Message du directeur

 

Bilan de l’année – Évoluer dans une ère de changement

Depuis 40 ans maintenant, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) protège la prospérité et la sécurité du Canada et de la population canadienne grâce à des renseignements, des conseils et des interventions fiables. Toutefois, alors que nous célébrons cet anniversaire important, nous affrontons un environnement de sécurité nationale plus complexe et difficile que jamais auparavant dans notre histoire. Le rapport annuel de cette année est l’occasion de réfléchir au travail qui a été réalisé pour composer avec un contexte en évolution constante et s’y adapter.

Je suis arrivé au SCRS à titre de directeur en octobre 2024 et depuis, j’ai le privilège d’être témoin du dévouement, des compétences et du professionnalisme au SCRS. Des professionnels des domaines techniques qui trouvent des solutions de pointe pour permettre de mener nos enquêtes aux agents de collecte régionaux qui s’emploient à comprendre les réseaux qui facilitent les activités liées à la menace, en passant par les analystes qui évaluent les menaces et conseillent le gouvernement, tous les employés du SCRS font preuve d’un engagement inébranlable à l’égard de sa mission. J’ai la chance de me joindre à l’organisation après les nombreuses réalisations de mes prédécesseurs. Je tiens particulièrement à remercier David Vigneault dont le leadership, la sagesse et les fonctions d’orientation ont permis de mener à bien une foule d’initiatives de transformation au cours des sept dernières années.

En 2024, deux arrestations très médiatisées liées au terrorisme ont permis de déjouer ce qui s’annonçait comme des attentats meurtriers. Le niveau national de la menace terroriste demeure modéré pour le Canada, en grande partie en raison des efforts d’atténuation déployés par les organismes de renseignement et d’application de la loi. Il ne faut toutefois pas se méprendre, car l’évolution des tendances de la menace terroriste est inquiétante. Notre cohésion sociale s’est effritée depuis quelques années, ce qui a causé des clivages dans le tissu social, et ce sont ces clivages que les auteurs de menace cherchent à exploiter. Fait peut-être plus inquiétant, les auteurs de menace cherchent à radicaliser de jeunes Canadiens, principalement par l’intermédiaire de chambres d’écho en ligne qui font la promotion de la rhétorique haineuse et incitent d’autres personnes à commettre des actes de violence. Le SCRS a fait une déclaration publique avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et des partenaires du Groupe des cinq au sujet de la radicalisation des jeunes et des efforts collectifs qui sont nécessaires pour la contrecarrer. Cette question demeurera un défi pour nous, en tant que société, dans les mois et les années à venir.

Tandis que les conflits à l’étranger perdurent, des nations étrangères qui cherchent à accélérer la réalisation de leurs objectifs militaires et économiques font peser des menaces accrues sur les intérêts du Canada. Dans le contexte de la concurrence mondiale incessante pour les minéraux essentiels, les possibilités de prospérité du Canada sont vulnérables à l’espionnage et à l’ingérence étrangère par des États comme la République populaire de Chine, qui cherche à s’approprier les chaînes d’approvisionnement de l’avenir. L’agression russe s’étend au-delà de la guerre d’agression menée actuellement contre l’Ukraine : elle prend pour cible les États occidentaux qui soutiennent l’ordre international fondé sur des règles, notamment en faisant des tentatives téméraires de sabotage et en contournant les sanctions de façon trompeuse. Le SCRS constate par ailleurs une tendance préoccupante selon laquelle des États mobilisent des réseaux du crime organisé pour mener des activités liées à la menace, y compris des activités de répression transnationale de discours légitimes au Canada. En effet, en 2024, deux Canadiens sont accusés d'avoir participé à un présumé projet d'assassinat aux États-Unis pour le compte des services de renseignement iraniens.

Pour entrer au Canada et mener des activités en sol canadien, des États hostiles, des groupes liés à la criminalité transnationale organisée et d’autres auteurs de menace tentent d’exploiter des moyens légitimes, soit les mêmes qui sont utilisés par les personnes qui veulent venir vivre paisiblement avec leur famille ou repartir à neuf au Canada. Le SCRS déploie nombre d’efforts pour protéger notre sécurité nationale, entre autres le programme de filtrage des demandes d’immigration et de citoyenneté. Grâce à un partenariat constant de collaboration avec les agents d’immigration et des services frontaliers, ainsi qu’avec des partenaires étrangers, le SCRS repère et atténue les menaces avant qu’elles n’atteignent notre frontière. Bien que le gouvernement du Canada ait annoncé une réduction des objectifs en matière d’immigration, le SCRS et d’autres partenaires de l’immigration continueront à traiter le nombre élevé de dossiers en attente de filtrage de sécurité avec la rigueur et la vigilance qui sont nécessaires pour protéger notre sécurité.

Au cours de l’année 2024, le SCRS a appuyé l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère dans les processus électoraux et les institutions démocratiques fédéraux par la production de documents et des témoignages d’experts. Le SCRS accueille favorablement les conclusions formulées par la Commission dans le rapport qu’elle a récemment rendu public. Il déploie d’ores et déjà des efforts pour y donner suite, y compris celles qui ont trait à la communication de renseignements. Ce rapport arrive à point. En effet, le SCRS prend la présidence du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignement visant les élections (le Groupe de travail), en préparation pour les processus politiques d’envergure qui seront lancés au cours de 2025, notamment la course à la chefferie du Parti libéral du Canada, une élection fédérale et des élections provinciales et territoriales anticipées. Certains États étrangers scrutent attentivement les processus démocratiques du Canada pour trouver les points faibles de ses mécanismes de protection. Le SCRS continuera de protéger les institutions démocratiques du Canada avec ses partenaires principaux, et ce, sans partisanerie, conformément à sa tradition et à celle du reste de la fonction publique fédérale. Ainsi, le SCRS et ses partenaires du Groupe de travail poursuivront leur collaboration avec les partis politiques et les intervenants compétents afin de maintenir la confiance des Canadiennes et des Canadiens dans leurs systèmes démocratiques.

En cette époque où États et citoyens adoptent de nouvelles technologies comme le chiffrement et l’intelligence artificielle générative, le Canada ne doit pas rester à la traîne : il lui faut comprendre les répercussions, les possibilités et les risques divers. Si ces percées peuvent permettre au Canada de croître, elles donnent parallèlement des munitions aux entités qui cherchent à lui nuire. En réaction, le SCRS a mis en place de nouveaux processus et de nouvelles structures permettant d’effectuer des examens et de réaffecter les ressources lorsque les priorités changent. Les équipes du SCRS collaborent étroitement avec ses partenaires étrangers – le Groupe des cinq, des alliés européens et de nombreux autres – et mettent à contribution des relations établies et renforcées au fil du temps, qui seront plus essentielles que jamais dans le contexte géopolitique en évolution.

Cette année, le projet de loi C-70, Loi concernant la lutte contre l’ingérence étrangère, a apporté à la Loi sur le SCRS sa mise à jour la plus importante depuis son adoption en 1984. Les nouvelles dispositions permettent au Service, pour certaines activités opérationnelles, de ne pas se laisser distancer par les avancées technologiques. Il accroît considérablement la capacité du SCRS d’interagir avec des intervenants de l’extérieur du gouvernement fédéral. Le présent rapport met en relief la vitesse à laquelle le SCRS a mis en œuvre les modifications, notamment, à 28 reprises, par la communication d’informations visant à renforcer la résilience à des partenaires non fédéraux, dont des gouvernements provinciaux et des organismes du secteur privé. Soulignons que les modifications à la Loi sur le SCRS prévoient aussi qu’elle doit faire l’objet d’un examen chaque cinq ans, au minimum, ce qui permettra au Parlement d’évaluer plus régulièrement si les pouvoirs du SCRS lui permettent de composer adéquatement avec les menaces qui évoluent.

Dans le budget de 2024, le gouvernement a reconnu les besoins du SCRS de contrer les menaces mondiales et de suivre le rythme des progrès technologiques : il a prévu des investissements ciblés au cours des huit prochaines années pour nous permettre de renforcer nos capacités et notre infrastructure de renseignement. L’amélioration des assises organisationnelles et techniques de notre travail nous permettra d’être en mesure de comprendre nos points faibles dans le nouveau monde de la sécurité sans pour autant compromettre nos exigences opérationnelles. Notre travail en est un qui n’arrête jamais, 24 heures par jour, 7 jours par semaine. Le monde change et le nombre de menaces continue d’augmenter. En raison de cela, nous devons constamment réévaluer et réaffecter nos ressources pour veiller à ce qu’elles demeurent concentrées sur les plus grandes priorités en lien avec la protection du Canada. 

Finalement, les réussites du SCRS sont le fruit du travail d’un personnel dévoué, compétent, diversifié et professionnel. Notre succès dans l’avenir dépend de notre capacité à maintenir en poste des spécialistes du renseignement et, pour ce faire, nous devons favoriser une culture et un milieu de travail sains. Au moment d’écrire le présent document, nous sommes sur le point de publier notre premier rapport annuel sur les actes répréhensibles et les écarts de conduite. Ce rapport constituera un premier pas en avant important sur le plan de la transparence et de la responsabilisation. Cependant, il indique aussi clairement que d’autres efforts sont nécessaires pour atteindre les objectifs. Par ailleurs, nous sommes en voie de terminer la mise sur pied de notre nouveau bureau d’ombuds pour le SCRS. Ce bureau relèvera directement de moi à titre de directeur, et aura le mandat de faire progresser les objectifs de l’organisation visant à favoriser un milieu de travail équitable et respectueux. Il constituera également une importante ressource pour tous les membres du personnel qui souhaitent obtenir des conseils et de l’aide pour faire face à des défis dans le milieu de travail.

Avec le recul, l’année 2024 aura été une année de grandes réalisations et de rappels brutaux. Bien que nous ayons déployé des efforts impressionnants pour investir dans nos capacités et moderniser nos pouvoirs, les fortes pressions exercées par les menaces et les priorités en évolution ne montrent aucun signe d’affaiblissement. Le SCRS intervient pour contrer les menaces qui pèsent sur le Canada, resserre ses liens avec ses alliés européens et de l’Indo-Pacifique et renforce ses partenariats en Amérique du Nord. Dans ce contexte, le Canada doit bien comprendre le rôle unique que joue le SCRS en matière de sécurité et de renseignement, au pays et à l’étranger. Nos partenaires et leurs priorités continuent d’évoluer et notre tâche collective ne se simplifie pas.

Il sera essentiel de continuer à faire preuve de transparence à l’égard de la population canadienne. Les nouveaux pouvoirs conférés par le projet de loi C-70 nous permettent de collaborer avec tous les secteurs de la société de nouvelles façons. Espérons également que cela permettra de renforcer la confiance des Canadiens et des Canadiennes en la capacité de leurs institutions de protéger les intérêts nationaux et les valeurs immuables du Canada. Je suis convaincu que les spécialistes du renseignement du SCRS continueront de relever ce défi.

« Avec le recul , l’année 2024 aura été une année de grandes réalisations et de rappels brutaux. Bien que nous ayons déployé des efforts impressionnants pour investir dans nos capacités et moderniser nos pouvoirs, les fortes pressions exercées par les menaces et les priorités en évolution ne montrent aucun signe d’affaiblissement. Le SCRS intervient pour contrer les menaces qui pèsent sur le Canada, resserre ses liens avec ses alliés européens et de l’Indo-Pacifique et renforce ses partenariats en Amérique du Nord. Dans ce contexte, le Canada doit bien comprendre le rôle unique que joue le SCRS en matière de sécurité et de renseignement, au pays et à l’étranger. »

Dan Rogers, Directeur, Service canadien du renseignement de sécurité


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