Archivée - Decision: 97-019 CODE CANADIEN DU TRAVAIL

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PARTIE II

SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

Révision, en vertu de l'article 146 de la partie II du Code canadien du travail

d'une instruction donnée par un agent de sécurité

Décision no:               97-019

Demandeur :              Terminaux Portuaires du Québec Inc.

                                    Représenté par : M. Jean Gaudreau, M. Denis Caron et M. Normand Giroux

Intimé :                       Syndicat international des débardeurs

                                    Local 2033

                                    Représenté par : M. Ange-Marie Lévesque

Mise en cause :          Daniel Michaud

                                    Agent de sécurité

                                    Transports Canada

Devant :                      Serge Cadieux

                                    Agent régional de sécurité

                                    Développement des ressources humaines Canada

Cette affaire a été entendue par voie de mémoires et, de l'accord des parties, a été complétée par une conférence téléphonique. Étant convaincu que les demandes de révision étaient opportunes dans les deux cas, j'ai avisé les parties de mon intention d'entendre les arguments concernant les deux instructions (ANNEXES A et B).

Historique

Une enquête a été amorcée par suite de la plainte d'un débardeur concernant l'état lamentable des grues à bord du navire « Kappara » au port Gros-Cacouna et le fait que l'employeur avait l'intention de procéder au chargement du navire malgré cette situation.   Les opérations de chargement du navire ont débuté en fin de journée le 17 juillet 1997.  Selon le rapport de l'agent de sécurité : « Les employés sur les quais et sur le navire étaient installés pour effectuer lesdites opérations à notre arrivée.  M. André Ouellet, le surintendant en devoir, était à bord du navire donnant des instructions à ses employés pour effectuer le travail. »  L'agent de sécurité aurait à ce moment­là interdit aux employés et au surintendant d'utiliser les grues à bord du navire jusqu'à ce que son inspection soit terminée.  Selon M.  Michaud, « il était plus qu'évident, dans ce cas-ci, que les grues étaient en piteux état ». 

Par suite de l'inspection des diverses grues à bord du navire et de la vérification des documents devant se trouver à bord, l'agent de sécurité a informé M. André Ouellet que les grues n'étaient toujours pas sécuritaires et qu'il ne pourrait pas les utiliser pour décharger le navire.  Selon l'agent de sécurité, « N'eût été de notre intervention, la compagnie aurait effectué lesdites opérations malgré l'apparence plus qu'évidente de l'état de détérioration avancée des grues et cela malgré la connaissance de ce fait par les gens sur place. »

L'agent de sécurité a rendu une ordonnance « S.I.7 » en vertu de la Loi sur la marine marchande visant le Capitaine, les propriétaires et les agents de navire et leur interdisant l'utilisation de l'outillage de chargement.  L'ordonnance décrivait en détail treize infractions qui contribuaient à rendre l'utilisation de grues non sécuritaires.   De plus, l'agent de sécurité a donné deux instructions à l'employeur.  La première instruction (ANNEXE A), donnée en vertu du paragraphe 145(1) de la partie II du Code canadien du travail (ci-après le Code) décrit deux contraventions au Code.  La deuxième instruction (ANNEXE B) décrit une situation que l'agent de sécurité considérait dangereuse pour les débardeurs. 

Arguments de l'employeur

M.  Giroux a soumis par écrit les motifs de contestation des deux instructions. En ce qui concerne l'instruction donnée en vertu du paragraphe 145(1) du Code :

« Tel qu'il appert de l'instruction écrite, celle-ci est basée sur le fait que Monsieur Michaud est d'avis que TPQ aurait contrevenu à deux dispositions de la partie II du Code canadien du travail soit:

1)     "alinéa 124 de la partie II du Code canadien du travail, que l'employeur ne veille pas à la protection en matière de sécurité et de santé du travail en n'instruisant pas ses employés à effectuer des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent de conformité des appareils de levage."

2)     "alinéa 125(t) de la partie II du Code canadien du travail, que l'employeur ne veille pas à ce que l'équipement - machines, appareils et outils - utilisé par ses employés pour leur travail de chargement, déchargement ou de manutention de marchandises installées sur les navires soit conforme aux normes réglementaires."

TPQ demande que cette instruction soit révisée et qu'elle soit annulée aux motifs suivants, à savoir:

1)     La première contravention que Monsieur Michaud prétend avoir constatée est basée sur des faits erronés et non vérifiés.

TPQ instruit ses employés de procéder à des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent des appareils de levage des navires.  Plus particulièrement, cela a été fait dans le cas du M.V. "Kappara", le tout tel que décrit dans une lettre que Monsieur Jean-Louis Perez transmettait à Monsieur Daniel Michaud le 8 août 1997.

2)     La deuxième contravention que Monsieur Michaud prétend avoir constatée est basée sur des faits erronés et non vérifiés et l'obligation à laquelle Monsieur Michaud réfère, n'est pas ici opposable à TPQ.

Tel que mentionné précédemment, TPQ instruit ses employés de procéder à des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent des appareils de levage des navires mais TPQ n'a pas à vérifier à ce qu'ils soient conformes aux normes réglementaires puisqu'il ne s'agit pas d'un lieu placé entièrement sous son autorité.

En effet, le navire est sous l'entière autorité du Capitaine et c'est à lui ainsi qu'à Transports Canada de veiller à ce que ces appareils de levage soient conformes aux normes réglementaires.  TPQ ne peut pas procéder à de telles vérifications, et a ni l'autorité ni les compétences pour le faire.

D'ailleurs, dans ce cas-ci, Monsieur Michaud lui-même a émis des ordonnances au Capitaine pour s'assurer que les appareils de levage soient conformes aux normes réglementaires en vertu des pouvoirs qui lui sont attribués. »

En ce qui concerne la deuxième instruction à l'employeur donnée en vertu de l'alinéa 145(2)(a) du Code, M.  Giroux expose les arguments suivants :

« Cette deuxième instruction est basée sur le fait que l'Agent Michaud estime que:

"Il est dangereux pour tout employé, d'utiliser les grues du navire Maltais (SIC) "Kappara" que l'employeur met à leur disposition pour charger la marchandise à bord dudit navire, parce que lesdites grues ne sont pas conformes aux normes réglementaires applicables et par le fait même ne fournissent pas une protection aux employés en matière de sécurité et de santé au travail."

TPQ demande que cette instruction soit révisée et qu'elle soit annulée aux motifs suivants, à savoir:

1)     La constatation que Monsieur Michaud prétend avoir faite est incorrecte, non vérifiée et erronée puisque les employés de TPQ n'ont pas travaillé sur le navire et que par la suite Monsieur Michaud a émis des instructions.

2)     Cette même instruction, en prenant pour acquis que la constatation de Monsieur Michaud est exacte, ce qui est par ailleurs nié, est abusive et illégale puisqu'elle vise aussi à ce que TPQ vérifie que les grues du navire soient conformes aux normes réglementaires applicables.  TPQ n'est investi d'aucun pouvoir à cet effet et ne peut pas faire de telles vérifications.  Il s'agit du rôle de Transports Canada et de ses agents.

Nous vous demandons de proroger le délai de quatorze (14) jours pour demander la révision des instructions de l'Agent de sécurité et de procéder rapidement à votre enquête. »

M.  Gaudreau a précisé lors de la conférence téléphonique que, sauf la question du délai, il ne tenait pas à débattre des faits précis de cette affaire.  Il veut plutôt savoir, en ce qui concerne la première instruction, à quelle norme réglementaire se reporte l'agent de sécurité.  S'il s'agit d'une norme en vertu du Règlement sur l'outillage de chargement qui découle de la Loi sur la marine marchande, alors il s'opposera. 

M.  Caron soutient qu'en ce qui concerne la contravention à l'article 124 du Code mentionnée dans l'instruction donnée en vertu du paragraphe 145(1) du Code, il peut démontrer, documents à l'appui, que les employés ont effectivement reçu la formation ayant trait à l'utilisation et à la vérification de l'outillage de chargement.  Dans la lettre qu'il m'a fait parvenir par suite de ma demande concernant ces documents, M.  Caron écrit :

« En ce qui regarde la formulation de la description du danger dans l'instruction émise en vertu de l'article (sic) 145. (2) dont voici le contenu:

Il est dangereux pour tout employé, d'utiliser les grues du navire Maltais  "Kappara" que l'employeur met à leur disposition pour charger la marchandise à bord dudit navire, parce que lesdites grues ne sont pas conformes aux normes réglementaires applicables et par le fait même ne fournissent pas une protection aux employés en matière de sécurité et de santé au travail.

nous considérons que la description du danger est imprécise, mais nous accepterions cette description si la partie ombragée dans ce texte était rayée.  Nous comprenons très bien que sous la partie II du C.C.T., il n'y a aucune normes réglementaires (sic) applicables en ce qui regarde l'outillage de chargement et de déchargement des navires. »

Argumentation au nom des employés

M.  Lévesque n'a pas soumis d'arguments écrits mais a participé à la conférence téléphonique.  Il a précisé qu'on ne lui a jamais demandé personnellement de participer à l'enquête ni d'aller à bord du navire, ce que l'agent de sécurité a confirmé pendant la conversation téléphonique.  De plus, M. Lévesque a expliqué que, contrairement à ce qu'a laissé entendre l'agent de sécurité, lorsqu'un navire doit être déchargé, chaque opérateur d'équipement fait une vérification visuelle et mécanique de l'outillage de chargement.  Toutefois, l'agent de sécurité est d'avis qu'il y avait beaucoup d'ambiguïté de la part des employés quant à la façon de faire ces vérifications.

Décision

Délai concernant la demande de révision

La première question résolue lors de la conférence téléphonique a été la question du délai prévu par le paragraphe 146(1) du Code pour demander la révision de l'instruction donnée en vertu du paragraphe 145(1).  L'agent de sécurité a indiqué que l'instruction a été donnée verbalement à l'employeur lors de l'inspection du navire le 17 juillet 1997.  L'instruction écrite est toutefois datée du 25 juillet 1997.

L'agent de sécurité affirme que l'instruction a été donnée verbalement à M.  André Ouellet, alors représentant de l'employeur, à savoir « que l'employeur devait établir des procédures claires pour effectuer des vérifications des équipements fournis par les navires ».  Toutefois, l'instruction écrite diffère sensiblement de ce qui est mentionné ci-dessus puisqu'elle ne parle pas « d'établir » des procédures claires, mais fait plutôt allusion à la formation des employés et à l'application de normes réglementaires, dans les termes suivants :

1)     « Alinéa 124 de la partie II du Code Canadien du Travail, que l'employeur ne veille pas à la protection en matière de sécurité et santé du travail en n'instruisant pas ses employés à effectuer des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent de conformité des appareils de levage.

2)     Alinéa 125(t) de la partie II du Code Canadien du Travail, que l'employeur ne veille pas à ce que l'équipement, machines, appareils et outils utilisés par ses employés pour leur travail de chargement, déchargement ou de manutention de marchandises installées sur les navires soient conformes aux normes réglementaires. »

Les faits relatés par l'agent de sécurité concernant le délai pour déposer une demande à l'agent régional de sécurité sont vivement contestés par l'employeur.  L'employeur affirme de plus que ce n'est pas une instruction qu'il a reçue le 17 juillet, mais un avertissement verbal concernant le danger que représentait l'utilisation des grues, ce qui s'est d'ailleurs traduit par une instruction donnée en vertu de l'alinéa 145(2)(a) du Code.  Selon M.  Gaudreau, l'agent de sécurité confond les deux instructions ce qui serait, selon lui, confirmé par les représentants de l'employeur à Cacouna. 

Dans l'affaire Brink's c. Jean Patry et al, décision non rapportée no. 93-004, l'employeur affirmait que l'instruction qu'il avait reçue par le courrier était la même que celle qui lui avait été donnée verbalement au lieu de travail trois mois plus tôt.  Après analyse des faits, j'ai conclu que je ne pouvais être saisi de cette affaire, le délai de quatorze jours prévu par le paragraphe 146(1) du Code étant expiré et ne pouvant pas être modifié par l'agent régional de sécurité. 

Dans ce cas-ci, l'employeur affirme le contraire de ce qui s'est produit dans l'affaire Brink's supra, à savoir que l'instruction donnée verbalement et celle reçue par le courrier sont distinctes et fort différentes.  Il n'y a pas d'opposition à cette allégation de la part de M.  Lévesque.  De plus, il y a de la confusion dans les faits relatés par l'agent de sécurité, puisque l'instruction écrite n'est pas une reproduction exacte de ce qu'il allègue avoir dit verbalement.

À mon avis, l'employeur ne peut subir de préjudice dans cette affaire.  On ne peut le priver de son droit d'appeler d'une instruction du fait qu'il y a mésentente concernant la date de l'instruction, sa substance ou le type d'instruction.  Or, je suis d'avis qu'il existe des distinctions réelles entre l'instruction verbale, que je crois réelle, et l'instruction écrite.  De plus, le paragraphe 146(1) du Code précise :

146. (1) Tout employeur, employé ou syndicat qui se sent lésé par des instructions données par l'agent de sécurité en vertu de la présente partie peut, dans les quatorze jours qui suivent, en demander la révision par un agent régional de sécurité dans le ressort duquel se trouve le lieu, la machine ou la chose en cause.

L'instruction écrite distincte de l'instruction verbale a été mise à la poste le 25 juillet 1997 et a été reçue aux bureaux de l'employeur le 7 août 1997.  Ce n'est qu'à ce moment­là que l'employeur a été lésé par les instructions écrites.  La demande de révision ayant été formulée le 20 août et reçue au bureau de l'agent régional de sécurité le 21 août 1997, je ferai droit à la demande de révision de l'employeur en recevant la demande.  La demande de révision de l'instruction écrite donnée le 25 juillet 1997 par l'agent de sécurité Daniel Michaud en vertu du paragraphe 145(1) du Code est ACCUEILLIE.

Les instructions

1.   Instruction donnée en vertu du paragraphe 145(1)

Première contravention

Selon le libellé de cette instruction, l'employeur serait en contravention de l'article 124 du Code « en n'instruisant pas ses employés à effectuer des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent de conformité des appareils de levage ».

L'article 124 du Code stipule ce qui suit :

124. L'employeur veille à la protection de ses employés en matière de sécurité et de santé au travail.

Cet article prévoit l'obligation générale qu'a l'employeur de veiller à la sécurité et à la santé de ses employés au travail.  Les obligations particulières de l'employeur sont prévues à l'article 125.  En l'absence d'une obligation particulière, ce qui est le cas en l'espèce, l'employeur a la responsabilité générale de prendre les mesures nécessaires pour protéger la sécurité et la santé de ses employés au travail.  Or, il n'a pas été démontré à ma satisfaction que l'employeur ne se serait pas conformé à cette obligation.

En effet, M.  Gaudreau affirme que la politique de l'employeur en matière de sécurité et de santé est omniprésente et bien connue de tous les employés de Terminaux Portuaires du Québec Inc.  Personnellement, j'en doute.  Toutefois, les documents soumis appuient l'affirmation selon laquelle les employés en question ont effectivement reçu la formation sur l'outillage de chargement.  M.  Lévesque semble appuyer les dires de l'employeur et confirme que les employés ont la formation requise pour faire leur travail en toute sécurité.  L'agent de sécurité aurait omis de vérifier les dossiers de l'employeur concernant cet aspect important de l'instruction.  De plus, je dois accorder du poids à l'affirmation selon laquelle le superviseur sur les lieux de travail vérifiait l'état des grues avant de permettre aux employés d'y travailler.  À mon avis, la prépondérance de la preuve fait osciller la balance en faveur de l'employeur pour l'instant.  Pour toutes ces raisons, les instructions émises ne sont pas justifiées dans les circonstances et devront être annulées.

Deuxième contravention 

Selon le libellé de cette instruction, l'employeur serait en contravention de l'alinéa 125(t) du Code parce qu'il « ne veille pas à ce que l'équipement, machines, appareils et outils utilisés par ses employés pour leur travail de chargement, déchargement ou de manutention de marchandises installées sur les navires soient conformes aux normes réglementaires ». 

L'alinéa 125(t) prévoit ce qui suit :

125. Dans le cadre de l'obligation générale définie à l'article 124, l'employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité :

   t) de veiller à ce que l'équipement  - machines, appareils et outils - utilisé par ses employés pour leur travail soit conforme aux normes réglementaires de sécurité et sécuritaire dans tous les usages auxquels il est destiné.

L'agent de sécurité a voulu régler une situation visiblement non sécuritaire pour les employés en utilisant une instruction qui, malheureusement, ne s'applique pas en l'espèce.  En effet, l'article 125 du Code n'a d'application qu'à « tout lieu de travail placé sous son (l'employeur) entière autorité ».  Or le navire « Kappara » est un navire étranger qui n'est certainement pas sous l'entière autorité de Terminaux Portuaires du Québec Inc. Par conséquent, l'article 125 du Code n'a pas d'application en l'espèce et l'instruction n'est pas justifiée dans les circonstances et devra être annulée. 

Pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, J'ANNULE l'instruction donnée le 25 juillet 1997 par l'agent de sécurité Daniel Michaud en vertu du paragraphe 145(1) du Code à Terminaux Portuaires du Québec Inc.

2.   Instruction donnée en vertu de l'alinéa 145(2)(a)

Selon le libellé de cette instruction, la sécurité et la santé des employés de Terminaux Portuaires du Québec Inc. seraient mises à risque du fait qu'« il est dangereux pour tout employé, d'utiliser les grues du navire Maltais "Kappara" que l'employeur met à leur disposition pour charger la marchandise à bord dudit navire, parce que lesdites grues ne sont pas conformes aux normes réglementaires applicables et par le fait même ne fournissent pas une protection aux employés en matière de sécurité et de santé au travail ».

L'employeur ne conteste pas que les grues étaient dans un état lamentable, une situation plus qu'évidente de l'avis de l'agent de sécurité. Il semble que tout le monde soit d'accord sur ce point. D'ailleurs l'ordonnance « S.I.7 » décrit l'état des grues de façon très éloquente.   Il est vrai que les normes réglementaires, c'est­à­dire les normes établies par le Règlement sur l'hygiène et la sécurité à bord des navires, ne s'appliquent pas en l'espèce puisque, de toute façon, ce règlement n'a pas d'application à bord de navires étrangers.  Toutefois, il est important de comprendre que lorsqu'un agent de sécurité utilise les pouvoirs qui lui sont conférés en vertu du paragraphe 145(2) du Code, un pouvoir exceptionnel à mon avis, il peut s'appuyer sur toute norme applicable même si celle-ci n'est pas mentionnée spécifiquement dans le Règlement sur l'hygiène et la sécurité à bord des navires.  En fait, en vertu de ce pouvoir extraordinaire, l'agent de sécurité n'est limité à aucune norme.

Toutefois, pour les fins de l'instruction, il n'est pas nécessaire dans ce cas-ci de se reporter à une norme, parce que le danger existe peu importe qu'il y ait une norme ou non. Je m'abstiendrai de décrire le danger sous tous ses aspects, car il suffit de se reporter à l'ordonnance pour comprendre la gravité de la situation. 

J'éliminerai donc l'instruction tout ce qui y est superflu.  Pour toutes ces raisons, JE MODIFIE l'instruction donnée le 25 juillet 1997 en vertu de l'alinéa 145(2)(a) du Code par l'agent de sécurité Daniel Michaud à Terminaux Portuaires du Québec Inc., en retranchant de la description du danger, au troisième paragraphe, les mots suivants « que l'employeur met à leur disposition pour charger la marchandise à bord dudit navire, parce que lesdites grues ne sont pas conformes aux normes réglementaires applicables et par le fait même ne fournissent pas une protection aux employés en matière de sécurité et de santé au travail », et en faisant précéder cette description d'une référence aux articles 3 à 12 de l'ordonnance O.N.4147.  Pour plus de certitude, le danger sera décrit de la façon suivante, une fois que l'on aura apporté les corrections grammaticales qui s'appliquent :

« Eu égard aux articles 3 à 12 de l'ordonnance O.N.4147 datée du 17 juillet 1997, il est dangereux pour tout employé d'utiliser les grues du navire maltais « Kappara ». »

Décision rendue le 17 février 1998.

Serge Cadieux

Agent régional de sécurité


ANNEXE A

DANS L'AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L'EMLOYEUR EN VERTU DE L'ALINÉA 145(1)

Le 17 juillet 1997, l'agent de sécurité soussigné a procédé à une inspection dans le lieu de travail exploité par Terminaux Portuaires du Québec Inc., employeur assujetti à la partie II du Code Canadien du Travail et sis au lieu étant parfois connu sous le nom du port de Gros-Cacouna.

Le dit agent de sécurité est d'avis que les dispositions suivantes de la partie II du Code Canadien du Travail sont enfreintes:

1)     Alinéa 124 de la partie II du Code Canadien du Travail, que l'employeur ne veille pas à la protection en matière de sécurité et santé du travail en n'instruisant pas ses employés à effectuer des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent de conformité des appareils de levage.

2)     Alinéa 125(t) de la partie II du Code Canadien du travail, que l'employeur ne veille pas à ce que l'équipement, machines, appareils et outils utilisés par ses employés pour leur travail de chargement, déchargement ou de manutention de marchandises installées sur les navires soient conformes aux normes réglementaires.

Par conséquent, il vous EST ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu du paragraphe 145(1) de la partie II du Code Canadien du Travail, de cesser toutes contraventions au plus tard le 08 août 1997.

Fait à Rimouski, ce 25ième jour de juillet 1997.

Daniel Michaud

Agent de sécurité

no.3022

À:         Terminaux Portuaires du Québec inc.

            C.P. 71

            Cacouna, Québec

            G0L 1G0
                                                                                                                       

ANNEXE B

DANS L'AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL

PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L'EMLOYEUR EN VERTU DE L'ALINÉA 145(2)(A)

Le 17 juillet 1997, l'agent de sécurité soussigné a procédé à une inspection dans le lieu de travail exploité par Terminaux Portuaires du Québec Inc., employeur assujetti à la partie II du Code Canadien du Travail et sis au port de Gros-Cacouna, ledit lieu étant parfois connu sous le nom de navire "Kappara".

Ledit agent de sécurité estime que l'utilisation d'une machine constitue un danger pour un employé au travail, à savoir:

Il est dangereux pour tout employé, d'utiliser les grues du navire Maltais "Kappara" que l'employeur met à leur disposition pour charger la marchandise à bord dudit navire, parce que les dites grues ne sont pas conformes aux normes règlementaires applicables et par le fait même ne fournissent pas une protection aux employés en matière de sécurité et de santé au travail.

Par conséquent, il vous EST ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l'alinéa 145(2)(a) de la partie II du Code Canadien du Travail de procéder immédiatement à la prise de mesures propres à parer au danger.

Fait à Rimouski, ce 25ième jour de juillet 1997.

Daniel Michaud

Agent de sécurité

no.3022

À:         Terminaux Portuaires du Québec inc.

            C.P. 71

            Cacouna, Québec

            G0L 1G0


 

SOMMAIRE DE LA DÉCISION DE L'AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ

Décision no:               97-019

Demandeur :              Terminaux Portuaires du Québec Inc.

Intimé:                        Syndicat international des débardeurs

                                    Local 2033

MOTS-CLÉS:

Grues, S.I.7, navire.

DISPOSITIONS:

Code:   124, 125(t), 145(1), 145(2)(a)

RÉSUMÉ:

Un agent de sécurité donne deux instructions à la compagnie de débardage notée ci-dessus.  La première instruction est donnée en vertu du paragraphe 145(1) du Code pour une première infraction à l'article 124 du Code parce que l'employeur n'aurait pas instruit ses employés à effectuer des vérifications visuelles et mécaniques pour évaluer l'état apparent des grues.  L'agent régional de sécurité a ANNULÉ cette instruction puisque l'employeur a démontré, documents à l'appui, que les débardeurs avaient reçu la formation pour cette responsabilité.  Le représentant syndical était aussi de cet avis et l'agent de sécurité avait omis de vérifier les dossiers de l'employeur en relation avec cette obligation.  La deuxième infraction identifiée dans l'instruction a aussi été ANNULÉE parce que l'agent de sécurité a cité l'employeur pour une contravention à l'alinéa 125(t) du Code alors que l'article 125 du Code ne s'applique que lorsque le lieu de travail des employés est placé sous son entière responsabilité.  Or le navire "Kappara" sur lequel les débardeurs devaient travailler est un navire étranger et donc il n'est pas sous l'entière responsabilité de l'employeur.

La deuxième instruction est donnée pour une situation de danger en vertu de l'alinéa 145(2)(a) du Code.  L'agent régional de sécurité a modifié l'instruction pour y retirer ce qu'il considérait comme une description superflue du danger et y ajouter une référence à une partie de l'ordonnance S.I. 7.  L'agent régional de sécurité, tout comme les parties, reconnaissait qu'il existait un danger à bord du navire mais les parties ne s'entendaient pas sur sa description.  L'agent régional de sécurité a fait référence aux infractions physiques qui ont été identifiées par l'agent de sécurité, aussi un agent de la Garde côtière, dans son ordonnance S.I. 7 donnée en vertu de la Loi sur la marine marchande.  Ce sont ces dernières qui décrivaient l'état lamentable dans lequel se trouvait le navire.

Le pouvoir de l'agent de sécurité de faire une telle référence est autorisée par l'utilisation de l'alinéa 145(2)(a) du Code.

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