Stratégie de gestion du risque lié au sulfonate de perfluorooctane, ses sels et ses précurseurs

Juin 2006

1. Enjeu

Une évaluation préalable des effets sur l'environnement et la santé humaine que posent le sulfonate de perfluorooctane (SPFO), ses sels et ses précurseurs, a été effectuée en vertu des dispositions relatives à la catégorisation et à l'évaluation des risques de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999 (LCPE). L'évaluation préalable a été effectuée en tenant compte du fait que certains de ces composés apparaissant dans la liste pilote de la Liste intérieure (LI) doivent être évalués, afin de vérifier s'ils correspondent aux critères de persistance et/ou de bioaccumulation et de toxicité inhérente de la LCPE, et de répondre à une demande d'un citoyen au ministre de l'Environnement souhaitant ajouter ces composés à la Liste des substances d'intérêt prioritaire (LSIP).

Le 1er juillet 2006, le rapport final d'évaluation préalable des effets sur l'environnement a été publié dans la Partie I de la Gazette du Canada. En se fondant sur les données publiées, le rapport sur l'évaluation préalable des effets sur l'environnement en vient à la conclusion que le SPFO, ses sels et ses précurseurs pénètrent dans l'environnement dans des quantités ou concentrations ou dans des conditions à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur sa diversité biologique. Elle conclut aussi que le SPFO et ses sels satisfont au critère de persistance en vertu du Règlement sur la persistance et la bioaccumulation de la LCPE. Le poids de la preuve scientifique suffit à conclure que le SPFO et ses sels sont bioaccumulables, mais que les données pertinentes à ces substances ne satisfont pas au critère relatif à la quantité de bioaccumulation défini dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation de la LCPE. C'est pourquoi le SPFO et ses sels ne respectent pas les conditions définies dans le paragraphe 77(3) visant l'ajout obligatoire de substances à la Liste de quasi-élimination.

Selon le rapport final de l'évaluation préalable des effets sur l'environnement, le SPFO, ses sels et ses précurseurs satisfont au critère défini à l'article 64(a) de la LCPE. Dans le rapport préliminaire de l'évaluation préalable des effets sur la santé humaine de 2004, on peut lire que le SPFO, ses sels et ses précurseurs ne satisfont pas au critère défini à l'article 64(c) de la LCPE.

Les ministres de l'Environnement et de la Santé doivent maintenant proposer un instrument de contrôle en vertu de la LCPE comprenant des mesures de prévention ou de contrôle servant à gérer ses substances au plus tard le 1er juillet 2008. De plus, l'instrument proposé doit entrer en vigueur au cours des 18 mois suivant sa proposition.

2. Contexte

2.1 Substances

Le SPFO, ses sels et ses précurseurs appartiennent tous à un groupe d'une catégorie plus large de substances chimiques fluorées communément appelées les composés perfluoroalkyliques qui contiennent des atomes de carbone qui sont entièrement saturés de fluor. La stabilité extrême et les propriétés uniques de ces composés perfluorés tiennent à la force des liaisons carbone-fluor (C-F).

Aux fins de la présente, l'expression « SPFO et ses sels » renvoie au groupe de composés comprenant l'anion SPFO, l'acide perfluorooctane sulfonique (APFS) et les sels du SPFO (sel de potassium du SPFO, sel d'ammonium du SPFO, sel de lithium du SPFO et sel diéthanol-amine du SPFO). Bien que le SPFO existe sous forme d'anion, d'acides et de sels, la forme anionique est la plus répandue dans l'environnement. L'anion SPFO dispose de la formule moléculaire C8F17SO3- et de la formule de structure CF3(CF2)7SO3-, comme l'illustre la figure 1.

Figure 1 : Structure anionique du SPFO

Figure 1 : Structure anionique du SPFO

Description longue de la figure 1

La figure 1 montre la formule développée de l'anion SPFO CF3(CF2)7SO3-. Une formule développée est utilisée pour illustrer les liens entre les atomes dans la molécule.  

L'expression « précurseurs du SPFO » renvoie à des composés qui contiennent les composés des groupes C8F17SO2, C8F17SO3 ou C8F17SO2N. Ces composés ont été incorporés à l'évaluation préalable des effets sur l'environnement et la santé humaine, ainsi que dans la présente stratégie de gestion du risque, puisque ces substances ont des utilisations semblables, qu'elles peuvent se transformer ou se dégrader pour former du SPFO dans l'environnement, et que le SPFO est le produit de dégradation final de ces substances.

La liste des composés considérés comme des SPFO, des sels et des précurseurs du SPFO, provenant du rapport final de l'évaluation préalable des effets sur l'environnement, est présentée à l'Annexe 1. Cette liste n'est cependant pas exhaustive. D'autres précurseurs de SPFO qui ne sont pas énumérés sur celle-ci pourraient existés.

2.2 Fabrication, importation et utilisation du SPFO, de ses sels et de ses précurseurs

Le SPFO, ses sels et ses précurseurs ne sont pas fabriqués au Canada ni exportés par le Canada. Ils sont plutôt importés sous forme de produits chimiques bruts, de produits et de formulations et d'articles fabriqués.

Entre 1997 et 2000, environ 600 tonnes de composés perfluoroalkyliques ont été importés au Canada; le SPFO et ses précurseurs ont représenté 43 % de ces importations. Ces substances se trouvaient principalement dans des produits hydrofuges, oléofuges, antisalissants et imperméables aux graisses qui sont appliqués sur les tissus, le cuir, les emballages et les tapis. Elles étaient aussi des additifs dans les mousses extinctrices, les liquides hydrauliques en aviation, le développement et tirage photo, les peintures et les revêtements.

Le principal fournisseur de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs a volontairement cessé sa production en 2002.

Selon la documentation recueillie pour appuyer la présente stratégie de gestion du risque, depuis 2002, les importations de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs au Canada ont presque cessé. Un sondage sur les méthodes d'utilisation publié le 15 janvier 2005, commandé dans le cadre de la LCPE de 1999, a confirmé cette situation. Le sondage visait les fabricants, les exportateurs et les importateurs de SPFO en quantité dépassant 100 kg, dans des concentrations supérieures à 10 grammes par kilogramme durant l'année civile de 2004. Environ 3 tonnes de SPFO ont été importés en 2004 sous forme de surfactant dans l'industrie de l'électrodéposition. Le sondage a aussi permis de confirmer à nouveau qu'il n'existe aucun fabricant ou exportateur de SPFO au Canada. Sauf une réserve estimée de 300 tonnes (ce qui représente environ 3 tonnes de SPFO) de mousse à formation de pellicule aqueuse (mousse AFFF) servant dans le domaine des services d'incendie achetée avant 2002, on suppose que la majorité des stocks de SPFO dans tous les autres secteurs ont été écoulés.

Malgré l'arrêt graduel volontaire de la fabrication de SPFO et du faible niveau actuel des importations de SPFO, il est possible que des produits et des articles contenant du SPFO et que du SPFO soient, à l'avenir, importés au Canada en quantités supérieures, car d'autres pays produisent toujours du SPFO.

3. Pourquoi agir?

Selon le rapport final de l'évaluation préalable des effets sur l'environnement, le SPFO, ses sels et ses précurseurs pénètrent dans l'environnement dans des quantités ou concentrations ou dans des conditions à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur sa diversité biologique. Le SPFO est anthropique, et il a été trouvé dans les biotes vertébrés et invertébrés partout dans le monde. Au Canada, on a trouvé du SPFO dans les biotes de niveau trophique supérieur, comme les poissons, les oiseaux ichtyophages et les mammifères marins de l'Arctique qui vivent loin des sources connues de ce composé ou des usines de fabrication. La bioaccumulation et la biomagnification du SPFO dans la faune posent aussi des risques.

Selon l'évaluation des effets sur l'environnement, le SPFO et ses sels satisfont au critère de persistance en vertu du Règlement sur la persistance et la bioaccumulation. Même s'il existe des données scientifiques prouvant que le SPFO est un polluant organique persistant qui s'accumule dans les animaux et s'amplifie dans les chaînes alimentaires, le SPFO ne satisfait pas au critère relatif à la quantité de bioaccumulation défini dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation et c'est pourquoi le SPFO, ses sels et ses précurseurs ne respectent pas les conditions définies dans le paragraphe 77(3) visant l'ajout obligatoire de substances à la Liste de quasi-élimination.

En raison des conclusions tirées dans l'évaluation préalable des effets sur l'environnement, le SPFO, ses sels et ses précurseurs seront gérés ensemble, en vertu des dispositions de la LCPE, afin d'atteindre le niveau d'émissions le plus faible dans l'environnement possible au plan technique et économique, quelque soit la source d'émission. La section 8 de ce rapport élabore davantage l'approche de gestion du risque proposée ainsi que les objectifs de gestion du risque.

4. Utilisations actuelles

En janvier 2005, un sondage sur les méthodes d'utilisation du SPFO, de ses sels et de ses précurseurs, en vertu de l'alinéa 71(1)(b) de la LCPE, a été effectué. Les entreprises devaient indiquer si elles fabriquaient, importaient ou exportaient plus de 100 kilogrammes d'une substance appartenant à la catégorie déterminée dans l'Annexe 1 de l'avis, si la substance était seule, dans un mélange ou une composante d'un produit, et si sa concentration était supérieure à 10 grammes par kilogramme de mélange ou de produit.

Les résultats du sondage ont confirmé que le SPFO, ses sels et ses précurseurs n'étaient pas fabriqués au Canada ni exportés du Canada. Seule une substance a été importée au Canada, représentant une quantité d'environ 3 tonnes de SPFO. La substance importée était vendue sous la forme de surfactant dans l'industrie d'électrodéposition.

5. Sources d'exposition

Il n'existe aucune source naturelle connue de SPFO, de ses sels ou de ses précurseurs dans l'environnement. Les rejets de SPFO dans l'environnement varient selon le procédé, le produit et les pratiques d'élimination de l'utilisateur final.

Le SPFO, ses sels et ses précurseurs peuvent pénétrer dans l'environnement par l'entremise des décharges d'eaux usées municipales et industrielles traitées ou non dans les eaux de surface et par l'entremise des lixiviats des sites d'enfouissement lorsque les produits et matériaux contenant ces substances sont envoyés à des fins d'élimination. Le SPFO peut aussi être rejeté directement dans l'air, le sol et les eaux de surface lors de l'utilisation de produits contenant du SPFO. On discutera de ces sources d'exposition dans la présente section.

Mousse à formation de pellicule aqueuse (mousse AFFF)

La mousse AFFF fabriquée et importée au Canada avant le début de l'arrêt graduel volontaire de la production en 2002 contenait du SPFO. Cette mousse sert principalement à combattre les incendies de carburant. Parmi les secteurs qui utilisaient la mousse AFFF, on comptait l'armée et d'autres secteurs d'activité du gouvernement du Canada, l'aviation civile, les services de prévention des incendies municipaux, le secteur pétrolier, l'industrie pétrochimique et les intervenants en cas d'urgence. L'équipement servant à distribuer la mousse AFFF peut être fixe ou mobile. Les systèmes fixes sont placés dans des édifices ou d'autres structures permanentes, tandis que les systèmes mobiles sont, par exemple, des extincteurs portatifs ou des systèmes installés dans les véhicules d'urgence qui servent à accéder au lieu d'incendie.

Il pourrait y avoir des rejets de SPFO lorsque la mousse est utilisée durant les essais et les exercices de formation, pour lutter contre les incendies de carburant, durant les rejets accidentels ou lorsqu'un produit expiré doit être retiré et éliminé. Ces activités peuvent entraîner des rejets directs de mousse AFFF dans les eaux de surface, les eaux souterraines et le sol. Selon la nature de l'activité, il n'est pas toujours possible de recueillir et de pré-traiter les résidus de mousse AFFF ou de les contenir en vue d'une élimination adéquate. La mousse AFFF recueillie est considérée comme étant un déchet dangereux. Elle est donc envoyée à un site d'enfouissement de déchets dangereux ou à une usine approuvée de destruction thermique afin qu'elle soit incinérée à une température élevée. Selon les estimations actuelles de l'industrie, une moyenne de 10 p. cent des stocks de mousse AFFF existants sont utilisés chaque année.

Selon les données recueillies dans ce secteur industriel, la mousse AFFF contenant du SPFO n'a pas été importée au Canada depuis 2002. Toutefois, en raison de la durée de vie moyenne de la mousse AFFF qui peut être supérieure à 25 ans, et que l'estimation des stocks existants de mousse AFFF contenant du SPFO dans les aéroports, les installations militaires et les industries au Canada est d'environ 300 tonnes (qui représente environ 3 tonnes de SPFO), la mousse AFFF demeure une source d'émission de SPFO potentielle.

Utilisation de surfactant dans le secteur de l'électrodéposition

Les surfactants contenant du SPFO servent à réduire la tension superficielle des solutions de placage dans le secteur de l'électrodéposition. C'est le seul secteur qui importe actuellement du SPFO (environ 3 tonnes en 2004) au Canada. Le SPFO peut pénétrer dans l'environnement par l'entremise de l'eau de rinçage des installations qui est rejetée directement dans les égouts municipaux si la qualité des effluents correspond aux exigences des règlements relatifs aux égouts. Le SPFO n'est pas enlevé de ces systèmes municipaux. Il demeure donc dans l'environnement aquatique en aval. On peut aussi trouver du SPFO dans les boues d'épuration produites par le système de traitement municipal. Celles-ci peuvent être répandues sous forme solide sur le sol ou envoyées à un site d'enfouissement résidentiel. Les boues de métaux peuvent aussi contenir du SPFO. Elles sont consolidées à l'usine d'électrodéposition, puis traitées comme des déchets dangereux. Ce déchet peut ensuite être recyclé, servir de matière dans l'industrie sidérurgique où les résidus de SPFO sont détruits par incinération à température élevée ou envoyés dans un site d'enfouissement approuvée de déchets dangereux à des fins d'élimination finale.

Procédés industriels et de fabrication

L'utilisation du SPFO, de ses sels et de ses précurseurs dans les procédés industriels et de fabrication vise de nombreuses activités dans lesquelles ces substances servent de composants dans les matériaux industriels, commerciaux et de consommation. Le SPFO, ses sels et ses précurseurs ont servi d'additifs dans les tanneries, les usines de textile, les usines de fabrication de tapis et la fabrication d'emballage, afin de protéger les surfaces contre l'eau, l'huile, la saleté et la graisse. Les rejets de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs par ces sources se produit essentiellement lors de la décharge d'eaux usées des procédés industriels ou de fabrication. Toutefois, en raison de la diminution graduelle volontaire de la production en 2002, on suppose que le SPFO n'est plus utilisé dans ces procédés de fabrication.

Élimination des matériaux

Par matériaux, on entend les articles auxquels on a appliqué des produits contenant du SPFO, notamment les tapis, les meubles, les tissus, les articles en cuir, le papier, l'emballage et le matériel de photographie. Toutefois, depuis 2002, ces produits contenant du SPFO n'ont pas été utilisés au Canada pour protéger ces matériaux et l'on suppose que l'importation de matériaux contenant du SPFO est limitée.

Les rejets de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs par ces sources peuvent se produire lorsque de vieux matériaux achetés avant 2002 ou lorsque des matériaux importés de pays n'ayant aucune réglementation relativement au SPFO sont mis au rebut à la fin de leur durée de vie ou, dans le cas de certains papiers, sont envoyés à des usines de recyclage.

L'enfouissement peut entraîner des rejets de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs dans le sol, les eaux de surface et, possiblement, dans les eaux souterraines. Les rejets dans les décharges varient selon la concentration des substances qui demeurent dans les matériaux à la fin de leur durée de vie, les pratiques d'enfouissement et l'existence de systèmes de cueillette des lixiviats.

On doit noter que les lixiviats qui peuvent contenir du SPFO recueillis dans les sites d'enfouissement sont habituellement envoyés aux installations de traitement municipales. Puisque le SPFO n'est pas enlevé des influents à ces installations, le SPFO est donc rejeté directement dans l'environnement aquatique en aval ou est contenu dans des boues bio-solides répandues sur le sol ou envoyées dans les sites d'enfouissement qui produisaient au départ ces mêmes lixiviats.

La majorité du papier et des emballages recouverts de SPFO est envoyée dans les sites d'enfouissement. Toutefois, un certain pourcentage est envoyé dans les installations de recyclage afin qu'il soit re-transformé dans d'autres produits. En raison de l'arrêt graduel de la production en décembre 2002 et de la durée de conservation limitée de ces matériaux dans les systèmes de fabrication et de recyclage, on suppose que la majorité de ces matériaux a déjà été traitée.

L'incinération municipale des déchets solides est une source potentielle d'émissions de SPFO. Toutefois, l'incinération représente moins de 5 p. cent de l'enfouissement des déchets solides au Canada.

Transport atmosphérique à grande distance

On a trouvé du SPFO dans des lieux éloignés partout dans le monde, y compris l'Arctique canadien, où il est présent à des niveaux élevés, par exemple, dans le foie des ours polaires et des phoques annelés, ce qui suggère que les précurseurs du SPFO parcourent de grandes distances. Ce transport atmosphérique à grande distance possible des précurseurs du SPFO dans l'atmosphère ou dans les océans représente une source éventuelle de charge de SPFO dans l'environnement canadien. Les procédés de fabrication du SPFO, de ses sels et de ses précurseurs, ainsi que l'utilisation et l'élimination des composés, des produits et des matériaux à l'extérieur du Canada, peuvent aussi favoriser la présence du SPFO au Canada. Même si des données d'échantillon sur les ours polaires et les phoques annelés de 2005 ont montré la première baisse des niveaux de SPFO depuis le début de la diminution mondiale de la production en 2000, on doit recueillir d'autres données d'échantillon au cours des prochaines années, avant de pouvoir confirmer si les réductions représentent réellement le début d'une baisse à long terme des niveaux de SPFO.

Utilisation des matériaux

L'utilisation quotidienne de certains matériaux traités des produits hydrofuges, oléofuges, antisalissants et imperméables aux graisses à base de SPFO peut potentiellement favoriser les rejets de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs dans l'environnement. On a trouvé des émissions potentielles dans les effluents d'eaux usées causées par le lavage de tissus ou par l'utilisation d'un aspirateur ou le nettoyage à la vapeur des tapis. Suite à ces activités, les résidus prennent habituellement la forme d'effluents liquides envoyés dans les installations de traitement municipales, ou la forme de déchets solides envoyés à un site d'enfouissement résidentiel. Une description de l'état final du SPFO dans ce flux des déchets se trouve à la section Élimination des matériaux, du présent rapport. Toutefois, depuis 2002, on n'utilise plus de produits contenant de SPFO au Canada qui servaient à protéger ces matériaux. De plus, les importations courantes des matériaux contenant du SPFO semble être limitées.

6. Considérations

6.1 Mesures de réglementation existantes relatives au SPFO, à ses sels et à ses précurseurs

Canada

Il n'existe aucune mesure de réglementation relative au SPFO, à ses sels et à ses précurseurs au Canada.

États-Unis

L'agence de protection environnementale des États-Unis (US EPA) a adopté deux règles fédérales quant à une nouvelle utilisation importante pour 88 substances de sulfonates de perfluorooctane qui s'appliquent aux nouveaux fabricants et aux nouvelles utilisations de ces substances. Une troisième règle quant à une nouvelle utilisation importante a été publiée, à l'intention des intervenants le 8 août 2006, aux fins de consultations pour 183 substances de sulfonates perfluoroalkyliques. Les 271 substances apparaissant dans les trois règles quant à une nouvelle utilisation importante comprennent l'acide sulfonique perfluorooctane (ASPFO) et certains de ses sels, le fluorure de soufre perfluorooctane (FSPFO), certains homologues supérieurs et inférieurs de l'ASPFO et du FSPFO, des polymères dérivés de l'ASPFO et de ses homologues, ainsi que d'autres substances qui peuvent se dégrader pour prendre la forme d'ASPFO.

Selon les règles quant à une nouvelle utilisation importante, les fabricants et les importateurs doivent aviser le Environmental Protection Agency des États-Unis (US EPA) au moins 90 jours avant une nouvelle fabrication ou l'importation de ces substances. L'Agence peut ainsi disposer de suffisamment de temps pour évaluer la nouvelle utilisation prévue, et interdire ou limiter la nouvelle activité s'il y a lieu. Même si les règles quant à une nouvelle utilisation importante n'exigent pas que les fabricants actuels cessent la production ou la vente des substances, le seul fabricant américain a cessé volontairement la production en 2002. Ainsi, lorsque les stocks existants seront épuisés, les trois règles quant à une nouvelle utilisation importante restreindront toute fabrication et toute importation.

Quatre utilisations ne sont pas de nouvelles utilisations importantes, en vertu des règles quant à une nouvelle utilisation importante. Elles ne sont donc pas visées par les restrictions relatives à la fabrication et aux importations. Les voici :

  1. un additif anti-érosion dans les liquides hydrauliques esterphosphoriques difficilement inflammables dans le domaine de l'aviation;
  2. une composante d'une substance photorésine, y compris un générateur photoacide ou un surfactant, ou une composante d'un revêtement antireflet utilisée en microphotolithographie pour produire des semi-conducteurs ou des composantes similaires dans des appareils électroniques ou d'autres appareils miniaturisés;
  3. les revêtements pour la tension superficielle, les décharges d'électricité statique et le contrôle de l'adhérence pour les films analogiques ou numériques, les papiers et les plaques, ou un surfactant dans les mélanges pour traiter les films; et
  4. un intermédiaire pour fabriquer d'autres substances chimiques qui serviront uniquement aux fins décrites aux points 1, 2 ou 3.

À l'échelle internationale

L'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) a conclut que la persistance du SPFO, sa présence dans l'environnement et dans certaines espèces sauvages, et son potentiel de bioaccumulation sont préoccupants. En 2002, certains pays membres de l'OCDE ont convenu de communiquer avec les fabricants de SPFO dans leurs pays respectifs, afin de déterminer si les entreprises prévoient diminuer graduellement la fabrication de SPFO. De plus, les pays membres ont convenu de dévoiler, tous les deux ans, de l'information sur la production et l'utilisation du SPFO, de l'exposition à cette substance, en plus des nouvelles informations sur les voies d'exposition. Pour appuyer ces mesures, un questionnaire sur la fabrication et l'utilisation du SPFO, du SPFA, de l'acide perfluorooctanoïque (APFO), des substances associées et des produits/mélanges contenant ces substances a été distribué en 2004. Dix pays membres ont soumis des réponses. Les résultats indiquent que les substances qui comprennent uniquement le SPFO ainsi que les produits de SPFO et les mélanges sont toujours importés et manufacturés par les pays membres. La majorité de l'utilisation de SPFO est rapportée dans les secteurs de lutte contre les incendies (stock actuel de mousse AFFF), de placage de métal, de photographie, de semi-conducteur et d'aviation (fluides hydrauliques). Les utilisations essentielles ont été rapportées pour les stocks courant de mousse AFFF, des fluides hydrauliques d'aéronef, de surfactants pour le placage de métal et dans les secteurs photographiques et de semi-conducteurs. Aucun nouvel usage de SPFO n'a été rapporté. Ce sondage sera de nouveau distribué en 2006.

L'Australie a diffusé deux alertes sur le SPFO, par l'entremise de son National Industrial Chemicals Notification and Assessment Scheme (NICNAS). La première alerte indiquait que tous les produits hydrofuges, oléofuges, antisalissants et imperméables aux graisses de 3M contenant du SPFO devraient être graduellement éliminés en Australie avant le mois de septembre 2002 et que les produits de cuir contenant du SPFO devraient graduellement être éliminés jusqu'en mars 2003. Tous les autres produits contenant du SPFO, y compris les mousses extinctrices et les additifs industriels, seraient graduellement éliminés en Australie jusqu'en décembre 2003. Selon l'alerte, le NICNAS évaluera des mesures de réglementation visant le SPFO une fois que l'OCDE aurait terminé son évaluation du SPFO. La deuxième alerte, datée du 30 avril 2003, comportait des recommandations sur le SPFO, le SPFA et l'APFO. Parmi ces recommandations, on trouve :

  • Le SPFO (et les produits chimiques à base de SPFA) ne doivent servir qu'à des fins essentielles pour lesquelles il n'existe aucun produit de rechange approprié, comme certaines mousses extinctrices de classe B.
  • Les mousses extinctrices de classe B ne doivent pas servir lors d'exercice de formation.
  • Faire preuve de prudence lors de la sélection d'APFO pour remplacer le SPFO, car l'APFO peut poser les mêmes risques pour l'environnement et la santé que le SPFO.

En avril 2005, la Norvège a proposé d'importantes réductions des émissions de SPFO d'ici 2010.

La Suède a proposé l'ajout du SPFO et de ses précurseurs à l'annexe A de la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants (POP) en juin 2005. A sa rencontre de novembre 2005, le Comité d'étude des polluants organiques persistants a convenu que le SPFO remplissait ses critères de sélection. De plus, il a été décidé à cette rencontre qu'un groupe de travail ad hoc serait créé conformément à la Convention pour examiner cette proposition davantage et de préparer un projet de descriptif des risques.

En octobre 2005, le Royaume-Uni a proposé un plan d'action national qui vise à restreindre l'utilisation et la commercialisation du SPFO et des substances qui se dégradent pour en prendre la forme.

En décembre 2005, les parties au Protocole relatif aux polluants organiques persistants de la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance de la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe (CEE) ont convenu que le SPFO devrait être considéré comme un polluant organique persistant. La Convention continuera d'évaluer les stratégies de gestion en 2006.

Le 5 décembre 2005, l'Union européenne a publié un projet de directive sur les restrictions visant la commercialisation et l'utilisation du SPFO. Ces restrictions visant le SPFO comprennent :

  • La substance ne peut pas être commercialisée ni utilisée dans des préparations lorsque sa concentration est égale ou supérieure à 0,1 % de la masse.
  • La substance ne peut pas être commercialisée dans des produits ou une partie des produits lorsque sa concentration est égale ou supérieure à 0,1 % de la masse.
  • Des exemptions aux restrictions, notamment les revêtements pour les procédés de photolithographie, les couches photosensibles appliquées aux films, les papiers ou les plaques, les dispositifs de suppression des brouillards pour le chromage, les liquides hydrauliques dans l'aviation, les mousses extinctrices et les systèmes fermés rejetant moins de un µg par kg et lorsque les rejets correspondent à moins de 0,1 % de la masse du SPFO utilisé dans le système.

6.2 Mesures de réglementations proposées dans l'industrie de la galvanoplastie au Canada

Le projet de règlement sur l'électrodéposition du chrome, l'anodisation au chrome et la gravure inversée en vertu de la LCPE vise à restreindre les émissions de chrome hexavalent des installations d'électrodéposition du chrome, d'anodisation au chrome et de gravure inversée au Canada. Il devrait entrer en vigueur en 2006. Parmi les trois mesures de réglementation autorisées dans ce projet de règlement, il y a une exigence visant le maintien de la tension superficielle des solutions en-dessous des limites spécifiées en ajoutant des surfactants jumelés à des mesures quotidiennes de la tension superficielle. La majorité des surfactants actuellement utilisés dans le secteur de la galvanoplastie contiennent du SPFO. Environnement Canada reconnaît le besoin de cohérence entre les exigences du projet de règlement sur l'électrodéposition du chrome, l'anodisation au chrome et la gravure inversée et l'approche de gestion du risque proposée pour le SPFO. L'approche de consultation proposée, tel que détaillée à la section 9 de ce rapport, assurera la possibilité de discussions continues entre Environnement Canada et les intervenants visés, au sujet de ces deux initiatives.

6.3 Produits de rechange

Des produits de rechange au SPFO, à ses sels et à ses précurseurs sont offerts pour la grande majorité d'utilisations industrielles et de fabrication. En raison de la cessation graduelle volontaire de la fabrication de SPFO en 2002, la production de produits de rechange s'est accélérée. Des recherches sont en cours pour déterminer les produits de rechange qui pourraient remplacer ces substances dans les applications qui utilisent toujours du SPFO, comme la photolithographie, les agents de surface pour l'électrodéposition, les couches photosensibles et les liquides hydrauliques dans le domaine de l'aviation.

Parmi les produits de rechange choisis dans le passé, on trouve les substances de sulfonate de perfluorobutane, les fluorotélomères, ainsi que les surfactants à base d'hydrocarbure et de silicone. On doit noter que des préoccupations environnementales semblables ont été exprimées au plan international pour certains fluorotélomères. À cet égard, le Règlement modifiant le Règlement sur certaines substances toxiques interdites (2005) qui comprend quatre nouvelles substances à base de télomères fluorés a été publié le 17 juin 2006.

6.4 Destruction

Le SPFO, ses sels et ses précurseurs devraient être éliminés de façon efficace par incinération à température élevée. Les liaisons carbone - soufre dans le SPFO, ses sels et ses précurseurs est plutôt faible. Il devrait donc être brisé à des températures initiales élevées atteignant de 760 à 982°C. D'autres technologies qui détruisent de façon sécuritaire le SPFO, ses sels et ses précurseurs ont été rapportées, notamment la gazéification au plasma, le plasma micro-ondes et l'enlèvement du SPFO par adsorption au carbone suivie par une incinération à 1200°C.

7. Objectifs

7.1 Objectif relatif à l'environnement

Selon l'évaluation préalable des effets sur l'environnement, le SPFO, ses sels et ses précurseurs pénètrent dans l'environnement dans des quantités ou concentrations ou dans des conditions à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur sa diversité biologique. De plus, l'évaluation préalable des effets sur l'environnement a conclu que le SPFO et ses sels sont persistants dans tous les milieux, et posent un risque éventuel en raison de la bioaccumulation et de la biomagnification du SPFO dans la faune. En raison de ces conclusions, on souhaite réduire les concentrations de SPFO dans l'environnement canadien au niveau le plus bas possible.

7.2 Objectif relatif à la gestion du risque

L'objectif relatif à la gestion du risque est l'atteinte du niveau d'émissions le plus faible dans l'environnement possible au plan technique et économique, quelque soit la source d'émission de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs.

8. Approche de gestion du risque proposée

En raison des conclusions tirées dans l'évaluation des risques pour l'environnement, présenté dans partie 3 de ce rapport, des mesures sont requises pour empêcher la réintroduction du SPFO, ses sels et ses précurseurs, sur le marché canadien, et pour aborder les utilisations qui en sont faites.

On propose donc que le SPFO, ses sels et les composés contenant des substances des groupes C8F17SO2, C8F17SO3 ou C8F17SO2N soient ajoutés au Règlement sur certaines substances toxiques interdites (2005). La fabrication, l'utilisation, la vente, l'offre de vente et l'importation du SPFO, de ses sels, de ses précurseurs, des produits ou des composés qui contiennent du SPFO, ses sels et ses précurseurs seront donc interdites.

Des exemptions pour l'utilisation du SPFO, ses sels et ses précurseurs en laboratoire aux fins de recherche scientifique et comme étalon en laboratoire analytique sont prévus au Règlement sur certaines substances toxiques interdites (2005). Des exemptions additionnelles seront possibles dans certains cas. On devra démontrer clairement qu'il n'existe aucune solution de rechange viable sur le marché ou que les solutions de rechange proposées peuvent poser un risque pour l'environnement ou la santé. Parmi les exemptions dont on tient déjà compte, il y a : l'utilisation des stocks existants de mousse AFFF contenant du SPFO (qui ne sont pas utilisés pour des essais ou des exercices de formation) pour une période d'au plus cinq ans suite à la date à laquelle le projet de règlement entre en vigueur, et l'importation d'articles fabriqués pouvant contenir du SPFO.

Le contenu moyen de SPFO dans la mousse AFFF atteint environ 1 p. cent. La quantité de 3 000 kg de SPFO dans les stocks de mousse AFFF existants est répartie dans plusieurs installations partout au Canada. La restriction proposée concernant l'utilisation de mousse AFFF contenant du SPFO, applicable 5 ans suite à l'entrée en vigueur du Règlement est suggérée afin de permettre une transition méthodique vers la mousse AFFF sans SPFO, tout en minimisant les rejets de SPFO à l'environnement à partir de l'utilisation à long terme des stocks existants. En plus de la restriction proposée concernant l'utilisation, on évalue un instrument complémentaire en vertu de la LCPE pour assurer l'adoption des meilleures pratiques de gestion durant l'entreposage, l'utilisation et l'élimination de la mousse AFFF contenant du SPFO. D'autres consultations avec les intervenants touchés seront nécessaires, afin de choisir un instrument complémentaire visant la mousse AFFF contenant du SPFO.

Environnement Canada a évalué des restrictions possibles sur l'importation d'articles fabriqués contenant du SPFO. Les principaux partenaires commerciaux du Canada ont déjà adopté ou adopteront bientôt des mesures de restriction relativement à l'utilisation du SPFO. On croit qu'éventuellement la production mondiale de SPFO sera éliminée ou réduite de façon significative. C'est pourquoi le nombre d'articles importés qui contiennent du SPFO diminuera sans intervention directe du Canada. Les données sur les méthodes d'utilisation des articles fabriqués avec du SPFO qui sont actuellement importés au Canada sont limitées. Dans certains cas, le pays exportateur et les importateurs canadiens ne savent même pas que l'article contient du SPFO. De plus, il faudrait élaborer des méthodologies d'analyse pour détecter et quantifier les concentrations de SPFO dans une vaste gamme d'articles importés qui pourraient contenir ces substances.

En raison de la baisse apparente de la production mondiale de SPFO, des mesures concertées d'autres pays et de forums internationaux pour aborder le problème que pose le SPFO, et les difficultés pratiques à l'égard de l'application de telles mesures, aucune restriction sur l'importation des articles n'a été proposée jusqu'à maintenant. Toutefois, les nouveaux marchés pourraient commencer à exporter, à l'avenir, un nombre supérieur d'articles contenant du SPFO au Canada. C'est pourquoi, on devra peut-être considérer des instruments complémentaires, en vertu de la LCPE, afin d'aborder le problème des articles importés. Des consultations avec les intervenants touchés seront nécessaires, avant de déterminer les instruments complémentaires requis. L'approche de consultation proposée dans la section 9 de la présente stratégie permettra de lancer ces discussions.

En outre, Environnement Canada continuera de discuter avec les partenaires internationaux pour favoriser la réduction à long terme et l'élimination éventuelle de la fabrication et de l'utilisation mondiale du SPFO. Environnement Canada poursuivra de plus ses activités de surveillance et de recherche nationales relativement à la présence de SPFO dans l'environnement canadien. Le ministère pourra ainsi accroître l'ensemble des connaissances internationales sur les substances perfluorées, et évaluer s'il atteint l'objectif relatif à l'environnement et l'objectif relatif à la gestion du risque.

9. Approche de consultation proposée

9.1 Approche générale

On planifie une approche de consultation par la poste et en ligne pour présenter cette stratégie de gestion du risque aux intervenants. Selon la demande, une séance de consultation visant plusieurs intervenants pourrait être organisée. Les consultations viseront:

  • L'approche proposée relativement à la gestion du risque
  • Les exemptions proposées
  • Toutes autres exemptions qui pourraient être identifiées

9.2 Intervenants

  • Importateurs canadiens de SPFO, de ses sels et de ses précurseurs
  • Importateurs canadiens d'articles contenant du SPFO, ses sels et ses précurseurs
  • Utilisateurs canadiens d'agents de surface contenant du SPFO dans le secteur de l'électrodéposition
  • Utilisateurs canadiens de mousse AFFF contenant du SPFO qui sert à combattre les incendies, notamment les autorités aéroportuaires, le ministère de la Défense nationale, Transports Canada, le ministère des Pêches et des Océans, les municipalités, les fabricants de produits pétrochimiques et les raffineries
  • Associations de l'industrie représentant les différents secteurs industriels mentionnés ci-dessus
  • Organisations non gouvernementales de l'environnement (ONGE)
  • Gouvernements provinciaux et territoriaux
  • Ministères gouvernementaux fédéraux et organismes

10. Prochaines étapes/échéanciers

Mesure Date d'achèvement
Consultations des intervenants relativement à la stratégie de gestion du risque juillet 2006
Publication du projet de règlement dans la Partie I de la Gazette du Canada décembre 2006
Publication du règlement final dans la Partie II de la Gazette du Canada septembre 2007

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