Programme de rétablissement du chevalier cuivré au Canada [finale] 2012 : Rétablissement
Ce programme de rétablissement vise à améliorer la situation du chevalier cuivré afin d’en arrêter le processus d’extinction, d’accroître l’abondance de l’espèce et, à plus long terme, d’amener la population à un niveau jugé suffisant pour que le COSEPAC puisse lui attribuer un statut moins élevé, soit menacé, préoccupant ou non en péril. La cible de rétablissement pour le maintien d’une population autoperpétuatrice de chevaliers cuivrés tout en maintenant 90% de la diversité génétique a été évaluée à 4 000 adultes (Bernatchez, 2004; Lippé et coll., 2006; MPO, 2007). Le délai pour atteindre ce but est de 20 ans. Compte tenu que les méthodes d’évaluations actuelles ne permettent de vérifier l’atteinte de la cible de rétablissement, plusieurs objectifs de population et de répartition ont été définis pour ce programme afin de mesurer les progrès :
- le ratio de géniteurs de chevaliers cuivrés par rapport à l’ensemble des chevaliers, toutes espèces confondues, devra atteindre 3% ;
- les captures automnales de jeunes chevaliers cuivrés de l’année devront représenter au moins 3% des captures de l’ensemble des jeunes chevaliers, toutes espèces confondues ;
- au cours des prochaines années, les juvéniles provenant des ensemencements devront contribuer significativement aux inventaires tandis que ceux provenant de la reproduction naturelle devront prendre graduellement la relève ;
- l’aire de répartition actuelle devra être maintenue.
Pour l’atteinte de ces objectifs de population, trois approches générales ont été préconisées :
- La conservation : mesures législatives ou administratives et actions préconisées autres que la sensibilisation et la recherche pour favoriser le rétablissement du chevalier cuivré ;
- La sensibilisation : sensibilisation et éducation des groupes concernés à la situation précaire de la population de chevaliers cuivrés et aux menaces à son rétablissement ;
- La recherche et le suivi : étude et suivi des chevaliers cuivrés et des menaces à leur rétablissement.
Grâce à la mise en œuvre des précédents plans de rétablissement du chevalier cuivré, plusieurs mesures ont été entreprises et réalisées pour permettre le rétablissement de l’espèce (Comité d'intervention, 1995, 1999; Équipe de rétablissement du chevalier cuivré, 2005).
2.2.1.1 Protection légale
Le chevalier cuivré est inscrit sur l’annexe 1 de la LEP depuis 2007 et bénéficie de l’interdiction de tuer un individu d'une espèce sauvage inscrite, de lui nuire, de le harceler, de le capturer ou de le prendre. L’espèce dispose également, depuis 1999, du statut le plus important en vertu de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables (L.R.Q., chapitre E-12.01) en vigueur au Québec, soit celui d’espèce menacée. De plus, selon le Règlement de pêche du Québec (DORS/90-214 et DORS/2008-322), il est interdit de capturer et posséder les meuniers et les chevaliers à la pêche sportive dans l’aire de répartition du chevalier cuivré, à l’exception du lac Saint-Pierre et son archipel, afin de limiter les mortalités, puisque ces poissons ressemblent beaucoup au chevalier cuivré et il peut être difficile pour les pêcheurs de les différencier.
D’autre part, tous les pêcheurs commerciaux ont une obligation de remise à l’eau en cas de capture de chevaliers cuivré et de rivière, tandis que l’utilisation de toutes les espèces de chevalier en tant que poisson appât est interdite. Une interdiction de pêche aux poissons appât est en vigueur depuis le 1er avril 2008 dans la rivière Richelieu, en aval du barrage de Chambly, dans le but de protéger les juvéniles du chevalier cuivré. De plus, la Loi sur les pêches protège l’habitat des chevaliers cuivrés puisqu’il est interdit d’exploiter des ouvrages ou des entreprises entraînant la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson à moins d’obtenir une autorisation du ministre.
La Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune (L.R.Q., chapitre 61.1, r.46) assure une protection légale du refuge Pierre-Étienne-Fortin, dans les rapides de Chambly, contre d’éventuelles modifications des éléments physiques, chimiques ou biologiques de l’habitat et interdit toute activité durant la période de fraie et d’incubation des œufs du chevalier cuivré, soit du 20 juin au 20 juillet, dans les zones utilisées à cette fin. Cette loi permet aussi de protéger l’habitat du poisson grâce à la préparation de plans d’habitats fauniques qui fixe les normes et conditions d’intervention dans le milieu (chapitre IV.1).
2.2.1.2 Construction et opération de la passe migratoire Vianney-Legendre
Depuis la fin des années 1960, le libre passage du chevalier cuivré et d’autres espèces de poisson était gravement compromis par la restauration du barrage de Saint-Ours, sans la reconstruction de la passe migratoire dont il était autrefois pourvu (Dumont et coll., 1997). La mise en opération d’une passe migratoire multispécifique a été effectuée au printemps 2001, grâce à la participation logistique et financière de plusieurs partenaires12. L’ouvrage est opéré par Parcs Canada, gestionnaire du lieu historique national du Canal-de-Saint-Ours et du barrage. Le permis d’opération de la passe, émis par Pêches et Océans Canada, exigeait une période de rodage au cours de laquelle divers scénarios d’opération de la passe et des vannes du barrage ont été testés et comparés par un comité scientifique13 pour identifier les modalités qui favorisent le passage du chevalier cuivré et des autres espèces ciblées par cet aménagement, soit l’esturgeon jaune (Acipenser fulvescens), l’alose savoureuse (Alosa sapidissima), l’anguille d’Amérique (Anguilla rostrata) et le chevalier de rivière (Moxostoma carinatum). Les résultats sont très encourageants puisque le chevalier cuivré emprunte la passe migratoire, quoiqu’il reste plutôt rare (Fleury et Desrochers, 2003; Fleury et Desrochers, 2004; Fleury et Desrochers, 2005; Fleury et Desrochers, 2006).
2.2.1.3 Création du refuge faunique Pierre-Étienne-Fortin
Le refuge faunique Pierre-Étienne-Fortin, qui a été inauguré en octobre 2002, doit son nom au naturaliste qui fut le premier à décrire un spécimen de chevalier cuivré dans la littérature scientifique en 1866. La création du refuge faunique dans les rapides de Chambly vise à préserver l’intégrité de la plus importante des deux seules frayères connues, à assurer la quiétude des géniteurs pendant la période de reproduction et à protéger les œufs du piétinement pendant l’incubation. La création du refuge relève d’une concertation entre Hydro-Québec, le MRNF, les municipalités de Richelieu et de Chambly et Conservation de la nature Canada (CNC). Cette dernière est devenue propriétaire du lit de la rivière sur un tronçon de 15 km en amont du refuge et se consacre à la conservation des habitats aquatiques et à l’éducation et la sensibilisation dans le refuge.
2.2.1.4 Protection des îles Jeannotte et aux Cerfs
En vue d’assurer leur protection à long terme, Conservation de la nature Canada a acquis en décembre 2006 et février 2009, les îles Jeannotte et aux Cerfs, dans la rivière Richelieu. La propriété de l’île aux Cerfs a depuis été transférée au MRNF. Ces acquisitions assurent une protection particulière aux sites propices à la croissance du chevalier cuivré dont les rives sont pratiquement les seules de ce tronçon de la rivière Richelieu qui n’ont pas été artificialisées par les activités humaines. Dès 2010, un projet de sensibilisation a été mis de l’avant par CNC et le Comité de concertation et de valorisation du bassin de la rivière Richelieu (COVABAR) autour des îles aux Cerfs et Jeannotte. Des bouées et deux quais portant des affiches ont été installés pour sensibiliser les plaisanciers à la présence de cet important habitat d’alevinage et des séances d’animation ont eu lieu durant la saison estivale afin de sensibiliser les plaisanciers à la notion d’habitat faunique ainsi qu’aux règles de nautisme durable.
2.2.1.5 Reproduction artificielle, élevage et ensemencement
Depuis 2004, un plan de reproduction artificielle et d’ensemencement est mis en œuvre pour pallier à la faiblesse de la reproduction naturelle. Près de trois millions de larves et 140 000 juvéniles ont été relâchés dans les aires d’alevinage de la rivière Richelieu entre 2004 et 2009. Les géniteurs sont capturés à la passe migratoire Vianney-Legendre. Ce plan vise à reconstituer le stock reproducteur en maintenant au moins 90% de la diversité génétique de départ de la population sur une période de 100 ans (Bernatchez, 2004). Neuf étangs ont été aménagés par le MRNF spécifiquement pour l’élevage du chevalier cuivré à la station piscicole provinciale de Baldwin. La reproduction artificielle est réalisée par le MRNF, à même les installations de Parcs Canada et est appuyée par le MPO depuis 2009.
2.2.1.6 Interventions dans le milieu
Le club conseil en agroenvironnement Conseilsol a obtenu une subvention du programme « Mise en valeur de la biodiversité des cours d’eau en milieu agricole » de la Fondation de la faune du Québec, en collaboration avec l’Union des producteurs agricoles, pour la réalisation d’activités de restauration et de stabilisation de berges sur le ruisseau Richer. Ce tributaire a une incidence sur la qualité de l’eau dans les sites d’alevinage de la rivière Richelieu. Ce club s’est associé au COVABAR afin de caractériser et réaliser des interventions en territoire agricole ainsi que de travailler avec les producteurs agricoles afin de modifier leurs pratiques culturales.
Depuis 2006, CNC a contribué à restaurer et caractériser des rives de la rivière Richelieu, en amont du refuge Pierre-Étienne-Fortin et autour des îles Jeannotte et aux Cerfs. Plusieurs chantiers de restauration et de stabilisation de berges ont été réalisés dans les rivières des Hurons, l’Acadie et dans le ruisseau Beloeil, des tributaires de la rivière Richelieu jugés prioritaires pour l’intervention dans le milieu, de 2006 à 2010 par le COVABAR en collaboration avec Agriculture et Agroalimentaire Canada. La rivière des Hurons, la rivière la plus polluée au Québec, a été ciblée en raison de la proximité de son embouchure avec la principale frayère du chevalier cuivré et d’autres espèces menacées. Ces chantiers ont été réalisés grâce au financement du Fonds interministériel pour le rétablissement des espèces en péril ainsi que de nombreux autres partenaires. L’organisme Éco-Nature a mis sur pied un programme de caractérisation des rives, le long de la rivière des Mille Îles, dans le but d’en dresser un portrait et de proposer des améliorations dans l’aménagement de celles-ci. Depuis 2007, près de 180 propriétés (privées et municipales) ont été caractérisées. Les propriétaires recevront une Trousse du riverain les incitant à améliorer l’état de leur rive notamment, par la végétalisation et la signature d’ententes de conservation basées sur l’honneur. Cette activité s’inscrit dans le cadre du Programme d’intendance de l’habitat pour les espèces en péril (PIH).
2.2.2.1 Outils de sensibilisation sur le chevalier cuivré
L’objectif de la publication de dépliants de sensibilisation sur le chevalier cuivré était d’informer le public sur le statut précaire de l’espèce, de proposer des moyens d’agir, de démontrer l’importance de la rivière Richelieu et de renseigner la population au sujet de la création et du rôle du refuge faunique Pierre-Étienne-Fortin. Un dépliant a été produit par le COVABAR et un second, qui présente de façon plus détaillée le refuge faunique, a été rédigé par CNC en collaboration avec le MRNF, l’Agence Parcs Canada, le PIH et le Projet Rescousse. Le comité ZIP du Lac Saint-Pierre a, pour sa part, réalisé des guides d’identification et de sensibilisation pour différents groupes cibles (p. ex. : les pêcheurs sportifs et commerciaux), pour plusieurs espèces en situation précaire dont le chevalier cuivré. Huit panneaux éducatifs ont également été aménagés à des sites stratégiques autour du lac (mises à l’eau). L’espèce a également fait l’objet de plusieurs articles dans différents journaux et revues et fut le sujet de reportages télévisés et radiophoniques ainsi que de pièces de théâtre.
2.2.2.2 Projet Rescousse
Le Projet Rescousse est un organisme sans but lucratif qui vise deux objectifs, soit de récolter des fonds pour la sauvegarde des espèces menacées et de sensibiliser le public à cette cause. En décembre 1998, il a lancé sur le marché une bière de microbrasserie, la Rescousse. Une partie des sommes récoltées lors de la vente de la bière est versée au programme Faune en danger de la Fondation de la faune du Québec, en vue de soutenir des projets qui portent sur des espèces menacées du Québec. Le chevalier cuivré est désormais considéré comme un véritable porte-étendard des espèces menacées du Québec et la Rescousse, qui constitue un excellent véhicule de communication à travers les médias, a contribué à redorer l’image du poisson auprès du public. Le Projet Rescousse a également été l’un des partenaires financiers de la passe migratoire Vianney-Legendre à Saint-Ours.
2.2.2.3 Rivière des Mille Îles
À l’aide du PIH, Éco-Nature, un organisme environnemental à but non lucratif, a fait plusieurs interventions auprès du public, notamment auprès des riverains, grâce à des panneaux d’interprétation, des conférences et du matériel éducatif. Ces interventions étaient orientées vers la conservation de l’habitat et la sensibilisation à la cause du chevalier cuivré. Les efforts concertés de nombreux intervenants, dont Éco-Nature et le MRNF, ont mené à la création du refuge faunique de la Rivière-des-Mille-Îles. Ce territoire, protégé en 1998, est constitué de dix îles couvrant 26,2 hectares de terres privées appartenant aux villes de Laval et de Rosemère et à l’organisme Éco-Nature. Ce dernier assume la gestion de ce site.
2.2.2.4 Gardiennage au refuge faunique Pierre-Étienne-Fortin
Le COVABAR, en collaboration avec le MRNF ainsi que d’autres partenaires, a mis en place un projet de gardiennage au refuge faunique Pierre-Étienne-Fortin. Ce projet avait pour but de préserver l’intégrité de la plus importante des deux seules frayères connues et l'habitat du chevalier cuivré. Ce site naturel d’une grande richesse est hautement fréquenté au cours de la période estivale par les plaisanciers (baignade, motomarine, kayak, pêche).
La présence d’agents de sensibilisation qui ont patrouillé le secteur durant les étés 2006 et de 2008 à 2010, principalement durant les périodes de fraie des espèces fréquentant ce site, a permis de faire respecter la réglementation du refuge faunique et de la pêche sportive, d’effectuer de la sensibilisation des usagers et de réaliser le sondage sur les pêches. Ce projet de sensibilisation a été rendu possible grâce au financement du PIH, d’Environnement Canada et de la Fondation de la faune du Québec.
2.2.2.5 Projet « Le périple du chevalier cuivré »
Cinq panneaux d’interprétation portant sur le chevalier cuivré ont été conçus. Ce projet est le fruit d’une étroite collaboration entre CNC, le COVABAR et le MRNF avec l’appui de plusieurs partenaires dont Hydro-Québec. Déployés sur le territoire de la rivière Richelieu à des endroits stratégiques, les panneaux bilingues permettent de faire connaître le chevalier cuivré et son habitat, les menaces pesant sur lui, les interventions de rétablissement réalisées et en cours, et ils suggèrent aux visiteurs des actions concrètes et simples pour participer à sa protection.
2.2.2.6 Interprétation et animation à la passe migratoire Vianney-Legendre
Le COVABAR a mis sur pied un projet pilote d’interprétation et d’animation à la passe migratoire Vianney-Legendre sur le territoire du Lieu historique national du Canada du Canal-de-Saint-Ours pendant à l’été 2010. Ce projet avait pour but d’informer et de sensibiliser le public aux thématiques du bassin versant de la rivière Richelieu et à la passe migratoire et aux espèces qui la fréquentent, incluant le chevalier cuivré.
Ce projet a permis de poursuivre les efforts de sensibilisation des usagers et des riverains de la rivière Richelieu et de mettre sur pied un programme d’animation qui pourrait être reconduit pour les prochaines années.
2.2.3.1 Guide d’identification des juvéniles
Compte tenu des difficultés d’identification des jeunes chevaliers des cinq espèces présentes au Québec, une clé dichotomique bilingue a été conçue en 2003 pour les juvéniles de 35 mm et plus (Vachon, 2003a). Des efforts ont également été investis pour la description des spécimens de plus petite taille, notamment par l’examen comparé du développement ostéologique de la queue chez divers les chevaliers (Grünbaum et coll., 2003).
2.2.3.2 Analyses génétiques
À ce jour, l’analyse de l’ADN est la seule façon fiable de discriminer les larves (25 mm et moins), puisque leur identification à partir de caractères morphologiques externes s’est avérée peu concluante. Les méthodes d’analyses ont été raffinées et la caractérisation génétique de la population ainsi que l’évaluation de l’hétérogénéité génétique ont été réalisées (Lippé et coll., 2004, 2006). Ces travaux ont aussi permis d’acquérir les connaissances requises pour la rédaction du plan de reproduction. Outre la caractérisation génétique de toutes les captures et des géniteurs utilisés pour la reproduction artificielle, une étude de marquage a été effectuée en 2007 et des analyses d’assignation parentale ont été réalisées avec les tissus des juvéniles capturés dans le but de déterminer leur origine, soit naturelle ou artificielle, pour améliorer les connaissances sur la survie des jeunes ensemencés. Globalement, le ratio de chevaliers cuivrés issus de la reproduction artificielle et naturelle se situe autour de 9:1 (Vachon, 2010). Ce suivi permet de mesurer le rendement des différentes activités de protection et de rétablissement mises de l’avant.
2.2.3.3 Suivi annuel du recrutement
Un protocole de suivi du recrutement des jeunes chevaliers de l’année de la rivière Richelieu a été élaboré et exécuté sur une base presque annuelle. Ces travaux visent à mettre au point un indice de rendement des mesures de conservation et de soutien mises en place et à venir. Des pêches automnales à la seine de rivage ont ainsi été effectuées à 40 stations entre 1998 et 2009. Depuis 2008, les travaux couvrent également le secteur de Saint-Ours à Sorel. Certaines corrélations, bien que préliminaires, ont pu être dégagées entre l’abondance, la croissance des jeunes de l’année et les conditions climatiques et hydrologiques du milieu (Vachon, 1999b, 2002, 2007). Ces travaux, combinés aux analyses génétiques, ont également permis de confirmer la survie à court terme des jeunes chevaliers cuivrés ensemencés et ont contribué à améliorer nos connaissances sur les juvéniles plus âgés.
2.2.3.4 Télémétrie
La télémétrie s’avère le meilleur outil pour localiser, dans un premier temps, les habitats fréquentés par le chevalier cuivré dans le fleuve Saint-Laurent et ses tributaires. Dans un second temps, la définition des caractéristiques de ces habitats a permis de délimiter, dans l’ensemble du territoire fréquenté, les milieux essentiels susceptibles d’être utilisés par l’espèce au stade adulte (aires de fraie, zones d’alimentation, voies de migration), et d’en déterminer l’étendue et la répartition. Ce travail permet d’intervenir par des mesures de conservation appropriées et de suggérer des modalités de gestion qui maximisent la protection des habitats du chevalier cuivré. La phase I du projet de télémétrie a permis de raffiner la méthode de fixation des émetteurs, tandis que les phases subséquentes ont permis de dresser un portrait de la répartition, des déplacements et des habitats sélectionnés par le chevalier cuivré. La télémétrie a démontré que l’aire de répartition de cette espèce était plus étendue que ce que les captures laissaient entrevoir. Les travaux de télémétrie ont permis de cerner les variables environnementales responsables de la sélection d’habitat et de bâtir un modèle d’habitat multivarié. Ce modèle a été utilisé pour produire des cartes représentant la probabilité de présence de l’espèce en période printanière, estivale et automnale (Comité ZIP des Seigneuries, 2006; D. Hatin, MRNF, données non publiées). Cette information a ensuite permis de définir les zones d’habitat essentiel aux chevaliers cuivrés adultes dans le fleuve Saint-Laurent (MPO, 2010a).
2.2.3.5 Suivi des captures commerciales et sportives accidentelles
En 1998, la collaboration d’un pêcheur commercial œuvrant dans le secteur Lavaltrie-Contrecœur du fleuve Saint-Laurent a permis de mettre en évidence une concentration importante de chevaliers cuivrés adultes. Depuis, toujours en collaboration avec ce pêcheur, un suivi annuel des captures accidentelles dans ses engins commerciaux est assuré, d’avril à novembre, par le MRNF.
Plusieurs renseignements sont colligés dans le cadre de ce suivi : date, engin, site, longueur totale, présence de tubercules nuptiaux et d’anomalies externes, état de santé à la remise à l’eau ou toutes autres informations jugées pertinentes (stade de maturité sexuelle, coloration particulière, etc.). Lorsque cela est possible, le sexe est déterminé par pression abdominale, par la présence de tubercules nuptiaux ou par l’angle formé par les nageoires pelviennes. Une micropuce est insérée dans chaque poisson remis à l’eau pour identification ultérieure. La découverte de ce groupe permet d’accroître de façon considérable les connaissances.
En 2009 un projet d’évaluation de l’impact de la pêche commerciale et sportive au lac Saint-Pierre a été coordonné par le comité ZIP du lac Saint-Pierre. Le but du projet est de sensibiliser les pêcheurs à la fragilité du chevalier cuivré et de vérifier l’importance des captures accidentelles. Ce projet comportait plusieurs volets dont la sensibilisation des pêcheurs, la formation du personnel et la mise en place d’une ligne téléphonique d’urgence.
Afin d’atteindre la cible de 4 000 individus matures et les objectifs en matière de population et de répartition, cinq objectifs de rétablissement ont été définis.
Objectif 1. Améliorer les conditions d’habitat requises pour l’ensemble des étapes du cycle vital nécessaires à la survie et au rétablissement du chevalier cuivré, en visant :
- a. la protection des habitats importants connus et la création d’habitats supplémentaires ;
- b. l’amélioration de la qualité de l’eau et des habitats dans le bassin versant de la rivière Richelieu et du fleuve Saint-Laurent, afin que la reproduction et la croissance puissent s’effectuer normalement ;
- c. le maintien de la connectivité entre les différents habitats utilisés aux différentes étapes du cycle vital.
Objectif 2. Soutenir la population de chevaliers cuivrés grâce à l’ensemencement, jusqu’à ce que la reproduction naturelle permette le maintien de la population à long terme.
Objectif 3. Encourager les efforts de recherche sur la composante subadulte (100-500 mm) de la population afin de combler le manque de connaissance de cette étape du cycle vital du chevalier cuivré.
Objectif 4. Réduire l’impact des pressions anthropiques sur le chevalier cuivré et son habitat.
Objectif 5. Effectuer un suivi régulier de l’état de la population.
Le tableau suivant présente des mesures visant à orienter les actions de rétablissement mises en œuvre par le MPO et tous les partenaires intéressés par le rétablissement du chevalier cuivré.
Le premier objectif de rétablissement vise à préserver l’habitat du chevalier cuivré par le maintien des habitats existants par des mesures de conservation (protection légale, politiques de gestion) et de sensibilisation (protection des rives), mais aussi par l’amélioration de la qualité de l’eau, milieu de vie de cette espèce. Les deuxième et troisième objectifs visent à augmenter le recrutement des chevaliers cuivrés en maintenant et bonifiant le programme de reproduction artificielle et d’ensemencement ainsi qu’en améliorant les connaissances sur un segment de la population encore peu connu, soit les subadultes (100-500 mm), dans le but de mettre de l’avant les mesures de gestion et de protection appropriées. Le quatrième objectif permet de mettre en œuvre des mesures visant à réduire l’impact de la pression exercée par les activités anthropiques. La sensibilisation des pêcheurs et la surveillance visant à limiter la perturbation par les plaisanciers sont des approches préconisées pour atteindre cet objectif. Le dernier objectif, le suivi de la population, s’avère essentiel pour valider et améliorer les efforts de rétablissement ainsi que pour améliorer les connaissances, à ce jour assez limitées, sur cette espèce.
12 Parcs Canada, MPO, ministère des Transports du Canada, Développement économique Canada, Environnement Canada, ministère de l'Environnement et de la Faune (maintenant le MRNF), ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, Fondation de la faune du Québec et Projet Rescousse.
13Ce comité était formé de représentants du MPO, du MRNF et de Parcs Canada.
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