Surveillance de l’innocuité du vaccin Imvamune lors de l’éclosion de mpox de 2022 au Canada

RMTC

Volume 51-8, août 2025 : Thérapie antivirale

Communication rapide

Surveillance de la sécurité du vaccin Imvamune lors de l'éclosion de mpox de 2022 au Canada

Charlotte Wells1, Yuhui Xu1, Ashley Weeks1, Amanda Shaw1, Susanna Ogunnaike-Cooke1

Affiliation

1 Agence de la santé publique du Canada

Correspondance

vaccine.vigilance@phac-aspc.gc.ca

Citation proposée

Wells C, Xu Y, Weeks A, Shaw A, Ogunnaike-Cooke S. Surveillance de la sécurité du vaccin Imvamune lors de l'éclosion de mpox de 2022 au Canada. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2025;51(8):346−51. https://doi.org/10.14745/ccdr.v51i08a05f

Mots-clés : mpox, effets secondaires, Imvamune, sécurité des vaccins, éclosion

Résumé

Contexte : Au Canada, en 2020, l'indication de l'utilisation d'Imvamune a été élargie pour inclure l'immunisation contre la variole, la mpox et les infections et maladies liées à l'orthopoxvirus chez les adultes âgés de 18 ans et plus et considérés comme présentant un risque élevé d'exposition.

Méthodes : Depuis l'introduction de cette nouvelle utilisation du vaccin et tout au long des éclosions de mpox en 2022, l'Agence de la santé publique du Canada (l'Agence) a surveillé de près la sécurité du vaccin Imvamune par l'intermédiaire du Système canadien de surveillance des effets secondaires suivant l'immunisation (SCSESSI).

Résultats : Cet article décrit les rapports d'événements indésirables suivant l'immunisation (ÉISI) étant survenus après l'administration d'Imvamune, et ayant été soumis à la base de données du SCSESSI entre le 24 mai 2022 et le 11 décembre 2022, lors de l'activation de l'intervention d'urgence du Canada.

Conclusion : La surveillance des rapports d'ÉISI suivant l'immunisation par Imvamune soumis au SCSESSI n'a pas identifié d'enjeux de sécurité vaccinale nouveaux ou inattendus dans la population adulte canadienne. L'Agence de la santé publique du Canada continue de surveiller les signaux potentiels de sécurité vaccinale.

Introduction

Identification des problèmes

En mai 2022, des cas humains de mpox ont été signalés au Royaume-Uni et dans d'autres pays peu avant d'être signalés au CanadaFootnote 1Footnote 2. En juillet 2022, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré que l'éclosion de mpox constituait une urgence de santé publique de portée internationale Footnote 3. En décembre, plus de 80 000 cas de mpox avaient été signalés dans 110 paysFootnote 4. La sévérité de la présentation clinique des cas signalés dans le cadre de cette éclosion était généralement faible, avec peu d'hospitalisations et aucun décès rapportés. Toutefois, certains cas ont fait état de douleurs considérables dues aux lésions ou aux cicatrices survenues suite à l'infectionFootnote 5Footnote 6Footnote 7. Les cas sont survenus principalement au sein de communautés marginalisées, en particulier au sein de la population d'hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (gbHARSAH)Footnote 5. Le terme gbHARSAH vise à inclure les personnes qui s'identifient comme des hommes cisgenres ou transgenres dont les partenaires sexuels sont des hommes cisgenres ou transgenres, quel que soit le sexe qui leur a été assigné à la naissance. Cela dit, il peut y avoir des différences entre les systèmes de surveillance en ce qui concerne la définition de l'identité de genre, du sexe et de l'orientation sexuelleFootnote 5. Les provinces et territoires canadiens ont lancé une campagne de vaccinationFootnote 8 à la suite de la publication de directives provisoires par le Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI) sur l'utilisation d'Imvamune dans le contexte d'éclosions de mpox au CanadaFootnote 8Footnote 9. Le CCNI a également indiqué que des données supplémentaires sur la sécurité de l'Imvamune après sa mise sur le marché constituaient une priorité de rechercheFootnote 9.

Imvamune (modified vaccinia Ankara-Bavarian Nordic), également connu à l'étranger sous les noms de marque Jynneos et Imvanex, est un vaccin à base d'orthopoxvirus vivant atténué et non réplicatifFootnote 10. Santé Canada a initialement approuvé Imvamune en 2013 dans le cadre de la présentation de drogue nouvelle pour usage exceptionnel (DNUE) pour une utilisation contre la varioleFootnote 11. Un supplément à la présentation de DNUE en 2020 a élargi l'indication pour inclure la mpox et les infections orthopoxvirales apparentéesFootnote 11. L'autorisation concernait les doses primaires du vaccin administrées en deux doses de 0,5 ml par voie sous-cutanée, à au moins quatre semaines d'intervalle. Imvamune peut être administré avant une exposition potentielle ou en prophylaxie post-exposition pour les personnes qui ont été exposées au virus, mais qui ne présentent pas encore de symptômes de mpoxFootnote 9.

L'Agence de la santé publique du Canada (l'Agence) a surveillé la sécurité du vaccin Imvamune à l'aide du Système canadien de surveillance des effets secondaires suivant l'immunisation (SCSESSI), un système fédéral, provincial et territorial de surveillance de la sécurité des vaccins suivant leur mise sur le marché, coordonné par l'Agence et utilisé pour surveiller de façon continue la sécurité des vaccins administrés au CanadaFootnote 12. Les rapports sont d'abord soumis à une autorité sanitaire (c'est-à-dire les autorités de santé publique locales, régionales, provinciales/territoriales ou fédérales) par les prestataires de soins de santé d'individus qui ont subi un événement indésirable suivant l'immunisation (ÉISI). Ces rapports sont ensuite soumis par les autorités sanitaires fédérales, provinciales ou territoriales à l'Agence pour être inclus dans la base de données du SCSESSIFootnote 12. Les ÉISI sont également surveillés dans le cadre du programme Canada Vigilance de Santé Canada, mais aucun cas lié à Imvamune n'a été signalé dans le cadre de ce programme pour la période décrite ici.

L'objectif de cette étude était de décrire les rapports d'ÉISI survenus suite à l'administration d'Imvamune soumis à la base de données du SCSESSI entre le 24 mai 2022 et le 11 décembre 2022. Cette période d'étude a été définie en raison du pic des éclosions survenues au Canada au cours de cette annéeFootnote 2Footnote 5 et de la désescalade de l'intervention d'urgence du portefeuille national de la santé en décembre 2022Footnote 13.

Méthodes

Les données ont été recherchées et extraites du SCSESSI pour les rapports d'ÉISI dépersonnalisés soumis entre le 24 mai 2022 et le 11 décembre 2022. L'extraction des données a été effectuée en utilisant le niveau hiérarchique de « terme préférentiel » (« Preferred Terms », en anglais) de la terminologie normalisée du Dictionnaire médical des affaires réglementaires (Medical Dictionary for Regulatory Activities, abrégé sous le sigle MedDRA) Footnote 14. Tous les rapports ont fait l'objet d'un examen systématique des cas médicaux primaires par des professionnels de la santé qualifiés. Un ÉISI a été considéré comme grave s'il a entraîné la mort, s'il a mis la vie en danger (un événement ou une réaction dans lequel ou laquelle le patient courait un risque réel, plutôt qu'hypothétique, de mourir au moment de l'événement ou de la réaction), s'il a nécessité une hospitalisation ou la prolongation d'une hospitalisation existante, s'il a entraîné une invalidité ou une incapacité persistante ou importante, ou s'il a entraîné une anomalie ou une malformationFootnote 15. Nous avons également recueilli des données sur les doses administrées auprès des partenaires provinciaux et territoriaux concernés.

Les taux de notification des événements indésirables ont été calculés en divisant le nombre d'effets secondaires par le nombre de doses administrées. Les intervalles de confiance (IC) à 95 % associés ont été estimés à l'aide de la méthode exacte de Poisson. L'extraction et l'analyse des données pour cet article ont été réalisées à l'aide du logiciel statistique R version 4.2.2Footnote 16 et du logiciel SAS Enterprise Guide version 7.1. SAS et tous les autres noms de produits ou de services de SAS Institute Inc. sont des marques déposées ou des marques commerciales de SAS Institute Inc. à Cary, Caroline du Nord, États-Unis.

Résultats

Entre le 24 mai 2022 et le 11 décembre 2022, 119 826 doses d'Imvamune ont été administrées au Canada, dont 95 346 (79,6 %) premières doses, 24 478 (20,4 %) deuxièmes doses et deux troisièmes doses (0,0 %). La majorité (93,2 %) des doses ont été administrées à des hommes. Imvamune a été administré à 80 personnes âgées de moins de 18 ans.

Au total, 53 rapports d'ÉISI consécutifs à l'administration d'Imvamune ont été soumis à l'Agence pour être inclus dans la base de données du SCSESSI au cours de la période analysée, ce qui correspond à un taux de notification global de 44,2 rapports pour 100 000 doses (IC à 95 % : 33,1–57,9). La plupart des notifications ont été classées comme non graves sur la base des manifestations cliniques et des résultats décrits. La majorité des ÉISI signalés sont survenus principalement chez les hommes (81 %), et auprès d'individus dans la tranche d'âge de 0 à 49 ans (72 %) (tableau 1). Cela est conforme aux recommandations relatives à l'utilisation d'Imvamune dans le contexte d'une éclosion active de mpox, ainsi qu'à l'épidémiologie de l'éclosion de 2022Footnote 5. Si la plupart des rapports indiquent une vaccination par injection sous-cutanée (53 %), la voie d'administration n'est pas précisée dans de nombreux rapports (tableau 1). Les événements indésirables les plus fréquemment rapportés étaient similaires entre les doses de vaccins administrées par voie sous-cutanée et celles dont la voie d'administration était inconnue (tableau 2).

Tableau 1 : Caractéristiques des personnes ayant reçu le vaccin Imvamune et ayant fait l'objet d'un rapport d'événements indésirables suivant l'immunisation soumis au SCSESSI au Canada, du 24 mai 2022 au 11 décembre 2022, (n = 53)
Caractéristiques Nombre de rapports (%)Footnote a
Sexe
Masculin 43 (81 %)
Féminin 6–9
Autre < 5
Groupe d'âge (années)
0 à 29 12 (23 %)
30 à 39 14 (26 %)
40 à 49 12 (23 %)
50 à 59 10 (19 %)
60 et plus 5 (9 %)
Voie d'administration
Sous-cutanée 28 (53 %)
IntramusculaireFootnote b < 5
Inconnue 21–24
Gravité
Non grave 49–52
Grave < 5

Tableau 2 : Les dix événements indésirables les plus fréquemment déclarés après l'administration du vaccin Imvamune, selon la voie d'administration du vaccin, d'après le SCSESSI du 24 mai 2022 au 11 décembre 2022, au Canada
ÉISIFootnote a Nombre de rapportsFootnote b
Voie d'administration sous-cutanée
Érythème au point de vaccination 9 (32 %)
Douleur au point de vaccination 9 (32 %)
Nodule au point de vaccination 6 (21 %)
Gonflement au point de vaccination 6 (21 %)
Chaleur au point de vaccination 6 (21 %)
Érythème < 5
Prurit < 5
Urticaire < 5
Induration au point de vaccination < 5
Éruption < 5
Voie d'administration inconnue
Douleur au point de vaccination 13 (54 %)
Érythème au point de vaccination 10 (42 %)
Gonflement au point de vaccination 8 (33 %)
Masse au point de vaccination 5 (21 %)
Prurit < 5
Éruption < 5
Nodule au point de vaccination < 5
Prurit au point de vaccination < 5
Érythème < 5
Cellulite au point de vaccination < 5

La majorité des ÉISI signalés étaient des réactions locales associées au point de vaccination. Notamment, l'ÉISI la plus signalée a été une douleur au point de vaccination, avec 18,4 rapports pour 100 000 doses administrées (tableau 3). Aucun cas d'anaphylaxie n'a été signalé.

Tableau 3 : Taux de déclaration pour 100 000 doses administrées des dix événements indésirables suivant l'immunisation les plus fréquemment signalés au SCSESSI après l'administration du vaccin Imvamune, du 24 mai 2022 au 11 décembre 2022, au Canada
ÉISIFootnote a Nombre d'événements Taux de déclaration
(IC 95 %)
Douleur au point de vaccination 22 18,4 (11,5–27,8)
Érythème au point de vaccination 20 16,7 (10,2–25,8)
Gonflement au point de vaccination 15 12,5 (7,0–20,6)
Masse au point de vaccination 9 7,5 (3,4–14,3)
Nodule au point de vaccination 9 7,5 (3,4–14,3)
Prurit 8 6,7 (2,9–13,2)
Chaleur au point de vaccination 8 6,7 (2,9–13,2)
Érythème 6 5,0 (1,8–10,9)
Éruption 6 5,0 (1,8–10,9
Cellulite au point de vaccination 5 4,2 (1,4–9,7)

Tous les cas graves ont été classifiés comme tels puisqu'ils ont nécessité une hospitalisation. Aucun décès n'a été signalé. L'examen des cas médicaux classifiés comme étant graves n'a pas permis de confirmer l'existence d'un lien entre les ÉISI signalés et la vaccination ou a considéré ce lien comme inclassable.

Les rapports sur les ÉISI graves comprenaient des événements tels que des accidents vasculaires cérébraux, des thromboses veineuses superficielles et des réactions au point d'injection.

Discussion

À ce jour, la surveillance des ÉISI après l'administration d'Imvamune n'a pas révélé d'enjeux de sécurité nouveaux ou inattendus dans la population adulte canadienne. La prédominance des réactions au point de vaccination après l'injection correspond étroitement à ce qui a été observé dans les études cliniques et aux réactions attendues mentionnées dans la monographie du produitFootnote 10. En outre, les taux de déclaration des ÉISI les plus signalés sont comparables à ceux rapportés aux États-Unis dans le cadre de la campagne de vaccination contre l'éclosion de mpoxFootnote 17.

Au cours de la période d'étude de sept mois, les données nationales de signalements spontanés de pharmacovigilance n'ont donné lieu à aucune préoccupation inattendue concernant le nombre ou la nature des rapports d'événements indésirables graves. En ce qui concerne les autres événements d'intérêt particulier pour la surveillance de la sécurité vaccinale, tels que la myocardite, aucun n'a été signalé au Canada. Toutefois, étant donné que la survenue de myocardites a été observée aux États-Unis à la suite de la vaccination par Jynneos à un taux de 1,53 et 2,99 par million de doses après la dose 1 et la dose 2, respectivementFootnote 17, il est peu probable qu'un événement aussi rare puisse être observé dans le contexte canadien, étant donné l'utilisation limitée de ce vaccin au Canada.

Lors de la campagne de vaccination par Imvamune, le CCNI a recommandé une stratégie d'économie de dose par injection intradermique pour les adultes immunocompétents recevant une seconde dose, au lieu d'utiliser la méthode standard d'injection sous-cutanéeFootnote 11. Sur la base des données disponibles dans le SCSESSI, rien ne permet de conclure que la voie d'administration du vaccin a pu avoir un impact notable sur le taux d'ÉISI. En effet, les dix événements indésirables les plus fréquemment rapportés étaient similaires entre les vaccinations administrées par voie sous-cutanée et celles pour lesquelles la voie d'administration du vaccin était inconnue. En outre, des rapports provenant des États-Unis suggèrent que les événements indésirables rapportés n'étaient pas différents entre les deux voies d'administrationFootnote 17.

Limites

Les résultats de cette enquête sout assujettis aux limites du système de déclaration du SCSESSI, qui comprennent le risque de sous-déclaration, le manque d'informations dans les rapports soumis (qui, parfois, ont conduit à l'incapacité de confirmer le diagnostic tel qu'il a été déclaré), et les différentes pratiques de déclaration entre les organisations de santé publique participantes. En outre, les données sur le nombre de doses qui ont pu être administrées au destinataire, ainsi que sur la voie d'administration du vaccin (intradermique ou sous-cutanée) étaient manquantes dans un nombre significatif de rapports d'ÉISI. Cela a limité notre capacité à effectuer des calculs de taux spécifiques aux voies d'administration et des comparaisons de risques relatifs. Enfin, la présence d'un ÉISI ne confirme pas nécessairement que ce dernier répond aux critères normalisés de diagnostic ou qu'il existe un lien de causalité entre l'administration d'un vaccin et l'événement indésirable signalé.

Conclusion

En conclusion, à la date du présent rapport, la surveillance des ÉISI après l'administration d'Imvamune n'a pas révélé d'enjeux de sécurité vaccinale inattendus au sein de la population adulte canadienne. Les effets secondaires observés au cours de la période d'analyse correspondent bien aux données publiées précédemment, et les événements indésirables graves ont été rares. Les études de surveillance de la sécurité d'Imvamune après sa mise sur le marché sont limitées, et cet article ajoute à la base de connaissances sur Imvamune obtenues lors d'essais cliniques. L'Agence de la santé publique du Canada continuera à surveiller les rapports sur les ÉISI au fur et à mesure qu'ils seront soumis au système de notification du SCSESSI.

Déclaration des auteurs

  • C. W. — Rédaction de la version originale
  • Y. X. — Validation, rédaction–révision et édition
  • A. W. — Rédaction–révision et édition
  • A. S. — Rédaction–révision et édition
  • S. O.-C. — Supervision, rédaction–révision et édition

Intérêts concurrents

Aucun.

Identifiants ORCID

Aucun.

Remerciements

Nous reconnaissons les efforts critiques et importants des autorités de santé publique locales et régionales, provinciales et territoriales et du public ayant soumis des rapports au Système canadien de surveillance des effets secondaires suivant l'immunisation (SCSESSI) qui assure la surveillance de la sécurité des vaccins au Canada.

Nous remercions également l'équipe du SCSESSI de la Division de la surveillance de la sécurité des vaccins de l'Agence de la santé publique du Canada pour la saisie et le codage des données relatives aux événements indésirables suivant l'immunisation, ainsi que tous les médecins ayant été impliqués dans l'examen des rapports.

Financement

Aucun.

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