Le ver solitaire Echinococcus chez les coyotes et les chiens domestiques à Winnipeg

RMTC

Volume 45-7/8, le 4 juillet 2019 : Maladies zoonotiques

Surveillance

Surveillance du ver solitaire Echinococcus chez les coyotes et les chiens domestiques à Winnipeg, au Manitoba

CCK Tse1, J Bullard1,2,3, R Rusk1,4,5, D Douma6, PJ Plourde1,2,5,7

Affiliations

1 Collège de médecine Max Rady, Faculté des sciences de la santé Rady, Université du Manitoba, Winnipeg, Manitoba

2 Département de microbiologie médicale et des maladies infectieuses, Faculté des sciences de la santé Rady, Université du Manitoba, Winnipeg, Manitoba

3 Laboratoire provincial Cadham, Winnipeg, Manitoba

4 Direction de la santé publique, Santé Manitoba, Aînés et Vie active, Winnipeg, Manitoba

5 Département des sciences de la santé communautaire, Faculté des sciences de la santé Rady, Université du Manitoba, Winnipeg, Manitoba

6 Direction de la santé et du bien-être des animaux, Agriculture Manitoba, Winnipeg, Manitoba

7 Programme de santé de la population et de santé publique, Office régional de la santé de Winnipeg, Winnipeg, Manitoba

Correspondance

pplourde@wrha.mb.ca

Citation proposée

Tse CCK, Bullard J, Rusk R, Douma D Plourde PJ. Surveillance du ver solitaire Echinococcus chez les coyotes et les chiens domestiques à Winnipeg, au Manitoba. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2019;45(7/8):189–95. https://doi.org/10.14745/ccdr.v45i78a01f

Mots-clés : Échinococcose alvéolaire, hydatidose, zoonoses, coyotes, renards, vers solitaires Echinococcus, chiens domestiques.

Résumé

Contexte : L’espèce Echinococcus, qui comprend E. multilocularis et E. canadensis, se compose de vers solitaires qui infectent surtout les canidés tels que les chiens, les renards et les coyotes, mais les humains sont également à risque. Chez l’humain, le ver solitaire E. multilocularis peut provoquer l’échinococcose alvéolaire, soit un trouble grave qui imite la malignité métastatique et présente un pronostic sombre. On sait que les coyotes en région rurale du Manitoba sont infectés par des espèces de ver solitaire Echinococcus, mais on ignore si les coyotes des zones périurbaines le sont également.

Objectifs : Consigner et cartographier les espèces de ver solitaire Echinococcus chez les canidés sauvages et chiens domestiques à Winnipeg, au Manitoba (Canada).

Méthodologie : On a prélevé 169 échantillons de matières fécales entre le 18 avril et le 1er juin 2018. Ils se composaient de 44 échantillons de matières fécales de chien domestique, 122 d’excréments de coyote et un d’excréments de renard, ainsi que de deux spécimens de tissu colique de coyote. On a congelé les échantillons (-80 °C) pendant au moins 72 heures dans le but de désactiver les ovules du ver solitaire. On a réalisé des analyses de la réaction en chaîne de la polymérase des vers solitaires E. multilocularis et E. canadensis avec les échantillons congelés.

Résultats : On a détecté des échantillons positifs pour le ver solitaire Echinococcus multilocularis dans neuf (10,6 %) des 85 emplacements, avec un échantillon positif dans un parc canin de la banlieue de Winnipeg et deux échantillons positifs dans un parc provincial populaire. Aucun échantillon de chien n’était positif pour le ver solitaire E. multilocularis; un échantillon était positif pour le ver solitaire E. canadensis. En revanche, neuf échantillons de coyote (7,3 %) étaient positifs pour le ver solitaire E. multilocularis et huit échantillons (6,5 %) étaient positifs pour le ver solitaire E. canadensis. Le seul échantillon de renard était positif pour les deux. Dans l’ensemble, six échantillons (3,6 %) étaient positifs pour les deux infections.

Conclusion : Il s’agit de la première confirmation de la présence du ver solitaire E. multilocularis dans des excréments de coyote au sein de la région métropolitaine de Winnipeg, au Manitoba. Étant donné le risque découlant de cette situation envers les chiens domestiques et la santé humaine, une surveillance périodique qui cartographie la distribution de ce ver solitaire pourrait venir appuyer le besoin de mesures de santé publique supplémentaires.

Introduction

Les espèces d’Echinococcus sont des vers solitaires qui infectent surtout des espèces de canidés. Les deux espèces prédominantes trouvées au Canada sont E. multilocularis et E. canadensis. Le cycle de vie sylvatique des vers solitaires Echinococcus comprend les coyotes et autres canidés en tant qu’hôtes définitifs, ainsi que les rongeurs en tant qu’hôtes intermédiaires. Cependant, l’humain peut être un cul-de-sac épidémiologique (figure 1). Le ver solitaire E. multilocularis peut provoquer une maladie grave chez l’humain, soit l’échinococcose alvéolaireNote de bas de page 1Note de bas de page 2. Cette infection, qui se comporte comme une malignité métastatique, présente un taux de létalité élevé et nécessite un traitement chirurgical radical et un traitement anthelminthique à long termeNote de bas de page 3. Bien qu’il s’agisse d’une infection plus bénigne chez l’humain, le ver solitaire E. canadensis est maintenu par un cycle de vie sylvatique qui comprend le loup, le coyote et le chien en tant qu’hôtes définitifs et le caribou, l’orignal et le wapiti en tant qu’hôtes intermédiaires. Chez l’humain, en tant que cul-de-sac épidémiologique, l’évolution clinique prédominante est l’hydatidose kystique principalement dans le foie, ce qui peut nécessiter une intervention chirurgicale présentant un risque d’anaphylaxie grave en cas de rupture du kysteNote de bas de page 2. On trouve souvent ces deux espèces ensemble, puisqu’elles partagent des canidés en tant qu’hôtes définitifs. Les vers solitaires Echinococcus sont asymptomatiques et ne déclenchent pas de maladie chez les canidés, en plus d’être difficiles à détecter puisqu’ils ne mesurent que de 1 mm à 7 mm.

Figure 1: Cycle de vie du ver solitaire Echinococcus multilocularis

Figure 1: Cycle de vie du ver solitaire Echinococcus multilocularis

Description textuelle : Figure 1

Figure 1: Cycle de vie du ver solitaire Echinococcus multilocularis

La figure montre le cycle de vie du ver solitaire Echinococcus multilocularis. Le parasite adulte vit dans les canidés (renard roux, renard arctique et chiens montrés) ; l’adulte produit alors un proglottis avec des œufs, qui libère un œuf par les selles du canidé, contaminant l’environnement ; les œufs sont ensuite ingérés par un hôte intermédiaire (rongeurs) ou hôte cul-de-sac comme l’humain. Les rongeurs développent des metacestodes à l’intérieur de leur foie. Ces kystes ont des protoscoles, passant à l’hôte définitif par la chaîne alimentaire, donnant lieu à des vers solitaires adultes dans le tractus gastro-intestinal des canidés. (Reproduit ave la permission de Torgerson PR, Keller K, Magnotta M, Ragland N. The Global Burden of Alveolar Echinococcosis. PLoS Negl Trop Dis 2010;4(6):e722.


L’Organisation mondiale de la Santé et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture ont classé l’échinococcose alvéolaire comme le troisième maladie parasitique transmise par les aliments en importance au mondeNote de bas de page 4. Vu qu’il n’existe pas de moyen rentable d’éliminer le ver solitaire E. multilocularis au cours du cycle de vie sylvatique, la surveillance est importante pour évaluer le risque chez l’humain.

Comment l’humain devient infecté

Les ovules du ver solitaire Echinococcus multilocularis sont très résistants et peuvent survivre et rester actifs pendant près d’un an dans des conditions favorablesNote de bas de page 5. Puisque les ovaires sont collants, ils se fixent à la fourrure des chiens, à la végétation sauvage et aux produits maraîchers cultivés dans un sol contaminé par des excrémentsNote de bas de page 2Note de bas de page 6Note de bas de page 7. En général, il y a transmission chez l’humain lorsque la main touche l’eau, le sol, la fourrure ou les objets contaminés par les excréments des hôtes, avec ensuite le transfert par inadvertance des ovules de la main à la bouche. Après l’ingestion humaine d’ovules du ver solitaire E. multilocularis, il y a une longue période de latence clinique, soit cinq à quinze ans. Les premiers symptômes comprennent de la douleur abdominale, qui est suivie de jaunisse et, au bout du compte, de dysfonctionnement hépatique graveNote de bas de page 2Note de bas de page 8. On méprend souvent l’échinococcose alvéolaire pour une croissance néoplasique, et ce, en raison de sa tendance à l’infiltration organique répandue avec métastasesNote de bas de page 2. Le ver solitaire E. multilocularis peut également imiter d’autres maladies telles que le carcinome hépatique, la cirrhose et la tuberculose, ce qui peut mener à des épreuves diagnostiques inadéquates et un retard de traitementNote de bas de page 3Note de bas de page 9Note de bas de page 10. On confirme le diagnostic par une combinaison de résultats cliniques, de données épidémiologiques, d’imagerie, d’histopathologie ou de détection d’acide nucléique et de sérologieNote de bas de page 8. Le traitement recommandé est la résection chirurgicale radicale de la lésion parasitaire qui, lors des premiers stades, peut mener à une guérison complète; cependant, la résection chirurgicale peut parfois être incomplète pour cause de propagation diffuse ou non détectée du parasiteNote de bas de page 2Note de bas de page 8. À ce titre, on recommande une chimiothérapie anthelminthique postopératoire pendant au moins deux ans, suivie d’au moins dix ans de surveillance étroiteNote de bas de page 8. Sans traitement, la mortalité est de 90 % dans les dix années qui suivent l’apparition des symptômesNote de bas de page 11. On a démontré qu’un diagnostic précoce et un traitement approprié améliorent les chances de survieNote de bas de page 12.

Le ver solitaire Echinococcus multilocularis au Canada

On note des vers solitaires Echinococcus chez les canidés du Canada depuis nombre d’années. Une étude sur la prévalence du ver solitaire E. multilocularis chez les espèces de canidés du Manitoba, réalisée il y a 40 ans au parc national du Mont-Riding, a permis de constater que presque le quart des coyotes échantillonnés étaient infectésNote de bas de page 13. Plus récemment, en 2009, on a découvert une souche européenne du ver solitaire E. multilocularis au centre de la Colombie-Britannique chez un chien domestique sans antécédent de déplacement à l’extérieur du Canada; d’autres études laissent entendre l’établissement possible de cette nouvelle souche dans la faune localeNote de bas de page 14Note de bas de page 15. Il pourrait y avoir des preuves d’une souche semblable au sein de la faune de la SaskatchewanNote de bas de page 16. Des enquêtes à Calgary et Edmonton publiées en 2012 ont permis de déterminer la présence du ver solitaire E. multilocularis au sein de la population sauvage de canidés de ces villesNote de bas de page 1. De plus, en Ontario, des détections récentes d’échinococcose alvéolaire chez plusieurs chiens domestiques sans antécédent de déplacement à l’extérieur de l’Ontario laissent entendre que le ver solitaire E. multilocularis pourrait aussi avoir établi un foyer dans le sud-ouest de l’OntarioNote de bas de page 17Note de bas de page 18.

Les vers solitaires Echinococcus et les cas d’échinococcose alvéolaire humaine ont d’abord été signalés dans les années 1930 au Manitoba et en AlbertaNote de bas de page 19. Plus récemment, en novembre 2017, on a diagnostiqué une infection disséminée d’échinococcose alvéolaire chez un patient pédiatrique du Manitoba (communication personnelle, 23 novembre 2017, Dr Sergio Fanella). Dans le même ordre d’idées, en 2018, on a détecté plusieurs cas humains d’échinococcose alvéolaire en Alberta (communication personnelle, 5 juin 2018, Dr Stan Houston).

Vu la hausse de l’urbanisation et des observations de coyotes dans les zones urbaines et suburbaines, le ver solitaire E. multilocularis peut se rapprocher des chiens domestiques et humainsNote de bas de page 20Note de bas de page 21. Étant donné ces cas humains récents et les observations de coyotes à Winnipeg et aux alentours de la villeNote de bas de page 20, on a procédé à une enquête sur les canidés sauvages pour étudier la présence d’espèces de vers solitaires Echinococcus.

Cette étude a pour but de déterminer l’étendue des ovaires d’espèces d’Echinococcus, en particulier le ver solitaire E. multilocularis, dans les excréments de coyote, renard et chien domestique trouvés dans la région métropolitaine qui entoure Winnipeg, ainsi que de créer des cartes géographiques visant à déterminer les zones à risque.

Méthodologie

Lieux de prélèvement

On a défini la région métropolitaine de Winnipeg (RMW) en tant que région métropolitaine de recensement 602 conformément au profil du recensement de 2016 de Statistique CanadaNote de bas de page 22. Elle se compose du milieu urbain, délimité par l’autoroute périphérique circonférentielle qui entoure Winnipeg et la zone périurbaine à l’extérieur de l’autoroute périphérique et au sein de la RMW. On a identifié 85 lieux de prélèvement couvrant une grande zone de la RMW, y compris des zones fréquentées par des humains et chiens domestiques, ainsi que des zones avec des observations connues de coyotes.

Prélèvement des échantillons

On a prélevé des échantillons fécaux entre le 18 avril et le 1er juin 2018. On a prélevé les échantillons de chiens domestiques d’une manière qui diffère de celle pour les autres échantillons de canidés. On a prélevé les échantillons de chiens dans des parcs canins et on en a reçu directement de propriétaires de chiens. On a offert deux points de remise aux bénévoles qui remettaient des échantillons de matière fécale provenant de chiens domestiques.

On a surtout prélevé des échantillons de canidés sauvages (principalement des coyotes) en conduisant le long de routes éloignées près de l’habitat des coyotes conformément aux observations locales connues de coyotes. On a identifié les échantillons de coyote à l’aide de caractéristiques de l’échantillon d’excréments, dont la forme, la texture, la présence de poils ou d’os appartenant à de petits animaux, ainsi que de caractéristiques à l’appui telles que des traces de coyotes, des tanières de coyotes à proximité et des observations antérieuresNote de bas de page 20. Dans le même ordre d’idées, l’agent de conservation local a différencié l’échantillon d’excréments de renard par sa petite taille et le fait qu’il y a eu des observations de renards aux alentours.

On a mis les échantillons fécaux dans des sacs de plastique individuels, scellés et étiquetés avec la date du prélèvement et l’endroit du prélèvement [coordonnées du système mondial de localisation (GPS), code postal ou adresse]. Pour les échantillons de chien domestique, on a également inscrit le nom et le numéro de téléphone du propriétaire du chien. Des agents locaux de conservation de la faune qui ont retiré le côlon de deux animaux uniques ont remis deux échantillons de côlon prélevés sur des carcasses de coyotes. On a entreposé les échantillons à -80 °C pendant au moins 72 heures dans le but de désactiver les ovules du ver solitaire E. multilocularis. Les échantillons coliques ont été grattés sur la surface muqueuse pour en retirer les matières fécales.

Épreuves de laboratoire

On a entreposé et transporté les matières fécales dans des contenants fécaux stériles conservés sur de la glace et envoyés par livraison le jour même au laboratoire de référence (IDEXX Laboratories, Inc.) à Markham, en Ontario. On a traité les échantillons fécaux immédiatement à leur arrivée, en plus de réaliser une extraction de l’acide nucléique total au moyen d’un processeur de particules magnétiques KingFisherMC Flex (Thermo Fisher Scientific, Vantaa, Finlande) avec tampon de lyse exclusif et particules magnétiques en verre [Roche Diagnostics, Indianapolis, États-Unis (É.-U.)]. On a réalisé des épreuves de réaction en chaîne de la polymérase (PCR) en temps réel à l’aide de l’acide nucléique total purifié des échantillons de selles sur un instrument LightCycler 480MC de Roche conformément aux réactifs de la PCR et aux protocoles d’établissement de cycle recommandés par le fabricantNote de bas de page 23. On a calculé les points de croisement au moyen de l’analyse du groupement à liens complets par dérivée seconde avec l’algorithme de haute sensibilité. Les essais de PCR en temps réel comprenaient des amorces de PCR et on a adapté une sonde d’hydrolyse classique trempée 6-FAM-TAMRA d’Isaksson et coll.Note de bas de page 24.

Le gène cible pour les essais de PCR en temps réel était le gène mitochondrial rrnL. On a exécuté six contrôles de la qualité, y compris des contrôles positifs et négatifs de la PCR, des contrôles d’extraction négatifs, un contrôle de contamination environnementale, un contrôle positif interne enrichi et un contrôle d’échantillon interne de seize petites sous-unités ribosomiques de l’ARN panbactérien dans le but de surveiller l’efficacité de l’extraction, les inhibiteurs de matrice des échantillons, ainsi que la contamination croisée lors des exécutions diagnostiques. Cette épreuve de PCR propre à l’espèce Echinococcus est en cours de validation et de révision par les pairs. On l’a utilisée dans la présente étude, et ce, puisqu’elle a confirmé avec succès un cas clinique de ver solitaire E. multilocularis avec un chien de l’Ontario (communication personnelle, 11 janvier 2019, Dre Roxanne Chan, IDEXX Laboratories, Inc.).

Analyse

On a stocké les données dans le logiciel Access de Microsoft, pour ensuite les analyser au moyen de la version 7.2.0.1 du logiciel Epi-Info des Centers for Disease Control (Atlanta, Géorgie, É.-U.) aux fins de statistique descriptive. On a procédé au géocodage et à la cartographie au moyen du logiciel ArcMap de l’Environmental Systems Research Institute.

Résultats

On a prélevé un total de 169 échantillons, qui comprenaient 122 échantillons d’excréments de coyote, deux échantillons de tissu colique de coyote, 44 échantillons fécaux de chien domestique, parmi lesquels 34 échantillons provenaient d’animaux uniques prélevés directement des propriétaires des chiens (on a prélevé les 10 autres échantillons dans des parcs canins et ils ne proviennent pas nécessairement d’animaux uniques) et un échantillon d’excrément de renard.

On a détecté des échantillons positifs pour le ver solitaire Echinococcus multilocularis dans 9 (10,6 %) des 85 emplacements, avec un échantillon positif dans un parc canin de la banlieue de Winnipeg et deux échantillons positifs au parc provincial Birds Hill. Les autres échantillons semblent mieux répandus parmi les milieux plus ruraux de la RMW. La figure 2 indique les lieux de prélèvement des échantillons, ainsi que l’emplacement des échantillons positifs de ver solitaire E. multilocularis.

Figure 2 : Carte de la distribution du prélèvement des échantillons de canidés dans la région métropolitaine de Winnipeg, qui indique les échantillons positifs pour le ver solitaire Echinococcus multilocularis

Figure 2 : Carte de la distribution du prélèvement des échantillons de canidés dans la région métropolitaine de Winnipeg, qui indique les échantillons positifs pour le ver solitaire Echinococcus multilocularis

Description textuelle : Figure 2

Figure 2 : Carte de la distribution du prélèvement des échantillons de canidés dans la région métropolitaine de Winnipeg, qui indique les échantillons positifs pour le ver solitaire Echinococcus multilocularis

La figure est une carte de Winnipeg et des municipalités Rurales environnantes au sud du Manitoba. Un point rouge indique un échantillon fécal ou de tissus de coyote positif à l’E. multilocularis, un point jaune indique un échantillon fécal de renard positif à l’E. multilocularis et un point noir indique un échantillon provenant de canidé négatif à l’E. multilocularis. Le contour bleu démontre la région métropolitaine de recensement de Winnipeg ; utilisé avec la permission de Statistiques CanadaNote de bas de page 22


Parmi les échantillons envoyés aux fins de traitement moléculaire, dix (5,9 %) étaient positifs pour le ver solitaire E. canadensis et dix (5,9 %) étaient positifs pour le ver solitaire E. multilocularis, avec six (3,6 %) coinfections chez cinq coyotes et un renard. On a trouvé le ver solitaire E. multilocularis dans 7,3 % des échantillons de coyote, dans 0 % des échantillons de canidé domestique et dans l’échantillon unique de renard. On a trouvé le ver solitaire E. canadensis dans 6,5 % des échantillons de coyote, dans 2,3 % des échantillons de chien domestique et dans l’échantillon unique de renard (tableau 1).

Tableau 1 : Nombre et pourcentage d’échantillons de canidé infectés par les vers solitaires Echinococcus dans les zones urbaines et périurbaines de Winnipeg, 2018
La source d’echantillons de selles Echinococcus multilocularis Echinococcus canadensis
Nombre d’échantillons Nombre de selles positives % d’échantillons positifs Nombre d’échantillons Nombre de selles positives % d’échantillons positifs
Chien domestiqueNote a de Tableau 1 44 0 0 44 1 2,3
CoyoteNote b de Tableau 1 124 9 7,3 124 8 6,5
Renard 1 1 100 1 1 100
Total 169 10 5,9 169 10 5,9

Discussion

Il s’agit de la première confirmation de la présence du ver solitaire E. multilocularis à la fois dans les zones urbaines et périurbaines de Winnipeg, au Manitoba. La distribution du ver solitaire E. multilocularis chez le coyote semble répandue, sans point névralgique. Bien qu’on ait identifié le ver solitaire E. multilocularis dans un parc provincial récréatif populaire et un parc canin, aucun échantillon de chien domestique n’était positif pour ce ver solitaire. On a trouvé un seul cas du ver solitaire E. canadensis beaucoup plus bénin dans un échantillon de chien domestique.

Les limites de la présente étude comprennent la courte durée de la surveillance, l’échantillonnage répété possible provenant des mêmes canidés et l’usage d’un essai moléculaire qui est encore en cours de révision par les pairsNote de bas de page 23. On n’a pas prélevé de caractéristique des chiens domestiques, telle qu’à savoir s’il s’agissait de chiens d’extérieur ou s’ils consommaient des rongeurs. On a ciblé la méthode d’échantillonnage d’excréments de canidé sauvage et, par conséquent, elle ne reflète pas un prélèvement uniformisé à l’échelle de la région. Il faudrait une taille d’échantillon plus grande et un délai de surveillance plus long de façon à mieux cartographier l’étendue de l’infection de canidés par le ver solitaire E. multilocularis dans la région métropolitaine de Winnipeg.

Conséquences et prochaines étapes

Nos constatations indiquent un risque d’exposition des humains et chiens domestiques aux excréments de coyote infectés par le ver solitaire E. multilocularis dans les zones urbaines et périurbaines de Winnipeg.

On ne sait pas exactement la manière à laquelle l’exposition humaine au parasite entraîne une infection provoquant une échinococcose alvéolaire. En 2001, on a publié une étude quinquennale en Suisse qui indique un taux de séropositivité humaine élevé pour le ver solitaire E. multilocularis, et ce, sans hausse du taux d’attaque. Une explication était une immunité accrue potentielle au sein de cette populationNote de bas de page 25. Cependant, un examen de 2007 a permis de découvrir une hausse importante de l’incidence d’échinococcose alvéolaire en Suisse après 2000, qui était précédée par une augmentation de cette infection dans la population locale de renards 10 à 15 ans plus tôtNote de bas de page 26. On était d’avis que cette situation reflétait la longue période de latence clinique de l’échinococcose alvéolaire. Une étude plus longue est en cours afin de déterminer si la prévalence élevée du ver solitaire E. multilocularis dans l’environnement est associée à une incidence accrue d’échinococcose alvéolaire chez l’humainNote de bas de page 25.

En fonction des preuves de ver solitaire E. multilocularis dans l’environnement dans plusieurs provinces et des cas humains récents en Alberta et au Manitoba, d’autres études sont indiquées. Dans le but de mieux caractériser la prévalence et la distribution géographique, on recommande de faire une recherche avec un plus grand nombre de lieux et d’échantillons, une analyse spatiale et des capacités de diagnostic moléculaire au sein de la province. Si la situation le justifie, on pourrait considérer une étude de séropositivité humaine du ver solitaire E. multilocularis dans les régions touchées.

Cet enjeu émergent peut tout spécialement relever d’une approche « Un monde, une santé »Note de bas de page 27 qui comprend des médecins, vétérinaires et experts de la faune. L’Ontario oblige la déclaration de l’infection par le ver solitaire E. multilocularis chez le chien domestique et l’humain dans l’optique de surveiller l’étendue de l’infectionNote de bas de page 28Note de bas de page 29. Bien que ce ne soit pas obligatoire ailleurs à l’heure actuelle, il serait utile de faire un compte rendu de l’enquête sur les cas humains d’échinococcose alvéolaire, y compris les antécédents de déplacement (pour confirmer la maladie acquise sur le plan local par rapport à celle importée de pays étrangers) et de fournir de l’information sur la voie d’exposition potentielle aux ovules du ver solitaire E. multilocularis. La sensibilisation du public à propos des mesures préventives visant à prévenir les infections chez le chien domestique et l’humain pourrait être indiquée.

Conclusion

On documente le ver solitaire Echinococcus multilocularis au Canada depuis plusieurs décennies au sein de la population de canidés sauvages, mais les cas humains se sont avérés extrêmement rares. Au cours des 20 dernières années, on a observé que les canidés sauvages ont tendance à migrer plus près des populations urbaines, ainsi que plusieurs cas humains récents d’échinococcose alvéolaire causés par le ver solitaire E. multilocularis. Bien que notre étude n’ait pas constaté de contamination croisée entre les coyotes et les chiens à Winnipeg, le risque d’exposition au ver solitaire E. multilocularis dans des milieux urbains et périurbains laisse entendre qu’une sensibilisation accrue et d’autres études pourraient aider les cliniciens de première ligne et les responsables de la santé publique à être à l’affût du risque et le surveiller.

Déclaration des auteurs

  • C. C. K. T. — Conception du projet, recherches documentaires, méthodologie, échantillonnage sur le terrain, essais en laboratoire, analyse des données, rédaction (première ébauche, révision et mise en forme)
  • J. B. — Conception du projet, méthodologie, essais en laboratoire « en nature », assistance logicielle, analyse des données, rédaction (révision et mise en forme)
  • R. R. — Conception du projet, méthodologie, assistance logicielle, analyse des données spatiales, rédaction (révision et mise en forme)
  • D. D. — Conception du projet, méthodologie, essais en laboratoire « en nature », analyse des données, rédaction (révision et mise en forme)
  • P. J. P. — Conception du projet, recherches documentaires, méthodologie, soutien de l’échantillonnage sur le terrain, analyse des données, rédaction (révision et mise en forme)

Conflit d’intérêts

Aucun.

Remerciements

Les auteurs souhaitent remercier le Laboratoire provincial Cadham et le département de parasitologie pour le soutien de laboratoire, de même que D. Berezanski et la Direction de la faune et de la pêche (ministère du Développement durable du Manitoba) pour l’aide apportée avec le prélèvement des échantillons et la sensibilisation des bénévoles vis-à-vis des coyotes. Un grand merci à C. Swiderek, au Kilcona Dog Park Club et aux bénévoles pour leur aide lors du prélèvement des échantillons. Nous souhaitons remercier T. Madill et G. Houghton pour leur aide lors du prélèvement et du traitement des échantillons, ainsi qu’IDEXX Laboratories Inc. pour l’analyse moléculaire des échantillons.

Les résultats et conclusions sont ceux des auteurs il ne faut pas conclure à l’aval officiel de Santé Manitoba, d’Aînés et Vie active ou d’Agriculture Manitoba.

Financement

La présente étude a reçu de l’appui pour C. C. K. Tse, un étudiant d’été qui a réalisé un projet de recherche de deuxième année de médecine d’avril à août 2018.

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