Allocution de la commissaire Judith Robertson  ̶  conférence annuelle sur la littératie financière de Comptables professionnels agréés (CPA) Canada  

Discours

Le 24 novembre 2022

Toronto (Ontario)

L’allocution prononcée fait foi

Je vous remercie de m’avoir invitée à m’adresser aux membres de CPA Canada aujourd’hui.

Je reconnais aussi respectueusement que les terres ancestrales sur lesquelles nous nous réunissons constituent le territoire traditionnel et le foyer actuel de nombreux différents peuples des Premières Nations, des Inuits et des Métis. 

En tant que commissaire de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), j’ai le grand privilège de diriger un petit organisme doté d’un grand mandat, lequel consiste à protéger les consommateurs de produits et services financiers. 

Nous nous acquittons de cette tâche de deux façons principales : en premier lieu, au moyen d’activités de réglementation. Nous veillons au respect des obligations en matière de pratiques commerciales des institutions financières sous réglementation fédérale, telles les banques.

En second lieu, nous participons aux activités de recherche, aux programmes et à l’éducation pour renforcer la littératie financière des Canadiens. 

Parce qu’un consommateur mieux informé est un consommateur mieux protégé.

Le Mois de la littératie financière est une excellente occasion de mettre en valeur cet important travail.

Cette campagne annuelle rassemble des organisations et des personnes de partout au Canada qui partagent le même engagement à faire progresser la littératie financière au Canada. 

Et comme pour toutes nos initiatives les plus importantes, l’aide et la participation d’intervenants comme CPA Canada contribuent grandement à son succès, et je vous en remercie.

Mois de la littératie financière

Cette année, le Mois de la littératie financière coïncide avec un moment où les Canadiens sont confrontés à de nombreux défis et doivent s’adapter à de nombreux changements.

Cet environnement marqué par l’incertitude se reflète bien dans le thème de cette année « Gérer son argent dans un monde en évolution ». 

Et cette année, l’ACFC met tout particulièrement l’accent sur la gestion des dettes.

Statistique Canada a récemment conclu que les ménages canadiens ont dû traverser une tempête parfaite de pressions économiques.

La combinaison de faibles taux d’intérêt, d’un accès accru au crédit et de problèmes économiques exacerbés par la pandémie a fait en sorte que les ménages canadiens sont parmi les plus endettés au monde. 

Et la hausse des coûts et des taux d’intérêt ne fait que rendre plus difficile le remboursement des dettes.

L’année dernière, nous avons lancé la Stratégie nationale pour la littératie financière, dans le cadre de laquelle nous indiquions que la gestion des dettes est l’un des principaux comportements des consommateurs qui mène assurément à la résilience financière, laquelle est l’objectif ultime de l’initiative.

Nous définissons la résilience financière comme la capacité de s’adapter ou de persévérer face à des événements, des difficultés et des contrecoups dans sa vie financière.  

Cette notion cadre tout à fait avec le thème de la présente conférence, le cercle de la vie.  

Vous parlez du parcours de la vie, avec ses hauts et ses bas, et nous parlons de chocs et de changements qui peuvent être tout autant prévisibles, qu’imprévisibles.  

Stratégie nationale pour la littératie financière

Quelle que soit la terminologie utilisée, le message est clair.  

Personne ne traverse la vie en ligne droite ou à l’abri de l’environnement externe.  

La stratégie nationale a introduit la notion selon laquelle l’amélioration de la résilience financière est une responsabilité partagée qui nécessite la prise de mesures collectives. 

Cette notion a touché les cordes sensibles du public et remporté un soutien enthousiaste, tant au niveau national qu’international.

Elle représente un changement fondamental par rapport aux approches antérieures de la littératie financière, qui étaient davantage axées sur l’information et l’éducation des particuliers. 

Ces éléments demeurent bien sûr très importants, mais la Stratégie nationale reconnaît que les consommateurs prennent leurs décisions dans un environnement sur lequel influent de nombreux intervenants : l’industrie, les médias, les organismes de réglementation, les groupes communautaires, les chercheurs, les gouvernements, et ainsi de suite.

Donc, au lieu de placer le fardeau uniquement sur les consommateurs, la Stratégie nationale met l’accent sur la responsabilité qui incombe à l’ensemble de l’écosystème lorsqu’il s’agit d’éliminer les obstacles et de catalyser les actions afin d’obtenir des résultats financiers positifs menant à la résilience financière.

À l’écran : Infographie : Stratégie nationale pour la littératie financière - Canada.ca

La stratégie nationale pour la littératie financière est un document de 40 pages très facile à lire que je vous incite à consulter, mais cette infographie d’une page en résume les principaux points de façon très éloquente.

Je trouve que ça ressemble à un arc-en-ciel.

L’arc extérieur présente les priorités en matière de changements à apporter à l’écosystème pour réduire les obstacles (rose) et catalyser les actions (or), et des priorités spécifiques sont indiquées.

Dans l’arche intérieure (verte) se trouvent les priorités du consommateur - comme la gestion des dettes - qui sont rendues possibles grâce à l’environnement créé par l’arche extérieure.

Au pied se trouve l’objectif ultime, ou le trésor que représente la résilience financière.

Cette simple image contient beaucoup de renseignements, mais je n’aborderai que quelques-uns des éléments qui sont les plus pertinents pour notre auditoire. 

L’un des changements à apporter à l’écosystème est la nécessité d’améliorer l’accès à des conseils financiers dignes de confiance et abordables. (Premier encadré or)

Il est essentiel d’offrir aux Canadiens davantage d’espaces sûrs et impartiaux où discuter des difficultés financières et trouver de l’aide financière adaptée.  

Cette priorité est particulièrement importante pour les Canadiens financièrement vulnérables, mais des conseils financiers dignes de confiance, fiables et abordables peuvent profiter à tous les Canadiens à un moment ou à un autre. 

Je tiens donc à remercier les personnes présentes aujourd’hui qui ont consacré d’innombrables heures à titre de bénévoles.

Lorsque vous vous portez volontaire pour animer des ateliers de littératie financière, participer aux cliniques d’impôt ou faire de la planification financière, vous avez une incidence positive sur l’écosystème financier et vous nous aidez à atteindre l’objectif de la Stratégie nationale. 

Plan de mesure

La Stratégie nationale fournit le cadre, résumé de manière claire dans cette infographie.

Mais le véritable changement ne se produira que si nous harmonisons et combinons nos compétences et nos efforts.

Aucune partie prenante ou organisation ne peut tout faire à elle seule.

Cela nous amène naturellement à notre plus récente initiative, qui nous permettra de suivre nos progrès. 

Au début du mois, nous avons publié le Plan de mesure pour la Stratégie nationale, qui porte le titre très à propos de « Compter les changements ». 

Le Plan de mesure fournira les outils et la tribune nécessaires pour regrouper et comparer l’incidence de nos efforts collectifs.  

Nous utiliserons les résultats pour mettre en évidence ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, afin que nous puissions tous ajuster et recentrer nos efforts là où ils ont la plus grande incidence.

Sans vouloir souscrire à un stéréotype, il me semble que la comptabilisation et la mesure sont des choses qui plairaient naturellement aux comptables.

J’espère donc que vous consulterez le Plan de mesure et que vous vous joindrez à nous la semaine prochaine, le 29 novembre, alors que l’ACFC organisera une séance d’information virtuelle au cours de laquelle nous vous expliquerons comment utiliser le Plan de mesure et comment y participer.

De nouvelles protections renforcées pour les clients des banques

À l’extrême droite de l’infographie, l’un des changements souhaités dans l’écosystème est la nécessité de renforcer les mesures de protection des consommateurs.

Je suis heureux d’annoncer que l’écosystème a déjà progressé à cet égard.

En effet, en juin dernier, le nouveau Règlement sur le régime de protection des consommateurs en matière financière du Canada est entré en vigueur. 

Il s’agit d’une étape importante qui offre aux Canadiens des protections nouvelles et améliorées dans leurs rapports avec les banques. 

En voici quelques exemples.  

  • Les banques doivent désormais respecter des normes accrues dans leurs pratiques de vente, notamment en fournissant des produits et des services qui conviennent à leurs clients. 

  • Les banques doivent également renforcer leurs procédures de traitement des plaintes afin que les problèmes soient résolus plus rapidement.  

  • En outre, les banques doivent fournir davantage d’information à leurs clients pour les aider à prendre des décisions éclairées et opportunes. Peut-être avez-vous vu les alertes et les rappels qui sont envoyés lorsqu’un paiement est dû?

À l’instar de la Stratégie nationale, le régime de protection représente un changement important, qui confère à l’industrie une plus grande responsabilité dans l’obtention de résultats financiers positifs pour ses clients.

En ce sens, le régime de protection et la Stratégie nationale vont de pair, car ils imposent tous deux une plus grande responsabilité à l’écosystème financier et reconnaissent que les résultats financiers positifs sont une responsabilité partagée. 

Innovation numérique

Cependant, un domaine de la protection des consommateurs qui demeure en constante évolution est lié à la numérisation des services financiers. 

Je n’en dirai pas trop ici, car je sais qu’un groupe d’experts doit vous entretenir sur ce sujet demain, dont ma collègue de l’ACFC, Mme Supriya Syal, Mike Mercer, de la SADC et Eric Santor, de la Banque du Canada. 

Toutefois, j’aimerais profiter de l’occasion pour formuler quelques commentaires importants.

Les innovations telles que le système bancaire ouvert, les services bancaires mobiles et les nouvelles façons d’effectuer des transactions offrent aux consommateurs plus de commodité, plus de choix et les avantages d’une concurrence accrue. 

Elles offrent également des occasions aux entreprises, ce qui profitera à notre économie.

Et cela pourrait ouvrir la porte à de grandes choses. 

Mais il y a aussi des risques. 

Un environnement complexe et en évolution rapide peut être source de confusion et ouvrir la porte à des pratiques douteuses, voire à la fraude pure et simple.

Prenons deux exemples qui ont fait les manchettes récemment : les actifs numériques tels que les cryptoactifs, et les nouveaux services de crédit tels que les prêts à tempérament et les prêts de type « achetez maintenant, payez plus tard ».

Ces services ne sont pas soumis au même niveau de surveillance réglementaire que les produits financiers traditionnels offerts par les banques et les coopératives de crédit. 

Tant au Canada qu’à l’étranger, les organismes de réglementation ont pris note de la situation et ont diffusé des mises en garde.

Système bancaire ouvert

Une innovation que nous sommes impatients de voir mise en œuvre, avec les protections adéquates qui s’imposent, est le système bancaire ouvert.

Le système bancaire ouvert permet l’échange de renseignements financiers entre applications et fournisseurs de services.

Les avantages potentiels pour les consommateurs sont énormes, mais les risques sont également élevés à l’heure actuelle, car de nombreuses applications fonctionnent en dehors d’un cadre réglementé. 

Par exemple, de nombreuses applications utilisent la « capture de données d’écran », qui permet à des tiers d’accéder à vos renseignements d’identification bancaires en ligne. 

Cela revient à donner à quelqu’un le code NIP de votre carte de débit et pourrait constituer une violation de votre contrat d’utilisation auprès de votre banque. 

En ce faisant, vous pourriez perdre des protections, comme la protection contre les transactions non autorisées. 

Le gouvernement fédéral élabore actuellement un cadre pour le système bancaire ouvert canadien, et l’ACFC y participe activement pour veiller à ce que le point de vue des consommateurs soit au premier plan. 

Nous recommandons que les protections des consommateurs s’appliquent de manière cohérente et qu’elles ne soient pas moindres que celles dont bénéficient actuellement les consommateurs, notamment les suivantes.

  • Une protection en matière de responsabilité contre les transactions non autorisées.

  • L’accès à un processus équitable en matière de résolution des plaintes et de réparation.

En guise de dernière réflexion sur l’incidence de cette révolution numérique, je tiens à vous souligner de nouveau que les avantages de l’innovation pourraient être répartis de façon très inégale, et pourraient même nuire aux segments les plus vulnérables de notre population, si nous ne sommes pas vigilants.

Les forces du marché ne suffiront pas à créer le résultat que nous recherchons en tant que société. 

Dans le cadre de votre travail sur la littératie financière, vous avez sans doute été confrontés à la réalité que l’innovation numérique, bien que formidable pour certains, représente un véritable obstacle pour de nombreux Canadiens. 

C’est pourquoi l’un des changements d’écosystème préconisés par la Stratégie nationale consiste à améliorer l’accès au numérique et à accroître le soutien à la littératie numérique. 

Comme je vous l’avais mentionné, cette infographie est chargée d’information et vous pourrez facilement constater que nous avons encore beaucoup de pain sur la planche. 

En conclusion, je voudrais simplement remercier chacun d’entre vous, à titre individuel, ainsi que les organisations que vous représentez, pour votre appui continu à la littératie financière.  

Votre participation est si importante. 

Chaque échange, chaque rencontre que vous avez avec un consommateur canadien représente une occasion.

Une occasion de réduire les obstacles et de prendre des mesures qui les aideront à atteindre la résilience financière. 

Nous avons tous un rôle important à jouer, et il est en notre pouvoir collectif de construire un écosystème financier plus inclusif, plus accessible et plus efficace pour tous les Canadiens. 

Alors ensemble, apportons des changements qui comptent.

Merci.

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