Le terrorisme au Canada : une violence inspirée
Le contexte de la menace terroriste au Canada continue d’évoluer et subit directement les conséquences des tendances et des événements qui retiennent l’attention au pays et à l’échelle internationale. Des acteurs canadiens demeurent inébranlables dans leur résolution de commettre un acte de violence terroriste. Les actes de terrorisme perpétrés par des extrémistes inspirés par des groupes terroristes comme Daech et al- Qaïda, notamment ceux qui cherchent à partir pour aller se joindre à des groupes terroristes à l’étranger et ceux qui se radicalisent, constituent le principal danger lié à la sécurité nationale pour la sécurité publique dans notre pays. L’enquête sur les menaces terroristes demeure la grande priorité du SCRS.
Le SCRS s’inquiète aussi toujours de la menace que font peser ceux qui soutiennent d’autres formes d’extrémisme. La mondialisation du terrorisme, alimentée par la propagande habile que les groupes extrémistes diffusent sur Internet, a amplifié le phénomène de la radicalisation et de la mobilisation à la violence. Certains individus influencés par une idéologie extrémiste sont partis à l’étranger (ou ont tenté de le faire) pour participer à des activités terroristes. D’autres militent en faveur de leur idéologie extrémiste en menant des activités d’entraînement, de collecte de fonds, de recrutement et de planification d’attentats au Canada.
Le terrorisme en Occident se caractérise généralement par des actes à grand retentissement nécessitant peu de ressources, habituellement inspirés par des groupes terroristes comme Daech et al-Qaïda, ou par des extrémistes répondant à l’appel à un « califat virtuel » lancé par Daech. L’utilisation répétée de véhicules et de couteaux en Europe et en Amérique du Nord montre bien que les terroristes ont de plus en plus recours à des moyens rudimentaires et nécessitant peu de ressources. Même si les attentats sont moins complexes, leurs répercussions et leur létalité demeurent importantes parce que les auteurs frappent souvent des cibles faciles. Dans leur propagande, Daech et al-Qaïda expliquent à leurs partisans comment utiliser des armes légères, des véhicules et des armes blanches et suggèrent des façons de maximiser les dommages. L’encouragement à utiliser des armes simples peut donner des moyens d’agir à ceux qui seraient autrement incapables de commettre un attentat terroriste plus complexe.
Les activités de messagerie et de recrutement des terroristes reposent en grande partie sur l’utilisation des médias et des médias sociaux. Daech a augmenté considérablement sa production médiatique pour continuer de propager son message en diffusant du matériel par de nouveaux moyens et sur d’autres plateformes (p. ex. en optant pour des plateformes qui n’exigent aucune identification, en recommençant à fréquenter des forums ou en partageant des liens dans des bibliothèques sur le Web invisible). L’utilisation du cyberespace par les entités terroristes pour renforcer la sécurité de leurs activités demeurera un défi pour l’appareil de la sécurité et du renseignement. Plus particulièrement, la popularité croissante des technologies de chiffrement permet aux terroristes de dissimuler le contenu de leurs communications et d’agir dans l’anonymat en ligne. Cette façon de faire, qui leur permet d’éviter d’être détectés par les services de police et de renseignement, met à rude épreuve la capacité des gouvernements d’enquêter sur les auteurs de menaces et de les traduire en justice.
Daech a subi d’importantes pertes de territoire à la suite d’actions militaires menées par une coalition internationale à laquelle le Canada participe. Désormais, le groupe ne cherche plus à accéder au statut d’État, mais lance plutôt davantage d’appels à l’exercice de représailles. D’après le SCRS, Daech poursuivra ses efforts pour inspirer ou encourager des opérations à l’étranger. Les attentats perpétrés par des individus dont la radicalisation est facilitée par les activités du groupe sur Internet et qui nouent le dialogue avec des communautés virtuelles favorables à Daech sont le résultat direct des campagnes médiatiques énergiques de Daech qui visent à inspirer davantage de violence. Le phénomène de la radicalisation, tant en ligne que hors ligne, demeure un grave sujet de préoccupation pour le Canada et ses alliés.
Le contexte de la menace actuel est mondial. Le SCRS est tenu d’enquêter en profondeur sur les activités liées à la menace menées au Canada qui visent l’extérieur de ses frontières. Au Canada, un petit nombre d’extrémistes établis au pays qui préconisent le recours à la violence comme moyen d’instaurer un État indépendant en territoire indien mènent toujours des activités liées à la menace qui visent principalement l’Inde, même s’ils sont beaucoup moins actifs qu’ils l’étaient à leur apogée au milieu des années 1980. Récemment, cependant, une hausse des activités liées à la menace a été observée, le Canada ayant servi de base pour soutenir cette idéologie et la perpétration d’attentats dirigés contre l’Inde. Ces activités représentent une menace pour la sécurité du Canada, qui doit contribuer aux efforts de la communauté internationale pour empêcher que des attentats violents soient perpétrés où que ce soit dans le monde.
Les voyageurs extrémistes canadiens
Le gouvernement du Canada continue de suivre la menace que représentent les voyageurs extrémistes et de prendre des mesures pour la contrer. Il s’agit d’individus qui ont un lien avec le Canada – c’est-à-dire des citoyens canadiens, des résidents permanents ou des détenteurs d’un visa valide – et qui sont soupçonnés d’être allés à l’étranger pour participer à des activités liées au terrorisme. Le phénomène des voyageurs extrémistes – ce qui comprend ceux qui sont à l’étranger, ceux qui reviennent au pays et ceux qui ont été empêchés de partir – suscite diverses préoccupations en matière de sécurité pour le Canada. Même s’il s’en tire bien sur le plan du nombre, le Canada n’est pas à l’abri de ce problème.
Quelque 250 de ces voyageurs extrémistes qui ont un lien avec le Canada sont allés à l’étranger, à peu près la moitié en Syrie, en Irak et en Turquie, les autres en Afghanistan, au Pakistan et dans des régions du nord et de l’est de l’Afrique, et environ 190 d’entre eux s’y trouvent toujours. Ces individus sont partis pour soutenir et faciliter des activités extrémistes et, dans certains cas, pour participer directement à la violence. Une soixantaine de personnes qui ont un lien avec le Canada et qui se sont livrées à des activités extrémistes à l’étranger sont rentrées au pays. Seul un nombre relativement petit d’entre elles sont revenues de Turquie, d’Irak ou de Syrie.
Depuis qu’il a éclaté en 2011, le conflit en Syrie et en Irak a attiré un nombre sans précédent d’extrémistes désireux de combattre à l’étranger, les départs ayant atteint un sommet en 2014. Le SCRS sait qu’une centaine d’individus ayant un lien avec le Canada sont soupçonnés de mener des activités liées au terrorisme dans cette région (sur les 190 qui s’y trouvent toujours). Plusieurs facteurs, dont les autorités étrangères qui les empêchent de franchir leurs frontières, le renforcement des mesures législatives au Canada qui dissuadent les gens de partir et la perte par Daech de vastes pans de territoire, ont contribué à la diminution du nombre de personnes qui partent rejoindre des groupes extrémistes en Syrie et en Irak.
Il n’y a pas beaucoup de voyageurs extrémistes qui sont revenus au Canada en provenance de la zone de conflit irako-syrienne. Il s’est révélé difficile de rentrer au Canada à partir de cette région, en raison du risque d’être tué ou capturé par une myriade de groupes extrémistes et autres groupes armés et du manque possible de documents de voyage valides et de fonds pour voyager. Enfin, étant donné leur engagement idéologique pour la cause, de nombreux extrémistes canadiens sont susceptibles de rester sur le théâtre du conflit à court ou à moyen terme.
Le SCRS prend très au sérieux la menace que représentent les combattants qui rentrent au pays. Outre qu’ils se sont montrés résolus à partir pour aller se joindre à un groupe terroriste, ces individus ont souvent reçu un entraînement ou acquis de l’expérience opérationnelle pendant leur séjour là-bas.
Le SCRS et d’autres ministères et organismes fédéraux sont bien organisés en tant qu’appareil pour gérer la menace que représentent les combattants qui rentrent au pays.
Les indices de mobilisation à la violence (IMV), une démarche du gouvernement du Canada
a radicalisation extrémiste et la mobilisation au terrorisme sont des processus complexes. Il y a longtemps que le SCRS a compris que ceux qui se radicalisent ne se livrent pas tous à des activités violentes. Certains n’ont pas l’occasion, les moyens ou la volonté nécessaires pour mettre leurs idées en pratique. À la lumière des attentats terroristes commis à Ottawa et à Saint-Jean-sur-Richelieu en 2014 – qui ont été suivis d’une augmentation soudaine du nombre des voyageurs extrémistes qui ont quitté le Canada à destination de la Syrie et de l’Irak –, le SCRS a mis à niveau et renforcé ses techniques d’analyse structurée pour mieux détailler les tendances et l’évolution des activités liées à la menace observées chez ceux qui commettent des actes de violence inspirés par al-Qaïda ou Daech. Cette recherche lui a ouvert de nouveaux horizons sur les activités concrètes qui révèlent une intention, des moyens, une planification et une préparation chez les individus qui se mobilisent au terrorisme. En collaboration avec la Gendarmerie royale du Canada, le SCRS a communiqué les points de vue et les pratiques exemplaires découlant de cette recherche aux intervenants de première ligne au sein des organismes d’application de la loi et des services de sécurité nationaux afin de les aider à évaluer si un individu se radicalise ou se mobilise au terrorisme.
Le SCRS a publié ces conclusions dans le rapport Recherche sur la mobilisation à la violence (terrorisme) – principaux résultats .
L’extrémisme de droite
L’extrémisme peut découler de diverses idéologies. Dans le dossier de l’extrémisme de droite, le SCRS collabore étroitement avec ses partenaires canadiens et étrangers, dont les organismes d’application de la loi.
L’extrémisme de droite est un phénomène engendré par la haine et la peur qui rassemble une gamme complexe d’individus, de sous-cultures et de communautés virtuelles. Ces individus et ces groupes exploitent les doléances sur des questions aussi variées que le sexe, la race, la religion, l’orientation sexuelle et l’immigration. Plutôt que de promouvoir ouvertement la violence, certains tenants de l’extrême droite tentent souvent d’instaurer une culture de peur, de haine et de méfiance en ligne en exploitant des craintes réelles ou imaginaires lorsqu’ils s’adressent à un public en ligne. Ils cherchent ainsi à légitimer leurs croyances et à se démarginaliser.
Le caractère transnational des médias sociaux permet aux individus du milieu de partager non seulement leurs opinions d’extrême droite, mais aussi leurs modes d’opération et les détails de leurs attaques et ainsi d’en inciter d’autres à faire de même. Ils peuvent s’inspirer des attentats terroristes commis un peu partout dans le monde et adopter des méthodes rudimentaires semblables (attentat au véhicule-bélier, armes à feu, etc.).
Depuis 2014, le Canada a été secoué par plusieurs attentats violents perpétrés par des individus influencés en tout ou en partie par l’extrémisme de droite. Qu’il suffise de mentionner l’assassinat de trois agents de la GRC à Moncton en 2014, la fusillade au Centre culturel islamique de Québec en janvier 2017 et l’attaque à la fourgonnette d’avril 2018 à Toronto. Les attentats commis récemment en Nouvelle-Zélande montrent bien que nos partenaires font eux aussi face à des menaces semblables, croissantes. Depuis 2014, tous les partenaires du Groupe des cinq ont connu des attentats ou des projets d’attentat violents perpétrés par des individus influencés, en tout ou en partie, par leurs opinions d’extrême droite.
Le SCRS continue de discuter avec ses partenaires au gouvernement et au sein des organismes d’application de la loi du contexte de l’extrémisme de droite et des nouvelles menaces et de fournir des conseils fondés sur des analyses poussées. Il a haussé son niveau de vigilance pour mieux comprendre la situation au Canada, obtenir des informations sur les principaux intervenants et évaluer la nature du contexte actuel de la menace.