Un projet de loi fédéral : un pas important pour réduire le nombre d’enfants autochtones placés en famille d’accueil

Document d'information

Date : Le 30 novembre 2018

La surreprésentation des enfants des Premières Nations, inuits et métis dans le système de protection de l’enfance a été qualifiée de crise humanitaire. Ces enfants représentent 7,7 % de la population de moins de 15 ans, mais comptent pour 52,2 % des enfants placés en famille d’accueil dans des résidences privées.

Tous les jours, des enfants autochtones sont séparés de leurs parents, leur famille et leur communauté. Les raisons sont diverses : pauvreté, logements de piètre qualité, traumatisme intergénérationnel, pratiques défavorables à la culture en matière de protection de l’enfance lors de la prise en charge par l’État. De concert avec les partenaires des Premières Nations, inuits et métis, le gouvernement du Canada convient que cette situation est inacceptable. Des mesures urgentes doivent être prises par tous les ordres de gouvernement – fédéral, provincial, territorial – pour aider les familles autochtones à élever leurs enfants au sein de leurs familles, de leurs territoires et de leurs nations; pour augmenter les efforts à déraciner les causes fondamentales de la prise en charge des enfants autochtones par l’État; pour réunir les enfants avec leurs parents, leurs familles élargies, leurs communautés et leurs nations. Le projet de loi est une étape dans cette voie.

Reconnaître et protéger l’intérêt supérieur de l’enfant

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones établit les normes minimales et les droits qui s’appliquent aux peuples autochtones et leurs enfants. Ces normes et ces droits sont connexes, interreliés et interdépendants, et servent de cadre de réconciliation pour les services de l’enfance, de la jeunesse et de la famille.

Les cinq premiers appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation concernent la protection de l’enfance. L’appel à l’action n° 4 demande « au gouvernement fédéral de mettre en place des dispositions législatives en matière de protection des enfants autochtones qui établissent des normes nationales en ce qui a trait aux cas de garde et de prise en charge par l’État concernant des enfants autochtones, et qui prévoient des principes qui :

  1. confirment le droit des gouvernements autochtones d’établir et de maintenir en place leurs propres organismes de protection de l’enfance;
  2. exigent des organismes de protection de l’enfance et des tribunaux qu’ils tiennent compte dans leurs décisions des séquelles laissées par les pensionnats;
  3. établissent, en tant que priorité de premier plan, une exigence selon laquelle le placement temporaire ou permanent des enfants autochtones le soit dans un milieu adapté à leur culture ».

 
En outre, en 2016, le Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP) a décidé que le Programme des services à l’enfance et à la famille des Premières Nations du gouvernement fédéral était discriminatoire et a ordonné au Canada de résoudre immédiatement ce problème. La décision a suscité des discussions plus poussées sur la création d’un projet de loi fédéral pour reconnaître et confirmer les pouvoirs autochtones axés sur la distinction dans le but de mieux veiller au bien-être des enfants autochtones.

En septembre 2018, le gouvernement fédéral a annoncé que les enfants inuits sont admissibles au programme fédéral de l’Initiative de l’enfant d’abord. Cela respectait l’engagement exprimé en juin 2018, à Inuvik dans les Territoires du Nord-Ouest, lors de la réunion du Comité de partenariat entre les Inuit et la Couronne, à travailler avec les Inuit, les provinces et les territoires pour élaborer une initiative de l’enfant d’abord à long terme, exprès pour les Inuit, et qui respecte leurs droits et leur autonomie.

Travailler en collaboration, en partenariat et dans le respect mutuel pour la réforme

  • En janvier 2018, le gouvernement fédéral a tenu une réunion nationale d’urgence avec les peuples autochtones, des représentants des peuples et des nations autochtones, de l’Assemblée des Premières Nations, de l’Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis, des organisations de services autochtones, des experts et des praticiens, des aînés, des grands-mères et des jeunes ayant une expérience concrète. À cette réunion, le gouvernement du Canada s’est engagé à prendre six mesures qui comprennent la possibilité d’élaborer un projet de loi fédéral, comme l’avait demandé la Commission de vérité et réconciliation dans son appel à l’action n° 4.
  • Une résolution adoptée en mai 2018 par l’Assemblée des Premières Nations appuyait l’établissement d’un projet de loi habilitant fédéral pour les Premières Nations. Un rapport provisoire du Comité consultatif national sur les services à l’enfance et à la famille des Premières Nations préconisait également l’adoption d’un nouveau projet de loi fédéral.

Au cours de l’été et de l’automne 2018, le gouvernement du Canada a collaboré activement avec des représentants des organisations nationales, régionales et communautaires des Premières Nations, des Inuit et de la Nation métisse, ainsi qu’avec des nations signataires de traités, des Premières Nations autonomes, des experts et des personnes ayant une expérience concrète. Cet engagement comprenait des activités avec les chefs communautaires, des représentants de l’Assemblée des Premières Nations, de l’Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis, des organisations de services autochtones, des provinces et territoires, des experts, des défenseurs des droits des enfants, des aînés, des jeunes et des femmes. Plus de 65 séances de mobilisation ont eu lieu partout au pays et ont rassemblé près de 2 000 participants. Ces séances font partie de l’élaboration conjointe d’une approche législative qui ouvre la voie à une réforme globale.

Les Autochtones, moteurs du changement

Certains des commentaires fournis au gouvernement fédéral pendant ces nombreuses séances de mobilisation incluaient la nécessité d’aborder certains principes, dont ceux exprimés dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, par exemple :

  • Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. (Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, article 3)
  • L’enfant a le droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux ou sa famille élargie. Quand une séparation se produit, la réunification de la famille doit être le but primordial.
  • Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, les parents doivent pouvoir s’attendre à une procédure régulière, être informés à l’avance d’une prise en charge éventuelle d’un enfant par l’État et avoir la possibilité de participer à l’instance.
  • Des systèmes d’alerte des naissances comme ceux qui sont actuellement en place pour amorcer le processus de prise en charge d’un nourrisson par l’État devraient être évités autant que possible. Un éventail de services prénataux et de soins préventifs devrait plutôt être préconisé, dans la mesure que ces services répondent aux exigences de protection de l’enfant.
  • Les Autochtones ne devraient faire l’objet d’aucun acte de génocide ou de violence, y compris le transfert forcé d’enfants autochtones d’un groupe à un autre. Les peuples autochtones ont le droit de ne pas subir l’assimilation forcée ou la destruction de leur culture. (Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, articles 7 et 8)
  • Il faut tenir dûment compte de la continuité dans l’éducation de l’enfant ainsi que de son héritage culturel et linguistique. Quel que soit le placement d’un enfant autochtone, la préférence devrait être donnée dans l’ordre suivant : (1) un membre de la famille de l’enfant; (2) un membre de la famille élargie de l’enfant; (3) d’autres membres de la communauté et de la nation de l’enfant autochtone; ou (4) d’autres familles autochtones; (5) des familles non autochtones.
  • Les familles et les communautés autochtones ont le droit d’exercer une responsabilité partagée sur l’éducation, la formation et le bien-être de leurs enfants. Lorsque les gouvernements autochtones ont adopté des lois sur le bien-être et la protection des enfants, celles-ci devraient avoir préséance.
  • Les enfants ne devraient pas être pris en charge par l’État en raison de la pauvreté économique, d’un logement insalubre ou des problèmes de santé des parents ou des enfants. Les problèmes sous-jacents déterminants sociaux de la santé devraient être abordés pour prévenir la prise en charge de l’enfant.
  • Le gouvernement fédéral devrait appuyer l’établissement de principes directeurs nationaux pour le bien-être des enfants autochtones et, en collaboration avec les provinces et les territoires, publier des rapports annuels sur le nombre d’enfants des Premières Nations, inuits et métis qui sont pris en charge.

Participation provinciale et territoriale

Un dialogue productif et continu avec les provinces et les territoires s’est déroulé pendant l’été et au début de l’automne, dans le cadre d’une mobilisation générale qui visait à informer sur l’élaboration d’options pour un projet de loi fédéral. Un dialogue concerté avec les partenaires provinciaux et territoriaux sur les répercussions et les différents aspects de l’application de la loi demeurera au cœur de la réforme des services à l’enfance et à la famille. Les discussions se poursuivent avant la présentation du projet de loi et se poursuivront durant les phases de transition et de mise en œuvre de la loi.

Travailler en partenariat en vue de l’élaboration commune d’un projet de loi

En octobre 2018, Services aux Autochtones Canada a participé à un petit groupe de référence composé de délégués de l’Assemblée des Premières Nations, de l’Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis. Le groupe a discuté des options législatives pour améliorer la situation des enfants, des jeunes et des familles autochtones, en tenant compte des rapports rédigés à la suite des séances de mobilisation.
 
Aujourd’hui, de concert avec les partenaires autochtones, le gouvernement du Canada s’est engagé à introduire un projet de loi pour appuyer le bien-être des peuples autochtones titulaires de droits en vertu de l’article 35, y compris les enfants des Premières Nations, des Inuit de la Nation métisse et leurs familles. L’objectif du projet de loi proposé vise ce qui suit :

  • Confirmer que le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale reconnu et confirmé à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 inclut l’autorité législative relative aux services à l’enfance et à la famille.
  • Confirmer que la loi fournisse une approche axée sur la distinction, cohérente avec les relations de nation à nation, Couronne-Inuit et de gouvernement à gouvernement avec le Canada.
  • Confirmer les pouvoirs respectifs des Premières Nations, des Inuit et de la Nation métisse d’élaborer des lois et des politiques concernant les services à l’enfance et à la famille tout en reconnaissant également leurs droits, leurs histoires et leurs pratiques distinctes et diverses.
  • Reconnaître qu’il n’existe pas de modèle ou d’approche unique, mais qu’il existe plutôt un éventail de modèles qui peuvent être librement déterminés par les peuples autochtones par l’intermédiaire de leurs propres représentants et gouvernements.
  • Inclure une disposition exhaustive sur l’intérêt supérieur de l’enfant pour les Premières Nations, les Inuit et la Nation métisse.
  • Établir des principes directeurs pour veiller à ce que les enfants, les jeunes et les familles autochtones reçoivent des soins équivalents et qu’ils obtiennent les mêmes résultats que les autres enfants, jeunes et familles canadiennes.

Services aux Autochtones Canada, l’Assemblée des Premières Nations, l’Inuit Tapiriit Kanatami et le Ralliement national des Métis déclarent qu’ils :

  • Collaboreront de manière transparente et axée sur la distinction pour développer conjointement une loi fédérale qui appuierait le bien-être des enfants des Premières Nations, des Inuit et de la Nation métisse et leurs familles. Le contenu de la loi reflétera la distinction géographique, politique, juridique et les contextes culturels qui ont un impact sur le bien-être de l’enfant et de la famille.
  • Le projet de loi sera élaboré conjointement de manière à appuyer la mise en œuvre concrète des appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation, de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de l’engagement du gouvernement fédéral à établir les relations de nation à nation, de gouvernement à gouvernement et Inuit-Couronne.
  • Collaborer à élaborer des options pour développer la capacité des communautés, gouvernements et organisations autochtones visés dans la transition à l’application de la loi ou d’un plus grand contrôle et des responsabilités exercés sur les programmes et les services à l’enfance et à la famille.




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