Allocution prononcée lors de l’atelier international sur les technologies perturbatrices utilisées dans les applications liées à la sûreté nucléaire par Rumina Velshi Présidente et première dirigeante de la Commission canadienne de sûreté nucléaire 

Discours

Introduction

Bonjour à toutes et à tous.

C’est un plaisir pour moi d’être parmi vous sur l’île de Jeju, en Corée, pour l’atelier international conjoint de l’OCDE sur les technologies perturbatrices utilisées dans les applications liées à la sûreté nucléaire.

Aujourd’hui, mon allocution portera sur trois domaines. Tout d’abord, je décrirai le changement de paradigme si important pour l’avenir du nucléaire, et dans quelle mesure l’innovation sera nécessaire. Ensuite, je soulignerai le travail que nous effectuons, en tant qu’organisme de réglementation nucléaire du Canada, pour être prêts à réglementer l’innovation, ou les TPNE, comme nous les appelons à la CCSN, c’est-à-dire les technologies perturbatrices, novatrices et émergentes. Enfin, je vous parlerai de notre collaboration avec d’autres organismes de réglementation.  

Des ateliers comme celui qui a commencé aujourd’hui sont essentiels pour que nous restions informés et concentrés sur la voie que suit le Canada pour comprendre, déployer et réglementer les TPNE qui seront éventuellement utilisées dans les petits réacteurs modulaires, ou PRM, le parc nucléaire actuel et les projets de réfection ou de prolongement de la vie utile des installations.

Ensemble, nous pouvons cibler les domaines pour lesquels nous pouvons nous entraider et apprendre les uns des autres, en prenant appui sur une priorité commune, soit la sûreté nucléaire relative aux applications potentielles de TPNE.

Si l’on veut que les PRM et les installations nucléaires existantes nous aident à relever les défis du changement climatique et de la sécurité énergétique, nous devrons communiquer efficacement au public le fait que la sûreté ne sera jamais compromise dans le déploiement de nouvelles technologies. Les TPNE doivent jouer et joueront un rôle dans ces plans. Et pour favoriser la sûreté, l’innovation et la réglementation doivent aller de pair.

De plus, si nous voulons profiter pleinement des avantages de l’innovation, nous devons attirer les plus fins d’esprits dans notre secteur.

Les meilleurs hommes et les meilleures femmes. Des personnes impressionnantes ayant de bonnes idées.

Lorsque nous excluons une partie de la population, ou que nous manquons d’ouverture à son égard, nous ne pouvons pas réaliser notre potentiel.

Partout dans le monde, nous devons convaincre plus de jeunes femmes d’étudier et de faire carrière dans les disciplines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques, ou STIM. Sinon, trop de potentiel demeure inexploité.

Quelle meilleure façon de s’adapter à un monde en évolution que d’infuser notre secteur d’une nouvelle énergie et de nouvelles perspectives, et de veiller à ce qu’il attire les personnes les plus qualifiées et les plus brillantes, peu importe leur genre.

Quand nous donnons aux femmes les moyens d’agir, c’est tout le monde qui en bénéficie.

Dans le reste de mon allocution, j’expliquerai davantage ce que nous faisons, à la CCSN, pour soutenir la mise en œuvre sûre de ces technologies.

Changement de paradigme

Alors, pourquoi les TPNE sont-elles si importantes pour l’avenir du nucléaire? En termes simples, les PRM et leur déploiement seront rendus possibles grâce aux TPNE. 

Le secteur nucléaire devra s’éloigner considérablement des projets classiques à grande échelle et privilégier un modèle rationalisé fondé sur le produit. Il suffit de penser à la fabrication adaptative utilisée pour produire des pièces et des composants, qui sera éventuellement assistée par l’intelligence artificielle, et appliquée à la conception, à la production et au contrôle de la qualité. Je reviendrai plus tard sur d’autres applications de l’intelligence artificielle.  

À la CCSN, nous avons été fermes et clairs sur le fait que nous ne représenterons pas un fardeau ou un obstacle inutile aux technologies novatrices, comme les PRM et les TPNE.

Il doit y avoir un élan vers l’harmonisation internationale de la réglementation. Il faut aussi réaliser des progrès au chapitre de la normalisation internationale des conceptions.

Et tout cela doit s’inscrire dans le cadre d’une surveillance internationale efficace faisant appel à une collaboration jamais vue auparavant dans notre secteur.

Mise à jour du Canada sur les TPNE

Il y a plusieurs années, la CCSN a constaté qu’il fallait comprendre et être prêt à réglementer les activités nucléaires utilisant les TPNE. La CCSN a donc mis en place le Groupe de travail sur les TPNE. Ce groupe a pour mandat de rencontrer des représentants du secteur et d’autres parties intéressées pour connaître les nouvelles technologies qu’ils envisagent, si celles-ci méritent d’être examinées davantage et si elles nécessitent de mettre à jour notre cadre de réglementation.

Nos efforts ne se limitent toutefois pas à nous assurer d’être prêts à réglementer les TPNE au Canada. À la CCSN, nous travaillons aussi avec des partenaires internationaux sur les TPNE comme moyen de créer les conditions favorables au changement de paradigme que j’ai mentionné.

TPNE et intelligence artificielle

La TPNE dont on parle le plus, mais aussi celle pour laquelle il faut acquérir plus d’information et une meilleure compréhension, est probablement l’intelligence artificielle, ou IA.

Nous venons d’achever un projet de recherche en collaboration avec une société d’experts-conseils du secteur nucléaire pour établir une compréhension et une interprétation communes de l’IA en appui à l’examen des répercussions qu’elle pourrait avoir sur le cadre de réglementation de la CCSN. Le rapport qui en résulte, et qui comprend aussi des suggestions sur la manière dont l’IA pourrait être mise en œuvre de façon sûre dans les activités nucléaires, sera bientôt disponible sur le site Web de la CCSN pour toutes les parties intéressées. 

De plus, des entreprises ont consulté la CCSN pour discuter de l’utilisation de technologies telles que la réalité virtuelle, la numérisation et d’autres encore, afin d’établir si et comment elles peuvent être prises en compte dans notre cadre de réglementation.

Par exemple, nous collaborons avec une entreprise de l’industrie pour examiner le traitement et la numérisation des documents en langage clair. Cela nous aidera à mieux comprendre comment rationaliser les processus dans les centrales nucléaires, dans le but de transférer les procédures, les formulaires et les processus papier dans l’espace numérique.

À l’heure actuelle, nos titulaires de permis nous consultent aussi au sujet des TPNE qu’ils envisagent de mettre en œuvre, ce qui nous aide à axer nos efforts sur les technologies qui seront probablement déployées dans le secteur nucléaire. Par exemple, les titulaires de permis envisagent l’utilisation de drones pour les inspections, le transport et les activités liées à la sécurité.

Dans cette optique, je vais vous donner un petit exemple très révélateur de la façon dont la CCSN favorise l’innovation.

Un de nos titulaires de permis produit des isotopes médicaux au moyen d’un réacteur de recherche. À plusieurs kilomètres de là, une installation médicale détenant aussi un permis de la CCSN utilise ces isotopes. En collaboration avec la CCSN, ces établissements mènent un essai dans le cadre duquel les isotopes médicaux sont transportés par drone de l’installation dotée d’un réacteur jusqu’à l’hôpital où ils seront utilisés. On évite ainsi les retards causés par la circulation, tout en assurant la livraison sûre des isotopes médicaux.  

Sur la scène internationale - Collaboration entre la CCSN, la NRC et l’ONR

Notre collaboration continue avec la Commission de réglementation nucléaire des États-Unis, ou NRC, et l’Office de réglementation nucléaire du Royaume-Uni, ou ONR, demeure un excellent exemple de l’art du possible en matière de leadership bilatéral et trilatéral au sein de la communauté des organismes de réglementation nucléaire. Et cela ne se limite pas aux PRM.

Nos efforts de collaboration dans des domaines comme la robotique, les jumeaux numériques et autres nous ont permis de mettre en commun nos approches à l’égard des TPNE.

Nos trois organismes de réglementation ont convenu que la rédaction d’un livre blanc était avantageuse pour établir une méthode d’évaluation uniforme liée à l’utilisation de l’IA en vue d’orienter les approches en matière de réglementation.

Une fois publié, en principe au début de 2024, le livre blanc sera transmis à d’autres parties intéressées pour faciliter encore plus le dialogue sur l’IA.

À ce propos, je ne peux passer sous silence la participation et le rôle de leader de la CCSN dans le cadre de la séance d’information technique sur l’IA organisée par l’AIEA, et du déploiement actuel et à court terme de l’IA dans les centrales nucléaires en exploitation. À l’occasion de cette séance, qui se déroule à Vienne cette semaine, la CCSN préside le sous-comité sur les cadres de réglementation pour l’IA.

J’aimerais aussi souligner que l’AIEA a tenu en avril dernier sa première réunion du groupe de travail sur l’innovation à l’appui des centrales nucléaires en exploitation. Je suis fière du rôle de leader que joue la CCSN dans cet effort de collaboration internationale. 

Et n’oublions pas la fusion. Nous consultons l’industrie, d’autres organismes de réglementation et l’AIEA pour comprendre et être prêts à réglementer ce qui pourrait être la plus perturbatrice de toutes les TPNE, la technologie de fusion.

Pour être fin prête, la CCSN a commandé un rapport de recherche dans le but d’examiner son cadre de réglementation et d’assurer sa préparation à réglementer les technologies de fusion. Ce rapport est disponible sur notre site Web.

Conclusion

Nous sommes à un moment charnière de l’histoire de l’humanité.

L’énergie nucléaire, une technologie qui ne produit pas d’émissions et qui est bien réglementée tout au long de son cycle de vie, mais qui est souvent crainte et mal comprise, pourrait aider à freiner ou à prévenir d’autres répercussions des sources émettrices et à assurer la sécurité énergétique de nombreux pays.

En tant qu’organisme de réglementation, la CCSN est là pour veiller à la sûreté des TPNE adoptées par le secteur nucléaire.

Mais c’est le rôle de tout organisme de réglementation d’observer son secteur, de voir où il se dirige et d’être prêt à exercer son mandat en matière de réglementation de manière efficace et efficiente. La CCSN continue de faire preuve de leadership dans l’établissement des conditions favorables aux TPNE grâce aux efforts qu’elle déploie au Canada et à l’échelle internationale.

Je vous remercie, et j’espère que vous profiterez de cet atelier qui promet d’être captivant et tourné vers l’avenir.

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