2012 TSSTC 9

Référence : Parcs Canada et Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2012 TSSTC 9

Date : 2012-03-06

No dossier : 2009-33/2010-37

Rendue à : Ottawa

Entre :

Parcs Canada et Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, appelantes

Affaire : Appel interjeté en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail à l’encontre de trois instructions émises par un agent de santé et de sécurité.

Décision : Les instructions sont annulées.

Décision rendue par : M. Richard Lafrance, agent d’appel

Langue de la décision : Anglais

Pour les appelantes : M. Richard Fader, avocat, Justice Canada

MOTIFS DE DÉCISION

[1]               La décision porte sur deux appels formés en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail (le Code). Deux agents de santé et sécurité (Ag. SS) ont effectué une enquête sur un accident mortel qui est survenu au barrage no 1 de la voie navigable Trent-Severn.

[2]               À la suite de cette enquête, l’Ag. SS Lewis A. Jenkins a émis deux directives à Parcs Canada. Par la suite, l’Ag. SS Francesco Misuraca a émis une directive à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC).

[3]               À la demande des appelantes, les deux appels ont été joints de façon à ce qu’ils soient entendus en même temps, étant donné qu’ils portaient sur les mêmes faits. Des audiences ont été tenues à Ottawa (Ontario), les 4, 5 et 6 juillet 2011, et les observations finales ont été reçues le 8 août 2011.

[4]               La victime était au service d’un employeur sous réglementation provinciale; par conséquent, le ministère du Travail de l’Ontario a fait enquête sur cet employeur. Étant donné qu’aucun employé relevant des compétences fédérales n’était impliqué dans cet accident, il n’y avait pas d’intimé dans la présente affaire.

Contexte

[5]               Le 6 octobre 2009, une entreprise de plongée, ODS Marine, a effectué une inspection d’ingénierie sous l’eau du barrage no 1 de la voie navigable Trent-Severn. Le barrage appartient à Parcs Canada.

[6]               Pendant qu’un plongeur inspectait le compartiment 6 du barrage, son câble ombilical a été happé en raison d’une différence de pression causée par un vide entre les poutrelles, ce qui a eu pour effet d’immobiliser le plongeur contre les poutrelles et d’ainsi causer sa mort.

[7]               Les agents du Programme du travail de Ressources humaines et Développement des compétences Canada ont procédé à une enquête sur l’accident. L’Ag. SS a conclu que le test du sac de sable effectué par l’entreprise de plongée n’a pas été fait suffisamment près des poutrelles, et n’a pas ainsi permis de constater l’existence d’une différence de pression dans cette partie du barrage. En outre, l’g. SS a conclu que Parcs Canada n’avait pas adopté de procédures d’urgence destinées à protéger les personnes à qui le ministère permet l’accès à un lieu de travail, comme l’entreprise de plongée.

[8]               Deux instructions qui faisaient état de six infractions au total ont été émises à Parcs Canada. Les instructions sont rédigées ainsi :

[traduction] DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II – SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 6 octobre 2009, l’agent de santé et de sécurité soussigné a procédé à une enquête sur un accident mortel qui concernait un employé de ODS Marine, un sous-traitant à qui l’accès à un lieu de travail exploité par l’AGENCE PARCS CANADA, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, au 2155 Ashburnham Drive, Peterborough (Ontario)  K9J 6Z6, a été permis, ledit lieu de travail étant parfois désigné comme étant le secteur de Trenton – la voie navigable Trent-Severn – Parcs Canada.

Ledit agent de santé et de sécurité est d’avis qu’il y a eu contravention aux dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail :

No. / No : 1

125.(1)o) – Code canadien du travail, partie II

12.11(2)a) – Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail

L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine, et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de noyade, a omis de veiller à ce qu’un équipement d’urgence soit fourni et tenu en état de fonctionnement.

No. / No : 2

125.(1)o) – Code canadien du travail, partie II

12.11(2)a) –  Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail

L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine, et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de noyade, a omis de veiller à ce que soit présente une personne qualifiée pour faire fonctionner l’équipement d’urgence.

No. / No : 3

125.(1)o) – Code canadien du travail, partie II

12.11(2)d)(i) – Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine, et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de noyade, a omis de faire en sorte que les procédures d’urgence contiennent une description complète des procédures et des responsabilités des personnes à qui est permis l’accès au lieu de travail.

No. / No : 4

125.(1)o) – Code canadien du travail, partie II

12.11(2)d)(ii) – Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine, et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de noyade, a omis de faire en sorte que les procédures d’urgence précisent l’emplacement de l’équipement d’urgence.

No. / No : 5

125.(1)z.14) – Code canadien du travail, partie II

12.15(3) – du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail

L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine, et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de noyade, a omis de faire en sorte que toutes les personnes à qui il permet l’accès au lieu de travail soient informées des procédures d’urgence écrites.

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)a) du Code canadien du travail, partie II, de mettre fin à la contravention sur-le-champ.

En outre, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) du Code canadien du travail, partie II, et dans le délai prescrit par l’agente de santé et de sécurité, de prendre des mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

Fait à Toronto, ce 10e jour de novembre 2009.

Lewis A Jenkins

Agent de santé et de sécurité

Numéro de certificat : ON2098

[9]               La deuxième instruction émise à Parcs Canada se lit ainsi :

[traduction] DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II – SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 6 octobre 2009, l’agent de santé et de sécurité soussigné a procédé à une enquête sur un accident mortel qui concernait un employé de ODS Marine, un sous-traitant à qui l’accès à un lieu de travail exploité par l’AGENCE PARCS CANADA, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, au 2155 Ashburnham Drive, Peterborough (Ontario)  K9J 6Z6, a été permis, ledit lieu de travail étant parfois désigné comme étant le secteur de Trenton – voie navigable Trent-Severn – Parcs Canada.

Ladite agente de santé et de sécurité est d’avis qu’une contravention à la disposition suivante de la partie II du Code canadien du travail a été commise

No. / No : 1

125.(1)z.14) Code canadien du travail, partie II

L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de différences de pression dans l’eau, a omis de prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne — autre qu’un de ses employés — admise dans le lieu de travail les risques connus ou prévisibles auxquels sa santé et sa sécurité pouvaient être exposées;

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ, PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)a) du Code canadien du travail, partie II, de mettre fin sur-le-champ à la contravention.

En outre, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) du Code canadien du travail, partie II, et dans le délai prescrit par l’agente de santé et de sécurité, de prendre des mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

Fait à Toronto, ce 10e jour de novembre 2009.

LEWIS A JENKINS

Agent de santé et de sécurité

Numéro de certificat : ON2098

[10]           L’Ag. SS Misuraca, avec le concours de l’Ag. SS Robert Maklan, a procédé à une enquête supplémentaire le 27 novembre 2009 ou vers cette date. Les Ag. SS ne se sont pas rendus sur les lieux de l’accident, mais ils ont interrogé diverses parties concernées et examiné de nombreux documents. Le 30 août 2010, après avoir achevé l’enquête, l’Ag. SS Misuraca a émis une instruction à TPSGC dans laquelle était mentionnée la violation de l’alinéa 125(1)z.14) du Code :

[traduction] DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II – SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 27 novembre 2009, l’agent de santé et de sécurité soussigné a procédé à une enquête dans un lieu de travail à l’époque sous l’autorité de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC), employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, situé au barrage no 1, voie navigable Trent-Severn, 118 Chester Road, à Trenton (Ontario).

Ledit agent de santé et de sécurité est d’avis qu’une contravention à la disposition suivante de la partie II du Code canadien du travail a été commise.

No. / No : 1

Alinéa 125.(1)z.14) – Code canadien du travail, partie II du

Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève, de prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne — autre qu’un de ses employés — admise dans le lieu de travail les risques connus ou prévisibles auxquels sa santé et sa sécurité peuvent être exposées.

TPSGC a omis, par le truchement de son directeur de projet principal, de veiller à ce qu’une évaluation des risques pour la santé et la sécurité reliées au lieu d travail soit effectuée par l’entrepreneur avant le début des travaux sur le lieu de travail exécutés par des employés d’ODS, que TPSGC avait autorisés à exercer les activités de plongée prévues par le contrat d’offre permanente signé le 9 septembre 2009 par ODS Marine aux fins d’effectuer une inspection du barrage no 1 de la voie navigable Trent‑Severn.

En outre, TPSGC a omis de recevoir, avant le début des travaux, une confirmation écrite de la part de l’entrepreneur susmentionné attestant que ses employés avaient été informés, conformément à l’évaluation de santé et de sécurité susmentionnée, de toutes les évaluations des risques connus ou prévisibles pour la santé et la sécurité et de tous les risques connus ou prévisibles auxquels leur santé et leur sécurité pouvaient être exposées en procédant à l’inspection du barrage audit lieu de travail.

Il en est résulté que les employés de l’entrepreneur n’ont pas été informés des risques mentionnés ci-dessus avant de commencer leur travail.

Par conséquent, je vous ORDONNE PAR LA PRÉSENTE, en vertu de l’alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail, de mettre fin sur-le-champ à la contravention.

En outre, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) du Code canadien du travail, partie II, et dans le délai prescrit par l’agente de santé et de sécurité, de prendre des mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

Fait à Toronto, ce 30e jour du mois d’août 2010.

Francesco Misuraca

Agent de santé et de sécurité

Numéro de certificat : GE1109

Audience

Agents de santé et de sécurité

[11]           Les deux agents de santé et sécurité ont présenté en preuve des rapports détaillés contenant les constatations et les conclusions découlant de leurs enquêtes. Ces rapports font donc partie du dossier et ne seront pas reproduits ici. En outre, ils ont tous les deux témoigné à l’audience et ont été contre-interrogés par l’avocat des appelantes.

[12]           Dans son témoignage, l’Ag. SS Jenkins a confirmé les constatations à l’origine des instructions en cause. Il a conclu que Parcs Canada avait contrevenu au Code et lui a donné des instructions en conséquence.

[13]           En contre-interrogatoire, l’Ag. SS Jenkins a confirmé le fait que ni l’entrepreneur qui offrait les services de plongée (ODS Marine), ni ses employés n’étaient des employés de Parcs Canada ou de TPSGC. La relation entre les parties découlait d’un contrat de service visant l’inspection du barrage.

[14]           Il a également convenu qu’il n’y avait pas eu violation de la partie XVIII (activités de plongée) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail (le Règlement). Il a également reconnu que, s’il y avait eu une violation reliée à la plongée, elle aurait été visée par les dispositions législatives ontariennes, étant donné que l’entreprise de plongée était assujettie à la réglementation provinciale.

[15]           Il a reconnu que l’entreprise de plongée avait élaboré un plan d’urgence et de plongée et qu’elle disposait d’un équipement d’urgence et d’un bateau sur les lieux. Il a également admis que les plongeurs avaient reçu une formation en ce qui concerne les procédures d’urgence ainsi que l’utilisation de l’équipement d’urgence. Il a toutefois ajouté qu’il ne s’était pas attaché à examiner ces aspects, étant donné que, dans les circonstances, les activités de plongée relevaient de la réglementation provinciale.

[16]           L’Ag. SS Jenkins a convenu que ses constatations indiquaient que TPSGC avait examiné le plan d’urgence de l’entreprise de plongée.

[17]           Il a reconnu que le Règlement n’exigeait pas la remise d’une confirmation écrite indiquant que les employés avaient été informés des risques actuels et prévisibles associés au lieu de travail.

[18]           L’Ag. SS Jenkins a convenu que les plongeurs avaient tous signé le plan de plongée. Il a également admis qu’on avait effectué le test du sac de sable, même s’il n’avait pas été effectué correctement. Il a reconnu que des employés de Parcs Canada étaient présents sur le lieu de plongée puisqu’ils étaient chargés de modifier, avec l’équipement prévu, la configuration du barrage en fonction des besoins de l’équipe de plongée. Il a également reconnu qu’il y avait une ligne de communication entre les employés de Parcs Canada et l’équipe de plongée.

[19]           L’Ag. SS Jenkins a également reconnu que ce n’était pas vraiment l’absence d’équipement d’urgence qui n’avait pas permis de sauver la vie du plongeur, mais plutôt le temps qu’il avait fallu pour faire baisser le niveau de l’eau dans le barrage pour essayer de sauver le plongeur immobilisé sous l’eau.

[20]           L’Ag. SS admet qu’il ressort de ses constatations qu’il y avait eu des discussions entre les parties au sujet de la plongée et du plan d’urgence avant le début des activités de plongée. Il a reconnu en outre que d’autres documents figurant dans son rapport montraient que l’entreprise de plongée avait été informée des risques et qu’un plan de plongée et d’urgence avait été préparé à l’avance en fonction de ces risques. L’Ag. SS Jenkins a admis qu’avec le recul, il semble que les exigences de l’alinéa 125(1)z.14) aient été respectées avant l’accident.

[21]           L’Ag. SS Misuraca a témoigné que son enquête avait principalement porté sur le fait que le lieu de travail relevait de TPSGC en raison du contrat conclu avec l’entreprise de plongée.

[22]           L’Ag. SS Misuraca a témoigné que son ministère avait retenu les services de M. Geddes à titre d’expert dans le domaine de la plongée. Il a également convenu avec l’avocat, au cours du contre-interrogatoire, que le rapport et le témoignage de M. Geddes indiquaient que l’entreprise de plongée avait respecté les normes de l’industrie pour ce qui est du plan d’urgence.

[23]           L’Ag. SS Misuraca a déclaré qu’au cours de son enquête, il ne s’était pas rendu sur les lieux de l’accident, mais qu’il avait plutôt eu des entretiens avec les diverses personnes concernées et examiné les documents que l’Ag. SS Jenkins avait réunis.

[24]           Il a admis que la partie XII (Matériel, Équipement, dispositifs, vêtements de sécurité) du Règlement ne s’appliquait pas vraiment aux activités de plongée, étant donné qu’elle concernait davantage les chutes accidentelles dans l’eau. Il a toutefois fait remarquer que le risque mentionné dans son instruction portait sur le risque que représentait une différence de pression de l’eau. L’Ag. SS Misuraca a reconnu que tous les plongeurs étaient certifiés et qu’ils avaient signé le plan d’urgence pour indiquer qu’ils étaient au courant des risques.

[25]           Il a reconnu que le plan de plongée mentionnait que, si le courant était trop fort ou s’il existait une différence de pression dans l’eau, l’équipe de plongée devait utiliser une caméra fixée sur une perche au lieu de demander à un plongeur de pénétrer dans l’eau.

[26]           L’Ag. SS Misuraca a affirmé qu’il croit aujourd’hui que les plongeurs étaient au courant du risque qu’il y ait des différences de pression dans l’eau parce qu’il semble, d’après les documents fournis, qu’ils en avaient été informés par TPSGC. Il a admis qu’il incombait à l’entreprise / équipe de plongée d’effectuer correctement le test du sac de sable. Il n’a toutefois pas admis que le but réel de son instruction, à savoir l’obligation de fournir des renseignements complets au sujet du risque, avait été respecté. Il a maintenu que TPSGC aurait pu prévoir d’autres solutions pour réduire le risque en question.

[27]           L’appelante a cité huit témoins :

                             i.          M. Jack Alexander, conseiller spécial pour les biens immobiliers. Au moment de l’accident, il était directeur des opérations du canal.

                           ii.          M. Dave Lawrence, directeur de projet pour TPSGC. Au moment de l’accident, il était un ingénieur principal pour Parcs Canada, pour ce qui est de la voie navigable Trent Severn.

                         iii.          M. John Mazhar, ingénieur (à la retraite). Au moment de l’accident, il avait été embauché par TPSGC comme directeur de projet pour la réparation de tous les barrages de la voie navigable Trent Severn.

                         iv.          M. Brad Graham, maître-éclusier de l’écluse no 1 de la voie navigable Trent Severn.

                           v.          M. Jacques Béland, ingénieur, directeur de projet pour TPSGC.

                         vi.          M. Dave Geddes, professeur de plongée commerciale (à la retraite), consultant, plongée marine.

                       vii.          M. Cam Holliday, directeur régional de Santé et la Sécurité au travail (TPSGC).

                     viii.          M. Luc Beriault, ingénieur civil en structures marines pour TPSGC.

Question en litige

 

[28]           La question à trancher dans la présente affaire est de savoir si les agents de santé et sécurité Jenkins et Misuraca ont commis une erreur en donnant les instructions susmentionnées, respectivement, à Parcs Canada et à TPSGC.

[29]           La première partie de la présente décision traite de la question des renseignements relatifs au risque, dans ses rapports avec les infractions prévues à l’alinéa 125(l)z.14) du Code, et qui était mentionnée dans les instructions données à Parcs Canada et à TPSGC.

[30]           La seconde partie de la seconde décision traite de la question de l’observation des normes réglementaires en matière de protection contre les incendies et de mesures d’urgence, dans ses rapports avec les cinq infractions prévues à la partie XII du Règlement, qui figuraient dans l’instruction donnée à Parcs Canada.

Partie 1 – Les infractions à l’alinéa 125(1)z.14)

Observations de l’appelante

Omission de porter à l’attention des intéressés tous les risques connus ou prévisibles

[31]           M. Richard Fader, avocat de l’appelante, affirme que l’Ag. SS Misuraca a en réalité mal interprété les faits et mal appliqué la disposition citée. Il soutient que le Code exigeait que TPSGC informe ODS Marine des « risques connus ou prévisibles auxquels » la santé et la sécurité de ses employés peuvent être exposées. M. Fader affirme que les preuves établissent de façon convaincante que TPSGC a respecté ces obligations.

[32]           M. Fader soutient, que lorsqu’il a élaboré son instruction, l’Ag. SS a ajouté les éléments suivants aux exigences de l’alinéa 125(1)z.14) :

[traduction] (TPSGC, par l’intermédiaire de son directeur principal de projet) a omis de veiller à ce que l’entrepreneur effectue une évaluation du risque pour la santé et la sécurité associé au lieu de travail, avant le commencement des travaux […].

(En outre, TPSGC) a omis de recevoir, avant le commencement des travaux, une confirmation écrite provenant de l’entrepreneur susmentionné déclarant que ses employés avaient été informés, en se fondant sur l’évaluation relative à la santé et à la sécurité susmentionnée, de toutes les évaluations des risques connus ou prévisibles pour la santé et la sécurité, de tous les risques connus et prévisibles pour la santé et la sécurité auxquels ils pouvaient être exposés en procédant à l’inspection du barrage sur ledit lieu de travail [souligné par M. Fader].

[33]           M. Fader affirme que le Code n’exige pas que TPSGC ou Parcs Canada veillent à ce que l’entrepreneur effectue une évaluation de la santé et sécurité associée au lieu de travail avant le début des travaux. Le Code oblige TPSGC et Parcs Canada à « prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne, autre qu’un de [leurs] employés – admise dans les lieux de travail, les risques connus ou prévisibles auxquels sa santé et sa sécurité peuvent être exposées ». À son avis, les preuves démontrent amplement que Parcs Canada et TPSGC ont respecté cette obligation.

[34]           Il pense que l’exigence imposée par l’Ag. SS est une exigence technique qui n’est pas prévue par la loi et qui n’a aucune conséquence pratique pour la présente affaire, étant donné qu’ODS Marine et ses plongeurs connaissaient tous les risques connus ou prévisibles touchant la santé et la sécurité existant sur le lieu de travail. Il a affirmé que l’instruction de l’Ag. SS n’était pas conforme aux dispositions pertinentes du Code et devait donc être annulée.

[35]           Il soutient en outre que ni le Code ni le Règlement n’exigent que toutes les personnes admises dans le lieu de travail soient informées « par écrit » de tous les risques connus ou prévisibles auxquels leur santé et leur sécurité peuvent être exposées. L’Ag. SS a également déclaré que l’employeur devait obtenir une « confirmation écrite » de la part de l’entrepreneur indiquant que les employés avaient été informés de ces risques. M. Fader soutient que l’Ag. SS a ainsi ajouté un élément à l’alinéa 125(1)z.14). Il prétend que, si le législateur avait voulu imposer une telle exigence, il l’aurait inscrite dans le texte de la loi. Il soutient que, par conséquent, l’instruction de l’Ag. SS est incompatible avec les dispositions pertinentes du Code et doit donc être annulée.

[36]           M. Fader soutient que l’Ag. SS a continué d’affirmer que l’alinéa 125(1)z.14) obligeait TPSGC non seulement à mentionner les risques que posaient les différences de pression de l’eau, mais également à informer ODS Marine des techniques permettant de gérer ce risque. Il affirme que pour les appelantes, cette mesure n’est pas exigée par le Code. Si le législateur avait voulu inclure la description des techniques destinées à gérer le risque identifié, il l’aurait fait expressément à l’alinéa 125(1)z.14). Toutefois, il soutient que le Code exige uniquement de « porter à l’attention » de toute personne les risques connus ou prévisibles. L’Ag. SS a ajouté des exigences au Code et son instruction doit donc être annulée.

[37]           M. Fader a fait remarquer que, dans son instruction, l’Ag. SS Jenkins ne mentionne pas les mêmes exigences que celles mentionnées par l’Ag. SS Misuraca. En fait, en contre-interrogatoire, l’Ag. SS Jenkins a admis qu’il n’était pas exigé que l’information en question soit transmise par écrit.

[38]           Il affirme que les preuves établissent clairement que toutes les personnes admises dans le lieu de travail ont été informées des risques connus ou prévisibles auxquels leur santé ou la sécurité pouvaient être exposées, y compris des risques liés aux différences de pression de l’eau.

[39]           M. Fader déclare qu’il ressort clairement des instructions et du témoignage des deux Ag. SS que le risque pour la santé et la sécurité tenait à la différence de pression de l’eau. C’est la question sur laquelle reposent les deux instructions et c’est dans le contexte de ce risque qu’il faut effectuer l’analyse de l’alinéa 125(1)z.14). Il s’agit de savoir si TPSGC et Parcs Canada ont pris toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne admise dans le lieu de travail les risques que représente une différence de pression dans l’eau dans l’exercice des activités de plongée au barrage no 1.

[40]           M. Fader mentionne que la preuve indique que, dans le cadre du processus d’appel d’offres, TPSGC a publié un énoncé de travail. Le document contient trois éléments qui concernent le présent appel :

·         « Le propriétaire (Parcs Canada) déplacera les poutrelles pour permettre l’exécution du travail des plongeurs, selon les besoins ». Le fait que des employés de Parcs Canada étaient prêts à prendre les mesures demandées par ODS, selon les besoins, est un thème que l’on retrouve dans l’ensemble des témoignages.

·         « Les activités de plongée doivent être exercées par une entreprise de plongée commerciale et compétente qui connaît le travail qu’exigent les barrages ». Les preuves démontrent que cette exigence a été respectée.

·         Enfin, l’énoncé de travail demande également la préparation d’un plan de santé et de sécurité concernant le lieu de travail prévu. Là aussi, les preuves indiquent clairement qu’un tel plan était en place au moment de l’accident.

[41]           M. Fader fait remarquer que l’Ag. SS Misuraca a confirmé que la demande de proposition a été envoyée à ODS Marine par courriel de la part de TPSGC et que les témoignages montrent qu’une demande de proposition modifiée a été transmise par courriel à ODS Marine avec la modification suivante :

[traduction]

Q4 : Que se passera-t-il si les poutrelles n’arrivent pas à contenir suffisamment l’écoulement de l’eau pour assurer la sécurité de l’inspection?

R4 : Dans les secteurs où les poutrelles ne peuvent contrôler l’écoulement de l’eau au point où la sécurité des plongeurs est compromise, l’entrepreneur sera tenu d’utiliser une caméra sous-marine fixée sur une perche pour inspecter ces secteurs.

[42]           M. Fader fait remarquer que les témoignages confirment qu’il y a eu des discussions avec ODS Marine au sujet des questions de sécurité générale. En outre, les témoignages de Luc Beriault (TPSGC) ont confirmé qu’il y avait eu une réunion avec ODS Marine au cours de laquelle les représentants de cette entreprise avaient été informés du fait qu’il existait des espaces entre les poutrelles à cause de la présence de débris et de l’usure de ces éléments et que cela créait un certain courant.

[43]           Il note également que tous les documents présentés en preuve montrent que l’entreprise de plongée a effectué une analyse des risques associés aux travaux et a correctement identifié le risque dont il est question dans le présent appel. Ce document a été transmis à TPSGC avant les plongées et a pu donner aux agents de ce ministère l’impression que cette entreprise et ses plongeurs connaissaient bien le risque lié à une différence de pression négative.

[44]           M. Fader mentionne également que le plan d’urgence de l’entreprise, qui a été déposé en preuve et communiqué à TPSGC avant la plongée, a été lu et signé par tous les membres de l’équipe de plongée. Le plan indiquait que le superviseur de la plongée était Mike Chard et que Luc Beriault était simplement le représentant du client. Le plan prévoyait clairement la possibilité de mettre fin à la plongée. Le plan mentionnait également expressément ce qui suit : [traduction] « RISQUES PARTICULIERS : Structure de régulation des eaux – Veillez à disposer d’un sac pour effectuer le test du sac de sable dans le secteur concerné avant que le plongeur entre dans l’eau. »

[45]           M. Fader affirme que, même s’il s’agissait là du seul document présenté en preuve, il montre que toute personne admise dans le lieu de travail était au courant du risque mentionné dans les instructions des agents de santé et de sécurité. Le document mentionnait également [traduction] « Protection des travailleurs exigée : Oui », et « Contact : Brad Graham (canal à vannes / niveau de l’eau) ». Cela montre clairement que l’équipe de plongée disposait d’une ligne de communication avec Brad Graham (Parcs Canada) pour pouvoir travailler dans les canaux à vannes ou modifier le niveau de l’eau pour assurer la sécurité du plongeur. Cette exigence avait donc été respectée

[46]           Il note qu’un plan de sauvetage et d’urgence est joint à ce plan, où, encore une fois, Mike Chard, le représentant d’ODS Marine, figure à titre de superviseur et Luc Beriault à celui de représentant du client.

[47]           M. Fader fait remarquer que le document est signé par tous les membres de l’équipe de plongée. Il est encore une fois clair que les personnes admises dans le lieu de travail connaissaient le risque en cause dans le présent appel, c’est-à-dire la différence de pression de l’eau. Il est également clair que l’équipe de plongée connaissait l’existence d’une ligne de communication avec Brad Graham.

[48]           En outre, M. Fader indique que le Plan de sauvetage et d’urgence contenait également l’avis exigé par le ministère du Travail de l’Ontario ainsi que l’avis donné au Service d’incendie de Quinte West. Ce Plan de sauvetage et d’urgence donne à penser que toutes les personnes admises dans le lieu de travail connaissaient les risques connus ou prévisibles.

[49]           D’après lui, le Guide des procédures et des politiques d’ODS Marine porterait à tout lecteur raisonnable à croire qu’il s’agit là d’une entreprise de plongée spécialisée, tout à fait en mesure d’exécuter en sécurité le travail qui devait être effectué au barrage no 1. M. Fader estime qu’il est intéressant de noter que « surveillant » est défini comme étant la personne responsable du lieu de travail qui peut donner des ordres aux travailleurs. La politique contient des procédures spéciales concernant « Les risques associés aux courants » et mentionne qu’« il est interdit de plongée lorsque le courant est dangereux » et :

Il faut procéder au test du sac de sable pour préciser les risques associés à « Delta P » [différence de pression] avant que le ou les plongeurs entrent dans l’eau lorsqu’il existe un risque associé à l’écoulement de l’eau pour les plongeurs, notamment, près des structures de régulation des eaux, des prises d’eau, etc.

[50]           M. Fader mentionne également que le rapport d’accident préparé par ODS Marine confirme que l’équipe de plongeurs était au courant du fait que de l’eau s’écoulait du compartiment 6, celle où s’est produit l’accident :

[traduction]  Le plongeur et l’équipe de surface avaient été préalablement informés du fait qu’il y avait un fort courant sortant du compartiment 6 parce qu’ils pouvaient voir l’eau s’écouler en aval des poutrelles.

[Le plongeur] a confirmé qu’il y avait un fort courant parce qu’il avait attaché son bâton à une petite ficelle longue d’un mètre qui était l’outil qu’il transportait avec lui à cette fin. Le plongeur a parlé avec l’équipe de surface des courants et il a déclaré que le débit était trop rapide pour pouvoir travailler en sécurité et ils ont donc convenu de ne pas inspecter ce compartiment.

[51]           M. Fader note que le rapport d’incident mentionne que le directeur des opérations d’ODS Marine, Ken Rule, avait déclaré avoir rencontré Jacques Béland et Luc Beriault (TPSGC) le 24 septembre 2009, et qu’ils avaient abordé la question de la sécurité du travail. Le rapport mentionne ce qui suit :

[traduction]  Parler du risque de fuite au barrage […]. J’ai abordé cette question avec notre équipe de plongée et nous avons décidé d’évaluer les conditions de travail, d’effectuer le test du sac de sable et de définir une zone de travail sécuritaire avant d’entrer dans l’eau.

Il est clair qu’ODS et l’équipe de plongée savaient, bien avant la plongée, qu’il existait un risque lié à une différence de pression négative dans l’eau. Il ressort également clairement de ce document que TPSGC avait examiné les plans de santé et de sécurité d’ODS Marine et que l’éclusier-maître de Parcs Canada et son équipe [traduction] « nous ont beaucoup aidés à veiller à ce que les poutrelles soient déplacées pour pouvoir toujours dégager deux compartiments conformément au plan ».

[52]           M. Fader affirme qu’en réalité les Ag. SS Jenkins et Misuraca ont confirmé dans leur témoignage qu’ils avaient compris que l’équipe de plongée était au courant du risque et avait décidé de ne pas inspecter le compartiment 6.

[53]           M. Fader cite en particulier le témoignage de M. Geddes qui a déclaré que la chaîne de commandement est un aspect essentiel dans une activité de plongée et qu’il était clair que Mike Chard d’ODS Marine était le superviseur de plongée pour les activités en question. M. Geddes a confirmé dans son témoignage les conclusions suivantes qui se retrouvent dans son rapport :

[traduction]  En ce qui concerne ce qui précède, j’estime que Parcs Canada et Travaux publics et Services gouvernementaux ont respecté les normes actuelles applicables à cette activité pour ce qui est d’identifier et d’informer des risques l’employeur, ODS Marine. En outre, Parcs Canada et Travaux publics et Services gouvernementaux ont également suivi les pratiques actuelles de l’industrie pour ce qui est de veiller à ce que l’équipe de plongée ait reçu la formation nécessaire et possède les compétences nécessaires pour effectuer le travail.

[54]           M. Fader souligne qu’il est important de signaler que M. Geddes a préparé ce rapport non pas à l’intention de TPSGC ou de Parcs Canada, mais de l’Ag. SS Misuraca. Le propre expert de l’Ag. SS contredit son instruction. Il ressort clairement du rapport de l’expert que TPSGC et Parcs Canada ont respecté les normes de l’industrie pour ce qui est d’informer ODS Marine des risques présents.

[55]           M. Fader conclu que, compte tenu des exigences précises du Code, en ce qui touche les deux instructions en question, il faut se demander si TPSGC et Parcs Canada ont pris toutes les précautions nécessaires pour que soit porté à l’attention de toute personne admise dans le lieu de travail le risque que représentent les différences de pression dans l’eau lorsqu’ont été exécutées les activités de plongée au barrage no 1.

[56]           M. Fader affirme que, pendant son contre-interrogatoire et après avoir revu toutes les preuves déterminantes décrites ci-dessus, l’Ag.SS Jenkins a admis que TPSGC et Parcs Canada [traduction] « semblaient avoir respecté leurs obligations ».

[57]           Les appelantes demandent par conséquent que les deux instructions soient intégralement annulées.

Analyse

[58]           L’instruction donnée par l’Ag. SS Jenkins à Parcs Canada le 10 novembre 2009, aux termes de l’alinéa 125(l)z.14) du Code, se lit en partie comme suit :

[traduction]  L’Agence Parcs Canada, propriétaire du barrage no 1 situé sur la voie navigable Trent-Severn, à Trenton (Ontario), lieu de travail où l’Agence a permis l’accès à des employés d’ODS Marine et où par la suite un employé d’ODS Marine a été exposé à un risque de différences de pression dans l’eau, a omis de prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne — autre qu’un de ses employés — admise dans le lieu de travail les risques connus ou prévisibles auxquels sa santé et sa sécurité pouvaient être exposées;

[59]           L’instruction donnée par l’Ag. SS Francesco Misuraca à TPSGC le 30 août 2010, aux termes de l’alinéa 125(l)z.14) du Code, se lit en partie comme suit :

TPSGC a omis, par le truchement de son directeur de projet principal, de veiller à ce qu’une évaluation des risques pour la santé et la sécurité reliées au lieu de travail soit effectuée par l’entrepreneur avant le début des travaux sur le lieu de travail exécutés par des employés d’ODS, que TPSGC avait autorisés à exercer les activités de plongée prévues par le contrat d’offre permanente signé le 9 septembre 2009 par ODS Marine aux fins d’effectuer une inspection du barrage no 1 de la voie navigable Trent‑Severn.

En outre, TPSGC a omis de recevoir, avant le début des travaux, une confirmation écrite de la part de l’entrepreneur susmentionné attestant que ses employés avaient été informés, conformément à l’évaluation de santé et de sécurité susmentionnée, de toutes les évaluations des risques connus ou prévisibles pour la santé et la sécurité et de tous les risques connus ou prévisibles auxquels leur santé et leur sécurité pouvaient être exposées en procédant à l’inspection du barrage audit lieu de travail. 

Il en est résulté que les employés de l’entrepreneur n’ont pas été informés des risques mentionnés ci-dessus avant de commencer leur travail. [Non souligné dans l’original.]

[60]           Je retiens les éléments suivants en ce qui concerne cette question :

·         Il y avait un énoncé de travailFootnote 1  qui précisait ce qui suit :

                                                              i.      des employés de Parcs Canada étaient prêts à reconfigurer le barrage selon les besoins;

                                                            ii.      les activités de plongée devaient être menées par une entreprise de plongée commerciale et compétente;

                                                          iii.      l’entrepreneur était tenu de fournir un plan de santé et de sécurité correspondant au site prévu.

·         Une demande de proposition modifiéeFootnote 2  a été envoyée expressément par courriel à ODS Marine et contenait la modification suivante :

[traduction]

Q4 : Que se passera-t-il si les poutrelles n’arrivent pas à contenir suffisamment l’écoulement de l’eau pour assurer la sécurité de l’inspection?

R4 : Dans les secteurs où les poutrelles ne peuvent contrôler l’écoulement de l’eau au point où la sécurité des plongeurs est compromise, l’entrepreneur sera tenu d’utiliser une caméra sous-marine fixée sur une perche pour inspecter ces secteurs.

·         Les témoignagesFootnote 3  ont confirmé qu’il y avait eu des discussions avec les représentants d’ODS Marine au sujet des questions de sécurité générale, y compris le risque de différences de pression, un grave danger pour les activités de plongée.

·         Les témoignages et les preuvesFootnote 4  confirment également qu’ODS Marine avait effectué une analyse des risques associés au travail à effectuer et a correctement isolé le risque (différence de pression de l’eau) en cause dans la présente affaire.

·         ODS Marine a fourni un Plan de sauvetage et d’urgenceFootnote 5 , qui avait été signé par tous les plongeurs présents sur le lieu de travail. Le plan portait directement sur le risque relié à la structure du barrage qui était susceptible de créer des différences de pression. Ce risque a été examiné de façon détaillée et il a été mentionné qu’il fallait effectuer le test du sac de sable avant de procéder à une plongée.

·         L’expertFootnote 6  en plongée commerciale, dont les services avaient été retenus par l’Ag. SS, mentionnait dans son rapport que TPSGC avait suivi la norme habituelle de ce secteur pour ce qui est de la détermination du risque associé au lieu de travail et de la transmission de cette information à ODS Marine. Il a ajouté que Parcs Canada et TPSGC avaient également suivi les pratiques habituelles de l’industrie pour ce qui est de veiller à ce que l’équipe de plongée soit composée de personnes ayant suivi une formation appropriée et capables d’effectuer le travail.

·         Les agents de santé et sécurité Jenkins et Misuraca ont confirmé dans leur témoignage qu’ils avaient compris que l’équipe connaissait l’existence de ce risque et avaient décidé de ne pas examiner le compartiment 6.

[61]           D’après ce qui précède, je conclus que Parcs Canada a respecté les exigences du Code pour ce qui est de porter à l’attention des personnes présentes (ODS Marine) les risques connus ou prévisibles en matière de santé et de sécurité avant le début de l’exécution du contrat de service de plongée. C’est la raison pour laquelle j’annule l’instruction donnée aux termes de l’alinéa 125(1)z.14) par l’Ag. SS Jenkins à Parcs Canada le 10 novembre 2009.

[62]           Je conclus aussi, en me fondant sur ce qui précède, que TPSGC a également respecté l’exigence du Code pour ce qui est de porter à l’attention de toute personne présente (ODS Marine) les risques connus ou prévisibles en matière de sécurité avant le début de l’exécution du contrat de service de plongée. C’est la raison pour laquelle j’annule également l’instruction donnée aux termes de l’alinéa 125(1)z.14) par l’Ag. SS Misuraca à TPSGC le 30 août 2010.

[63]           Pour ce qui est des deux exigences supplémentaires contenues dans l’instruction donnée par l’Ag. SS Misuraca à TPSGC, à savoir :

·         TPSGC a omis de veiller à ce que l’entrepreneur effectue une évaluation du risque pour la santé et la sécurité associé au lieu de travail, avant le commencement des travaux;

·         et en outre, TPSGC a omis de recevoir, avant le commencement des travaux, une confirmation écrite provenant de l’entrepreneur susmentionné déclarant que ses employés avaient été informés de tous les risques connus et prévisibles pour la santé et la sécurité auxquels ils pouvaient être exposés en procédant à l’inspection du barrage no 1. 

[64]           Je conviens avec M. Fader que ces mesures ne sont pas expressément exigées par le Code. Le Code énonce que l’employeur doit prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne admise dans le lieu de travail les risques connus ou prévisibles. Il n’est pas exigé que toutes ces personnes (dans cette affaire, les employés d’ODS Marine) effectuent une évaluation des risques. J’estime que cette obligation d’effectuer une évaluation des risques incombe aux employeurs (Parcs Canada et TPSGC) qui doivent veiller à cerner les risques connus ou prévisibles associés au lieu de travail en question pour être ainsi en mesure de les porter à l’attention de toutes les personnes admises dans le lieu de travail.

[65]           En outre, je conclus que le Code n’exige pas que l’employeur reçoive une confirmation écrite des personnes se trouvant dans le lieu de travail indiquant qu’elles ont été informées des risques connus et prévisibles.

Partie 2 – Les infractions prévues aux alinéas 125(1)o), 125(1)z.14) et à la partie XII du Règlement, telles qu’exposées dans les instructions données à Parcs Canada

Observations de l’appelante

[66]           M. Fader soutient que l’alinéa 125(1)o) du Code et les articles du Règlement invoqués par l’Ag. SS s’appliquent à l’employeur et à ses employés. Il souligne qu’il n’y a pas de relations employeur-employé entre Parcs Canada et les employés d’ODS Marine. C’est pourquoi il soutient que ces dispositions ne s’appliquent pas à la présente affaire.

[67]           M. Fader soutient en outre que l’article 12.11 du Règlement ne s’applique pas aux risques de noyade associés à la plongée. La partie XVIII s’applique à la présente affaire et constitue un code complet en matière de plongée. À son avis, l’article 12.11 serait sans objet s’il devait être interprété comme s’il s’appliquait au risque de noyade au cours d’une plongée. M. Fader cite le passage suivant d’un arrêt récent de la Cour d’appel fédérale qui souligne qu’une disposition législative doit s’interpréter dans un contexte global et que les mots ne doivent pas être interprétés de façon isolée :

[…] Ainsi que le souligne Sullivan, [traduction]  « Avant de pouvoir se prononcer sur la clarté des mots à interpréter, les interprètes doivent tenir compte du contexte global dans le cadre duquel ces mots s’inscrivent » [...]. Le juge Bastarache écrit par ailleurs ce qui suit dans l’arrêt ATCO Gas and Pipeline Ltd. c. Alberta (Energy and Utility Board), [2006] 1 R.C.S. 140, au paragraphe 48 :

Notre Cour a affirmé maintes fois que le sens grammatical et ordinaire d’une disposition n’est pas déterminant et ne met pas fin à l’analyse. Il faut tenir compte du contexte global de la disposition, même si, à première vue, le sens de son libellé peut paraître évident. [Non souligné dans l’original.]

Toute loi s’interprète de la façon la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objetFootnote 7 .

[68]           M. Fader affirme que l’article 12.11 du Règlement se trouve dans la partie intitulée « Équipement de sauvetage ». Il fait remarquer que le paragraphe 12.11(l) prévoit que l’employeur doit fournir des gilets de sauvetage et des filets de sécurité. Il est clair que ces objets ne s’appliquent aucunement à des activités de plongée. Il estime que cela vient du fait que l’article 12.11 tout entier vise la noyade accidentelle et ne s’applique pas dans le contexte des activités de plongée. C’est la raison pour laquelle il soutient que l’instruction en cause doit être annulée intégralement. Il fait remarquer qu’il importe de signaler qu’en contre-interrogatoire l’Ag. SS Jenkins a admis que l’article 12.11 du Règlement ne s’appliquait pas aux activités de plongée.

[69]           Il informe le Tribunal que même si ce point n’est pas en litige dans le présent appel, il importe de faire remarquer que Parcs Canada possède de l’équipement et des procédures qui visent les chutes accidentelles. Il ressort du témoignage de Jack Alexander que Parcs Canada possédait de l’équipement d’urgence pour les chutes accidentelles. Parcs Canada possède un dispositif de flottaison, attaché à une corde qui peut être lancé à la personne en danger pour faciliter le sauvetage. Il existe en amont du barrage un câble destiné à empêcher les bateaux de s’approcher du barrage. Parcs Canada a adopté une politique intitulée « Précautions à prendre contre les noyades ».

Analyse

[70]           L’article du Code applicable aux contraventions nos 1 à 4 de la première instruction donnée à Parcs Canada est le suivant :

125(1) Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève

o) de se conformer aux normes réglementaires en matière de prévention des incendies et de mesures d’urgence;

[71]           L’article du Code applicable à la contravention no 5 de la première instruction donnée à Parcs Canada est le suivant :

125(1) Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève :

z.14) de prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne - autre qu’un de ses employés - admise dans le lieu de travail les risques connus ou prévisibles concernant sa santé et sa sécurité auxquels elle peut être exposée.

Les parties applicables de la partie XII du Règlement sur laquelle l’Ag. SS s’est basé pour donner son instruction à Parcs Canada sont ainsi conçues :

·      Alinéas 12.11(2)a) et b) du Règlement :

12.11(2) Lorsque, dans le lieu de travail, il y a risque de noyade :

a) de l’équipement d’urgence doit être fourni et tenu en état de fonctionnement;

b) une personne qualifiée pouvant faire fonctionner l’équipement d’urgence doit être disponible;

·      Sous-alinéas 12.11(2)d)(i) et (ii) du Règlement :

12.11(2) Lorsque, dans le lieu de travail, il y a risque de noyade :

d) l’employeur doit établir par écrit des procédures d’urgence qui contiennent les renseignements suivants :

(i) une description complète des procédures à suivre, y compris les responsabilités des personnes à qui est permis l’accès au lieu de travail;

(ii) l’emplacement de l’équipement d’urgence.

·      Paragraphe 12.15(3) du Règlement :

12.15(3) Toute personne à qui est permis l’accès au lieu de travail doit recevoir une formation sur les procédures d’urgence écrites visées à l’alinéa 12.11(2)d).

Pour ce qui est de l’argument de M. Fader selon lequel l’alinéa 125(1)o) ne s’applique pas en l’espèce, je note que les plongeurs d’ODS Marine n’étaient pas des employés de Parcs Canada. Cela dit, si on lit la disposition dans son ensemble, je conclus toutefois que la partie XII du Règlement s’applique non seulement à la protection des employés, mais également à celle de toute personne admise dans le lieu de travail comme l’énonce l’article 12.1 du Règlement :

12.1 Toute personne à qui est permis l’accès au lieu de travail doit utiliser l’équipement de protection réglementaire visé par la présente partie dans les cas suivants :

a)       lorsqu’il est en pratique impossible d’éliminer ou de maintenir à un niveau sécuritaire le risque que le lieu de travail présente pour la santé ou la sécurité;

b)       lorsque l’utilisation de l’équipement de protection peut empêcher une blessure ou en diminuer la gravité.

[Non souligné dans l’original.]

[72]           À la lecture des dispositions de la partie XII du Règlement, il est clair que celles‑ci ont pour but de protéger les employés et les personnes au moyen d’un équipement de protection contre les risques professionnels lorsqu’il est en pratique impossible d’éliminer ou de maintenir à un niveau sécuritaire le risque que le lieu de travail présente pour la santé et la sécurité. Le Règlement prévoit l’utilisation de casques protecteurs, la protection de la peau et un équipement de sauvetage. D’une façon générale, ces dispositions s’appliquent à tous les types d’équipement de protection contre les risques pour la santé et la sécurité dans le lieu de travail, lorsqu’ils existent.

[73]           Cependant, même si l’on peut dire que la partie XII du Règlement impose des obligations à Parcs Canada à l’égard de personnes autres que ses employés, je conviens avec l’appelante que le fait que l’Ag. SS ait choisi dans cette affaire la partie XII pour fonder les contraventions contre Parcs Canada fait problème. Les dispositions expresses citées par l’Ag. SS, soit les articles 12.11 et 12.15 du Règlement, traitent du risque de noyade accidentelle. Le paragraphe 12.11(2), par exemple, vient immédiatement après le paragraphe 12.11(1) qui impose à l’employeur l’obligation de fournir à toute personne un gilet de sauvetage lorsqu’il y a un risque de noyade. Cependant, l’aspect qui est véritablement à la base de la décision de l’Ag. SS, comme le montre son témoignage, est l’existence d’une différence de pression, et non pas l’obligation générale de protéger contre la noyade qui pourrait découler, par exemple, d’une chute accidentelle d’une personne se trouvant dans le lieu de travail.

[74]           Sur ce point, il est clair que la partie XVIII du Règlement traite de façon exhaustive des risques reliés aux activités de plongée. Plus précisément, la partie XVIII fait référence aux employeurs et aux employés qui participent à des activités de plongée. C’est un cadre réglementaire complet qui s’applique au type d’activités qui est au cœur de la présente affaire. La partie XVIII touche tous les aspects de la sécurité des plongées, comme les méthodes écrites, la formation et l’entraînement, les risques associés au plan de plongée (article 18.21) jusqu’à l’équipement de plongée et d’autres aspects comme l’interruption d’une plongée, voire même le voyage aérien après une plongée. Par exemple, la partie XVIII traite expressément des sujets suivants :

·         l’obligation pour l’employeur d’établir par écrit les méthodes et les exigences que doivent observer les employés affectés aux activités de plongée qui doivent être appliquées afin de contrer les dangers connus, y compris les courants dangereux (alinéa 18.4(1)b)) et de prévoir les situations d’urgence et l’évacuation des membres de l’équipe de plongée (alinéa 18.4(1)c));

·         l’obligation d’établir un plan de plongée énonçant les conditions et les risques en surface et sous l’eau susceptibles de survenir, y compris ceux reliés aux différences de pression sous l’eau et qui précise les fonctions de chaque membre de l’équipe de plongée, les procédures d’urgence à suivre ainsi que les circonstances nécessitant l’interruption de la plongée (paragraphe 18.9(1));

·         l’obligation pour le chef de plongée de veiller à ce que tous les membres de l’équipe de plongée connaissent bien le plan de plongée, comprennent les tâches à accomplir, y compris les procédures à suivre en cas d’urgence (articles 18.19 et 18.20).

[75]           Autrement dit, la partie XVIII du Règlement porte expressément sur les activités de plongée et tout ce qu’elles impliquent. Il est toutefois important de noter que la partie XVIII n’a pas été invoquée contre Parcs Canada, et aussi que, pour ce qui est de l’accident à l’origine des instructions données en l’espèce, le dossier indique que c’est ODS Marine qui a fait l’objet, à titre d’employeur relevant de la province, de poursuites aux termes des dispositions de la loi provinciale en matière de santé et sécurité au travail dans le domaine de la plongée.

[76]           Par conséquent, l’aspect extrêmement technique des activités de plongée fait partie d’un domaine qui est visé par la partie XVIII et qui s’applique à un employeur exerçant des activités de plongée. La partie XII du Règlement, dont la portée n’englobe aucunement les activités de plongée, n’était pas le cadre approprié pour examiner ce type d’activité.

[77]           Cela dit, j’admets toutefois que les employés d’ODS Marine pouvaient courir le risque d’une chute accidentelle en raison de leur présence sur le site –ce qui imposait à Parcs Canada l’obligation, prévue dans la partie XII du Règlement, de veiller à établir une protection contre ce risque particulier. À mon avis, le témoignage de M. Alexander et le dossier indiquent que Parcs Canada s’est acquittée de cette obligation. Plus précisément, le dossier montre que Parcs Canada avait adopté une politique intitulée « Précautions contre les noyades »Footnote 8 , qui était assimilable à des méthodes d’urgence écrites et qui contenait les éléments suivants : 

·      l’obligation de fournir de l’équipement d’urgence, et de préciser son emplacement, à savoir des bouées de sauvetage équipées d’un filin ainsi que des gaffes;

·      l’obligation de fournir à tout le personnel et, par exemple, aux étudiants, une formation pour l’utilisation de tout l’équipement de sécurité et pour porter à leur attention les procédures prévues;

·      une procédure précise que doit suivre le personnel en cas de chute dans l’eau;

·      l’obligation d’afficher bien en vue les numéros de téléphone d’urgence;

·      l’obligation d’installer des pancartes, lorsque cela est nécessaire, pour contrôler les activités réglementées.

[78]           Il est toutefois important de noter en l’espèce qu’en plus des méthodes et de l’équipement que Parcs Canada avait mis en place comme cela a été mentionné ci-dessus, ODS Marine avait également adopté ses propres procédures d’urgence visant le risque d’une chute ou d’une noyade accidentelle, lesquelles ont été remises à TPSGC avant la plongée des 1re et 2 octobre 2009. 

[79]           Sur ce point, je note ce qui suit dans la liste de vérification de l’équipement du Plan de sauvetage et d’urgence d’ODS MarineFootnote 9 . Les domaines abordés par ODS Marine concernaient chacune des contraventions mentionnées par l’Ag. SS qui touchent le risque de noyade assujetti à la partie XII du Règlement :

·      omission de veiller à ce que l’équipement d’urgence soit fourni et en état de fonctionnement (alinéa 12.11(2)a) du Règlement) : en plus de l’équipement fourni par Parcs Canada mentionné ci-dessus, le Plan de sauvetage et d’urgence d’ODS Marine mentionnait un bateau de sécurité, un filin, une bouée de sauvetage et une gaffe. Il était mentionné que cet équipement devait être utilisé dès qu’une personne tombait à l’eau;

·      omission de veiller à ce qu’une personne qualifiée pouvant faire fonctionner l’équipement d’urgence soit disponible (alinéa 12.11(2)b) du Règlement) : à part le fait qu’une équipe de surface était en mesure d’utiliser l’équipement d’urgence dans le cas où un employé d’ODS Marine tomberait à l’eau, le Plan de sauvetage et d’urgence d’ODS Marine demandait « à tous les membres du personnel de participer au sauvetage du travailleur » en utilisant l’équipement d’urgence mentionné ci-dessus; 

·      omission de formuler des procédures d’urgence écrites contenant une description complète des procédures et des responsabilités des personnes à qui est permis l’accès au lieu de travail (sous-alinéa 12.11(2)d)(i) du Règlement) : là encore, je note que le Plan de sauvetage et d’urgence d’ODS Marine mentionne, en cas de « chute dans l’eau », les mesures à prendre si une personne tombe à l’eau;

·      omission de veiller à ce que les procédures d’urgence écrites précisent l’emplacement de l’équipement d’urgence (sous-alinéa 12.11(2)d)(ii) du Règlement) : il ressort du plan d’ODS Marine décrit ci-dessus que l’équipement aurait été disponible si un risque de noyades était concrétisé;

·      omission de veiller à ce que toutes les personnes à qui a été permis l’accès au lieu de travail aient reçu une formation sur les procédures d’urgence (paragraphe 12.15(3) du Règlement) : le document d’ODS Marine intitulé « Plan de sauvetage et d’urgence » a été signé par les quatre employés d’ODS qui ont participé à la plongée. 

[80]           Il est, bien entendu, important de noter qu’en fin de compte les obligations prévues par le Code à l’égard des employés et des autres personnes incombent à l’employeur et ne peuvent être déléguées à des tiers. Dans une décision antérieure, j’ai écrit ce qui suit :

[…] De plus, les appelantes admettent dans leurs arguments qu’ils sont des employeurs assujettis au Code canadien du travail. Cela étant, je conclus qu’ils doivent s’acquitter à part entière des obligations que le Code impose aux employeurs. Étant donné que TPSGC et AINC sont l’un et l’autre des employeurs pour l’application de la partie II du Code canadien du travail, je conclus qu’ils sont tous deux responsables, à titre d’employeurs, de la santé et de la sécurité au travail à la mine Colomac Mine.

Dans l’arrêt R. c Whyssen, la Cour d’appel de l’Ontario a rappelé un principe important, en l’occurrence que l’employeur « ne peut pas se soustraire » aux obligations qui lui sont imposées par la Loi « en se déchargeant de ses responsabilités sur un entrepreneur indépendant. »

Le fait que TPSGC a conclu un marché avec Tli-Cho pour coordonner la santé et la sécurité à la mine Colomac n'a pas pour effet, au bout du compte, de dégager TPSGC et AINC des obligations qui leur sont imposées par le Code.

Par conséquent, même si Tli-Cho a la responsabilité d'organiser la santé et la sécurité au site Colomac aux termes du contrat, TPSGC et AINC conservent l'entière responsabilité de s'assurer que cela est fait de manière appropriéeFootnote 10 . [Non souligné dans l’original.]

[81]           En l’espèce, Parcs Canada avait lui-même adopté les mesures mentionnées ci‑dessus pour se protéger contre les risques de noyade. En outre, ODS Marine entreprenait, au su de Parcs Canada et de TPSGC, une activité de plongée spécialisée pour laquelle elle avait adopté, compte tenu de la nature spécialisée de ladite activité, son propre ensemble de mesures d’urgence pour se protéger contre le risque de « chute accidentelle dans l’eau ». Ces procédures avaient été examinées et modifiées par TPSGC avant la plongée. À la lumière de tous ces éléments, j’estime que les obligations en matière de protection contre le risque de noyade, telles qu’envisagées par la partie XII du Règlement, pour ce qui est des employés d’ODS Marine se trouvant sur le lieu de travail, ont été respectées.

[82]           En me fondant sur ce qui précède, j’annule l’instruction donnée le 10 novembre 2009 aux termes des alinéas 125(1)o) et z.14) du Code par l’Ag. SS Jenkins.

Décision

Il est fait droit aux appels portant sur les trois instructions en cause. Les deux instructions données à Parcs Canada le 10 novembre 2009 par l’Ag. SS Jenkins sont annulées. En outre, l’instruction donnée à TPSGC le 30 août 2010 par l’Ag. SS Misuraca est annulée. 

Richard Lafrance

Agent d’appel

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