Archivée - Décision n° 95-015 CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

Informations archivées

Les informations archivées sont fournies aux fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elles ne sont pas assujetties aux normes Web du gouvernement du Canada et n'ont pas été modifiées ou mises à jour depuis leur archivage. Pour obtenir ces informations dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.

Révision en vertu de l'article 146 du Code canadien du travail, Partie II, des instructions données par un agent de sécurité

Requérant : R.J. Corfe                  
Vice-président adjoint                  
Administration de la voie maritime du Saint-Laurent                  
Région de Niagara                  
St. Catharines (Ontario)

Mise-en-cause : Julie D. Bottoni                          
Agente de sécurité n° 1713                          
Développement des ressources humaines Canada                         
Région de l'Ontario

Intimé : Gary Wilson             
Co-président du comité de sécurité            
Travailleurs canadiens de l'automobile            
Section locale 4212

Devant : Bertrand Southière              
Agent régional de sécurité              
Développement des ressources humaines Canada

Une audience a eu lieu le 20 juillet 1995 à St. Catharines. Étaient présents - Joel Fournier Préposé aux services 9 Président de la section locale 4212 - John Thomas Wickabrod Jr. Opérations Délégué syndical - Gary Wilson Co-président, comité de santé et sécurité au travail, local 4212 - Vince Hearn Employé syndiqué - Julie Bottoni Agente de sécurité, DRHC, Programme du travail - Wayne Page Conseiller technique en SST, DRHC, Programme du travail - R. Noël Agent de sécurité, DRHC, Programme du travail - Peggy Wright Agente de sécurité, DRHC, Programme du travail - W. Bruce Tkachuck Agent de sécurité, Voie maritime du Saint-Laurent - R.J. Corfe Co-président, comité de santé et sécurité au travail, Région de Niagara, Administration de la voie maritime du Saint-Laurent - John Teravich Gestionnaire, Secteur du centre, Administration de la voie maritime du Saint-Laurent - Larry Malone Directeur, Installations électriques, Administration de la voie maritime du Saint-Laurent - Bill Valedis Expert-conseil indépendant, PLC System

Historique

Le rapport d'ingénierie intitulé «Investigation of flight lock controls», daté du 1er juin 1995 et préparé par le comité d'enquête donne une brève description de l'incident à l'origine des instructions

«Le 11 avril 1995, l'écluse 6W s'est déversée dans l'écluse 5W alors que les vannes (11 et 12) à l'extrémité amont de l'écluse 6W étaient ouvertes. Il s'en est ensuivi une inondation qui aurait pu occasionner des blessures ou des pertes de vie.» (Traduit de la page 1 du rapport.)

Un second incident est également décrit dans ce rapport

«Le 13 avril 1995, les vannes 9 et 10 de l'écluse 6W se sont à nouveau ouvertes d'ellesmêmes. » (Traduit de la page 1 du rapport.)

Le rapport se poursuit ainsi

«Ces deux incidents majeurs, ainsi que plusieurs incidents mineurs reliés à la commande des écluses étagées, ont amené la direction à mettre sur pied un comité d'enquête chargé de déterminer la cause du problème et de recommander des solutions.

Le comité d'enquête était composé de Larry Malone Services techniques, St. Catharines - président Pat Vinelli Services opérationnels, Cornwall Dave Shaw Secteur du Centre, St. Catharines Bill Valedis Expert-conseil indépendant.»

Le rapport du comité d'enquête ainsi que d'autres documents soumis par l'employeur ont été versés à ce dossier.

D'après ce que j'en comprends, la manoeuvre des écluses est commandée par un système informatique. En gros, l'ordinateur s'occupe de la séquence de fonctionnement des différents éléments lorsqu'un bateau emprunte les écluses. Cela comprend la manoeuvre des éléments comme les portes d'écluses, les dispositifs d'arrêt de bateau, les vannes, etc. D'après les documents que j'ai en ma possession, je constate que cet ordinateur a eu des défaillances qui ont été à l'origine des incidents susmentionnés.

Suite à ces incidents, il a été décidé, à titre de mesure provisoire, d'instaurer une procédure manuelle incluant une désactivation manuelle de chaque vanne. Cette désactivation consiste à couper manuellement l'alimentation électrique aux opérateurs de vanne. De cette façon, on s'assure que même si l'ordinateur envoie une commande erronée, par exemple l'ouverture des vannes pendant que ces dernières devraient être fermées, les vannes demeureront fermées car elles ont désactivées à la source.

Après un examen du système de commande automatisé, l'expert-conseil retenu par l'employeur, M. Valedis, proposait, en attendant que le système informatique soit entièrement revu et corrigé, qu'une fonction d'invalidation de la commande des vannes («désactivation par logiciel») remplace la désactivation manuelle des actionneurs de vanne. Cette fonction, une fois activée, empêcherait toute commande du contrôleur logique programmable de manoeuvrer les vannes.

L'employeur a décidé de mettre en application la proposition de l'expert-conseil. Sur les recommandations de l'équipe d'enquête, la fonction d'invalidation de la commande des vannes a été soumise à trois niveaux d'essais : un test de la logique au bureau, un essai in situ par l'équipe d'ingénierie et enfin des essais de fonctionnement par une équipe d'essais opérationnels. Le 26 mai 1995, l'employeur a procédé à la mise en service de la fonction provisoire d'invalidation de la commande des vannes sur le côté est des écluses étagées. Toutefois, suite à un refus de travailler, la mise en service a été reportée après le week-end. Le lundi matin, 29 mai 1995, Julie Bottoni, agente de sécurité de Développement des ressources humaines Canada, a été informée du refus de travailler de certains employés. Elle a mené une enquête le 30 mai 1995 et a ensuite donné des instructions à l'employeur (annexe 1).

Arguments de l'employeur

L'employeur plaide que les instructions n'étaient pas fondées sur toutes les données disponibles. La «désactivation par logiciel» a été testée à fond par le personnel technique et par des représentants des employés, qui ont constaté qu'elle fonctionnait à tout coup. La «désactivation par logiciel» est indépendante du cheminement logique et reproduit le débranchement manuel. De plus, les instructions n'énoncent aucune décision concernant le refus de travailler au moment où ce dernier s'est produit.

Arguments des employés

Les syndiqués sont d'avis que le système est défectueux, que le câblage est défectueux et que la logique est défectueuse. La «désactivation par logiciel» passe par l'ordinateur et les employés n'y ont plus confiance. Par contre, le débranchement manuel est direct et sûr.

Analyse

Les instructions de l'agente de sécurité énoncent «...qu'il n'a pas été démontré que la désactivation automatisée par logiciel empêche de façon infaillible que des commandes erronées soient transmises et reçues...». Par contre, l'employeur déclare ce qui suit, dans une lettre datée du 12 juin 1995 et signée par R.J. Corfe:

«John Teravich nous a avisé que les trois (3) premiers niveaux d'essais recommandés par l'équipe d'enquête avant la mise en service ont été effectués pour le côté est des écluses étagées. Le premier était un test de la logique au bureau; le second, un essai in situ par l'équipe d'ingénierie et le troisième, des essais de fonctionnement par une équipe d'essais opérationnels. M. Teravich va maintenant passer à la mise en application de la recommandation grâce à laquelle les procédures manuelles spéciales ne seront plus nécessaires sur le côté est des écluses. David Shaw avait confiance en cette mesure de sécurité. Par contre, Dan Warner signalait que, bien que l'équipe d'essai "ne suit pas parvenue à causer une défaillance du système", il n'était pas prêt à recommander que nous procédions...».

Il y avait un représentant des employés au sein du comité d'enquête aux côtés des représentants de l'employeur et d'un expert-conseil indépendant. L'équipe d'essais opérationnels comptait aussi des représentants des employés. Les résultats des essais n'étayent pas le jugement porté par l'agente de sécurité à l'effet «...qu'il n'a pas été démontré que la désactivation automatisée par logiciel empêche de façon infaillible que des commandes erronées soient transmises et reçues...». De plus, ces résultats d'essais n'ont pas été contestés par les employés. Malgré les problèmes survenus avec les commandes informatisées et la perte de confiance des employés à l'endroit du système dans son ensemble, il a été démontré que la fonction logique d'invalidation de la commande des vannes (désactivation par logiciel) avait le même effet que la désactivation manuelle des vannes.

Il a également été mentionné, comme l'a souligné R.J. Corfe dans ses arguments datés du 20 avril (?) 1995, que l'agente de sécurité n'a pas pris de décision concernant le refus de travailler comme l'exigeait le paragraphe 129(2) du Code canadien du travail.

Décision

Comme les arguments utilisés par l'agente de sécurité pour donner ses instructions ne sont pas appuyés par les faits, j'annule par les présentes les instructions données à l'Administration de la voie maritime du Saint-Laurent par l'agente de sécurité Julie D. Bottoni le 2 juin 1995.

Décision rendue le 31 octobre 1995.

 

Bertrand Southière Agent régional de sécurité

DANS L'AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL INSTRUCTIONS À L'EMPLOYEUR EN VERTU DE L'ALINÉA 145(2)a)

Le 30 mai 1995, l'agente de sécurité soussignée a mené une enquête sur le lieu de travail occupé par l'Administration de la voie maritime du Saint-Laurent, employeur assujetti au Code canadien du travail, Partie II, sis au 508, avenue Glendale, St. Catharines (sic) (Ontario), ledit lieu de travail étant parfois appelé la Voie maritime du Saint-Laurent.

L'agente de sécurité est d'avis que l'utilisation d'une chose constitue un danger pour un employé au travail il n'a pas été démontré que la désactivation automatisée par logiciel empêche de façon infaillible que des commandes erronées soient transmises et reçues et causent des mouvements intempestifs des éléments et des vannes des écluses, ce qui met en danger le personnel affecté à ces dernières.

Par conséquent, je vous ORDONNE PAR LES PRÉSENTES, conformément à l'alinéa 145(2)a) du Code canadien du travail, Partie II, de prendre immédiatement des mesures propres à parer au danger.

Fait à Mississauga, le 2 juin 1995.

Julie D. Bottoni Agente de sécurité N° 1713

À : Administration de la voie maritime du Saint-Laurent     
508, avenue Glendale     
St. Catharines (sic) (Ontario)
L2R 6V8

Décision n° 95-015

RÉSUMÉ DE DÉCISION DE L'AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ

Requérant : L'Administration de la voie maritime du Saint-Laurent, Région de                  
Niagara                  
R.J. Corfe, vice-président adjoint

MOT CLÉS

Commandes automatisées; désactivation manuelle; écluse de canal; Administration de la voie maritime du Saint-Laurent.

DISPOSITIONS Code canadien du travail : al. 145(2)a), par. 129(2)

RÉSUMÉ

Le 11 avril 1995, un incident s'est produit sur le canal Welland, où l'écluse n° 6 ouest s'est déversée dans l'écluse n° 5 ouest alors que les vannes de l'extrémité amont de l'écluse n° 6 étaient ouvertes. L'écluse n° 5 a alors débordé, produisant une inondation qui a causé des dommages matériels considérables dans le secteur. Deux jours plus tard, les vannes se sont à nouveau ouvertes comme d'elles-mêmes, mais l'incident n'a pas eu de conséquences. À titre de mesure provisoire, l'employeur a eu recours à une désactivation manuelle des vannes pour éviter que ces incidents se répètent. Concurremment, une équipe d'enquête, constituée de représentants de l'employeur et des employés aidés par un expert-conseil indépendant, a été chargée d'analyser les incidents et de trouver une solution. Suite à un examen préliminaire du système informatisé de commande des écluses, l'expert-conseil a conclu que le matériel et le logiciel devaient être améliorés et a proposé, comme mesure de sécurité, qu'on incorpore à l'ordinateur une fonction d'invalidation de la commande des vannes («désactivation par logiciel») qui pourrait remplacer la désactivation manuelle des vannes. Après des essais complets de cette fonction, l'employeur a tenté de la mettre en service à la fin mai 1995, mais certains employés ont alors refusé de travailler. Une agente de sécurité a été convoquée sur les lieux et, après enquête, a donné à l'employeur des instructions lui interdisant d'utiliser la «désactivation par logiciel».

L'agent régional de sécurité a annulé ces instructions parce qu'elles étaient fondées sur l'assertion à l'effet que la «désactivation par logiciel» n'était pas infaillible, alors que tous les essais effectués sur cette fonction n'avaient démontré aucune défaillance. L'agent régional de sécurité a aussi souligné que, en contravention au paragraphe 129(2) du Code canadien du travail, l'agente de sécurité n'a pas pris de décision concernant le refus de travailler.

Détails de la page

Date de modification :