Archivée - Code canadien du travail Partie II Santé et sécurité au travail

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Swanberg Bros. Trucking Ltd.
demandeur

et

Dale Pinnell
défendeur
________________________________
No de la décision 05-009
Le 7 février 2005

Cette affaire a été entendue par l'agent d'appel Thomas Farrell, à Edson, Alberta, le 1er décembre 2004.

Étaient présents

Pour le demandeur
Gene Gauthier, directeur général, Swanberg Bros. Trucking Ltd.

Pour les employés
Dale Pinnell

Agent de santé et de sécurité
Derek Becker, Ressources humaines et développement des compétences Canada (RHDCC), Programme du travail, région de l'Alberta

[1] Cette affaire concerne un appel déposé en vertu de l'article 146 de la partie II du Code canadien du travail, (le Code), le 21 juillet 2003, par Gordon Dixon, au nom de Swanberg Bros. Trucking Ltd. (Swanberg).

[2] L'appel a été déposé par suite d'une instruction émise le 3 juillet 2003 par l'agent de santé et de sécurité Derek Becker en vertu du paragraphe 145(1) du Code, après enquête sur un accident subi par Dayton Hennig, employé de Swanberg, à un site de forage.

[3] Dayton Hennig, signaleur sur véhicule motorisé (signaleur), a été blessé en essayant de monter sur un véhicule Commander C (le Commander), propriété de Swanberg, conduit par Dale Miller, pendant qu'il était en mouvement. Dayton Hennig a glissé sous le pneu gauche avant du véhicule, qui a roulé sur sa jambe et sa hanche gauches. Il a souffert de blessures mineures.

[4] Par suite de son enquête, l'agent de santé et de sécurité Becker a émis à Swanberg une instruction en quatre points.

[5] Le 14 juillet 2003, Jim Donald, superviseur des ressources humaines et de la sécurité de Swanberg, a répondu à l'instruction émise par l'agent de santé et de sécurité Becker. Il a également déclaré que Swanberg souhaitait en appeler du deuxième point de l'instruction, relativement à une contravention à l'alinéa 125(1)l) du Code et au paragraphe 14.27(1) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail (RCSST).

[6] Le deuxième point de l'instruction se lit comme suit :

[TRADUCTION] L'enquête a indiqué que, le 20 juin 2003, l'employé Dayton Hennig ne disposait pas d'un moyen de communication efficace entre lui-même et le conducteur du Commander C numéro 196.

[7] Je retiens les points suivants des arguments écrits présentés par l'employeur et ceux présentés par G. Gauthier à l'audience. L'employeur a décrit la nature des activités d'un site de forage et les conditions de travail courantes durant la mise en place ou le démantèlement d'un site de forage gazier ou pétrolier.

[8] Le Commander fait le travail d'un camion à plate-forme quand le terrain est trop mou ou boueux. Il est conçu pour transporter des charges lourdes sur des surfaces instables et de réduire au minimum les dommages causés au terrain. La hauteur de la plate-forme à l'arrière du véhicule est de plus de six pieds. Il s'y trouve une caméra et un microphone. À l'avant, on trouve également une caméra. Le tout est relié à un écran placé à droite du conducteur pour permettre au signaleur de communiquer avec le conducteur pendant l'accrochage ou le décrochage d'équipement à l'arrière. La caméra installée du côté droit du véhicule facilite les manœuvres en marche arrière pendant que le signaleur le dirige du côté gauche.

[9] G. Gauthier a décrit les pratiques de sécurité de l'entreprise qui, entre autres choses, défendent de monter à bord d'un véhicule en mouvement. Il a aussi que le conducteur aux commandes du véhicule Commander au moment de l'accident avait refusé toute responsabilité relativement à la contravention aux règles de sécurité de Swanberg Bros., particulièrement en raison du fait que ces règles exigent que le conducteur garde un contact visuel permanent avec le signaleur et que le signaleur ne monte pas à bord d'un véhicule en mouvement.

[10] M. Gauthier a signalé qu'après avoir reçu l'instruction, l'entreprise a fourni des radios aux signaleurs. Toutefois, il a observé que ces radios peuvent elles-mêmes entraîner un danger en raison des rudes conditions de travail des sites de forage et du risque que le conducteur du véhicule confonde un appel avec un autre. Il a insisté sur le fait qu'un conducteur ne doit pas déplacer le véhicule s'il ne voit pas le signaleur.

[11] Dans son exposé écrit contestant l'instruction, Jim Donald a déclaré que l'industrie avait déjà mis à l'essai l'utilisation de radios pour les signaleurs et que cette pratique avait causé autant, sinon plus, de problèmes qu'elle en avait résolus. Les conducteurs et les signaleurs ont également essayé des appareils portatifs. Les conducteurs devaient également surveiller les radios de camion à camion et communiquer avec les conducteurs de tracteur et d'autres véhicules et utiliser une autre radio sur une fréquence différente pour communiquer avec les signaleurs. L'utilisation simultanée de deux radios causait trop d'interférence et causait davantage de danger qu'elle en évitait. Comme les signaleurs travaillaient souvent à l'humidité et dans la boue, la radio tombait souvent en panne. L'employeur leur avait également fourni des micros-cravates, mais ils se couvraient aussi de boue. De plus, le signal de marche arrière produisait beaucoup d'interférence pour les radios. Si le signaleur se trouve hors du champ de vision du conducteur, le signal peut brouiller la communication et entraîner un danger.

[12] Au cours des dernières années, l'entreprise a discuté de la question avec son comité de santé et de sécurité et, plus récemment, avec les conducteurs, les superviseurs et les ouvriers travaillant sur la plate-forme des véhicules. Elle est toujours arrivée à la conclusion que la pratique la plus sûre était de demeurer visible et d'utiliser des signaux visuels.

[13] Quelques années auparavant, on avait tenu des réunions pour discuter d'une série de blessures et de décès survenus dans l'industrie. La majorité des incidents concernaient des employés travaillant à proximité de véhicules en mouvement. Des agents de santé et de sécurité de la Commission des accidents du travail et de RHDCC et des représentants de l'industrie ont participé à des discussions sur la prévention des accidents. Ils se sont entendus pour dire que la législation était adéquate et que l'industrie disposait des ressources suffisantes en formation et que les conducteurs devaient savoir en tout temps ou se trouvaient les signaleurs et que, sinon, ils devaient s'abstenir de déplacer leur véhicule.

[14] Pour sa part, Dale Pinnell a présenté d'autres renseignements du point de vue du conducteur qui ont renforcé la position de G. Gauthier. Il a parlé du risque de confusion qui se trouvait accru quand les communications radios provenaient de diverses sources et de la difficulté pour le conducteur du véhicule d'identifier l'émetteur, car les voix transmises par radio se ressemblent beaucoup.

[15] L'agent de santé et de sécurité Becker a déclaré que sa principale préoccupation au sujet du point 2 de l'instruction avait trait à l'interprétation du paragraphe 14.27(1) du RCSST et à la clarification de l'expression « doit fournir ».

[16] Il a aussi présenté une lettre de Keith Parent, gestionnaire de la santé, de la sécurité et de l'environnement de F I Oilfield Services Canada Ltd., qui prônait l'utilisation de radios par les signaleurs. Dans cette lettre, K. Parent fait état de son expérience de gestionnaire de la sécurité dans une autre entreprise qui utilisait des radios bidirectionnelles portatives pour maintenir le contact entre le signaleur et le conducteur et déclare que « cela s'est avéré un outil inestimable pour le conducteur et le signaleur ». K. Parent concluait sa lettre de la façon suivante :

[TRADUCTION] L'entreprise a constamment préconisé le recours au contact visuel et les signaux visuels entre le conducteur et le signaleur, mais la radio leur a donné un autre moyen de communication pour mieux promouvoir la sécurité durant les manœuvres dangereuses.

**********

Décision

[17] La question à régler, dans cet appel, est de savoir si oui ou non Swanberg Bros. Trucking Ltd. était en contravention de l'alinéa 125 (1)l) de la partie II du Code canadien du travail et du paragraphe 14.27(1) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, comme l'indique l'instruction.

[18] L'alinéa 125(1)l) du Code se lit comme suit :

125(1) Dans le cadre de l'obligation générale définie à l'article 124, l'employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève :

l) de fournir le matériel, l'équipement, les dispositifs et les vêtements de sécurité réglementaires à toute personne à qui il permet l'accès du lieu de travail[.]

[19] Le paragraphe 14.27(1) du RCSST stipule que l'employeur doit fournir au signaleur des dispositifs de communication quand l'utilisation de signaux visuels ne suffit pas. Il se lit comme suit :

14.27(1) Sous réserve du paragraphe (2), lorsque l'utilisation de signaux visuels ne constitue pas un moyen de communication efficace pour le signaleur, l'employeur doit fournir à celui-ci et à l'opérateur un téléphone, une radio ou tout autre dispositif de signalisation sonore.

[20] L'accident qui s'est produit résulte directement d'une contravention aux procédures de fonctionnement de Swanberg. D'une part, le signaleur connaissait les procédures correctes. D'autre par, si le conducteur du véhicule avait suivi ces procédures, il n'aurait pas déplacé le véhicule sans contact visuel avec le signaleur et il ne lui aurait pas permis d'essayer de monter dans un véhicule en mouvement.

[21] Dans son témoignage, le directeur général G. Gauthier a déclaré que la politique de l'employeur en matière de santé et de sécurité stipule clairement que le véhicule ne doit pas être en mouvement quand le conducteur ne peut voir le signaleur.

[22] Le représentant et le défendeur de l'employeur ne croyaient pas que le fait de fournir des radios aux signaleurs améliorait la sécurité du lieu de travail et estimaient qu'en de nombreux cas, cela introduisait un facteur de confusion dans les communications.

[23] Le 7 juillet 2003, l'employeur a émis un avis de sécurité à tous les superviseurs et aux conducteurs relativement à la conduite des véhicules et au fait d'y monter pendant qu'ils sont en mouvement. Il les a informés de l'enquête de l'agent de santé et de sécurité et leur a donné les conseils suivants :

  • aux superviseurs :
  • qu'il faisait partie de leurs attributions d'avertir immédiatement un employé ou un conducteur de ne pas monter dans un véhicule en mouvement et de ne pas permettre à un autre employé de le faire ou de mettre sa sécurité en péril de toute autre manière;
  • aux conducteurs :
  • de ne pas laisser un signaleur monter dans un véhicule en mouvement ou en descendre, auquel cas, ils seront tenus responsables des conséquences;
  • de ne jamais perdre de vue leur signaleur;
  • de s'arrêter et de reprendre un contact visuel avec leur signaleur s'ils le perdent de vue.

[24] L'alinéa 14.27(1) du RCSST fait référence aux situations où « l'utilisation de signaux visuels ne constitue pas un moyen de communication efficace pour le signaleur ».

[25] J'estime que la politique de sécurité de Swanberg qui exige que le conducteur du véhicule maintiennent un contact visuel constant avec le signaleur pendant que le véhicule est en mouvement et qui impose l'utilisation de signaux visuels assure le plus haut niveau de protection possible.

[26] En outre, les conditions de travail courantes dans ce type de lieu (ornières profondes, boue et activité intense) rendent les autres moyens de communication peu fiables et peuvent accroître le niveau de danger.

[27] Les deux parties m'ont convaincu du risque d'utiliser une radio pour le signaleur et je pense aussi que le meilleur moyen d'assurer la sécurité du signaleur est un contact visuel constant avec le conducteur et l'arrêt du véhicule quand ce contact est rompu.

[28] Pour ces raisons, en vertu de l'autorité qui m'est conférée par l'alinéa 146.1(1)(a) de la partie II du Code, j'annule le point 2 de l'instruction émise le 3 juillet 2003 par l'agent de santé et de sécurité Derek Becker, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION] 2. Alinéa 125.(1)l) de la partie II du Code canadien du travail, paragraphe 14.27(1) du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

L'enquête a indiqué que, le 20 juin 2003, l'employé Dayton Hennig ne disposait pas d'un moyen de communication efficace entre lui-même et le conducteur du Commander C numéro 196.



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Tom Farrell
Agent d'appel

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