Archivée - Décision: 05-051 Code canadien du travail Partie II Santé et sécurité au travail
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Randy Betts
Jay Sadowy
demandeurs
et
Compagnie de chemins de fer nationaux du Canada
défendeur
________________________________
No de la décision 05-051
Le 19 décembre 2005
La présente affaire a été entendue par l'agent d'appel Tom Farrell à Winnipeg (Manitoba), le 30 septembre 2005.
Personnes présentes
Pour les demandeurs
Gerry Michasiw, coprésident, Comité de la santé, de la sécurité et de l'environnement de travail.
Syndicat des Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA), Canadien national (CN), Symington
Centre de fiabilité pour locomotives, Winnipeg (Manitoba)
Jay Sadowy, aide-mécanicien de manoeuvre, Centre de fiabilité pour locomotives du CN, Symington
Randy Betts, mécanicien de manœuvre, Centre de fiabilité pour locomotives du CN, Symington
Rick Doherty, TCA, section locale 100
Pour le défendeur
L. Michel Huart, avocat, CN
Gary Foster, gestionnaire adjoint, Centre de fiabilité pour locomotives du CN, Symington
Ed Falardeau, gestionnaire des risques, CN, Division des Prairies
Douglas Wylie, hygiéniste du travail, O.H.G. Consulting
Agent de santé et de sécurité
Alex Kozubal, Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC), Programme du travail, région du Manitoba
[1] La présente affaire porte sur un appel interjeté en vertu du paragraphe 129(7) de la partie II du Code canadien du travail, par Gerry Michasiw, coprésident représentant la TCA au Comité de la santé, de la sécurité et de l'environnement au travail de la gare de triage de Symington du CN, Centre de fiabilité pour locomotives, à Winnipeg (Manitoba), contre la décision d'absence de danger rendue par l'agent de santé et de sécurité (ASS) Alex Kozubal, faisant suite à un refus de travailler de deux employés à la gare de triage de Symington.
[2] Le 6 août 2004, vers 16 h 30, deux employés de la gare de triage de Symington, Jay Sadowy, aide-mécanicien de manœuvre, et Randy Betts, mécanicien de manœuvre, ont été affectés au lavage des locomotives stationnées à la gare de triage.
[3] Randy Betts a expliqué qu'il avait demandé de l'équipement protecteur pour ce travail et qu'on lui avait remis un imperméable de style poncho. Après avoir travaillé 40 minutes, il était tout en sueur, se sentait faible et avait la nausée. Le poncho était très ample et s'accrochait aux poteaux et aux poignées. Lorsqu'il a demandé à Gary Foster, gestionnaire adjoint du Centre de fiabilité pour locomotives, de lui fournir un vêtement en Tyvek, on lui a indiqué qu'on lui fournirait un vêtement imperméable. M. Betts a fait savoir à Gary Foster qu'il jugeait cette solution encore pire que le poncho, après quoi Gary Foster a demandé à Randy Betts s'il refusait de travailler. M. Betts a répondu que sans vêtement de protection convenable, il refusait effectivement de travailler. Gary Foster a donc appelé le Programme du travail pour demander la tenue d'une enquête de santé et sécurité sur la situation.
[4] Pour sa part, Jay Sadowy a expliqué qu'il avait été affecté à la fosse de lavage. Avant de commencer à travailler, il a demandé l'équipement protecteur convenable pour ce travail, et on lui a remis un nouvel imperméable de style poncho. Après l'avoir porté environ 30 minutes, il était tout en sueur. Il a en outre fait savoir que le poncho était trop ample et qu'il s'accrochait aux mains courantes et aux escaliers. Il a remarqué qu'un autre employé qui avait dû quitter le travail pour épuisement en raison de la chaleur s'était vu remettre un vêtement jetable en papier. Il a demandé un vêtement protecteur différent du poncho, et on lui a répondu qu'on n'avait rien d'autre à lui offrir qu'un imperméable. Jay Sadowy a lui aussi refusé de travailler si on ne lui fournissait pas l'équipement approprié.
[5] L'agent de santé et de sécurité Alex Kozubal, accompagné de Gord Logan, agent des affaires du travail, s'est rendu sur les lieux de travail à environ 18 h 20 pour enquêter sur les deux refus de travailler.
[6] Après avoir mené son enquête, l'ASS Kozubal a conclu que ni l'un ni l'autre des deux employés ne courait de danger au sens de la définition fournie à la partie II du Code canadien du travail. Gerry Michasiw a interjeté appel contre cette décision le 14 août 2004.
[7] Gerry Michasiw a fait valoir que, selon le syndicat, la décision de l'ASS s'appuyait sur des renseignements inexacts puisqu'elle était fondée sur le rapport de Douglas Wylie, un hygiéniste du travail à qui le CN avait confié le mandat d'examiner l'utilisation de l'équipement de protection personnelle qu'il fournit à ses employés.
[8] Gerry Michasiw a en outre déclaré qu'il ne pouvait pas ordonner à l'employeur de fournir un type spécifique d'équipement de protection personnelle, mais il a invoqué une décision rendue par l'agent de santé et de sécurité Richard Dupuis le 23 février 1989 concernant l'atelier du CN à Pointe Saint-Charles, à Montréal. Dans cette instruction on précisait :
« [TRADUCTION] les vêtements protecteurs doivent résister aux huiles de manière à empêcher tout contact avec la peau tout en étant confortables pour le travailleur qui les porte afin de ne pas entraver le travail et d'éviter d'engendrer d'autres risques superflus pour la santé et la sécurité du travailleur. »
[9] Gerry Michasiw a indiqué qu'il avait examiné les divers types d'équipement protecteur sur le marché. Il estime préférable d'utiliser les vêtements jetables pour le travail en question plutôt que des imperméables. Il s'est dit préoccupé par l'augmentation considérable du potentiel de stress thermique et de coups de chaleur lorsque les travailleurs portent des vêtements qui empêchent la circulation de l'air et qui ne conviennent pas pour la tâche à accomplir. Il a ajouté que l'équipement de protection personnelle devait répondre aux besoins spécifiques de chaque personne.
[10] Gerry Michasiw a indiqué qu'il avait déjà eu des discussions avec les représentants du Programme du travail, la direction du CN et l'agent de santé et de sécurité Alex Kozubal à ce sujet avant les deux refus de travailler dont il est ici question. À l'époque, l'ASS Kozubal avait indiqué qu'il remettrait peut-être une instruction au CN lui enjoignant de fournir de l'équipement de protection personnelle convenable à ses employés. Il ne l'a pas fait.
[11] Gerry Michasiw a aussi ajouté que les ponchos et les imperméables fournis étaient tellement inconfortables que certains employés préféraient porter des sacs de plastique, et que l'agent de santé et de sécurité avait émis une instruction verbale à l'effet qu'il fallait fournir de l'équipement correct. Gary Foster avait donc fait distribuer des imperméables.
[12] L. Michel Huart a souligné que l'affaire portait sur l'utilisation de vêtements de marques spécifiques. Il a indiqué que le CN avait aboli l'utilisation de vêtements en Tyvek pour la plupart des travaux de lavage. Il a fait savoir qu'il entendait fournir de l'information à l'audience sur la fourniture d'équipement de protection personnelle et qu'il décrirait la formation que le CN donne à ses employés sur l'utilisation de l'équipement de protection personnelle.
[13] L. Michel Huart a appelé Gary Foster et a demandé qu'on l'assermente.
[14] Gary Foster a indiqué qu'un chef de quart était venu à son bureau pour l'informer que des employés étaient sur le point de refuser de travailler. M. Foster a demandé des détails et, pendant la conversation, Randy Betts est arrivé. Gary Foster lui a expliqué pourquoi le CN procédait ainsi, puis Randy Betts a signifié son refus de travailler.
[15] L. Michel Huart a remis une copie du formulaire de refus de travail à Gary Foster et lui a demandé de donner son avis sur l'énoncé de Randy Betts à l'effet qu'un travailleur du quart précédent avait pu utiliser un vêtement en Tyvek. Gary Foster a expliqué que le vêtement en Tyvek avait été utilisé parce qu'il y avait des débris d'origine animale sur la locomotive que cet employé avait eu à laver.
[16] En se fondant sur l'information fournie, Douglas Wylie, l'hygiéniste industriel dont le CN avait retenu les services, a examiné l'équipement fourni, c.-à-d. les imperméables, et il a convenu que l'équipement de protection personnelle fourni répondait aux besoins de la tâche à accomplir.
[17] L. Michel Huart a ensuite demandé à Gary Foster de lire la page 3 d'un document de 130 pages de Gerry Michasiw, soit une Demande de révision en vertu du paragraphe 146.1(1) du partie II du Code canadien du travail, d'une décision de l'agent de santé et de sécurité remise à l'employeur, la Compagnie de chemins de fer nationaux du Canada, Centre de fiabilité pour les locomotives, à Symington, Winnipeg (Manitoba), le 6 août 2004. Ce rapport, daté du 3 septembre 2004, fait mention d'une demande d'indemnisation pour coup de chaleur déposée par un autre travailleur. Gary Foster a indiqué que la Commission des accidents de travail avait rejeté la demande et que deux autres cas n'avaient même pas généré de demandes d'indemnisation à titre d'accidents de travail.
[18] L. Michel Huart a aussi présenté les documents suivants :
- Norme du CN sur les vêtements protecteurs
- Norme du CN sur l'équipement de protection personnelle
- Note de service du 6 août 2004 rédigée par Terry Corson sur la nécessité de mettre fin à l'utilisation des vêtements en Tyvek
- Bulletin de sécurité du CN, redistribué en juin 2003, sur les problèmes de santé liés à la chaleur.
Gary Foster a fait remarquer que les documents énumérés ci-dessus décrivent les normes établies par le CN pour faire en sorte que les travailleurs utilisent l'équipement approprié afin d'assurer une bonne protection et établir des pratiques de travail sécuritaires. Gary Foster a ensuite souligné que même si les travailleurs préféraient utiliser les vêtements en Tyvek plutôt que les imperméables, ceux qui utilisaient les vêtements en Tyvek se faisaient mouiller alors qu'ils restaient au sec en utilisant les imperméables ou les tabliers.
[19] Gary Foster a ensuite présenté l'équipement de protection personnelle mis à la disposition des travailleurs qui exécutent ce genre de tâche. Il a en outre expliqué les modifications apportées à l'équipement pour satisfaire les demandes des travailleurs et en rehausser le confort.
[20] Rick Doherty a demandé des précisions à Gary Foster sur le fait que les trois employés qui prétendaient avoir souffert d'un coup de chaleur s'étaient absentés du travail. Gary Foster a confirmé qu'ils avaient bel et bien manqué au travail.
[21] Rick Doherty a ensuite demandé s'il était vrai qu'il n'y avait plus d'imperméables noirs depuis six mois. Gary Foster a répondu qu'il s'était procuré un imperméable noir la veille de l'audience. M. Doherty a demandé à M. Foster s'il savait que certains travailleurs portaient des sacs à poubelle dans lesquels ils perçaient des trous pour les bras. M. Foster a confirmé que cela s'était produit à quelques reprises.
[22] Gerry Michasiw a indiqué que les imperméables noirs n'avaient pas été achetés au cours des six derniers mois, que ces vêtements ne comportaient pas de trous de ventilation et que les vêtements conçus pour laisser passer l'air coûtaient 120 $ chacun. À ce moment-là, Gerry Michasiw a montré un vêtement jetable en Tyvek sali en expliquant que celui-ci avait bien bloqué la saleté, mais qu'il avait laissé passer l'humidité.
[23] L. Michel Huart a appelé Ed Falardeau, gestionnaire des risques du CN pour la Division des Prairies, et lui a demandé de faire la lumière sur l'équipement de protection personnelle et l'expérience du CN lorsqu'il s'est agi de trouver des imperméables qui permettent à l'air de circuler. M. Falardeau a indiqué que le Comité de santé et de sécurité avait déjà procédé à cette recherche, mais qu'il n'avait eu aucune rétroaction des travailleurs sur ce point.
[24] M. Falardeau a indiqué que les travailleurs utilisaient les vêtements en Tyvek à mauvais escient, raison pour laquelle on avait décidé d'utiliser des imperméables. Il a indiqué qu'on utilise ce type d'équipement dans des conditions identiques dans les ateliers du CN à Edmonton.
[25] L. Michel Huart a demandé au consultant en hygiène industrielle, M. Douglas Wylie, d'expliquer son rapport sur les dangers que l'on peut courir en lavant une locomotive. M. Wylie a précisé qu'en examinant les contaminants que l'on enlevait des locomotives, il avait déterminé qu'ils étaient bien inférieurs aux seuils limites d'exposition, que les imperméables procuraient une protection suffisante aux travailleurs qui lavaient les locomotives et que le fait de permettre aux travailleurs de prendre des pauses fréquentes permettait de réduire suffisamment les risques de coup de chaleur.
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[26] La présente affaire découle du fait que deux travailleurs du CN, Centre de fiabilité pour les locomotives, gare de triage de Symington, soit Jay Sadowy, aide-mécanicien de manœuvre, et Randy Betts, mécanicien de manœuvre, ont exercé leur droit de refuser de travailler le 6 août 2004.
[27] La question en litige portait sur la décision de l'employeur de continuer de fournir aux travailleurs affectés au lavage des locomotives de l'équipement de protection personnelle, c.-à-d. des ponchos, des tabliers et des imperméables, mais de ne plus utiliser les vêtements jetables qu'on leur fournissait auparavant.
[28] En prenant connaissance des témoignages et des preuves des demandeurs et du défendeur, j'en suis venu à la conclusion qu'il s'agit d'une question qui aurait dû être réglée par le Comité de santé et de sécurité.
[29] À mon avis, l'utilisation de vêtements en Tyvek n'assure pas une protection suffisante aux travailleurs qui lavent les locomotives. Je me fonde sur les comparaisons de l'hygiéniste industriel Douglas Wylie avec les vêtements que les pompiers utilisent dans leurs interventions et le degré de stress qui découle du port de tels vêtements. L'équipement de protection personnelle doit procurer la meilleure protection possible aux travailleurs, un critère que le papier ne peut tout simplement pas satisfaire.
[30] Étant donné l'équipement fourni aux travailleurs affectés au lavage des locomotives et les procédures liées à la fréquence des pauses pour permettre aux travailleurs de se réhydrater, je confirme l'absence de danger selon la définition de la partie II du Code canadien du travail.
[31] Par conséquent, je confirme la décision émise par l'agent de santé et de sécurité Alex Kozubal à l'effet que l'activité menée par les employés Jay Sadowy et Randy Betts ne correspondait pas à la définition de danger fournie à la partie II du Code canadien du travail, étant donné que l'équipement fourni donnait aux travailleurs un degré de protection bien supérieur à celui offert par les vêtements de papier en Tyvek. La sélection et la disponibilité de l'équipement nécessaire pour protéger les travailleurs qui lavent les locomotives sont des questions qui relèvent du Comité de santé et de sécurité de l'atelier.
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Tom Farrell
Agent d'appel
Sommaire de la décision de l'agent d'appel
No de la décision : 05-051
Demandeur : Randy Betts, Jay Sadowy
Défendeur : La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada
Mots-clés : Refus de travailler, locomotives, lavage, gare de triage, équipement de protection personnelle.
Disposition : | Code canadien du travail 129(7), 146.1(1) Règlement |
Sommaire :
Deux employés de la gare de triage Symington ont refusé de travailler parce qu'ils estimaient que leur employeur ne leur avait pas fourni d'équipement de protection personnelle valable pour laver des locomotives à la gare de triage. Après enquête sur les refus de travailler, l'agent de santé et de sécurité a décidé que ni l'un ni l'autre des deux employés ne couraient de danger.
Dans le cadre d'un examen entrepris à la suite d'un appel interjeté par les employés, l'agent d'appel s'est prononcé en faveur de la décision de l'agent de santé et de sécurité à l'effet qu'il n'existait aucun danger pour les employés et a confirmé la décision de l'agent de santé et de sécurité.
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