Archivée - Decision: 97-015 CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

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Révision, en vertu de l’article 146 du Code canadien du travail, partie II,

d’une instruction donnée par un agent de sécurité

Décision no :            97-015

Demandeur :           Chemin de fer St‑Laurent et Hudson

                                 Réseau CP Rail, triage Agincourt

                                 Représenté par : Chris Bartley

                                 Agincourt (Ontario)

Intimé :                    TCA‑Canada

                                 Oshawa (Ontario)

                                 Représenté par : Ron Laughlin

                                 Vice‑président régional

Mis en cause :        Robert Maklan

                                 Agent de sécurité

                                Développement des ressources humaines Canada

Devant :                  Doug Malanka

                                Agent régional de sécurité

Le 6 janvier 1997, l’agent de sécurité Robert Maklan a mené une enquête sur les opérations de l’atelier Diesel du Réseau CP Rail situé au triage Agincourt, en Ontario. Il a ensuite donné une instruction, conformément au paragraphe 145(1) du Code canadien du travail (Code), partie II. Au point 3 de son instruction, il a indiqué que l’employeur avait enfreint l’alinéa 147a)(iii) du Code parce qu’il avait pris des mesures disciplinaires contre un employé qui s’était prévalu de son droit de refuser un travail dangereux. L’agent de sécurité a donc ordonné à l’employeur de mettre fin à l’infraction au plus tard le 7 février 1997. Il a envoyé son instruction à M. Chris Bartley, spécialiste, Ressources humaines, à CP Rail. Une copie de l’instruction se trouve à l’annexe A.

M.  P. J. Gagne, chef, Exploitation - Mécanique, de CP Rail, à Toronto, a écrit à M. Maklan le 6 février 1997, afin de demander une révision du point 3 de l’instruction, conformément à l’article 146 du Code. En conséquence, une audience a eu lieu le 17 juin 1997, à Toronto (Ontario), en vue d’examiner ce point.


Contexte

Le rapport de l’agent de sécurité, M. Maklan, a été versé au dossier et ne sera donc pas repris ici. Dans le témoignage qu’il a donné à l’audience, il a indiqué que, le 29 août 1996, M. A. H. Mashregi, un électricien de l’atelier Diesel, avait été chargé de faire l’entretien de l’alternateur d’une locomotive diesel. Au cours de ce travail, il a utilisé cinq bonbonnes d’un produit chimique en aérosol appelé Contax N-F. M. Mashregi a été incommodé par ce produit; il a été pris d’étourdissements et s’est senti malade. Ses symptômes correspondaient à l’information donnée dans la fiche signalétique du produit; on y indiquait que l’inhalation prolongée des vapeurs pouvait causer une irritation des voies respiratoires, des étourdissements, des vertiges et donner la nausée. De plus, l’étiquette sur l’aérosol indiquait aussi que l’exposition prolongée à ce produit pouvait être dommageable et même mortelle. L’agent de sécurité a souligné que le produit avait été utilisé dans un endroit mal aéré de la locomotive.

Après avoir été exposé au Contax N-F, M. Mashregi est sorti pour prendre l’air comme le recommandait l’étiquette du produit. C’est à ce moment que M. Fenech, coordonnateur adjoint, Exploitation, l’a aperçu et lui a demandé d’installer un convertisseur sur la locomotive 5555. Selon le témoignage de M. Maklan, M. Mashregi aurait dit à M. Fenech qu’il se sentait mal et qu’il n’était pas en mesure de terminer le travail parce que la senteur d’urine qui flottait dans cette partie de la locomotive aggravait son malaise. M. Mashregi a ensuite rencontré M. Crosse, coordonnateur adjoint, Exploitation, et rédigé un rapport sur l’incident.

L’agent de sécurité, M. Maklan, a admis que M. Mashregi n’avait pas de fait informé son employeur qu’il exerçait son droit de refuser de travailler conformément aux dispositions du Code. Toutefois, il estimait qu’il aurait été dangereux pour M. Mashregi et pour les autres employés qu’il continue à travailler. Par conséquent, malgré l’ambiguïté de son refus, l’agent de sécurité a déclaré que l’employé avait agi correctement dans les circonstances. De plus, il a indiqué que cette action était conforme à la décision no 757 du Conseil canadien des relations du travail (CCRT) dans l’affaire Malboeuf c. le Canadien National (1989).

Le 10 septembre 1996, M. Gagne a écrit à M. Mashregi afin de l’informer que 20 mauvais points avaient été portés à son dossier pour insubordination. Les raisons invoquées étaient que M. Mashregi n’avait pas suivi les instructions données par son superviseur, le 29 août 1996, et qu’il n’avait pas fait les réparations aux locomotives 5622 et 5555. Le 15 novembre 1996, M. Laughlin a déposé une plainte auprès de Développement des ressources humaines Canada indiquant que CP Rail avait pris des mesures disciplinaires contre M. Mashregi parce qu’il avait exercé son droit de refus. L’agent de sécurité, M. Maklan, a été chargé du dossier; il a ensuite rencontré les parties le 6 janvier 1997 et donné une instruction le 23 janvier 1997.


Position de l’employeur

Avant l’audience, l’employeur a présenté des documents dans lesquels il expliquait pourquoi il demandait une révision du point 3 de l’instruction. Ces documents ont été versés dans le dossier et ne seront donc pas repris ici.

Pendant l’audience, l’employeur a présenté deux témoins. Il s’agissait de M. J. Fenech et de M. J. D. (Jim) Eaton, spécialiste, Locomotives.

M. Fenech a déclaré que le 29 août 1996, M. Mashregi avait refusé à trois reprises de faire le travail qui lui avait été confié. Il a insisté sur le fait que M. Mashregi ne lui avait pas dit qu’il se sentait malade à cause du Contax N‑F, ni qu’il refusait d’exécuter le travail pour des raisons de sécurité. M. Fenech a aussi déclaré que M. Mashregi n’avait pas eu assez de temps ce matin‑là pour faire le travail qu’il disait avoir effectué; par conséquent, il ne croyait pas que M. Mashregi avait fait le travail ni qu’il avait été exposé au Contax N‑F.

Dans son témoignage, M. Eaton a déclaré qu’après l’incident M. Mashregi s’était plaint que M. Fenech s’en prenait à lui et qu’il voulait aller voir son médecin. Selon M. Eaton, M. Mashregi n’avait pas mentionné qu’il avait été exposé au Contax N‑F et n’avait pas l’air malade.

Position de l’employé

M. Mashregi a témoigné et insisté sur le fait qu’il avait fait le travail demandé sur l’alternateur et utilisé cinq bonbonnes de Contax N‑F. Il a admis qu’il savait que le Contax N‑F était un produit dangereux, tout en précisant qu’il n’en connaissait pas exactement les dangers tant qu’il n’a pas lu l’étiquette sur le produit. Il a indiqué n’avoir reçu aucune formation dans le cadre du SIMDUT concernant le Contax N‑F ni aucune formation sur les dispositifs de protection des voies respiratoires. M. Mashregi a déclaré qu’il ne savait pas qu’il y avait des masques à filtre à charbon de bois dans l’atelier Diesel.

Après avoir utilisé cinq bonbonnes de Contax N‑F, il s’est senti pris de vertiges, faible et malade. Il a déclaré qu’il était très énervé après avoir lu sur l’étiquette que l’exposition au produit pouvait entraîner la mort. Lorsqu’il est sorti de la locomotive pour prendre l’air, M. Fenech lui a demandé d’enlever le convertisseur de la locomotive. M. Mashregi a affirmé avoir dit à M. Fenech de confier le travail à quelqu’un d’autre parce qu’il était malade.

M. Mashregi a expliqué qu’il n’avait pas appelé l’agent de sécurité parce qu’il était malade. Il a aussi expliqué qu’il avait révisé le rapport d’incident le 9 septembre 1996, parce qu’il ne l’avait pas terminé le 29 août 1996 en raison de son malaise. Il a déclaré que l’énervement signalé dans le rapport d’incident initial était attribuable à son malaise et au fait que M. Fenech a insisté à plusieurs reprises pour qu’il change le convertisseur. Il a aussi indiqué qu’il n’a jamais refusé une tâche pendant ses 27 années de service dans cette entreprise.

M. W. Hardy, aide‑mécanicien de locomotive et coprésident adjoint du comité de sécurité et de santé du triage de Toronto, a indiqué dans son témoignage qu’il n’y a pas eu de formation dans le cadre du SIMDUT dans l’atelier Diesel depuis le milieu des années 80. Il a déclaré qu’il n’avait rien avoir avec le refus de M. Mashregi mais que, dans les circonstances, ce dernier avait à son avis fait le mieux possible.

Argument de l’employeur

Dans son argument, M. Bartley a déclaré à nouveau qu’il n’avait rien remarqué dans le comportement ou les actions de M. Mashregi qui laisse croire qu’il était malade; MM. Fenech, Crosse et Eaton n’avaient rien remarqué non plus. Il a insisté sur le fait que M. Mashregi n’avait dit à personne qu’il venait d’être exposé au Contax N‑F ou qu’il se sentait malade. Il a déclaré que le refus de travailler était de l’insubordination et n’avait rien à voir avec la sécurité.

M. Bartley a affirmé que, dans les affaires Paquin c. CAFAS Inc.[1], Lapointe c. Société canadienne des postes[2], Green c. Air Niagara Express Inc.[3] et Laprise c. Robin Hood Multifioods Inc.[4], le CCRT avait indiqué dans sa décision que l’employé doit préciser à l’employeur qu’il refuse de travailler pour des raisons de sécurité et indiquer quelles sont ces raisons. Il a aussi affirmé que, dans l’affaire Bliss c. le Conseil du Trésor[5], la Commission des relations de travail dans la fonction publique a déterminé que le stress ou les conflits attribuables aux relations humaines ne constituent pas un danger. Il a ajouté que dans l’affaire Almeida c. Via Rail Canada[6], le CCRT a jugé que le stress lié aux rapports avec les collègues de travail peut constituer une condition de travail normale.

Argument de l’employé

M. Laughlin a souligné qu’il n’existe aucune preuve que M. Mashregi n’a pas fait l’entretien de l’alternateur, le 29 août 1996. Il a déclaré à nouveau que le harcèlement signalé par M. Mashregi à M. Eaton et indiqué dans le rapport d’incident initial était attribuable au fait que M. Mashregi était malade. Il a aussi indiqué qu’aucun membre du comité de sécurité et de santé n’était présent lorsque M. Crosse a rempli le rapport d’incident. Il a affirmé que M. Mashregi n’avait pas appelé un agent de sécurité parce qu’il était malade et confus. Selon lui, l’employeur aurait dû faire venir un agent de sécurité.


Décision

Selon le sous‑alinéa 147a)(iii)[7] du Code, il est interdit à l’employeur de prendre des mesures disciplinaires contre un employé parce qu’il a observé les dispositions de la partie II du Code. Compte tenu de la lettre que M. Gagne a envoyée à M. Mashregi le 10 septembre 1996 pour l’informer des 20 mauvais points portés à son dossier, le fait que des mesures disciplinaires ont bien été prises ne fait aucun doute.

Par conséquent, la question sur laquelle je dois me prononcer en ce qui concerne le point 3 de l’instruction de l’agent de sécurité, M. Maklan, est si M. Mashregi a agi conformément aux dispositions de la partie II du Code, et plus précisément s’il a exercé son droit de refus au sens du Code.

Bien qu’il y ait eu certains points communs dans les témoignages que j’ai entendus au sujet de la chronologie et du déroulement des événements qui se sont produits le 29 août 1996, il y avait toutefois des différences importantes dans les témoignages au sujet de ce qui est réellement arrivé. Par conséquent, je ne peux trancher la question qu’en déterminant ce qui est le plus plausible d’après les éléments de preuve présentés.

Si je prends les faits dans l’ordre, je suis convaincu que M. Mashregi a de fait été exposé au contenu de cinq bonbonnes de Contax N‑F. On ne m’a fourni aucune preuve convaincante pour réfuter la déclaration de M. Mashregi, qui affirme avoir exécuté le travail et avoir été exposé au Contax N‑F. M. Fenech a déclaré qu’il était impossible de remettre l’alternateur en état dans le laps de temps que M. Mashregi déclare avoir pris, mais il n’a apporté aucune preuve au sujet de ce que M. Mashregi a fait ou n’a pas fait, ni au sujet de la quantité de Contax N‑F utilisée ce matin‑là.

Je suis aussi convaincu que l’exposition au Contax N‑F a rendu M. Mashregi malade et nerveux. La fiche signalétique du Contax N‑F et le témoignage de l’agent de sécurité confirment que l’exposition à ce produit dans un endroit mal aéré pouvait incommoder M. Mashregi. Même si les témoins de l’employeur déclarent que M. Mashregi ne semblait pas malade, ils n’ont aucune formation médicale qui leur permette de prouver leurs observations et ils ne lui ont fait passer aucun test.

Après avoir examiné les différents éléments de preuve, j’estime que M. Mashregi n’a pas pu faire le travail parce que l’exposition au Contax N‑F l’avait rendu malade. L’agent de sécurité a déclaré qu’en raison de la nature du travail exécuté à l’atelier Diesel et de l’état de M. Mashregi, il aurait été dangereux pour ce dernier et pour ses collègues qu’il continue à travailler. Je ne suis pas convaincu que l’action de M. Mashregi a été motivée par un conflit entre M. Fenech et lui.

En ce qui concerne le rapport d’incident initial dans lequel il n’est pas fait mention de l’exposition au Contax N‑F ni du refus de travailler, M. Mashregi a affirmé qu’il n’a pas pu compléter le rapport parce qu’il était malade. M. Crosse, dans son témoignage à l’audience, n’a pas réfuté la déclaration de M. Mashregi; en outre, rien dans les documents qui m’ont été fournis ne réfute cette déclaration. Par conséquent, je dois accepter l’explication de M. Mashregi pour justifier l’absence de ces renseignements dans le rapport d’incident et la révision ultérieure dudit rapport. Pour la même raison, j’accepte aussi son explication dans laquelle il déclare que le harcèlement et le stress mentionnés dans le rapport découlaient de son malaise et de l’insistance de M. Fenech pour qu’il fasse le travail demandé.

Dans son rapport, l’agent de sécurité, M. Maklan, a reconnu que M. Mashregi n’a jamais dit qu’il refusait de travailler conformément aux dispositions du Code relatives au danger. Toutefois, il a expliqué qu’il croyait que c’était implicitement son intention lorsqu’il a dit qu’il était malade et qu’il comptait partir tôt pour se rendre chez le médecin. Il a dit que, dans les circonstances, M. Mashregi avait eu raison de refuser.

M. Bartley a affirmé que M. Mashregi n’avait pas, de fait, exercé son droit de refus parce qu’il n’avait pas informé l’employeur de son intention ni du danger possible. Il a rappelé que le Conseil et la Commission avaient confirmé cette exigence et le fait que le stress et le harcèlement ne constituent pas un danger au sens du Code.

Même si je comprend le raisonnement de l’agent de sécurité qui a conclu que M. Mashregi avait implicitement exercé son droit selon le Code, je crois, comme M. Bartley, que l’employé doit indiquer clairement à l’employeur qu’il refuse de travailler conformément aux dispositions du Code ainsi que le danger en question. Dans l’affaire Lapointe c. la Société canadienne des postes mentionnée par M. Bartley, l’un des membres du CCRT, Mme G. Gollelin, a écrit ce qui suit dans sa décision :

« Des dispositions pertinentes du Code, il ressort clairement que c’est le rapport que fait l’employé à son employeur et à un membre du Comité de santé et de sécurité qui déclenche tout processus devant mener à la solution du problème et qui lui vaudra la protection du Code le cas échéant. Ce rapport est plus qu’un simple détail administratif; il est l’expression même du refus de travailler, puisqu’il concrétise la décision qu’a prise l’employé de ne pas travailler dans certaines conditions, parce qu’il croit à l’existence d’un danger. C’est pourquoi le paragraphe 133(3) en fait une condition préalable au dépôt de la plainte. Dans le but de respecter tant l’esprit que la lettre du Code, le Conseil a maintes fois déclaré que ce rapport n’avait pas à être formel et détaillé, dans la mesure où il est évident que l’employé refuse de travailler pour des motifs de sécurité. »

Comme M. Mashregi n’a pas indiqué explicitement à son employeur qu’il exerçait son droit de refus en vertu du Code ni le danger en question, j’accepte l’argument de l’employeur qui prétend que les actions de M. Mashregi, malgré son malaise, ne peuvent pas être considérées comme un refus au sens du Code. Par conséquent, j’estime que l’article 128 du Code ne s’applique pas dans la présente affaire.


Ceci dit, je dois revenir à la prémisse initiale de l’agent de sécurité, M. Maklan, voulant que M. Mashregi ait agi conformément aux dispositions de la partie II du Code et qu’il ne devrait faire l’objet d’aucune mesure disciplinaire. À ce sujet, je précise que, selon l’alinéa 126.1h)[8] du Code, M. Mashregi est tenu de signaler l’accident ou la situation à l’origine de son malaise à son employeur. De plus, l’article 15.3[9] du Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail (RCSST) stipule que son rapport peut être fait oralement ou par écrit. À mon avis, M. Mashregi s’est conformé à cette exigence lorsqu’il a informé M. Fenech de son malaise et de son intention d’aller voir le médecin. Il a répété cette information lorsqu’il a fait son rapport à M. Crosse, dans lequel il a indiqué que l’incident s’était produit à 11 h et lorsque, le 10 septembre 1996, M. Bartley a pris la déclaration de M. Mashregi en présence de M. W. Hardy. Le rapport de l’employeur indique clairement que, pendant cette rencontre, M. Mashregi a déclaré que le Contax N‑F l’avait rendu malade.

Selon l’alinéa 125c)[10] du Code, l’employeur doit, de la manière réglementaire, enquêter sur tous les accidents, toutes les maladies professionnelles et autres situations comportant des risques dont il a connaissance, les enregistrer et les signaler aux autorités désignées par les règlements. En outre, les dispositions du paragraphe 15.4(1)[11] du RCSST stipulent que l’employeur doit sans délai nommer une personne qualifiée pour faire enquête sur la situation, aviser le comité de sécurité et de santé de la situation et du nom de la personne nommée pour faire enquête et, enfin, prendre les mesures nécessaires pour empêcher que la situation ne se reproduise.

On pourrait affirmer que le dépôt, par M. Crosse, du rapport d’accident no 1409 répond à la première exigence, soit la nomination d’une personne qualifiée pour faire enquête sur la situation, mais rien ne prouve qu’une enquête a été menée, sauf pour ce qui est d’établir un rapport à l’aide du formulaire 1409. De plus, rien n’indique que le comité de sécurité et de santé a été avisé de l’incident ni que l’employeur a pris les mesures nécessaires pour éviter qu’un tel incident ne se produise à nouveau.

À ces exigences s’ajoutent celles de l’alinéa 125f)[12] du Code en vertu duquel l’employeur est tenu de fournir les installations de premiers soins et les services de santé réglementaires. En outre, selon les dispositions du paragraphe 16.2(1)[13] du RCSST, l’employeur est tenu d’établir par écrit la marche à suivre pour donner promptement les premiers soins à un employé dans le cas d’une blessure, d’une maladie professionnelle ou d’un malaise. Si une telle marche à suivre existait à l’atelier Diesel, rien n’indique qu’elle ait été appliquée.

Lorsque l’agent de sécurité, M. Maklan, a mené son enquête le 6 janvier 1996, soit environ quatre mois après que M. Mashregi ait été exposé au Contax N‑F, il a constaté qu’aucune mesure n’avait été prise pour éviter que cet incident se reproduise. Par conséquent, il a ordonné à l’employeur, aux points 1 et 2 de son instruction, de mettre fin à l’infraction aux dispositions du Code précisées dans l’instruction. Il est donc évident, dans le cas à l’étude, que l’intérêt des employés de l’atelier Diesel aurait été mieux servi si l’employeur avait fait porter son enquête sur la sécurité et la santé plutôt que sur l’insubordination.

J’affirme en outre que si l’employeur avait été plus diligent en ce qui concerne les besoins en premiers soins ou médicaux de M. Mashregi, et s’il avait fait une véritable enquête sur l’incident, il est peu probable qu’on aurait eu à se demander si M. Mashregi a refusé de travailler parce que le Contax N‑F l’avait rendu malade ou si ses actions constituaient un refus implicite de travailler.

Tout bien considéré, je crois que M. Mashregi a agi conformément aux dispositions du Code et a été pénalisé pour cette raison. En conséquence, JE MODIFIE PAR LES PRÉSENTES le troisième point de l’instruction de l’agent de sécurité, M. Maklan, comme suit :

L’agent de sécurité soussigné [...] estime que les dispositions suivantes du Code ne sont pas respectées, c’est‑à‑dire :

3.  147a)(iii)

Il est interdit à l’employeur :

a) de congédier, suspendre, mettre à pied ou rétrograder un employé ou de lui imposer une sanction financière ou autre ou de refuser de lui verser la rémunération afférente à la période au cours de laquelle il aurait travaillé s’il ne s’était pas prévalu des droits prévus par la présente partie, ou de prendre  C ou menacer de prendre C des mesures disciplinaires contre lui parce que : [...]

(iii) soit il a observé les dispositions de la présente partie ou cherché à les faire appliquer;

M. Mashregi a fait l’objet de mesures disciplinaires parce qu’il a agi conformément à l’alinéa 126(1)h) de la présente partie.

En conséquence, il est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES audit employeur, conformément au paragraphe 145(1) du Code canadien du travail, partie II, de rectifier la situation au plus tard le 7 février 1997.

Décision rendue le 16 octobre 1997.

Doug Malanka

Agent régional de sécurité


 

SOMMAIRE DE LA DÉCISION DE L’AGENT DE SÉCURITÉ

Décision no :      97‑015

Demandeur :      Chemin de fer St‑Laurent et Hudson

                         Réseau CP Rail - triage Agincourt

                         Agincourt (Ontario)

Intimé :              TCA‑Canada

MOTS CLÉS

Droit de refuser, refus implicite, premiers soins, enquête sur les situations comportant des risques, mesures disciplinaires, harcèlement, SIMDUT, fiche signalétique, formation.

DISPOSITIONS

Code :         alinéas 125c), 125f) 126.1h), articles 128, 133 et 145.1, sous‑alinéa 147a)(iii)

RCSST :      article 15.3 et paragraphes 15.4(1) et 16.2(1)

RÉSUMÉ          

Le 6 janvier 1997, un agent de sécurité a mené une enquête sur les opérations de l’atelier Diesel du Réseau CP Rail situé au triage Agincourt, en Ontario. Il a ensuite donné une instruction conformément au paragraphe 145(1) du Code canadien du travail (Code), partie II.  Au point 3 de son instruction, il a indiqué que l’employeur avait enfreint l’alinéa 147a)(iii) du Code parce qu’il avait pris des mesures disciplinaires contre un employé qui s’est prévalu de son droit de refuser un travail dangereux. L’agent de sécurité a ordonné à l’employeur de mettre fin à l’infraction au plus tard le 7 février 1997.

L’agent de sécurité a admis que l’employé n’avait pas de fait informé son employeur qu’il exerçait son droit de refuser de travailler conformément aux dispositions du Code. Toutefois, il estimait qu’il aurait été dangereux pour l’employé en question et pour les autres employés qu’il continue à travailler. Par conséquent, malgré l’ambiguïté de son refus, l’agent de sécurité a déclaré que l’employé avait agi correctement dans les circonstances.

L’agent régional de sécurité (ARS) a décidé que même s’il comprend le raisonnement de l’agent de sécurité qui a conclu que l’employé avait implicitement exercé son droit selon le Code, le droit de refuser s’applique à la condition que l’employé indique clairement à l’employeur qu’il refuse de travailler conformément aux dispositions du Code ainsi que le danger en question.

Néanmoins, l’ARS a décidé que l’employé a agi correctement en signalant à l’employeur  qu’il avait été exposé à un produit chimique en aérosol et en l’informant qu’il était incapable de compléter le travail. L’employé n’aurait donc pas dû faire l’objet de mesures disciplinaires étant donné qu’il se conformait aux dispositions de la partie II. L’ARS A CONFIRMÉ que l’employeur a enfreint le sous‑alinéa 147a)(iii) en prenant des mesures disciplinaires contre l’employé, mais A MODIFIÉ l’instruction en supprimant la référence au droit de refuser. Il a rendu sa décision le 8 octobre 1997.



[1] Paquin c. CAFAS Inc.(1991) - Décision no 896 du CCRT.

[2] Lapointe c. Société canadienne des postes (1992) - Décision no 920 du CCRT.

[3] Green c. Air Niagara Express Inc (1992) - Décision no 983 du CCRT.

[4] Laprise c. Robin Hood Multifioods Inc. (1990) - Décision no 793 du CCRT.

[5] Bliss c. Conseil du Trésor (1987) - Décision no 166-2-18 de la CRTFP.

[6] Almeida c. Via Rail Canada (1990) - Décision no 819 du CCRT.

[7] Le sous‑alinéa 147a)(iii) se lit comme suit :

« 147....Il est interdit ŕ l’employeur :

a)...de congédier, suspendre, mettre ŕ pied ou rétrograder un employé ou de lui imposer une sanction financičre ou autre ou de refuser de lui verser la rémunération afférente ŕ la période au cours de laquelle il aurait travaillé s’il ne s’était pas prévalu des droits prévus par la présente partie, ou de pendre  C ou menacer de prendre C des mesures disciplinaires contre lui parce que : [...]

(iii) soit il a observé les dispositions de la présente partie ou cherché ŕ les faire appliquer; [...] »

[8] L’alinéa 126.1h) se lit comme suit :

« L’employé au travail est tenu : […]

h) de signaler, de la maničre réglementaire, tout accident ou autre fait ayant causé, dans le cadre de son travail, une blessure ŕ lui‑męme ou ŕ une autre personne; [...] »

[9] L’article 15.3 se lit comme suit :

« 15.3 L’employé qui prend conscience d’un accident ou de toute autre situation survenant dans le cadre de son travail qui est la cause ou est susceptible d’ętre la cause d’une blessure ŕ lui‑męme ou ŕ une autre personne doit sans délai en faire rapport ŕ l’employeur, oralement ou par écrit. »

[10] L’alinéa 125c) se lit comme suit :

125....Dans le cadre de l’obligation générale définie ŕ l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entičre autorité : […]

c)...de la maničre réglementaire, d’enquęter sur tous les accidents, toutes les maladies professionnelles et autres situations comportant des risques dont il a connaissance, de les enregistrer et de les signaler aux autorités désignées par les rčglements; […] »

[11] Le paragraphe 15.4(1) se lit comme suit :

« 15.4(1) L’employeur qui prend conscience d’un accident, d’une maladie professionnelle ou d’une autre situation comportant des risques qui touche un employé au travail doit sans délai :

a)     nommer une personne qualifiée pour faire enquęte sur la situation;

b)     aviser le comité de sécurité et de santé ou le représentant en matičre de sécurité et de santé, si l’un ou l’autre existe, de la situation et du nom de la personne nommée pour faire enquęte;

c)     prendre les mesures nécessaires pour empęcher que la situation ne se reproduise. »

[12] L’alinéa 125f) se lit comme  suit :

« 125....Dans le cadre de l’obligation générale définie ŕ l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entičre autorité : [...]

f)...de fournir les installations de premiers soins et les services de santé réglementaires; [...] »

[13] Le paragraphe 16.2(1) se lit comme suit :

« 16.2(1) L’employeur doit établir par écrit la marche ŕ suivre pour donner promptement les premiers soins ŕ un employé dans le cas d’une blessure, d’une maladie professionnelle ou d’un malaise. »

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