Monographie du produit et vaccins administrés aux femmes enceintes

tête de mât

Volume 44-6, le 7 juin 2018 : Mise à jour sur les vaccins

Étude qualitative

Les fournisseurs de soins de santé font-ils confiance aux renseignements contenus dans les monographies de produit relativement à l'utilisation des vaccins chez les femmes enceintes? Une étude qualitative

KA Top1,2*, C Arkell3, JE Graham1,2, H Scott4, SA McNeil2,5, J Mannerfeldt6, NE MacDonald1,2

Affiliations

1 Département de pédiatrie, Université Dalhousie, Halifax (Nouvelle-Écosse)

2 Centre canadien de vaccinologie, Université Dalhousie, IWK Health Centre, Régie de la santé de la Nouvelle-Écosse, Halifax (Nouvelle-Écosse)

3 École de la santé publique et des populations, Université de la Colombie-Britannique, Vancouver (Colombie-Britannique)

4 Département d'obstétrique et de gynécologie, Université Dalhousie, Halifax (Nouvelle-Écosse)

5 Département de médecine, Université Dalhousie, Halifax (Nouvelle-Écosse)

6 Département d'obstétrique et de gynécologie et département de médecine familiale, Université de Calgary, Calgary (Alberta)

Correspondance

karina.top@dal.ca

Citation proposée

Top KA, Arkell C, Graham JE, Scott H, McNeil SA, Mannerfeldt J, MacDonald NE. Les fournisseurs de soins de santé font-ils confiance aux renseignements contenus dans les monographies de produit relativement à l'utilisation des vaccins chez les femmes enceintes? Une étude qualitative. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2018;44(6):150-4. https://doi.org/10.14745/ccdr.v44i06a03f

Mots-clés : monographies de produit, vaccins, grossesse, étude qualitative

Résumé

Contexte : La vaccination contre la grippe est recommandée pendant la grossesse pour prévenir les infections graves chez les femmes enceintes et les nouveau-nés, mais les vaccins restent peu utilisés dans ces cas. Des études semblent indiquer que les mises en garde sur l’innocuité et l’utilisation des vaccins chez les femmes enceintes stipulées dans les monographies de produits influent sur la perception des fournisseurs de soins de santé quant à l’innocuité des vaccins et sur les conseils qu’ils donnent aux femmes enceintes.

Objectif : Faire une analyse qualitative de la perception des fournisseurs de soins de santé quant à l’innocuité des vaccins antigrippaux inactivés et de leurs recommandations quant à l’utilisation de ces vaccins chez les femmes enceintes selon les énoncés des monographies de produits.

Méthodologie : Des fournisseurs de soins de santé ont été recrutés à deux conférences internationales sur la santé et à des programmes de formation en Éthiopie, au Ghana, en Ouganda et au Laos en septembre et en octobre 2015. Après avoir lu des extraits des monographies de trois vaccins antigrippaux inactivés homologués, les participants ont répondu à un sondage en ligne de dix questions comportant des éléments quantitatifs et qualitatifs qui reflétaient les perceptions en matière d’innocuité des vaccins.

Résultats : Dans leurs réponses, les fournisseurs de soins de santé ont témoigné un manque de confiance envers les fabricants et les renseignements contenus dans les monographies de produits. Ces renseignements leur semblaient ambigus et non conformes aux données probantes actuelles. Les fournisseurs de soins de santé étaient d’avis que les renseignements contenus dans les monographies de produits devaient refléter clairement les risques et les bienfaits des vaccins et être faciles à comprendre.

Conclusion : Cette étude laisse supposer que l’adoption de pratiques exemplaires en matière de formulation des énoncés des monographies aiderait à appuyer l’utilisation des vaccins fondée sur des données probantes chez les femmes enceintes.

Introduction

La grippe saisonnière est associée à une augmentation du risque d’hospitalisation pendant la grossesse et chez les nourrissons de moins de six moisNote de bas de page 1Note de bas de page 2. Le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) du Canada et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommandent la vaccination contre la grippe pendant la grossesse pour réduire le risque d’infection grave chez les femmes enceintes et les nourrissons de moins de six moisNote de bas de page 1Note de bas de page 3. L’innocuité des vaccins antigrippaux chez les femmes enceintes a été démontrée dans de nombreuses études et est résumée dans plusieurs examens systématiquesNote de bas de page 3Note de bas de page 4Note de bas de page 5Note de bas de page 6. D’après ces examens, dont un fait par le Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale de l’OMSNote de bas de page 3 les vaccins antigrippaux inactivés n’ont entraîné aucune augmentation du risque d’issues indésirables de la grossesse, telles qu’un avortement spontané, une mortinaissance ou des anomalies congénitales. Cependant, les vaccins restent peu utilisés chez les femmes enceintesNote de bas de page 7Note de bas de page 8. Les inquiétudes persistantes des fournisseurs de soins de santé et des patients pourraient les empêcher de recourir à la vaccination.

Le CCNI, le Groupe Technique Consultatif national pour la Vaccination (GTCV) du Canada, examine les données probantes tirées d’études cliniques et d’observation sur l’innocuité et l’efficacité des vaccins dont l’utilisation est homologuée au Canada ainsi que sur l’épidémiologie de la maladie, et établit des recommandations relatives à l’utilisation des vaccinsNote de bas de page 1. Les recommandations en matière de vaccination antigrippale mises à jour après l’examen annuel des données les plus récentes sont accessibles en ligne en version intégrale et en format de pocheNote de bas de page 1.

Les monographies sont une autre source de renseignements sur les vaccins destinés aux fournisseurs de soins de santé. Elles donnent de l’information sur les indications approuvées, les contre-indications, les mises en garde et les précautions. Accessibles en ligne, elles sont conçues pour « aider les professionnels de la santé à prendre des décisions relatives au traitement et à conseiller les patients sur les risques et les bienfaits d’un produit »Note de bas de page 9. Les énoncés des monographies sont rédigés par les fabricants de vaccins en tenant compte des commentaires et des autorisations de Santé Canada, l’autorité nationale de réglementation (ANR). Santé Canada examine les données d’innocuité et d’efficacité présentées par le fabricant, qui se limitent généralement aux données sur le produit en question tirées d’études cliniques à répartition aléatoire. Cependant, peu d’études cliniques sur les vaccins antigrippaux inactivés ont été menées auprès de femmes enceintesNote de bas de page 6. Par conséquent, les énoncés des monographies peuvent sembler mettre davantage en garde que les recommandations du CCNI (p. ex. « ne doit être utilisé [...] que sur avis médical en tenant compte des bénéfices et des risques pour la mère et le fœtus », FluLavalMD, GlaxoSmithKline, Sainte-Foy [Québec])Note de bas de page 10. L’énoncé ci-dessus reflète bien la circularité typique de ce genre de documents, incitant le lecteur (un professionnel de la santé) à suivre les conseils d’un professionnel de la santé. De plus, les énoncés des monographies de produits peuvent varier grandement d’un vaccin à l’autre, même entre deux vaccins ayant une composition et un profil d’innocuité semblablesNote de bas de page 11. Ces facteurs pourraient contribuer à semer la confusion chez les fournisseurs de soins de santé.

Nous avons mené un sondage comportant des éléments quantitatifs et qualitatifs pour déterminer l’incidence de la formulation des énoncés des monographies sur la perception des fournisseurs de soins de santé relative à l’innocuité des vaccins antigrippaux inactivés et leurs recommandations en matière d’utilisation chez les femmes enceintesNote de bas de page 12. Les 141 personnes qui ont répondu au sondage comprenaient des obstétriciens, des médecins de famille, des infirmiers et infirmières, des sages-femmes et d’autres professionnels de la santé de 49 pays à faible revenu, à revenu intermédiaire et à revenu élevé, y compris le Canada, qui représentaient les six régions de l’OMS.

Les résultats quantitatifs, publiés ailleurs, montrent que les fournisseurs de soins de santé de pays à faible revenu, à revenu intermédiaire et à revenu élevé percevaient l’innocuité des vaccins différemment, selon l’énoncé des trois monographies qu’ils lisaient. Moins de la moitié d’entre eux ont classé les vaccins dans la catégorie des produits sûrs d’emploiNote de bas de page 12. De nombreux répondants ont donné des commentaires supplémentaires sur la formulation des énoncés de monographies. Nous avons fait une analyse qualitative de ces commentaires pour faire ressortir les thèmes et les suggestions d’amélioration des énoncés de monographies.

Méthodologie

Méthodologie de l’étude et sujets

Les professionnels de la santé qui prodiguent des soins prénataux étaient admissibles à répondre à un sondage sur leur perception des énoncés de monographies de produits portant sur l’innocuité des vaccins antigrippaux et leur utilisation chez des femmes enceintes. De septembre à octobre 2015, des participants ont été recrutés à deux conférences sur la santé : la conférence de la Fédération Internationale de Gynécologie et d’Obstétrique, à Vancouver; et la Global Maternal Newborn Health Conference, à Mexico. Pour que les six régions de l’OMS soient représentées, des participants ont été recrutés dans des programmes de formation à l’intention de fournisseurs de la santé locaux en Éthiopie, au Ghana, en Ouganda et au LaosNote de bas de page 12. De plus, pour avoir un échantillon diversifié de répondants, un maximum de six participants pouvait être inscrit par pays. Afin de recueillir des données particulières au Canada, nous n’avons fixé aucune limite au nombre de participants canadiens.

Sondage

La conception du sondage à 10 questions a été décrite précédemmentNote de bas de page 12. En gros, les répondants devaient lire trois énoncés différents de monographies de vaccins similaires (vaccins antigrippaux inactivés) ayant un profil d’innocuité semblable qui étaient homologués aux États-Unis, au Canada et en France. Les trois vaccins avaient été approuvés par l’OMS en vue de l’approvisionnement par les organismes des Nations Unies. Le premier énoncé mettait l’accent sur l’incertitude : « l’innocuité et l’efficacité n’ont pas été établies chez les femmes enceintes [et le vaccin ne doit être utilisé] que s’il est réellement nécessaire » (FluvirinMD, Novartis Vaccines and Diagnostics, Ltd, Liverpool, Royaume-Uni; FluzoneMD, Sanofi Pasteur Inc, Swiftwater [Pennsylvanie], États-Unis). Le deuxième énoncé décrivait les conditions d’utilisation du vaccin : « n’utiliser que sur avis médical en tenant compte des bénéfices et des risques pour la mère et le fœtus » (FluLavalMD, GlaxoSmithKline, Sainte-Foy [Québec], Canada). Le troisième énoncé correspondait davantage aux recommandations en matière de santé publique : « administrer uniquement le vaccin à partir du deuxième trimestre de grossesse; [limiter l’utilisation tout au long de la grossesse chez les femmes] qui présentent un risque de complication de l’infection » (VaxigripMD, Sanofi Pasteur Ltd, Lyon, France).

Les répondants devaient ensuite expliquer leur perception de l’innocuité des vaccins décrits dans les énoncés et faire tout autre commentaire sur les renseignements des monographies de produit concernant l’utilisation des vaccins pendant la grossesse. La dernière question était une question ouverte, qui visait à obtenir d’autres commentaires sur les monographies de vaccins. Le sondage a été traduit professionnellement en français et en espagnol, puis de nouveau en anglais.

La version 6.9.1 d’un logiciel de sondage d’opinion (créé par ObjectPlanet, à Oslo, en Norvège) a été utilisée sur un serveur hébergé à Halifax (Nouvelle-Écosse), au Canada.

Analyse et synthèse

Quatre co-auteurs (C. A., K. A. T., N. E. M. et J. E. G.) ont analysé les réponses en texte libre sur le plan qualitatif en faisant une analyse inductive du contenu selon une méthodologie établie pour cerner les divers thèmesNote de bas de page 13. L’un des co-auteurs (C. A.) a ensuite raffiné les thèmes pour plusieurs itérations subséquentes. Les co-auteurs K. A. T., N. E. M. et J. E. G. ont revu et approuvé les thèmes finaux. Les données ont été codées manuellement.

Éthique

Les aspects éthiques de cette étude ont été approuvés par le comité d’éthique de la recherche de l’IWK Health Centre (approbation n° 1020057) et le Comité de révision d’éthique de la recherche de l’OMS.

Résultats

En tout, 61 répondants ont donné leurs commentaires sur les renseignements contenus dans les monographies de produits. Huit (14 %) de ces commentaires venaient de Canadiens, et 44 (72 %) venaient de répondants de pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire. Ils venaient de toutes les régions de l’OMS et représentaient une grande diversité de professions et de langues.

Le thème principal était le manque de confiance envers le contenu des monographies de produits et les fabricants de vaccins (tableau 1). Selon les répondants, les énoncés étaient « ambigus », non spécifiques et omettaient certains renseignements essentiels. Plusieurs répondants étaient d’avis que les monographies n’étaient pas « à jour » par rapport aux données probantes actuelles. Certains répondants ont déclaré que le contenu des monographies était restreint par les fabricants de vaccins, qui « veulent éviter les poursuites ». Les répondants se sont dits plus portés à faire confiance à des organisations comme l’OMS qu’aux monographies de produits en ce qui concerne les renseignements et les lignes directrices en matière de vaccins.

Tableau 1 : Principaux thèmes cernés dans la question ouverte : « Avez-vous des commentaires particuliers à ajouter sur les énoncés relatifs à l’innocuité stipulés dans les monographies de vaccins qui pourraient être utilisés chez des femmes enceintes? »
Thèmes Exemple

Manque de confiance envers le contenu des monographies

« Les énoncés sont ambigus et ne sont d’aucune aide » – Obstétricien, Canada

« Certaines monographies portent à confusion. J’hésite à utiliser ce vaccin chez les femmes enceintes, même si le programme d’immunisation le recommande. Pourquoi la monographie énonce-t-elle un risque, alors que c’est une recommandation du programme? Qui a raison? » – Sage-femme, Éthiopie

« Parfois, les monographies ne correspondent pas à la documentation actuelle et peuvent donc entraîner une fausse interprétation de l’efficacité et de l’innocuité » – Obstétricien, Canada

« Au lieu d’avoir un énoncé tout fait, tel que “l’innocuité n’est pas démontrée”, il faudrait préciser à quels trimestres ne pas administrer le vaccin, ainsi que les effets secondaires qu’il peut causer, pour qu’on puisse bien soupeser les risques et les bienfaits. » – Sage-femme, Botswana

« Les monographies devraient être approuvées par des expert[s] du domaine et faire l’objet d’une méta-analyse » – Obstétricien, Inde

« Devraient être faciles à lire » – Obstétricien, Indonésie

Manque de confiance envers les fabricants

« En général, les fabricants sont très réticents à donner des conseils [sic] chez les femmes enceintes, ce qui pourrait faire plus de mal que de bien. Je préfère donc, en général, suivre les lignes directrices des organismes de réglementation. » – Obstétricien, Pays-Bas

« Comme les monographies sont écrites par des sociétés pharmaceutiques qui veulent aussi éviter les poursuites, je consulte toujours d’autres sources. » – Obstétricien, Suède

Manque de données probantes appuyant l’innocuité des vaccins chez les femmes enceintes

« Les vaccins doivent être testés chez les femmes enceintes pour [que nous puissions] être sûrs [de leur] innocuité. » – Sage-femme, Éthiopie

« Il faudrait indiquer clairement que les données viennent d’études de recherche… » – Obstétricien, République démocratique du Congo

« Les vaccins ne devraient être utilisés pendant la grossesse que s’ils ne causent aucun tort à la mère ni au bébé. » – Obstétricien, Nigéria

Les répondants s’accordaient pour dire qu’il y avait un manque de données probantes appuyant l’innocuité des vaccins chez les femmes enceintes. Ils étaient en faveur d’une faible tolérance des risques et de la certitude de l’innocuité lors de l’utilisation chez les femmes enceintes. Certains répondants ont déclaré qu’ils ne seraient à l’aise d’administrer un vaccin que si son innocuité pouvait être garantie. Ils préconisaient des études plus poussées sur l’innocuité des vaccins chez les femmes enceintes tout en reconnaissant les difficultés de telles recherches.

Pour améliorer les monographies, certains répondants souhaitaient que des renseignements plus précis soient indiqués concernant l’efficacité des vaccins et les risques associés à leur utilisation chez les femmes enceintes. D’autres étaient d’avis que les monographies devraient être « faciles à lire » et écrites dans un « langage courant ».

Discussion

Les résultats semblent indiquer que les fournisseurs de soins de santé ne font pas confiance aux monographies ni aux fabricants. Ceci est inquiétant, car les résultats de notre analyse quantitative montrent que la majorité des fournisseurs de soins de santé lisent des monographies au moins à l’occasion ou dans le cas de nouveaux produitsNote de bas de page 12.

Les résultats de l’analyse qualitative viennent compléter ceux de l’analyse quantitative, qui montrent que la perception des fournisseurs de soins de santé quant à l’innocuité des vaccins change selon la formulation des énoncés des monographies, et que cette formulation influe sur leurs recommandations en matière de vaccination. Par exemple, après avoir lu l’énoncé stipulant que « l’innocuité et l’efficacité n’ont pas été établies chez les femmes enceintes [et le vaccin ne doit être utilisé] que s’il est réellement nécessaire », 38 % des répondants percevaient le vaccin décrit dans l’énoncé comme étant moyennement ou très peu sûr d’emploi, et 18 % des répondants ont indiqué qu’ils ne recommanderaient pas le vaccin s’il était recommandé par les organismes de santé publique nationaux. Par contre, après avoir lu l’énoncé stipulant d’« administrer uniquement le vaccin à partir du deuxième trimestre de grossesse », 28 % des répondants percevaient le vaccin comme non sûr d’emploi, et 12 % ne le recommanderaient pas. Environ 75 % des répondants ont indiqué que la façon dont l’énoncé était formulé avait une incidence sur leurs recommandations en matière de vaccination pendant la grossesseNote de bas de page 12.

Selon notre hypothèse, le fait que les fournisseurs de soins de santé ont l’impression que les fabricants restreignent le contenu des monographies et que les monographies contredisent les recommandations du CCNI contribue à leur méfiance envers les renseignements indiqués dans les monographies.

Les répondants ont exprimé le souhait d’avoir des monographies plus informatives, rédigées de façon claire, qui donnent des lignes directrices sur l’utilisation des vaccins. Les fournisseurs de soins de santé semblent donc souhaiter que les monographies comprennent des renseignements plus détaillés sur l’innocuité et l’efficacité des vaccins chez les femmes enceintes. Les commentaires des répondants selon lesquels les monographies devraient être faciles à comprendre pour tout un chacun montrent bien la difficulté de réviser ces ouvrages.

Les organismes de réglementation et de santé publique, ainsi que le Groupe stratégique consultatif d’experts sur la vaccination de l’OMS, commencent à reconnaître que les différences entre les monographies et les recommandations des GTCV (p. ex. le CCNI) ont une incidence sur l’utilisation des vaccins. Ils ont donc fait appel aux ANR et aux GTCV pour abolir ces différencesNote de bas de page 14Note de bas de page 15. L’OMS et plusieurs ANR ont mis au point des lignes directrices pour interpréter les sous-sections des monographies portant sur l’utilisation des vaccins chez les femmes enceintes et ont commencé à revoir la formulation des monographiesNote de bas de page 14Note de bas de page 16. Ces démarches, cependant, ont été faites sans la collaboration des utilisateurs finaux (p. ex. les fournisseurs de soins de santé de première ligne).

Avec l’appui de l’Agence de la santé publique du Canada et la collaboration de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, nous avons adopté une démarche interdisciplinaire visant à modifier la formulation des monographies pour montrer plus clairement aux fournisseurs de soins de santé la qualité et la spécificité des données probantes appuyant l’innocuité et l’efficacité des vaccins chez les femmes enceintes, et ainsi favoriser l’utilisation des vaccins fondée sur des données probantes. Cette étude a suscité la collaboration directe de fournisseurs de soins de santé, d’experts en santé publique, d’épidémiologistes, de juristes, de spécialistes en sciences sociales, de régulateurs de Santé Canada et d’autres intervenants clés. Nous pensons que le travail accompli contribuera à normaliser la formulation des énoncés des monographies de vaccins ayant un profil d’innocuité et des degrés de données probantes semblables, au Canada et partout ailleurs. Ce sera une première étape importante pour améliorer les monographies et susciter plus de confiance de la part des fournisseurs de soins de santé canadiens envers les recommandations en matière de vaccination chez les femmes enceintes.

De plus, les résultats suggèrent qu’il y a un besoin pour Santé Canada de collaborer avec les fabricants et des évaluateurs indépendants pour mettre à jour le contenu des monographies, de façon à ce qu’il corresponde aux dernières données probantes. Pour ce faire, ils pourraient ajouter un hyperlien vers les recommandations du CCNI dans les monographies pour que les lecteurs aient accès aux lignes directrices les plus à jour en matière d’utilisation des vaccins. Nous encourageons aussi Santé Canada et le CCNI à participer à des initiatives internationales visant à abolir les différences entre les monographies et les recommandations en matière de santé publique. Santé Canada pourrait envisager, en collaboration avec les ANR, d’imposer des mises à jour à intervalles réguliers aux fabricants. Enfin, des études plus poussées sur l’innocuité et l’efficacité des vaccins chez les femmes enceintes et une surveillance active accrue des effets indésirables chez les femmes enceintes et les nourrissons doivent être réalisées pour veiller à ce que les monographies et les recommandations du CCNI soient appuyées par des données probantes de grande qualité tout au long du cycle de vie des vaccins.

Cette étude a ses limites. Le recours à un échantillonnage de proximité a peut-être créé des biais de sélection et de réponse. Les participants recrutés aux deux conférences n’étaient pas forcément représentatifs des travailleurs de la santé de première ligne, au Canada ou ailleurs. La plupart des commentaires ont été formulés par des répondants de pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire, qui ont parfois un point de vue différent des fournisseurs de soins de santé canadiens. Cependant, les réponses aux questions à choix multiples étaient semblables, quels que soient le revenu du pays et la région de l’OMSNote de bas de page 12.

Conclusions

La formulation ambiguë et des énoncés des monographies qui ne sont pas à jour pourraient, au lieu de favoriser l’utilisation des vaccins fondée sur des données probantes, nuire à l’adoption de la vaccination chez les femmes enceintes au Canada. Santé Canada, le CCNI et les fabricants de vaccins doivent envisager d’adopter des pratiques exemplaires pour formuler le contenu des monographies de façon à présenter clairement les risques et les bienfaits de la vaccination pendant la grossesse, pour que les fournisseurs de soins de santé puissent bien le comprendre.

Déclaration des auteurs

K. A. T.  – Conceptualisation, recherche, analyse, rédaction – première ébauche

C. A. – Recherche, analyse, rédaction – révision et édition

J. G. – Analyse et interprétation, rédaction – révision et édition

H. S., J. M. et S. A. M. – Recherche, rédaction – révision et édition

N. E. M. – Conceptualisation, recherche, analyse, rédaction – révision et édition

Conflit d’intérêt

K. A. T. a reçu un soutien à la recherche et des frais de consultation de Pfizer ainsi que des subventions à la recherche de GlaxoSmithKline en dehors du travail soumis. S. A. M. a reçu des subventions à la recherche de GlaxoSmithKline et de Pfizer en dehors du travail soumis. Aucun autre auteur ne signale de conflit d’intérêts.

Collaborateurs

Les auteurs tiennent à remercier Poh Chua de son aide technique experte et les Drs Justin Ortiz et Philipp Lambach de l’examen critique du protocole de l’étude et du questionnaire.

Financement

Cette étude a été financée par une subvention de l’Initiative de l’Organisation mondiale de Santé pour la recherche sur les vaccins.

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