Archivée - Decision: 96-018 CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

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Révision, en vertu de l'article 146 du Code canadien du travail,
d'une instruction donnée par un agent de sécurité

Décision no   96-018

Demandeur :  Port Royal Mills
                     Représenté par : M. Kresho Petrovich, propriétaire
                     et M. Jim Fode, directeur de la minoterie

Mis en cause :  Roma Duncalfe
                        Agente de sécurité
                        Développement des ressources humaines Canada

Devant :  Serge Cadieux
               Agent régional de sécurité
               Développement des ressources humaines Canada

Une visite du lieu de travail décrit dans l'instruction (ci-jointe) a été effectuée le 4 septembre 1996, à Aurora (Ontario), en présence de Jim Fode, directeur de la minoterie, Bob Gass, agent de sécurité représentant Roma Duncalfe (agente ayant donné l'instruction), Doug Malanka, agent régional de sécurité du Bureau de l'agent régional de sécurité et moi-même. Il n'y avait aucun représentant des employés. La minoterie emploie généralement quatre personnes.

Contexte

Cette affaire a débuté par une inspection du lieu de travail exploité par Port Royal Mills, par les autorités provinciales, c'est-à-dire le ministère du Travail de l'Ontario (MTO). Après avoir déterminé que les provenderies relèvent généralement de la compétence du fédéral, le MTO a décidé de renvoyer ce dossier aux autorités fédérales, c'est-à-dire aux agents du Programme du travail de Développement des ressources humaines Canada. L'agente de sécurité Roma Duncalfe s'est vu confier la responsabilité d'assurer un suivi relativement à l'inspection initiale menée à Port Royal Mills. Dans son rapport d'enquête circonstancié, qui a été déposé en preuve dans cette affaire, l'agente décrit son intervention en ces termes [traduction] :

« Intervention et méthode »:  Une inspection a été effectuée le jeudi 4 juillet 1996 sans préavis. Cette inspection a été suivie d'une autre visite, le lundi 8 juillet 1996, afin de donner trois instructions à l'employeur et d'essayer d'obtenir, de la part de ce dernier, une promesse de conformité volontaire à de nombreuses autres exigences en matière de sécurité et de santé au travail.

Conclusions : L'intérieur du lieu de travail consiste en une salle de mouture, qui sert à la transformation des grains de céréales, et comporte un entrepôt adjacent.

Un chariot élévateur électrique à fourche présentant des pièces sous tension à découvert dans le moteur était utilisé dans la salle de mouture pendant que la transformation et la manipulation des grains de céréales était en cours. Aux termes du Code canadien de l'électricité, ce genre d'endroit est un emplacement de classe II, division I (18-006), parce que la transformation et la manipulation des grains de céréales peut générer de la poussière combustible en quantité suffisante pour produire un mélange explosif ou inflammable. Il est en outre précisé dans le Code qu'aucune pièce sous tension de l'appareillage électrique ne doit être à découvert (18-224).

Une copie du plan de la salle de mouture, préparé apparemment par l'employeur et remis au ministère du Travail de l'Ontario, constitue l'annexe 4. Ce plan visait à illustrer l'existence d'un système de ventilation pouvant peut-être empêcher l'accumulation d'éléments combustibles dans l'air. Par ailleurs, la nature même du travail effectué dans la salle de mouture, d'après la classification établie par le Code canadien de l'électricité, exige qu'aucune pièce sous tension de l'appareillage électrique ne soit à découvert, car durant les opérations liées à la mouture, le potentiel de production de poussières combustibles, en quantité suffisante pour produire un mélange explosif ou inflammable, existe clairement. La classification est tout à fait indépendante des exigences liées à la ventilation, et le plan de la salle de mouture fourni par l'employeur ne constitue pas une preuve concluante que tout danger d'explosion est éliminé.

Règlement : Une instruction a été donnée en vertu de l'alinéa 145(2)a) du Code canadien du travail pour interdire l'utilisation du chariot électrique à fourche dans la salle de mouture pendant que la transformation et la manipulation des grains de céréales est en cours, compte tenu du fait que ces activités sont susceptibles de produire des poussières combustibles. Cette décision a été rendue en vertu de l'alinéa 125i) du Code canadien du travail et du paragraphe 17.11(1) du Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail.

À noter que l'agent de sécurité Robert Gass a confirmé que l'agente de sécurité Roma Duncalfe avait, dans le cadre de son inspection, observé le déroulement des opérations à la minoterie et qu'elle avait remarqué, durant l'opération de tamisage, qu'une quantité raisonnable de poussière de farine combustible était alors produite.

Représentations de l'employeur

L'employeur n'a pas fait de représentations par écrit au sujet de cette affaire, bien qu'il ait été invité à expliquer les motifs pour lesquels il demandait la révision de l'instruction.

Toutefois, j'ai eu un entretien téléphonique avec M. Petrovich durant ma visite du lieu de travail de Port Royal Mills, au cours duquel il m'a expliqué qu'un système de ventilation avait été installé dans la salle de mouture, ce qui, à son avis, devait suffire à réduire la concentration de poussière combustible à un niveau sécuritaire puisque l'air dans cette pièce était renouvelé chaque minute et demie. Il croyait aussi que l'instruction ne devait pas s'appliquer à son établissement, qui n'est pas une minoterie conventionnelle puisqu'il s'agit d'un système fermé.

Décision

Dans cette affaire, il s'agit de déterminer si l'utilisation d'un chariot élévateur électrique à fourche à Port Royal Mills constitue un danger pour un employé au travail. Étant donné que l'agente de sécurité a précisé les dispositions applicables du Code canadien du travail, partie II (ci-après le Code) et du Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail (ci-après le Règlement), je déterminerai également, pour ma part, si les dispositions citées viennent étayer la constatation d'un danger.

L'agente de sécurité a décrit le danger en ces termes :

«Alinéa 125i) du Code canadien du travail, partie II, et paragraphe 17.11(1) du Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail.

  Pendant la transformation ou la manipulation des grains de céréales, il est dangereux pour un employé d'utiliser le chariot élévateur électrique à fourche, qui présente des pièces sous tension à découvert, à l'intérieur de la salle de mouture, parce que celle-ci contient de l'équipement susceptible de produire des poussières combustibles. »

 
Voici le libellé des dispositions invoquées, soit l'alinéa 125i) du Code 

125 Dans le cadre de l'obligation générale définie à l'article 124, l'employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité (i) de veiller à ce que les véhicules et l'équipement mobile que ses employés utilisent pour leur travail soient conformes aux normes réglementaires de sécurité;

et le paragraphe 17.11(1) du Règlement :

17.11(1) Sous réserve du paragraphe (2), personne ne doit, dans un endroit présentant un risque d'incendie :

a) utiliser un équipement, une machine ou un outil qui pourrait fournir une source d'inflammation;

  b) fumer ou utiliser une flamme nue ou une autre source d'inflammation.

Il importe avant tout de déterminer si la salle de mouture est effectivement un endroit présentant un risque d'incendie au sens du paragraphe 17.11(1) du Règlement. Selon la définition qui est donnée à l'article 1.2 du Règlement,

 « endroit présentant un risque d'incendie » s'entend d'un endroit qui contient ou est susceptible de contenir des concentrations explosives ou inflammables de substances dangereuses.

C'est un fait notoire dans l'industrie céréalière que la poussière céréalière explosera si la concentration de poussière en suspension dans l'air dépasse un certain niveau en présence d'une source d'inflammation ou d'une énergie suffisante pour enflammer la poussière. L'agente de sécurité a signalé que de telles conditions existaient lors de son enquête. Elle en a déduit à la lecture du Code canadien de l'électricité que la salle de mouture est un emplacement qui fait partie des établissements de la classe II, division I (18-006), parce que la transformation et la manipulation des grains de céréales peut produire des poussières combustibles en quantité suffisante pour produire un mélange explosif ou inflammable. De plus, M. Fode a confirmé que l'installation électrique de la salle de mouture avait été approuvée en fonction des normes établies dans le Code canadien de l'électricité pour ce type d'emplacement dangereux.

Je suis donc convaincu que cette salle de mouture est un endroit dangereux qui, à tout le moins, est susceptible de contenir des concentrations de poussières céréalières explosives ou inflammables produites par la mouture, le tamisage ou toute autre activité liée directement à la transformation du grain. En fait, la salle de mouture correspond bien, à mon avis, à la définition d'un endroit présentant un risque d'incendie.

Je suis également persuadé que le chariot élévateur électrique à fourche est une pièce d'équipement pouvant fournir une source d'inflammation dans un environnement où l'on retrouve des poussières céréalières, si je me fonde sur diverses caractéristiques de cet équipement, et notamment le fait que les pièces sous tension à découvert produisent des étincelles pouvant enflammer la poussière de farine et en provoquer la combustion de façon soudaine. On sait par expérience que les conséquences sont alors dévastatrices. Le frottement des fourches du chariot sur le plancher en béton de la minoterie peut aussi produire des étincelles qui enflammeront la poussière céréalière. Et il y a encore d'autres sources d'inflammation présentes dans la salle de mouture. Par exemple, les employés se servent d'un autre chariot de manutention, un chariot pour palettes, qui présente les mêmes problèmes que le chariot électrique à fourche.

L'article 17.11 du Règlement établit une norme minimale stricte, qui doit être respectée pour protéger la sécurité et la santé des employés au travail. L'utilisation d'équipement pouvant fournir une source d'inflammation dans un endroit qui présente un risque d'incendie, comme la salle de mouture, mettra inévitablement en danger la vie, la santé et la sécurité des employés qui utilisent cet équipement. Dans les conditions où l'on retrouve ou l'on peut retrouver suffisamment de poussière combustible dans l'air pour produire une explosion ou un mélange inflammable, seuls les chariots industriels approuvés en vue d'un usage dans de tels endroits peuvent être utilisés. Le chariot élévateur électrique à fourche vu par l'agente de sécurité lors de son inspection n'était pas approuvé pour une utilisation dans ce genre d'endroit présentant un risque d'incendie. Par conséquent, il existe une preuve suffisante que la non-conformité aux dispositions de l'alinéa 17.11(1)a) du Règlement compromet la sécurité des employés de Port Royal Mills.

Je souscris donc à l'instruction donnée puisqu'aucun argument n'a été présenté dans cette affaire relativement à l'application du paragraphe 17.11(2)1 du Règlement. Je laisse aux agents de sécurité et aux représentants de l'employeur le soin de déterminer si cette dernière disposition s'applique en l'espèce. Il incombe à l'employeur de démontrer, à la satisfaction de l'agent de sécurité, qu'il est en pratique impossible d'éviter l'exécution du travail dans la salle de mouture sans se servir du chariot élévateur électrique à fourche non réglementaire et que les conditions énoncées dans cette dernière disposition peuvent être respectées.

L'instruction doit être corrigée pour faire état des dispositions habilitantes pertinentes du Code en ce qui concerne l'article 17.11 du Règlement, car le fondement législatif de cette disposition particulière n'est pas l'alinéa 125i) du Code, comme il est mentionné dans l'instruction, mais plutôt les alinéas 1252o) et p) du Code qui traitent des obligations de l'employeur. Pour ce motif, je MODIFIE l'instruction donnée en vertu de l'alinéa 145(2)a) du Code, le 4 juillet 1996, par l'agente de sécurité Roma Duncalfe à Port Royal Mills, en substituant au renvoi à l'alinéa 125i) du Code, au troisième paragraphe (en retrait) de l'instruction, le renvoi aux alinéas 125o) et p).


Décision rendue le 30 octobre 1996

L'agent régional de sécurité,

Serge Cadieux


 

ANNEXE

CONCERNANT LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL
PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION DONNÉE À L'EMPLOYEUR EN VERTU DE L'ALINÉA 145(2)a)

L'agente de sécurité soussignée ayant, le 4 juillet 1996, visité le lieu de travail exploité par Port Royal Mills, employeur assujetti au Code canadien du travail, partie II, et sis au 240 Industrial Parkway South, à Aurora, en Ontario, et ayant effectué une inspection sur ledit lieu de travail, estime que l'utilisation ou le fonctionnement d'une machine décrite ci-après constitue un danger pour un employé au travail et que les dispositions suivantes du Code ne sont pas respectées, c'est-à-dire :

Alinéa 125i) du Code canadien du travail, partie II, et paragraphe 17.11(1) du Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail.

Pendant la transformation ou la manipulation des grains de céréales, il est dangereux pour un employé d'utiliser le chariot élévateur électrique à fourche, qui présente des pièces sous tension à découvert, à l'intérieur de la salle de mouture, parce que celle-ci contient de l'équipement susceptible de produire des poussières combustibles.


En conséquence, il est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES audit employeur, conformément à l'alinéa 145(2)a) du Code canadien du travail, partie II, de prendre immédiatement des mesures propres à parer au danger.

Fait à Aurora, le 4 juillet 1996.

Roma Duncalfe
Agente de sécurité no1855

DESTINATAIRE :  Port Royal Mills
                                240 Industrial Parkway South, Aurora

SOMMAIRE DE LA DÉCISION DE L'AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ

Décision no    96-018

DEMANDEUR :  Port Royal Mills

MOTS-CLÉS : 

Chariot élévateur électrique à fourche, poussière céréalière, inflammation, endroit présentant un risque d'incendie, Code canadien de l'électricité, chariot pour palettes, combustible.

DISPOSITIONS : 

Code canadien du travail, alinéas 125 i), o), p) et 145 (2)a)
Règlement canadien sur la sécurité et la santé, paragraphe 17.11

RÉSUMÉ :

Une agente de sécurité a remarqué qu'un chariot élévateur électrique à fourche qui présentait des pièces sous tension à découvert dans le moteur était utilisé dans la salle de mouture pendant que la transformation des grains de céréales était en cours. Elle a donc donné une instruction à l'employeur pour lui signaler le danger et lui indiquer qu'il était dangereux de se servir de ce chariot élévateur non réglementaire, parce que les opérations de transformation et de manipulation des grains de céréales peuvent produire des poussières combustibles en présence d'une source d'inflammation. L'agent régional de sécurité était parfaitement d'accord avec l'instruction qui a été donnée, mais il a MODIFIÉ cette dernière afin de corriger le renvoi inexact aux dispositions du Code qui constituent le fondement législatif de l'article 17.11 du Règlement.

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