Brochet vermiculé (Esox americanus vermiculatus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 7

Habitat

Besoins en matière d’habitat

L’habitat de l’espèce est généralement constitué de cours d’eau au pH neutre ou légèrement alcalin, de couleur claire ou thé, au débit très lent ou absent, souvent moins profonds que 2 m, possédant une végétation aquatique submergée, flottante ou émergée, abondante à dense. Le pH des habitats de l’Ontario était de 6,26 à 8,32 (Scott et Crossman, 1973). Ming (1968) a rapporté la présence de brochets vermiculés dans des cours d’eau rapides des montagnes. La végétation, semblable à celle des habitats des autres brochets, dont le grand brochet et le maskinongé, est composée de Potamogeton, de Ceratophyllum, de Nymphaea, de Nuphar et de Chara. Il existe des listes florales complètes des habitats du brochet vermiculé dans le nord et le sud de son aire de répartition (Crossman, 1962a; Ming, 1968). L’habitat caractéristique consiste en des petits cours d’eau clairs et productifs, des anses et des baies peu profondes d’étendues d’eau plus vastes, généralement aux fonds vaseux. La population ontarienne du ruisseau Twenty Mile (un affluent à l’ouest du lac Ontario) constitue une exception à cet égard : le substrat de son habitat est souvent composé de gravier et de pierres calcaires plates (Gorrie, 1975). En Oklahoma, l’espèce est parfois présente dans des fosses sans végétation aux fonds de pierre ou de gravier. Dans ces cas, les poissons étaient associés à un amas de broussailles ou à un buisson en surplomb. L’espèce peut survivre dans des fosses isolées de cours d’eau temporaires et saisonniers. Elle peut vivre même isolée dans des fossés aux abords des routes, si l’oxygène dissous est adéquat (Ming, 1968).

Crossman (1962a) a décrit en détail l’habitat du ruisseau Jones : eau brunâtre au pH de 7,65; débit variant entre 0 et 0,15 m (0,5 pi) par seconde; profondeur de 0,5 à 1,7 m (de 1,5 à 5,5 pi), parfois très variable; substrat en grande partie vaseux composé d’argile et de roches; abri consistant en de vastes berges sapées et en débris ligneux; végétation aquatique variée et souvent très abondante; température maximale de l’eau de 29 °C (84 °F); berges variables (marécageuses, arbustives ou forestières dans les cas où le cours d’eau traverse des pâturages; communauté de poissons variée et composée de 24 espèces.

Serns et McKnight (1977) ont décrit l’habitat du Wisconsin. L’eau avait une alcalinité au méthylorange de 57,0 m/l ainsi qu’une conductivité de 118 µmhos à 25 °C. Becker (1983) a caractérisé le substrat de ces habitats : sable (21 %), gravier (21 %), vase (17 %), argile (13 %), blocailles (13 %), limon (8 %) et roches (8 %).

Tendances en matière d’habitat

Dans certains affluents de la rivière Niagara où des brochets vermiculés ont été capturés près de routes à la circulation dense au début des années 1960, l’habitat et la végétation se sont dégradés. On trouve maintenant l’espèce plus loin en amont, dans des habitats plus typiques et non perturbés (E. J. Crossman, obs. pers.).

Yagi (2004) a décrit l’habitat et ses tendances dans la région de Niagara :

« Le brochet vermiculé a des besoins particuliers en matière d’habitat. En effet, il n’est présent que dans les cours d’eau associés à des milieux humides aux sols organiques. La plupart de ces habitats incluent des ruisseaux qui ont pu être canalisés pour des besoins de drainage agricole, mais qui ne sont pas activement entretenus et ne s’écoulent pas pendant certains mois; cependant, ils possèdent au moins une fosse permanente.

L’habitat de cette nature a diminué d’au moins 80 % à Niagara depuis l’établissement humain. Ce type d’habitat est très vulnérable aux activités de drainage (nouveaux canaux de drainage et leur entretien), aux changements météorologiques extrêmes, aux activités de gestion des pêches et des milieux humides, aux fluctuations de température ainsi qu’à la canalisation et à la fragmentation aux fins de construction de routes. En raison de leur isolement, les habitats des fosses sont particulièrement vulnérables aux risques de la surexploitation (prédation, prélèvements scientifiques et pêche à l’appât ou à la ligne).

On n’a jamais mené d’analyse du nombre d’habitats actuels et historiques pour le brochet vermiculé à l’échelle provinciale, régionale ou locale. Comme l’espèce n’est présente que dans les cours d’eau de milieux humides organiques, il serait possible d’établir le nombre d’habitats potentiels pour chaque affluent. On pourrait alors comparer ce nombre au nombre d’habitats occupés par l’espèce afin de disposer d’un indice approprié pour suivre les tendances dans le temps. On aurait aussi une façon normalisée de comparer des affluents et des zones entre eux. » [Traduit de l’anglais]

Protection des habitats

Ce poisson méconnu, qui se fait plutôt discret, vit dans des régions ayant peu d’intérêt pour les humains. Dans la plupart des zones, en raison de sa petite taille et de la nature de l’habitat, il présente peu ou pas d’importance pour les pêcheurs à la ligne. Par conséquent, les lois générales qui visent à maintenir, pour divers intérêts humains, la grande qualité de l’environnement de tels cours d’eau constituent leur seule protection. De nombreux habitats se trouvent dans des zones agricoles où l’envasement dû à l’effondrement des berges causé par le bétail et l’utilisation de produits chimiques tels que les herbicides et les insecticides risquent d’être dommageables.

Quatre populations se trouvent dans des parcs; elles sont donc protégées contre la destruction de leur habitat. Il s’agit du parc provincial Pinery, du parc national de la Pointe-Pelée, du parc provincial Long Point et du parc national des Îles-du-Saint-Laurent. La population du delta Sainte-Claire est régie par la Première nation de Walpole Island.

Au Québec, la Loi sur la qualité de l’environnement protège l’habitat en général. L’habitat du poisson est également protégé en vertu de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune qui, conformément aux articles 128.1 à 128.18, régule toute activité susceptible de modifier un élément biologique, physique ou chimique propre à l’habitat du poisson visé par cet habitat. La Loi sur les espèces menacées ou vulnérables contient des dispositions supplémentaires relatives à la protection des habitats des espèces menacées ou vulnérables.

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