Archivée - Decision: 99-016 CODE CANADIEN DU TRAVAIL

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Révision, selon l’article 146 du Code canadien du travail,

Partie II, d’instructions données par un agent de sécurité

Décision no :           99-016

Demandeur :           Syndicat national de l’automobile

                                 Représenté par : R. W. Bourrier

Intimée :                  Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

                                 Représentée par : D.N. Kruk, avocat

Mis en cause :        T. Mckay

                                 Agent de sécurité

                                 Développement des ressources humaines Canada

Devant :                   Douglas Malanka

                                  Agent régional de sécurité

                                  Développement des ressources humaines Canada

Contexte :

Le 10 février 1999, des agents de sécurité de Développement des ressources humaines Canada ont fait enquête sur un accident mortel survenu aux chantiers Symington de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (ci-après appelée le “ CN ”). Après un examen préliminaire de l’accident, ils ont donné des instructions au CN en vertu de l’alinéa 145.2 a)[1] du Code canadien du travail (ci-après appelé le Code, ou la partie II). Les instructions sommaient l’employeur de protéger immédiatement toute personne contre le danger. Pour les instructions, se reporter à l’annexe.

Le 22 février 1999, le Syndicat national de l’automobile (TCA) demande, en vertu de l’article 146 du Code, que les instructions soient révisées par un agent régional de sécurité. Une audience a eu lieu le 28 avril 1999 à Winnipeg (Manitoba).


Agent de sécurité

Le 10 février 1999, à 9 h 45, l’agent de sécurité McKay apprenait qu’un grave accident était survenu vers 9 h 15 aux chantiers Symington du CN. Lui et l’agent de sécurité Schultz ont entrepris immédiatement une enquête sur l’accident et sont arrivés aux chantiers Symington à environ 11 h 10 ce jour-là. Par la suite, ils ont appris que l’employé blessé, M. Harold Maisey, avait succombé à ses blessures.

Les agents de sécurité ont procédé à leur enquête sur les lieux de l’accident et ont effectué des entrevues préliminaires. Ils ont aussi interrogé M. Nello D’Ottavio, l’autre employé impliqué dans l’accident, et l’unique témoin. Selon leurs conclusions préliminaires, ils ont établi que M. D’Ottavio et M. Maisey avaient été priés de réparer un wagon qui se trouvait sur une portion incurvée de la voie. Lorsque les deux employés sont arrivés près du wagon, ils ont décidé de le déplacer vers une portion rectiligne de la voie, à l’aide de leur camion et d’une chaîne. M. Maisey a attaché la chaîne au camion et au wagon et s’est avancé à côté de celui-ci, pendant que M. D’Ottavio conduisait le camion en marche arrière et ramenait le wagon vers  l’arrière. M. D’Ottavio a stoppé son véhicule lorsqu’il a vu un poteau hydroélectrique le long de la voie, mais le wagon a continué de se mouvoir. M. Maisey a tenté d’enlever la chaîne du wagon afin de découpler les deux véhicules, mais il a été écrasé entre la chaîne et le wagon avant de pouvoir décrocher la chaîne. L’agent de sécurité McKay a dit avoir appris que cette façon de procéder était courante au CN et que le frein à main du wagon n’était pas enclenché au moment de l’accident.

Le lendemain, les agents de sécurité ont rencontré leurs surveillants et, se fondant sur les conclusions préliminaires, ont décidé que l’accident était la preuve qu’il existait un danger pour les employés tenus d’effectuer ce travail. L’agent de sécurité McKay a expliqué qu’il avait suivi les directives ministérielles se rapportant à la communication d’instructions selon le paragraphe 142(2) du Code et qu’il avait choisi de préciser le danger dans les instructions plutôt que de le rattacher à des contraventions au Code ou au Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail (Règlement CSST). S’il avait agi ainsi, a-t-il dit, c’était parce que les instructions étaient nécessaires immédiatement et qu’il était trop tôt pour dire s’il y avait eu contravention au Code ou au Règlement CSST. Il a par la suite précisé au CN que ses instructions s’appliquaient à toutes les activités exercées à l’intérieur de la Division La Verendre, ce qui comprend la zone délimitée par les routes périphériques entourant la ville de Winnipeg.

À la suite de ses instructions, l’agent de sécurité McKay a appris que, avant l’accident, il n’existait au CN aucune procédure écrite se rapportant au déplacement des wagons et que les employés n’avaient reçu aucune formation en règle sur la manière d’effectuer le travail.


Témoignage


M. J. McQuarry a témoigné au nom du demandeur. Il a déclaré qu’il avait plus de 20 ans d’expérience comme mécanicien de wagon. Il a confirmé n’avoir jamais vu de procédures écrites ni entendu parler d’une formation en règle se rapportant au remorquage d’un wagon avec un camion et une chaîne. Il a exprimé l’avis qu’il est imprudent de remorquer un wagon de cette manière parce qu’il n’y a rien pour empêcher le déplacement incontrôlé du wagon et parce que la défaillance d’une chaîne n’est précédée d’aucun avertissement.

Intimé


M. W. Nohlgren, directeur du Système de maintenance des wagons au CN, a témoigné au nom de l’intimé, le CN. De son témoignage, je retiens ce qui suit.

M. Nohlgren est entré au CN en 1972 comme employé de la section des équipements, puis a accédé à des postes de direction au fil des ans. En tant que directeur du Système de maintenance des wagons, il est chargé de l’entretien du parc des wagons de marchandises, ainsi que des ateliers, et il doit veiller à l’application des pratiques et procédures du CN se rapportant aux travaux effectués sous sa surveillance.

Il a décrit la conclusion du CN se rapportant à l’accident à l’aide de croquis représentant la disposition du wagon et du camion impliqués dans l’accident. Sa description a pour l’essentiel confirmé la description donnée par l’agent de sécurité McKay. M. Nohlgren a confirmé que, avant l’accident, le CN n’avait pas établi de procédures écrites officielles ni ne dispensait une formation en règle sur la pratique consistant à déplacer des wagons à l’aide de véhicules non ferroviaires et de pièces de jonction flexibles ou non rigides. Il a fait observer que la pratique est employée uniquement lorsqu’il n’y a pas de locomotive ou de véhicule sur rail pour déplacer le wagon et que, à défaut de procédures officielles ou de formation, les travailleurs de l’entretien des wagons reçoivent de leurs collègues une formation et une expérience au sein même de l’entreprise. Il a confirmé que les procédures écrites élaborées par le CN à la suite de l’accident officialisent la pratique antérieure et il a exprimé l’avis que la pratique est sûre si les employés suivent les procédures écrites établies.

M. Nohlgren s’est exprimé sur une note de service présentée auparavant pendant l’audience par M. Bourrier et se rapportant à la décision du Comité directeur du CN en matière de sécurité et de santé de mettre fin à l’utilisation de chaînes pour déplacer des wagons. Il a témoigné que, après la distribution de la note de service, il avait parlé à son auteur, M. Ferrusi. Selon M. Ferrusi, si l’on a décidé après l’accident de mettre fin à l’utilisation de chaînes, c’était pour donner satisfaction aux représentants syndicaux qui participaient à la réunion et non pour corriger une pratique non sécuritaire.

Récapitulations

M. Bourrier a fait valoir que l’agent de sécurité avait commis une erreur lorsqu’il avait donné ses instructions en conformité avec l’alinéa 145(2) a) du Code le 11 février 1999 et que les instructions devraient être modifiées et se reporter plutôt à l’alinéa 145(2) b)[2] ainsi qu’au paragraphe 145.(3)[3], “ Affichage d’un avis ”, et au paragraphe 145.(4)[4] “ Cessation d’utilisation ”. Selon lui, l’alinéa 145(2) a) oblige simplement l’employeur à prendre des mesures pour protéger la sécurité et la santé des employés, tandis que l’alinéa 145(2) b) oblige l’employeur à cesser complètement l’activité. M. Bourrier a déploré que la réponse du CN aux instructions données selon l’alinéa 145(2) a) ait été d’officialiser la pratique même qui a conduit à l’accident mortel. Il a déclaré que ni le syndicat ni le comité de la sécurité de la santé n’avaient été consultés dans la rédaction des procédures portant sur l’utilisation de véhicules non ferroviaires.

M. Bourrier a signalé qu’il existe actuellement des procédures adéquates pour déplacer les wagons à l’aide d’équipements ferroviaires spécialisés, qui sont surtout des locomotives et des tracteurs rail-route fabriqués et conçus pour déplacer des wagons. Il a estimé que les véhicules non ferroviaires sont incapables de maîtriser le mouvement de wagons, surtout lorsqu’ils sont utilisés avec des connecteurs non rigides, et leur emploi devrait être interdit. Il a ajouté que les freins à main des wagons ne servent pas à commander le mouvement de wagons. Il a affirmé que les cadres supérieurs du CN s’étaient entendus, lors de la réunion du comité directeur du CN en matière de sécurité et de santé, tenue à la suite de l’accident, pour qu’il soit mis fin définitivement à l’utilisation de chaînes pour le déplacement de wagons. Il a exprimé l’avis que les courroies et les câbles sont semblables à des chaînes.


M. Bourrier a aussi soutenu que les instructions devraient être modifiées de manière qu’il soit ordonné au CN de se conformer aux alinéas 125 i)[5] et q) [6] du Code, ainsi qu’au paragraphe 14.3(1), à l’article 14.15 et à l’alinéa 14.23(1) c) du Règlement CSST[7].

M. Kruk a dit que les instructions données dans ces conditions étaient justifiées. Il a estimé qu’il aurait été exagéré de la part de l’agent de sécurité Mckay d’arriver à la conclusion que la formation était la cause de l’accident ou que, après examen préliminaire de l’accident, il y avait d’autres contraventions au Code ou au Règlement CSST.

Il a répété que, selon le CN, la pratique est sécuritaire quelles que soient les circonstances et que les employés avaient reçu une formation officieuse sur le tas à propos de cette pratique. Il a estimé qu’un véhicule non ferroviaire est incapable de stopper le mouvement d’un wagon quel que soit le genre de connecteur employé, et cette observation s’applique aux tracteurs rail-route. Ils sont trop légers pour cette fonction. Il a affirmé que les freins à main des wagons sont utilisés dans l’industrie pour le réglage du mouvement des wagons.

Finalement, M. Kruk a déclaré que la seule différence entre l’alinéa 145.(2) b) et l’alinéa 145.(2) a) du Code est que l’alinéa 145.(2) a) s’applique lorsque, selon l’agent de sécurité, le danger peut être supprimé immédiatement, tandis que l’alinéa 145.(2) b) s’applique lorsque l’agent de sécurité décide que le danger ne peut être supprimé immédiatement. Il a ajouté que le CN avait déjà affiché les instructions de l’agent de sécurité Mckay.


Décision

La question à trancher dans cette révision est la suivante : existait-il un “ danger ” selon la définition du Code lorsque l’agent de sécurité a enquêté sur l’accident mortel qui s’est produit le 10 février 1999 et, dans l’affirmative, devrais-je modifier ou confirmer les instructions?

Afin de répondre à cette question, j’ai indiqué aux parties que j’allais devoir examiner la description du danger figurant dans les instructions de l’agent de sécurité Mckay ainsi que le fondement juridique des instructions, et me demander si le CN avait contrevenu à d’autres dispositions du Code et du Règlement CSST, ce dernier aspect devant confirmer la description du danger donnée dans les instructions.

Pour savoir si un “ danger ” existait selon le Code, il est nécessaire de considérer le paragraphe 122.(1) du Code, où apparaît la définition du mot “ danger ”, et la jurisprudence applicable. Selon le paragraphe 122.(1) :

“ 122.(1) danger ” Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié… ” [C’est moi qui souligne]

En ce qui concerne la jurisprudence applicable, il faut se référer à la décision non publiée de l’agent régional de sécurité, Serge Cadieux, dans l’affaire Terminus Maritimes Fédéraux, Décision 99-010.  M. Cadieux s’y exprime ainsi :

“ Pour résoudre la première question, il faut déterminer les principes qui s’appliquent au “ danger ” prévu en vertu du Code. Les parties à ce dossier sont d’accord avec l’abondante jurisprudence qui a établi les principes devant s’appliquer dans les cas de refus de travail. 

Le danger devra être immédiat et réel (Montani vs. Compagnie des chemins de fer nationaux, C.C.R.T. décision no 1089).  Il devra être présent au moment de l’enquête de l’agent de sécurité (Bonfa c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration, Dossier no A-138-89). Sa réalisation devra être plus qu’hypothétique. De plus, et tel que souligné par Me Benaroche, l’agent de sécurité devra déterminer, après enquête, qu’un danger au sens du Code existe. L’agent de sécurité ne peut présumer de l’existence d’un danger afin d’intervenir mais il doit recueillir une preuve à cet égard (Mario Lavoie 1998 F.C.J. no. 1285) et sa décision devra être basée sur des critères objectifs (Coulombe vs. Empire Stevedoring Company Ltd., C.C.R.T. décision no 747).  Le danger devra en être un qui est visé par le Code. Par conséquent, un danger inhérent au travail de l’employé ou qui en constitue une condition normale d’emploi ne peut servir de motif au droit de refus (Montani, supra).

On se rappellera de la décision notoire no 686 rendue le 26 avril 1988 par le vice-président du Conseil canadien des relations de travail, Hugh R. Jamieson, dans laquelle il écrivait :

Le Code définit le danger comme suit :

“danger” Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié.”

Si l’on se souvient que la Partie IV du Code utilisait l’expression “danger imminent” avant l’adoption de la définition actuelle de danger en 1984, il est évident – d’après les mots soigneusement choisis de la définition – que le législateur a voulu préserver dans la notion de danger le caractère immédiat de celui-ci. C’est dans cette acception du terme qu’il faut comprendre le droit de refuser de travailler qu’accordent à l’employé les articles 85 et 86, ainsi que les pouvoirs conférés par le paragraphe 102(2) à un agent de sécurité de donner des instructions dans des situations dangereuses.

À la suite de cette décision, les tribunaux administratifs et la Cour fédérale, Sections de Première instance et d’Appel, ont abondé dans le même sens que la décision ci-dessus. Ils ont établi des principes similaires au danger imminent, à savoir que le danger doit être immédiat, réel, présent au moment de l’enquête de l’agent de sécurité, plus qu’hypothétique, basé sur des critères objectifs etc. M. Leclerc voudrait limiter l’application de ces principes à l’exercice du droit de refuser de travailler. Je ne suis pas d’accord. La décision rendue par le CCRT à ce moment expliquait que cette notion de danger immédiat s’appliquait non seulement au droit de refus mais que

. . . C’est dans cette acceptation du terme qu’il faut comprendre le droit de refuser de travailler qu’accordent à l’employé les articles 85 et 86, ainsi que les pouvoirs conférés par le paragraphe 102(2) à un agent de sécurité de donner des instructions dans des situations dangereuses. (mon soulignement)

Il faut se rappeler qu’avant 1984, la notion de danger n’était pas définie au Code. Plutôt, il y existait l’expression “ danger imminent ” qui était utilisée à ce moment aux articles s’appliquant au droit de refuser de travailler et au pouvoir de l’agent de sécurité d’émettre des instructions pour danger. À ce moment, la disposition prévoyant le pouvoir de l’agent de sécurité d’émettre une instruction pour danger se lisait comme suit :

94.(1) L’agent de sécurité, qui estime qu’un endroit, une substance ou une chose, ou une ou plusieurs parties de ceux-ci, dans une entreprise fédérale, constitue un danger imminent  pour la sécurité ou la santé de personnes employées dans le cadre de cette entreprise et que l’utilisation de ce lieu ou de cette substance ou chose est de ce fait contraire à la présente partie ou aux règlements,…

Par conséquent, la définition ci-dessus qui a servi à remplacer l’expression “ danger imminent ”, et tous les principes établis par la jurisprudence citée ci-dessus, s’appliquent également au pouvoir de l’agent de sécurité d’émettre une instruction pour danger.

Une conséquence directe de cette conclusion est que lorsque l’agent de sécurité enquête suite à un accident, il ne peut conclure que la cause de l’accident constitue au moment de son enquête un danger au sens du Code et émettre une instruction pour danger. Le danger “ immédiat ” existait au moment précédant l’accident et, à moins de posséder une information objective ou des éléments de preuve à l’effet que la même situation est sur le point de se concrétiser au moment de son enquête, il ne peut conclure à la présence de danger au sens du Code. Tout au plus peut-il conclure à une infraction à la loi ou à un danger au sens général du terme. Il en va de même lorsque l’agent de sécurité inspecte un lieu de travail. Le fait d’observer des situations susceptibles de causer éventuellement des blessures ou des maladies ne constitue pas, en soi, des “ dangers ” au sens du Code.

Dans le cas d’un danger au sens général du terme, le risque de blessure ou de maladie demeure possible, donc hypothétique, et sa réalisation peut se faire à plus ou moins long terme. À ce moment, l’agent de sécurité ne possède ou n’a recueilli aucun fait précis pendant son enquête ou aucun élément de preuve confirmant la réalisation immédiate de la blessure ou de la maladie à une personne exposée au risque ou à la situation. En somme, ce qui distingue un “ danger au sens du Code ” du “ danger au sens général ” est son caractère immédiat.

En l’espèce, l’agent de sécurité Mckay a témoigné que le danger était la “ possibilité ” hypothétique que des employés effectuant ce travail se fassent prendre ou écraser au point de pincement ou point de retenue de la chaîne, du wagon et du camion. Cependant, lorsqu’il a enquêté sur l’accident, personne devant lui n’était en train d’utiliser ou sur le point d’utiliser un véhicule non ferroviaire et un connecteur non rigide pour déplacer un wagon. Par conséquent, eu égard à la définition du mot “ danger ” qui figure dans le Code, à la jurisprudence applicable et aux faits particuliers de ce dossier, il n’existait pas un “ danger ” selon le Code parce que le danger perçu par l’agent de sécurité Mckay n’était pas réel, immédiat ou existant au moment de son enquête. Le simple fait qu’un accident ou une blessure se produise n’est pas la preuve qu’il existe un “ danger ” selon le Code.

Cela ne fait pas obstacle cependant à l’opinion des agents de sécurité selon laquelle il existait un “ danger ”[8] de répétition de l’accident et des blessures, selon le sens ordinaire de ce mot selon les dictionnaires. L’agent de sécurité Mckay a d’ailleurs témoigné que lui et l’agent de sécurité  Shultz avaient la certitude qu’il était possible que quelqu’un d’autre se trouve piégé et écrasé entre la chaîne et le wagon ou le camion. Cependant, pour régler ce problème, il leur fallait dire si la pratique du CN présentait des lacunes sur le plan de la sécurité et, dans l’affirmative, rattacher ces lacunes à des contraventions au Code. Si des contraventions existaient, ou si telles contraventions sont constatées, alors le paragraphe 145.(1) du Code autorise l’un ou l’autre des agents de sécurité à ordonner au CN de cesser la contravention et de préciser un délai de conformité, ou même l’obliger à se conformer immédiatement.

Sur ce point, M. Bourrier a soutenu que cette pratique de l’employeur contrevenait aux alinéas 125. i) et q) du Code, ainsi qu’au paragraphe 14.3(1), à l’article 14.15 et à l’alinéa 14.23.(1) c) du Règlement CSST et que ces contraventions devraient faire l’objet des instructions données par l’agent de sécurité Mckay le 11 février 1999. Cependant, en ma qualité d’agent régional de sécurité, je ne suis pas habilité par l’article 146 du Code à donner de nouvelles instructions selon le paragraphe 145(1). C’est à l’agent de sécurité qu’il appartient de le faire.

Pour les motifs ci-dessus, j’Annule par les présentes les instructions données au CN par l’agent de sécurité Mckay le 11 février 1999 conformément à l’alinéa 145.(2) a) du Code.

Décision rendue le 15 juillet 1999.

Douglas Malanka

Agent régional de sécurité

ANNEXE

CONCERNANT LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL,

PARTIE II – SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTIONS DONNÉES À L’EMPLOYEUR SELON L’ALINÉA 145(2) a)

Le 10 février 1999, l’agent de sécurité soussigné a effectué une enquête sur le lieu de travail exploité par la COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA, un employeur assujetti au Code canadien du travail, partie II, dans les ateliers SYMINGTON, sis au 821 BOULEVARD LAGIMODIERE, WINNIPEG, (MANITOBA), ledit lieu de travail étant parfois appelé les “ chantiers Symington ”.

Le soussigné considère qu’à tout endroit une circonstance constitue un danger pour un employé au travail :

Le raccordement d’un véhicule routier à un wagon à l’aide d’une chaîne en vue du déplacement du wagon constitue un danger pour les employés exécutant ce travail.

Il vous est en conséquence ORDONNÉ, conformément à l’alinéa 145(2) a) du Code canadien du travail, partie II, de protéger immédiatement toute personne contre ce danger.

Fait à Winnipeg, ce 11e jour de février 1999.

Terry McKay

Agent de sécurité

1877

À :       COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

            ATELIERS SYMINGTON

            831 BOULEVARD LAGIMODIERE

            WINNIPEG (MANITOBA)

            R3C 2Z6


 

SOMMAIRE DE LA DÉCISION DE L’AGENT RÉGIONAL DE SÉCURITÉ


Décision no:
            99-016

Demandeur :           Syndicat national de l’automobile

Intimée:                   Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

MOTS CLÉS:

Danger, accident mortel, mécanicien de wagon, véhicule non ferroviaire, chaînes, courroies, câbles, connecteurs non rigides, tracteurs rail-route, procédures, formation.

DISPOSITIONS:

Code: 122.(1), 125 i) et q), 145.(1), (2), (3) et (4), 146

Règlement : 14.3(1), 14.15 et 14.23(1)(c)

SOMMAIRE

Un employé de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) qui s’employait à déplacer un wagon vers un autre endroit à l’aide d’un véhicule non ferroviaire et d’une chaîne a été blessé mortellement lorsqu’il s’est trouvé pris entre la chaîne et le wagon. Après leur enquête préliminaire, les agents de sécurité ont décidé que l’accident établissait l’existence d’un danger selon le Code canadien du travail (le Code) relativement à la pratique suivie au CN. Ils ont ordonné au CN, en conformité avec l’alinéa 145(2) a) du Code, de protéger immédiatement toute personne contre le danger.

Après examen, l’agent régional de sécurité a établi qu’il n’existait pas de “ danger ”, selon la définition donnée par le Code, au moment de l’enquête de l’agent de sécurité, et il a annulé ses instructions.



[1] L’alinéa 145.(2) a) est rédigé ainsi:

“  145.(2) a)  S’il estime que l’utilisation d’une machine ou chose ou qu’une situation existant dans un lieu constitue un danger pour un employé au travail, l’agent de sécurité :

 (a)...len avertit l’employeur et lui enjoint, par des instructions écrites, de procéder, immédiatement ou dans le délai qu’il précise:

(i)   soit à la prise de mesures propres à parer au danger,

(ii)  soit à la protection des personnes contre ce danger…”

[2] L’alinéa 145.(2) b) est rédigé ainsi:

“145.(2) b)  [l’agent de sécurité] peut en outre, s’il estime qu’il est impossible dans l’immédiat de parer à ce danger ou de prendre des mesures de protection, interdire, par des instructions écrites données à l’employeur, l’utilisation du lieu, de la machine ou de la chose en cause jusqu’à ce que ses instructions  aient été exécutées, le présent alinéa n’ayant toutefois pas pour objet d’empêcher toute mesure nécessaire à la mise en œuvre de l’interdiction.”

[3] Le paragraphe 145.(3) est rédigé ainsi:

“145.(3).Dans le cas visé à l’alinéa (2) b), l’agent de sécurité qui formule l’interdiction appose dans le lieu, sur la machine ou la chose en cause, ou à proximité de ceux-ci, un avis en la forme et la teneur que le ministre peut préciser. Il est interdit d’enlever l’avis sans l’autorisation de l’agent.”

[4] Le paragraphe 145.(4) est rédigé ainsi:

“145.(4) Dans le cas visé à l’alinéa (2) b), l’employeur doit cesser d’utiliser le lieu, la machine ou la chose en cause et il est interdit à quiconque de les utiliser tant que les mesures ordonnées par l’agent de sécurité n’ont pas été prises.”

[5] L:alinéa 125. i) est rédigé ainsi:

“125. Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité:

(i).dde veiller à ce que les véhicules et l’équipement mobile que ses employés utilisent pour leur travail soient conformes aux normes réglementaires de sécurité;”

[6] L’alinéa 125 q) est rédigé ainsi:

“125. Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité:

q)...d’offrir à chaque employé, de la manière réglementaire, l’information, la formation, l’entraînement et la surveillance nécessaires pour assurer sa sécurité et sa santé;”

[7] Règlement canadien sur la sécurité et la santé au travail, partie XIV:

“14.3(1) L’appareil de manutention motorisé ou manuel doit, dans la mesure où cela est en pratique possible, être conçu et construit de manière à n’entraîner, en cas de défaillance de l’une de ses parties, ni risques ni perte de contrôle.”

“14.15 L’appareil de manutention motorisé doit être muni de mécanismes de freinage et de direction et d’autres mécanismes de contrôle qui:

a)       permettent de régler et d’arrêter son mouvement et celui de tout treuil, benne ou autre pièce qui en fait partie; …”

“14.23(1) c) Sous réserve du paragraphe (2), l’employeur doit veiller à ce que tout opérateur d’un appareil de manutention motorisé ait reçu la formation et l’entraînement portant sur la marche à suivre pour:

c)   l’utiliser convenablement et en toute sécurité, conformément aux instructions du fabricant et en tenant compte des conditions du lieu de travail où il sera utilisé.”

[8] Le Petit Robert, édition de 1991, définit ainsi le mot danger: ce qui menace ou compromet la sûreté, l’existence d’une personne ou d’une chose; situation qui en résulte, et il établit un rapport de sens avec les mots “péril”, “menace” et “risque”.

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