La détermination du « véritable employeur » - IPG-068
Date d’entrée en vigueur : 3 avril 2006
Date de révision : 14 février 2023
Sur cette page
- Objet
- Contexte
- Application
- La détermination du véritable employeur
- Compétence
- Conclusion
- Annexe A : Fiche - Affichage graphique des faits faisant partie de chaque catégorie des facteurs
- Annexe B : Table de jurisprudence
Objet
De nombreux employeurs font appel à des agences de placement pour combler leurs besoins de main-d'œuvre temporaire. Ces agences sont des intermédiaires car elles fournissent aux employeurs les services des travailleurs qu'elles recrutent. La relation juridique existante entre l'agence, son client et le travailleur n'est pas toujours clairement définie. Par conséquent, une orientation quant à l'identification du « véritable employeur » est nécessaire. Cet Interprétations, politiques et guides (IPG) aidera à déterminer où se situe la relation employeur/employé dans le cadre de la relation tripartite.
Contexte
Les agences de placement fournissent des services de main-d’œuvre qualifiée à des entreprises selon diverses modalités. Donc, l'agence crée une relation « tripartite » composée du travailleur, de l'agence et de l'entreprise cliente qui utilise des services de travail temporaire.
Application
La partie III du Code du travail canadien (le Code) s’applique aux employés sous réglementation fédérale qui ont une relation employeur/employé. Ceci comprend les personnes souvent appelées « stagiaires ».
Le 1 septembre 2020, les changements au Code reconnaissant les « stagiaires » et les « étudiants stagiaires » sont entrées en vigueur. Les individus cherchant à obtenir des connaissances ou de l’expérience en effectuant des stages qui ne font pas partie d’un programme d’éducation, sont souvent appelés « stagiaires ». Ils ne sont pas considérés des « employés ». Toutefois, ils sont traités comme des employés dans le but et l’application du Code. Ils reçoivent toutes les mesures de protection des normes du travail, incluant le droit d’être rémunéré au salaire minimum.
Les étudiants effectuant un stage afin de répondre aux exigences du programme d’éducation sont connus sous le nom d’« étudiants stagiaires ». Les étudiants stagiaires ne sont pas considérés des « employés ». Ceci s’explique par le but premier de leur présence en milieu de travail qui est d’acquérir des connaissances et/ou de l’expérience. Les étudiants stagiaires, qui ne sont pas rémunérés, n’ont pas droit à toutes les mesures de protection des normes du travail. Ils ont droit à certaines mesures de protection figurant dans le Règlement sur les normes relatives aux activités d’apprentissage en milieu de travail.
Le Code et les Règlements associés régissent, par conséquent, la relation bipartie qui va au-delà de l’employeur et de l’employé.
La détermination du véritable employeur
Plusieurs facteurs sont utilisés afin de déterminer qui est le véritable employeur. L’annexe A est un guide utile.
Cette détermination peut être faite en envisageant un continuum où :
- l'employé se retrouve au milieu;
- l'agence de placement d'un côté; et
- l'entreprise cliente de l'autre.
Au fur et à mesure que les faits sont examinés, évalués et soupesés, l'employé se déplacera vers un côté ou l'autre du continuum. Il sera classé en conséquence à titre d'employé, soit de l'agence, soit de l'entreprise cliente. Des questionnaires seront utilisés dans le but de permettre de recueillir des faits afin de compléter l’évaluation.
Une approche globaleNote de bas de page i sera utilisée afin de repérer le véritable employeur. Cela permettra de déterminer laquelle des parties exerce le contrôle le plus important sur tous les aspects du travail.Note de bas de page ii Les critères de la subordination juridique et l'intégration au sein de l'entreprise sont importants. Cependant, « […] ils ne doivent pas être utilisés comme des critères exclusifs pour déterminer le véritable employeur. »Note de bas de page iii
- Le critère de la subordination juridique comprend le concept du contrôle réel par une partie sur les activités quotidiennes d'un travailleur. « Le critère de contrôle consiste à se demander qui contrôle le travail et comment, et quand et où cela doit être fait. »Note de bas de page iv La notion de contrôle peut être divisée en plusieurs éléments. C'est la relation globale qui sera examinée;
- Le test de l'intégration (qui a été élaboré dans l'arrêt rendu dans l'affaire Pointe-Claire c. Québec) exige que tous les facteurs pertinents soient considérés, par exemple :
- la partie qui exerce la direction et le contrôle des travailleurs qui effectuent le travail;
- la partie qui verse la rémunération;
- la partie qui impose la discipline;
- la partie qui embauche le travailleur;
- la partie ayant le pouvoir de congédier le travailleur;
- la partie qui est perçue par les travailleurs comme étant l'employeur;
- l'existence de l'intention de créer une relation employeur-employé.
Compétence
Il faut déterminer si l'entreprise où est affecté le travailleur ou l'agence de placement est assujettie à la législation fédérale ou provinciale. En effet, lorsqu'on doit traiter une question conformément au Code, il faut s'assurer que le travail, l'entreprise ou l’ouvrage relève de la compétence fédérale.
Évaluation des renseignements et prise de décision
L'identité du véritable employeur sera établie sur la base d'une détermination factuelle qui est propre à chaque cas. Par conséquent, aucun facteur n'est déterminant en soi.
Lors de l'analyse des renseignements recueillis, le Programme du travail ne doit pas examiner seulement la transaction mais également sa substance. À titre d'exemple, qui est responsable :
- du recrutement;
- de la sélection des candidats;
- de la formation;
- de la rémunération; et
- de la prise de mesures disciplinaires.
Même si l'agence prend des mesures disciplinaires, l'entreprise cliente pourrait réglementer les activités quotidiennes du travailleur. Par conséquent, ceci pourrait déplacer le travailleur vers le côté entreprise cliente du continuum. Même si la rémunération est versée par l'agence, le contrat entre celle-ci et l'entreprise cliente pourrait stipuler le montant à payer. Donc, ceci pourrait déplacer le travailleur vers le côté entreprise cliente du continuum.
Évaluation des faits
L'évaluation des faits est primordiale dans la détermination du véritable employeur. Les faits correspondant à chaque facteur mentionné dans l’annexe A seront examinés et chaque catégorie sera évaluée pour prendre la décision. Plusieurs faits, comme le recrutement et la formation, peuvent indiquer qu'il s'agit d'un employé de l'agence. Cependant, il est possible d'accorder une plus grande valeur à la direction et au contrôle. En conséquence, la personne pourrait être considérée comme étant un employé de l'entreprise cliente.
Une fois que la relation globale a été examinée et évaluée, les parties doivent être informés de la décision par écrit.
Autres relations tripartites – transport routier
Dans l’industrie du transport routier, il peut également y avoir des relations tripartites impliquant des intermédiaires entre :
- l’entreprise de transport routier (le client); et
- le conducteur (le travailleur).
Ces entreprises intermédiaires peuvent être une agence ou une autre entreprise de transport routier telle qu'un propriétaire exploitant.
Dans ces situations, la relation tripartite se compose des parties suivantes :
- l'entreprise de transport routier ou le transporteur est considéré comme le plus grand transporteur motorisé. Ceux-ci s'occupent du transport de marchandises ou de passagers par véhicule motorisé. Dans la plupart des cas, ces entreprises sont des grands transporteurs motorisés. L’entreprise peut également posséder ses propres camions, qui sont utilisés par ses propres travailleurs. L'entreprise est alors considérée comme le client dans la relation;
- l'entreprise intermédiaire, qui peut être une agence de placement ou une autre entreprise de transport routier :
- les agences opérant dans l’industrie du transport routier peuvent se spécialiser en fournissant des conducteurs aux entreprises de transport. Ces agences fournissant des services de conducteurs peuvent être considérées comme une entreprise intermédiaire. Celles-ci seraient l’intermédiaires entre le transporteur routier (le client) et le conducteur (le travailleur);
- les propriétaires exploitants sont des petites entreprises qui offrent des services de transport aux transporteurs routiers (clients) contre une somme d'argent convenue. Ils possèdent ou louent un ou plusieurs camions et sont responsable des dépenses liées à leurs camions. Ils peuvent embaucher et payer des conducteurs afin de les aider dans leur activité. Le propriétaire exploitant peut être lui-même un conducteur dans sa propre entreprise. Dans la relation tripartite, le propriétaire exploitant qui emploie un ou plusieurs conducteurs peut être perçu comme une entreprise de camionnage intermédiaire. Il serait l’intermédiaire entre le transporteur routier (le client) et le conducteur (le travailleur);
- le conducteur est le travailleur et il utilise un véhicule motorisé.
Dans ces situations, il se peut que la relation juridique ne soit pas clairement définie. Par conséquent, les concepts, principes et questions figurant dans la présente politique peuvent être appliqués dans le cadre de l'enquête. Cela permettra de déterminer le véritable employeur.
Étudiants stagiaires répondant aux exigences de leur programme d’enseignement
Un étudiant stagiaire effectue son stage afin de répondre aux exigences de son programme d’enseignement. Les types d’activités qui répondront aux exigences de son programme doivent être décrites dans des documents. Ces documents doivent être produits par l’établissement d’enseignement de l’étudiant stagiaire. Ils doivent aussi être fournis à l’employeur avant le début du stage.
Un étudiant stagiaire doit seulement exercer les activités dans son milieu de travail qui sont alignés avec ceux identifiés dans les documents de stage.
Un étudiant stagiaire peut être sujet à une relation tripartite (par exemple, un étudiant stagiaire effectuant des activités pour un propriétaire-opérateur de la compagnie qui a été nommé sur l’entente de stage). Si c’est le cas, le Programme du travail enquêtera la relation avec le « véritable employeur » en utilisant l’approche et les principes décrits dans cet IPG.
Bien que le Programme du travail ferait une détermination sur le « véritable employeur », il est important de ne pas oublier que l’étudiant stagiaire n’a pas d’employeur en soi. Cette situation s’explique par le fait que l’étudiant stagiaire n’est pas engagé à une relation employeur/employé. Le Programme du travail détermine qui est le véritable employeur dans l’unique but de déterminer:
- pour quel employeur l’étudiant stagiaire exerce des activités; et
- si le stage de l’employeur répond aux exigences du programme d’enseignement de l’étudiant stagiaire.
À la conclusion de l’enquête, l’étudiant stagiaire peut être traité comme un employé en vertu du Code si :
- un agent détermine que l’étudiant stagiaire n’a pas exercé des activités dans son milieu de travail pour l’employeur qui étaient identifiés dans les documents de stage; et
- le stage n’a pas répondu aux exigences du programme d’enseignement de l’étudiant stagiaire.
Conclusion
Le Code régit les relations de travail entre bipartites qui implique :
- un employeur et un employé; ou
- un stagiaire ou un étudiant stagiaire et son employeur pour qui le stagiaire ou l’étudiant stagiaire exerce des activités.
Les caractéristiques d'un employeur peuvent être partagées dans une relation tripartite entre 2 employeurs distincts, soit l'agence et l'entreprise cliente. Dans le but de déterminer le « véritable employeur », la relation globale sera examinée et évaluée. Considérez qu'aucun facteur n'est déterminant et qu'une liste détaillée de facteurs doit être prise en considération.
Annexe A : Liste de facteurs utilisée afin de déterminer le « véritable employeur » dans une relation tripartie
Les facteurs suivants seront considérés pour déterminer qui est le véritable employeur dans la relation tripartie. Quel parti :
- fourni au plaignant une orientation de travail;
- les absences lui sont reportées et quel parti approuve les absences du plaignant;
- approuve les congés du plaignant;
- réalise les performance d’évaluation du plaignant;
- autorise le temps supplémentaire;
- fourni la formation;
- exerce un contrôle sur le travail du plaignant;
- rémunère le plaignant;
- fourni du travail assigné au plaignant;
- embauche le plaignant;
- a le pouvoir de suspendre ou de congédier le plaignant;
- le plaignant a intégré (par exemple, le port de l’uniforme avec le logo de la compagnie).
Annexe B : Table de jurisprudence
- Association du personnel navigant des lignes aériennes canadiennes (Syndicat canadien de la Fonction publique - lignes aériennes) c. Nationair (Nolisair International Inc.) et Canadian Air Personnel et Canadian Aviation Services International (version PDF 1,87 MB), [1987] CCRT no 630
- Bernshire Mobile Maintenance Ltd. c. Conseil canadien des relations du travail, [1986] 1 C.F.
- Blackburn c. La société canadienne des postes, [2000] F.C.J. no 780
- Global Helicopter Pilots Assn. v. CHC Global Operations (2008) Inc.[2009], CCRI no 459; affirmed 2010 C.C.L.C. 220-028 (F.C.A.)
- Les Entreprises Motex Inc. et al.,[2001] CCRI no. 133
- Mackie Moving Systems Corp. [2002] CCRI no 156
- Mohawks of the (Bay of Quinte) Tyendinaga Mohawk Territory, [2000] CCRI no 89
- Pointe-Claire (Ville) c. Québec (Tribunal du travail), [1997] 1 R.C.S. 1015
- Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada (TCA-Canada) c. Penske Logistics et Direct Driver Personnel; ADS Employment Services, [2001] CCRI no 146
- Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes c. Adecco Services de Ressources Humaines limitée, [2010] CCRI no 528 & 556
- Wolf c. Canada, [2002] 4 C.F. 396
- Zoldy c. OK Transportation Limited, [2002] C.L.A.D. no 58
Détails de la page
- Date de modification :