Sciences sociales et évaluation d’impact

Par : Marion Doull, analyste politique principale, Ottawa

Je suis née à Glasgow, en Écosse, et ma famille a immigré au Canada en 1980. Je vis maintenant dans les territoires traditionnels, non cédés et non abandonnés de la nation algonquine Anishinaabe à Ottawa, en Ontario. J’ai un baccalauréat en kinésiologie de l’Université d’Ottawa, une maîtrise en sciences de la santé en promotion de la santé de l’Université de Toronto et un doctorat en santé des populations de l’Université d’Ottawa. Après avoir obtenu mon doctorat, j’ai travaillé en tant que chercheuse postdoctorale à l’Université de la Colombie-Britannique.

J’ai rejoint l’Agence d’évaluation d’impact du Canada en 2018 en tant qu’analyste principale des politiques dans le cadre du Programme de recrutement de leaders en politiques, qui est un excellent programme permettant aux scientifiques d’amorcer une carrière dans la fonction publique fédérale où leurs connaissances et leur expérience uniques sont valorisées et où ils peuvent appliquer leur expertise à des travaux qui ont des répercussions sur tous les Canadiens. Mon rôle et mes responsabilités consistent à fournir une expertise en matière de santé et d’analyse comparative entre les sexes plus (ACS Plus) et à mener des recherches et des analyses pour soutenir la mise en œuvre de la Loi sur l’évaluation d’impact (la Loi).

J’ai été attirée par les sciences parce que je suis curieuse de tout et que j’ai l’impression d’apprendre en permanence. Je suis une féministe en sciences sociales et j’ai donc toujours étudié les différents contextes dans lesquels les gens vivent et les nombreuses façons dont ils sont touchés par le monde qui les entoure. J’aime que la recherche et la science contribuent à rendre visible ce que nous savons et ce que nous ne savons pas, et remettent en question nos hypothèses sur les personnes et les systèmes. J’aime que les données et les renseignements puissent être transformateurs en mettant au jour les obstacles structurels et systémiques, et je m’intéresse à la manière dont ces obstacles affectent notre santé et notre bien-être. En tant que spécialiste des sciences sociales, je vois le pouvoir qui est ancré dans les expériences vécues par les gens et la manière dont ces connaissances peuvent être utilisées pour œuvrer en faveur de politiques, de programmes et d’espaces plus équitables. J’aime aussi que la science nous permette de poser des questions sur la manière dont les preuves sont recueillies et utilisées dans les politiques et les pratiques. En tant que scientifique s’intéressant au genre, je cherche toujours à savoir comment nous savons ce que nous savons, de qui les données parlent, à qui elles s’appliquent et à qui elles ne s’appliquent pas. Poser ces questions nous permet de comprendre réellement comment la science et l’information peuvent être inclusives et répondre aux divers besoins des gens.

J’applique la science tous les jours dans mon travail à l’Agence. J’ai rejoint l’Agence juste avant l’entrée en vigueur de la Loi, qui a introduit l’exigence de l’ACS Plus dans les évaluations des grands projets au Canada. On me demande souvent : « Quel est le rapport entre l’ACS Plus et les pipelines, les projets ou les mines? ». Pour y répondre, j’utilise mes compétences en matière de recherche pour m’appuyer sur l’important corpus de recherches féministes et en sciences sociales, sur les connaissances des femmes et sur les recherches menées par des universitaires autochtones et des organisations non gouvernementales, afin de mettre en évidence les preuves de la manière dont les projets ont un impact différent sur les gens et comment nous pouvons prendre en compte ces impacts et les atténuer. Par exemple, les travaux de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées ont fourni une base de données substantielle sur les impacts de l’exploitation des ressources sur la sûreté et la sécurité des femmes et des filles autochtones et des personnes bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers, en questionnement, intersexes et asexuelles (2SLGBTQQIA). Ces preuves, ancrées dans les expériences vécues par les femmes, les filles et les personnes 2SLGBTQQIA autochtones, ont la même valeur que les preuves quantitatives sur les impacts biophysiques et environnementaux et justifient une action égale. Lorsque nous élargissons notre compréhension des preuves et incluons des voix diverses dans nos processus, nous pouvons mieux comprendre les impacts et planifier des projets plus sains et plus réussis.

Les scientifiques de l’Agence disposent d’un large éventail d’expertise qui permet cette réflexion et cette prise en compte globales. Les scientifiques de l’Agence, comme moi, fournissent des conseils et des orientations sur les méthodes et les indicateurs et, dans mon cas, en tant que spécialiste des sciences sociales travaillant dans le domaine des sciences de l’environnement, contribuent souvent à élargir l’idée de ce qui compte comme données et preuves et à mettre en lumière les recherches et les récits de personnes et de populations historiquement exclues.

J’ai eu la chance de recevoir plusieurs bourses d’études pour soutenir mon apprentissage. Sans ces bourses, je n’aurais pas poursuivi ma carrière universitaire. J’ai quitté le monde universitaire pour trouver une carrière scientifique offrant un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée lorsque je suis devenue parent. L’un des défis à relever consiste à traduire et à faire une place aux sciences sociales et aux connaissances et preuves féministes dans des espaces où les sciences physiques sont la norme. Lorsque nous travaillons dans des équipes diversifiées, avec des connaissances et des disciplines différentes, nous créons de meilleures politiques.

Lorsque l’on considère la science au sens large, on se rend compte que chaque carrière comporte un élément scientifique. Chaque problème difficile et complexe nécessite des renseignements, un esprit critique et une analyse, qui sont des éléments clés de la science. Si vous êtes curieux et que vous vous posez des questions sur le monde qui vous entoure, je vous recommande sans hésiter une carrière scientifique. Plus il y aura de femmes et de filles diverses et curieuses pour réfléchir à des problèmes complexes, meilleures seront les solutions à ces problèmes.

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