Archivée - Décison: 07-044-S Code canadien du travail Partie II Santé et sécurité au travail

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Dossier no : 2007-33

Décisions interlocutoires
Décision no : CAO-07-044 (S)

171817 Canada Inc. exploitée sous le nom de Artic Sunwest Charter
appelant

et

Patrick Mugony
intimé ___________________________
Le 21 décembre 2007

Cette demande de suspension a été tranchée par Pierre Guénette, agent d’appel, sur le fondement des plaidoiries des parties présentées le 18 décembre 2007 et des observations écrites de l’appelant soumises le 7 décembre 2007.

Pour l’appelant
Lawrence W. Olesen, avocat

Pour l’intimé
Patrick Mugony, employé représentant au sein du comité de santé et sécurité

[1] La présente décision concerne une demande de suspension d’une instruction donnée par l’agent de santé et sécurité (l’ASS) René Sheïr à la société 171817 Canada Inc. exploitée sous le nom de Artic Sunwest Charter le 21 novembre 2007, en vertu du paragraphe 145(1) de la partie II du Code canadien du travail (le Code).

[2] L’ASS Sheïr a donné cette instruction à la suite de son enquête sur une situation comportant un risque qui s’est produite le 3 janvier 2007, à proximité de Blatchford Lake Lodge, dans les Territoires du Nord-Ouest, qui a entraîné le décès d’un pilote employé par la société 171817 Canada Inc. exploitée sous le nom de Artic Sunwest Charter.

[3] L’instruction de l’ASS Sheïr est libellée dans les termes suivants :

[Traduction]

AFFAIRE INTÉRESSANT LA PARTIE II DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL
SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL
INSTRUCTION À L’EMPLOYEUR EN VERTU DU PARAGRAPHE 145(1)

Le 15 novembre 2007, l’agent de santé et sécurité soussigné a conclu une enquête sur une situation comportant un risque survenue le 3 janvier 2007 à proximité de Blatchford Lake Lodge, TNO, qui a entraîné le décès d’un pilote employé par la société 171817 Canada Inc., cette société étant un employeur visé par la partie II du Code canadien du travail.

Après avoir terminé son enquête, ledit agent de santé et sécurité est d’avis qu’il a été contrevenu à la disposition suivante de la partie II du Code canadien du travail :

Alinéa 125. (1)q) de la partie II du Code canadien du travail

« […] d’offrir à chaque employé, selon les modalités réglementaires, l’information, la formation, l’entraînement et la surveillance nécessaires pour assurer sa santé et sa sécurité; »

L’employeur n’a pas donné à l’employé la supervision nécessaire concernant les fonctions de préparation de vol et les fonctions exécutées avant le vol, comme le planning de vol, le chargement de l’avion, le transport de bagages et du matériel de commissariat et le contrôle du poids et de l’équilibre. Par conséquent, il vous EST ORDONNÉ PAR LES PRÉSENTES, en vertu de l’alinéa 145(1)a) de la partie II du Code canadien du travail, de mettre fin aux contraventions au plus tard le 20 décembre 2007.

En outre, je vous DONNE PAR LA PRÉSENTE L’INSTRUCTION, conformément à l’alinéa 145 (1)b) de la partie II du Code canadien du travail, de prendre, au plus tard le 20 décembre 2007, des mesures pour veiller à ce que la contravention ne se poursuive pas ni ne se produise de nouveau.

Délivrée à Winnipeg, au Manitoba, ce 21 novembre 2007.

[4] Dans la présente affaire, il y a lieu de déterminer s’il existe des motifs valables justifiant que j’accueille la demande de suspension de l’instruction de l’ASS Sheïr délivrée à 171817 Canada Inc.

[5] Pour prendre une décision, je dois tenir compte du rapport de l’agent de santé et sécurité et des arguments exposés par les deux parties sur les critères à trois volets qui doivent être examinés dans le cas d’une demande de suspension. Ces critères se fondent sur l’arrêt Metropolitan Stores Ltd. 1 :

1

Manitoba (A.G.) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, dossier 19609

  1. la question sérieuse à juger;
  2. le préjudice irréparable résultant du rejet de la demande de suspension;
  3. le critère de la prépondérance des inconvénients, qui consiste à déterminer laquelle des parties subira le plus grand préjudice selon que l’on accorde ou que l’on refuse une suspension, en attendant une décision sur le fond.

[6] De plus, j’ai demandé qu’il soit satisfait à un quatrième critère, énoncé comme suit : s’il choisit de ne pas se conformer à l’instruction, que l’appelant a-t-il l’intention de faire pour protéger la santé et la sécurité des employés ou de toute personne qui pourrait être exposée au danger relevé par l’agent de santé et sécurité?

Arguments de l’appelant

[7] En ce qui concerne le premier critère, Lawrence W. Olesen (L. Olesen) a fait valoir que l’employeur a une question sérieuse à juger parce que l’instruction est impossible à observer, ce qui défavorise la société. Le motif principal pour lequel l’employeur ne l’observe pas est que l’instruction n’établit pas clairement quelles dispositions du Code ont été enfreintes. L. Olesen a soutenu que l’ASS Sheïr n’a pas dit ce que doit faire l’employeur pour observer le Code.

[8] Relativement à l’instruction, il a également fait valoir que la société s’est acquittée de son obligation à cet égard. D’après L. Olesen, l’appelant a exploité son entreprise conformément au Manuel d’exploitation et aux Procédures d’utilisation normalisées qui sont vérifiés et approuvés par Transports Canada. Il a ajouté que Transports Canada a également approuvé la formation reçue par la société et ses employés.

Préjudice irréparable

[9] En ce qui touche le deuxième critère, L. Olesen a soutenu que l’appelant subira manifestement un préjudice irréparable si la demande de suspension est rejetée. Il a fait valoir que le défaut d’observer l’instruction pourrait entraîner une poursuite contre l’employeur. De plus, L. Olesen a affirmé que la société subit un effet négatif lorsqu’elle est tenue d’afficher publiquement l’instruction. Il a écrit que l’affichage de l’instruction [traduction] « se traduirait probablement par des effets négatifs sur les affaires de l’appelant et sur sa capacité de maintenir en poste ou de recruter des employés compétents. De plus, l’affichage pourrait également avoir un effet sur toute poursuite civile qui pourrait découler de l’événement survenu le 3 janvier 2007. »

Prépondérance des inconvénients

[10] L. Olesen a fait valoir que comme la société est exploitée en tant que société d’avions nolisés commerciaux, elle a utilisé le Manuel d’exploitation et les Procédures d’utilisation normalisées et continue d’utiliser ces procédures. L’appelant soutient qu’il ne devrait subir aucun effet préjudiciable pour la santé et la sécurité de ses employés parce que la société continuera à utiliser les mêmes procédures.

Solution de rechange à l’observation de l’instruction

[11] En ce qui concerne le quatrième critère que j’ai ajouté comme condition pour accueillir une demande de suspension, L. Olesen a affirmé que l’employeur entend continuer à former ses employés en conformité avec la procédure déjà approuvée par Transports Canada.

Arguments de l’intimé

[12] Patrick Mugony a affirmé, à titre d’employé représentant au sein du comité de santé et sécurité au travail, qu’il souscrit tout à fait aux arguments de l’appelant.

Analyse et décision

[13] En ce qui a trait au premier critère, soit celui de la question sérieuse à juger, je crois qu’il y a effectivement une question sérieuse à juger parce qu’une instruction a été donnée à la suite d’une enquête sur une situation comportant des risques ayant entraîné le décès d’un pilote employé par la société 171817 Canada Inc. De plus, la question touche l’employeur qui n’aurait pas fourni à l’employé la supervision nécessaire concernant les fonctions de préparation de vol et les fonctions devant être exercées avant le vol.

[14] En ce qui touche le deuxième critère, c’est-à-dire celui du préjudice irréparable, l’appelant ne m’a pas convaincu que la société 171817 Canada Inc. peut subir un tel préjudice. À mon avis, l’argument de l’appelant portait surtout sur les conséquences, pour l’employeur, de son défaut de se conformer à l’instruction, ce qui pourrait entraîner une poursuite. De plus, le deuxième argument soulevé par l’appelant relativement à l’affichage de l’instruction ne me convainc pas que la société subira un préjudice irréparable. Une instruction doit être affichée en un lieu accessible aux employés pour les informer. J’estime qu’une instruction ne s’adresse pas au public. Je suis convaincu que la société 171817 Canada Inc. pourrait continuer à être exploitée normalement jusqu’à ce que l’appel sur le fond puisse être entendu par un agent d’appel et que des éclaircissements de l’agent de santé et sécurité sur le contenu de l’instruction pourraient aider l’employeur à observer celle-ci. Je conclus donc, quant au deuxième critère, qu’il n’y a pas de préjudice irréparable.

[15] En ce qui concerne le troisième critère, soit la prépondérance des inconvénients, L. Olesen ne m’a pas persuadé que la société 171817 Canada Inc. subira un plus grand préjudice que les employés dont la santé et la sécurité peuvent être en péril. Je suis d’avis que dans une situation comme celle qui nous occupe, la question de l’observation de l’instruction aurait pu être évitée si l’employeur avait communiqué avec l’ASS Sheïr pour obtenir des éclaircissements, ce qu’il n’a pas fait. Je conclus que les employés subissent davantage d’inconvénients en situation de supervision potentiellement insuffisante sur le plan de la préparation de vol et des fonctions à exercer avant le vol.

[16] Pour ce qui est du quatrième critère, L. Olesen n’a pas présenté d’autre solution provisoire pour protéger davantage les employés jusqu’à ce que l’appel puisse être entendu par un agent d’appel et jusqu’à ce qu’une décision soit rendue. J’estime que dans ses observations, l’appelant n’a pas fait mention de ses obligations prévues par le Code de protéger la santé et la sécurité des employés. De fait, l’employeur prétend qu’il doit maintenir ses procédures actuelles de sécurité en vol, qui ont été approuvées par Transports Canada. Toutefois, je tiens à souligner que ces procédures de sécurité en vol ne sont pas soumises au Code.

[17] Par conséquent, pour les motifs énoncés précédemment, je rejette la demande de suspension de l’instruction. L’employeur doit s’efforcer de déployer des efforts raisonnables pour observer l’instruction jusqu’à ce qu’un agent d’appel rende une décision sur le fond de l’affaire. Par conséquent, je proroge jusqu’au 27 décembre 2007 au plus tard la date prévue pour mettre fin à la contravention et pour s’assurer que la contravention ne se poursuive pas ni ne se produise de nouveau.

[18] Vous devrez informer l’agent de santé et sécurité par écrit au plus tard le 28 décembre 2007 des mesures prises pour vous conformer à l’instruction délivrée initialement le 21 novembre 2007. De plus, une copie des mesures prises a été envoyée au comité de santé et sécurité au travail.



_________________
Pierre Guénette
Agent d'appel


Résumé de la décision de l’agent d’appel

Décision no : CAO-07-044 (S)

Appelant : 171817 Canada Inc. exploitée sous le nom de Artic Sunwest Charter

Intimé : Patrick Mugony, employé membre du comité de santé et sécurité au travail

Dispositions : Partie II, Code canadien du travail, paragraphe 145(1)

Mots-clés : demande de suspension, supervision, préparation de vol, fonctions devant être exercées avant le vol

Sommaire :

Le 21 novembre 2007, l’agent de santé et sécurité René Sheïr a délivré une instruction à la société 171817 Canada Inc., une entreprise exploitée sous le nom de Artic Sunwest Charter, selon laquelle l’employeur n’a pas fourni à l’employé la supervision nécessaire en rapport avec ses fonctions de préparation de vol et ses fonctions avant le vol. La société 171817 Canada Inc. a présenté ses arguments oraux au cours d’une conférence téléphonique en affirmant que l’employeur n’est pas en position pour se conformer à l’instruction parce que celle-ci est floue, vague et imprécise. La société 171817 Canada Inc. n’a pas satisfait aux quatres critères exposés par l’agent d’appel. Par conséquent, la demande de suspension est rejetée.

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