2014 TSSTC 13

Date : 2014-08-19

 Dossier no : 2012-45

 Entre :

Sécurité maritime de Transports Canada, appelante

Et

Alliance de la Fonction publique du Canada, intimée

 Indexé sous : Sécurité maritime de Transports Canada c. Alliance de la Fonction publique du Canada, intimée

 Affaire : Appel interjeté en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail à l’encontre d’une instruction émise par un agent de santé et de sécurité

 Décision : L’instruction est annulée.

 Décision rendue par : M. Pierre Hamel, agent d’appel

 Langue de la décision : Anglais

 Pour l’appelante : Me Richard Fader, avocat, ministère de la Justice du Canada, groupe du droit du travail et de l’emploi

 Pour l’intimée : M. Jean-Rodrigue Yoboua, agent de représentation, Alliance de la Fonction publique du Canada

 Référence : 2014 TSSTC 13

MOTIFS DE DÉCISION

[1] La présente décision concerne un appel interjeté par la Sécurité maritime de Transports Canada (la « SMTC » ou l’« employeur ») à l’encontre d’une instruction émise le 5 juin 2012 par Francis Healey, agent de santé et de sécurité (agent de SST), conformément au paragraphe 145(1) du Code canadien du travail (le « Code »).

[2] L’instruction se lit comme suit :

DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II – SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

[Traduction] Le 14 mai 2012, j’ai procédé à une enquête concernant un refus de travailler exercé par un inspecteur de marine à l’emploi de la Sécurité maritime de Transports Canada (SMTC), employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis au 8e étage, Immeuble John Cabot, 10 Barter’s Hill, St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador) A1C 6H8, ledit lieu de travail étant parfois connu sous le nom de la Sécurité maritime de Transports Canada.

Ledit agent de santé et de sécurité est d’avis que les dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail ont été enfreintes :

 Alinéa 125.1f) – Partie II du Code canadien du travail, et article 10.4 - Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail. 

La santé ou la sécurité des inspecteurs de la sécurité maritime de la Sécurité maritime de Transports Canada (SMTC) à St. John’s (T.-N.-L.) risque d’être compromise par l’exposition à l’amiante et à d’autres substances dangereuses dans l’exercice de leurs fonctions à bord des navires. L’employeur n’a pas nommé de personne qualifiée pour faire enquête sur cette question.

Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail de mettre fin à la contravention au plus tard le 5 juin 2012.

De plus, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)b) de la partie II du Code canadien du travail, de prendre, au plus tard dans le délai imparti par l’agent de santé et de sécurité, les mesures pour empêcher la continuation de la contravention ou sa répétition.

Fait à St. John’s, le 5 juin 2012.

(signé)

Frank Healey

Agent de santé et de sécurité

[…]

À : SÉCURITÉ MARITIME DE TRANSPORTS CANADA

8e étage, Immeuble John Cabot

10 Barter’s Hill

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador)

A1C 6H8

[3] L’appel a été entendu à St. John’s (T.-N.-L.) du 18 au 20 janvier 2014.

Contexte

[4] Les faits entourant le présent appel ne sont généralement pas contestés. Le 15 avril 2012, des inspecteurs de la sécurité maritime de la SMTC, soit le capitaine Glenn Mackey et M. Dan Earles se sont rendus à Harbour Grace (T.-N.-L.) afin de procéder à l’inspection du navire Shamook de la Garde côtière canadienne (le « navire Shamook de la GCC »). Les employés se sont répartis les tâches d’inspection comme suit : le capitaine Mackey devait inspecter le pont, tandis que M. Earles devait se charger de l’inspection sous le pont. Vers la fin de leur inspection, M. Earles a été avisé par le chef mécanicien du navire qu’un entrepreneur se trouvait à bord pour encapsuler de l’isolant dans le tambour machine. M. Earles a demandé au chef mécanicien si l’isolant friable et en vrac ainsi que la substance blanche sur les rebords et le pont étaient de l’amiante, ce que le chef mécanicien n’a pu confirmer. M. Earles a ensuite informé le capitaine Mackey de la situation, et les deux inspecteurs se sont rendus sur la passerelle et ont demandé une copie du plan de gestion de l’amiante (PGA) pour le navire. Ils ont examiné le plan en présence du capitaine et du chef mécanicien et leur ont posé des questions sur la présence et l’emplacement de l’amiante à bord du navire, mais l’on n’a pas pu répondre à leurs questions. Les inspecteurs ont également demandé où en était la mise en œuvre des recommandations formulées dans le PGA, mais l’on n’a pas été en mesure de répondre à leurs questions non plus. Le capitaine et le chef mécanicien n’ont pas pu confirmer que les recommandations contenues dans le PGA avaient été mises en œuvre. M. Earles a ensuite préparé une Note de la Sécurité maritime, également appelée « SI-07 », demandant au capitaine du navire Shamook de la GCC de prendre un échantillon d’air dans la salle des machines pour déterminer la présence de matériaux contenant de l’amiante (MCA), de mener une réévaluation du navire pour détecter la présence d’amiante et déterminer son état, et de confirmer que les recommandations générales de l’évaluation précédente avaient bien été appliquées. Le capitaine Mackey et M. Earles ont interrompu leur inspection à ce moment et quitté les lieux. C’est un fait connu qu’il n’y avait pas eu d’évaluation des matières et des conditions dangereuses à bord du navire Shamook de la GCC et qu’aucune analyse du risque professionnel n’avait été menée, ni par les employés ni par l’employeur, avant l’inspection.

[5] M. Earles a envoyé un courriel à Peter Johnson, qui était alors gestionnaire intérimaire aux Services des inspections de la SMTC, exprimant sa préoccupation et expliquant la situation. À la lumière de ces renseignements, M. Johnson a conseillé à l’ensemble du personnel d’éviter de monter à bord du navire Shamook de la GCC tant que le problème ne serait pas réglé et a communiqué avec les représentants de la Garde côtière pour les informer de la situation et du retrait des Services des inspections. Le capitaine Mackey a également informé M. Johnson qu’il refusait de travailler dans ces conditions. Il a rempli le formulaire Enregistrement d’un refus de travailler en cas de danger le 16 avril 2012, en indiquant ce qui suit :

[Traduction] Risque d’exposition à l’amiante à bord du navire Shamook de la GCC, le 15 avril 2012. Le plan de gestion de l’amiante est vague sur l’emplacement de l’amiante. Il semble que la Garde côtière ne suit pas les recommandations formulées dans le plan. L’équipage n’a ni connaissance ni formation sur l’amiante. Je demande une formation sur le plan de gestion de l’amiante.

[6] Le 17 avril 2012, M. Johnson a reçu un courriel de Mme Shauna Akerman, agente des besoins opérationnels, GCC, l’informant des mesures prises en réponse à la Note SI-07 donnée le 15 avril par M. Earles. Mme Akerman a répondu aux questions soulevées par les inspecteurs dans le cadre de leur inspection et a également joint les rapports sur les deux échantillons d’air prélevés les 16 et 17 avril 2012, conformément à la Note SI-07. Les échantillonnages en vrac et l’analyse ont été réalisés par Pinchin LeBlanc Environmental (« Pinchin LeBlanc »), une entreprise spécialisée dans ce type d’analyse. Les résultats ont indiqué qu’aucune fibre d’amiante aéroportée n’avait été détectée à la suite de l’analyse. Les résultats ont révélé que les échantillons contenaient de la cellulose, des fibres synthétiques, de la laine minérale et des matières non fibreuses. Même si le navire renfermait néanmoins des matériaux contenant de l’amiante, on ne conteste pas que ces matériaux aient été correctement encapsulés et qu’ils ne présentaient aucun danger d’exposition pour les employés. On ne remet pas davantage en doute l’expertise et les compétences du personnel de Pinchin LeBlanc en ce qui concerne le type d’analyse dont il est ici question. On ne conteste pas non plus l’exactitude des résultats des échantillonnages en vrac de Pinchin LeBlanc, ni les conclusions de l’entreprise quant à l’absence de fibres d’amiante aéroportées à bord du navire.

[7] À la lumière de ces renseignements, M. Johnson a levé les restrictions qui empêchaient les inspecteurs de la SMTC de monter à bord du navire Shamook de la GCC pour effectuer leur inspection. M. Johnson a informé le capitaine Mackey de la situation et lui a remis les deux rapports mentionnés ci-dessus.

[8] Le capitaine Mackey est resté sur sa position au sujet de son refus de travailler, faisant valoir qu’il n’avait pas reçu de formation adéquate concernant l’examen du PGA, ce qui lui faisait courir un risque lors de l’inspection de navires renfermant des matériaux contenant de l’amiante. Scott Kennedy, directeur général, SMTC, a informé le Programme du travail de Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC), comme on l’appelait alors, de la poursuite du refus de travailler. L’agent de SST Frank Healey a reçu le mandat de faire enquête sur le refus de travailler, ce qu’il a commencé à faire le 14 mai 2012. Il ne s’est pas rendu dans le lieu de travail visé par le refus, c.-à-d. le navire Shamook de la GCC, mais il a interviewé tous les gestionnaires et les employés de la SMTC associés aux événements. L’agent de SST Healey a conclu que la situation ne présentait pas de danger au sens du Code et en a informé le capitaine Mackey et son employeur le 5 juin 2012.

[9] L’agent de SST Healey note dans son rapport (à la page 8) que le comité de santé et de sécurité a participé à l’enquête sur le refus, puisqu’il a été informé du refus le 16 avril 2012. Le comité a reconnu que le navire avait été inspecté afin de détecter la présence d’amiante et que les rapports d’analyse avaient indiqué qu’il n’y avait pas de fibres d’amiante aéroportées et que toute l’amiante présente était encapsulée et contenue de façon appropriée, qu’un affichage adéquat était en place, que l’emplacement de l’amiante était bien indiqué et que l’analyse de la qualité de l’air avait révélé que la substance ne contenait pas d’amiante et que le navire Shamook de la GCC était jugé sûr. Il ajoute que le comité a formulé deux recommandations : d’abord, que l’employeur élabore et mette en œuvre un processus afin de relever tous les risques connus à bord du navire, en collaboration avec le propriétaire du navire, avant qu’un employé se rende dans le lieu de travail et, ensuite, que l’employeur, en collaboration avec un groupe d’employés, réévalue le programme de formation sur le travail comportant une exposition à l’amiante de la SMTC.

[10] Le jour même où il a rendu sa décision sur le refus de travailler, l’agent de SST Healey a émis l’instruction qui fait l’objet de l’appel, citant une infraction à l’article 10.4 du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail (RCSST). Selon lui, son enquête a établi qu’il y avait un risque que la santé et la sécurité des deux inspecteurs de la sécurité maritime qui ont mené l’inspection le 15 avril 2012, soit compromise par l’exposition à l’amiante et à d’autres substances dangereuses, ce qui obligeait l’employeur à nommer une personne qualifiée pour faire enquête sur la question. Bien que son instruction ait été rédigée en termes généraux, l’agent de SST Healey a été très clair dans son témoignage sur le fait que son instruction ne portait que sur l’article 10.4 du RCSST, et non sur le caractère adéquat du Programme de prévention des risques (PPR) de la SMTC et des analyses du risque professionnel réalisées dans le cadre dudit programme, ou leur application, questions qui relevaient à ce moment-là de son collègue, l’agent de SST O’Neill. Il a également souligné que l’infraction citée était fondée uniquement sur les circonstances qui prévalaient le 15 avril 2012 liées à la présence des deux employés à bord du navire Shamook de la GCC. Il a expliqué qu’à son avis l’information obtenue auprès de Pinchin LeBlanc aurait dû être fournie aux employés avant leur inspection du navire, conformément à l’article 10.4 du RCSST. Il a également déclaré que, si une analyse des tâches critiques avait été réalisée avant que les employés montent à bord du navire, il aurait considéré que l’article 10.4 avait été respecté.

[11] Il convient de signaler que les événements des 15 et 16 avril 2012 sont survenus dans un contexte où la prévention des risques et l’absence de mise en œuvre du Programme de prévention des risques de l’employeur posaient problème depuis un bon moment et avaient donné lieu à plusieurs échanges entre la direction de la SMTC, le capitaine Mackey et d’autres employés, ainsi que l’agent de SST O’Neill, et le Programme du travail de RHDCC. Le Rapport narratif pour les situations comportant des risques produit en preuve le montre et relève des incidents passés où le capitaine Mackey a exercé son droit de refuser de travailler en 2009 lorsqu’il a appris que des travaux de désamiantage étaient en cours sur le navire qu’il inspectait (Sir Robert Bond) et qu’aucun PGA n’était en place. En 2011, il a de nouveau quitté ce navire lorsque la personne responsable du navire n’a pas pu répondre à une question sur la présence et l’état de l’amiante. La même situation s’est produite à bord de l’Anticosti plus tard cette année-là. Ces situations et les discussions qui s’en sont suivies ont mené à la signature par M. Kennedy, au nom de la SMTC, d’une promesse de conformité volontaire (PCV) selon laquelle l’employeur a entrepris de parfaire son PPR et de préparer des analyses des tâches critiques en collaboration avec les propriétaires des navires, pour chaque navire à inspecter, afin de recueillir de l’information de base sur les conditions du navire, entre autres la présence d’amiante et d’autres substances dangereuses, avant que les inspecteurs de la sécurité maritime montent à bord pour mener leur inspection. Il est utile de citer la « constatation no 1 » de la PCV, signée le 4 mai 2012, que M. Kennedy a fait parvenir à l’agent de SST O’Neill le 9 mai 2012 :

[Traduction] Le Programme du travail, Division de la santé et de la sécurité au travail, a participé aux discussions et aux rencontres avec le personnel de la SMTC (employeur, employés, comité mixte de santé et de sécurité) concernant le refus de travailler des inspecteurs de la sécurité maritime et leurs activités d’inspection à bord du navire. Tout au long de ce processus, il a été établi que la SMTC avait élaboré et mis en œuvre, en partie, un document d’orientation sur la santé et la sécurité au travail destiné aux employés de la SMTC exerçant leurs fonctions. Le Programme du travail, Division de la santé et de la sécurité au travail, a pris connaissance dudit document d’orientation et déterminé que certaines parties (analyse du risque professionnel, prévention et évaluation des risques, inventaire et consignation des risques, etc.) n’avaient pas été entièrement mises en œuvre à ce jour, en violation de l’alinéa 125(1)s) de la partie II du Code canadien du travail. L’employeur doit veiller à ce que soient portés à l’attention de chaque employé les risques connus ou prévisibles que présente pour sa santé et sa sécurité l’endroit où il travaille, conformément à l’alinéa 125(1)s) de la partie II du Code canadien du travail.

[12] La PCV fixe au 15 mai 2012 la date d’observation de cette disposition. Le courriel du 9 mai 2012 de M. Kennedy indique également ce qui suit :

[Traduction] En ce qui concerne le point 1 ci-dessus, TC poursuivra la mise en œuvre de son Programme de prévention des risques – plan d’action daté (révisé) de septembre 2011, comme il en a été convenu précédemment avec RHDCC. Je joins une copie du plan à votre intention. Veuillez noter que, dans le plan débutant en mai 2012, des analyses des tâches doivent être réalisées afin de relever les tâches à haut risque. La Sécurité maritime de Transports Canada effectuera les analyses des tâches critiques, peaufinera les analyses des tâches critiques et établira un mécanisme de tenue d’inventaire des analyses des tâches à mesure que celles-ci seront réalisées. Ces analyses des tâches critiques (ou analyses du risque professionnel) feront partie des renseignements qui seront fournis aux employés concernant l’endroit où ils travaillent.

[13] L’agent de SST O’Neill a reconnu avoir reçu le courriel de M. Kennedy, accompagné des pièces jointes, et a indiqué ce qui suit dans un courriel daté du 30 mai 2012 :

[…]

[Traduction] J’ai pris connaissance des pièces jointes et j’estime que le plan d’action proposé respecte l’esprit et l’intention des composantes de la PCV. Je joins donc ces documents au dossier de PCV et considère les questions comme étant « en conformité ».

À titre indicatif, l’agent de SST Frank Healey est en train de rédiger le rapport d’enquête sur le refus de travailler et devrait pouvoir le remettre la semaine prochaine.

[…]

[Soulignement ajouté]

[14] Les documents en question comprenaient les parties du document d’orientation sur la santé et la sécurité au travail portant sur le Programme de prévention des risques, qui présente un ensemble complet de règles, inspiré du document précédent de 2008, visant à relever tous les risques potentiels dans le lieu de travail et à les éliminer avant l’inspection. En résumé, les principaux éléments du programme sont la détermination des risques pour la santé et la sécurité, lesquels sont consignés dans un formulaire d’identification des risques en matière de santé et de sécurité conçu à cette fin et rempli conjointement avec les propriétaires ou les exploitants des navires, avant l’inspection; l’analyse des tâches critiques que devront exécuter les inspecteurs de la sécurité maritime; la création du poste d’administrateur du programme de sécurité, dont la responsabilité est de mettre en œuvre et de surveiller le programme, y compris de consigner et de tenir à jour l’information; un tableau décisionnel pour surveiller les cas où un risque d’exposition aux substances dangereuses est relevé; une liste de vérification des plans d’amiante en place.

[15] Le document donne également des exemples de formulaires d’analyse des tâches critiques préremplis génériques concernant des situations courantes. Comme le système affiche des renseignements propres aux emplacements, il est attendu que les formulaires d’analyse des tâches critiques portant sur des emplacements précis seront accessibles pour la majorité des lieux de travail devant faire l’objet d’une inspection. M. Kennedy a expliqué qu’un groupe de travail formé d’employés et de gestionnaires de la SMTC avait été formé afin de réaliser ces analyses des tâches critiques, en se concentrant d’abord sur les tâches à haut risque, conformément à la PCV et comme convenu avec l’agent de SST O’Neill. Les renseignements recueillis au moyen de ce processus sont entrés dans une base de données, appelée Système de gestion des dossiers, des documents et de l’information (SGDDI), et les employés doivent consulter l’analyse des tâches critiques pertinente (propre à un lieu ou générique) avant de monter à bord d’un navire, afin de se familiariser avec les conditions qui y prévalent. S’il n’y a pas d’analyse des tâches critiques, les inspecteurs de la sécurité maritime doivent utiliser un formulaire d’identification des risques en matière de santé et de sécurité et demander au responsable du lieu/navire de le remplir et de le leur retourner.

[16] M. Kennedy a expliqué que la SMTC, en tant qu’organisme de réglementation du secteur maritime, n’exerce pas de contrôle sur les lieux de travail où ses inspecteurs de la sécurité maritime sont appelés à accomplir leurs tâches d’inspection. Lorsqu’un risque est relevé, le personnel de la SMTC ne peut pas tout simplement mettre en place la mesure corrective : les inspecteurs doivent utiliser les pouvoirs d’application qui leur sont conférés par la loi appropriée et exiger que le propriétaire ou le responsable du navire corrige la situation en demandant à une personne qualifiée de prendre les mesures correctives appropriées, soit faire des essais et des analyses, apporter des modifications à l’emplacement et ainsi de suite, afin d’éliminer le risque, et rendre compte des résultats à la SMTC, comme cela a été le cas dans l’incident lié au navire Shamook de la GCC.

[17] Ce programme prévoit que si, à la suite d’une analyse des tâches critiques, l’employé détermine qu’il y a un risque d’exposition à une substance dangereuse sur laquelle il n’a pas reçu de formation, il ne doit pas se rendre dans le lieu de travail et doit informer son gestionnaire. De la même façon, si, une fois sur place, un employé détermine que les conditions décrites dans le formulaire d’analyse des tâches critiques ont changé et qu’il y a un risque d’exposition, il doit quitter les lieux et en informer son gestionnaire, pour que les mesures correctives appropriées puissent être ordonnées.

[18] Ce processus a été présenté à toutes les divisions régionales, comme en témoigne une lettre signée par M. Kennedy et datée du 29 mai 2012 et un courriel de M. Balaban daté du 14 juin 2012 à ce sujet.

Question en litige

[19] La question est de savoir si l’employeur a enfreint l’alinéa 125.1f) du Code et l’article 10.4 du RCSST en ne nommant pas de personne qualifiée pour faire enquête sur les circonstances entourant cette affaire, avant que le capitaine Mackey et M. Earles montent à bord du navire Shamook de la GCC pour effectuer leur inspection, le 15 avril 2012.

 Observations des parties

[20] Les observations finales des parties ont été reçues le 14 mars 2014, et le Tribunal a reçu la réponse de l’appelante le même jour.

A) Observations de l’appelante

[21] L’avocat de l’appelante déclare que l’instruction est biaisée et qu’elle doit être annulée. Comme la preuve l’a établi, l’instruction concerne un lieu de travail précis, soit le navire Shamook de la GCC. L’instruction portait uniquement sur l’article 10.4 du RCSST et non sur l’obligation dans le cadre du Programme de prévention des risques, qui faisait l’objet d’un autre processus dirigé par l’agent de SST O’Neill et où, le 30 mai 2012, il a jugé que la SMTC était en conformité. L’agent de SST Healey a confirmé que, à l’examen du rapport de Pinchin LeBlanc, il n’y avait aucun risque qu’un employé soit exposé à l’amiante à bord du navire Shamook de la GCC. Il a justifié son instruction en expliquant qu’il avait compris que l’information n’avait pas été fournie aux employés avant leur inspection. L’avocat soutient que, à la lumière de ces faits, la seule conclusion possible était qu’il n’y avait aucun risque d’exposition à une substance dangereuse dans cette affaire, et que l’employeur n’était donc pas tenu de nommer une personne qualifiée pour faire enquête conformément à l’article 10.4 du RCSST. L’interprétation de l’agent de SST Healey est que l’objet de cet article est d’obliger l’employeur à nommer une personne qualifiée pour enquêter sur chaque lieu de travail où ses inspecteurs assument des fonctions d’inspection, afin de déterminer s’il y a un « risque d’exposition ». Cette interprétation est incorrecte.

[22] L’avocat de l’appelante prétend que l’agent de SST Healey n’a pas bien saisi la nature de l’instruction en se concentrant sur les événements survenus le 15 avril 2012 plutôt que sur la situation qui prévalait le 5 juin 2012, à la date de son instruction. Ce jour-là, l’agent de SST Healey avait accès à l’information qu’il n’avait pas pu obtenir le 15 avril 2012 et aurait dû en tenir compte. Plus particulièrement, il aurait dû tenir compte du fait que l’employeur avait étoffé son Programme de prévention des risques et que, en date du 29 mai 2012, le représentant du navire devait avoir rempli le formulaire d’identification des risques en matière de santé et de sécurité pour qu’une inspection soit réalisée. De plus, l’agent de SST O’Neill avait jugé cette façon de procéder comme étant en conformité. L’avocat fait remarquer que les employés ont reçu une formation sur les risques posés par l’amiante, et que le capitaine Mackey, plus particulièrement, a reçu la formation offerte par Strum Environmental le 28 février 2012. Cette formation comprenait une liste de vérification relative à l’inspection préalable pour l’amiante, un rappel aux employés qu’ils doivent examiner les documents pertinents avant de monter à bord d’un navire, y compris toute analyse des tâches critiques; si l’analyse des tâches critiques a établi qu’il y a un risque d’exposition, les employés ne doivent pas procéder à l’inspection. Elle précise en outre quels renseignements doivent figurer sur le plan de gestion de l’amiante. L’avocat note que les inspecteurs de la sécurité maritime suivaient cette procédure.

[23] L’avocat de l’employeur déclare également que l’agent de SST Healey a mal interprété le paragraphe 10.4, qui exige uniquement de nommer une personne qualifiée pour faire enquête lorsqu’il y a un risque d’exposition. Il a déclaré, à tort, à plusieurs reprises pendant son témoignage qu’il incombait à l’employeur de déterminer si un risque existait et d’engager sans délai une personne qualifiée pour ce faire. Ce point de vue s’oppose à la propre documentation de RHDCC, qui répète qu’une personne qualifiée ne doit être engagée pour déterminer les procédures de travail sécuritaires à mettre en place que lorsqu’on a confirmé l’existence d’un risque.

[24] Dans le cas qui nous occupe, il était question de poussière et de l’incapacité des membres de l’équipage de confirmer la présence d’amiante à bord du navire. Les inspecteurs de la sécurité maritime ont donc bien fait de quitter les lieux et la SMTC de demander au propriétaire du navire de remédier à la situation, de mener des essais et de fournir les renseignements et un rapport complets à la SMTC. M. Kennedy a indiqué dans son témoignage que c’était bien la chose à faire et qu’il avait agi conformément au document d’orientation sur la santé et la sécurité au travail. Lorsqu’il a émis son instruction, l’agent de SST Healey avait la confirmation qu’il n’y avait pas de fibres d’amiante aéroportées à bord du navire et qu’il n’y avait donc aucun risque que des employés soient exposés à cette substance. Il ne convenait donc pas d’émettre une instruction indiquant une infraction à l’article 10.4 du RCSST.

[25] L’avocat de l’appelante suggère également que le capitaine Mackey a lui-même commis une faute en ne respectant pas le document d’orientation de la SMTC et en ne prenant pas de mesures d’inspection préalable afin de s’assurer que sa sécurité ne serait pas compromise. Son allégation selon laquelle il n’avait pas reçu de formation appropriée pour gérer les cas d’amiante est « non fondée et fallacieuse ». De la même façon, la suggestion du capitaine Mackey selon laquelle il avait besoin d’un expert pour le conseiller sur les conclusions du rapport d’inspection de Pinchin LeBlanc selon lesquelles aucune amiante n’avait été détectée dans l’échantillonnage en vrac (« aucune amiante détectée ») est inexacte et faite dans un esprit de contradiction. L’avocat soutient que le capitaine Mackey a abdiqué ses responsabilités en n’appliquant pas les mesures préventives appropriées contenues dans le document d’orientation sur la santé et la sécurité au travail, état d’esprit dont témoigne son refus de collaborer avec le groupe de travail formé par l’employeur pour améliorer son Programme de prévention des risques.

[26] L’avocat de l’appelante estime que la majorité de la preuve présentée par l’intimée et le témoignage de l’agent de SST Healey portent sur la question de la prévention des risques ou du PPR, ce qui est un sujet différent de celui abordé dans l’article 10.4 et concernant lequel l’agent de SST O’Neill a jugé que l’employeur était en conformité. L’avocat soutient qu’il n’appartient pas à l’agent d’appel agissant aux termes de l’article 146 du Code de revenir sur ces questions, qui ne sont pas liées à l’instruction, et qui élargissent indûment la portée de la question visée par l’appel (Burchill c. Le Procureur général du Canada [1981] 1 CF 109 (CA); Shneidman c. Canada (Procureur général) 2007 CAF 192). Le Code ne permet pas une enquête indépendante sur d’autres infractions possibles au Code et ne donne pas à l’agent d’appel l’autorité d’émettre une nouvelle instruction aux termes du paragraphe 145(1) : l’agent d’appel ne peut que « confirmer, annuler ou modifier » l’instruction initiale et ne peut émettre d’instruction que s’il a établi l’existence d’un danger, conformément à l’alinéa 146.1 (1)b) du Code.

[27] En conclusion, l’avocat de l’appelante m’invite à annuler l’instruction.

B) Observations de l’intimée

[28] Le représentant de l’intimée affirme que l’instruction visée par l’appel est fondée, car l’employeur a omis de nommer une personne qualifiée pour faire enquête alors qu’il y avait un risque que la santé ou la sécurité des inspecteurs de la sécurité maritime soit compromise par l’exposition à l’amiante.

[29] Au cours de son témoignage, l’agent de SST Healey a indiqué que son instruction reposait en partie sur le fait que l’appelante avait négligé d’informer ses inspecteurs de la sécurité maritime de tous les risques associés au navire Shamook de la GCC avant l’inspection. L’agent de SST Healey a également indiqué qu’aux fins de l’article 10.4 les gestionnaires de l’appelante n’étaient pas considérés comme des personnes qualifiées.

[30] Selon le représentant de l’intimée, la preuve démontre que le navire Shamook de la GCC avait fait l’objet d’une remise en état avant d’être inspecté par le capitaine Mackey et M. Earles le 15 avril 2012. Il est également évident qu’il y avait de l’amiante dans le navire et que ni le capitaine du bateau ni le chef mécanicien n’étaient en mesure de dire où se trouvait l’amiante à bord du navire Shamook de la GCC. Ces personnes étaient également incapables de confirmer si les recommandations formulées dans le plan de gestion de l’amiante avaient été suivies. Elles ne pouvaient pas davantage confirmer si la substance blanche sur les rebords et le pont du navire était de l’amiante. De plus, aux dires du capitaine Mackey, l’amiante n’était pas étiquetée au moment de l’inspection, et le capitaine Mackey a indiqué qu’il avait inspecté la cuisine et constaté qu’il s’y trouvait de l’amiante non étiquetée derrière un panneau. Enfin, la Garde côtière canadienne n’avait fait aucune inspection annuelle relative à l’amiante depuis 2010. Toutes ces circonstances satisfont à l’exigence selon laquelle il doit y avoir un risque que la santé et la sécurité d’un employé soit compromise par l’exposition. Pour remplir ce critère, il suffit de démontrer qu’il y avait une substance dangereuse et qu’une exposition était possible (voir Air Canada et Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale, section locale 714, décision no 96-016 de l’agent d’appel , le 30 août 1996). En cas de doute sur l’état de l’amiante, l’appelant devait nommer une personne qualifiée pour faire enquête et formuler des recommandations à la lumière des facteurs précisés à l’alinéa 10.4(2) du RCSST, en ce qui concerne les mesures à prendre. Aucun des gestionnaires de l’appelant n’avait les compétences nécessaires pour s’acquitter de cette tâche.

[31] Le représentant de l’intimée soutient également qu’en s’appuyant sur les conclusions de Pinchin LeBlanc dans ses rapports destinés à la Garde côtière canadienne et non à la SMTC, l’appelante se trouve à avoir sous-traité ses obligations aux termes du Code, ce qu’elle n’est pas autorisée à faire (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et Affaires indiennes et du Nord Canada, décision no TSSTC 10-001).

[32] Le représentant de l’intimée se défend également d’essayer de soulever de nouvelles questions relatives au Programme de prévention des risques de l’employeur. C’est l’appelante qui s’appuie sur son PPR pour prétendre qu’il n’y a pas de risque d’exposition, parce que son PPR identifie des substances dangereuses et qu’aucun employé n’est tenu de monter à bord d’un navire avant que le propriétaire n’ait éliminé le risque. Le refus lié au Sir Robert Bond et à l’Anticosti prouve qu’il y a longtemps que l’exposition aux substances dangereuses est un sujet de préoccupation. La preuve établit que l’appelante n’a pas utilisé le formulaire d’identification des risques en matière de santé et de sécurité au moment du refus des 15 et 16 avril. Cependant, même après que ce formulaire est rempli, le capitaine Mackey, comme les autres inspecteurs de la sécurité maritime, n’est pas en mesure de déterminer si l’amiante constitue ou non un risque pour la santé, car il n’a pas reçu la formation nécessaire pour porter un tel jugement. La gestion de l’amiante est un sujet complexe, ce que la preuve a clairement démontré. En outre, le représentant a évoqué plusieurs lacunes du PPR, notamment le fait qu’il n’y a pas toujours d’analyse des tâches critiques propre à un lieu et que d’autres approches, comme l’analyse générique des tâches critiques ou la préparation d’un formulaire par le capitaine du navire avant l’inspection, ne procurent pas aux inspecteurs de la sécurité maritime tous les renseignements utiles avant de monter à bord du navire. Enfin, le nouveau document d’orientation sur la santé et la sécurité au travail n’a été terminé que beaucoup plus tard en 2012 (en novembre), et la formation sur le document d’orientation a été offerte en avril 2013 seulement, et, de l’avis de nombreux participants, cette formation était inadéquate. Somme toute, les lacunes dans le formulaire d’identification des risques en matière de santé et de sécurité démontrent clairement qu’il y avait un risque d’exposition et que les problèmes qui existaient avant sa mise en œuvre sont toujours là.

[33] Le représentant de l’intimée conteste l’allégation de l’appelante selon laquelle le capitaine Mackey a abdiqué ses responsabilités en refusant de collaborer avec le groupe de travail et en ne suivant pas le processus d’inspection préalable établi dans le PPR : le capitaine Mackey a fourni une explication satisfaisante au sujet du premier point, et le fait qu’il ait considéré que ce n’était pas à lui de faire l’inspection préalable, mais plutôt à son employeur, était motivé par la crainte réelle d’être exposé à l’amiante pendant l’inspection du navire.

[34] En ce qui concerne le fait que l’agent de SST O’Neill ait jugé que l’employeur était en conformité avec le Code à l’égard de son Programme de prévention des risques (alinéa 125(1)s) du Code et partie XIX du RCSST), le représentant de l’intimée fait référence à l’arrêt DP World (Canada) Inc. c. International Longshore and Wharehouse Union, section locale 500, 2011 TSSTC 17) et soutient que ce fait n’est pas pertinent, puisque l’agent de SST Healey avait le droit de tirer ses propres conclusions à la lumière de l’ensemble de la preuve. Enfin, le représentant estime que l’agent de SST Healey avait raison de tenir compte des faits qui prévalaient les 15 et 16 avril 2012 et qu’il n’était nullement tenu d’examiner les faits en date du 5 juin 2012 lorsqu’il a émis son instruction dans les circonstances entourant cette affaire, et il fait remarquer que le paragraphe 145(1) permet aux agents de santé et de sécurité d’émettre des instructions sur des infractions passées au Code.

[35] Le représentant de l’intimée conclut que l’instruction doit être confirmée.

C) Réponse

[36] En réponse, l’avocat de l’appelante a souligné le fait que les observations de l’intimée montraient clairement qu’elle tentait d’élargir la portée de l’appel pour inclure une série de questions sans lien direct avec l’instruction. Il est vrai que l’agent d’appel procède à une audience de novo, mais le Parlement ne souhaite certainement pas élargir le débat à tout un éventail de questions simplement parce que l’intimée fait des hypothèses dans ses observations finales. L’avocat a donc réitéré sa position selon laquelle la SMTC ne permet pas à ses employés de travailler dans un environnement où il y a un risque d’exposition à des substances dangereuses. Une fois qu’il est établi (conformément à son PPR) qu’il y a un risque d’exposition, il incombe au propriétaire du navire de corriger la situation avant que les inspecteurs de la sécurité maritime montent à bord.

[37] L’avocat de l’appelante s’oppose à l’affirmation selon laquelle l’employeur sous-traite ses responsabilités aux termes du Code en se fondant sur un rapport commandé par un autre organisme, en l’occurrence la CCG. La SMTC s’appuie sur le rapport du cabinet d’experts Pinchin LeBlanc pour assurer la santé et la sécurité de ses propres employés. Enfin, l’avocat soutient qu’il est erroné de laisser entendre qu’un inspecteur de la sécurité maritime ne peut pas interpréter un rapport comme celui de Pinchin LeBlanc, surtout quand ce rapport utilise des expressions simples comme « aucune amiante détectée » ou « contient de l’amiante ». La SMTC n’exige pas que les inspecteurs de la sécurité maritime mènent des inspections pour déterminer la présence d’amiante, cette tâche étant confiée à des experts. Ils reçoivent une formation sur les risques liés à l’amiante qui leur permet de faire les bons choix relativement à leur sécurité au travail.

Analyse

[38] Le présent appel fait intervenir l’alinéa 125.1f) du Code et l’article 10.4 du RCSST, puisque l’agent de SST Healey s’est fondé sur ces dispositions pour justifier son instruction à l’employeur. Ces dispositions se lisent comme suit :

125.1 Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124 et des obligations spécifiques prévues à l’article 125, mais sous réserve des exceptions qui peuvent être prévues par règlement, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève,

[…]

f) dans les cas où les employés peuvent être exposés à des substances dangereuses, d’enquêter sur cette exposition et d’apprécier celle-ci selon les modalités réglementaires et avec l’aide du comité local ou du représentant;

[…]

 10.4 (1) Lorsque la santé ou la sécurité d’un employé risque d’être compromise par l’exposition à une substance dangereuse présente dans le lieu de travail, l’employeur doit sans délai,

a) nommer une personne qualifiée pour faire enquête sur la situation;

b) à des fins de participation à l’enquête, aviser le comité local ou le représentant qu’il y aura enquête et lui communiquer le nom de la personne qualifiée nommée pour faire enquête.

 (2) Au cours de l’enquête visée au paragraphe (1), les facteurs suivants doivent être pris en compte :

a) les propriétés chimiques, biologiques et physiques de la substance dangereuse;

b) les voies par lesquelles la substance dangereuse pénètre dans le corps;

c) les effets aigus et chroniques sur la santé que produit l’exposition à la substance dangereuse;

d) la quantité de substance dangereuse à manipuler;

e) la manière d’entreposer, d’utiliser, de manipuler et d’éliminer la substance dangereuse;

f) les méthodes de contrôle utilisées pour éliminer ou réduire l’exposition des employés à la substance dangereuse;

g) la concentration ou le niveau de la substance dangereuse auquel l’employé risque d’être exposé;

h) la probabilité que la concentration d’un agent chimique aéroporté ou le niveau de rayonnement ionisant ou non ionisant soit supérieur à 50 pour cent des valeurs visées respectivement aux paragraphes 10.19(1) et 10.26(3) et (4);

i) la probabilité que le niveau visé à l’alinéa g) soit supérieur ou inférieur au niveau prévu à la partie VI.

[Soulignement ajouté]

[39] Après avoir entendu la preuve présentée par les parties et étudié attentivement leurs observations, la première question que je dois trancher est la portée du présent appel. Une preuve imposante a été présentée concernant le Programme de prévention des risques de l’employeur, le processus établi dans le cadre de ce programme afin de relever les risques connus et prévisibles liés aux fonctions des inspecteurs de la sécurité maritime et leur transmettre cette information avant leur inspection des navires, ainsi que l’efficacité de ce programme. L’agent de SST Healey a maintenu assez fermement dans son témoignage que son instruction se fondait uniquement sur sa conclusion que l’employeur avait enfreint l’article 10.4 du RCSST les 15 et 16 avril 2012, en omettant de nommer une personne qualifiée pour faire enquête sur les conditions du lieu de travail avant que les inspecteurs de la sécurité maritime montent à bord du navire Shamook de la GCC, puisqu’il y avait, selon lui, un risque que la santé ou la sécurité des deux inspecteurs soit compromise par l’exposition à une substance dangereuse, en l’occurrence des fibres d’amiante aéroportées. Il a répété le fait que, si l’employeur avait fourni au capitaine Mackey et à M. Earles les résultats du rapport de Pinchin LeBlanc avant qu’ils montent à bord du navire, l’employeur aurait été considéré comme étant en conformité avec l’article 10.4 du RCSST, puisqu’on ne conteste pas que le personnel du Pinchin LeBlanc ait eu les compétences nécessaires pour réaliser les analyses qu’il a menées les 16 et 17 avril 2012. Cette précision montre, selon moi, que le seul facteur sur lequel devrait se baser l’évaluation de la validité de l’instruction est l’application correcte de l’article 10.4 du RCSST par l’agent de SST Healey dans les circonstances de la présente affaire.

[40] Même s’il y a un lien entre l’obligation de l’employeur aux termes de la partie XIX du RCSST (Programme de prévention des risques) et celle en vertu de l’article 10.4 du RCSST (partie X – Substances dangereuses), ces dispositions prescrivent des obligations de nature différente, la première soulignant l’importance que soient portés à l’attention de chaque employé les risques connus ou prévisibles associés à leurs fonctions, la dernière portant plus particulièrement sur la manipulation des substances dangereuses présentes dans le lieu de travail. L’une peut guider l’autre, en ce sens que, lorsqu’un risque réel ou potentiel a été établi au moyen du PPR et de mesures préventives, l’employeur peut devoir prendre des mesures supplémentaires pour corriger la situation pour laquelle le RCSST prescrit des mesures précises, comme la manipulation des substances dangereuses, les espaces clos, les niveaux sonores et ainsi de suite. L’agent de SST Healey a reconnu que son collègue, l’agent de SST O’Neill, avait examiné la question du Programme de prévention des risques.

[41] Cependant, bien que l’agent de SST Healey affirme avoir fondé son instruction sur l’article 10.4 du RCSST, il a en fait établi que la lacune était liée au défaut de l’employeur de porter à l’attention des employés les risques connus ou prévisibles, autrement dit le processus prescrit par le Programme de prévention des risques de l’employeur. Lorsque l’agent de SST Healey a émis son instruction le 5 juin 2012, l’agent de SST O’Neill avait déterminé que le PPR et les processus établis dans le cadre de ce programme étaient en conformité avec le Code, et l’agent de SST Healey a été catégorique dans son témoignage en indiquant que son instruction n’avait aucun lien avec le PPR ni une quelconque conclusion selon laquelle l’employeur avait négligé de mettre en place les processus prévus.

[42] En conséquence, je conclus que la portée du présent appel se limite à savoir si, oui ou non, l’employeur a enfreint l’article 10.4 du RCSST en ne nommant pas de personne qualifiée pour faire enquête avant l’inspection du navire Shamook de la GCC le 15 avril 2012, argument sur lequel l’agent de SST Healey prétend avoir fondé sa décision. Cet article porte sur le risque que la santé des employés soit compromise par l’exposition à une substance dangereuse dans le lieu de travail. Bien qu’aucune preuve précise n’ait été présentée à l’audience à ce sujet, les parties reconnaissent que l’amiante est une substance dangereuse qui peut causer de graves maladies si elle n’est pas traitée, entreposée ou enfermée convenablement, selon des normes industrielles strictes. La question ici concerne la présence de fibres d’amiante aéroportées à bord du navire qui pourraient poser un risque en cas d’inhalation par les employés exposés.

[43] La question consiste ensuite à déterminer s’il y avait un risque, le 15 avril 2012, que la santé ou la sécurité du capitaine Mackey et de M. Earles soit compromise par l’exposition à des fibres d’amiante aéroportées lorsqu’ils sont montés à bord du navire; le cas échéant, une enquête par une personne qualifiée aurait dû être menée, conformément à l’article 10.4 du RCSST. L’article 10.4 ne définit pas les mots soulignés, et il convient de leur donner leur sens habituel. « Likelihood » (risque) est défini comme the condition of being likely or probable ; probability; something that is probable ((l’état de ce qui est probable; qui est probable) (The Free Online Dictionary; Oxford’s Online Dictionary); the chance that something will happen, probability (la probabilité que quelque chose survienne) (Merriam Webster Dictionary online). « Exposure » (exposition) est défini comme the condition of being subjected to something, as to infectious agents, extremes of weather, or radiation, which may have a harmful effect (le fait d’être exposé à quelque chose, comme des agents infectieux, des conditions météorologiques extrêmes ou de la radiation, qui peut avoir un effet nocif (The Free Dictionary online); the state of being exposed to contact with something (le fait d’être exposé au contact avec qqch. (Google Dictionary online); the state of having no protection from something harmful (le fait de n’avoir aucune protection contre un danger) (Merriam Webster Dictionary online). Selon moi, « exposition » veut dire plus que de simplement « être en présence de quelque chose », par exemple, d’amiante encapsulée. La nature de l’enquête et les facteurs dont la personne qualifiée doit tenir compte aux termes du paragraphe 10.4(2) du RCSST indiquent que ce qui est visé par la partie X, ce sont les risques liés au contact avec des substances dangereuses. Alors que les autres articles de la partie X abordent les questions de l’entreposage, de l’identification et de l’étiquetage, etc. des substances dangereuses, l’article 10.4 porte sur l’exposition comme telle. Ainsi, la question, énoncée dans des termes différents, consiste à savoir s’il y avait un risque, le 15 avril 2012, que les employés soient exposés à des fibres d’amiante aéroportées lorsqu’ils sont montés à bord du navire pour faire leur inspection. Il s’agit d’une question de fait que l’on doit trancher en fonction des circonstances de cette affaire.

[44] À mon avis, avant de conclure qu’une personne qualifiée devait être nommée, l’agent de SST Healey aurait dû établir d’abord qu’il y avait un risque que les employés soient en contact avec des fibres d’amiante aéroportées, voire avec n’importe quelle autre substance dangereuse qui aurait pu se trouver sur le navire ce jour-là.

[45] J’estime qu’aucun fait ne m’a été présenté qui appuie raisonnablement une telle constatation. Si l’on revient au 15 avril 2012, rien ne pouvait laisser penser qu’il y avait un risque que les employés soient exposés à des fibres d’amiante aéroportées ou à d’autres substances dangereuses; au mieux, on ne connaissait pas la réponse à cette question à ce moment-là.

[46] Toutefois, lorsque l’agent de SST Healey mène son enquête le 14 mai 2012 et qu’il émet ensuite son instruction le 5 juin 2012, il connaît les résultats de l’analyse de l’échantillonnage massif réalisée par Pinchin LeBlanc les 16 et 17 avril, et le rapport conclut qu’aucune fibre d’amiante aéroportée n’a été détectée. Selon cette preuve, la seule conclusion que pouvait tirer l’agent de SST Healey, et la seule que tire le soussigné aux fins de cet appel, est qu’il n’y avait aucun risque que la santé des employés soit compromise par l’exposition ces jours-là. Cette conclusion est également conforme à la décision d’« absence de danger » de l’agent de SST Healey. Le fait que le navire Shamook de la GCC ait fait l’objet d’une remise en état ou que les membres de l’équipage n’aient pas été en mesure de répondre aux questions sur la présence d’amiante à bord du navire ne prouve pas, selon moi, qu’il y avait un risque d’exposition, au sens de l’article 10.4 du RCSST.

[47] L’intimée cite la décision Air Canada pour appuyer son argument selon lequel l’enquête en vertu de l’article 10.4 du RCSST devrait également servir à déterminer la présence possible d’une substance dangereuse dans le lieu de travail. Il m’apparaît important de placer les déclarations de l’agent d’appel dans cette affaire dans leur contexte factuel. Cette affaire portait sur le déglaçage d’aéronefs à l’aide d’une substance appelée « éthylène glycol ». Il est tout à fait clair que les employés ont été appelés à utiliser, à vaporiser et à manipuler la substance dangereuse dans l’exercice de leurs fonctions, bref qu’ils y ont été exposés. La question ici consistait à savoir si le niveau d’exposition (supérieur ou inférieur au niveau prévu) combiné au fait que les employés n’avaient pas reçu de dispositifs de protection respiratoire, posait un risque pour leur santé. À mon avis, ces questions sont au cœur de l’objet de l’article 10.4 du RCSST, lorsqu’on lit les facteurs mentionnés au paragraphe 10.4(2), et l’on peut comprendre que l’agent d’appel dans cette affaire en soit arrivé à cette conclusion. Dans le cas qui nous occupe, la preuve indique clairement qu’il n’y a pas eu d’utilisation, de manipulation ni même de présence de fibres d’amiante aéroportées, et donc aucune exposition ni aucun risque d’exposition à quelque substance que ce soit.

[48] Je suis d’accord avec l’appelante pour dire que l’interprétation que fait l’agent de SST Healey de l’article 10.4 du RCSST revient à imposer à l’employeur l’obligation de nommer une personne qualifiée pour déterminer s’il y a un risque que la santé ou la sécurité des employés soit compromise par l’exposition. Cette interprétation, dans des cas où l’employeur, en l’occurrence la SMTC, n’exerce aucun contrôle sur le lieu de travail où les inspecteurs de la sécurité maritime assument leurs fonctions de responsables de la réglementation des activités de transport maritime, pourrait, selon moi, mener à des résultats imprévus et déraisonnables. Ne sachant pas à quoi s’attendre dans chacun des centaines ou des milliers de navires à inspecter, l’employeur suivant cette logique devrait nommer une personne qualifiée pour déterminer s’il y a un risque d’exposition à n’importe quelle matière dangereuse qui pourrait ou non être présente sur le navire. Comment l’enquête se déroulerait-elle dans ce genre de conditions, où l’on ne sait même pas quelle est la substance dangereuse en question? À mon avis, la détermination d’un risque d’exposition à une substance dangereuse particulière doit précéder l’obligation de nommer une personne qualifiée. Cette interprétation est davantage en accord avec l’objet de l’article 10.4 du RCSST. Selon l’article 10.4, l’employeur doit procéder à une analyse ciblée et exhaustive de la substance dangereuse particulière à laquelle les employés risquent d’être exposés en tenant compte de certains facteurs (articles 10.4(2), 10.5, 10.6.).

[49] À mon avis, l’agent de SST Healey a confondu les obligations découlant de la partie XIX (Programme de prévention des risques) et les prescriptions de l’article 10.4 du RCSST. L’objet du PPR est de relever tous les risques connus ou prévisibles de façon à informer les employés de ce à quoi ils doivent s’attendre lorsqu’ils montent à bord d’un navire. M. Kennedy a reconnu dans son témoignage qu’il y avait des « lacunes » dans le PPR et son application, et ce, jusqu’au moment du refus du 15 avril 2012. La prévention des risques était effectivement inadéquate le jour du refus, puisqu’on n’a pas fourni de renseignements aux employés sur les risques connus ou prévisibles qui pouvaient exister sur le navire Shamook de la GCC. La preuve a établi que des mesures visant à corriger la situation avaient été mises en place pendant les mois de mai et juin 2012 et consignées dans une PCV, mesures que l’agent de SST O’Neill a jugées acceptables. Dans ces circonstances, une instruction enjoignant l’employeur de s’acquitter de ses obligations aux termes de l’alinéa 125(1)s) du Code et de la partie XIX du RCSST en fonction des événements du 15 avril 2012, ne serait d’aucune utilité, selon moi. Je ne vois donc pas la nécessité d’aborder l’argument de l’employeur selon lequel un agent d’appel ne peut pas constater une infraction différente au Code et d’émettre une instruction aux termes du paragraphe 145(1) d’après la preuve présentée dans la procédure d’appel.

[50] C’est toutefois, à mon avis, une question différente de celle soulevée par l’instruction visée par l’appel, qui ne touche que les conditions déclenchant l’application de l’article 10.4 du RCSST. Il est évident que l’employeur considère que le capitaine Mackey a bien agi en interrompant son inspection lorsqu’il a soupçonné que la substance blanche sur les rebords et le pont du navire était de l’amiante et que les représentants du navire n’ont pas pu répondre à ses questions sur la présence ou l’état de cette substance. Si l’analyse de l’échantillonnage massif avait révélé la présence de fibres d’amiante aéroportées, l’article 10.4 se serait appliqué selon moi, et l’employeur du capitaine Mackey aurait été tenu de nommer une personne qualifiée pour faire enquête et préparer un rapport sur ses conclusions et recommandations, en tenant compte des facteurs mentionnés au paragraphe 10.4(2) du RCSST.

[51] La façon dont cette obligation est mise en œuvre dans un contexte où l’employeur ne possède pas le lieu de travail ou n’en a pas le contrôle accroît la complexité de la question et soulève une autre série de questions. L’approche de la SMTC, qui consiste à utiliser les pouvoirs discrétionnaires des inspecteurs en tant qu’administrateurs de la législation sur le transport maritime ou découlant du Code lorsqu’ils agissent comme agents de la sécurité dans le secteur maritime, pour ordonner à l’exploitant du navire d’enquêter sur la situation et de la corriger, me semble une approche pragmatique et acceptable dans ce contexte particulier. Selon moi, on n’a pas affaire ici à un employeur qui sous-traite ses responsabilités en vertu du Code : le résultat de ce processus est qu’une personne responsable des lieux s’assure que les employés de la SMTC peuvent y travailler en toute sécurité. En interrompant les services d’inspection et en utilisant leurs pouvoirs d’application de la loi pour demander aux exploitants du navire de s’assurer, en engageant des experts en la matière, de mener des essais et des analyses, d’apporter des changements structurels ou de corriger autrement le problème défini, l’employeur s’efforce de s’assurer que les inspecteurs de la sécurité maritime exercent leurs fonctions dans un environnement sûr.

[52] Je souligne toutefois que, dans de telles circonstances, toute enquête qui pourrait être ordonnée et le rapport qui s’ensuit doivent respecter les exigences prévues aux articles 10.4, 10.5 et 10.6 du RCSST en ce qui concerne leur contenu, la marche à suivre, les recommandations formulées dans le rapport et les mesures de précaution à prendre. La question à savoir si des inspecteurs de la sécurité maritime ont suffisamment de connaissances pour comprendre les conclusions et les recommandations contenues dans le rapport et saisir parfaitement les effets d’une exposition sur leur santé, selon la nature de la substance en cause, est une question de fait qu’il convient de déterminer au cas par cas. Il se pourrait que, dans un cas donné, une expertise particulière soit nécessaire pour comprendre les conclusions et les recommandations de la personne qualifiée et veiller à leur application correcte dans le contexte des fonctions des inspecteurs de la sécurité maritime. L’employeur doit donc être prêt à s’adapter à ces situations, qui sont aussi des questions de fait qui doivent être tranchées au cas par cas. Mais comme je l’ai mentionné plus tôt dans ces motifs, cela dépasse ce que je considère être la portée du présent appel.

[53] Puisque j’ai conclu, au vu des faits exposés dans cette affaire, qu’il n’y avait aucun risque que la santé ou la sécurité des employés soit compromise par l’exposition à une substance dangereuse, en l’occurrence des fibres d’amiante aéroportées, l’employeur n’était donc pas tenu de nommer une personne qualifiée en vertu de l’article 10.4 du RCSST. Il s’agit d’une question préliminaire qui doit être établie avant qu’une conclusion d’infraction à l’article 10.4 du RCSST puisse être faite, et l’agent de SST Healey ne pouvait pas, en l’espèce, conclure le 5 juin 2012 que l’article 10.4 du RCSST avait été enfreint. L’instruction n’est donc pas fondée et doit être annulée.

[54] Compte tenu de ma décision, il n’est pas utile d’aborder la question à savoir si les gestionnaires de la SMTC sont des personnes qualifiées aux fins de l’article 10.4 du RCSST. Bien que l’employeur et l’agent de SST Healey en aient discuté au moment des événements après qu’un gestionnaire, M. James Kenny, a dit que les gestionnaires « ne comprenaient pas grand-chose » à la question de l’exposition à l’amiante à bord du navire Henry Larsen de la GCC, je n’ai pas reçu de preuves suffisantes qui me permettent d’arriver à une conclusion éclairée à ce sujet, d’une manière générale, ce que demandait l’intimée. Toutefois, je dirai ceci : dans le cadre des mesures prises par l’employeur pour se conformer à l’instruction de l’agent de SST Healey comme l’exige la loi, M. Kennedy a informé l’agent de SST Healey qu’il demandait à l’équipe des affaires environnementales régionales de Transports Canada d’agir à titre de « personne qualifiée » en vertu de l’article 10.4 du RCSST. Cette équipe réunit des spécialistes de l’environnement et des ingénieurs chargés de la prestation des programmes et des services de Transports Canada dans le domaine de l’environnement, comme la gestion des sites contaminés et la protection de l’environnement. Les membres de cette équipe ont une formation et une expérience de travail variées, ce qui leur permet de donner des conseils et de l’expertise sur la prévention des risques. Cette approche semble tenir compte du fait qu’une expertise appropriée pourrait, dans certains cas, s’avérer nécessaire, comme je l’ai mentionné plus tôt, pour préparer ou examiner les analyses et les recommandations contenues dans le rapport mentionné à l’article 10.4 du RCSST, lorsqu’on a établi, au moyen du PPR et des analyses des tâches critiques, qu’il y a un risque que la santé des employés soit compromise par l’exposition à une substance dangereuse. Toutefois, comme j’ai déterminé qu’il n’y avait pas eu d’infraction à l’article 10.4 en l’espèce, je considère cette question comme étant purement théorique pour ce qui est de la présente procédure.

[55] De la même façon, la portée et le caractère adéquat de la formation offerte aux employés sur les risques liés à l’amiante, ainsi que la mise en œuvre du PPR et la réalisation des analyses des tâches critiques, ne se rapportent qu’indirectement à l’appel, et je ne fais aucune constatation ni conclusion sur cette question. J’estime que le respect par la SMTC de son PPR dépasse la portée du présent appel et je m’abstiendrai de faire toute autre observation à ce sujet. Il vaut mieux laisser cette question aux agents de santé et de sécurité du Programme du travail dans leur continuum d’observation de la loi avec la SMTC, selon les besoins.

Décision

[56] Pour les raisons exposées ci-dessus, je fais droit à l’appel et annule l’instruction de l’agent de SST Healey datée du 5 juin 2012.

Pierre Hamel
Agent d’appel

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