2018 TSSTC 11

Date : 2018-09-26

Dossier : 2017-05

Entre :

Emploi et Développement social Canada, Appelant

Et

Syndicat de l'Emploi et de l'Immigration du Canada, Intimé

Indexé sous : Emploi et Développement social Canada c. Syndicat de l'Emploi et de l'Immigration du Canada

Affaire : Appel interjeté en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail à l’encontre d’une instruction émise par un représentant délégué par le ministre du Travail.

Décision : L’instruction est confirmée.

Décision rendue par : Mme Katia Néron, agente d’appel

Langue de la décision : Français

Pour l’appelant : Me Marc Séguin, avocat, ministère de la Justice, groupe du droit du travail et de l’emploi

Pour l’intimé : M. Jean-Rodrigue Yoboua, agent de représentation, Alliance de la Fonction publique du Canada

Référence : 2018 TSSTC 11

Motifs de la décision

[1] La présente décision concerne un appel déposé le 30 mars 2017 par le Ministère de l’Emploi et du Développement social du Canada (EDSC, employeur) conformément au paragraphe 146(1) du Code canadien du travail, LRC 1985, c L-2 (le Code). L’appel est à l’encontre d’une instruction émise le 2 mars 2017 par M. Daniel Boulanger, représentant délégué par le ministre du Travail (le délégué ministériel).

[2] L’instruction contestée se lit comme suit :

Dans l'affaire du Code Canadien du Travail

Partie II – Santé et Sécurité au Travail

Instruction a l'employeur en vertu du paragraphe 141.(1) a)

Le 2 mars 2017, le délégué officiel du ministre du Travail soussigné a procédé à l’enquête d’une situation s’étant produite dans le lieu de travail exploité par Ministère de l’Emploi et du Développement social, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis au 200, rue Montcalm, C.P. 2090, Gatineau, Québec, K1A 0J9, ledit lieu étant parfois connu sous le nom de Accréditation des établissements d’enseignement.

Au cours de cette enquête, le délégué officiel du ministre a pu établir que la plaignante refuserait de reconnaître comme personne compétente, conformément au paragraphe 20.9(1) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, toute personne qui est un employé du Gouvernement du Canada, du fait qu’elle ne peut la considérer impartiale.

Considérant que la nomination d’une personne compétente, c’est-à-dire, entre autres, une personne impartiale et considérée comme telle par les parties, est essentielle afin de régler la situation où Mme […] allègue être victime de violence;

Et

Considérant que l’employeur lui a proposé à ce jour, à titre de personne compétente pour fin d’enquête, que des personnes employées du Gouvernement du Canada ou une équipe formée en partie d’au moins une personne employée du Gouvernement du Canada;

Il vous est ordonné pas les présentes, en vertu du paragraphe

141.(1) a) de la partie II du Code canadien du travail, de faire enquête sur la situation de violence en milieu de travail alléguée par Mme […] en lui proposant des personnes qui ne sont pas des employés du Gouvernement du Canada afin de nommer une personne compétente qui n’est pas un employé du Gouvernement du Canada, ce au plus tard le 3 avril 2017. La personne compétente nommée par l’employeur doit respecter les critères cités à l’alinéa 20.9(1) a), b) et c) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

Fait à Montréal ce 2ième jour de mars 2017.

(s) Daniel Boulanger
Délégué officiel du ministre du Travail

[…]

[3] À la fin de l’audience, les représentants des deux parties ont demandé que les détails de la situation de violence alléguée par l’employée, que je nommerai ici Mme A, ainsi que les noms des personnes qui y sont indiqués, ne soient pas mentionnés dans ma décision. J’ai informé les parties que j’acquiesçais à cette demande.

[4] En l’espèce, les personnes contre qui Mme A a formulé ses allégations de violence en milieu de travail ne sont pas parties à la procédure et n’ont donc pas pu donner leurs observations.

[5] De plus, bien que la situation de violence alléguée par Mme A soit à l’origine de sa plainte auprès du Programme du travail,Note de bas de page 1 le présent litige ne porte pas sur le bien-fondé de ces allégations.

[6] L’appelant ne conteste également pas que Mme A allègue dans sa plainte avoir vécu une situation de violence dans son milieu de travail ni qu’il devait nommer une personne compétente pour faire enquête sur cette situation comme le prévoit le paragraphe 20.9(3) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail (le Règlement).

[7] La question soulevée dans la présente affaire peut donc, à mon avis, très bien être examinée sans faire référence aux détails de la situation alléguée de violence ni aux noms des personnes qui y sont mentionnés.

Contexte

[8] Le rapport d’enquête du délégué ministériel produit au Tribunal a été déposé en preuve à l’audience sous la cote « Pièce 1 ». Dans son témoignage, M. Boulanger a expliqué les motifs de son instruction. Je retiens ce qui suit de son rapport d’enquête et de son témoignage.

[9] Le 24 février 2014, Mme A, une employée d’EDSC, rencontre sa directrice générale pour se plaindre d’une situation qu’elle dit vivre avec sa gestionnaire et son directeur immédiats. Elle lui explique que cette situation lui cause du stress et qu’elle a peur de continuer à travailler avec ces personnes au point que cela lui crée un cadre de travail qu’elle qualifie de malsain et toxique. Elle lui demande également de l’aide pour obtenir une mutation. Elle lui dit en outre que c’est la première fois dans sa vie professionnelle qu’elle fait une telle démarche.

[10] Le 14 mars 2014, Mme A rencontre à nouveau sa directrice générale. On l’informe qu’elle ne recevra pas d’aide pour sa demande de mutation. De juillet 2014 à mars 2015, Mme A a pris un congé de maladie.

[11] En septembre 2014, Mme A dépose un grief contre son employeur. Elle dépose aussi une réclamation à la CSSTNote de bas de page 2.

[12] En mars 2015, à son retour de congé de maladie, Mme A est réaffectée pour ne plus relever des personnes dont elle s’était plainte en février 2014.

[13] Le 2 mars 2015, Mme A transmet une lettre à sa directrice générale dans laquelle elle lui rappelle leurs discussions du 24 février 2014, ainsi que la réponse obtenue pour sa demande de mutation. Dans cette lettre, elle demande qu’une enquête soit menée conformément à la partie XX du Règlement. Elle demande aussi que tous les arrangements pour sa participation à l’enquête passent par M. Éric Boileau. M. Boileau est représentant national pour le Syndicat de l’Emploi et de l’Immigration du Canada. Une copie de cette lettre est transmise à M. Marc Béland. M. Béland est représentant syndical en santé et sécurité pour l’Alliance de la Fonction Publique du Canada dans la région de la capitale nationale.

[14] Le 8 mai 2015, EDSC propose à Mme A et à M. Boileau de tenter de régler sa plainte et ses griefs à l’amiable par médiation en utilisant les services de gestion informelle des conflits à l’interne. La médiation ayant été annulée, Mme A transmet le 12 juin 2015 à son employeur une plainte de violence en milieu de travail. Mme A précise qu’elle demande un enquêteur indépendant et compétent pour enquêter sur sa plainte.

[15] Le 28 juillet 2015, le Programme du travail reçoit une plainte de Mme A alléguant que son employeur refuse d’enquêter sur sa plainte relative à la partie XX du Règlement. Dans cette plainte, elle demande un enquêteur indépendant pour enquêter sur sa situation.

[16] Le 20 août 2015, le Programme du travail reçoit une deuxième plainte de Mme A. Dans cette plainte, elle décrit brièvement la situation de violence qu’elle allègue avoir vécue et y joint sa lettre du 2 mars 2015 et son courriel du 12 juin 2015. M. Boulanger est affecté à ce dossier.

[17] Le 28 août 2015, M. Boulanger contacte Mme A pour obtenir plus d’informations. Au cours de leur discussion, Mme A l’informe de l’annulation de la médiation pour tenter de régler sa plainte et ses griefs à l’amiable. De cette discussion, il comprend que Mme A allègue que son employeur ne suit pas le processus de traitement de sa plainte que prévoit la partie XX du Règlement. Le même jour, M. Boulanger tente d’obtenir le plan d’action d’EDSC pour un règlement à l’amiable de la plainte de Mme A ou une enquête sur celle-ci.

[18] Le 4 septembre 2015, M. Boulanger est informé que M. Steven Risseeuw est le nouveau directeur général affecté au dossier de Mme A. M. Risseeuw est directeur général des Opérations du mode en personne et des stratégies, à la Direction générale de services aux citoyens à Service Canada, une division d’EDSC.

[19] Les 17 et 29 septembre 2015, M. Boulanger réitère sa demande pour obtenir le plan d’action à EDSC en vue de régler à l’amiable la plainte de Mme A ou d’enquêter sur celle-ci.

[20] Les 14 et 15 décembre 2015, M. Boulanger est informé par M. Michel Gaudreau qu’EDSC propose à Mme A de régler sa plainte à l’amiable. M. Gaudreau a été affecté auprès de M. Risseeuw en tant que conseiller pour le dossier de Mme A. Il est conseiller régional en ressources humaines et santé et sécurité au travail à la Direction des opérations des services aux ressources humaines d’EDSC. Dans un courriel adressé le 15 décembre 2015 à M. Boulanger, M. Gaudreau indique avoir récemment reçu, après l’audition du grief déposé par Mme A, l’énoncé de ses allégations de violence en milieu de travail et que rien dans ces allégations ne permet selon lui de conclure à de la violence en milieu de travail. M. Gaudreau indique aussi qu’ils vont rencontrer les représentants syndicaux de Mme A afin de chercher à régler la situation.

[21] Le 16 décembre 2015, M. Gaudreau informe M. Boulanger que, lors de la rencontre avec la représentante syndicale de Mme A, Mme Denise Camus, celle-ci a indiqué qu’elle ne pouvait envisager un règlement à l’amiable.

[22] Le même jour, M. Risseeuw soumet à Mme A une liste d’enquêteurs potentiels à l’externe pour enquêter sur sa plainte. Toutes ces personnes sont des enquêteurs provenant de firmes externes et ayant de l’expérience dans le domaine de la violence en milieu de travail. Dans le courriel donnant ces informations, M. Risseeuw précise qu’EDSC donnera le mandat à l’enquêteur choisi par Mme A de recevoir et d’examiner les détails de ses allégations afin de vérifier si la partie XX s’applique dans les circonstances. À la suite d’un courriel du 23 décembre 2015 de Mme Camus, des informations sur les connaissances et l’expérience des enquêteurs externes potentiels sont transmises à Mme A pour qu’elle puisse les examiner.

[23] Le 29 janvier 2016, Mme A, accompagnée de ses représentants syndicaux, M. Boileau et Mme Camus, rencontre M. Risseeuw et son conseiller, M. Gaudreau, pour les informer de son choix. Ce choix s’est porté sur Mme Jelly de la firme externe Glencastle Security Inc. Au cours de cette rencontre, M. Risseeuw réitère à Mme A que Mme Jelly aura le mandat de recueillir les détails de ses allégations et qu’il attendra son rapport sur ce point. Il lui précise qu’elle n’aura à passer qu’une seule fois par le processus d’enquête.

[24] En février 2016, Mme Jelly transmet son rapport à l’employeur. Ce rapport présente de façon détaillée la situation de violence que Mme A allègue avoir vécue dans son lieu de travail entre 2012 et 2014. À la fin de son rapport, Mme Jelly conclut que les comportements dont Mme A allègue avoir été victime correspondent, à la suite de son enquête prima facie, à la définition d’une situation de violence en milieu de travail au sens de la partie XX du Règlement et qu’elle recommande que soit menée une enquête sur la plainte soumise par Mme A.

[25] Le 31 mai 2016, M. Risseeuw informe Mme A qu’EDSC a l’intention de nommer Mme Francine Morse pour enquêter sur sa plainte. Mme Morse est une professionnelle dans le domaine de la santé et la sécurité au travail et elle travaille à l’Agence du revenu du Canada.

[26] Le 2 juin 2016, M. Boileau informe M. Risseeuw qu’il ne pense pas que Mme Morse puisse être compétente et impartiale pour mener l’enquête sur la plainte de Mme A. M. Boileau demande aussi à M. Risseeuw de joindre le CV de la personne dans la prochaine proposition d’enquêteur. Le courriel de M. Boileau précise de plus que, si M. Risseeuw l’accepte, ils sont d’accord pour que Mme Jelly mène l’enquête.

[27] Le 14 juin 2016, M. Risseeuw demande à Mme A de fournir les raisons pour lesquelles elle ne considère pas que Mme Morse soit impartiale pour enquêter sur sa plainte. M. Risseeuw lui indique que, si elle ne lui fournit pas ses motifs, il nommera Mme Morse pour enquêter sur sa plainte. Le 6 septembre 2016, à la suite de la demande de M. Boileau, Mme A reçoit un résumé de l’expérience et de la formation professionnelles de Mme Morse.

[28] Le 7 septembre 2016, M. Risseeuw informe, par courriel, M. Boulanger de son intention de nommer Mme Morse. Dans le courriel à M. Boulanger, M. Risseeuw précise que la pratique, dans les ministères du gouvernement du Canada, pour la tenue des enquêtes sur des plaintes de violence dans leurs lieux de travail consiste à recourir au personnel des départements des ressources humaines d’autres ministères partenaires, ce qui évite, à son sens, le risque de partialité et permet aussi d’optimiser l’expérience et l’expertise à l’interne.

[29] Le 16 septembre 2016, Mme A transmet une plainte au Programme du travail alléguant que son employeur veut procéder à l’enquête sur sa plainte sans qu’elle y participe et qu’il va nommer Mme Morse alors qu’elle ne considère pas cette personne comme étant impartiale.

[30] Le 20 septembre 2016, M. Boulanger est informé que M. Gilles Hubert est dorénavant chargé de traiter le dossier de Mme A. M. Hubert est gestionnaire à la Direction générale des services des ressources humaines d’EDSC.

[31] Le 22 septembre 2016, M. Boulanger demande à Mme A de fournir par écrit, avec copie à M. Hubert, les raisons pour lesquelles elle ne considère par Mme Morse comme étant une personne impartiale.

[32] Le même jour, Mme A répond qu’elle ne pense pas que Mme Morse soit une tierce personne impartiale pour mener l’enquête sur sa plainte parce que cette personne représente l’employeur dans ses activités quotidiennes de travail et a des relations internes avec des personnes dans le ministère. Mme A indique aussi avoir été anxieuse et angoissée par le processus d’enquête sur sa plainte, notamment compte tenu de la longue période d’attente avant qu’il ne commence mais que, lorsque cette enquête a finalement débuté et après avoir rencontré Mme Jelly, elle a cru à la fois en sa compétence et en son impartialité parce qu’elle était un entrepreneur indépendant. Elle indique aussi qu’elle ne comprend pas pourquoi son employeur a décidé de changer cette personne pour une autre.

[33] Le 26 septembre 2016, M. Boulanger envoie un courriel à M. Hubert à propos de son interprétation de la décision dans l’affaire Association des employeurs maritimes c. Syndicat des débardeurs, SCFP, locale 375, 2016 TSSTC 14 (Association des employeurs maritimes). Dans ce courriel, il indique que, selon les conclusions de l’agent d’appel Pierre Hamel dans cette affaire, Mme A est en droit, à son avis, de refuser la nomination de Mme Morse pour enquêter sur sa plainte pour les motifs qu’elle invoque, motifs qui ne lui semblent pas abusifs. M. Boulanger demande de plus à M. Hubert de lui envoyer, d’ici le 14 octobre 2016, son plan d’action pour nommer une personne compétente qui respecte l’article 20.9 et suivants du Règlement pour enquêter sur la plainte.

[34] Le 14 novembre 2016, M. Hubert propose à Mme A deux autres personnes ne travaillant pas pour EDSC pour enquêter sur sa plainte : M. Serge Marion ou M. Luc Charron. M. Marion travaille à la Division de la sécurité nationale du Ministère de la Défense nationale et donne des conseils d’expert en matière de prévention du harcèlement et de la violence. M. Charron est conseiller principal en santé et sécurité au travail à la Division de la santé et sécurité au travail à l’Agence canadienne des douanes.

[35] Le 15 novembre 2016, M. Boileau informe M. Hubert qu’ils ne pensent pas qu’une personne employée par le gouvernement du Canada puisse être impartiale en enquêtant sur la plainte de Mme A. M. Boileau réitère aussi que Mme Jelly est considérée par Mme A comme une tierce personne impartiale et qu’elle demeure un choix acceptable à leurs yeux pour mener l’enquête sur la plainte.

[36] Le 20 décembre 2016, Mme A transmet un courriel à M. Boulanger. Dans ce courriel, elle indique que, depuis le début, elle demande qu’une tierce personne impartiale, compétente et ne travaillant pas au gouvernement du Canada enquête sur sa plainte car elle avait vu, entendu parler et connu des témoins réticents à se confier à des enquêteurs gouvernementaux à cause des représailles possibles dans leur milieu de travail. Mme A indique en outre qu’elle aurait davantage confiance, connaissant les témoins impliqués dans sa plainte, que ceux-ci se sentent plus confortables à se confier à un enquêteur impartial externe ne travaillant pas pour le gouvernement du Canada. Selon Mme A, cela aiderait non seulement à diminuer la crainte réelle de représailles mais aussi son niveau d’anxiété parce qu’elle vit ce supplice de l’attente depuis presque quatre ans et qu’à ce jour, aucune enquête sur sa plainte n’a été faite.

[37] Le 26 janvier 2017, M. Hubert indique à Mme A que l’autre partie en cause dans sa plainte ne considère pas Mme Jelly comme étant impartiale. M. Hubert lui propose une 4ième personne pour enquêter sur sa plainte : M. David Zanetti. M. Zanetti travaille comme agent principal de projet au Bureau national de la santé et sécurité du travail d’EDSC et a une formation récente sur la recherche d’une personne compétente en vue d’appliquer la partie XX du Règlement.

[38] Le 31 janvier 2017, Mme A informe M. Hubert qu’elle est désolée de ne pouvoir accepter M. Zanetti pour enquêter sur sa plainte puisqu’il travaille avec elle sur un projet de santé et de sécurité et qu’à ses yeux, elle ne voit pas comment cela pourrait conduire à un examen impartial de sa plainte, tant pour l’autre partie en cause que pour elle-même.

[39] Le 2 février 2017, M. Hubert propose à Mme A que l’enquête sur sa plainte soit menée conjointement par lui-même et M. Marc Béland.

[40] Le 7 février 2017, Mme A informe M. Hubert qu’elle a discuté avec M. Béland et qu’elle ne peut accepter sa proposition sur ce processus d’enquête conjointe. Elle précise que ce processus ne constituerait pas pour elle un examen impartial de sa plainte.

[41] Le 13 février 2017, M. Hubert écrit à M. Boulanger en réponse à une promesse de conformité volontaire (PCV) émise deux semaines plus tôt. Dans cette PCV, M. Boulanger demandait à EDSC de veiller à nommer une personne compétente conformément au paragraphe 20.9(3) du Règlement pour enquêter sur la plainte de Mme A. Dans sa réponse, M. Hubert dit :

[…] Nous avons tenu la promesse de conformité volontaire, signée le 30 janvier dernier; à ce jour, 6 personnes compétentes ont été proposées par l’employeur.

Nous soumettons que Mme […] abuse de ses droits en refusant systématiquement toutes personnes proposées par l’employeur et ce, de façon capricieuse et arbitraire (2016 TSSTC 14). […]

Tel qu’indiqué dans la décision du Tribunal SST du Canada, ce refus systématique devrait être interprété comme une renonciation au droit qui lui est conféré au paragraphe 20.9(3) du Règlement.

L’employeur a donc l’intention de procéder avec la nomination d’une personne compétente : M. Luc Charron de l’Agence des services frontaliers du Canada. M. Charron n’a aucun lien avec l’employeur […].

M. Charron débutera l’enquête le 27 février 2017.

[42] Le même jour, M. Boulanger demande à Mme A si elle accepte M. Charron pour enquêter sur sa plainte. Mme A répond que, bien qu’elle comprenne que M. Charron puisse être un enquêteur compétent, elle ne pense pas qu’il puisse être impartial pour enquêter sur sa plainte, car il travaille à l’Agence canadienne des services frontaliers du Canada.

[43] À la suite de son enquête, M. Boulanger a conclu qu’après que l’employeur ait proposé Mme Morse pour enquêter sur la plainte, Mme A a estimé que cette personne n’était pas impartiale pour le faire parce qu’elle était employée du gouvernement fédéral. M. Boulanger a également conclu que, de façon générale, selon Mme A, une personne employée du gouvernement du Canada ou une équipe composée d’au moins une personne employée du gouvernement du Canada n’était pas impartiale pour enquêter sur sa plainte.

[44] C’est pourquoi, M. Boulanger a conclu que les personnes proposées étaient essentiellement rejetées sur le critère de l’impartialité et non pas sur celui des compétences professionnelles.

[45] En se référant à la position de son administration centrale, M. Boulanger a en outre conclu que pour qu’une personne puisse être considérée comme une personne compétente au sens du Règlement, les parties concernées doivent la considérer comme impartiale et qu’ainsi, lorsque Mme A a fait part de ces motifs pour refuser les enquêteurs proposés sur sa plainte, ces motifs devaient être pris en compte par l’employeur pour nommer une personne compétente.

[46] Pour ces motifs, M. Boulanger a déterminé que l’employeur avait proposé des personnes sans consulter l’une des parties en cause et qu’il n’y avait pas eu d’entente des parties sur l’impartialité de la personne pouvant mener l’enquête. Selon lui, il n’avait pas à décider si les motifs de refus sur le critère de l’impartialité des parties en cause étaient valables ou non. À son avis, cela relève, aux termes du Règlement, d’une entente entre les parties.

[47] M. Boulanger a enfin déclaré que son instruction visait à dénouer l’impasse entre les parties et à ce que l’employeur se conforme au Règlement.

Question en litige

[48] Dans le présent appel, il s’agit de se prononcer sur le bien-fondé de l’instruction émise par le délégué ministériel, en vertu de l’alinéa 141(1)(a), enjoignant à l’employeur de proposer des personnes qui ne soient pas des employés du gouvernement du Canada pour enquêter sur la situation de violence alléguée par l’employée.

Observations des parties

A) Observations de l’appelant

[49] L’avocat de l’appelant, Me Marc Séguin, a fait témoigner M. Risseeuw et M. Hubert. Au cours des témoignages de M. Risseeuw et M. Hubert, Me Séguin a déposé en preuve le CV de Mme Morse et celui de M. Charron. Il a aussi déposé des résumés des compétences professionnelles de M. Zanetti et M. Hubert. Je retiens ce qui suit des témoignages de M. Risseeuw et M. Hubert, ainsi que des documents soumis.

[50] M. Risseeuw a déclaré que Mme A a transmis sa plainte à l’employeur avant qu’il soit son directeur général. Il a ajouté qu’il a été chargé de ce dossier dès que Mme A a été réaffectée dans son organisation. Après le dépôt de sa plainte, il a rencontré Mme A avec les ressources humaines pour tenter de régler sa plainte. Ensuite, ils ont choisi de tenter de régler à l’amiable en passant par les services de gestion informelle des conflits. Malheureusement, l’ancienne directrice générale de Mme A a annulé la médiation, et cette tentative de règlement à l’amiable a ainsi échoué.

[51] Après cet échec, l’employeur a choisi d’engager un enquêteur externe pour mener une enquête préliminaire afin d’obtenir de façon formelle et documentée les détails des allégations de Mme A, de déterminer si ceux-ci correspondaient à la définition d’une situation de violence selon le Règlement et s’ils devaient procéder à une enquête sur celles-ci. M. Risseeuw a ajouté que l’employeur a décidé de procéder ainsi, car on ne voyait rien, dans les allégations de Mme A déjà faites verbalement et obtenues ensuite par écrit, qui puisse indiquer de la violence en milieu de travail.

[52] M. Risseeuw a déclaré qu’à la suite des conclusions du rapport de Mme Jelly, ils ont choisi d’offrir à Mme A de tenter à nouveau de régler la plainte mais sans succès. L’employeur a alors décidé de chercher une personne compétente pour mener l’enquête sur la plainte, mais ils ne sont pas arrivés à s’entendre sur le choix de cette personne. L’employeur a décidé de ne pas poursuivre l’enquête avec Mme Jelly, car bien qu’il reconnaisse qu’elle se soit acquittée des obligations contractuelles qu’il lui avait données, il a été déçu de son rapport. En effet, avant de formuler ses conclusions, elle aurait dû les valider, selon lui, en recueillant les observations des personnes contre qui les allégations de violence avaient été portées.

[53] En outre, bien que M. Risseeuw admette qu’il aurait pu retourner à la liste d’enquêteurs externes potentiels soumise auparavant à Mme A, la direction essayait d’établir une liste d’enquêteurs internes potentiels pour développer l’expertise à l’interne. Bien qu’il n’ait jamais soulevé cet argument devant Mme A ou ses conseillers syndicaux, M. Risseeuw a ajouté que le coût d’une enquête à l’externe a été fixé à 47 000 $ et que, les dépenses étant une priorité pour un gestionnaire, il voulait économiser les fonds publics en offrant la même qualité d’enquête, mais à l’interne.

[54] M. Hubert est conseiller principal en santé et sécurité au travail au secrétariat du Conseil du Trésor. Au moment où M. Risseeuw a fait appel à lui pour s’occuper de la plainte de Mme A, M. Hubert était gestionnaire des programmes des ressources humaines à l’Administration du programme ministériel de santé et sécurité au travail de EDSC.

[55] En janvier 2016, l’autre partie en cause était d’accord pour que Mme Jelly fasse l’enquête prima facie. Après avoir reçu le rapport de Mme Jelly en février 2016, M. Hubert a refusé de la nommer comme personne compétente pour enquêter sur la plainte de Mme A sans avoir consulté l’autre partie en cause. Selon lui, Mme Jelly ne pouvait pas en arriver à ses conclusions sans avoir également examiné les faits de l’autre partie en cause. Cependant, M. Hubert a reconnu que l’enquête prima facie visait à vérifier si, « à première vue », la situation alléguée pouvait s’appliquer à la partie XX du Règlement pour permettre, si ce n’était pas le cas, de régler la plainte.

[56] À la suite de l’enquête prima facie, l’employeur a décidé de nommer une personne pour mener l’enquête, tel que le prévoit le Règlement, sur la plainte de Mme A et M. Hubert a été chargé de trouver cette personne à l’interne.

[57] M. Hubert a déclaré qu’il existe une liste d’une quinzaine de personnes travaillant au gouvernement et qui sont recommandées pour enquêter sur ce type de plainte. Il a alors fait un courriel à ces personnes et a reçu une réponse, de Mme Morse. M. Hubert a déclaré qu’avant de proposer Mme Morse comme enquêtrice, il ne l’avait pas rencontrée mais avait communiqué avec elle uniquement pour connaître ses disponibilités. M. Hubert a déclaré qu’à son avis, les motifs du refus de Mme Morse pour des motifs de partialité invoqués par Mme A ne sont pas valables, car cette personne est compétente en santé et sécurité au travail, est assujettie à un code de valeurs et d’éthique et, ne travaillant pas pour EDSC, n’a aucun lien dans son travail quotidien avec l’employeur. M. Hubert a déclaré qu’il savait que Mme Morse était affiliée aux ressources humaines mais ne savait pas que Mme A ne serait pas ouverte à ce genre de profil pour le choix d’une personne compétente, même s’il avait compris qu’elle avait indiqué, pour rejeter Mme Morse, ne pas vouloir d’une tierce personne qui représente l’employeur dans ses tâches quotidiennes de travail. Selon M. Hubert, Mme A aurait dû préciser ce qu’elle voulait dire par les mots « représente l’employeur dans ses activités quotidiennes de travail » et « a des relations internes avec des personnes dans le ministère ».

[58] En contre-interrogatoire, M. Hubert a admis avoir compris de la première réponse de Mme A rejetant Mme Morse que celle-ci ne voulait pas, s’appuyant sur le critère d’impartialité, d’un enquêteur qui provienne du gouvernement du Canada. De l’avis de M. Hubert, ce motif de rejet n’est toutefois pas valable parce qu’il signifie, selon lui, que l’on préjuge de la partialité des employés du gouvernement du Canada sans égard à leurs compétences professionnelles.

[59] À propos de ses deux autres propositions de nommer comme enquêteur, soit M. Marion, soit M. Charron, M. Hubert a déclaré connaître le parcours professionnel de M. Charron, savoir qu’il donne des conseils aux ressources humaines dans l’exercice de ses fonctions et qu’il a un profil similaire sur ce point à celui de Mme Morse. M. Hubert a déclaré que M. Marion a aussi ce type de profil. M. Hubert a déclaré que, selon lui, le fait que Mme Morse, M. Marion et M. Charron travaillent pour d’autres ministères qu’EDSC les rend acceptables sur le critère de l’impartialité.

[60] M. Hubert a déclaré que, lorsqu’il a fait sa troisième proposition sur M. Zanetti comme enquêteur sur la plainte, il savait que Mme A le connaissait et il pensait qu’elle l’accepterait et qu’ils pourraient s’entendre pour régler la plainte. Selon lui, le fait que M. Zanetti travaillait avec Mme A ne suffit pas pour conclure à la partialité de ce dernier.

[61] Pendant ce temps-là, le comité de santé et de sécurité a recommandé une enquête conjointe. C’est pourquoi M. Hubert a fait sa quatrième proposition afin qu’il soit nommé lui-même avec M. Béland pour enquêter. En contre-interrogatoire, M. Hubert a reconnu s’être fait une opinion sur la plainte de Mme A et savoir que M. Béland était au courant de ce dossier. Il croyait cependant qu’ils auraient pu trouver un équilibre sur le critère de l’impartialité, lui représentant l’employeur, M. Béland représentant le syndicat de Mme A.

[62] Me Séguin soumet que l’instruction doit être annulée, compte tenu de ce qui suit. L’employeur n’a pas contrevenu au paragraphe 20.9(3) du Règlement en omettant de nommer une « personne compétente » pour mener une enquête sur la plainte de Mme A.

[63] Me Séguin s’est d’abord référé aux paragraphes 60 et 61 de la décision Association des employeurs maritimes où l’agent d’appel Hamel a ainsi conclu :

On a évoqué les risques d’abus que pourraient occasionner cette application dite « textuelle » de l’article. Le refus de consentir à la nomination d’une personne sans devoir en exposer les raisons ni les justifier pourrait, comme le note avec justesse l’avocate de l’appelante, être motivé par des considérations discriminatoire, sexistes ou arbitraires. Ou un employé – je pense en particulier à un employé, qui serait mis en cause comme l’agresseur allégué par exemple – pourrait systématiquement refuser toute personne proposée par l’employeur, de façon capricieuse et arbitraire.

Il est un principe de droit que nul ne peut abuser de ces droits. Une telle approche abusive ou discriminatoire n’a bien sûr pas sa place et pourrait selon moi être sanctionnée par des mesures disciplinaires ou interprétée comme une renonciation au droit que confère aux parties le paragraphe 20.9(3).

[64] Me Séguin soutient que le délégué ministériel a erré en concluant que les motifs invoqués par Mme A pour refuser la nomination de Mme Morse comme personne compétente pour enquêter sur sa plainte n’étaient pas abusifs. Au contraire, Me Séguin soutient que ces motifs étaient sans fondement, capricieux et arbitraires. Quant aux motifs invoqués par Mme A ou ses représentants syndicaux pour rejeter la nomination de M. Marion ou M. Charron comme enquêteur, Me Séguin allègue que ces motifs étaient également capricieux et arbitraires, donc abusifs.

[65] Me Séguin prétend que les motifs donnés par Mme A pour déclarer que Mme Morse n’était pas une personne impartiale sont déraisonnables, sans fondement, capricieux et arbitraires, donc abusifs.

[66] Quant aux propositions de M. Charron ou M. Marion comme personne compétente, M. Boileau et Mme A avaient rejeté ces personnes parce qu’elles étaient des employés du gouvernement fédéral et manquaient donc d’impartialité pour enquêter sur la plainte. De l’avis de Me Séguin, Mme A et son syndicat n’avaient ainsi pas l’intention de retenir un employé du gouvernement du Canada pour enquêter sur la plainte et leur refus était catégorique sur ce point. Le fait de préjuger de la partialité sans égard aux compétences professionnelles des personnes proposées équivaut, de l’avis de Me Séguin, à un motif de refus capricieux et arbitraire, donc abusif.

[67] C’est pourquoi, Me Séguin soutient qu’EDSC n’a pas pu régler la situation de façon appropriée, car il en a été empêché par les motifs de refus abusifs de la part de Mme A et son syndicat et qu’ainsi, l’employeur n’a pas contrevenu au paragraphe 20.9(3) du Règlement en ne nommant pas une « personne compétente » pour mener l’enquête sur la plainte de Mme A.

[68] Si je décidais par contre dans cette affaire que l’employeur a contrevenu au paragraphe 20.9(3) et qu’il méritait donc une instruction, selon Me Séguin, l’instruction de M. Boulanger est déraisonnable et erronée, et il s’appuie sur les motifs qui suivent.

[69] Me Séguin soutient qu’en émettant l’instruction comme elle est formulée, le délégué ministériel a sanctionné le fait, pour l’employée, de préjuger de la partialité d’une personne compétente et lui a ainsi donné le droit d’influer sur le choix de l’enquêteur alors que, de l’avis de Me Séguin, il n’y a rien à cet effet dans le Règlement.

[70] Dans son témoignage, M. Boulanger a reconnu avoir cherché à dénouer l’impasse entre les parties. Me Séguin allègue qu’en fait, M. Boulanger y a mis fin en adoptant la position de l’intimé. Me Séguin souligne notamment que le libellé de l’instruction reprend celui de M. Boileau, dans son courriel du 15 novembre 2016, adressé à M. Hubert. Dans ce courriel, M. Boileau dit que selon lui, une personne employée au gouvernement du Canada ne peut pas être impartiale pour enquêter sur la plainte de Mme A.

[71] Me Séguin soutient de plus qu’il lui semble, de par son instruction, que le délégué ministériel a décidé que tous les employés du gouvernement du Canada ne pouvaient pas être impartiaux, alors que M. Boulanger avait clairement dit, dans son enquête et son témoignage, que ce n’est pas son rôle de statuer sur l’impartialité d’une personne compétente.

[72] Me Séguin soutient en outre qu’en procédant ainsi, M. Boulanger a également influé sur le choix de la personne compétente pour mener une enquête en vertu du Règlement alors qu’il n’existe, de l’avis de Me Séguin, aucune disposition dans le Code ou le Règlement qui le lui permet.

[73] Me Séguin soutient enfin que le libellé de l’instruction du délégué ministériel crée un effet pernicieux et un précédent préjudiciable à l’employeur pour les raisons qui suivent.

[74] De l’avis de Me Séguin, l’instruction comme elle est libellée peut laisser supposer qu’à chaque fois qu’il y aura désaccord entre l’employeur et un employé sur le choix de la personne compétente, l’employeur sera contraint d’embaucher un enquêteur qui n’est pas un fonctionnaire et d’en défrayer les coûts.

[75] Me Séguin allègue de plus que le libellé de cette instruction pourrait servir de levier pour refuser capricieusement et arbitrairement une personne compétente sur le critère de l’impartialité.

[76] Me Séguin allègue en outre que, si l’instruction est maintenue comme telle, il est possible que les employés rejettent systématiquement des personnes compétentes proposées par l’employeur jusqu’à ce que ce dernier finisse par fléchir et nomme le consultant externe voulu par l’employé, ce qui est contraire, de l’avis de Me Séguin, au Règlement puisque ce dernier exige que les deux parties en cause s’entendent sur l’impartialité de la personne compétente. Me Séguin prétend aussi que ce n’était pas le rôle du délégué ministériel de s’immiscer dans l’entente entre les parties.

[77] Si je décidais dans cette affaire qu’une instruction devait être émise à l’employeur, Me Séguin demande, au nom de l’appelant, que soit enlevée de l’instruction toute référence « à des personnes qui ne sont pas des employés du Canada » et qu’on la remplace par une référence à des « personnes compétentes » pour que la partie « ordonnance » de l’instruction se lise comme suit :

« Il vous est ordonné par les présentes, en vertu du paragraphe 141.(1)(a) de la partie II du Code canadien du travail, de faire enquête sur la situation de violence en milieu de travail alléguée par Mme […] en lui proposant des personnes compétentes. La personne compétente nommée par l’employeur doit respecter les critères cités aux alinéas 20.9(1)(a), (b) et (c) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail ».

[78] Compte tenu de tout ce qui précède, Me Séguin demande, au nom de l’appelant, que l’appel soit accueilli et que l’instruction soit mise de côté ou, dans l’alternative, que l’instruction soit modifiée.

B) Observations de l’intimé

[79] Mme A a témoigné à l’audience. Je retiens ce qui suit de son témoignage.

[80] Mme A est entrée en 1995 à la fonction publique fédérale. En 2005, elle a obtenu un poste à EDSC.

[81] En février 2014, elle a fait plusieurs démarches pour mettre fin à la situation qu’elle vivait dans son milieu de travail et qui la minait au niveau psychologique. Elle a rencontré une personne au programme d’aide aux employés, ainsi qu’un conseiller en gestion informelle des conflits à l’interne, pour être guidée en vue d’améliorer sa relation avec sa gestionnaire. Elle a aussi rencontré sa directrice générale pour lui faire part de la situation, en expliquant notamment qu’elle travaillait dans un environnement de plus en plus toxique pour elle, qui la stressait et lui faisait du mal, et pour lui demander son aide en vue d’une mutation. C’était la première fois qu’elle se plaignait à une directrice générale d’un problème de travail et elle l’a fait parce qu’elle était désespérée.

[82] En avril 2014, elle a aussi rencontré sa gestionnaire immédiate en dehors du lieu de travail pour tenter de régler le conflit, mais la situation pour elle a empirée par la suite. Malgré sa déception, elle a tenté d’obtenir une mutation à d’autres postes, mais sans succès. La situation devenant insoutenable et, se sentant ignorée par la gestion et épuisée, elle est allée voir son médecin en juillet 2014, et ce dernier lui a donné un congé de maladie. Elle a ensuite déposé un grief alléguant de la violence en milieu de travail, car elle se sentait complètement abandonnée.

[83] Son congé de maladie s’est terminé à la fin janvier 2015, mais elle n’est retournée physiquement au travail qu’à la mi-mars parce qu’il n’y avait pas de bureau pour elle avant cette date. N’ayant pas reçu de salaire entre le 29 janvier et le 16 mars 2015, elle a déposé un deuxième grief pour ce motif.

[84] Mme A a été réaffectée sous la direction générale de M. Risseeuw à son retour au travail. Le 2 mars 2015, elle a transmis une lettre à sa directrice générale parce qu’elle estimait que celle-ci n’avait rien fait après leur entretien de février 2014 et souhaitait une enquête, conformément au Règlement, sur la situation qu’elle alléguait avoir vécue. Elle lui a également transmis le courriel du 12 juin 2015, où elle réitérait sa demande pour qu’une enquête soit menée sur sa plainte parce qu’après plusieurs mois, elle n’avait reçu aucune réponse et que ce retard lui donnait l’impression que sa plainte n’était pas prise au sérieux.

[85] Elle a ensuite accepté la proposition de M. Risseeuw en mai 2015 de recourir à un processus de résolution informelle de conflits à l’interne. Elle a rencontré une personne des services de gestion informelle des conflits pour comprendre le processus et, à la suite de cette rencontre, elle était prête à rencontrer son ancienne gestionnaire. L’annulation de cette médiation a été une déception pour elle, car elle cherchait à régler la situation. N’ayant eu aucune nouvelle par la suite et sentant que sa plainte était en quelque sorte laissée de côté, elle s’est adressée au Programme du travail.

[86] Lorsque M. Risseeuw lui a fait parvenir la liste d’enquêteurs externes pour enquêter sur sa plainte, elle est passé par sa représentante syndicale, Mme Camus, pour avoir des précisions sur leurs compétences et expérience professionnelles; elle ne savait pas qui choisir, n’avait jamais eu à faire ce genre de choix, pensait à ses témoins et voulait faire au mieux pour tout le monde. Elle a ajouté avoir pris conseil auprès de ses représentants syndicaux pendant ce processus, car elle avait besoin d’aide pour essayer de le comprendre.

[87] Après avoir examiné les informations fournies sur Mme Jelly, elle a estimé que cette personne correspondait à ce qu’elle recherchait pour faire enquête sur sa plainte. Mme A a ajouté qu’avec les précisions données par M. Risseeuw sur l’enquête, elle savait qu’elle n’aurait à parler qu’une seule fois à un enquêteur. Ce processus n’a pas été facile pour elle, mais elle s’est sentie à l’aise avec Mme Jelly. Après cette enquête, elle n’a reçu aucune nouvelle ni su ce que les autres avaient pensé du rapport de Mme Jelly. Alors, lorsque son employeur lui a envoyé un courriel lui indiquant qu’il avait décidé de nommer un employé du gouvernement fédéral pour enquêter sur sa plainte, elle a été complétement déroutée par cette démarche.

[88] Lorsqu’elle a dit pourquoi elle rejetait Mme Morse, elle a dit s’être inquiétée et avoir eu des doutes sur l’impartialité de celle-ci parce qu’elle ne connaissait pas ses fonctions exactes au gouvernement ni son parcours professionnel et qu’elle voulait qu’on la rassure sur ce point. En examinant le CV de Mme Morse, Mme A a déclaré que le fait que cette personne ait beaucoup travaillé en ressources humaines la préoccupe énormément. Comme elle travaillait au gouvernement et connaissait des personnes à l’interne, Mme Morse pouvait, selon Mme A, avoir des préjugés sur les gens. Mme A a déclaré que, lorsqu’elle avait fait part, dans son courriel du 20 décembre 2016 à M. Boulanger, de son anxiété et de son inquiétude à cause de la nomination éventuelle d’un employé du gouvernement du Canada pour enquêter sur sa plainte, elle voulait lui expliquer que ses trois témoins se sentaient mal à l’aise, voire menacés par son ancienne direction et que c’était chose normale dans leur milieu de travail, et qu’elle espérait que ces témoins seraient plus à l’aise pour parler avec quelqu’un de l’extérieur.

[89] Quant aux propositions de M. Marion et M. Charron, Mme A a déclaré qu’elle ne savait pas avec qui ces personnes avaient travaillé et qu’elle pensait qu’elles occupaient des fonctions du côté patronal. Selon elle, les personnes travaillant à la direction au gouvernement se connaissent toutes entre elles et elle n’avait pas confiance en la gestion pour enquêter sur sa plainte.

[90] Pour M. Zanetti, Mme A a déclaré qu’elle travaillait avec lui et trouvait que ce serait injuste pour l’autre partie mais aussi pour elle-même, car elle ne se sentait pas à l’aise pour traiter avec lui sur cette enquête.

[91] En ce qui concerne la proposition d’une enquête conjointe par M. Hubert et M. Béland, ces deux personnes étant impliquées et au courant de sa plainte, Mme A a déclaré qu’elle ne les trouvait pas impartiales pour mener l’enquête.

[92] Quant à la dernière proposition de nommer M. Charron, qui indiquait aussi la date du début de son enquête, Mme A a déclaré qu’elle n’avait rien compris.

[93] Mme A a déclaré qu’après que l’instruction a été émise, c’est une tierce personne de la firme externe Textus qui a été nommée et que tout s’est fait dans un délai de trois semaines.

[94] Elle a ajouté que, pendant cette très longue démarche, elle avait eu l’impression que personne à la direction ne voulait faire quoi que ce soit et que la situation qu’elle alléguait comme étant de violence en milieu de travail ne serait jamais jugée de façon impartiale. Son niveau de confiance envers la direction était tombé très bas.

[95] Mme A a déclaré qu’elle aurait considéré une personne travaillant au sein du gouvernement comme étant impartiale si on lui avait donné confiance dans le processus, mais qu’elle craignait que les personnes compétentes jusqu’ici proposées n’examinent pas sa plainte avec impartialité; sa plainte n’aurait donc servi à rien et serait mise de côté par son employeur. C’est pour ce motif qu’elle voulait quelqu’un de vraiment neutre pour enquêter sur sa plainte et avait davantage confiance en une tierce personne impartiale externe au gouvernement.

[96] M. Jean-Rodrigue Yoboua, au nom de l’intimé, soumet que l’instruction du délégué ministériel doit être confirmée pour les motifs qui suivent.

[97] M. Yoboua soutient d’abord que Mme A a tenté avec diligence de faire avancer l’enquête que devait mener son employeur sur ses allégations de violence en milieu de travail et que rien ne démontre qu’elle a abusé de ses droits en agissant comme elle l’a fait. Il allègue aussi que les raisons de Mme A pour rejeter la nomination des personnes compétentes proposées étaient, en grande partie, fondées sur le comportement de l’appelant, comportement qui a miné la confiance de Mme A dans le processus.

[98] M. Yoboua soutient que cette méfiance envers l’appelant provient surtout de ce qui suit.

[99] De l’avis de M. Yoboua, l’appelant a trop tardé avant d’adresser la plainte de Mme A tel que le prévoit le Règlement. De plus, lorsque l’appelant a refusé de nommer Mme Jelly comme personne compétente pour mener l’enquête conformément au Règlement, il l’a fait pour des raisons erronées. Sur la base du témoignage de M. Risseeuw et celui de M. Hubert, M. Yoboua allègue qu’il n’est pas valable d’avoir rejeté Mme Jelly en disant qu’elle aurait dû obtenir les faits de l’autre partie en cause dans son enquête prima facie. Mme Jelly a fait exactement ce qu’elle devait faire dans le cadre de cette enquête.

[100] En outre, en critiquant la participation du syndicat de Mme A dans sa plainte au Programme du travail pour tenter de l’exclure du processus, l’employeur a miné sa relation avec la plaignante. Le bulletin d’interprétation produit par le Programme du travail, portant sur la prévention de la violence dans le lieu de travail (943-1-IPG-081, Pièce 3), dit que le syndicat peut représenter un plaignant; l’appelant connaissait ce bulletin.

[101] M. Yoboua soutient enfin que Mme A n’a pas agi de manière arbitraire ou abusive en refusant les personnes compétentes proposées. Au contraire, Mme A a sérieusement considéré chaque candidature et les raisons qu’elle a données pour rejeter chaque personne et le groupe de personnes proposés sont fondées sur des considérations raisonnables et non arbitraires.

[102] M. Yoboua soumet finalement que Mme A ne remet pas en question dans cette affaire les qualifications professionnelles des personnes proposées et que les objections soulevées par celle-ci pour chaque personne et le groupe de personnes proposés portent uniquement sur leur impartialité.

[103] M. Yoboua soutient qu’établir une démarche arbitraire et abusive constitue un fardeau élevé et que les personnes proposées à Mme A devaient être, non seulement objectivement impartiales, mais aussi être subjectivement considérées comme impartiales par la plaignante. Or, de l’avis M. Yoboua, non seulement plusieurs des enquêteurs proposés par l’appelant ne répondaient pas à des critères objectifs d’impartialité, mais aucun d’entre eux ne répondaient aux critères subjectifs soulevés par Mme A. M. Yoboua soumet aussi que les raisons pour lesquelles Mme A a rejeté les enquêteurs proposés étaient étroitement liées aux circonstances qui entouraient sa plainte.

[104] M. Yoboua soumet que l’instruction comme elle est écrite est valide, car elle indique précisément ce que l’appelant devait faire pour respecter le Règlement. De plus, l’employeur ayant nommé une tierce personne impartiale d’une firme externe pour enquêter sur la plainte de Mme A, comme le proposait bien l’instruction, cela démontre, de l’avis de M. Yoboua, sa validité.

[105] Pour ces raisons, M. Yoboua, au nom de l’intimé, demande que l’appel soit rejeté et que l’instruction soit confirmée sans modification.

C) Réplique

[106] Me Séguin, au nom de l’appelant, ne convient pas que ce soit un fardeau élevé que de devoir démontrer une démarche abusive ou arbitraire parce qu’aux paragraphes 60 et 61 de la décision Association des employeurs maritimes, l’agent d’appel Hamel n’a pas employé ce terme mais s’est plutôt référé au principe selon lequel « personne ne peut abuser de ses droits ».

[107] De plus, Me Séguin réfute la prétention de l’intimé voulant que l’employeur a tenté d’exclure le syndicat du processus. Me Séguin allègue plutôt que Mme A et son syndicat ont préjugé de la partialité de tous les fonctionnaires fédéraux.

Analyse

[108] Il s’agit, dans le présent appel, de déterminer si l’instruction émise par le délégué ministériel M. Boulanger est bien fondée.

[109] La présente affaire se distingue des autres dossiers qui soulèvent des questions liées à une plainte alléguant une situation de violence dans le lieu de travail puisqu’en l’espèce, le délégué ministériel n’a pas émis une instruction constatant une contravention au Code en vertu du paragraphe 145(1), mais a plutôt choisi ici de recourir au pouvoir discrétionnaire prévu à l’alinéa 141(1)(a) du Code :

141. (1) Dans l’exercice de ses fonctions et sous réserve de l’article 143.2, le ministre peut, à toute heure convenable, entrer dans tout lieu de travail placé sous l’entière autorité d’un employeur. En ce qui concerne tout lieu de travail, il peut :

a) effectuer des examens, essais, enquêtes et inspections ou ordonner à l’employeur de les effectuer;

[je souligne]

[110] C’est en utilisant ce pouvoir discrétionnaire que le délégué ministériel, comme le lui permet le Code, a ordonné à l’employeur de procéder à une enquête, conformément au paragraphe 20.9(3) du Règlement, sur la situation de violence en milieu de travail alléguée par Mme A. Plus précisément, le délégué ministériel a enjoint à l’employeur de proposer à Mme A « des personnes qui ne sont pas des employés du Gouvernement du Canada » afin qu’une personne compétente qui n’est pas un employé du gouvernement du Canada soit nommée pour enquêter sur sa plainte.

[111] Dans son témoignage à l’audience, M. Boulanger a expliqué qu’il a émis son instruction dans ces termes parce que, selon lui, le refus de Mme A de consentir à la nomination de plusieurs des personnes proposées par l’employeur pour faire enquête sur sa plainte s’expliquait principalement par le fait que ces personnes étaient des employés du gouvernement fédéral. Selon le délégué ministériel, compte tenu du libellé de la partie XX du Règlement et de la jurisprudence applicable, Mme A avait tout à fait le droit de rejeter la nomination des personnes choisies si elle ne les considérait pas comme étant impartiales, le rôle du délégué ministériel n’étant pas de remettre en question l’objection d’une partie quant à l’impartialité de la personne choisie pour faire enquête. Enfin, le délégué ministériel a expliqué avoir procédé ainsi afin de dénouer l’impasse dans laquelle se trouvait les parties sur la nomination d’une personne compétente pour faire enquête.

[112] Afin de décider si le délégué ministériel était justifié en l’espèce d’ordonner à l’employeur de proposer de nommer une personne compétente qui n’est pas un employé du gouvernement fédéral afin d’enquêter sur la situation de Mme A, je dois, dans un premier temps, établir si l’employeur a respecté ses obligations en vertu de la partie XX du Règlement.

[113] L’article 20.9 de la partie XX du Règlement qui porte sur la prévention de la violence en milieu de travail énonce les obligations de l’employeur et la procédure qu’il doit suivre dès qu’il a connaissance d’une situation de violence ou de toute allégation d’une telle situation dans le lieu de travail. Les parties pertinentes de l’article 20.9 applicables au présent dossier se lisent comme suit :

Notification et enquête

20.9 (1) Au présent article, personne compétente s’entend de toute personne qui, à la fois :

  • (a) est impartiale et considérée comme telle par les parties;
  • (b) a des connaissances, une formation et de l’expérience dans le domaine de la violence dans le lieu de travail;
  • (c) connaît les textes législatifs applicables.

(2) Dès qu’il a connaissance de violence dans le lieu de travail ou de toute allégation d’une telle violence, l’employeur tente avec l’employé de régler la situation à l’amiable dans les meilleurs délais.

(3) Si la situation n’est pas ainsi réglée, l’employeur nomme une personne compétente pour faire enquête sur la situation et lui fournit tout renseignement pertinent qui ne fait pas l’objet d’une interdiction légale de communication ni n’est susceptible de révéler l’identité des personnes sans leur consentement.

(4) Au terme de son enquête, la personne compétente fournit à l’employeur un rapport écrit contenant ses conclusions et recommandations. Notification et Investigation

20.9 (1) In this section, « competent person » means a person who

  • (a) is impartial et is seen by the parties to be impartial;
  • (b) a knowledge, training and experience in issues relating to work place violence; and
  • (c) has knowledge of relevant legislation.

(2) If an employer becomes aware of work place violence or alleged work place violence, the employer shall try to resolve the matter with the employee as soon as possible.

(3) If the matter is unresolved, the employer shall appoint a competent person to investigate the work place violence and provide that person with any relevant information whose disclosure is not prohibited by law and that would not reveal the identity of persons involved without their consent.

(4) The competent person shall investigate the work place violence and at the completion of the investigation provide to the employer a written report with conclusions and recommendations.

[je souligne]

[114] Il n’est pas contesté en l’espèce que les plaintes de Mme A à l’origine de l’intervention du délégué ministériel soulevaient des questions liées à de la violence en milieu de travail et que, par conséquent, l’employeur devait, conformément au paragraphe 20.9(2), tenter de régler la situation à l’amiable et, à défaut de le faire à la satisfaction de l’employée en cause, qu’il devait, conformément au paragraphe 20.9(3), nommer une personne compétente pour faire enquête.

[115] Le paragraphe 20.9(1) du Règlement énumère certaines conditions à remplir pour qu’une personne puisse être considérée comme compétente afin d’enquêter sur une plainte de violence en milieu de travail. Aux termes de cette disposition, une personne compétente doit répondre à deux exigences. Elle doit, d’une part, être impartiale et considérée comme telle par les parties (alinéa 20.9(1)(a)) et, d’autre part, elle doit posséder des connaissances, une formation et de l’expérience dans le domaine de la violence en milieu de travail et connaître les textes législatifs applicables (alinéas 20.9(1)(b) et (c)).

[116] Il convient aussi de noter que, compte tenu du libellé de l’instruction émise par le délégué ministériel, le débat dans la présente affaire ne porte que sur la première condition prescrite à l’alinéa 20.9(1)(a) du Règlement, c’est-à-dire sur l’impartialité des personnes sélectionnées par l’employeur pour enquêter sur la situation de violence alléguée par Mme A. Qui plus est, l’intimé n’a pas, à aucun moment durant l’audience ou dans ses observations écrites, contesté les qualifications professionnelles des personnes proposées pour faire enquête et la preuve qui m’a été soumise ne me permet pas non plus d’en douter.

[117] Ainsi, la question à résoudre dans ce dossier est de déterminer si l’employeur a contrevenu à l’alinéa 20.9(1)(a) en ne nommant pas pour faire enquête sur la situation de violence alléguée par Mme A une personne qui réponde au critère d’impartialité qui y est énoncé. Selon les termes de l’alinéa 20.9(1)(a), avant de nommer une personne pour enquêter sur des allégations de violence en milieu de travail, l’employeur doit s’assurer que cette personne soit impartiale et considérée comme telle par les parties en cause. À cet égard, je partage l’avis de mon collègue Pierre Hamel, dans l’affaire Association des employeurs maritimes, selon laquelle le législateur a privilégié une approche consensuelle en matière d’impartialité :

[55] Le législateur a clairement privilégié une approche consensuelle sur la question de l’impartialité. En insérant les mots et considérée comme telle par les parties après le mot impartiale, il a clairement exigé que les parties soient d’accord sur la question de l’impartialité de la personne proposée par l’employeur. La version anglaise de ce même alinéa est également claire : […is impartial and is seen by the parties to be impartial] et exige aussi que les parties considèrent la personne comme impartiale, sans réserve ou exception. À défaut d’un accord, la personne proposée ne peut tout simplement pas être nommée.

[56] On peut en conclure que le législateur considérait comme primordial que les parties soient d’accord sur l’impartialité de la personne désignée pour mener l’enquête dont les objectifs sont décrits aux paragraphes 20.9(3) et suivants du Règlement. Nul doute que l’objectif recherché par le législateur est d’assurer la crédibilité des recommandations que cette personne doit formuler au terme de son enquête et favoriser leur acceptation par toutes les parties en cause.

[…]

[59] Je suis d’accord avec l’interprétation qu’a fait Mme Perreault des exigences de l’alinéa a) : il suffit qu’une personne ne considère pas la personne proposée pour faire enquête comme étant impartiale, pour que cette personne ne puisse agir aux termes de cet article. Ceci ne signifie pas que j’accepte la prétention que Mme Charbonneau ou M. Pratt ne sont pas impartiaux : il ne m’appartient pas de me prononcer sur cette question, le Règlement exigeant l’accord mutuel des parties sur cette qualité pour agir.

[je souligne]

[118] Je suis d’accord avec cette interprétation que mon collègue Pierre Hamel donne à l’alinéa 20.9(1)(a), à savoir qu’il doit avoir un accord entre les parties en cause sur l’impartialité de la personne sélectionnée pour l’enquête afin que cette personne puisse agir en tant que personne compétente au sens du Règlement. Je suis également d’accord avec la proposition exprimée par mon collègue selon laquelle il suffit qu’une partie en cause ne considère pas la personne proposée pour faire enquête comme étant impartiale pour que cette personne ne puisse agir aux termes du paragraphe 20.9(3).

[119] Dans une décision subséquente concernant la partie XX du Règlement et plus spécifiquement, l’obligation de l’employeur de faire enquête sur les situations de violence en milieu de travail (Ressources naturelles du Canada c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2018 TSSTC 1), l’agent d’appel Jean-Pierre Aubre, tout en exprimant son accord avec l’interprétation retenue par l’agent d’appel Hamel, a ajouté ce qui suit sur le critère d’impartialité :

[142] Je conviens de l’importance fondamentale de la notion subjective d’impartialité comprise dans l’alinéa 20.9(1)a) et que cela exige que les parties (à savoir les parties visées par les allégations de violence dans le lieu de travail) s’entendent sur l’impartialité de la personne proposée par l’employeur. Toutefois, j’estime, avec égards, que cette interprétation ne tient pas compte de la notion objective d’impartialité également intégrée dans cette disposition.

[143] Il convient de noter que l’alinéa 20.9(1)a) comporte deux éléments. Il fait référence à une personne qui est impartiale et est considérée comme telle. Selon moi, cette disposition énonce donc un critère en deux volets composé d’un élément objectif et d’un élément subjectif comme condition à la nomination. […]

[144] La conjonction de « est » et « est considérée » exprimé au présent signifie, d’après le soussigné, que bien que les parties à une plainte de violence dans le lieu de travail devant faire l’objet d’une enquête doivent percevoir (« est considérée ») la personne nommée comme impartiale, la perception étant une notion tout à fait subjective, cela signifie que différentes personnes peuvent comprendre le mot « impartiale » de différentes façons. En outre, comme la ou les personnes proposées pour être nommées pour faire enquête le seraient par une partie (l’employeur) qui n’est pas une partie à la plainte, cette partie (l’employeur) doit se conformer à un critère plus rigoureux, soit celui de proposer la nomination d’une personne (ou de plusieurs personnes) qui « est » effectivement impartiale, de façon objective.

[je souligne]

[120] Selon cette interprétation, le critère de l’impartialité énoncé à l’alinéa 20.9(1)(a) comprend un élément objectif et un élément subjectif. Il s’ensuit que, lorsqu’il nomme une personne compétente pour enquêter sur une situation de violence en milieu de travail, l’employeur doit non seulement s’assurer que la personne nommée soit vue par les parties comme étant impartiale, mais aussi que cette personne l’est effectivement, de façon objective.

[121] Il est bien établi en jurisprudence que la norme d’impartialité exigée chez un enquêteur n’ayant pas de pouvoir décisionnel, comme une personne compétente nommée pour faire enquête en vertu du paragraphe 20.9(3), est moins stricte que celle qui s’applique à un décideur administratif, ou même un juge. Dans son arrêt Chris Hughes c. Canada (Procureur général), 2010 CF 837, la Cour fédérale énonce ce qui suit :

[23] [...] Cela dit, vu la nature non décisionnelle des responsabilités de la Commission, il a été statué que la norme d’impartialité exigée d’un enquêteur de la Commission est moins stricte que celle qui s’applique aux membres de la magistrature. Plus précisément, il ne s’agit pas de savoir s’il existe une crainte raisonnable de partialité de la part de cet enquêteur mais plutôt de savoir s’il a abordé l’affaire avec un « esprit fermé » : voir Zündel c. Canada (Procureur général) (1999), 175 D.L.R. (4th) 512, aux paragraphes 17 à 22.

[je souligne]

[122] Si on devait appliquer cette norme de « l’esprit fermé » dans le cadre d’une plainte soumise en vertu de la XX du Règlement, à mon avis, un employeur assujetti à la partie II du Code doit établir un minimum de questions objectives pour déterminer si les personnes sélectionnées pour mener une enquête ont un « esprit ouvert » à l’égard de la situation de violence en milieu de travail alléguée qu’on leur demande d’examiner, afin de s’assurer que la norme exigée d’impartialité soit respectée. Sans que cette liste soit exhaustive, voici quelques questions à poser en provenance de la jurisprudence sur cette norme pour déterminer l’impartialité de la personne choisie :

  • Est-ce qu’il y a des indices ou des raisons de croire que la personne n’agira pas de bonne foi pour mener une enquête sur la situation alléguée de violence en milieu de travail?
  • Est-ce qu’il y a des indices ou des raisons de croire que la personne a déjà pris une décision avant même d’être nommée ou avant même d’entendre chacune des parties en cause sur la situation de violence alléguée?
  • Est-ce que la personne a exprimé des propos qui pourraient porter à croire qu’elle a pris une décision avant même d’être nommée ou avant même d’entendre chacune des parties en cause?
  • Est-ce que la personne est disposée à permettre à chacune des parties impliquées dans la situation alléguée de violence dans le lieu de travail de se faire entendre?
  • Est-ce que la personne est prête à prendre en considération les faits et arguments de chacune des parties en cause pour en arriver à émettre des conclusions écrites et, sur la base de celles-ci, des recommandations afin d’éviter que la situation ne se répète?

[123] Cela dit, il n’est pas nécessaire ici d’examiner la question de savoir si les personnes sélectionnées par l’employeur pour faire enquête sur la situation de Mme A étaient effectivement impartiales selon une norme objective, puisqu’il appert de la preuve soumise que le deuxième élément du critère d’impartialité – à savoir que l’employeur devait s’assurer que la personne sélectionnée pour faire enquête est impartiale selon chacune des parties en cause – n’a pas été respecté. Ces deux éléments étant cumulatifs, le non-respect de l’un deux suffit pour conclure à une violation de l’alinéa 20.9(1)(a).

[124] En effet, la preuve présentée démontre que l’employeur a proposé un total de 4 personnes et un groupe de 2 personnes à Mme A et que celle-ci a, à chaque fois, indiqué qu’elle ne considérait pas ces personnes ou ce groupe de personnes comme étant impartiales pour enquêter sur sa plainte.

[125] Dans son témoignage à l’audience, Mme A a expliqué que, lorsqu’elle a donné ses motifs pour rejeter la première personne proposée par l’employeur, Mme Morse, elle était inquiète et avait des doutes sur l’impartialité de cette personne pour enquêter sur sa plainte parce qu’elle ne connaissait pas ses fonctions exactes au gouvernement ni son parcours professionnel et qu’elle voulait qu’on la rassure sur ce point. En examinant le CV de Mme Morse, elle a ajouté que le fait que cette personne a beaucoup travaillé en ressources humaines la préoccupait énormément. Comme elle travaillait au gouvernement et connaissait, selon Mme A, des personnes à l’interne, cette personne pouvait, selon Mme A, avoir des préjugés sur les gens.

[126] Selon M. Hubert, les motifs du refus de Mme A concernant Mme Morse ne sont pas valables, car cette personne est compétente en santé et sécurité au travail, est assujettie à un code de valeurs et d’éthique et, ne travaillant pas à EDSC, n’a aucun lien avec l’employeur dans son travail quotidien.

[127] M. Hubert savait que Mme Morse était affiliée aux ressources humaines mais ne savait pas que Mme A ne serait pas ouverte à ce genre de profil pour le choix d’une personne compétente, même s’il avait compris qu’elle avait indiqué, pour rejeter Mme Morse, ne pas vouloir d’une tierce personne qui représente l’employeur dans son travail quotidien. Selon M. Hubert, Mme A aurait dû préciser ce qu’elle voulait dire par les mots « représente l’employeur dans ses activités quotidiennes de travail » et « a des relations internes avec des personnes dans le ministère ».

[128] De plus, bien qu’ayant compris, d’après la première réponse de Mme A rejetant Mme Morse, qu’elle ne voulait pas, sur le critère d’impartialité, d’enquêteur qui provienne du gouvernement du Canada, ce motif de rejet, de l’avis de M. Hubert, n’était pas valable parce qu’il signifiait, selon lui, que l’on préjugeait de la partialité des employés du gouvernement du Canada, sans égard à leurs compétences professionnelles.

[129] Quant aux propositions de M. Marion ou M. Charron, Mme A a déclaré avoir refusé leurs nominations parce qu’ils occupent des fonctions du côté patronal et qu’elle croyait qu’ils connaissaient des personnes dans son ministère. Selon elle, les personnes travaillant à la direction du gouvernement se connaissent toutes entre elles et elle n’avait pas confiance dans la gestion pour enquêter sur sa plainte.

[130] M. Hubert a déclaré savoir que M. Charron donne des conseils aux ressources humaines dans l’exercice de ses fonctions et a un profil similaire sur ce point à celui de Mme Morse. M. Marion a aussi ce type de profil.

[131] M. Hubert est cependant d’avis que Mme Morse, M. Marion et M. Charron répondent tous au critère d’impartialité parce qu’ils travaillent pour d’autres ministères qu’EDSC.

[132] Mme A a refusé de reconnaître l’impartialité de M. Zanetti parce qu’elle travaillait avec lui et trouvait que ce serait injuste pour l’autre partie, mais aussi pour elle-même, car elle ne se sentait pas à l’aise pour traiter avec lui dans une enquête.

[133] M. Hubert a déclaré que, lorsqu’il a fait sa troisième proposition de nommer M. Zanetti comme enquêteur sur la plainte, il l’a fait parce que Mme A le connaissait et qu’ainsi, il pensait qu’elle l’accepterait et qu’ils pourraient s’entendre pour régler la plainte. Selon lui, la relation professionnelle qui existait entre les deux ne suffit pas pour conclure à la partialité de M. Zanetti.

[134] Mme A a aussi refusé la proposition de l’employeur de la tenue d’une enquête conjointe par M. Hubert et M. Béland. Puisque ces deux personnes étaient au courant de sa plainte, elle ne voyait pas comment ces personnes pourraient être impartiales pour enquêter sur sa plainte.

[135] Bien qu’il ait eu un avis sur la plainte de Mme A et su que M. Béland était au courant du dossier, M. Hubert a, pour sa part, déclaré qu’il croyait pouvoir trouver un équilibre pour ce qui est de l’impartialité, lui représentant l’employeur, M. Béland représentant le syndicat de Mme A.

[136] Compte tenu de ce qui précède, il ne fait aucun doute qu’aucun accord n’est jamais intervenu de la part de chacune des parties en cause quant à l’impartialité de l’une ou l’autre des personnes sélectionnées par l’employeur pour mener l’enquête conformément au paragraphe 20.9(3) sur la situation de violence alléguée concernant Mme A.

[137] Me Séguin, au nom de l’appelant, prétend que l’employeur n’a pas pu nommer une personne compétente pour enquêter conformément au paragraphe 20.9(3) parce qu’à son avis, les motifs invoqués par Mme A pour rejeter les personnes proposées pour traiter sa plainte étaient déraisonnables, capricieux et arbitraires, donc abusifs.

[138] Dans la décision Association des employeurs maritimes, l’agent d’appel Hamel a déclaré que, bien que l’on ne puisse pas remettre en question la croyance subjective d’une personne quant à l’impartialité de la personne choisie par l’employeur pour mener une enquête, une partie ne peut abuser de ses droits en refusant systématiquement de consentir à la nomination d’une personne en se fondant sur des considérations discriminatoires, sexistes ou arbitraires :

On a invoqué les risques d’abus que pourraient occasionner cette application dite « textuelle » de l’article. Le refus de consentir à la nomination d’une personne sans devoir en exposer les raisons ni les justifier pourrait, comme le note avec justesse l’avocate de l’appelante, être motivé par des considérations discriminatoires, sexistes ou arbitraires. Ou un employé – je pense en particulier à un employé, qui serait mis en cause comme l’agresseur allégué par exemple – pourrait systématiquement refuser toute personne proposée par l’employeur, de façon capricieuse ou arbitraire.

Il est un principe de droit que nul ne peut abuser de ses droits. Une telle approche abusive ou discriminatoire n’a bien sûr pas sa place et pourrait selon moi être sanctionnée par des mesures disciplinaires ou interprétée comme une renonciation au droit que confère aux parties le paragraphe 20.9(3).

[139] À mon avis, compte tenu des circonstances de cette affaire, les doutes exprimés plus haut par Mme A sur les personnes et le groupe de personnes proposés pour mener l’enquête sur sa plainte ne semblent pas abusifs. Tout comme l’agent d’appel Hamel, je suis de plus d’avis qu’il ne m’appartient pas de décider si les raisons données par Mme A pour refuser, sur le critère de l’impartialité, les personnes proposées par son employeur sont valables. En effet, aux termes de l’alinéa 20.9(1)(a), c’est à l’employeur qu’incombe la responsabilité d’obtenir l’accord de chacune des parties en cause sur la personne « compétente », en ce qui concerne son impartialité pour enquêter en vertu du paragraphe 20.9(3) sur des allégations de violence en milieu de travail.

[140] Il est en outre clair ici que Mme A avait perdu toute confiance en la direction et que, pour cette raison, elle ne jugeait pas qu’un gestionnaire du gouvernement fédéral puisse être impartial dans l’examen de sa plainte. À mon avis, la lenteur des procédures, et le fait que l’employeur ait initialement nommé une personne externe au gouvernement pour mener une enquête prima facie sur ses allégations de violence, ont contribué à faire croire à Mme A qu’un employé du gouvernement fédéral ne serait pas impartial pour enquêter sur sa plainte.

[141] À l’audience, Mme A a expliqué qu’après l’enquête menée par Mme Jelly, elle n’a reçu aucune nouvelle ni su ce que les autres avaient pensé de son rapport. Lorsque son employeur lui a ensuite envoyé un courriel lui indiquant qu’il avait décidé de nommer un employé du gouvernement fédéral pour enquêter sur sa plainte, elle a été complétement déconcertée par cette démarche. De plus, lorsqu’elle avait fait part, dans son courriel du 20 décembre 2016 à M. Boulanger de son anxiété et de son inquiétude à cause de la nomination éventuelle d’un employé du gouvernement du Canada pour enquêter sur sa plainte, elle voulait lui expliquer que ses trois témoins se sentaient mal à l’aise, voire menacés par son ancienne direction et que c’était chose normale dans leur milieu de travail, et qu’elle espérait que ces témoins seraient plus à l’aise pour parler avec quelqu’un de l’extérieur du gouvernement.

[142] Mme A a expliqué que, tout au long de cette démarche, elle avait eu l’impression que personne à la direction ne voulait faire quoi que ce soit et que la situation de violence en milieu de travail qu’elle alléguait ne serait jamais jugée de façon impartiale. C’est pour ce motif qu’elle voulait quelqu’un de vraiment neutre pour enquêter sur sa plainte et avait davantage confiance en une tierce personne impartiale de l’extérieur du gouvernement.

[143] Pour tous ces motifs, je suis d’avis qu’en omettant d’obtenir l’accord des parties en cause sur le choix de la personne « compétente », sur le critère de l’impartialité, pour enquêter sur la plainte de Mme A, l’employeur a contrevenu à l’alinéa 20.9(1)(a) du Règlement puisqu’il n’a pas respecté son obligation de veiller à nommer une personne considérée par les parties comme étant impartiale pour enquêter.

[144] Je dois maintenant me prononcer sur le bien-fondé de l’instruction du délégué ministériel comme elle est formulée.

[145] Me Séguin soutient qu’en émettant l’instruction comme elle est formulée, le délégué ministériel a sanctionné le fait d’avoir préjugé de la partialité d’une personne, simplement parce qu’elle est employée du gouvernement. Le délégué ministériel a donc permis à Mme A d’influer sur le choix de la personne compétente alors que, de l’avis de Me Séguin, il n’y a rien à cet effet dans le Règlement. En outre, selon Me Séguin, l’instruction, dans son libellé, crée un précédent préjudiciable à l’employeur parce qu’elle permet à d’autres employés de la fonction publique fédérale, dans des situations similaires, d’exiger la nomination d’un enquêteur externe au gouvernement. Je n’accepte pas ces arguments pour les raisons qui suivent.

[146] L’alinéa 20.9(1)(a) du Règlement est clair et exige de l’employeur qu’il obtienne l’accord des parties concernées sur l’impartialité de l’enquêteur choisi. Ce qui permet donc à chacune des parties en cause d’influer sur le choix de cet enquêteur. Le délégué ministériel n’a, de plus, tiré aucune conclusion sur l’impartialité des personnes proposées à Mme A pour enquêter. Après avoir déterminé que l’employée refusait de reconnaître comme étant impartiale toute personne employée du gouvernement fédéral et avoir constaté que l’employeur avait, jusqu’à ce jour, proposé uniquement des personnes ou un groupe de personnes qui étaient toutes des employés du gouvernement du Canada, le délégué ministériel était alors, à mon avis, tout à fait justifié d’enjoindre à l’employeur de proposer aux parties qu’un enquêteur externe soit nommé sur la plainte de Mme A.

[147] Quant à la prétention de l’appelant que l’instruction, dans son libellé, crée un précédent préjudiciable à l’employeur parce qu’elle peut permettre à d’autres employés de la fonction publique fédérale, dans des situations similaires, d’exiger la nomination d’un enquêteur externe au gouvernement, l’instruction du délégué ministériel mentionne clairement que c’était la perception de Mme A qu’un employé du gouvernement ne pouvait pas être impartial en examinant sa plainte. Et cela ne veut pas nécessairement dire que, dans d’autres circonstances, d’autres employés seraient du même avis.

[148] En tenant compte de tout ce qui précède, je suis ainsi d’avis que l’instruction est bien fondée.

Décision

[149] Pour ces motifs, je confirme l’instruction émise le 2 mars 2017 par M. Boulanger, délégué ministériel du ministre du Travail.

Katia Néron
Agente d’appel

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