Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur la Tortue caouanne au Canada 2010 - Biologie

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Nidification

Les tortues caouannes nichent sur les plages océaniques et, à l’occasion, sur les rives d’estuaires. Elles semblent préférer les plages relativement étroites, à pente raide et à sable à grains grossiers, mais le profil de la zone infralittorale risque également d’influer sur leur choix de site de ponte (Provancha et Ehrhart, 1987). La ponte se déroule pendant la nuit. Les femelles affichent une forte tendance à revenir sur leur plage natale (Bowen et al., 2005; Bowen et Karl, 2007). Elles nichent tous les 2 ou 3 ans et produisent de 3 à 4 pontes d’environ 112 œufs chacune, à environ 14 jours d’intervalle (Miller, 1997). Les nids sont habituellement creusés entre la ligne de marée haute et le front dunaire (Routa, 1968; Witherington, 1986; Hailman et Elowson, 1992).

Stade 1 : des œufs aux nouveau–nés

Les œufs de la tortue caouanne éclosent au bout de 7 à 13 semaines d’incubation, selon la température du nid (Miller, 1997), chaque différence d’un degré Celsius pouvant ajouter ou soustraire environ 5 jours à la période d’incubation (Mrosovsky, 1980). Plus le sable entourant le nid est chaud, plus rapide sera le développement des embryons (Mrosovsky et Yntema, 1980). La longueur de la période d’incubation, le taux d’éclosion et la taille des nichées dépendent des conditions d’humidité qui règnent dans le nid (McGehee, 1990; Carthy et al., 2003).

Le sexe des nouveau–nés dépend de la température du nid : lorsque cette température est supérieure à 29 °C, les nouveau–nés sont majoritairement ou exclusivement femelles; à une température inférieure à ce seuil, ils sont majoritairement ou exclusivement mâles (Limpus et al., 1983, Mrosovsky et al., 1984; Mrosovsky, 1988; Marcovaldi et al., 1997; Mrosovsky et al., 2002; Wibbels, 2003). D’autres facteurs environnementaux (par exemple, la pluie, les conditions d’humidité et l’ombre) peuvent également influer directement ou indirectement sur le rapport des sexes (Mrosovsky et al., 1995; Godfrey, 1997).

L’éclosion des œufs s’étend sur 1 à 3 jours; les nouveau–nés remontent à l’air libre et émergent du nid sur une période de 2 à 4 jours (Christens, 1990). La période qui s’écoule entre l’éclosion et l’émergence varie de 4 à 7 jours (moyenne de 4,1 jours) (Godfrey et Mrosovsky, 1997). Les nouveau–nés émergent pendant la nuit et utilisent la lumière ambiante du ciel nocturne pour s’orienter et gagner la mer (Daniel et Smith, 1947; Limpus, 1971; Salmon et al., 1992; Witherington, 1997; Witherington et Martin, 1996; Stewart et Wyneken, 2004). Dès l’émergence, les nouveau–nés entament une période d’activité frénétique; ils franchissent la distance qui les sépare de l’eau et partent à la nage pour traverser la zone de déferlement des vagues (Carr et Ogren, 1960; Carr, 1962; Carr, 1982; Wyneken et Salmon, 1992; Witherington, 1995). Ils passent ensuite dans les eaux de la zone néritique pour une période qui peut durer de quelques semaines à quelques mois (Witherington, 2002; Bolten, 2003). Contrairement aux nouveau–nés en période de nage frénétique, les jeunes tortues caouannes deviennent ensuite largement inactives, les périodes de nage devenant peu fréquentes et moins énergiques; elles se nourrissent d’une grande variété de proies flottantes comme les hydroïdes et les copépodes communément associés aux sargasses (Witherington, 2002).

Stade 2 : juvéniles (1), exclusivement océaniques

Le stade juvénile océanique débute lorsque les tortues caouannes arrivent pour la première fois dans cette zone. Les tortues s’y déplacent en suivant les courants dominants et y passent plusieurs années avant de retourner aux zones d’alimentation néritiques et à l’habitat de reproduction (Pitman, 1990; Bowen et al., 1995; Zug et al., 1995; Musick et Limpus, 1997; Bolten, 2003). Leurs mouvements en zones océaniques peuvent être actifs ou passifs; ils dépendent des courants marins en surface ou en eau plus profonde ainsi que des vents. Les tortues peuvent utiliser les caractéristiques bathymétriques de leur milieu environnant pour s’orienter (Bolten, 2003). Elles se nourrissent principalement de méduses et d’autres invertébrés (Bjorndal, 1997; Witherington, 2002; Frick et al., 2009).

La durée du stade juvénile océanique est variable, et la taille des tortues qui quittent la zone océanique varie largement (15 à 63 cm [SCL]; TEWG, 2009) (figure 3). Selon Bjorndal et al. (2000), dans l’Atlantique Nord, les tortues commencent à passer au stade de développement suivant à partir de 42 cm de longueur (SCL). Les estimations de la durée de ce stade varient de 7 à 11,5 ans (Bjorndal et al., 2000; idem, 2003) à 9 à 24 ans (moyenne de 14,8 ans) (Snover, 2002). Dans le Pacifique Nord, les juvéniles ne commencent à revenir en zone néritique que lorsque leur longueur dépasse 60 cm (SCL) (Conant et al., 2009).

Stades 3 et 4 : juvéniles (2, 3), océaniques ou néritiques benthiques

Dans les zones néritiques, les tortues caouannes passent à un régime composé principalement d’invertébrés benthiques à carapace dure (Bjorndal, 1997; Seney et Musick, 2007). Des études génétiques indiquent que les tortues caouannes reviennent dans un habitat proche de leur plage natale, établissant ainsi une modeste structure de population (Bowen et al.,2005). Les petits juvéniles benthiques (2) ont une SCL variant de 41 à 82 cm, tandis que celle des grands juvéniles benthiques (3) varie de 63 à 100 cm (TEWG, 2009) (figure 3). Les estimations de la durée des stades 3 et 4 varient (pour en avoir un résumé, consulter Heppell et al., 2003b). Selon Bjorndal et al. (2000), il faut de 13 à 20 ans aux tortues caouannes pour atteindre une CCL de la dossière de 87 cm, alors que selon l’estimation de Heppell et al. (2003a), il leur faudrait de 14 à 24 ans pour croître de 45 à 92 cm (SCL).

Le passage en zone néritique n’est pas unidirectionnel; certains juvéniles des milieux néritiques peuvent retourner en zone océanique, et certains ne quittent leur habitat océanique que pour se reproduire (Eckert et Martins, 1989; Hatase et al., 2002a; Bolten, 2003; Ehrhart et al., 2003; Schroeder et al., 2003; Bass et al., 2004; Hawkes et al., 2006; McClellan et Read, 2007; Casale et al., 2008; Kobayashi et al., 2008; Mansfield et al., 2009; Reich et al., 2010). Selon Casale et al. (2008), les stades 3 et 4 ainsi que le stade adulte peuvent être qualifiés de « stades opportunistes à double habitat », au cours desquels la tortue caouanne choisit son habitat en fonction de la disponibilité des proies (figure 8).

Stade 5 : adultes, néritiques ou océaniques

Les tortues caouannes commencent à passer au stade adulte lorsqu’elles atteignent 82 cm (SCL), et elles sont toutes adultes lorsqu’elles atteignent 100 cm (TEWG, 2009) (figure 3). Selon les estimations, elles atteindraient la maturité sexuelle entre 16 et 34 ans, mais cette donnée ne fait pas consensus (Crowder et al., 1994; Heppell et al., 1996; Parham et Zug, 1997; Musick, 1999; Dalhen et al., 2000; NMFS et SWFSC, 2008), et elles pourraient vivre plus de 57 ans (Dalhen et al., 2000; NMFS et SWFSC, 2008). Pour calculer la durée d’une génération, l’âge à la maturité est estimé en établissant la moyenne de certaines estimations publiées. Ces estimations varient d’environ 16 à 35 ans, et la moyenne est de 25 ans (toutefois, Ernst et Lovich [2009]) parlent plutôt d’estimations variant de 22 à 35 ans). Par ailleurs, on ne connaît pas le taux de mortalité naturelle, puisque la plupart des études utilisent des estimations incluant les sources de mortalité anthropiques qui sont les plus importantes en ce qui concerne les adultes (p. ex. les prises accessoires des pêcheurs). En conséquence, on utilise en guise d’approximation les taux de mortalité des tortues d’eau douce, lesquels ont tendance à avoisiner les 5 % annuellement et sont souvent même plus bas (Ernst et Lovich, 2009). À partir de ces estimations, la durée d’une génération est calculée comme suit : durée d’une génération = âge à la maturité + (1 + 1/taux annuel de mortalité) = 25 + (1 + 1/0,05) = 25 + 1 + 20 = 46 ans. Une autre formule utilisant l’estimation du TEWG (2009) de l’âge à la maturité de 34 ans plus 12,5 (moitié de la durée de vie reproductive estimée à 25 ans [Pianka, 1974; Dahlen et al., 2000]) établit la durée d’une génération à 46,5 ans (NMFS et USFWS, 2008).

Les eaux néritiques fournissent d’importants habitats d’alimentation, de migration et pour les périodes inter–pontes pour les tortues caouannes adultes. Toutefois, ces dernières utilisent à la fois les habitats néritique et océanique (Hatatse, 2002a; Hawkes et al., 2006; Reich et al., 2010) (figure 8). Dans les trois études précitées, les femelles qui s’alimentaient en zone océanique étaient plus petites que celles qui s’alimentaient en zone néritique, avec toutefois un certain chevauchement (n = 2) dans le cas des femelles provenant de colonies nicheuses japonaises (Hatatse, 2002a).

Les mâles ne reviennent jamais sur la terre ferme après leur éclosion, et les connaissances sur leur cycle vital sont donc moins complètes (Bowen et Karl, 2007). Les études portant sur l’ADN nucléaire (ADNn) de la tortue caouanne laissent deviner une structure de population complexe caractérisée par un flux génétique sous contrôle mâle (Bowen et Karl, 2007). Le fait que les mâles ne reviennent pas à leur plage natale ou que l’accouplement se déroule dans des aires d’alimentation ou des corridors migratoires où diverses populations se côtoient pourraient expliquer cette situation (Bowen et Karl, 2007). Toutefois, Bowen et Karl (2007) supposent que les tortues caouannes mâles reviennent effectivement près de leur plage natale, puisque c’est ce qu’on observe dans le cas de la tortue verte (Chelonia mydas).

Les rapports des sexes des tortues caouannes juvéniles et adultes sont relativement mal connus. Peu d’aires de nidification ont fait l’objet d’études rigoureuses étalées sur de nombreuses années; les méthodes ne sont pas normalisées, et plusieurs variables entrent en jeu (Mrosovsky, 1994; Wibbels, 2003; Conant et al., 2009). Conant et al. (2009) résument les données disponibles sur les rapports des sexes des tortues caouannes de l’Atlantique Nord à tous les stades de développement.

Les tortues caouannes sont des reptiles ectothermes, et leur tolérance thermique influe sur leur répartition et sur leur comportement. Leur température interne ne dépasse que de quelques degrés (3,8 °C) la température de l’eau ambiante (Spotila et Standora, 1985). La température préférentielle de la tortue caouanne oscille entre 13,3 et 28 °C (Hopkins–Murphy et al., 2003). L’étude de Kobayashi et al. (2008) sur les tortues caouannes du Pacifique Nord fait état de la présence d’individus dans des zones où la température de l’eau varie de 14,45 à 19,95 °C.

Une exposition prolongée à des températures inférieures à 8 à 10 °C peut provoquer un choc thermique et une perturbation des voies métaboliques qui entraînent une perte de flottabilité et nuisent à l’aptitude de la tortue à nager et à plonger (Witherington et Ehrhart, 1989; Morreale et al., 1992; Spotila et al., 1997). Selon Milton et Lutz (2003), c’est le taux de refroidissement de l’eau, et non simplement la température de l’eau elle–même, qui provoque le choc thermique. Ce phénomène peut conduire à la mort des tortues.

Les études de suivi par satellite réalisées par Hawkes et al. (2007) fournissent un autre détail intéressant : les femelles peuvent effectuer de longues plongées de repos dont la durée peut atteindre jusqu’à 7 heures et 24 minutes, ce qui leur permet en fait d’hiberner pendant les mois les plus froids. Un tel comportement a été observé chez deux individus, et donne à penser que de nombreuses tortues caouannes adultes « endurent » de cette façon les périodes froides tout en exploitant les eaux productives des latitudes plus élevées.

Les nouveau–nés en période de nage frénétique s’orientent en fonction de la direction des vagues et du champ magnétique terrestre (Lohmann et Lohmann, 2003). Arrivées au stade post–nouveau–né néritique, lorsqu’elles commencent à s’alimenter, les jeunes tortues caouannes se laissent transporter passivement par les courants et par le vent (Bolten, 2003). Les tortues qui passent à la zone océanique peuvent se déplacer activement ou passivement par rapport aux courants océaniques de surface, aux courants plus profonds, au vent et aux caractéristiques bathymétriques du milieu ambiant (Bolten, 2003). Les juvéniles sont capables d’évaluer leur position par rapport à une destination donnée en utilisant des indices locaux, et pratiquent donc une navigation « cartographique » (Avens et Lohmann, 2004). La direction générale des déplacements des tortues pendant le stade juvénile néritique (Bowen et al., 2005) et le retour à la plage natale des femelles adultes pondeuses ainsi que les données laissant penser que les femelles matures (après la nidification) effectuent des migrations dirigées (Schroeder et al., 2003) donnent à conclure que les tortues caouannes de ces stades de développement se dispersent activement. Les femelles matures (après la nidification) peuvent également nager à contre-courant et modifier leur trajectoire lorsque celle–ci est déviée par les courants océaniques (Schroeder et al., 2003).

Bjorndal (2003) note qu’il existe peu de données quantitatives sur les relations des tortues caouannes avec leur milieu ou avec d’autres espèces.

Hybridation

Les études de génétique moléculaire ont confirmé des cas d’hybridation entre la tortue caouanne et la tortue de Kemp (Lepidochelys kempii) (Karl et al., 1995; Barber et al., 2003), la tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata) (Karl et al., 1995; Witzell et Schmid, 2003) et la tortue verte (Karl et al., 1995; James et al., 2004).

Régime alimentaire

Le régime des tortues caouannes du stade océanique est mal connu. Dans l’étude la plus complète portant sur cette question, Bjorndal (1997) a examiné le contenu stomacal de juvéniles océaniques capturés aux Açores et à Madère. Il a trouvé des salpes (y compris le Pyrosoma atlanticum), des méduses (y compris le Pelagia noctiluca), des amphipodes qui vivent en association avec les méduses (Hyperia medusarum), des ptéropodes (Hyalaea tridentata), le crabe Nautilograpsus (= Planes) minutus, la balane Lepas anatifera, le poisson sygnathidé Entelurus aequoreus, des calmars, des gastéropodes (y compris des Janthina spp. et des Pterotrachea spp.) et d’autres cœlentérés pélagiques (principalement des siphonophores). Dans le Pacifique Nord, les tortues caouannes pélagiques se nourrissent principalement de gastéropodes (Janthina spp.) et de vélelles (Velella velella).

Prédateurs naturels

Les œufs et les nouveau–nés font l’objet d’une prédation sur presque toutes les plages de nidification. Les prédateurs les plus communs des principales plages de nidification des États–Unis sont l’ocypodé (Ocypode quadrata), le raton laveur (Procyon lotor), le sanglier (Sus scrofa), les renards (Urocyon cinereoargenteus et Vulpes vulpes), le coyote (Canis latrans), le tatou à neuf bandes (Dasypus novemcinctus) et la fourmi rouge de feu (Solenopsis invicta) (Stancyk, 1982; Dodd, 1988).

Pendant le stade juvénile océanique, la tortue caouanne est la proie de gros poissons ou mammifères marins carnivores qui vivent dans ce milieu (Bjorndal, 2003). Les juvéniles néritiques et les juvéniles et adultes océaniques sont la proie des gros requins comme le requin–tigre (Galeocerdo cuvieri), le requin bouledogue (Carcharhinus leucas) et le grand requin blanc (Carcharodon carcharias), ainsi que de l’épaulard (Orcinus orca) (Compagno, 1984; Witzell, 1987; Fergusson et al., 2000; Simpfendorfer et al., 2001; Bjorndal, 2003).

Les tortues caouannes néritiques du nord–ouest de l’Atlantique peuvent également souffrir des proliférations d’algues comme les marées rouges. L’espèce qui cause le plus de marées rouges est le Karenia brevis. Même si les tortues caouannes échouées sur la rive lors de marées rouges peuvent se rétablir des symptômes de la brevitoxicose aiguë (manque de coordination et léthargie, malgré une apparence robuste), on a observé des cas de mortalité de tortues caouannes (n = 4) sur la côte ouest de la Floride causés par ce type de prolifération (Redlow et al., 2003).

La lignée de la tortue caouanne remonte à plus de 24 millions d’années (Bowen, 2003). Une telle longévité est un signe de la capacité de l’espèce à s’adapter à l’évolution des conditions naturelles dans les milieux marins et terrestres où elle vit. Toutefois, la capacité de la tortue caouanne à survivre aux menaces anthropiques a été mise en doute. L’espèce est en déclin dans le monde entier et, compte tenu des informations disponibles sur les menaces anthropiques qui pèsent sur les juvéniles et les adultes dans les eaux néritiques et océaniques, ce déclin risque de se poursuivre à l’avenir (Conant et al., 2009). Selon Conant et al. (2009), les tortues caouannes du nord-ouest de l’Atlantique et du Pacifique Nord présentent une forte probabilité de quasi-disparition. La quasi–disparition constitue un seuil à partir duquel la survie de l’espèce devient douteuse, et elle a été déterminée à l’aide d’un indice du risque appelé « vulnérabilité à la quasi-disparition » (Snover et Heppell, 2009). (Voir Fluctuations et tendances et Facteurs limitatifs et menaces.)

Il n’existe actuellement aucune évaluation directe des stocks de la tortue caouanne dans les eaux canadiennes. Les données sur l’abondance de l’espèce dans ces eaux ont été établies à partir des documents suivants : McAlpine et al. (2007); Ledwell (2007); Brazner et McMillan (2008); Canadian Sea Turtle Sightings Database (2009); Lawson (comm. pers., 2009); Spaven (comm. pers., 2009). Les données sur les tendances démographiques et reproductrices des stocks reproducteurs qui contribuent, ou qui sont les plus susceptibles de contribuer, aux populations de la tortue caouanne fréquentant les eaux canadiennes nous viennent de trois études récentes effectuées aux États–Unis : le programme de rétablissement de la population de tortue caouanne du nord–ouest de l’Atlantique (Recovery Plan for the Northwest Atlantic Population of the Loggerhead Sea Turtle) (NMFS et USFWS, 1998); l’évaluation de la population de tortue caouanne du nord–ouest de l’Atlantique (An Assessment of the Loggerhead Turtle Population in the Western North Atlantic Ocean) (TEWG, 1999) et l’examen de la situation de la tortue caouanne réalisé en 2009 en vertu de la Endangered Species Act (Loggerhead Sea Turtle 2009 Status Review Under the Endangered Species Act) (Conant et al., 2009). Ces données ont été obtenues de la façon suivante :

Programme de rétablissement de la population de tortue caouanne du nord–ouest de l’Atlantique (Recovery Plan for the Northwest Atlantic Population of the Loggerhead Sea Turtle; NMFS et USFWS, 1998)

Bien que le nombre de nids et de femelles pondeuses varie beaucoup d’une année à l’autre, les relevés effectués sur les plages de nidification permettent une évaluation utile des variations des populations de femelles adultes, puisque ces dernières sont très fidèles à leur plage natale (Bowen et al., 2005). La valeur de l’évaluation dépend de la longueur de la période couverte par les relevés ainsi que de l’utilisation d’activités et de méthodes d’échantillonnage normalisées (Meylan, 1982; Gerrodette et Brandon, 2000; Reina et al., 2002). Au cours d’une saison de nidification donnée, il existe un lien direct entre le nombre de femelles et le nombre de pontes produites. On a fait état d’une fréquence des pontes variant de 3 à 5,5 par femelle et par saison. Pour convertir le nombre de nids en nombre de femelles pondeuses, il suffit simplement de diviser le nombre de nids par la fréquence des pontes, et ce, pour le nombre d’années pour lesquelles existent des données. Les sous–populations sont assimilées à des « unités de rétablissement », c’est–à–dire à des sous–unités de l’espèce géographiquement ou autrement identifiables et essentielles au rétablissement de l’espèce. On dénombre cinq de ces unités de rétablissement pour la population de tortues caouannes du nord-ouest de l’Atlantique (figure 9) :

  1. Unité de rétablissement du nord (NRU) (depuis la frontière de la Floride et de la Géorgie jusqu’au sud de la Virginie);

  2. Unité de rétablissement de la péninsule de la Floride (PFRU) (depuis la frontière de la Floride et de la Géorgie jusqu’au comté de Pinellas, en Floride);

  3. Unité de rétablissement de Dry Tortugas (DTRU) (îles situées à l’ouest de Key West, en Floride);

  4. Unité de rétablissement du nord du golfe du Mexique (NGMRU) (depuis le comté de Franklin, en Floride, jusqu’au Texas);

  5. Unité de rétablissement de la grande région des Caraïbes (GCRU) (depuis le Mexique jusqu’à la Guyane française, aux Bahamas, aux Petites Antilles et aux Grandes Antilles).

Figure 9. Emplacements des quatre unités de rétablissement de la tortue caouanne aux États–Unis. NRU : unité de rétablissement du nord; PFRU : unité de rétablissement de la péninsule de la Floride; DTRU : unité de rétablissement de Dry Tortugas; NGMRU : unité de rétablissement du nord du golfe du Mexique. D’après NMFS et USFWS (2008).

Carte des emplacements des quatre unités de rétablissement de la tortue caouanne aux États-Unis : l’unité de rétablissement du nord, l’unité de rétablissement de la péninsule de la Floride, l’unité de rétablissement de Dry Tortugas et l’unité de rétablissement du nord du golfe du Mexique.

Évaluation de la population de tortue caouanne du nord–ouest de l’Atlantique (An Assessment of the Loggerhead Turtle Population in the Western North Atlantic Ocean; TEWG, 1999)

Les tendances démographiques de la tortue caouanne du nord–ouest de l’Atlantique ont été estimées à partir des données de recensement des nids, et ces données n’incluaient que les plages les plus régulièrement inventoriées. Ces plages représentaient généralement la majorité de l’ensemble des activités de nidification de chaque sous–population. Les sous–populations étaient définies comme étant les cinq unités de rétablissement déterminées dans l’étude de NMFS et SWFSC (2008). Les tendances ont été estimées à l’aide de la régression linéaire simple et de la modélisation bayésienne à espace d’état.

Examen de la situation en vertu du Endangered Species Act (Conant et al., 2009)

Les populations de la tortue caouanne de chaque segment distinct (DPS) (voir « Unités désignables ») ont été évaluées à l’aide de deux analyses indépendantes.

  1. Risque de quasi–disparition. La quasi–disparition est un seuil à partir duquel la persistance de l’espèce devient douteuse; elle a été déterminée dans ce cas–ci à l’aide d’un indice de risque appelé « vulnérabilité à la quasi–disparition » (Snover et Heppell, 2009). La démarche se fonde sur des projections stochastiques des tendances et de la variabilité observées du nombre de femelles matures présentes sur diverses plages de nidification. L’analyse est fondée sur les séries chronologiques disponibles du nombre de nids présents sur les plages de nidification.

  2. Analyse d’une matrice des menaces. Il s’agit d’un modèle déterministe de population fondé sur les stades de développement qui vise principalement à déterminer les effets des causes connues de mortalité anthropique sur chaque DPS, par rapport aux paramètres biologiques de l’espèce. Les taux de mortalité anthropique ont été ajoutés à la mortalité naturelle, et les valeurs possibles des taux de croissance de la population ont été calculées comme autre mesure de la santé de la population. Cette analyse est fondée sur les connaissances actuelles de la biologie de l’espèce et sur des valeurs de la mortalité anthropique indépendantes des données d’observation des plages de nidification.

Données sur les eaux canadiennes de l’Atlantique

McAlpine et al. (2007) ont dressé un résumé des mentions historiques de tortues caouannes dans les eaux canadiennes et présenté les premières données sur l’espèce tirées du Canadian Sea Turtle Network, lesquelles incluaient les observations d’individus signalées de 1998 à 2000. Ces informations ont été actualisées pour les besoins du présent rapport (n = 81) (Canadian Sea Turtle Sightings Database, 2009). Les informations contenues dans la Base de données canadienne sur les observations de tortues de mer (Canadian Sea Turtle Sightings Database) ont été obtenues par le biais d’un programme volontaire de communication des observations ciblant les pêcheurs commerciaux de la côte canadienne de l’Atlantique (Martin et James, 2005a). Les données sont limitées pour deux raisons : les participants devaient d’abord connaître l’existence du programme, et ensuite se montrer disposés à y participer dans un contexte peu propice à ce genre de collaboration (Martin et James, 2005b). De plus, la tortue caouanne a été désignée comme une espèce d’intérêt secondaire pour le programme, les efforts étant surtout consacrés à la sensibilisation à la situation de la tortue luth. Enfin, le nombre d’observations dépend également de l’effort de pêche déployé.

Brazner et McMillan (2008) ont examiné les données recueillies dans le cadre du Programme international des observateurs (PIO) (International Observer Program) au sujet des activités de la flottille de pêche à la palangre de la côte canadienne de l’Atlantique de 1999 à 2006 (incluant des informations provenant de Javitech [2002] et de Javitech [2003]) dans la zone économique exclusive du Canada. Les données d’observation antérieures à 1999 ont été exclues, puisque les tortues de mer étaient toutes classées à l’époque dans une catégorie générale, sans distinction d’espèce. Les observations de 1999–2000 ont été considérées comme sous–estimées, parce que seules les tortues embarquées étaient enregistrées, alors que la plupart sont simplement larguées en coupant la ligne au–dessus de l’eau. La couverture des observateurs (~ 10,6 %) a été estimée comme étant la proportion du total des débarquements commerciaux observés au cours d’une année et d’une saison données, dans une région donnée. Les prises de tortues caouannes par unité d’effort ont été estimées à partir du total des débarquements et du pourcentage de la couverture des observateurs. Les difficultés de faire correspondre les données du PIO et les bases de données sur les débarquements totaux (p. ex. les poids estimés comparés ou poids réels, les valeurs manquantes) ont introduit un biais dans les estimations des prises accessoires de tortues caouannes; ces observations devraient donc être considérées comme des valeurs minimales, les nombres réels risquant d’être beaucoup plus élevés.

Données sur les eaux canadiennes du Pacifique

Le réseau d’observation des cétacés de la Colombie–Britannique, qui compile également les observations de tortues de mer, a recueilli 31 mentions d’observations de tortues de mer non identifiées (Spaven, comm. pers., 2009; Wild Whales, 2010), dont certaines pourraient être des tortues caouannes. Le réseau regroupe plus de 1 800 observateurs répartis dans toute la province – y compris des organisateurs d’expéditions d’observation des baleines, des gardiens de phare, des exploitants de bateaux nolisés, des capitaines de remorqueurs, des membres d’équipages des traversiers de BC Ferries, des chercheurs, des fonctionnaires, des plaisanciers et des résidents de la côte (Wild Whales, 2010). Ces personnes transmettent leurs observations par l’intermédiaire du site Web du projet, à l’aide d’un numéro de téléphone sans frais ou d’un programme de journal de bord (Wild Whales, 2010).

Populations nicheuses du nord–ouest de l’Atlantique

Les estimations suivantes du nombre de femelles pondeuses (FP) dans chacune des unités de rétablissement ont été calculées à partir du nombre moyen de nids (NN) dérivés pour une période de temps définie (NMFS et SWFSC, 2008). Le nombre de femelles pondeuses est approximatif et fondé sur une estimation de 4,1 nids par femelle.

Unité de rétablissement du nord : FP = 1 272; NN = 5 215 (1989–2008)
Unité de rétablissement de la péninsule de la Floride : FP = 15 735; NN = 64 513 (1989-2007)
Unité de rétablissement de Dry Tortugas : FP = 60; NN = 246 (1995–2004, à l’exclusion de 2002)
Unité de rétablissement du nord du golfe du Mexique : FP = 221; NN = 906 (1995-2007)
Unité de rétablissement de la grande région des Caraïbes : aucune analyse statistique valide des tendances de nidification à long terme n’est disponible pour l’unité.

Population canadienne de l’Atlantique

Il n’existe aucune étude scientifique officielle de l’abondance des tortues caouannes dans les eaux canadiennes.

Les observations de la présence de la tortue caouanne (n = 701) dans les eaux canadiennes ont été communiquées dans le cadre du Programme international des observateurs. Ces individus ont été accidentellement capturés par la flottille canadienne de palangriers pélagiques de l’Atlantique de 1999 à 2006, dans la zone économique exclusive du Canada; les prises étaient concentrées dans les zones extracôtières, le long de la portion ouest du plateau néo-écossais et du banc Georges, au large de la Nouvelle-Écosse, et près des Grands Bancs de Terre–Neuve (Brazner et McMillan, 2008). Compte tenu du degré de couverture du Programme international des observateurs (~ 10,6 %), Brazner et McMillan (2008) ont estimé que le nombre de prises accessoires de tortues effectuées par l’ensemble de la flottille pendant cette période atteignait 9 592 (moyenne annuelle de 1 199 tortues).

La Base de données canadienne sur les observations de tortues de mer contient 81 mentions de tortues caouannes pour la période 1997–2009. La structure de la collecte des données ne permet pas dans ce cas d’extrapoler pour déterminer le nombre total de tortues caouannes au Canada, mais elle corrobore néanmoins la présence saisonnière de l’espèce en eaux canadiennes (Martin et James, 2005a; James et al., 2006).

Selon les observations et les données d’observateurs recueillies jusqu’à ce jour, une population saisonnière de tortues caouannes juvéniles est présente dans les eaux canadiennes de l’Atlantique, ce que la présence de tortues caouannes dans les eaux américaines contiguës tend à confirmer (Ladzell, 1980; Witzell, 1999; Javitech, 2002; Bolten, 2003; Ehrhart et al., 2003; Javitech, 2003; Ledwell, 2007; McAlpine et al., 2007; Brazner et McMillan, 2008; Canadian Sea Turtle Sightings Database, 2009; James, comm. pers., 2009; Lawson, comm. pers., 2009). Même si les critères du COSEPAC mettent habituellement l’accent sur le nombre d’adultes matures dans une population, il importe de ne pas sous–estimer l’importance du stade de développement juvénile pour la survie de l’espèce. Les analyses de stocks mélangés de tortues caouannes juvéniles montrent que des individus appartenant à des populations nicheuses génétiquement distinctes se mêlent fortement dans les milieux océaniques (Bowen et al., 2005; Bowen et Karl, 2007). En conséquence, les impacts sur la population de juvéniles se répercutent sur l’ensemble de l’habitat de nidification (Bowen et al., 2005; Bowen et Karl, 2007; Brazner et McMillan, 2008; Alfaro Shigueto et al., 2008; Mansfield et al., 2009). En utilisant un modèle matriciel fondé sur les stades de développement, Crouse et al. (1987) ont noté que les mesures permettant d’accroître le taux de survie des grands juvéniles et des adultes paraissaient beaucoup plus efficaces pour assurer la pérennité et la croissance de la population que celles influant sur la survie des œufs ou la fécondité. En s’appuyant sur les conclusions de cette étude, Crowder et al. (1994) ont calculé les valeurs reproductives propres à chaque stade :

Population nicheuse du Pacifique Nord

Les plages de nidification du Japon, où se reproduit la majorité des tortues caouannes du Pacifique Nord, accueillent chaque année environ 2 000 femelles matures (Conant et al., 2009).

Population canadienne du Pacifique

Les tortues caouannes sont peu nombreuses dans les eaux canadiennes du Pacifique; il n’y existe en fait aucune observation confirmée de l’espèce (McAlpine et al., 2007, Spaven, comm. pers., 2009). Toutefois, selon les observations signalées sur les côtes des États de Washington et de l’Alaska, l’espèce fréquente probablement à l’occasion les eaux de la Colombie–Britannique (Hodge, 1982; Bane, 1992; Hodge, 1992; Hodge et Wing, 2000; McAlpine et al., 2007). Les observations de tortues de mer non identifiées (n = 31) par le réseau d’observation des cétacés de la Colombie-Britannique pourraient inclure des tortues caouannes (Spaven, comm. pers., 2009; Wild Whales, 2010). Toutefois, les connaissances actuelles sur les habitats océanique et néritique de la tortue caouanne du Pacifique Nord indiquent que l’espèce serait présente au sud des eaux canadiennes. Dans les zones océaniques, on les observe au sud du 44e degré de latitude nord (Bowen et al., 1995; Koch et al., 2006; Peckham et Nichols, 2003; Peckham et al., 2007; Kobayashi et al., 2008).

Les données actuelles sur les tortues caouannes au Canada sont insuffisantes pour permettre de déterminer les fluctuations et les tendances de la population. Il est pertinent d’utiliser, en guise d’approximation, les tendances affichées par les populations des plages de nidification d’où proviennent – ou pourraient vraisemblablement provenir – les tortues caouannes observées dans les eaux canadiennes. On estime que la durée d’une génération de tortue caouanne est de 46 ans (50 ans selon NMFS et USFWS, 2008). Les tendances pour les populations de la tortue caouanne du nord-ouest de l’Atlantique et du Pacifique Nord montrent un déclin (NMFS et USFWS, 2008; Conant et al., 2009; TEWG, 2009).

Nord–ouest de l’Atlantique

Les résultats du plan de rétablissement de la population de la tortue caouanne du nord-ouest de l’Atlantique (NMFS et USFWS, 1998) et du rapport intitulé « An Assessment of the Loggerhead Turtle Population in the Western North Atlantic Ocean » (TEWG, 1999) sont inclus. Les chiffres représentent les taux annuels de déclin.

Tableau 1. Nombres totaux de nids de la tortue caouanne (1989–2009) recensés sur les plages de référence de la Floride dans le cadre d’une étude du Fish and Wildlife Research Institute intitulée « Index Nesting Beach Survey » (INBS) (Florida Fish and Wildlife Commission, 2010). Le programme INBS utilise des critères normalisés de collecte des données afin de mesurer le taux saisonnier de nidification et d’établir des comparaisons précises entre les diverses plages et les saisons de reproduction. La Fish and Wildlife Conservation Commission de la Floride coordonne la collecte des données du INBS par l’intermédiaire d’un réseau de détenteurs de permis – employés de parcs fédéraux, d’État et locaux, fonctionnaires d’autres agences d’État, membres d’organisations de conservation, chercheurs universitaires et membres du public. Le personnel du Fish and Wildlife Research Institute coordonne la collecte des données, donne de la formation et compile les données des relevés annuels aux fins de publication et de diffusion. Les nids dénombrés dans le cadre de l’INBS représentent environ 69 % des nids connus de la tortue caouanne en Floride. Dans le cadre du programme principal du INBS, 320 km de plages de nidification sont divisés en zones d’une longueur moyenne de 0,8 km. Chaque année (de 1989 à 2009), les zones de référence sont inspectées chaque jour pendant les 109 jours de la période de nidification de référence (du 15 mai au 31 août). Sur toutes les plages de référence, les chercheurs notent le nombre de nids et de tentatives de nidification par espèce, l’emplacement du nid et la date.
Année Nombre total de nids
1989 39 083
1990 51 412
1991 53 899
1992 48 873
1993 42 691
1994 52 281
1995 59 381
1996 54 559
1997 44 686
1998 61 298
1999 58 273
2000 57 901
2001 47 681
2002 39 651
2003 41 509
2004 30 680
2005 35 202
2006 32 274
2007 29 044
2008 39 788
2009 33 773

Conant et al. (2009) ont calculé une tendance au déclin pour les segments de population distincts (DPS) du nord–ouest de l’Atlantique, dans les unités de rétablissement pour lesquelles on possède des données suffisantes (unités de rétablissement du nord, de la péninsule de Floride, du nord du golfe du Mexique et de la grande région des Caraïbes). Le 10 mars 2010, le National Marine Fisheries Service et le Fish and Wildlife Service des États–Unis ont proposé de faire passer le statut des tortues caouannes du Pacifique Nord et du nord–ouest de l’Atlantique de « espèce menacée » à « espèce en voie de disparition » en vertu de la Endangered Species Act. Le NMFS et le USFWS ont également proposé de répartir les tortues caouannes du monde entier en neuf populations distinctes auxquelles seraient attribués selon le cas le statut d’espèce menacée ou en voie de disparition.

Pacifique Nord

Les données qui existent pour certaines plages de nidification japonaises remontent aux années 1950 et indiquent clairement un déclin significatif de la population (Kamezaki et al., 2003). Les données des années 1970 indiquent une période de stabilité pour les femelles pondeuses. Au cours des années 1980, on a observé une augmentation du nombre de nids. Toutefois, les années 1990 ont été marquées par un net déclin du nombre annuel de nids, qui a atteint un niveau inférieur à celui enregistré au début des années 1980. Deux plages en particulier ont subi un déclin important : Hiwasa (89 %) et Minabe (74 %). La période de 1997 à 1999 est celle au cours de laquelle on a enregistré les nombres de nids les plus bas sur la plupart des plages. (Toutes les données sur les aires de nidification du Pacifique proviennent de Kamezaki et al. [2003].) Snover (2008) a récemment confirmé une tendance générale à la diminution du nombre de nids sur les plages japonaises entre 1989 (entre 6 000 et 7 000 nids) et 2007 (entre 3 000 et 4 000 nids).

Conant et al. (2009) ont calculé un indice élevé de la vulnérabilité à la quasi-disparition (VQD) tant pour le DPS du nord–ouest de l’Atlantique que pour celui du Pacifique Nord. La valeur de l’indice a été établie à 0,3. Le DPS du Pacifique Nord a atteint une VQD de 0,3 à environ 3 % de l’abondance actuelle des femelles. Dans chaque DPS, le seuil de la VQD de 0,3 a été atteint à un seuil de quasi-disparition (quasi–extinction threshold – QET) inférieur à 0,3, ce qui indique une forte probabilité de quasi–disparition pour une large gamme de valeurs du seuil de quasi-disparition (Conant et al., 2009).

Les populations de la tortue caouanne du monde entier sont en déclin, et ce déclin risque de se poursuivre à l’avenir. Tel que mentionné ci–dessus, Conant et al. (2009) soutiennent que les populations du nord–ouest de l’Atlantique et du Pacifique Nord ont atteint le seuil de quasi-disparition.

Le comportement migratoire à grande distance de la tortue caouanne fait de cette espèce une ressource biologique partagée entre plusieurs pays. Les efforts internationaux de conservation sont donc interdépendants (NMFS et USFWS, 2008). La perte de l’un ou l’autre des segments de population distincts du monde (n = 9) créerait une discontinuité importante dans l’aire de répartition du taxon (Hatase, 2002b; Conant et al., 2009).

Les eaux canadiennes de l’Atlantique abritent une population de tortues caouannes juvéniles (Ladzell, 1980; Witzell, 1999; Javitech, 2002; Bolten, 2003; Ehrhart et al., 2003; Javitech, 2003; Ledwell, 2007; McAlpine et al., 2007; Brazner et McMillan, 2008; Canadian Sea Turtle Sightings Database, 2009; James, comm. pers., 2009; Lawson, comm. pers., 2009). Les analyses de stocks mélangés de tortues caouannes juvéniles montrent que des individus appartenant à des populations nicheuses génétiquement distinctes se mêlent fortement dans les milieux océaniques (Bowen et al., 2005; Bowen et Karl, 2007). Les juvéniles présentent la valeur reproductive la plus élevée pour l’espèce (Crowder et al., 1994). Mansfield et al. (2009) soulignent que des sources localisées de mortalité des tortues caouannes juvéniles auront à terme un impact sur l’ensemble des sous-populations de tortues caouannes des États–Unis. Crowder (2000) et Lewison et al. (2004) traitent de la responsabilité de pays comme le Canada, dont les flottilles de pêche pélagique à la palangre capturent accidentellement des tortues caouannes; ils signalent qu’en raison de la répartition sur des bassins entiers de l’effort de pêche pélagique et des populations de tortues de mer, la protection efficace des tortues caouannes et des tortues luth exigera une intervention internationale coordonnée. On ne saurait sous–estimer l’importance d’assurer la conservation de la population de tortues caouannes qui se trouve dans les eaux canadiennes de l’Atlantique.

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