Archivée - Décison: 07-046-A Code canadien du travail Partie II Santé et sécurité au travail
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Dossier no : 2005-37
Décision interlocutoire
Décision interlocutoire no : CAO-07-046 (A)
K. Bartakovic et Alliance de la Fonction publique du Canada
appelants
et
Agence des services frontaliers du Canada
intimé
___________________________
Le 21 décembre 2007
La présente décision interlocutoire a été rendue par l’agent d’appel Pierre Guénette.
Pour les appelants
Andrew Raven, avocat
Pour l’intimé
Richard E. Fader, avocat, Services juridiques du Conseil du Trésor
[1] La décision qui suit a été rendue en réponse à une demande présentée par les appelants en vue d’obtenir l’autorisation de produire d’autres éléments de preuve relativement à la question préliminaire de l’indépendance institutionnelle concernant l’appel ci-dessus dont je suis saisi.
[2] D’après les appelants, la preuve en question n’avait pas été mise à la disposition des intéressés au moment de l’audition sur la question préliminaire et venait tout juste d’entrer en leur possession.
[3] Compte tenu de la demande des appelants, j’ai décidé de convoquer une audience pour établir s’il serait nécessaire de reconvoquer l’audience sur la question préliminaire mentionnée au paragraphe 1 afin de recevoir d’autres éléments de preuve. Cette audience a été tenue le 5 décembre 2007.
[4] Avant de statuer sur la question en l’espèce, établissons que l’historique de l’affaire montre ce qui suit.
[5] Cette affaire concerne un appel interjeté par Mme Katie Bartakovic à l’encontre d’une décision établissant une absence de danger rendue par l’agent de santé et sécurité Rod Noel le 1er septembre 2005. Cet appel a été interjeté le 16 septembre 2005.
[6] L’objection préliminaire au sujet de l’indépendance institutionnelle du Bureau canadien d’appel en santé et sécurité au travail (BCA) a d’abord été déposée au BCA le 6 mars 2006.
[7] Le 20 mars 2006, le BCA a été informé que les deux parties étaient prêtes à procéder à l’examen de la question préliminaire le 9 mai 2006 ce qui a effectivement été fait.
[8] L’audition de cette question a toutefois due être relancée devant l’agent d’appel soussigné après le retrait de l’agent d’appel auquel l’affaire avait d’abord été assignée, pour des motifs qu’il n’est pas nécessaire d’aborder en l’espèce.
[9] Le 14 décembre 2006, les deux parties ont accepté que l’audience soit tenue le 15 janvier 2007. L’agent d’appel a reçu les observations finales des appelants le 22 mars 2007, lesquelles ont été suivies des observations de l’intimé le 29 mars 2007. Enfin, l’agent d’appel a reçu la réplique des appelants le 5 avril 2007. Les plaidoiries de toutes les parties ont pris fin le 12 avril 2007.
[10] Le 8 novembre 2007, quand l’avocat des appelants a demandé de produire d’autres éléments de preuve, l’agent d’appel soussigné était en train de rédiger sa décision concernant l’objection préliminaire relative à l’indépendance institutionnelle.
[11] Au début de l’audience et, de fait, à plusieurs reprises pendant celle-ci, l’avocat des appelants a demandé de déposer en preuve, censément à des fins d’identification, le document qu’il décrit comme une preuve nouvellement découverte suffisamment importante pour justifier la reconvocation de l’audience sur l’objection préliminaire relative à l’indépendance institutionnelle. L’avocat de l’intimé ne s’y est pas opposé.
[12] Pour le même motif pour lequel cet agent d’appel a refusé de recevoir le document en question qui accompagnait l’avis déposé par l’avocat des appelants au BCA de sa découverte et la demande de dépôt en preuve et a ordonné son retour à l’avocat, j’ai de nouveau refusé de recevoir et d’entrer en possession du document à cette audience. J’ai mentionné aux avocats qu’il me faudrait, pour être satisfait, une description suffisamment détaillée du contenu et de la nature du document pour établir l’importance et la nécessité de le recevoir en preuve lors d’une audience reconvoquée.
[13] J’étais initialement d’avis, et c’est toujours mon opinion, qu’une telle description serait suffisante pour les fins de l’affaire en instance et qu’elle permettrait d’éviter que ma décision soit affectée abusivement quant à la question en litige principale si je décidais de ne pas reconvoquer l’audience sur la question principale et de ne pas recevoir ledit document en preuve.
[14] L’avocat des appelants a décrit la preuve qu’il cherche à faire déposer dans le cadre d’une audience reconvoquée dans une note rédigée par M. Pierre Rousseau, directeur, Bureau canadien d’appel en santé et sécurité au travail datée du 10 décembre 2004 et adressée au sous-ministre adjoint (Travail d’alors, M. John McKennirey, intitulée « Sommaire de notre rencontre du 7 décembre 2004 ». D’après l’avocat, ce document renferme des notes ou un compte-rendu de la réunion du 7 décembre portant sur des questions directement liées aux rouages du BCA et est directement lié aux déclarations faites par M. Rousseau dans son témoignage rendu à l’audience concernant l’objection préliminaire relative à l’indépendance institutionnelle.
[15] L’avocat des appelants souligne également que bien que M. Rousseau ait été sommé de divulguer des documents concernant [traduction] « la nature et le contenu des rapports hiérarchiques entre le Bureau d’appel et le sous-ministre adjoint – Programme du travail, RHDCC », le document obtenu récemment établirait qu’une divulgation complète n’a pas été obtenue et, de plus, que ce contenu servirait à contredire le témoignage donné par M. Rousseau sur la question.
[16] Me Raven a également fait valoir que le pouvoir conféré aux agents d’appel de recevoir la preuve par le Code, et plus précisément par l’article 146.2, est suffisant pour recevoir la preuve en question.
[17] D’après l’avocat des appelants, la description de la preuve qu’il cherche à déposer permet d’établir qu’elle s’applique de façon tout à fait pertinente à la question soulevée par l’objection préliminaire sur l’indépendance institutionnelle.
[18] En outre, l’avocat estime que l’existence de l’exigence d’une audience équitable tenue d’après les règles de justice naturelle établit que cette preuve nouvellement découverte doit être reçue dans le cadre d’une audience reconvoquée.
[19] Enfin, Me Raven a déclaré qu’il a porté sans délai ce dernier développement à l’attention du BCA en tentant d’informer l’agent d’appel et en tentant d’obtenir une audience seulement quelques jours après avoir appris l’existence du document.
[20] Me Richard Fader, pour l’intimé, était généralement d’accord avec la position énoncée par les appelants. D’après l’avocat, l’audience doit, en raison de l’équité, être reconvoquée pour recevoir ladite preuve. Refuser de le faire porterait préjudice au dossier des appelants.
[21] Me Fader a ajouté qu’il est convaincu que la preuve proposée est directement liée au témoignage donné précédemment par M. Rousseau, mais qu’il conviendrait que ce document soit déposé en preuve par son auteur à une audience reconvoquée dans l’éventualité où celui-ci serait appelé à témoigner. L’avocat estimait que M. Rousseau devrait au moins obtenir l’occasion de répondre aux allégations et à la preuve, que son défaut de divulguer le document ait été délibéré ou accidentel.
Décision
[22] La question consiste à décider s’il est nécessaire d’accéder à la demande faite par les appelants de reconvoquer l’audience sur la question préliminaire concernant l’indépendance institutionnelle d’entendre de nouvelles preuves qu’ils n’avaient pas à leur disposition à l’audience. À cet égard, j’examinerai les observations des parties, le Code canadien du travail (le Code) et les affaires citées par l’avocat Raven.
[23] Comme l’a noté Me Raven, en vertu de l’alinéa 146.2c), un agent d’appel est autorisé à recevoir et à accepter toute preuve qu’il juge indiquée, qu’elle soit admissible ou non en justice. Par conséquent, si je décide qu’il serait approprié de recevoir la preuve, le Code m’autorise à le faire. L’alinéa 146.2c) est ainsi rédigé :
146.2 Dans le cadre de la procédure prévue au paragraphe 146.1(1), l’agent d’appel peut :
c) recevoir sous serment, par voie d’affidavit ou sous une autre forme, tous témoignages et renseignements qu’il juge indiqués, qu’ils soient admissibles ou non en justice; […]
[24] Dans un jugement britannique rendu en 19611, il était établi que les quatre conditions suivantes devaient être remplies avant qu’une nouvelle preuve soit acceptée :
[Traduction]
[1] il doit s’agir d’une preuve qui n’était pas disponible en première instance;
[2] elle doit s’appliquer de façon pertinente à la question en litige;
[3] ce doit être une preuve crédible, en ce sens qu’elle est digne de foi;
[4] elle aurait, si l’on y prêtait foi, un effet très important sur la réflexion du tribunal.
1 | R. v. Parks 1961 1 W. L. R. 1484 (C.C.A.) |
[25] Le critère qui précède pose le problème suivant : il exige que le juge des faits décide si la preuve est pertinente avant même qu’elle soit entendue.
[26] À l’audience tenue récemment, j’hésitais à recevoir la preuve, et j’ai préféré entendre d’abord une description détaillée de la nature et du contenu du document pour décider de sa pertinence et de son importance. Après avoir pris connaissance des observations des deux parties, j’étais convaincu que je possédais assez de renseignements pour prendre ma décision.
[27] Dans une décision rendue par la Cour fédérale du Canada dans Haydon c. Canada2, il était énoncé au paragraphe 26 que :
« Il est un principe élémentaire de justice naturelle, dans la conduite d'une audience équitable, selon lequel, si l'on constate qu'une partie a dissimulé ou négligé de communiquer un document important et utile, alors la partie adverse a le droit de faire ajourner l'audience afin de pouvoir répondre adéquatement à ce document, soit à l'aide de témoins, soit à l'aide d'autres documents, soit par contre-interrogatoire. L'objet des règles présidant à la communication de documents avant l'audience est d'éviter que le procès ne se déroule à l'improviste ou par surprise. »
2 | Haydon c. Canada (Procureur général) 2003 A.C.F. no 957 |
[28] Sous réserve de la question de savoir si la preuve avait été délibérément dissimulée ou si sa divulgation avait été omise, les observations des parties m’ont persuadé de l’importance et de la nécessité de recevoir la note de M. Pierre Rousseau qui a été envoyée à M. John McKennirey, SMA du Programme du travail, en date du 10 décembre 2004. Les appelants ne disposaient pas de cette preuve pendant les audiences sur la question de l’indépendance institutionnelle qui ont pris fin le 12 avril 2007.
[29] Me Fader faisait valoir que la bonne façon de faire déposer ce document en preuve serait par l’entremise de son auteur dans le cadre d’une audience reconvoquée au cours de laquelle il serait appelé à témoigner. Selon l’avocat, que le défaut de divulguer ait été délibéré ou accidentel, M. Rousseau devrait au moins avoir l’occasion de répondre aux allégations et de réagir à la preuve. Me Raven a convenu que le document devrait être soumis par l’entremise de M. Rousseau.
[30] Pour ces motifs, je reconvoque l’audience sur la question de l’indépendance institutionnelle afin de recevoir d’autres preuves sur cette note, y compris des observations connexes des deux parties. Je conviens que cette preuve devrait être introduite dans le cadre du témoignage de M. Pierre Rousseau. Par conséquent, M. Pierre Rousseau sera assigné à témoigner au sujet de cet élément de preuve lorsqu’il y aura reconvocation de l’audience sur la question de l’indépendance institutionnelle.
[31] Il importe de rappeler que l’audience est reconvoquée uniquement pour recevoir la note de M. Pierre Rousseau qui a été envoyée à M. John McKennirey, SMA du Programme du travail, en date du 10 décembre 2004.
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Pierre Guénette
Agent d'appel
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