Archivée - Decision: 99-010 CODE CANADIEN DU TRAVAIL
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Révision, en vertu de l’article 146 du Code canadien du travail, partie II,
d’une instruction donnée par un agent de sécurité
Décision no: 99-010
Demandeur : Les Terminus Maritimes Fédéraux, division Fednav Ltée
Montréal (Québec)
Représenté par : Me Patrick Benaroche
Intimés: Syndicat des débardeurs, SCFP
Section locale 375
Représenté par : M. Daniel Tremblay
et
Association internationale des débardeurs
Section locale 1657
Représenté par: M. Donald Beerworth
Mise en cause : Alain Messier
Agent de sécurité
Développement des ressources humaines Canada
Devant : Serge Cadieux
Agent régional de sécurité
Développement des ressources humaines Canada
Il fut décidé d’entendre cette affaire par voie de soumissions écrites, les parties au dossier ne pouvant s’entendre sur une date d’audition. Une conférence téléphonique a aussi eue lieu le 10 février 1999 à laquelle participaient toutes les parties au dossier. Le but de la conférence fut d’aviser les parties, et en particulier le demandeur, qu’elles devaient présenter des arguments à l’agent régional de sécurité concernant l’existence, ou l’inexistence selon le cas, de danger tel que défini au Code canadien du travail, Partie II (ci-après le Code) pour chaque instruction émise par l’agent de sécurité. Chaque item d’une instruction constitue en soi une instruction.
Historique
Le 3 décembre 1997, vers 10h30, monsieur Joseph Ronci, vérificateur à l’emploi de la compagnie de débardage Terminus Maritimes Fédéraux (ci-après «TMF») situé au port de Montréal, fut écrasé par un chariot élévateur de 25 tonnes en opération.
L’accident fut aussitôt rapportée à Développement des ressources humaines Canada, Direction du Travail, et une enquête fut ouverte presqu’immédiatement par monsieur Alain Messier, agent de sécurité. Ce dernier fut assisté tout au long de l’enquête d’un autre agent de sécurité, M. Yves Jégou. L’agent de sécurité a soumis un Rapport d’enquête d’accident (ci-après le Rapport) détaillé dans cette affaire.
L’enquête
Lors de son enquête, l’agent de sécurité a interrogé plusieurs témoins de l’accident de même que des personnes y ayant un rapport et a inclut leurs déclarations au dossier. Il a pris des photographies, des mesures pertinentes et a inclut au Rapport des croquis de la scène de l’accident de même que le rapport médico-légal concernant le décès de monsieur Ronci.
Il ressort de l’enquête qu’au moment de l’accident, M. Ronci se dirigeait à pied de la roulotte, servant d’édifice administratif et d’aire de repos située à l’est de la barrière d’entrée, vers le quai et face à la cale no5 du navire à être déchargé, situé à environ 100 mètres au sud de la barrière, où une tâche l’attendait. Pour ce faire, il devait traverser l’aire de manutention. Au même moment, monsieur Richard Laporte, opérateur du chariot élévateur de 25 tonnes no9560, revenait de porter une charge dans le stationnement. Il se dirigeait en marche avant, vers le sud, de la barrière vers le quai, face à la cale no6 du navire. Le chariot était sans charge et ses fourches levées à une hauteur de un mètre.
À un certain moment, monsieur Ronci se trouve devant le chariot élévateur en marche de monsieur Laporte. Ce dernier ne voit pas monsieur Ronci qui est écrasé par les roues avant gauches de son chariot élévateur. Il se situe alors à une distance d’environ 38 mètres au sud de la barrière d’entrée.
Le Rapport nous informe que TMF est une entreprise de débardage opérant au port de Montréal et qu’elle est représentée par L’Association des employeurs maritimes (ci-après L’AEM). On y apprend que AEM a la responsabilité de prendre les mesures disciplinaires à la demande des employeurs mais qu’au “moment de l’accident aucune mesure disciplinaire n’a jamais été prise à l’encontre d’un employé, concernant le non-respect d’une procédure de sécurité.”
L’agent de sécurité rapporte que
“Au moment de l’accident, l’activité impliquée consistait à décharger les cales no5 et no6 d’un navire, le M/V Lake Ontario, situé à l’extrémité ouest du hangar 49 et à placer la marchandise en différents endroits sur le quai.
La marchandise de la cale no6 devait être déposée sur le quai à l’aide d’une grue, puis transportée jusqu’au stationnement à l’aide de chariots élévateurs de 25 tonnes.
La marchandise de la cale no5 était transportée dans la cours(sic) à la section 48.”
Il explique que le stationnement pour les véhicules des visiteurs et des employés, les sections 48 et 49 ainsi que le hangar 49 sont utilisés comme aire d’entreposage et de manutention des matériaux.
L’agent de sécurité et son confrère ont fait certaines constatations sur les lieux de l’accident et y ont aussi recueillis des informations. Ainsi, le 3 décembre 1997, les agents ont constaté qu’en ce qui concerne le chariot élévateur no9560,
· la hauteur des fourches au sol est de un mètre;
· il y a une accumulation de 22 centimètres de neige sur la partie arrière du chariot ce qui obstrue le champ de vision de l’opérateur en marche arrière;
· le tablier des fourches, les cylindres hydrauliques des fourches, les fourches, le mât ainsi que la partie mobile du mât obstruent le champ de vision avant de l’opérateur du chariot; et
· le miroir droit du chariot est brisé et ne peut être utilisé lorsque l’appareil se déplace en marche arrière.
Le lendemain, soit le 4 décembre 1997, les deux agents ont aussi constaté, alors que le même navire est amarré à la section 48 et que les mêmes activités de déchargement s’y déroulent que:
· aucun passage à l’usage exclusif des piétons n’est aménagé;
· aucun signaleur ou feu de signalisation ne règle la circulation;
· le marchepied d’un appareil de manutention est utilisé par un employé pour se déplacer;
· un contremaître nous déclare utiliser le marchepied d’un appareil de manutention pour se déplacer;
· dans le stationnement au nord de la clôture, des marchandises sont manutentionnées à l’aide de chariots élévateurs, alors que la marchandise est entreposée pêle-mêle parmi les véhicules des personnes ayant affaires aux sections 48 et 49 et alors que les opérateurs n’ont pas une vue sans obstacle de l’aire et qu’ils ne sont pas dirigés par un signaleur pendant que les employés et les personnes qui ont accès à l’aire de manutention se dirigent à pied vers leur voiture ou vers le quai;
· les opérateurs des chariots élévateurs de 25 tonnes lorsqu’ils conduisent de l’avant, sans charge, maintiennent les fourches à une hauteur d’environ un mètre, ce qui obstrue la vision;
· des charges qui dépassent la largeur des chariots à fourches sont manutentionnées au-dessus de la tête de personnes au sol dans le stationnement et sur le quai;
· plusieurs des chariots élévateurs ne sont pas munis d’un avertisseur sonore qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière; et
· les contremaîtres, les personnes qui ont accès à l’aire de manutention ainsi que la plupart des employés ne portent pas de gilet de signalisation.
Les deux agents de sécurité ont de plus fait l’interrogation des témoins, à différentes dates, en présence de représentants de l’employeur. Ceci les a amené à conclure que, le 3 décembre 1997,
· aucun passage à l’usage exclusif des piétons n’est aménagé et qu’aucun signaleur ne règle la circulation;
· il n’existe aucune procédure, en application, définissant la façon sécuritaire de se déplacer dans le lieu de travail, pour les personnes à pied ainsi que pour tous les appareils motorisés de manutention;
· il ne se fait aucun contrôle de la circulation par l’employeur;
· chaque employé décide lui-même de la façon de se déplacer sur le quai, qu’il soit à pied ou aux commandes d’un appareil de manutention;
· la seule mesure de prévention en usage concernant le mouvement des piétons consiste pour les piétons à faire attention pour ne pas se faire écraser et pour les opérateurs, à faire attention pour ne pas écraser les piétons;
· les employés n’ont pas de discussion avec leur supérieur concernant les méthodes de travail sécuritaires;
· les opérateurs des appareils de manutention de 25 tonnes et plus ont une vision restreinte, même sans charge, à cause de leur façon de conduire et à cause des dimensions de ces appareils et qu’ils ne sont pas dirigés par un signaleur; et
· il ne se prend pas de mesures correctrices lorsqu’un individu adopte un comportement dangereux.
En se fondant sur les constatations de son enquête et de l’information recueillie suite aux témoignages des témoins, l’agent de sécurité Messier a énoncé et analysé quatre causes possibles de l’accident. Il a retenu trois de ces causes comme étant des causes réelles de l’accident, à savoir:
1. Monsieur Ronci traversait l’aire de manutention pour se rendre à son poste. L’analyse de cette cause démontre qu’aucun passage à l’usage exclusif des piétons n’étant aménagé et aucun signaleur ne réglant la circulation, M. Ronci n’avait d’autre choix que de traverser l’aire de manutention et était ainsi exposé aux appareils de manutention en mouvement.
2. Monsieur Laporte n’a pas vu Monsieur Ronci. L’analyse de cette cause démontre que Monsieur Laporte opérait son chariot en conduite avant, sans charge, alors que ses fourches étaient à une hauteur de un mètre du sol, ce qui ne lui permettait pas d’avoir un champ optimal de vision.
3. On ne veillait pas à la protection des employés en matière de sécurité et de santé au travail. L’analyse de cette cause démontre que plusieurs risques d’écrasement existaient et ont été observés par l’agent de sécurité ou lui ont été rapportés lors des interrogatoires. Il s’ensuit que Monsieur Ronci n’était que l’une parmi plusieurs personnes à être exposé à de tels risques.
Le 4 décembre, l’agent de sécurité émet une première instruction (ANNEXE A) verbale à TMF en vertu de l’alinéa 145(2)(a) du Code canadien du travail, Partie II (ci-après le Code), instruction qu’il a confirmée par écrit le 8 décembre 1997. Cette instruction comporte onze instructions individuelles ou onze items.
Le 9 janvier, alors qu’il fait certains examens sur le chariot élévateur de 25 tonnes no9560, il s’aperçoit que les pneus arrières de ce chariot et d’un autre chariot à proximité ont une usure excessive. Il émet alors une autre instruction (ANNEXE B) verbale à l’employeur en vertu des sous-alinéas 145(2)(a) et (b) du Code qu’il confirme par écrit le 12 janvier 1997.
Finalement, le 17 décembre, alors que l’agent de sécurité revient sur les mêmes lieux ayant fait l’objet de l’instruction du 8 décembre pour vérifier la conformité avec cette dernière instruction, l’agent constate que la seule mesure correctrice prise par l’employeur est celle de l’item 11 de cette instruction. Sur ce, l’agent émet une nouvelle instruction (ANNEXE C) verbale en vertu des sous-alinéas 145(2)(a) et (b) du Code accompagnée d’un avis de danger. Le 18 janvier, l’agent de sécurité confirme par écrit l’instruction verbale donnée la journée précédente. En fin de journée du 18 janvier, il retire l’avis de danger apposé la veille étant satisfait que la majorité des mesures correctrices ont été apportées ou sont en voie d’être implantées.
Toutes ces instructions sont portées en appel à l’agent régional de sécurité. Toutefois, TMF a retiré la demande de révision de l’item 11 de l’instruction du 8 janvier 1997.
MISE AU POINT
Il est important de noter que dans ce dossier, les trois instructions ont été émises en vertu du paragraphe 145(2) du Code pour une situation de danger. La notion de danger telle que prévue au Code n’ayant pas été soulevée par les parties lors de leurs soumissions écrites, je les ai avisé via une conférence téléphonique de me soumettre des arguments à cet effet. Je leur ai fait part de mon intention de rendre une décision dans cette affaire en utilisant les concepts de danger qui ont été établis par les cours et les tribunaux administratifs qui ont eu à se pencher sur la notion de danger tel que prévu au Code et à l’interpréter.
Les arguments qui suivent représentent la position des parties concernant cet aspect des instructions. Les représentations initiales plus détaillées des parties sont au dossier et ne seront pas décrites ci-dessous. Toutefois, je tiendrai compte au besoin de ces représentations dans ma décision.
Arguments pour l’employeur
Me Benaroche s’est penché sur la juridiction de l’agent régional de sécurité et sur la notion de “danger” telle que prévue par le Code.
Selon Me Benaroche, les pouvoirs conférés à l’agent régional de sécurité en vertu de l’article 146 du Code ne lui permettent pas d’élaborer une notion de danger qui va au-delà de celle identifiée par l’agent de sécurité ni de substituer son appréciation d’un danger qui pouvait exister le jour de la visite de l’agent de sécurité, par une appréciation que ce dernier n’a pas lui-même faite. Il souligne à cet effet que l’agent de sécurité doit déterminer, après enquête, s’il existe un danger. Il ajoute que la Cour Fédérale du Canada a déjà conclu qu’il n’était pas suffisant pour l’agent de sécurité de présumer de l’existence d’un danger afin d’intervenir mais qu’il fallait recueillir une preuve à cet égard (voir Mario Lavoie F.C.J. no. 1285). Me Benaroche remarque que l’agent de sécurité a observé ce qu’il considérait être des risques d’écrasement et a conclu de façon globale à un danger “sans établir ou dénoncer la cristallisation du danger.”
Me Benaroche fait une revue sommaire de la jurisprudence concernant la notion de danger en vertu du Code. Il précise que le Parlement n’a pas eu l’intention d’utiliser le mot “danger” dans son sens le plus général. Le danger prévu au Code doit être réel et immédiat. Il ne peut s’agir d’un danger inhérent au travail ou qui en constitue une condition normale d’emploi. La possibilité de blessure ou de danger ne constitue pas en soi un motif suffisant pour déclarer une situation “dangereuse” au sens du Code.
Me Benaroche s’est attardé à expliquer la nature “dangereuse” du travail d’un débardeur. À la suite d’un accident mortel comme celui qui a coûté la vie à M. Ronci, il est normal qu’une enquête soit effectuée. Toutefois, “tout accident n’est pas et ne doit pas nécessairement être une équation systématique qu’il y a danger au sens du Code. Il faut dans chaque cas, évalué (sic) le contexte et les circonstances particulières de l’accident.” L’agent de sécurité se serait donc trompé en présumant d’un danger parce que sa décision n’est pas fondée sur un motif raisonnable. Il n’a tenu compte d’aucun élément objectif pour conclure au danger.
L’agent de sécurité a eu maintes occasions dans le passé de visiter le même lieu de travail et d’observer son fonctionnement. Si l’agent de sécurité n’a pas jugé bon d’intervenir dans le passé alors que les mêmes opérations étaient en cours, comment peut-il émettre des instructions pour danger comme celles qu’il a émises si on tient compte que le danger doit être réel et immédiat? En ce qui a trait au droit des employés de refuser d’exécuter un travail dangereux, Me Benaroche se demande pourquoi les employés n’ont pas exercé ce droit “en ce qui a trait aux instructions contestées?”
Finalement, Me Benaroche termine en soulignant que:
Sous réserve de ce qui précède, considérant même qu’il ait pu y avoir non observation rigoureuse de toutes et chacune des procédures par l’employeur ou les employés le jour de la visite de l’agent de sécurité, cela ne rend pas pour autant le lieu de travail dangereux au sens du Code.
Soumissions pour les employés
M. Raymond Leclerc, représentant syndical agissant pour les intimés, répond aux propos de
Me Benaroche en formulant le commentaire qui suit:
Tout comme l’a fait remarquer Me Benaroche relativement à votre correspondance du 22 février, votre référence au paragraphe 145(2)(a) du Code, bien qu’à propos, ne lie aucunement les parties aux présentes ou l’agent régional dans le détermination du droit. En ce sens nous partageons l’avis du demandeur que certaines instructions émises l’ont été dans le cadre de l’application de l’article 145(1) du Code. Cette seule constatation, n’invalide pas l’instruction émise en cette circonstance, mais elle relève l’agent de sécurité et les parties aux présentes de discuter de la notion de danger. La seule preuve de dérogation à la Partie II du Code permet l’intervention de l’agent de sécurité, et ce sans contrainte.
M. Leclerc souligne que “la jurisprudence définissant la notion de danger s’inscrit dans le cadre où un travailleur exerce son droit de refuser de travailler.” Ainsi, le Conseil canadien des relations de travail (CCRT) a établi qu’en matière de refus de travail, le danger doit être réel et immédiat et qu’il doit être basé sur des critères objectifs. Il explique que le droit de refuser de travailler est effectivement une mesure d’urgence destinée à faire face à des situations dangereuses qui peuvent survenir subitement.
M. Leclerc s’est aussi attardé à expliquer la notion de danger inhérent. Il reconnaît que même si un travail comporte un danger inhérent, cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas faire l’objet de mesures préventives. L’agent de sécurité a le pouvoir d’émettre des instructions en vertu du paragraphe 145(1) du Code même s’il est déterminé qu’aucun danger existe, un principe qui a été reconnu par la Cour fédérale d’appel dans la cause Bonfa. Selon M. Leclerc, il n’y aurait pratiquement pas de distinction entre le pouvoir de l’agent de sécurité lors d’une enquête sur un refus de travail et son pouvoir lors d’une inspection. De plus, dans un contexte où un danger inhérent existe, le seule constatation de contravention à la loi à elle seule est suffisante pour qu’il intervienne.
Motifs de la décision
La question à résoudre ici est la suivante: Est-ce que les situations décrites par l’agent de sécurité aux instructions en ANNEXES (A, B et C) constituent des “dangers” au sens du Code? Subsidiairement , et dans l’éventualité où l’agent régional de sécurité décide qu’il y a absence de “danger” au sens du Code, quelle est la compétence de ce dernier pour modifier une instruction émise en vertu du paragraphe 145(2) du Code pour danger, en une instruction émise en vertu du paragraphe 145(1) du Code pour une contravention?
I - Notions de Danger
Pour résoudre la première question, il faut déterminer les principes qui s’appliquent au “danger” prévu en vertu du Code. Les parties à ce dossier sont d’accord avec l’abondante jurisprudence qui a établi les principes devant s’appliquer dans les cas de refus de travail.
Le danger devra être immédiat et réel (Montani vs. Compagnie des chemins de fer nationaux, C.C.R.T. décision no 1089). Il devra être présent au moment de l’enquête de l’agent de sécurité (Bonfa c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration, Dossier no. A-138-89). Sa réalisation devra être plus qu’hypothétique. De plus, et tel que souligné par Me Benaroche, l’agent de sécurité devra déterminer, après enquête, qu’un danger au sens du Code existe. L’agent de sécurité ne peut présumer de l’existence d’un danger afin d’intervenir mais il doit recueillir une preuve à cet égard (Mario Lavoie 1998 F.C.J. no. 1285) et sa décision devra être basée sur des critères objectifs (Coulombe vs. Empire Stevedoring Company Ltd., C.C.R.T. décision no747). Le danger devra en être un qui est visé par le Code. Par conséquent, un danger inhérent au travail de l’employé ou qui en constitue une condition normale d’emploi ne peut servir de motif au droit de refus (Montani, supra).
On se rappellera de la décision notoire no 686 rendue le 26 avril 1988 par le vice-président du Conseil canadien des relations de travail, Hugh R. Jamieson, dans laquelle il écrivait:
Le Code définit le danger comme suit:
«danger» Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié.»
Si l’on se souvient que la Partie IV du Code utilisait l’expression «danger imminent» avant l’adoption de la définition actuelle de danger en 1984, il est évident – d’après les mots soigneusement choisis de la définition – que le législateur a voulu préserver dans la notion de danger le caractère immédiat de celui-ci. C’est dans cette acception du terme qu’il faut comprendre le droit de refuser de travailler qu’accordent à l’employé les articles 85 et 86, ainsi que les pouvoirs conférés par le paragraphe 102(2) à un agent de sécurité de donner des instructions dans des situations dangereuses.
À la suite de cette décision, les tribunaux administratifs et la Cour fédérale, Sections de Première Instance et d’Appel, ont abondé dans le même sens que la décision ci-dessus. Ils ont établi des principes similaires au danger imminent, à savoir que le danger doit être immédiat, réel, présent au moment de l’enquête de l’agent de sécurité, plus qu’hypothétique, basée sur des critères objectifs etc.. M. Leclerc voudrait limiter l’application de ces principes à l’exercice du droit de refuser de travailler. Je ne suis par d’accord. La décision rendue par le CCRT à ce moment expliquait que cette notion de danger immédiat s’appliquait non seulement au droit de refus mais que
C’est dans cette acception du terme qu’il faut comprendre le droit de refuser de travailler qu’accordent à l’employé les articles 85 et 86, ainsi que les pouvoirs conférés par le paragraphe 102(2) à un agent de sécurité de donner des instructions dans des situations dangereuses. (mon soulignement)
Il faut se rappeler qu’avant 1984, la notion de danger n’était pas définie au Code. Plutôt, il y existait l’expression «danger imminent» qui était utilisée à ce moment aux articles s’appliquant au droit de refuser de travailler et au pouvoir de l’agent de sécurité d’émettre des instructions pour danger. À ce moment, la disposition prévoyant le pouvoir de l’agent de sécurité d’émettre une instruction pour danger se lisait comme suit:
94.(1) L’agent de sécurité, qui estime qu’un endroit, une substance ou une chose, ou une ou plusieurs parties de ceux-ci, dans une entreprise fédérale, constitue un danger imminent pour la sécurité ou la santé de personnes employés dans le cadre de cette entreprise et que l’utilisation de ce lieu ou de cette substance ou chose est de ce fait contraire à la présente partie ou aux règlements, …
Par conséquent, la définition ci-dessus qui a servie à remplacer l’expression «danger imminent», et tous les principes établis par la jurisprudence citée ci-dessus, s’applique également au pouvoir de l’agent de sécurité d’émettre une instruction pour danger.
Une conséquence directe de cette conclusion est que lorsque l’agent de sécurité enquête suite à un accident, il ne peut conclure que la cause de l’accident constitue au moment de son enquête un danger au sens du Code et émettre une instruction pour danger. Le danger “immédiat” existait au moment précédant l’accident et, à moins de posséder une information objective ou des éléments de preuve à l’effet que la même situation est sur le point de se concrétiser au moment de son enquête, il ne peut conclure à la présence de danger au sens du Code. Tout au plus peut-il conclure à une infraction à la loi ou à un danger au sens général du terme. Il en va de même lorsque l’agent de sécurité inspecte un lieu de travail. Le fait d’observer des situations susceptibles de causer éventuellement des blessures ou des maladies ne constituent pas, en soi, des “dangers” au sens du Code.
Dans le cas d’un danger au sens général du terme, le risque de blessure ou de maladie demeure possible, donc hypothétique, et sa réalisation peut se faire à plus ou moins long terme. À ce moment, l’agent de sécurité ne possède ou n’a recueilli aucun fait précis pendant son enquête ou aucun élément de preuve confirmant la réalisation immédiate de la blessure ou de la maladie à une personne exposée au risque ou à la situation. En somme, ce qui distingue un “danger au sens du Code” du “danger au sens général” est son caractère immédiat.
II - Pouvoirs de l’agent régional de sécurité
Monsieur Tremblay a reconnu, au même titre que le demandeur, que certaines instructions émises l’ont été dans le cadre de l’application du paragraphe 145(1) du Code. La divergence d’opinion vient du fait que M. Tremblay est d’avis que cela n’invalide pas l’instruction émise alors que je suis d’avis contraire.
Lorsque, suite à la révision, le “danger” constaté par l’agent de sécurité s’avère être une infraction au Code ou au Règlement ou simplement un danger au sens général du terme, je n’aurai d’autre choix que d’annuler l’instruction en question puisque l’article 146 du Code n’autorise pas l’agent régional de sécurité d’émettre une nouvelle instruction. En effet, le paragraphe 146(3) du Code prévoit ce qui suit:
146 (3) L’agent régional de sécurité mène une enquête sommaire sur les circonstances ayant donné lieu aux instructions et sur la justification de celles-ci. Il peut les modifier, annuler ou confirmer et avise par écrit de sa décision l’employeur, l’employé ou le syndicat en cause.
Or, pour convertir une instruction émise en vertu du paragraphe 145(2) pour danger en une instruction pour une infraction requiert qu’une nouvelle instruction soit émise en vertu du paragraphe 145(1) du Code, un pouvoir que je n’ai pas présentement en vertu du Code. D’ailleurs, l’Honorable Juge P. Rouleau de la Cour fédérale, Première Instance, a déjà eu l’occasion de statuer sur ce même point dans Vancouver Wharves Ltd. vs. The Attorney General of Canada, dossier de Cour No. T-1125-97. À la page 8 du jugement, alors que le demandeur questionnait la compétence de l’agent régional de sécurité de modifier une instruction et l’interprétation que j’avais donnée concernant les limites à ma compétence en vertu de paragraphe 146(3) du Code, le Juge écrivait:
Applying these principles to the case at bar, I can find no fault with the Regional Safety Officer’s determination of the jurisdictional issue before him.
Ce “détail technique” est fort important puisque qu’il semble libérer le récipiendaire de l’instruction de toute responsabilité alors que dans les faits, cela n’est pas le cas. Il appartiendra à ce moment à l’agent de sécurité de décider s’il y a lieu de retourner sur les mêmes lieux pour établir s’il y a conformité avec la loi.
III - Les instructions
Il est évident, à la lumière des principes établis par la jurisprudence citée ci-dessus, que les observations plutôt générales et les conclusions de l’agent de sécurité ne constituent pas des “dangers” au sens du Code. Comme l’a soulignée M. Leclerc, “certaines instructions émises l’ont été dans le cadre de l’application de l’article 145(1) du Code”. À mon avis, M. Leclerc a vu juste dans les circonstances et a habilement tenté de limiter les dégâts. Toutefois, l’agent de sécurité a observé des dangers au sens général du terme, des situations hasardeuses, des infractions au Règlement, mais pas de “danger” au sens prévu par le Code. Pour cette raison, et tel que je l’ai expliqué ci-dessus, je devrai annuler les instructions.
Je me permettrai de faire une analyse sommaire des instructions individuelles pour le bénéfice des parties et de l’agent de sécurité afin de démontrer qu’elles ne constituent pas des “dangers” au sens du Code. Les mêmes principes établis par la jurisprudence citée ci-dessus seront appliqués à ces situations. Par exemple:
A. instruction 145(2)(a) du 8 décembre 1997
Item #1: Les opérateurs des appareils de manutention n’ont pas une vue sans obstacle de l'aire où l'appareil doit circuler et qu'ils ne sont pas dirigés par un signaleur.
L’agent de sécurité a observé que l’assemblage des fourches sur les appareils de manutention créait des obstacles à la vision des opérateurs de sorte qu’ils ne pouvaient opérer leurs appareils de manutention en toute sécurité. Il est d’avis que les opérateurs auraient dû être dirigés à ce moment par des signaleurs, ce qui n’était évidemment pas le cas. De plus, l’agent de sécurité a observé nombre d’opérateurs qui circulaient avec leurs appareils les fourches baissées “Ce qui ne [leur] permettait pas d’avoir un champ optimal de vision”. Il a retenu cette cause comme étant une des causes réelles de l’accident.
À mon avis, l’accident s’est produit non seulement parce que les fourches et leur assemblage réduisait la vison de l’opérateur mais aussi parce que l’opérateur ne regardait pas devant lui au moment de l’accident. Ce dernier a déclaré que son attention était portée vers “…l’autre machine…J’étais concentré sur l’autre machine.” lorsqu’il a frappé M. Ronci. Si l’attention de l’opérateur avait été portée vers l’avant de son chariot élévateur comme cela se doit, je n’ai pas de doute que, quoique sa vision fut réduite, mais non obstruée par les limites inhérentes de l’appareil et le fait qu’il conduisait les fourches baissées, il aurait vu M. Ronci et aurait pu l’éviter.
Il n’y a aucun doute qu’opérer un chariot élévateur de 25 tonnes parmi des employés et autres personnes ayant affaire sur ces lieux avec les fourches à un mètre du sol crée un risque susceptible de causer des blessures éventuelles aux personnes qui se trouvent dans la même aire de travail que l’appareil parce que les fourches et son assemblage ajoutent de nombreux points morts à la vision de l’opérateur. Je note toutefois que l’agent de sécurité n’a pas intervenu immédiatement pour protéger les employés, lorsqu’il a constaté cette pratique, tout simplement parce que le risque de blessure n’était pas suffisamment aigu pour arrêter l’opération. En d’autres mots, l’agent de sécurité n’est pas intervenu pour protéger les piétons du danger parce qu’il ne possédait aucune information spécifique ou aucun élément de preuve à l’effet que le danger était immédiat.
À mon avis, l’agent de sécurité a observé une pratique hasardeuse pouvant causer des blessures et s’est résolu à y mettre un terme parce que, comme il l’a rapporté, les représentants de l’employeur sur les lieux ne prenaient aucune mesure pour faire cesser cette pratique. Tout aussi louable que fut l’action de l’agent de sécurité, le danger n’étant pas immédiat, il n’en était pas un prévu par le Code.
Comme je l’ai dit plus haut, je n’ai pas le pouvoir d’émettre une instruction à l’employeur, en vertu du paragraphe 146(3) du Code, pour une contravention alors que l’agent de sécurité a conclu à la présence d’un danger. Toutefois, ceci ne limite en rien le pouvoir de l’agent de sécurité de retourner sur les mêmes lieux et déterminer si l’employeur se conforme à la loi et à ses règlements.
Item #2: Les charges qui dépassent la largeur des chariots à fourches sont manutentionnées au-dessus de la tête des piétons.
Le 4 décembre 1997, les agents de sécurité ont constaté que des charges qui dépassent la largeur des chariots à fourches sont manutentionnées au-dessus de la tête de personnes au sol dans le stationnement et sur le quai. De plus, Monsieur Daniel Tremblay, dans une déclaration solennelle signée du 4 décembre 1997, a affirmé avoir constaté en présence de l’agent de sécurité, qu’une charge fut manutentionnée au-dessus de la tête de personnes au sol dans le stationnement.
À mon avis, si l’agent de sécurité possédait une information spécifique à l’effet que la charge observée allait tomber sur une personne quelconque à ce moment précis, il était de son devoir d’intervenir immédiatement pour protéger la personne du danger et mettre fin à l’opération en cours. Mais l’agent ne possédait évidemment aucune information spécifique à l’effet que la charge allait tomber sur une personne. L’agent de sécurité a tout au plus observé une pratique qu’il considère dangereuse au sens général du terme.
Sur ce dernier point, je suis en accord avec l’agent de sécurité. Il est tout à fait inacceptable qu’en aucun moment, une personne, quelle qu’elle soit, passe sous une charge transportée par un chariot élévateur ou qu’un opérateur circule avec une charge au-dessus de la tête d’une personne. Le bon sens doit primer dans de telles circonstances. Un opérateur qui opère son véhicule d’une manière aussi imprudente devrait faire l’objet de réprimandes immédiates et sévères. Mais comme il a été démontré que l’employeur n’a jamais pris de mesures disciplinaires à l’égard d’employés qui ont des comportements à risque, on peut conclure que l’employeur tolère de tels comportements.
Il est évident que la situation décrite ci-dessus comporte de nombreux dangers au sens général du terme et que l’employeur n’assume pas sa responsabilité de protéger les employés au travail. Si une telle situation persiste, des employés pourraient être blessés. Toutefois, l’agent de sécurité n’a relevé aucun fait précis qui appuie sa constatation de danger au sens du Code. Il n’a pas vérifié si la charge devait être ou était attachée telle que prévue par le paragraphe 14.34(2) du Règlement qui se lit comme suit:
14.34(1) Lorsque l’appareil de manutention motorisé ou manuel se déplace avec une charge soulevée ou suspendue, l’opérateur doit s’assurer que la charge est transportée aussi près que possible du sol ou du plancher, et celle-ci ne doit en aucun cas être transportée à une hauteur supérieure à celle où l’appareil chargé devient instable.
(2) Toute charge, sauf les matériaux en vrac, qui pourrait vraisemblablement se déplacer ou s’échapper de l’appareil de manutention motorisé ou manuel et entraîner une situation comportant des risques doit être attachée par mesure de prévention.
L’agent de sécurité n’a pas vérifié les conditions physiques du sol, des fourches, du transport ou autres conditions pour déterminer si la charge allait se renverser. Ce qu’il a constaté, c’est la possibilité qu’un employé soit blessé si une telle pratique continue à être exécutée. Bien que l’agent de sécurité ait raison sur ce point, ce type de danger n’est pas prévu par le Code puisqu’il est hypothétique et non immédiat.
Item #3: Les équipements de manutention ne sont pas déneigés et que la vue des opérateurs est
obstruée en marche arrière.
La même situation se répète ici. Le 3 décembre 1997, l’agent de sécurité constate qu’il y a une accumulation de 22 centimètres de neige sur la partie arrière du chariot no 9560, ce qui obstrue le champ de vision de l’opérateur en marche arrière. Cette observation est une observation statique qui ne rencontre pas les critères de danger au sens du Code. Par exemple, l’agent de sécurité n’a pas observé une situation dans laquelle un opérateur d’appareil de manutention motorisé reculait en direction d’une personne qu’il ne voyait pas alors que cette personne ignorait qu’il se dirigeait dans sa direction et que la vue de l’opérateur était obstruée par la neige.
L’agent de sécurité n’a pas observé une utilisation en sens inverse du chariot. Il a simplement constaté qu’il y avait une accumulation de 22 centimètres sur l’arrière du chariot élévateur impliqué dans l’accident. De plus, le Syndicat démontre aussi du scepticisme au sujet de l’accumulation de neige lorsqu’il soumet “il serait difficile de prétendre que la neige fait obstacle à la vision lors de la conduite en marche arrière…” Ceci me laisse perplexe parce qu’il semble en effet que personne n’a constaté une utilisation en marche arrière avec une accumulation de neige à l’arrière du chariot élévateur. Par conséquent, je ne peux conclure à la présence d’un danger réel et immédiat au moment de l’enquête de l’agent de sécurité.
Item #4: Dans le stationnement à l’extérieur de la barrière, des appareils de manutention transportent des charges et que les opérateurs n’ont pas une vue sans obstacle de l’aire et qu’ils ne sont pas dirigés par un signaleur pendant que les employés et les personnes qui ont accès à l’aire de manutention se dirigent à pied vers leur voiture ou vers le quai.
Même scénario dans cette situation. L’agent de sécurité fait une observation générale qui, si elle est fondée, constitue une infraction au Règlement mais non un danger au sens du Code.
On a mis beaucoup d’emphase à savoir si le stationnement rencontrait les exigences d’une aire de manutention. À mon avis, il est peu important de savoir si le stationnement rencontre les exigences d’une aire de manutention telle que prévue par le Règlement. En effet, je n’ai pas à traiter ici d’une contravention au Règlement mais plutôt d’une situation de danger. Or, on ne peut conclure à la présence de danger au sens du Code que sur la base d’éléments objectifs et réels existants au moment de l’enquête de l’agent de sécurité.
À mon avis, l’agent de sécurité a observé de nombreuses infractions à la loi, mais pas de “danger” au sens du Code. La situation observée par l’agent de sécurité est susceptible de causer éventuellement des blessures aux personnes circulant dans le stationnement si on ne fait rien pour corriger la situation. De plus, l’agent n’a pas observé une situation particulière susceptible de blesser qui que ce soit avant qu’il ne puisse y être remédié. Le danger est donc susceptible de se produire à l’avenir. Il est hypothétique et non immédiat. L’instruction émise n’est pas, à mon avis, justifiée dans les circonstances.
Item#5: Les appareils de manutention ne sont pas munis d’un avertisseur sonore qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière.
La question à répondre dans ce cas-ci est la suivante: Est-ce que le fait que l’agent de sécurité a constaté que certains appareils de manutention ne sont pas munis d’un avertisseur sonore qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière constitue un danger au sens du Code? Les dispositions pertinentes susceptibles de nous éclairer dans ce cas-ci sont les paragraphes 14.16(1) et (2) du Règlement. Ils se lisent comme suit:
14.16(1) L’appareil de manutention motorisé qui est utilisé dans une aire occupée par des employés et qui se déplace:
a) en marche avant à une vitesse de plus de 8km/h doit être muni d’un klaxon ou autre avertisseur sonore du même genre;
b) en marche arrière doit, sous réserve du paragraphe 14.51(1), être muni d’un klaxon ou autre avertisseur sonore du même genre qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière.
(2) Lorsque l’avertisseur visé au paragraphe (1) ne peut être entendu clairement eu égard au bruit de l’appareil de manutention motorisé et au bruit ambiant, qu’il n’avertit pas du danger assez tôt pour qu’on puisse l’éviter ou qu’il ne constitue pas par ailleurs un moyen d’avertissement suffisant, d’autres dispositifs ou moyens d’avertissement - visuels, sonores ou tactiles - doivent être utilisés pour que l’avertissement soit suffisant. (mon soulignement)
L’alinéa 14.16(1)(b) du Règlement requiert que des appareils de manutention soient munis d’un avertisseur sonore qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière. Ne pas en avoir ou en avoir qui sont défectueux constitue une infraction au Règlement. La situation des avertisseurs sonores a déjà été traitée par l’agent régional de sécurité Douglas Malanka dans Forest Products Terminal Corporation Ltd. vs. International Longshoreman’s Association, décision numéro 99-006. Dans ce dossier, un agent de sécurité avait émis une instruction à l’employeur en vertu du paragraphe 145(1) du Code parce que ses appareils de manutentions motorisés n’étaient pas munis d’appareils sonores. En révision, l’agent régional de sécurité a confirmé l’essence de l’instruction, se limitant à corriger une légère erreur, et reconnaissait par le fait même que cette situation constituait en soi une infraction au Règlement.
Le paragraphe 14.16(2) ci-dessus explique qu’il y aurait danger pour un employé au travail si un avertisseur ne l’avertissait pas du danger assez tôt pour qu’il puisse éviter l’appareil de manutention. Toutefois, l’agent de sécurité n’a pas observé dans la réalité une telle situation. Ainsi, il n’a pas observé un employé susceptible d’être blessé par un appareil de manutention motorisé circulant en sens inverse, dans la direction de ce dernier, alors que l’avertisseur sonore de l’appareil ne fonctionnait pas. C’est la dynamique de tels faits qui rendent une infraction à la loi en une situation de danger au sens du Code.
Dans le cas qui nous préoccupe, le risque de blessures est plus élevé dû à la présence de personnes circulant dans la même aire de manutention que les appareils motorisés. L’appareil sonore sert à éviter des accidents. Il y a contravention flagrante à la présente Partie. Toutefois, l’agent de sécurité n’a détecté aucune situation de danger au sens du Code.
Item #6: Des passages à l’usage exclusif des piétons ne sont pas aménagés.
Cette instruction constitue avant tout une observation, voire une recommandation spécifique visant à régler certains problèmes de déplacement de piétons sur l’aire de manutention plutôt qu’un danger au sens du Code. Le fait qu’il y ait absence de passages à l’usage exclusif des piétons ne constitue pas en soi un danger au Code. Un danger représente une situation dynamique de faits précis comportant des éléments objectifs. Ceci ne veut pas dire que je ne suis pas d’accord avec l’agent de sécurité. Il est évident que la présence de passages à l’usage exclusif de piétons, tel que prévu par l’article 14.44 du Règlement, augmente la sécurité de ces derniers. Cet article se lit comme suit:
14.44 L’employeur doit aménager un passage clairement indiqué d’au moins 750 millimètres de largeur et réservé à l’usage exclusif des piétons et des personnes utilisant un fauteuil roulant ou autres appareils du même genre d’un côté d’une allée, d’un passage ou de toute autre voie de circulation se trouvant dans le lieu de travail, qui à la fois:
a) est une voie de circulation principale pour les appareils mobiles, les piétons et les personnes utilisant un fauteuil roulant ou autres appareils du même genre;
b) a plus de 15 mètres de longueur.
De bons arguments m’ont été présentés de part et d’autre pour justifier la présence ou l’absence d’un passage à l’usage exclusif des piétons. Toutefois, je ne peux traiter ici du mérite de ces arguments puisqu’ils s’inscrivent en dehors du contexte de danger.
Je suis d’avis que M. Ronci n’avait d’autre choix que de traverser cette aire de manutention pour se rendre au quai où une tâche l’attendait puisqu’aucun passage à l’usage exclusif des piétons n’avait été aménagé par l’employeur et qu’aucun signaleur, tel que prévu par le Règlement, dirigeait les opérations. Il est évident que si M. Ronci avait utilisé un passage piétonnier (voir photos S-5 à S-8, soumises par le Syndicat) tel que mis à la disposition des piétons par TMF suite à l’instruction de l’agent de sécurité, M. Ronci serait en vie aujourd’hui.
À mon avis, il est fort imprudent et même périlleux de permettre à des employés qui doivent traverser l’aire de manutention de circuler dans la même aire que les appareils motorisés pendant que des opérations de manutention sont en cours. À la moindre distraction, ils risquent de se faire écraser. Leur seule mesure de précaution est de faire attention de ne pas se faire frapper par un appareil motorisé en mouvement. Il n’existe aucune séparation entre les piétons et les appareils motorisés alors que plusieurs personnes se dirigent vers divers endroits où des tâches les attendent.
Toutefois, la situation de M. Ronci est devenue une situation “dangereuse” au sens du Code à partir du moment où l’opérateur de l’appareil de manutention regardait dans une autre direction alors qu’il se dirigeait vers M. Ronci qui ne voyait pas l’appareil venir vers lui. Je suis d’avis que l’employeur aurait tout intérêt à prendre des mesures visant à protéger les employés, ou toute autre personne, qui doit traverser l’aire de manutention pour se rendre, par exemple, au quai qui se trouve à l’autre extrémité de la guérite d’entrée. Ceci dit, cette instruction ne constitue pas un danger au sens du Code.
Item #7: La plupart des employés, des gestionnaires ainsi que les personnes qui ont accès à l’aire
de manutention ne portent pas de gilet de signalisation.
Selon le Rapport d’enquête, deux agents de sécurité i.e. Messrs Messier et Jégou, ont observé, c’est-à-dire qu’ils ont vu des contremaîtres et d’autres personnes qu’ils ont identifié ne portant pas de gilet de signalisation. Les contremaîtres doivent, au même titre que les employés, porter des gilets de signalisation. Le fait qu’ils n’en portaient pas au moment où les agents de sécurité menaient leur enquête est un signe révélateur du non-respect des obligations de l’employeur vis-à-vis la santé et sécurité au travail des employés. L’article 12.13 du Règlement est clair à ce sujet. Il prévoit:
12.13 L’employé qui, pendant son travail, est habituellement exposé au risque de heurt avec des véhicules en mouvement doit être protégé par l’un des dispositifs suivants, nettement visibles dans toutes les conditions d’utilisation:
a) un gilet de signalisation ou un vêtement semblable;
b) une barrière.
Toutefois, la notion de danger requiert qu’une circonstance quelconque ou qu’un ensemble de circonstances crée une situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposé avant qu’on ne puisse y remédier. Le simple fait d’observer un manquement à une disposition quelconque du Règlement ne vient pas nécessairement confirmer la présence d’un danger tel que prévu par le Code. À la lumière de ce qui précède, je conclus que l’agent de sécurité a observé une infraction au Règlement mais n’a pas observé une situation quelconque susceptible de causer des blessures à une personne au moment de son enquête. Or, en vertu du paragraphe 146(3) du Code, je n’ai pas le pouvoir d’émettre les instructions qu’aurait dû émettre l’agent de sécurité. En effet, en vertu de cette disposition, je ne peux que “…les modifier, annuler ou confirmer…”, ce qui me laisse peu de choix.
L’agent de sécurité n’a observé aucune situation susceptible de blesser un employé en particulier avant qu’il ne puisse y être remédié. Le fait de ne pas porter un gilet de signalisation en soi ne constitue pas automatiquement un danger au sens du Code.
Item #8: Il n’existe pas de procédure définissant la façon sécuritaire de se déplacer, pour les appareils de manutention;
et
Item #9: Il n’existe pas de procédure définissant la façon sécuritaire de se déplacer pour les piétons.
Ces deux instructions reflètent ce que l’agent de sécurité considère être des lacunes concernant la façon sécuritaire pour les piétons et les appareils de manutention de se déplacer dans l’aire de manutention des matériaux. Elles n’identifient aucunement une situation susceptible ce causer des blessures à une ou des personnes avant qu’il ne puisse y être remédié. Elles décrivent plutôt les mesures que l’agent de sécurité considèrent appropriées dans les circonstances. Ces mesures sont souhaitables toutefois aucun lien direct de cause à effet n’a été établi pour justifier l’émission d’une instruction pour danger. À mon avis, c’est au comité de santé et de sécurité au travail de se pencher sur ces questions en collaboration avec l’employeur et de proposer, à la lumière des risques connus ou prévisibles, une procédure sécuritaire pour le déplacement des piétons et des appareils de manutention.
Il existe d’ailleurs une procédure sécuritaire pour le déplacement des appareils motorisés. Celle-ci se retrouve, telle qu’indiquée par le Syndicat, à l’article 14.3.5.4. du M.H.S.T.. Cet article se lit comme suit:
4. Dans la mesure où cela est pratiquement réalisable:
a) la circulation devrait être à sens unique ou suivant un circuit en boucle; le sens de la circulation devrait être indiqué par une signalisation;
b) les voies de circulation principales devraient être clairement signalées;
c) la circulation devrait être convenablement contrôlée;
d) les voies de circulation devraient être dégagées de tous obstacles tels que marchandises, matériaux de fardage et engins.
L’argumentation de TMF est à l’effet que le paragraphe 4 de l’alinéa 14.3.4 (qui devrait probablement se lire 14.3.5) du M.H.S.T. constitue une procédure qui ne peut s’appliquer à un terminal de marchandise conventionnelle et en vrac. Dans les faits, une telle procédure n’était pas appliquée aux sections 48 et 49 du port. Toutefois, le Syndicat soumet que la procédure recherchée par l’agent de sécurité aurait pu ressembler à la procédure décrite ci-dessus. En somme, il semble qu’il y ait possibilité de développer une procédure semblable pour un terminal de marchandise conventionnelle et en vrac. Je ne m’attarderai toutefois pas sur ce point puisqu’à mon avis, ces situations sont du ressort du pouvoir de l’agent de sécurité en vertu du paragraphe 145(1) du Code. Ce que je constate, c’est que ces instructions n’ont aucunement trait à un danger immédiat tel que prévu par le Code.
Item #10: Les gestionnaires et les employés utilisent les marches pieds des appareils de manutention pour se déplacer d’un endroit à l’autre du quai.
Le fait d’observer une personne se déplacer d’un endroit à un autre en utilisant un marchepied d’un appareil de manutention ne signifie pas automatiquement que la personne sera immédiatement blessée. Il est évident que cette pratique ne peut être tolérée. Si l’employeur ne veille pas à la sécurité de ses employés, il en sera tenu responsable. Tout comme l’agent de sécurité l’a souligné dans son rapport d’enquête, cette pratique est interdite par le paragraphe 14.30(1) du Règlement qui se lit comme suit:
14.30 (1) L'appareil de manutention motorisJ ou manuel ne peut Ltre utilisJ pour transporter un employJ, et aucun employJ ne peut l'utiliser pour ce transport, B moins qu'il n'ait JtJ expressJment conHu B cette fin.
Dans le cas qui nous préoccupe, l’agent de sécurité a rapporté que le 4 décembre 1997, il a observé un employé utiliser le marchepied d’un appareil motorisé pour se déplacer. Si l’agent de sécurité était d’avis que cette pratique était susceptible de blesser l’employé immédiatement, il aurait dû intervenir au moment même où il a observé l’employé sur le marchepied et non pas plus tard alors qu’il donne une série d’instructions à l’employeur. Le danger n’existait plus à ce moment.
Cette disposition s’adresse aussi à l’employé. Un employé qui se permet une pratique aussi périlleuse le fait de son propre choix et doit aussi en être tenu responsable. En vertu de l’alinéa 126(1)(b) du Code, l’employé au travail est tenu:
b) de se plier aux consignes réglementaires en matière de sécurité et de santé au travail.
Il faut aussi se rappeler que lorsqu’un employé utilise le marchepied d’un appareil pour se déplacer, il engage non seulement sa responsabilité mais aussi celle de l’opérateur qui permet à l’employé d’agir de la sorte. Or l’opérateur a reçu une formation qui interdit une telle pratique.
En ce qui concerne le contremaître ayant déclaré utiliser le marchepied d’un appareil de manutention pour se déplacer, il m’est impossible de conclure que cette situation constitue une situation susceptible de causer des blessures à l’employé au moment de l’enquête de l’agent de sécurité. L’agent n’a pas constaté l’événement en question et, par conséquent, il ne peut pas conclure à l’existence d’un danger au sens du Code à ce moment. Il ne peut donc pas intervenir immédiatement pour protéger la personne en question. Le danger est chose du passé. Toutefois, l’employeur a tout intérêt à s’assurer qu’une telle pratique ne se produise pas. Si elle se produit, il doit intervenir pour y mettre fin.
Item #11: Le miroir droit du chariot numéro 9560 est brisé et ne peut être utilisé lorsque l’appareil se déplace en marche arrière.
L’employeur a retiré sa demande de révision de cet item. Cette instruction demeurera donc intacte.
Décision: Pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, j’ANNULE les instructions ou items numéros 1 à 10 inclusivement de l’instruction 145(2)(a) du 8 décembre 1997 émise par l’agent de sécurité Alain Messier à Les Terminus Maritimes Fédéraux. L’item numéro 11 de cette instruction demeure intact.
B. instruction 145(2)(a) et (b) du 12 décembre 1997
Les pneus arrières gauches des équipements de manutention no 9560 et no 1024 ont une usure excessive, ce qui peut provoquer leur éclatement et résulter en une perte de contrôle de ces appareils. Ce qui représente un risque d’écrasement pour les employés.
Le 9 janvier, alors qu’il fait certains examens sur le chariot élévateur de 25 tonnes no9560, l’agent de sécurité s’aperçoit que les pneus arrières de ce chariot et d’un autre chariot à proximité ont une usure excessive. L’agent n’a pas observé ces appareils en opération. Il n’a recueilli aucune information objective à l’effet qu’un employé allait être blessé au même moment à moins qu’il intervienne pour le protéger. En fait, l’agent de sécurité a indiqué que l’usure excessive des pneus peut provoquer leur éclatement et résulter en une perte de contrôle de ces appareils. Je suis en accord avec l’agent de sécurité sur ce point. Toutefois, le risque d’éclatement et la possibilité de perte de contrôle sont des risques hypothétiques. Par conséquent, ce risque ne rencontre pas la définition de danger telle que prévue au Code.
Décision: Pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, j’ANNULE l’instruction 145(2)(a) et (b) du 12 décembre 1997 émise par l’agent de sécurité Alain Messier à Les Terminus Maritimes Fédéraux.
C. instruction 145(2)(a) et (b) du 18 décembre 1997
Les mesures préventives concernant l’instruction du 8 décembre 1997 n’ont pas toutes été prises, de telle sorte que les employés sont exposés à des risques d’écrasement par des appareils de manutention des matériaux lors de la manutention des matériaux.
Puisque cette instruction vise uniquement les instructions annulées ci-dessus, je me dois de l’annuler aussi puisqu’elle n’a plus de fondement en droit.
Décision: Pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, j’ANNULE l’instruction 145(2)(a) et (b) du 18 décembre 1997 émise par l’agent de sécurité Alain Messier à Les Terminus Maritimes Fédéraux.
Décision rendue le 29 avril 1999
Serge Cadieux
Agent régional de sécurité
ANNEXE A
DANS L'AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL
PARTIE II ‑ SÉCURITÉ ET SANTE AU TRAVAlL
INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DE L'ALINÉA 145(2)a)
Le 3 et 4 décembre 1997, I'agent de sécurité soussigné a procédé à une enquête concernant le décès de monsieur Joseph Ronci, survenu le 3 décembre 1997, dans le lieu de travail exploité par LES TERMINUS MARITIMES FÉDÉRAUX employeur assujetti à la partie lI du Code canadien du travail et sis à l’extrémité ouest du HANGAR 49 du PORT DE MONTREAL, MONTRÉAL, QUÉBEC.
Ledit agent de sécurité estime que des situations existant dans le lieu constitue des dangers pour un employé au travail, à savoir:
Les employés, les gestionnaires les personnes qui ont accès au lieu de travail sont exposés à des risques d'écrasement par des appareils de manutentions des matériaux en mouvement alors que:
1. Les opérateurs des appareils de manutention n’ont pas une vue sans obstacle de l'aire où l'appareil doit circuler et qu'ils ne sont pas dirigés par un signaleur.
2. Les charges qui dépassent la largeur des chariots à fourches sont manutentionnées au-dessus de la tête des piétons.
3. Les équipements de manutention ne sont pas déneigés et que la vue des opérateurs est obstruée en marche arrière.
4. Dans le stationnement à l’extérieur de la barrière, des appareils de manutention transportent des charges et que les opérateurs n’ont pas une vue sans obstacle de l’aire et qu’ils ne sont pas dirigés par un signaleur pendant que les employés et les personnes qui ont accès à l’aire de manutention se dirigent à pied vers leur voiture ou vers le quai.
5. Les appareils de manutention ne sont pas munis d’un avertisseur sonore qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière.
6. Des passages à l’usage exclusif des piétons ne sont pas aménagés.
7. La plupart des employés, des gestionnaires ainsi que les personnes qui ont accès à l’aire de manutention ne portent pas de gilet de signalisation.
8. Il n’existe pas de procédure définissant la façon sécuritaire de se déplacer, pour les appareils de manutention.
9. Il n’existe pas de procédure définissant la façon sécuritaire de se déplacer,
pour les piétons.
10. Les gestionnaires et les employés utilisent les marches pieds des appareils de manutention pour se déplacer d’un endroit à l’autre du quai.
11. Le miroir droit du chariot numéro 9560 est brisé et ne peut être utilisé lorsque l’appareil se déplace en marche arrière.
Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(2)a) de la partie II du Code canadien du travail, de procéder à la protection des personnes contre ces dangers immédiatement.
Fait à Montréal, ce 8e jour de décembre 1997.
ALAIN MESSIER
Agent de sécurité
1841
À: LES TERMINUS MARITIMES FÉDÉRAUX
Bureau 3500
1000, de la Gauchetière Ouest
Montréal, Québec
H3B 4W5
ANNEXE B
DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL
PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL
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INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DES ALINÉAS 145(2)b) ET b)
Le 9 décembre 1997, l’agent de sécurité soussigné a procédé à une enquête dans le lieu de travail exploité par LES TERMINUS MARITIMES FÉDÉRAUX, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis à l’extrémité est du HANGAR 42, du PORT DE MONTRÉAL, MONTRÉAL, QUÉBEC.
Ledit agent de sécurité estime qu’une situation existant dans le lieu constitue un danger pour un employé au travail, à savoir:
Les pneus arrières gauches des équipements de manutention no 9560 et no 1024 ont une usure excessive, ce qui peut provoquer leur éclatement et résulter en une perte de contrôle de ces appareils. Ce qui représente un risque d’écrasement pour les employés.
Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vetu de l’alinéa 145(2)a) de la partie II du Code canadien du travail de procéder immédiatement à la protection des personnes contre ce danger.
Il vous est EN OUTRE INTERDIT PAR LES PRÉSENTES, conformément à l’alinéa 145(2)b) de la partie II du Code canadien du travail, d’utiliser les équipements de manutention à propos desquelles les avis de danger no 6540 et 6559 ont été apposés en vertu du paragraphe 145(3) de la partie II, jusqu’à ce que ces instructions aient été exécutées.
Fait à Montréal, ce 12e jour de décembre 1997.
ALAIN MESSIER
Agent de sécurité
1841
À: LES TERMINUS MARITIMES FÉDÉRAUX
Bureau 3500
1000, de la Gauchetière Ouest
Montréal, Québec
H3B 4W5
ANNEXE C
DANS L’AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL
PARTIE II - SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL
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INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DES ALINÉAS 145(2)a) ET b)
Le 17 décembre 1997, l’agent de sécurité soussigné a procédé à une enquête dans le lieu de travail exploité par LES TERMINUS MARITIMES FÉDÉRAUX, employeur assujetti à la partie II du Code canadien du travail, et sis aux sections 48 et 49 du PORT DE MONTRÉAL, MONTRÉAL, QUÉBEC.
Ledit agent de sécurité estime qu’une situation existant dans le lieu constitue un danger pour des employés au travail, à savoir:
Les mesures préventives concernant l’instruction du 8 décembre 1997 n’ont pas toutes été prises, de telle sorte que les employés sont exposés à des risques d’écrasement par des appareils de manutention des matériaux lors de la manutention des matériaux.
Par conséquent, il vous est ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(2)a) de la partie II du Code canadien du travail, de procéder immédiatement à la protection des personnes contre ce danger.
Il vous est EN OUTRE INTERDIT PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(2)b) de la partie II du Code canadien du travail, d’effectuer des opérations de manutention des matériaux avec des appareils de manutention, aux section 48 et 49 ainsi qu’au hangar 49, lieux à propos desquels l’avis de danger no 6551 a été apposé en vertu du paragraphe 145(3) de la partie II, jusqu’à ce que ces instructions aient été exécutées.
Fait à Montréal, ce 18e jour de décembre 1997.
ALAIN MESSIER
Agent de sécurité
1841
À: LES TERMINUS MARITIMES FÉDÉRAUX
Bureau 3500
1000, de la Gauchetière Ouest
Montréal, Québec
H3B 4W5
SOMMAIRE DE LA DÉCISION DE L’AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ
Décision no: 99-010
Demandeur : Terminus Maritimes Fédéraux, division Fednav Ltée
Montréal (Québec)
Défendeur : Syndicat des débardeurs
et
Association internationale des débardeurs
MOTS-CLÉS:
Danger réel et immédiat, accident mortel, aire de manutention, appareils de manutention, piétons, vue sans obstacle, avertisseur sonore, passages, gilet de signalisation, procédure pour se déplacer, marchepied, pneus, risque d’écrasement, vision restreinte
DISPOSITIONS:
Code: 126(1)(b), 145(1), 145(2) (a) et (b), 146(3)
Règlement: 12.13, 14.16(1) et (2), 14.30(1), 14.34(2), 14.44
RÉSUMÉ:
Le 3 décembre 1997, un accident tragique s’est produit au port de Montréal alors qu’un employé traversait à pied l’aire de manutention de la compagnie T.M.F. pour se rendre au quai où une tâche l’attendait. Au même moment l’opérateur d’un appareil de manutention se dirigeait dans la même direction que l’employé circulant à pied. Il n’a pas vu ce dernier et l’a écrasé avec l’appareil. L’agent de sécurité enquête le jour de l’accident et constate que la hauteur des fourches au sol du chariot élévateur est de un mètre, qu’il y a une accumulation de 22 centimètres de neige sur la partie arrière du chariot ce qui obstrue le champ de vision de l’opérateur en marche arrière, que le miroir droit du chariot est brisé et ne peut être utilisé lorsque l’appareil se déplace en marche arrière. Le lendemain, l’agent continue son enquête et fait les observations suivantes, à savoir:
· aucun passage à l’usage exclusif des piétons n’est aménagé;
· aucun signaleur ou feu de signalisation ne règle la circulation;
· le marchepied d’un appareil de manutention est utilisé par un employé pour se déplacer;
· un contremaître déclare utiliser le marchepied d’un appareil de manutention pour se déplacer;
· dans le stationnement au nord de la clôture, des marchandises sont manutentionnées à l’aide de chariots élévateurs, alors que la marchandise est entreposée pêle-mêle parmi les véhicules des personnes ayant affaires aux sections 48 et 49 et alors que les opérateurs n’ont pas une vue sans obstacle de l’aire et qu’ils ne sont pas dirigés par un signaleur pendant que les employés et les personnes qui ont accès à l’aire de manutention se dirigent à pied vers leur voiture ou vers le quai;
· les opérateurs des chariots élévateurs de 25 tonnes lorsqu’ils conduisent de l’avant, sans charge, maintiennent les fourches à une hauteur d’environ un mètre, ce qui obstrue la vision;
· des charges qui dépassent la largeur des chariots à fourches sont manutentionnées au-dessus de la tête de personnes au sol dans le stationnement et sur le quai;
· plusieurs des chariots élévateurs ne sont pas munis d’un avertisseur sonore qui fonctionne automatiquement durant le déplacement en marche arrière; et
· les contremaîtres, les personnes qui ont accès à l’aire de manutention ainsi que la plupart des employés ne portent pas de gilet de signalisation.
L’agent de sécurité décide que toutes ces situations constituent des dangers au sens du Code et émet une instruction verbale en vertu du paragraphe 145(2)(a) à l’employeur le 4 décembre 1997 qu’il confirme par écrit à la conclusion de son enquête, soit le 8 décembre 1997.
Le 9 décembre 1997 alors qu’il est sur les mêmes lieux, l’agent de sécurité constate que les roues de deux appareils de manutention ont une usure excessive. Il considère que cette situation peut créer un accident et donne une autre instruction verbale à l’employeur en vertu des alinéas 145(2)(a) et (b) du Code qu’il confirme par écrit le 12 décembre 1997.
Alors qu’il revient sur les lieux pour vérifier si l’employeur s’est confirmé à ses instructions, il constate que l’employeur ne se conforme pas aux instructions émises. Il émet alors une autre instruction verbale à l’employeur en vertu des alinéas 145(2)(a) et (b) du Code qu’il confirme par écrit le 18 décembre 1997.
En révision, l’agent régional de sécurité a conclu que l’agent de sécurité a observé et constaté des situations hasardeuses, des dangers au sens général du terme, des infractions à la loi mais pas de danger au sens du Code. Dans aucun cas le danger était immédiat. Pour ces raisons, l’agent régional de sécurité a ANNULÉ toutes les instructions. Il a dû faire ainsi parce que même s’il reconnaissait que plusieurs des situations identifiées par l’agent de sécurité constituaient des infractions à la loi, il n’avait pas le pouvoir en vertu de l’article 146 du Code d’émettre de nouvelles instructions à l’employeur pour des infractions.
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