Archivée - Decision: 93-106 CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

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Révision, aux termes de l'article 146 de la Partie II
du Code canadien du travail, de deux instructions
données par un agent de sécurité

Décision no 93-106

Demandeurs:   Auto Haulaway inc.
                       Oakville, Ontario
                       Représenté par: M. Douglas C. McTavish, C.R

                       et


                      MLC Motors Carriers Limited
                      Oshawa, Ontario
                      Représentés par: M. Dean Saul, avocat


Parties intéressées: Section locale 938, Syndicat des Teamsters
                             Représentée par: M. David Philp
                             Agent syndical
                             Oshawa, Ontario

                             et

                             M. Ray Hill
                             Agent syndical
                             Mississauga, Ontario

Mis en cause:   M. Wm. H. Grealis
                        Agent de sécurité
                        Développement des ressources humaines (Travail Canada)

Devant:    M. Serge Cadieux
                Agent régional de sécurité
                Développement des ressources humaines (Travail Canada)


Le 1er et le 8 décembre respectivement, des audiences séparées ont eu lieu à Toronto, Ontario, pour les deux entreprises.  Étant donné la similitude des instructions qu'un même agent de sécurité a données aux deux entreprises, les représentants des demandeurs ainsi que ceux des parties intéressées ont demandé qu'une seule décision soit rendue par l'agent régional de sécurité dans les deux cas.  Les arguments des parties étant essentiellement les mêmes dans les cas présents, je suis d'avis, en accord avec les demandeurs, qu'une seule décision satisferait aux exigences du processus de révision pour ces deux cas.


Résumé des faits

L'agent de sécurité Wm. H. Grealis a mené des enquêtes séparées et à des dates différentes, sur les lieux de travail d'Auto Haulaway inc et de MLC Motors Carriers Limited.  L'agent de sécurité a vu des conducteurs, aux deux endroits, en train de charger et décharger des véhicules d'un camion-remorque spécialement aménagé pour le transport de véhicules neufs et usagés.  Des mesures et des photos ont été prises démontrant qu'à deux endroits précis (au-dessus de la boîte du camion et sur une plate-forme qui lui est adjacente sur la remorque), les conducteurs travaillaient dans des endroits non protégés, à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche.  Dans les cas présents, le niveau permanent sûr le plus proche est le sol.

L'agent de sécurité a conclu que les deux entreprises enfreignaient la Partie II du Code canadien du travail ainsi que le Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail (le Règlement).  Les deux entreprises ont reçu l'ordre, conformément au paragraphe 145(1) du Code, de cesser de contrevenir aux dispositions prévues dans la loi avant une date déterminée.

En ce qui concerne MLC Motors Carriers Limited, l'agent de sécurité a mentionné les faits suivants dans l'instruction qu'il a donnée le 24 juin 1993:

«Ledit agent de sécurité est d'avis qu'il y a infraction aux  dispositions suivantes de la Partie II du Code canadien du travail:

L'alinéa 124 de la Partie II du Code canadien du travail, et l'alinéa 12.10(1)(a)(i) du Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail.

En l'occurence, les personnes travaillant à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche ne sont pas protégées contre les chutes.

Par la présente, vous avez l'ordre, conformément à 1l'alinéa 145(2) de la Partie II du Code canadien du travail, de mettre fin aux infractions au plus tard le 30 septembre 1993.»

Dans le cas de Auto Haulaway inc., l'agent de sécurité a noté les faits suivants dans l'instruction qu'il a donnée le 22 juillet 1993:

«Ledit agent de sécurité est d'avis qu'il y a infraction aux  dispositions suivantes de la Partie II du Code canadien du travail:

L'alinéa 124 de la Partie II du Code canadien du travail, et l'alinéa 12.10(1),(a),(i) du Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail.

En l'occurence, les personnes travaillant à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche ne sont pas protégées contre les chutes.

Par la présente, vous avez l'ordre, conformément à 2l'alinéa 145.1 de la Partie II du Code canadien du travail, de mettre fin aux infractions au plus tard le 30 octobre 1993.»


Arguments des demandeurs

Les arguments conjoints des demandeurs avaient d'abord été présentés par écrit à l'agent régional de sécurité.  Malgré de légères variations discutées devant l'audience, l'idée maîtresse des arguments est la même.  Les demandeurs et les parties intéressées ont réitéré verbalement leur demande d'avoir une seule décision pour les deux cas, se fondant sur «l'argumentation de base» suivante:

«L'argumentation de base» des demandeurs couvre deux aspects particuliers:

1. La loi n'exige pas l'installation d'un garde-fou ou de tout autre dispositif et l'article du Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail DORS/86-304 (le «Règlement»), tel que modifié, mentionné dans l'instruction, ne s'applique pas à une remorque destinée au transport de véhicules neufs et usagés.

2. Si ces exigences sont imposées, il en résultera un danger pour les employés car un garde-fou installé à l'endroit indiqué constitue un obstacle et gêne même l'exécution d'un travail en toute sécurité.  De plus, les dispositifs de protection contre les chutes nuisent à l'exécution du travail en toute sécurité.

Dans le but de justifier chaque point, les demandeurs ont examiné les dispositions du Règlement auxquelles on se réfère afin de prouver leur manque d'à-propos dans les circonstances.  Ces dispositions sont 3le sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) de la Partie XII (matériel, équipement, dispositifs, vêtements de sécurité), et 4l'article 2.10 de la Partie II (Sécurité des bâtiments) du Règlement.

Afin d'appuyer le point no 1 de «l'argumentation de base», les demandeurs soumettent les cinq (5) commentaires suivants, que j'ai résumé à des fins de clarté et de concision:

Commentaire no 1: une remorque aménagée pour le transport de véhicules motorisés n'est pas une «structure».

Commentaire no 2: une lecture approfondie des normes de l'Association canadienne de normalisation, mentionnées à l'article 12.10(2) du Règlement démontre qu'elles ne s'appliquent pas dans les circonstances.

Commentaire no 3: dans le présent contexte, un garde-fou est contre-indiqué.

Commentaire no 4: la clause portant sur le garde-fou apparaît  dans une partie du Règlement intitulée «Sécurité des bâtiments», ce qui suggère fortement qu'elle ne s'applique pas à de l'équipement mobile tel que les remorques en question.

Commentaire no 5: Les exigences relatives aux dispositions de protection contre les chutes qu'impose le Règlement ne s'appliquent pas à aucun autre moyen de transport.

Afin d'appuyer le point no 2 de la «l'argumentation de base», les demandeurs expriment leur inquiétude quant à l'obligation d'installer un garde-fou ou tout autre dispositif de sécurité, aux termes du paragraphe 12.10(1) du Règlement.  Cette inquiétude se fonde essentiellement sur une cassette vidéo ainsi que sur un rapport d'une firme d'ingénieurs, présentés dans le cadre du processus de révision.  «Ce qu'il faut savoir, c'est qu'un garde-fou installé à l'endroit indiqué constituerait un obstacle pour un conducteur montant une échelle ou la descendant, ou ouvrant et fermant les portières des autos visée, ou installant ou enlevant le mécanisme de verrouillage des véhicules».

Les demandeurs ont fait remarquer que «le meilleur moyen d'assurer la sécurité des employés travaillant dans ce milieu dynamique était de voir à la bonne manipulation et à la bonne utilisation des échelles, ce qui a été fait relativement à l'équipement en question».

En conclusion de leur «argumentation de base», les demandeurs demandent l'annulation des deux instructions.


Arguments des employés:

M. David Philp et M. Ray Hill partagent le point de vue des employeurs dans ces deux cas.  Ils ont consulté plusieurs conducteurs relativement aux instructions qu'a données l'agent de sécurité.  L'opinion générale est qu'un garde-fou est totalement contre-indiqué dans les cas présents puisque les conducteurs ne pourraient sortir des véhicules facilement et sans les endommager.  Ils sont aussi d'avis que les dispositifs obligatoires de protection contre les chutes ne s'appliquent pas dans ces contextes puisqu'ils ajoutent au «danger» pour les employés qui, fort probablement, se heurteraient sur les côtés de la remorque et se blesseraient lors d'une chute.  Ils préféreraient ne pas être gênés par de tels dispositifs, et sont d'avis qu'ils seraient mieux en mesure de maîtriser une chute dans l'éventualité d'un tel accident par eux-mêmes.

Étant donné ces faits, M. David Philp et M. Ray Hill ont aussi demandé que les instructions soient abrogées et qu'une seule décision soit rendue.


Décision

La question qu'il faut trancher consiste, selon moi, à savoir si on a contrevenu au sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) de Règlement.  Dans l'affirmative,  je n'ai pas d'autre choix que de confirmer les instructions qu'a données l'agent de sécurité.  S'il n'y a pas eu de contravention à cette disposition, ou si elle ne s'applique pas dans le cas qui nous occupe, j'examinerai les circonstances qui ont donné lieu aux instructions et je pourrai soit les modifier soit les annuler, selon le cas.  Ainsi, je déterminerai si le paragraphe 12.10(1) du Règlement, ou toute autre disposition, est un outil approprié pour protéger un employé qui travaille à plus de 2,4 m sur le camion ou la remorque mentionnés plus haut.

Avant de rendre ma décision, j'aimerais jeter un peu de lumière sur un postulat formulé par les demandeurs au cours de leur témoignage relativement aux premier point de «l'argumentation de base».  On a indiqué que «Nous tenons pour acquis qu'il est donc admis que ces articles sont les seuls qui puissent être pertinents».  Cette restriction est clairement intéressée car une telle concession n'a jamais été faite et ne se saurait se faire.  Le rôle de l'agent régional de sécurité agissant en vertu du paragraphe 146(3) du Code consiste notamment à modifier une instruction lorsque la situation l'exige.  Pour ce faire, l'agent régional de sécurité doit examiner toutes les dispositions du Code et du Règlement en tenant compte des circonstances à l'origine de l'instruction, et modifier, annuler ou confirmer l'instruction en conséquence.  Les parties ont eu l'occasion d'étudier la loi en profondeur mais elles ont choisi de demeurer sur leurs positions de départ.

«L'argumentation de base» des demandeurs portait sur deux points.

Le premier point de «l'argumentation de base» est le suivant:

1. La loi n'oblige pas l'utilisation d'un garde-fou ou de tout autre dispositif et l'article du Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail DORS/86-304 (le «Règlement»), tel que modifié, mentionné dans l'instruction, ne s'applique pas à une remorque destinée au transport de véhicules neufs et usagés.

NOTA: Je comprends que l'agent de sécurité a remis aux demandeurs une copie de l'article 2.10 du Règlement avec son instruction.  Ce geste a manifestement et malheureusement été mal interprété par les demandeurs qui pensaient que l'installation d'un garde-fou était obligatoire aux deux endroits en question.  J'ai expliqué au cours de l'audience que ce n'était pas le cas et permis aux parties de modifier leurs positions si elles le désiraient.  Après réflexion, les parties ont décidé de maintenir leurs arguments.

Afin de justifier le premier point de «l'argumentation de base», les demandeurs ont formulé cinq (5) commentaires que j'ai mentionnés plus tôt.  Je réponds à ces commentaires de la manière suivante:

Commentaire no 1: une remorque aménagée pour le transport de véhicules motorisés n'est pas une «structure».

En l'absence d'une définition du mot anglais «structure» dans la loi, par opposition à l'expression «structure temporaire», clairement expliquée à 5l'article 3.1 du Règlement, c'est la définition du dictionnaire qui prévaut.  Bien que les dictionnaires se rapportent amplement au mot «building», ils offrent aussi une définition plus générale: «A set of interconnecting parts of any complex thing;» (The Concise Oxford Dictionary, édition de 1990).  Cette définition est exhaustive et s'applique selon moi à l'expression «structure non munie d'un dispositif de protection», qui n'est pas spécifique et possède donc un sens très large.

Fait à signaler, l'article 12.10 du Règlement est contenu dans la Partie XII (matériel, équipement, dispositifs, vêtements de sécurité) du Règlement.  Donc, la Partie XII, et par conséquent, l'article 12.10 du Règlement, s'applique à toutes les dispositions pertinentes des articles 125, 125.1, 125.2 et 125.6 du Code, tel que stipulé par 6l'article 1.3 du Règlement.  Il est donc préférable d'utiliser la définition la plus générale des dictionnaires dans le cas présent.  Par conséquent, je suis d'avis que les remorques utilisées pour le transport des véhicules sont des structures au sens de l'article 12.10 du Règlement.


Commentaire 2: une lecture approfondie des normes de l'Association canadienne de normalisation, mentionnées à l'article 12.10(2) du Règlement démontre qu'elles ne s'appliquent pas dans les circonstances.

Les demandeurs supposent que les normes de l'Association canadienne de normalisation mentionnées dans le paragraphe 12.10(2) du Règlement sont les seules normes qu'il faille respecter.  Je suis en désaccord avec cette supposition.  Les normes de l'Association canadienne de normalisation auxquelles on se réfère dans la paragraphe 12.10(2) du Règlement établissent des exigences minimales en ce qui a trait aux dispositifs de protection contre les chutes.  La première phrase du paragraphe 12.10(2) du Règlement se lit comme suit:

12.10(2) Les composantes d'un dispositif de protection contre les chutes doivent être conformes aux normes suivantes:

Une lecture attentive de cette phrase me force à conclure que les composantes individuelles d'un dispositif de protection contre les chutes doivent uniquement satisfaire aux normes de l'Association canadienne de normalisation mentionnées dans cet article.  Selon moi, cet article indique que tout dispositif de protection contre les chutes est convenable, en autant que ses composantes individuelles répondent et se conforment aux normes pertinentes de l'Association canadienne de normalisation.  De plus, les titres de ces normes, décrivant les composantes individuelles d'un dispositif de protection contre les chutes, ne devraient pas induire un employeur en erreur en limitant l'application de ces dispositifs uniquement au type d'entreprises mentionnées dans cette disposition.


Par conséquent, la disposition mentionnée plus haut ne devrait pas être interprétée de manière restrictive au point d'empêcher l'employeur d'envisager d'autres dispositifs de protection contre les chutes.  On prévoit une approche plus souple dans le paragraphe 12.10(2) du Règlement.  Par conséquent, j'informe les demandeurs qu'ils limitent incorrectement l'application du paragraphe 12.10(2) du Règlement aux dispositifs de protection contre les chutes décrits dans la disposition et aux industries auxquelles ces normes se rapportent.


Commentaires nos 3 et 4 Renvois à «garde-fou» en général et tel que précisé dans l'article 2.10 de la Partie II (Sécurité des bâtiments) du Règlement.

Les parties ont été informées au cours de l'audience que la mention d'une «structure non munie d'un dispositif de protection» dans l'alinéa 12.10(1)(a) du Règlement ne signifie pas qu'il est requis d'installer un garde-fou répondant aux critères de l'article 2.10 du Règlement, car cette interprétation est trop étroite.  Dans le texte anglais, le mot «unguarded», c'est-à-dire non muni d'un dispositif de protection (guard), s'applique à tous les types de dispositifs de protection.  Aussi, puisque la loi ne donne aucune définition du mot anglais «guard», il convient d'utiliser la définition donnée dans les dictionnaires de langue anglaise.  Le Concise Oxford Dictionary définit le mot «guard» de la façon suivante: «a thing that protects or defends» ou aussi «a device fitted to a machine, vehicle, weapon, etc., to prevent injury or accident to the user».  Un garde-fou n'est qu'un exemple de dispositif de protection pouvant prévenir une blessure ou un accident à l'utilisateur.

Si un garde-fou avait été installé sur la remorque, il serait possible de dire qu'il n'est pas tenu de satisfaire aux critères du Règlement car les garde-fous sont mentionnés dans la Partie II du Règlement sous la rubrique «Sécurité des bâtiments».  Toutefois, cette question n'a pas à être tranchée dans les cas qui nous occupent.

À la lecture du paragraphe 12.10(1) du Règlement, il peut ne pas sembler évident que cette clause requiert que la structure soit munie d'un dispositif de protection, ou que d'autres mesures de sécurité soient prises afin de protéger les employés au travail.  Cependant, les instructions de l'agent de sécurité renvoient de façon précise à l'obligation générale de l'employeur, conformément à l'article 124 du Code, «...de veiller à la protection de ses employés en matière de sécurité et de santé au travail».  Selon moi, une lecture simultanée des ces dispositions indique que l'employeur doit aussi orienter son attention, en termes de mesures de sécurité à prendre, vers les employés qui travaillent sur la structure, les divers dispositifs de sûreté en place ou qui pourraient être adaptés à la structure, ou la distance entre celle-ci et le niveau permanent sûr le plus proche.  Exiger que l'employeur prenne des mesures pour protéger ses employés est une chose raisonnable et est, à mon avis, tout indiqué dans les situations actuelles compte tenu du fait que ce problème perdure depuis plusieurs années.  De toute évidence, dire que les dispositifs exigés de protection contre les chutes ne s'appliquent pas dans les cas présents ne décharge pas l'employeur de sa responsabilité de prendre d'autres mesures de sécurité pour protéger ses employés au travail.

Par conséquent, l'affirmation selon laquelle «la loi n'oblige pas l'utilisation d'un garde-fou ou de tout autre dispositif...», ne peut être soutenue à la lumière de l'article 124 du Code portant sur la responsabilité générale de l'employeur.  Tout dispositif de sûreté serait convenable, en autant qu'il protège les employés contre les chutes.  Si l'employeur est incapable de protéger la structure, il sera dans l'obligation de fournir un dispositif de protection contre les chutes répondant aux normes de l'Association canadienne de normalisation.  À défaut de se conformer, l'employeur sera en infraction du sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) du Règlement qu'autorisent les alinéas 125(j), (t) et (u) du Code.

Quant à savoir si l'installation d'un garde-fou est appropriée dans les circonstances, il s'agit d'une question d'interprétation.  Il est vrai qu'un garde-fou peut gêner quelque peu les employés qui sortent d'un véhicule ou qui y entrent, mais il remplit ses fonctions qui consistent à protéger les employés contre les chutes.  En fait, si ce n'était de la distance entre le garde-fou et le véhicule sur la remorque, le garde-fou serait un dispositif de sûreté convenable.

Les demandeurs ont mentionné des échelles et des poignées dans leur témoignage.  L'installation d'échelles et de poignées semblables aux endroits indiqués pourrait constituer une solution au problème.

Commentaire 5: Les exigences relatives aux dispositions de protection contre les chutes qu'impose le Règlement ne s'appliquent pas à aucun autre moyen de transport (transport maritime, aérien et ferroviaire - article 1.4 du Règlement).

Les demandeurs ont soutenu que le sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) du Règlement ne s'appliquait pas à l'industrie du transport routier interprovincial.  Je suis en désaccord avec les demandeurs sur ce point et je ne partage pas leur affirmation selon laquelle les autres types de transport ne sont pas soumis à des exigences de protection contre les chutes dans leur industrie.  Malgré cela, le transport routier interprovincial, visé à l'alinéa 2(b) du Code, est régi par le Règlement sur l'hygiène et la sécurité au travail (le Règlement).  Les autres types de transport sont régis par des règlements particuliers à chaque industrie.  Les exigences imposées en vertu de ces règlements, ou l'absence d'exigences semblables à celles contenues au sein du Règlement, n'ont aucune portée sur le transport routier interprovincial.   L'article 12.10 du Règlement est formulé en des termes assez généraux pour s'appliquer au transport routier interprovincial.  L'article 12.10 s'applique donc à cette industrie.

Le second point de «l'argumentation de base» indique ce qui suit:


2. Si ces exigences sont imposées, il en résultera un danger pour les employés car un garde-fou installé à l'endroit indiqué constitue un obstacle et gêne même l'exécution d'un travail en toute sécurité.  De plus, les dispositifs de protection contre les chutes nuisent à l'exécution du travail en toute sécurité.

Je me suis déjà penché sur la question des garde-fous.  Selon moi, il ne s'agit sûrement pas de l'unique solution au problème dans les cas présents.  Cela ne veut pas dire qu'un garde-fou ne puisse pas être adapté à la structure en question, mais compte tenu de la formulation générale de l'article 12.10 du Règlement, on peut envisager une myriade de solutions.


Par exemple, on n'a pas songé à utiliser d'autres types de dispositifs de protection, à réduire la distance de «2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche», à adapter le garde-fou en question à la situation, à jeter un coup d'oeil aux autres types de dispositif de protection contre les chutes, et j'en passe.  Je pense que l'on passe trop de temps à débattre l'interprétation légaliste d'une clause afin de prouver qu'elle ne s'applique pas, et pas assez de temps à se pencher sur les aspects de sécurité du problème et à formuler des solutions.

Ainsi, à la question de savoir si le paragraphe 12.10(1) du Règlement est indiqué pour protéger un employé travaillant à une hauteur de 2,4 mètres sur le camion-remorque mentionné plus haut, je réponds dans l'affirmative.  L'agent de sécurité a aussi affirmé dans ses instructions que les demandeurs enfreignaient l'article 124 du Code, indiquant de cette façon que le problème pouvait se régler de différentes manières.  Je suis entièrement d'accord avec l'agent de sécurité qui, je crois comprendre, est prêt à aider les parties à  atteindre cet objectif.

Si les demandeurs soutiennent qu'il n'existe aucune autre solution possible en raison de leur lecture restrictive de l'article 12.10 du Règlement, alors un dispositif de protection contre les chutes devra être installé, tel que prévu dans la disposition.  Puisque les demandeurs ont seulement examiné brièvement les dispositifs de protection contre les chutes décrits dans le sous-alinéa 12.10(2), on ne peut affirmer, conformément à 7l'article 12.2 du Règlement, qu'un tel dispositif puisse être une source de danger pour l'employé.  Le cas échéant, la seule solution serait alors de voir à ce qu'aucun employé ne travaille sur ces structures jusqu'à ce que l'employeur se soit conformé à l'article 124 du Code.

En résumé, je crois que les instructions de l'agent de sécurité étaient justifiées dans les circonstances.  Il y avait infraction au sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) du Règlement, et aussi à l'article 124 du Code.  Néanmoins, les instructions de l'agent de sécurité doivent être corrigées pour, en premier lieu, préciser la disposition du Code qui autorise l'article 12.10 du Règlement, et en second lieu, corriger les erreurs de typographie que j'ai mentionnées plus haut.

Pour toutes les raisons mentionnées plus haut, JE MODIFIE PAR LA PRÉSENTE l'instruction donnée le 24 juin 1993 à MLC Motor Carriers Limited, par l'agent de sécurité Wm. H. Grealis, en vertu du paragraphe 145(1) de la Partie II du Code canadien du travail, en remplaçant les quatre alinéas de l'instruction citées dans le résumé des faits (voir page 2) par les quatre paragraphes suivants:

«Ledit agent de sécurité est d'avis qu'il y a contravention aux  dispositions suivantes de la Partie II du Code canadien du travail:

L'article 124 et les alinéas 125(j), (t) et (u) de la Partie II du Code canadien du travail, et le sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) de la Partie XII (matériel, équipement, dispositifs, vêtements de sécurité) du Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail.

En l'occurence, les personnes travaillant à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche ne sont pas protégées contre les chutes.

Par la présente, vous avez l'ordre, conformément au paragraphe 145(1) de la Partie II du Code canadien du travail, de mettre fin aux infractions au plus tard le 30 septembre 1993».


- et -


Pour toutes les raisons mentionnées plus haut, JE MODIFIE PAR LA PRÉSENTE l'instruction donnée le 22 juillet 1993 à Auto Haulaway inc., par l'agent de sécurité Wm. H. Grealis, en vertu du paragraphe 145(1) de la Partie II du Code canadien du travail, en remplaçant les quatre alinéas de l'instruction citée dans le


résumé des faits (voir page 3) par les quatre paragraphes suivants:

«Ledit agent de sécurité est d'avis qu'il y a contravention aux dispositions suivantes de la Partie II du Code canadien du travail:

L'article 124 et les alinéas 125(j), (t) et (u) de la Partie II du Code canadien du travail, et le sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) de la Partie XII (matériel, équipement, dispositifs, vêtements de sécurité) du Règlement du Canada sur l'hygiène et la sécurité au travail.

Par exemple, les personnes travaillant à plus de 2,4 m au-dessus du niveau permanent sûr le plus proche ne sont pas protégées contre les chutes.

Par la présente, vous avez l'ordre, conformément au paragraphe 145(1) de la Partie II du Code canadien du travail, de mettre fin aux infractions au plus tard le 30 octobre 1993.»

Décision rendue le 14 janvier 1994


Serge Cadieux
Agent régional de sécurité

Résumé de la décision de l'agent régional de sécurité


Décision no 93-106

Demandeurs:    Auto Haulaway inc. et MLC Motors Carriers Limited
                        Toronto, Ontario

Parties intéressées:  Section locale 938, Syndicat des Teamsters

Un agent de sécurité a donné des instructions identiques à deux entreprises de transport de véhicules neufs et usagés, aux termes du paragraphe 145(1) de la Partie II du Code canadien du travail.  L'agent de sécurité jugeait que les entreprises contrevenaient à l'article 124 du Code et au sous-alinéa 12.10(1)(a)(i) du Règlement.  Aucune mesure de sécurité n'avait été prise pour protéger les employés contre les chutes. Les remorques sur lesquelles ils travaillaient ne possédaient pas de système de protection contre les chutes, tel que requis par le Règlement.

Les demandeurs ont soutenu que la loi ne les obligeait pas à munir leurs camions-remorques de dispositifs de protection et que de tels dispositifs créeraient un danger.  Cependant, l'agent régional de sécurité a confirmé l'instruction de l'agent de sécurité dans les deux cas.  Les demandeurs avaient demandé à l'agent régional de sécurité de rendre une seule décision pour les deux cas, ce qu'il a fait. 

L'agent régional de sécurité a jugé que les entreprises enfreignaient effectivement les clauses mentionnées plus haut.  Il a souligné que les entreprises disposaient d'une multitude de solutions mais n'avaient rien fait depuis plusieurs années pour protéger leurs employés.  L'agent régional de sécurité a de plus indiqué que si les demandeurs soutiennent qu'aucune mesure de sécurité ne peut être prise et qu'un dispositif de protection contre les chutes, tel qu'exigé, ne convient pas dans les circonstances, aucun employé ne pourrait accéder aux structures non munies de dispositif de protection jusqu'à ce que les employeurs se soient conformés aux instructions.

Des corrections mineures de typograhie ont été apportées aux instructions de l'agent de sécurité.

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