Décret d’urgence visant à protéger l’habitat du caribou boréal au Québec
Document d'information
Le caribou boréal, aussi appelé caribou forestier au Québec, est une espèce emblématique pour les Canadiens et Canadiennes et il revêt une grande importance pour la culture, l’histoire et le maintien des traditions des peuples autochtones. Auparavant abondantes, les populations du Canada sont maintenant estimées à moins de 34 000 individus et les données indiquent que l’espèce est en déclin dans plusieurs régions du pays. Le caribou boréal est inscrit sur la liste des espèces menacées du Canada depuis 2003, ce qui signifie que l’espèce pourrait disparaître si rien n’est fait pour la protéger.
Mise en place d’un décret d’urgence au Québec
Bien que les provinces et les territoires aient la responsabilité première de la gestion des terres et de la faune sur leur territoire, la Loi sur les espèces en péril (LEP) prévoit des dispositions pour protéger les espèces en péril et leur habitat sur le territoire non domanial. C’est notamment le cas de l’article 80 qui précise que le ministre de l’Environnement et du Changement climatique est dans l’obligation de recommander au gouverneur en conseil la prise d’un décret d’urgence s’il est d’opinion qu’une espèce est exposée à des menaces imminentes pour sa survie ou son rétablissement.
À la suite de la recommandation du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, le gouvernement du Canada entamera les démarches visant à mettre en place un décret d’urgence pour contrer les menaces imminentes auxquelles font face les trois populations de caribou boréal les plus à risque au Québec, soit celles de Val-d’Or, de Charlevoix et de Pipmuacan. Les populations de Val-d’Or et de Charlevoix vivent en enclos à longueur d’année avec respectivement 9 et 30 individus. Val-d’Or a déjà franchi le seuil de quasi-disparition et Charlevoix demeure très près d’atteindre ce seuil. La population de Pipmuacan, qui compte moins de 300 bêtes, pourrait franchir ce seuil dans environ 10 ans.
Au cours des prochaines semaines, le gouvernement du Canada consultera le gouvernement du Québec, les communautés autochtones du Québec, la population et les parties impliquées et intéressées, notamment les communautés locales et les industries, afin de préciser l’étendue des zones potentielles de protection et la portée des interdictions proposées dans ces zones. À la suite de ces consultations, l’élaboration du décret sera finalisée. Le décret est un règlement qui, une fois approuvé par le gouverneur en conseil, protégera des zones ciblées du meilleur habitat disponible pour les populations de Val-d’Or, de Charlevoix et de Pipmuacan sur les terres provinciales du Québec. Les menaces imminentes au rétablissement sont dues à l’augmentation de l’étendue des perturbations liées à de multiples menaces, notamment les répercussions de l’exploitation forestière pour des activités industrielles et l’extension du réseau de chemins multiusages. Le décret interdira les activités qui contribuent à ces menaces imminentes. En vertu de la Loi sur les espèces en péril, si le Québec devait mettre en place des mesures de protection concrètes qui permettraient au ministre de conclure que l’espèce ne fait plus face à des menaces imminentes à son rétablissement, le gouverneur en conseil pourrait, à la suite de la recommandation du ministre, retirer le décret.
Le dépôt de la stratégie pour les caribous forestiers et montagnards du Québec a été reporté à de nombreuses reprises au cours des dernières années. Bien que deux projets pilotes aient récemment été annoncés, le gouvernement du Québec n’a présenté aucune stratégie globale et l’espèce fait toujours face à des menaces imminentes à son rétablissement.
Le caribou boréal au Québec et au Canada
Le Québec joue un rôle majeur dans le rétablissement de l’espèce puisqu’il abrite environ 15 p. 100 des populations de caribou boréal du Canada. En 2023, le gouvernement du Québec estimait que les populations de caribou boréal comptaient entre 6 162 et 7 445 individus. La majorité des populations du Québec sont en déclin. Cela s’explique notamment par la perte ou la modification de l’habitat du caribou.
Une espèce au cœur de la forêt boréale
Le caribou boréal joue un rôle important pour l’écosystème de la forêt boréale. Le caribou boréal a tendance à éviter les zones perturbées. Par conséquent, ses déplacements et l’état de ses populations peuvent nous aider à mieux comprendre l’état de santé globale de la forêt boréale. La protection de l’habitat de l’espèce peut avoir des avantages importants pour d’autres espèces en péril, la faune et la flore, et plus globalement, pour la biodiversité. Par exemple, la protection de l’habitat du caribou boréal partout au Canada pourrait être bénéfique à 90 p. 100 des espèces d’oiseaux et de mammifères qui vivent dans la forêt boréale et protéger des zones névralgiques de stockage du carbone dans le sol.
Menaces
Les populations de caribou boréal ont connu un déclin important partout au Canada au cours des dernières décennies. Cela est dû en grande partie à l’augmentation de la prédation liée aux perturbations de l’habitat causées par l’humain. Le caribou a besoin de vastes parcelles de forêts matures et anciennes. Les forêts plus anciennes permettent aux caribous de se séparer de leurs prédateurs. Les perturbations de l’habitat comprennent les utilisations des terres par les industries telles que l’exploitation forestière, minière, pétrolière et gazière, ainsi que les « éléments linéaires » comme les routes. Il existe également des perturbations naturelles dans l’habitat du caribou boréal, notamment des incendies de forêt et des infestations d’insectes. Les perturbations naturelles et humaines peuvent donner lieu à des peuplements d’arbres plus jeunes, qui ont tendance à attirer d’autres proies comme l’orignal et le cerf. L’orignal et le cerf peuvent être porteurs de maladies qui menacent le caribou boréal, ainsi qu’augmenter le nombre de prédateurs, comme les ours et les loups, dans l’habitat du caribou. Les habitats perturbés, y compris les chemins multiusages, peuvent faciliter le déplacement des prédateurs dans l’habitat du caribou, augmentant ainsi les chances que les prédateurs rencontrent les caribous.
Les changements climatiques pourraient également avoir des effets à long terme sur le caribou boréal. Les effets des changements climatiques devraient augmenter les conséquences des perturbations naturelles et humaines sur le caribou boréal et son habitat. Tout comme les perturbations, des hivers moins rigoureux et une proportion croissante de peuplements de feuillus dans les parties sud de la forêt boréale pourraient augmenter la présence des cerfs, des orignaux et des prédateurs dans le nord, ce qui contribuerait au déclin de la répartition du caribou boréal. De plus, des conditions plus chaudes et plus sèches devraient augmenter la fréquence et l’ampleur des incendies dans la forêt boréale du Canada, augmentant ainsi le niveau de perturbation global.
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