Archivée - Décision: 95-003 DÉCISION D'UN AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ

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Requérant : Air Canada

Intimée :  Syndicat canadien de la fonction publique (S.C.F.P.)

MOTS CLÉS 

Danger,  Confort , Condition personnelle, Taille -Aéronef,  Blessure à la tête,  Mal de dos,  Position debout,  Agent de bord,  Hauteur de cabine,  bloc,  Offres,  Déclaration de refus de travailler,  Inhérent, Condition normale d'emploi,  Observations conjointes,  Révision,  Ergonomie,  Enquête objective,  Certificat de médecin,  Danger réel

DISPOSITIONS

Code canadien du travail : para. 122(1), 128(1), 129(3), 129(4), 145(2).

SOMMAIRE

Un agent de bord d'Air Canada a refusé de travailler à bord du nouveau réacté de cinquante places d'Air Canada parce qu'il était trop grand pour la cabine de l'aéronef.  Un agent de sécurité a reconnu que l'employé avait subi un dommage corporel du fait de son travail à bord du CL-65 en raison des maux de dos entraînés par la position courbée qu'il lui avait fallu adopter à bord de cet aéronef.

En révision, l'agent régional de sécurité a jugé qu'une allégation de mal de dos était insuffisante en l'espèce pour justifier une décision d'existence d'un danger parce que l'employé n'avait pas consulté de médecin.  L'agent régional de sécurité a jugé que le rôle de l'agent de sécurité dans un cas de refus de travailler est de décider s'il y a danger réel, non pas s'il y a possibilité de danger.  L'agent régional de sécurité a modifié l'instruction, l'employeur ayant admis que l'employé avait subi des blessures à la tête en raison de l'absence de rembourrure à la partie supérieure de la porte du poste de pilotage.

 

CODE DU TRAVAIL DU CANADA

 PARTIE II

 SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

 

Révision en vertu de l'article 146 du Code canadien du travail,
partie II des instructions données par un agent de sécurité

 

Décision no 95-003

Requérant :  Air Canada
                   Aéroport international d'Halifax
                   Représentée par : Me Richard J. Charney, avocat


Intimé :  Andrew Crutchfield
             Agent de bord
             Représenté par : Tracy Angles et Stephen Morash, Syndicat canadien de la fonction publique


Mis-en-cause : R. M. Muzzerall
                        Agent de sécurité
                        Développement des ressources humaines Canada


Devant :  Serge Cadieux
              Agent régional de sécurité
              Développement des ressources humaines Canada


Le 18 janvier 1995, les parties ont été entendues en audience à Montréal (Québec), MM. Morash et Crutchfield étant convenus que M. Angles serait le porte-parole de M. Cruthfield, l'employé, auteur du refus de travail en l'espèce, et du Syndicat canadien de la fonction publique.

 

 

 

 


Renseignements généraux

M. Crutchfield est agent de bord de remplacement au service d'Air Canada1, il est également commissaire de bord2.  Le 13 novembre 1994, M. Crutchfield, qui fait six pieds et un demi-pouce (6'½") de taille, travaillait à bord d'un aéronef d'Air Canada CL-65.  Le CL-65 est un réacté de cinquante (50) places dont la cabine a une hauteur de six pieds, un pouce et demi (6'1 ½").  Cette hauteur est la même sur toute la longueur de la section de la cabine qui est réservée aux passagers; le plafond s'abaisse légèrement près du poste de pilotage.

Le 21 novembre 1994, M. Crutchfield a reçu son calendrier de vols pour le mois, appelé dans le jargon de l'industrie du transport aérien, un bloc.  M. Crutchfield s'est vu accorder ce bloc par suite d'une offre3 qu'il avait faite en application de sa convention collective.  Il a noté qu'il devait travailler sur la ligne Halifax-Boston, desservie par des aéronefs CL-65.

Ce qui s'est passé ensuite est assez obscur.  M. Crutchfield nous a informé à l'audience qu'il avait d'abord voulu agir contre son employeur et faire un grief, mais qu'il s'est fait dire que s'il refusait de travailler sur un aéronef CL-65, il se trouvait en fait à invoquer son droit de refus de travailler en vertu de la Partie II du Code du travail.  Il a accepté cet argument quoique, comme il l'a redit à l'audience, il a pensé que la situation n'était pas dangereuse.  Par danger, lui-avait-on dit, il faut entendre un danger aux termes de la définition du Code, et seul un agent de sécurité pouvait statuer sur ce point.  Aussi un agent de sécurité a-t-il été appelé et invité à faire enquête en la matière.

L'agent de sécurité Robert Muzzerall a ouvert une enquête à cet égard le jour suivant, en présence de toutes les parties intéressées.  La Déclaration de refus de travailler signée par
M. Crutchfield se lit ainsi :

J'AI TRAVAILLÉ SUR CET AVION LE 13 NOV.  J'AI TRAVAILLÉ UNE JOURNÉE DE ONZE HEURES ET DEMIE, DONT HUIT HEURES ENVIRON À BORD DE L'AVION.  COMME LA HAUTEUR DE LA CABINE EST MOINDRE QUE MA TAILLE, J'AI ÉTÉ FORCÉ DE ME PENCHER DURANT TOUTE LA JOURNÉE, CE QUI M'A DONNÉ MAL AU DOS.  JE N'AI PLUS VOULU LE REFAIRE.

Le 25 novembre 1994, l'agent de sécurité a mesuré l'intérieur de l'avion et M. Crutchfield.  Voici ces mesures :

Taille de M. A. Crutchfield : 6'½"
CL-65 au point le plus haut — allée : 6'½"
Enseigne "sortie", près de l'entrée principale : 71 ½"
Porte du poste de pilotage : 66 ½"

L'agent de sécurité a constaté que l'espace de travail dont disposait M. Crutchfield [TRADUCTION] "ne lui permettait pas de faire son travail sans avoir à se tenir courbé en permanence".  Il a décidé qu'il y avait là une situation qui représentait un danger pour cet employé, forcé de travailler à bord d'un aéronef CL-65.  Comme l'exige le Code dans ces cas-là, l'agent de sécurité a enjoint, par instructions écrites, à Air Canada, sur le fondement de l'alinéa 145(2)a) du Code, de prendre des mesures.  Ces instructions sont ainsi conçues, en partie :

[TRADUCTION]
"Ledit agent de sécurité est d'avis qu'il y a existence d'une situation constituant un danger pour un employé à son travail,

En raison de la hauteur limitée de l'aéronef CL 65 et de celle de l'employé et de plusieurs blessures à la tête par l'employé.

Par conséquent, IL VOUS EST DONNÉ PAR LA PRÉSENTE INSTRUCTION, en vertu de l'alinéa 145(2)a) de la Partie II du Code canadien du travail, de prendre immédiatement des mesures propres à parer au danger."

Thèse de l'employeur

L'argumentation détaillée de l'employeur a été consignée au dossier.  Air Canada a [TRADUCTION] "contesté l'instruction pour deux motifs" :

a) En premier lieu, Air Canada fait valoir que les circonstances inconfortables dans lesquelles s'est trouvé M. Crutchfield ne constituaient pas un "danger" aux termes du paragraphe 122(1) du Code;

b) En second lieu, subsidiairement, Air Canada fait valoir que, s'il y avait quelque "danger" à accomplir ce travail, il était inhérent aux fonctions de l'employé, ou en tant que condition normale d'emploi et, par conséquent, en application de l'alinéa 128(2)b) du Code, il ne donnait pas le droit à M. Crutchfield de refuser l'affectation."

Me Charney reconnaît que la distance séparant le plancher de la partie supérieure de la porte du poste de pilotage est de cinq pieds six pouces (5'6"), que, normalement, ce linteau devrait être rembourré de caoutchouc et qu'un tel rembourrage est actuellement en voie d'être mis en place.  L'absence de dispositif de protection en ce point, au sommet de la porte, explique les blessures à la tête reçus par M. Crutchfield.  Toutefois, Me Charney fait observer que les blessures subies à la tête par M. Crutchfield ne sont pas la raison pour laquelle il a exercé son droit de refus de travailler.  C'est plutôt la hauteur de l'aéronef qui est à la raison de sa plainte.

Thèse de l'employé

M. Angles fait valoir que, lorsque M. Crutchfield travaille à bord d'un CL-65, il doit adopter une position qui lui est dommageable, tout simplement parce qu'il n'a pas sa hauteur à l'intérieur de cet aéronef.  Il fait observer également que M. Crutchfield n'a jamais souffert de maux de dos auparavant, mais qu'il éprouve des douleurs dans le dos lorsqu'il lui faut adopter une position à demi penché à bord du CL-65.

M. Angles reconnaît que M. Crutchfield n'a consulté aucun médecin pour son mal de dos et qu'il ne peut présenter de certificat médical indiquant la cause, ni même constatant l'existence, de son mal.  M. Crutchfield n'a pas refusé de travailler à bord d'autres aéronefs, seulement à bord du CL-65.

Observations conjointes

Afin de tenter de résoudre le litige hors la procédure de révision, les parties en l'espèce, soit Me Charney pour Air Canada, M. Crutchfield en son nom propre et MM. Angles et Morash pour le Syndicat canadien de la fonction publique, sont convenues que les faits, tels qu'ils sont rapportés dans le mémoire d'Air Canada, ne sont pas contestés.  Les parties sont unanimes à convenir que les spécifications du constructeur pour la cabine, soit 6'1½" (six pieds et un pouce et demi) sont justes, qu'en réalité la hauteur de la cabine varie de 6'1 ½" à 6'1" (six pieds un pouce) en raison de variations dans l'habitacle du CL-65, et que M. Crutchfield fait 6'½".  En somme, les parties ont toutes reconnu fondées les prétentions d'Air Canada.

Il a en outre été admis qu'il n'y avait pas lieu d'administrer d'autres preuves et que les parties étaient satisfaites qu'aucun autre argument ou observation ne serait invoqué en l'espèce.  S'étant vu refuser, par l'agent régional de sécurité, leur demande conjointe de rescision simple des instructions, sans plus ample considération, les parties ont demandé que les faits exposés ci-haut soient les seuls dont l'agent régional de sécurité tienne compte dans sa décision.

Décision

Il s'agit de décider en l'espèce s'il y avait danger pour M. Crutchfield, au moment où l'agent de sécurité a fait enquête, le jour qui a suivi le jour de son refus de travailler.  Dès observations présentées par les parties et du rapport de l'agent de sécurité, je retiens les faits suivants :

 1.  M. Crutchfield est commissaire de bord, c.-à-d. chef de cabine, ses services ont été retenus par Air Canada, il doit exercer ses fonctions à bord de tous les appareils;

 2.  M. Crutchfield a exercé son droit de refus de travailler alors qu'il était chez lui, après s'être aperçu que, d'après son calendrier de vols, il pourrait avoir à voler sur la ligne Halifax-Boston, desservie par des CL-65;

 3.  M. Crutchfield ne travaille à bord des CL-65 qu'à l'occasion et il ne souffre de maux de dos qu'à bord de ces appareils;

 4.  M. Crutchfield allègue qu'il ne souffre de maux de dos qu'à bord des CL-65 en raison de la position courbée qu'il doit adopter pour travailler à bord de cet aéronef; il admet volontiers cependant n'avoir consulté aucun médecin et ne pouvoir présenter aucun certificat à l'appui de son allégation;

 5.  M. Crutchfield n'a pas voulu exercer un droit en vertu du Code, il a voulu présenter un grief contre son employeur afin que la question soit résolue;

 6.  M. Crutchfield ne prétend pas que l'inconfort qu'entraîne l'obligation de travailler dans une position courbée à bord du CL-65 représente un danger pour lui, fait qui a cependant été constaté par un agent de sécurité.

Il me faut dire que l'agent de sécurité ignorait que M. Crutchfield avait refusé de venir travailler alors qu'il était chez lui, qu'il avait l'intention de présenter un grief et qu'il ne croyait pas se trouver en danger.  À mon avis, si l'agent de sécurité avait connu ces faits, il aurait peut-être tenté de résoudre la question en-dehors de la procédure relative au refus de travail.  Après tout, l'agent de sécurité ignore si M. Crutchfield aurait eu à travailler à bord de cet aéronef dans un avenir prochain, puisque, m'affirme-t-on, il ne répond pas aux critères relatifs au bilinguisme qui pourraient lui permettre de faire des offres pour les lignes desservies par cet appareil.  Le droit de refus a pour but de répondre à des problèmes graves, imprévus, devant être résolus sur le champ, alors que l'employé est exposé au danger prétendu.  Il n'a pas pour but de pallier les dangers éventuels susceptibles de surgir à l'avenir.

Je vais néanmoins statuer au fond en l'espèce, car la jurisprudence établit clairement que l'agent de sécurité doit décider si un danger existe ou non pour l'employé au moment où il procède à son enquête et non si le danger existait au moment du refus de travailler.  En l'espèce, l'agent de sécurité a procédé à l'enquête le jour suivant, en présence de l'employé, et il a constaté qu'il y avait existence d'un danger au moment de l'enquête, aussi a-t-il donné des instructions à cet égard.  Je vais examiner les circonstances qui ont donné lieu à ces instructions et déciderai, à la lumière des faits, s'il y a ou non danger.

Pour décider si M. Crutchfield était ou non dans une situation dangereuse, il faut considérer la définition donnée au terme danger que l'on trouve au paragraphe 122(1) du Code, compte tenu du droit de l'employé de refuser de travailler en vertu du paragraphe 128(1) du même Code.  Le paragraphe 128(1) du Code porte :

128. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l'employé au travail peut refuser d'utiliser ou de faire fonctionner une machine ou une chose ou de travailler dans un lieu s'il a des motifs raisonnables de croire que, selon le cas :

a) l'utilisation ou le fonctionnement de la machine ou de la chose constitue un danger pour lui-même ou un autre employé;

b) il y a danger pour lui de travailler dans le lieu.

Et le terme "danger" est défini au paragraphe 122(1) du Code comme il suit :

"danger" Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposé, ou de la rendre malade, avant qu'il ne puisse y être remédié.

Rapprochée du refus de travailler exercé par M. Crutchfield, la définition qui précède laisse entendre que le risque ou la situation dangereuse doivent être apparus sur les lieux de travail et être susceptibles de causer un préjudice corporel ou d'être une cause de maladie pour l'individu concerné.  De plus, l'emploi de la proposition "avant qu'il ne puisse y être remédié" indique qu'il doit être possible de "remédier" au danger, c'est-à-dire au risque ou à la situation.

L'appareil a été approuvé par la FAA et par Transport Canada; aucune modification majeure ne peut y être apportée.  Air Canada n'a pas les moyens de remédier physiquement à la situation si ce n'est par le recours à une solution administrative.  En l'espèce, c'est la condition physique personnelle de M. Crutchfield qui est la cause de la situation.  M. Crutchfield n'a pas sa hauteur à bord de cet appareil; autrement dit, le matériel (le CL-65) n'est pas adapté à cet employé.  Fournir un matériel adapté à la personne est une question d'ergonomie, une science qui n'a pas encore reçu toute la reconnaissance qu'elle mérite.

L'agent de sécurité a reconnu fondées les allégations de M. Crutchfield, qu'il avait subi un préjudice corporel du fait d'avoir eu à adopter une position courbée à bord du CL-65, sans vérifier si elle était vraiment fondée.  La décision de l'agent de sécurité est basée sur cette allégation, soit une question d'ordre médical à ce moment-là.  M. Crutchfield affirme qu'il n'a jamais eu mal au dos auparavant, qu'il n'éprouve des douleurs dans le dos que lorsqu'il travaille à bord du CL-65 et que ces douleurs disparaissent à sa sortie de l'appareil.  Je serais tenté de dire que M. Crutchfield trouve très inconfortable de travailler à bord de cet appareil et, à mon avis, éprouve l'inconfort et les symptômes que toute personne éprouverait normalement dans une situation semblable.  J'en viens à cette conclusion seulement parce que M. Crutchfield n'a pas travaillé à bord du CL-65 souvent.  Il me semble fort difficile de conclure, après un seul jour de travail à bord du CL-65, que cet appareil est responsable d'un préjudice corporel causé au dos de
M. Crutchfield.

En tout état de cause, pour l'agent de sécurité, conclure automatiquement au préjudice, c'était faire un acte de foi puisque M. Crutchfield n'a consulté aucun médecin au sujet de sa condition, encore moins obtenu un certificat médical à l'appui de son allégation.  Il aurait pu le faire, ou, à tout le moins, tenter de le faire, puisque c'est le 13 novembre 1994 qu'il a travaillé à bord du CL-65 et que c'est le 21 novembre qu'il a refusé de travailler.

Son enquête sur le refus de travailler close, l'agent de sécurité doit décider s'il y a danger.  Si, comme il l'a fait en l'espèce et en conformité avec le paragraphe 129(4) du Code, l'agent de sécurité "conclut à la réalité du danger..." (soulignés ajoutés), il doit donner des instructions en application du paragraphe 145(2) du Code.  Contrairement à l'employé, auquel il n'est demandé que d'avoir "des motifs raisonnables de croire..." qu'il y a danger pour lui à travailler, l'agent de sécurité doit, lui, conclure à la réalité du danger, non pas seulement à la possibilité de son existence.

L'enquête de l'agent de sécurité doit donc être objective.  Il ou elle doit considérer les faits en cause et, sur le fondement de ces faits et du droit applicable, rendre une décision.  Pour ce faire, il peut s'avérer nécessaire que l'agent de sécurité prenne le temps nécessaire pour obtenir quelque assurance susceptible de fonder sa constatation qu'il y a réellement danger.  L'agent de sécurité ne subit aucune pression qui le force à se prononcer immédiatement, surtout dans les cas où la question est épineuse.  Tant que l'agent de sécurité n'a pas rendu sa décision, l'employé est autorisé à demeurer en un lieu sûr ou est affecté à un autre travail [art. 129(3)].  Par conséquent, tant que l'agent de sécurité poursuit son enquête, l'employé n'est pas exposé au danger allégué.

Dans des cas semblables, l'agent de sécurité devrait rappeler à l'employé l'avantage qu'il peut y avoir à obtenir confirmation médicale que ses conditions de travail lui causent un préjudice ou un dommage corporel.  Il en est ainsi parce que, en l'espèce, il n'y a aucun test, aucune analyse ou évaluation auxquels l'agent de sécurité peut procéder pour établir qu'une condition de travail particulière était dommageable pour M. Crutchfield.  Seul un professionnel de la médecine ou de l'ergonomie pouvait s'acquitter de cette tâche.

Néanmoins, même si l'employé avait obtenu un certificat médical qui était venu soutenir son allégation, il me faudrait encore déterminer, comme l'a fait valoir Me Charney, si le danger allégué était un danger couvert par le Code.  Je n'ai pas à statuer sur ce point en l'espèce néanmoins, les parties s'étant entendues sur les faits.

Compte tenu des preuves administrées conjointement par les parties en cause et de l'absence de preuve qui puisse venir soutenir et la constatation de l'agent de sécurité que danger il y avait et l'allégation de M. Crutchfield qu'il avait subi un préjudice corporel, je conclus qu'il n'y avait pas danger pour M. Crutchfield à travailler, aux termes du Code, à bord du CL-65.  Je ne doute pas toutefois que M. Crutchfield se trouve dans une situation fort inconfortable lorsqu'il lui faut travailler à bord d'un CL-65, une situation qu'il n'a guère les moyens de modifier.

Lorsqu'il fait des offres pour un bloc de remplacement, M. Crutchfield ne dispose d'aucune information sur les lignes qui composent ce bloc ou sur le type d'appareils qui desservent ces lignes. Si M. Crutchfield pouvait disposer de cette information, cela lui permettrait de choisir les blocs pour lesquels il est prêt à faire une offre et de décider quels appareils il veut éviter.  Il me semble que si les parties demandaient l'avis du Comité de la sécurité et de la santé au travail dans des cas de ce genre, des solutions simples pourraient, et seraient, trouvées.

L'employeur ayant reconnu que M. Crutchfield a subi un préjudice corporel à la tête en raison de l'absence de rembourrage du sommet de la porte du poste de pilotage et que cet état de chose pouvait être corrigé, je vais modifier les instructions afin qu'il soit tenu compte de cette admission.  L'employeur est également prévenu que toute autre cause de danger devra faire l'objet d'une protection adéquate dès lors que l'on saura qu'elle peut blesser les employés.  Je crois comprendre qu'une enseigne "sortie", à bord du CL-65, peut ainsi être cause de danger.

Par tous ces motifs, JE RÉVISE PAR LES PRÉSENTES les instructions données à Air Canada le trentième jour de novembre 1994 par l'agent de sécurité R.M. Muzzerall, remplaçant le troisième alinéa de ces instructions par l'alinéa suivant :

"L'absence de rembourrage au sommet de la porte du poste de pilotage fait que l'employé se blesse à la tête."

Décision rendue le 28 février 1995.

 


Serge Cadieux,
Agent régional de sécurité

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