Préserver les forêts caroliniennes de l'Ontario : préserver les espèces d'oiseaux chanteurs en péril : chapitre 6


Guide de l'aménagement des forêts respectueux de l'habitat

De bonnes pratiques forestières peuvent permettre de conserver et d'améliorer une forêt, d'un point de vue économique, pendant une longue période, et ce, sans nuire aux processus écologiques qui maintiennent et créent les habitats de la faune. Ces pratiques permettent de réduire davantage les risques de dégrader ou de détruire l'habitat des espèces aviaires forestières en péril. Il existe des solutions de récolte viables qui peuvent profiter aux propriétaires fonciers et aux espèces sensibles à la superficie, notamment aux espèces en péril. Bon nombre d'espèces se développent dans une forêt soigneusement aménagée. Le propriétaire continue d'avoir un revenu à long terme grâce à cette forêt. L'exploitation forestière, lorsqu'elle est effectuée intelligemment, permet d'établir un patrimoine important pour la préservation de notre héritage naturel et de protéger les intérêts économiques à long terme pour les générations futures.

Parmi les pratiques d'aménagement des forêts respectueuses de l'habitat figurent : la sélection d'un seul arbre et la récolte sélective par groupe d'arbres, qui sont censées reproduire à petite échelle des perturbations naturelles comme les foudres qui déclenchent des feux à l'échelle locale, les déracinements par le vent, les tempêtes de verglas et les maladies, que les forêts de feuillus de l'est de l'Amérique du Nord ont subis. La récolte sélective donne lieu à des peuplements de forêts qui abritent une variété d'habitats et dont l'âge diffère. Il est préférable de retirer un tiers ou moins du volume de bois par abattage et de choisir des arbres à différents stades de croissance afin de conserver le couvert forestier et de favoriser la croissance de tous les autres arbres. La récolte périodique réalisée de cette manière est rentable financièrement et offre à la forêt une diversité en matière de structures ainsi qu'un couvert forestier en permanence.

Parmi les pratiques qui nuisent à la préservation des forêts caroliniennes et aux espèces qui en sont dépendantes figurent :1) la coupe à blanc, où tous les arbres mûrs sont abattus en une seule coupe; 2) l'écrémage ou la coupe sélective, où les meilleurs arbres ou les meilleures espèces sont abattus et 3) la coupe à diamètre limite, où tous les arbres dont le diamètre est supérieur à un certain diamètre sont abattus. Ces pratiques diminuent la diversité en matière de structures et suppriment les caractéristiques des forêts matures qui sont nécessaires pour bon nombre d'oiseaux se reproduisant dans les forêts.

L'importance de la planification

La planification minutieuse à tous les stades de l'aménagement forestier peut contribuer à établir des objectifs économiques réalisables, à minimiser les dommages environnementaux et à protéger les espèces sensibles ainsi que les caractéristiques du site. Il est recommandé de consulter des forestiers professionnels ainsi que d'autres experts avant de planifier un projet d'aménagement forestier, notamment l'exploitation des arbres et la mise en valeur de peuplements. Le choix de la méthode (système sylvicole) dépendra des espèces d'arbres qui composent la forêt et des conditions. Certaines espèces peuvent se reproduire dans des milieux plus ombragés : elles se sont adaptées à la pratique de sélection d'un seul arbre; tandis que d'autres ont besoin de plus de lumière et de cavités plus importantes créées grâce à la pratique de la récolte sélective par groupe d'arbres.

Il est possible d'obtenir des renseignements sur l'aménagement forestier dans le sud de l'Ontario auprès du ministère des Richesses naturelles de l'Ontario (consultez la liste des documents et des liens hypertextes du ministère des Richesses naturelles de l'Ontario sous Programmes intéressants et suggestions de lecture).

Pratique de la sélection d'un seul arbre

Il s'agit de la pratique d'abattage la moins nuisible. Elle est quasi semblable à une perturbation naturelle de petite échelle. Pour cela, il est recommandé de sélectionner différents arbres de différentes tailles et de les abattre à de courtes périodes de 10 ou 20 ans. Dans ce cas, il faut choisir ceux qui sont soit en mauvais état ou dont le bois est de mauvaise qualité (évaluation faite par un forestier qualifié ou par une personne certifiée pour le marquage d'arbres) ou dont le bois est de bonne qualité pour être exploité. De tels abattages laissent une forêt fragmentée avec de petites ouvertures ou cavités, ce qui favorise la croissance des arbres privilégiés (avec le bois, les graines, la faune ou d'autres éléments) et permet aux arbres de se régénérer de façon naturelle, car les principaux éléments des arbres sont là. La durée de ces espaces est relativement courte car les arbres ont tendance à se régénérer rapidement. La pratique de la sélection d'un arbre réalisée en permanence fera en sorte que de nouvelles cavités soient créées. Entre-temps, la conservation de bon nombre d'arbres plus anciens permet la continuation des cycles écologiques nécessaires (y compris le replantage).

Le fait de conserver un grand nombre d'arbres ayant un diamètre important dans la forêt permet d'avoir un couvert forestier en permanence, habitat le plus bénéfique pour la majorité des espèces d'oiseaux chanteurs en péril. En même temps, les petites ouvertures et cavités parsemées créées grâce à la pratique de la sélection d'un seul arbre offriront un autre type d'habitat, idéal pour la Paruline à capuchon. Des espaces de cinq mètres peuvent offrir un habitat convenable pour ces oiseaux chanteurs.

Pratique de la récolte sélective par groupe d'arbres

Cette pratique est une méthode d'exploitation de petites parcelles ou de groupes d'arbres qui crée un ensemble d'espaces au sein de la forêt où de jeunes arbres peuvent pousser.Les espaces doivent avoir un diamètre inférieur à deux fois la hauteur des arbres mûrs (couvert); pour la plupart des espèces d'arbres ciblées, ces espaces varient entre une et deux fois la hauteur du couvert forestier. Chaque fois, plus d'un ou de deux arbres sont abattus. Les espaces sont légèrement plus grands que ceux laissés par la pratique de la sélection d'un seul arbre. La pratique de la récolte sélective par groupe d'arbres peut également être intégrée à la pratique de sélection d'un seul arbre. Dans les deux cas, les peuplements doivent être de nouveau abattus uniquement lorsque les arbres qui ont poussé occupent le volume des arbres qui ont été coupés (il faut habituellement une période de 10 à 20 ans entre les récoltes).

À condition que les opérations permettent de conserver certaines parcelles de terrains boisés abritant des arbres à feuilles caduques mûrs non abattus, les pratiques bien planifiées de récolte sélective par groupe d'arbres peuvent préserver les conditions du couvert fermé apprécié de la majorité des espèces d'oiseaux chanteurs forestiers en péril. Finalement, quelques années après leur création, les espaces au sein des terrains boisés seront remplacés par des arbres et attireront la Paruline à capuchon qui se sert des petits espaces pour nicher. Le nombre d'espaces créés pour chaque cycle d'abattage doit être calculé par un forestier professionnel pour que ce soit durable. Dans la plupart des cas, il faut avoir moins d'un espace par hectare, ce qui offrira à la Paruline à capuchon qui se reproduit, un habitat constitué d'un couvert arbustif qui lui permet de rechercher sa nourriture. La Paruline peut revenir chaque année jusqu'à ce que les gaulis atteignent plus de cinq mètres de haut et commencent à faire de l'ombre au sous-bois dense, ce qui peut prendre 12 ans, voire plus.

Forêts anciennes au matures qui sont bien gérées

Forêts anciennes au matures qui sont bien gérées
Les forêts anciennes au matures qui sont bien gérées fournissen des habitats sauvages variés. Cette coupe transversale montre un écart dans le couvert forestier dû à une couple sélective et à un ravin.

Autres pratiques d'aménagement

Le mode de régénération par coupes progressives est une pratique d'aménagement des forêts équiennes qui suppose l'abattage de tous les arbres mûrs en réalisant de multiples coupes partielles. Les coupes préparatoires peuvent être réalisées pour éclaircir le peuplement et ainsi offrir aux arbres choisis plus d'espace pour leur croissance. L'étape suivante, l'abattage des arbres régénérés, a pour objectif de stimuler leur croissance grâce à une exposition plus importante à la lumière. Quelques années plus tard, on effectue un ou plusieurs abattages pour supprimer les arbres mûrs restants. L'aménagement des arbres du peuplement final est centré sur la sélection et la conservation d'arbres qui correspondent à des objectifs particuliers en matière d'aménagement des forêts. Cette pratique peut être réalisée au cours des premiers stades de croissance.

Si la pratique de la coupe progressive permet d'avoir suffisamment de couvert forestier, de nombreuses espèces d'oiseaux forestiers peuvent rester et le nombre d'espèces d’oiseaux peut même augmenter après la coupe de régénération, car il existe alors un habitat formé d'arbres mûrs au début du stade de succession. Toutefois, le nombre d'oiseaux forestiers qui préfèrent les forêts anciennes ou les forêts matures diminuera par rapport à ceux qui préfèrent les peuplements qui n'ont pas été abattus ou qui ont été abattus de manière sélective. Conserver au moins 25 arbres mûrs (de la forêt d'origine) par hectare au cours de l'abattage final peut aider à conserver certains habitats particuliers ainsi que les espèces qui en dépendent. Aussi, modifier la fréquence et la période de l'abattage peut permettre d'avoir des arbres à différents stades de croissance au sein de la zone d'exploitation forestière.

La pratique du mode de régénération par coupes progressives n'est cependant pas recommandée pour des endroits où la présence d'une des cinq espèces d'oiseaux indiquées dans ce document a été observée.

Les coupes à diamètre limite peuvent restreindre les choix ultérieurement.

Une coupe à diamètre limite suppose l'abattage de tous les arbres dont le diamètre dépasse une certaine valeur. Cette pratique amoindrit considérablement la santé écologique de la forêt et réduit les possibilités d'avoir des revenus durables à long terme provenant de l'abattage d'arbres. Il reste souvent aux propriétaires fonciers un peuplement de forêts de mauvaise qualité et une diversité génétique moindre. Les coupes à diamètre limite font également disparaître tous les vieux arbres et élimineront très certainement l'habitat de reproduction des espèces d'oiseaux chanteurs de la forêt en péril et d'autres oiseaux des terrains boisés qui ont besoin d'un habitat forestier composé d'arbres mûrs.

Les cycles de coupe sont essentiels

Les meilleures pratiques pour la conservation de l'habitat ainsi que les avantages économiques tirés de la forêt permettent de conclure que seule une partie de la forêt doit être abattue à un moment donné. L'utilisation des cycles de coupe permet de conserver l'habitat essentiel des oiseaux forestiers grâce à la création d'une variété de conditions (couvert et ouvert) du couvert forestier qui permettent de répondre aux besoins des espèces d'oiseaux en péril qui requièrent des forêts matures et à celles qui requièrent des forêts composées de jeunes arbres ou de clairières. L'application de cycles de coupe garantit un revenu durable pour le propriétaire foncier.

Minimiser les répercussions de l'exploitation forestière

Les opérations doivent être prévues en dehors de la période de reproduction afin de minimiser les répercussions de l'exploitation forestière sur les oiseaux qui se reproduisent. La destruction de nids est interdite pour tout oiseau inscrit dans la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs du gouvernement fédéral. La meilleure période pour exploiter les forêts est entre octobre et mars, lorsque les oiseaux ne nichent pas et lorsque le sol est gelé ou suffisamment sec afin de minimiser les dégâts sur la couverture morte ou pour les éviter. Planifier soigneusement de sorte que la taille et le nombre de pistes et de jetées restent faibles; le nombre de perturbations causées par l'homme sera ainsi réduit et la prolifération de plantes envahissantes indigènes et non indigènes sera par la même occasion évitée.

Préserver les lisières de forêt

Les lisières de forêt à découvert exposent la forêt à des risques importants de déracinement par le vent, de sécheresse, de maladie, d'exposition aux pesticides et aux plantes envahissantes. Il ne faut pas couper les arbres à moins de 20 à 30 mètres de la lisière de la forêt. Un peuplement dense d'arbres autour des terrains boisés, en particulier au sud-ouest, diminuera les effets néfastes du vent et du soleil sur la forêt intérieure.

Avoir une forêt intérieure intacte

Envisager de conserver une zone intacte non exploitée de façon permanente au milieu de la forêt (à l'intérieur) qui servira de réserve d'arbres mûrs. Les habitats constitués d'arbres mûrs abritent de nombreuses espèces végétales et animales qui ne se trouvent pas (ou qui ne sont pas répandues) dans les forêts qui comportent de jeunes arbres. Les forêts matures peuvent répondre aux besoins en matière d'habitat de toutes les espèces d'oiseaux chanteurs en péril de la forêt, car elles offrent des zones étendues où le couvert est fermé ainsi qu'une variété d'ouvertures et d'espaces naturels créés grâce à la chute naturelle d'arbres.

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