Archivée - Décision: 06-003(S) Code canadien du travail Partie II Santé et sécurité au travail

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Canadien Pacifique Ltée
Demandeur

et

Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA)
Défendeur
___________________________
No de la décision 06-003 (S)
Le 30 janvier 2006

Cette demande de sursis a été entendue par l'agent d'appel Douglas Malanka le 26 janvier 2006. Sa décision a été rendue le même jour.

Pour le demandeur
Bob Tully, spécialiste de la sécurité des services de mécanique, Canadien Pacifique Ltée

Pour le défendeur
Jim Wilson, coordonnateur national de la santé et de la sécurité, Travailleurs canadiens de l'automobile, (TCA) section locale 101
Mario Galli, coprésident des employés du Comité de santé et de sécurité au travail

Agent de santé et de sécurité
Todd Campbell
Ressources humaines et Développement des compétences Canada
Programme du travail, Vancouver (Colombie-Britannique)

[1] Cette décision concerne la demande de sursis à l'endroit du troisième point de l'instruction remise par l'agent de santé et de sécurité (l'ASS) Todd Campbell au Canadien Pacifique Ltée (CP) le 28 novembre 2005, en vertu des alinéas 145(1)a) et b) de la partie II du Code canadien du travail (le Code). L'ASS Campbell a émis l'instruction par suite de son enquête sur un accident qui s'est produit à la cour de triage du CP à Port Coquitlam et qui a entraîné le décès de Dennis Sokoliuk, manœuvre-aiguilleur du CP.

[2] Le point 3 de l'instruction émise par l'ASS Campbell au CP se lit comme suit :

CONCERNANT LA PARTIE II DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL
SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L'EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 10 janvier 2005, le soussigné agent de santé et de sécurité a mené une enquête sur le décès au travail de Dennis Sokoliuk, manœuvre-aiguilleur de Canadien Pacifique Ltée, employeur assujetti au Code canadien du travail, à la cour de triage située au 1250, route Lougheed, à Port Coquitlam en Colombie-Britannique, lieu de travail exploité par l'employeur.

Ledit agent de santé et de sécurité est d'avis qu'il y a eu contravention aux dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail :

.....
3. l'article 124 de la partie II du Code canadien du travail (termes directionnels)

L'employeur n'a pas assuré la protection de la santé et de la sécurité de ses employés affectés à l'aiguillage, car il a enseigné à ces employés l'utilisation de termes imprécis comme « avancer », « reculer », « en avant » et « en arrière » pour indiquer la direction du mouvement des wagons aux conducteurs des locomotives. Comme le sens de ces termes dépend de l'orientation variable de la locomotive, parfois hors du champ de vision de l'aiguilleur, ses instructions peuvent être mal interprétées et le conducteur de locomotive peut réagir de façon opposée à l'intention de l'aiguilleur.

En conséquence, je vous ORDONNE PAR LA PRÉSENTE, en vertu de l'alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail, de mettre fin à la contravention au plus tard le 31 janvier 2006.

De plus, je vous ORDONNE PAR LA PRÉSENTE, en vertu de l'alinéa 145(1)b) de la partie II du Code canadien du travail, dans les délais précisés par l'agent de santé et de sécurité, de prendre des mesures pour mettre fin à la contravention et éviter qu'elle se reproduise.

[3] Une conférence téléphonique pour entendre les arguments motivant la demande de sursis a eu lieu le 26 janvier 2006. Les deux parties et l'agent de santé et de sécurité y participaient.

[4] Avant la conférence téléphonique, B. Tully a présenté par écrit à l'agent d'appel les raisons de sa demande de sursis à l'instruction. Dans sa demande, il a fait indirectement référence à la décision Manitoba (P.G.) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 RCS 110, 1987 : 3 juin, dossier 19609 et soutenu les arguments suivants :

  • L'affaire pose une question grave. L'enjeu en est la santé et la sécurité de tous les employés du CP affectés à l'aiguillage de l'équipement ferroviaire dans ses installations de mécanique;
  • Le CP subira des torts irrémédiables si le sursis n'est pas accordé. Se conformer à l'instruction forcera le CP à fonctionner d'une façon non conforme au Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REFC) et fera subir un risque inutile à ses employés. La règle 12.2 du REFC exige que l'indication des manœuvres d'aiguillage soit donnée par rapport à l'avant de l'engin quand on utilise une radio pour les contrôler. En outre, changer les termes directionnels créerait une confusion chez les employés du CP, réduirait l'efficacité de ses activités et, surtout, mettrait en danger ses employés;
  • Si le CP se conforme au point 3 de l'instruction de l'ASS Campbell, cela entraînera de la confusion chez ses employés au détriment de leur sécurité et de l'efficacité des activités de la compagnie. Le CP et ses employés subiront des inconvénients importants si le sursis n'est pas accordé.

[5] Durant la conférence téléphonique, l'ASS Campbell a déclaré qu'il ne s'opposait pas à un sursis au point 3 de son instruction, car rien n'indiquait que la situation décrite au point 3 de son instruction était la cause directe de l'accident. En outre, il était d'accord avec les parties pour dire que se conformer immédiatement au point 3 de l'instruction risquait de causer de la confusion pour les employés du CP si l'instruction était par la suite annulée ou modifiée par un agent d'appel.

[6] Entre-temps, pour assurer la protection des employés, si le sursis était accordé, M. Tully a accepté que le CP se conforme aux points 1 et 2 de l'instruction au plus tard le 31 janvier 2006, date indiquée dans l'instruction. Les points 1 et 2 de l'instruction se lisent comme suit :


CONCERNANT LA PARTIE II DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL
SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

INSTRUCTION À L'EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 10 janvier 2005, le soussigné agent de santé et de sécurité a mené une enquête sur le décès au travail de Dennis Sokoliuk, manœuvre-aiguilleur de Canadien Pacifique Ltée, employeur assujetti au Code canadien du travail, à la cour de triage située au 1250, route Lougheed, à Port Coquitlam en Colombie-Britannique, lieu de travail exploité par l'employeur.

Ledit agent de santé et de sécurité est d'avis qu'il y a eu contravention aux dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail :

  1. l'article 124 de la partie II du Code canadien du travail (formation / évaluation)

    L'employeur n'a pas assuré la protection de la santé et de la sécurité de ses employés affectés à l'aiguillage et n'ayant pas rempli ces fonctions depuis longtemps, car il n'a pas fixé de période acceptable entre les séances de reformation officielle à l'intention de ces employés, y compris une évaluation objective de leur capacité à remplir ces fonctions de façon sécuritaire.

  2. l'article 124 de la partie II du Code canadien du travail (rapport du médecin)

L'employeur n'a pas assuré la protection de la santé et de la sécurité de ses employés qui reviennent au travail après un congé de maladie, car il n'a pas tenu compte de l'opinion négative du médecin sur la capacité d'un employé à revenir au travail, ni cherché à obtenir des précisions sur celle-ci, comme l'indique le rapport médical à remplir par le médecin traitant fourni par l'employeur.

....

En conséquence, je vous ORDONNE PAR LA PRÉSENTE, en vertu de l'alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail, de mettre fin à la contravention au plus tard le 31 janvier 2006.

De plus, je vous ORDONNE PAR LA PRÉSENTE, en vertu de l'alinéa 145(1)b) de la partie II du Code canadien du travail, dans les délais précisés par l'agent de santé et de sécurité, de prendre des mesures pour mettre fin à la contravention et éviter qu'elle se reproduise.

*****

[7] La question à régler dans cette affaire est de savoir s'il y a lieu d'accorder ou non un sursis à l'instruction en vertu du paragraphe 146(2) qui se lit comme suit :

146(2) À moins que l'agent d'appel n'en ordonne autrement à la demande de l'employeur, de l'employé ou du syndicat, l'appel n'a pas pour effet de suspendre la mise en œuvre des instructions.

[8] Pour les raisons suivantes, un sursis conditionnel est accordé jusqu'à ce qu'un agent d'appel entende la cause et rende une décision sur la demande du CP relativement au point 3 de l'instruction :

  1. les parties et l'ASS Campbell étaient d'accord pour dire que le CP et ses employés pouvaient subir des torts irrémédiables si le point 3 de l'instruction était appliqué avant qu'il fasse l'objet d'une décision finale d'un agent d'appel;
  2. l'ASS Campbell était d'avis que le problème de communication évoqué au point 3 de l'instruction n'était pas un facteur important dans l'accident qui a entraîné le décès de M. Sokoliuk;
  3. le CP a accepté de se conformer aux points 1 et 2 de l'instruction au plus tard le 31 janvier 2006, date stipulée dans l'instruction.

[9] Le sursis est conditionnel à la conformité du CP aux points 1 et 2 de l'instruction au plus tard le 31 janvier 2006.

[10] À cet égard, l'agent d'appel s'en remet à l'ASS Campbell pour qu'il s'assure que le CP respecte les conditions du sursis et pour qu'il prenne les mesures nécessaires si, durant la période de sursis, les circonstances changent de manière à mettre en péril la santé et la sécurité des employés concernés.




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Douglas Malanka
Agent d'appel

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