Épaulard du large (Orcinus orca) : programme de rétablissement 2018

Titre officiel : Programme de rétablissement de l’épaulard du large (Orcinus orca) au Canada 2018

Ce document décrit les moyens dont nous disposons pour favoriser le rétablissement de la population d'épaulard du large au Canada.

Loi sur les espèces en péril
Série des programmes de rétablissement

Épaulard du large
Épaulard du large
Information sur le document

Citation recommandée : Pêches et Océans Canada. 2018. Programme de rétablissement de l'épaulard du large (Orcinus orca) au Canada. Série de Programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril. Pêches et Océans Canada, Ottawa. viii + 59 pp.

Pour obtenir des exemplaires supplémentaires du programme de rétablissement, ou de plus amples renseignements sur les espèces en péril, y compris les rapports de situation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), les descriptions de résidence, les plans d'action et autres documents liés au rétablissement, veuillez consulter le Registre public des espèces en péril.

Illustration de la couverture : Photo : Brian Gisborne

Also available in English under the title: « Recovery Strategy for the Offshore Killer Whale (Orcinus orca) in Canada »

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par la ministre des Pêches et des Océans du Canada, 2018. Tous droits réservés.

L’ISBN 978-0-660-27241-2

No de catalogue En3-4/293-2018F-PDF

Le contenu (à l’exception des illustrations) peut être utilisé sans autorisation, sous réserve de mention de la source.

Préface

En vertu de l’Accord pour la protection des espèces en péril (1996), les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires ont convenu d’établir une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection efficace des espèces en péril partout au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (L.C. 2002, ch. 29) (LEP), les ministres fédéraux compétents sont responsables de l'élaboration d'un programme de rétablissement pour les espèces inscrites comme étant disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et sont tenus de rendre compte des progrès réalisés cinq ans après la publication du document définitif dans le Registre public des espèces en péril.  

Le ministre des Pêches et des Océans et de la Garde côtière et le ministre responsable de l'Agence Parcs Canada sont les ministres compétents en vertu de la Loi sur les espèces en péril pour l'épaulard du large (Orcinus orca) et ont préparé ce programme, conformément à l'article 37 de la Loi sur les espèces en péril. Dans l’élaboration de ce programme de rétablissement, les ministres compétents ont tenu compte, conformément à l'article 38 de la LEP, de l’engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de conserver la diversité biologique et de respecter le principe voulant que s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance. Dans la mesure du possible, le présent programme de rétablissement a été préparé en collaboration avec Environnement Canada, Transports Canada, le ministère de la Défense nationale, la Garde côtière canadienne, Ressources naturelles Canada, la province de la Colombie-Britannique et la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) des États-Unis, au titre de l'article 39(1) de la LEP.

Comme il est indiqué dans le préambule de la LEP, la réussite du rétablissement de cette espèce dépendra de l'engagement et de la collaboration d'un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des recommandations et des mesures formulées dans le présent programme de rétablissement. Cette réussite ne pourra reposer seulement sur Pêches et Océans Canada (MPO) ou l'Agence Parcs Canada (APC) ou sur toute autre administration seule. Les coûts de la conservation des espèces en péril sont partagés entre les différentes instances. Tous les Canadiens et toutes les Canadiennes sont invités à soutenir la mise en œuvre du programme pour le bien de l’épaulard du large et de la société canadienne en général.

Le présent programme de rétablissement sera suivi d’au moins un plan d’action qui fournira de l’information sur les mesures de rétablissement que doivent prendre Pêches et Océans Canada, l'Agence Parcs Canada, d’autres administrations ou les organismes engagés dans la conservation des espèces. La mise en œuvre du présent programme de rétablissement est assujettie aux crédits, aux priorités et aux contraintes budgétaires des autorités et organisations participantes.

Remerciements

Pêches et Océans Canada tient à reconnaître les généreuses contributions des nombreuses personnes et des nombreux organismes qui ont participé à l’élaboration du présent document. L'équipe de rétablissement de l'épaulard du large (annexe C) a dirigé l'élaboration du programme et fourni des avis et des connaissances inestimables pour la rédaction de son contenu. Eva Stredulinsky a rédigé la version provisoire initiale du document.

Le présent document a également bénéficié grandement des renseignements fournis par les participants de l’atelier technique sur l’épaulard du large de 2013 (annexe C). Pêches et Océans Canada remercie également les personnes qui ont fourni d’autres éléments essentiels à l’évolution du présent document, soit : Lance Barrett-Lennard (Aquarium de Vancouver); Phil Morin (Northeast Fisheries Science Center de la National Oceanic and Atmospheric Administration [NOAA]); Stephen Raverty (Animal Health Center du ministère de l’Agriculture et des Terres de la Colombie-Britannique); Jackie King, Steve Wischniowski et Greg Workman (Direction des sciences de Pêches et Océans Canada).

Sommaire

L’écotype de la population d’épaulards du large, ou hauturiers, diffère de ses écotypes sympatriques que sont les épaulards résidents et les épaulards migrateurs sur le plan du comportement, du régime alimentaire, de la morphologie, du comportement acoustique et des caractéristiques génétiques. Les rencontres avec des épaulards du large ont été relativement peu fréquentes, et les efforts pour cataloguer les membres de cette population ont été difficiles en raison de la rareté des observations, de la grande taille de leurs groupes et de leur habitat plus pélagique.

Les épaulards du large sont des prédateurs dominants ayant une aire de répartition très vaste et une grande longévité. Ils sont considérés comme étant à risque en raison de la petite taille de la population, de leur faible potentiel de reproduction et de leur propension à accumuler des concentrations élevées de contaminants chimiques persistants, bioaccumulables et dont les dommages causés aux mammifères marins ont été démontrés (Ross et al. 2000; COSEPAC 2008). La population est présente dans les eaux canadiennes du Pacifique, ce qui représente environ le cinquième de son aire de répartition connue qui s’étend du sud de la mer de Béring au sud de la Californie. L’épaulard du large a été désigné comme espèce menacée par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) en 2008, puis il a été inscrit en tant que tel sur la liste de la Loi sur les espèces en péril en 2011.

Les épaulards du large font face à des menaces anthropiques et naturelles, à des restrictions ou à des vulnérabilités, y compris : la baisse de l’abondance des proies; l’exposition aux contaminants par l’intermédiaire des proies; les déversements de substances nocives pour l’environnement marin; les perturbations acoustiques aiguës et chroniques; les perturbations physiques; les interactions avec la pêche commerciale et l’aquaculture; la mise à mort directe; les changements climatiques; les agents pathogènes; les préférences alimentaires fixes et la diminution de la quantité de proies; la dépression consanguine; l’usure de la dentition; l’échouement massif ou le piégeage naturel. La petite taille de la population d’épaulards du large composée généralement de grands groupes fait que cette population est particulièrement vulnérable aux événements stochastiques.

Les objectifs en matière de population et de répartition définis dans le présent programme de rétablissement sont les suivants :

Compte tenu des lacunes importantes dans les connaissances sur les épaulards du large, le présent programme de rétablissement recommande d'adopter des stratégies et approches générales pour combler ces lacunes et atténuer les menaces en fonction de ce qui est connu actuellement.

En raison du manque de renseignements disponibles sur la répartition saisonnière des épaulards du large dans les eaux côtières extérieures et sur les proies qui peuvent déterminer la qualité de leur habitat (Ford et al. 2014), il n’est pas possible de déterminer leur habitat essentiel pour l’instant. La désignation de l’habitat essentiel pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition sera abordée dans un ou plusieurs plans d’action, ou une version révisée du présent programme de rétablissement.

Le ou les plans daction visant à mettre en œuvre le présent programme de rétablissement seront élaborés dans les cinq ans suivant la publication de la version définitive du programme de rétablissement dans le Registre public des espèces en péril.

Résumé du caractère réalisable du rétablissement

Des individus de l’espèce sauvage capables de se reproduire sont présents à l’heure actuelle ou le seront dans un avenir rapproché pour maintenir la population ou augmenter son abondance.

Oui Les épaulards (Orcinus orca) présentent un potentiel de reproduction naturellement faible – ce qui est une caractéristique des gros mammifères ayant une longue durée de vie – ainsi que de longs intervalles entre chaque mise bas d’une progéniture unique (Olesiuk et al 2005). Avec une abondance de la population actuelle estimée à 300 individus (Ford et al. 2014), on peut calculer que la population d’épaulards du large compte environ 130 individus matures, en mesure de se reproduire (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiéesNote de bas de page 1). On ignore s’il existe un biais lié au sexe sur le plan de la survie, de la mortalité ou de la démographie pour cette portion de la population. Toutefois, en se fondant sur d’autres populations d’épaulards de la Colombie-Britannique, on peut s’attendre à un biais naturel en faveur des femelles matures en raison de la différence de l’espérance de vie entre les sexes. Dans l’ensemble, la taille de la population des épaulards du large paraît stable, et son taux estimé de survie est élevé chaque année (Ford et al. 2014). Tous ces facteurs donnent à penser que le taux actuel de recrutement de la population d’épaulards du large est adéquat pour maintenir la population à son niveau actuel.

Une superficie suffisante d’habitat convenable est à la disposition de l’espèce, ou pourrait le devenir grâce à des activités de gestion ou de restauration de l’habitat

Oui, à l’intérieur des eaux canadiennes; mais à l’extérieur des eaux canadiennes, on l’ignore (p. ex. gestion des espèces de proies et réglementation et gestion des substances dangereuses pour l’environnement marin par d’autres pays). À l’heure actuelle, la population d’épaulards du large ne semble pas exclue de l’ensemble de son habitat type des eaux canadiennes du Pacifique. Les épaulards du large semblent vivre principalement dans les eaux du bord du plateau continental, le long de la côte de la Colombie-Britannique, bien qu’ils aient été plus souvent présents dans les eaux côtières au cours des dernières années (Ford et al. 2014).

L’aspect le plus important de l’habitat des épaulards du large est peut-être l’abondance et la disponibilité de leurs proies. Parmi les cinq espèces de proies confirmées se trouvant dans les eaux canadiennes du Pacifique, l’aiguillat commun du Pacifique Nord, le saumon quinnat et le flétan du Pacifique sont surveillés et gérés de façon active par Pêches et Océans Canada (MPO). La laimargue du Pacifique et le requin bleu sont examinés par le MPO, mais les données ne sont pas analysées aux fins de surveillance des tendances en matière de population ou de santé. Toutefois, le Canada est l’un des pays signataires du Plan d’action international pour la conservation et la gestion des requins de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO 1999) et possède son propre Plan d’action national pour la conservation et la gestion des requins (MPO 2007a).

En théorie, grâce à la gestion et à la conservation minutieuses de ces espèces de proies et d’autres espèces de proies potentielles restant à découvrir, à l’intérieur et à l’extérieur des eaux canadiennes, la dégradation de l’habitat des épaulards du large peut être atténuée. Une superficie suffisante d’habitat convenable devrait continuer d’être à la disposition de la population d’épaulards du large, sauf en cas d’obstacle physique ou non physique (p. ex. acoustique) ou d’élément ayant un effet dissuasif sur leur utilisation des eaux côtières et du bord du plateau, ou de déclin nuisible de l’abondance et de la disponibilité de leurs proies à l’intérieur et à l’extérieur des eaux canadiennes.

Les principales menaces pesant sur l’espèce ou son habitat (y compris à l’extérieur du Canada) peuvent être évitées ou atténuées

Oui, pour les menaces à l’intérieur des eaux canadiennes; mais pour les menaces à l’extérieur des eaux canadiennes, on l’ignore (p. ex. les sources étrangères de contaminants; la pêche du voilier en Californie et l’interaction avec l’industrie et le transport hauturiers). Les concentrations élevées de contaminants, les perturbations acoustiques et physiques et les éventuels déversements d’hydrocarbures figurent parmi les menaces qui pèsent sur la population d’épaulards du large et son habitat, comme le mentionne le COSEPAC (2008). Grâce à une réglementation et à une gestion appropriées des substances nocives pour le milieu marin et du transport de ces apports anthropiques dans le milieu marin, y compris les mesures de sécurité et d’intervention rapide et rigoureuse en cas de déversement, les effets néfastes des contaminants et des déversements de pétrole sur la population d’épaulards du large et leurs proies peuvent être atténués dans les eaux canadiennes. Avec l'application de la Loi sur les pêches et de ses règlements connexes, la mise en œuvre des pratiques exemplaires (p. ex. MPO 2007b pour les ondes sismiques; MDN 2008 pour l'utilisation de sonars) ainsi que les lignes directrices supplémentaires en matière d'intendance actuellement en place, les bruits aigus et la perturbation causée par les bateaux peuvent être atténués. À l’heure actuelle, on ignore si la perturbation liée au bruit chronique pourrait être atténuée dans toute l’aire de répartition de la population d’épaulards du large et il n’existe pas de mesures d’atténuation des bruits chroniques en vigueur dans les eaux canadiennes du Pacifique. Bien que les épaulards du large ne soient pas visés par la Endangered Species Act des États-Unis d’Amérique, ils sont protégés par le règlement fédéral américain sur les mammifères marins et par des mesures connexes d’atténuation des menaces comparables à la protection offerte par le Règlement sur les mammifères marins du Canada.

Grâce à toutes ces méthodes, ainsi qu’à la gestion de l’industrie visant à éviter la compétition pour les proies avec la pêche, les principales menaces qui pèsent sur la population d’épaulards du large peuvent être évitées ou atténuées. Compte tenu de l’aire de répartition très vaste des épaulards du large, la compétence pour éviter ou atténuer les menaces à l’extérieur des eaux canadiennes est limitée, et la capacité de comprendre les impacts de ces menaces représente un défi. La surveillance se fait probablement à un niveau acceptable dans toute leur aire de répartition, bien que certaines menaces sont mieux surveillées que d’autres et que les mesures d’atténuation sont variables. Étant donné que tout autre fait que la mortalité naturelle pourrait compromettre le rétablissement de la population d’épaulards du large (c.-à-d. le prélèvement biologique potentiel calculé est de moins d’un individu) (Ford et al 2014), il est impératif d’effectuer une surveillance continue et d’appliquer des mesures améliorées d’atténuation des menaces dans son aire de répartition.

Il existe des techniques de rétablissement qui permettent d’atteindre les objectifs de population ou de répartition, ou il est possible d’en élaborer dans un délai raisonnable

On l’ignore. Les techniques de rétablissement visant à promouvoir activement la croissance des populations d’épaulards n’existent pas, mais les obstacles à leur rétablissement peuvent être réduits à l’aide de mesures d’atténuation des menaces. Bien que les menaces qui pèsent sur les proies, l’habitat et les individus de la population d’épaulards du large puissent théoriquement être atténuées, l’efficacité pratique de ces mesures n’a pas encore été établie clairement. Cependant, les mesures de recherche, les programmes d’intendance et la réglementation en matière de gestion permettent d’encourager et de surveiller le rétablissement de cette population.

1 Information sur l'évaluation de l'espèce par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada

Date de l’évaluation : Novembre 2008

Nom commun (population) : Épaulard (population océanique)

Nom scientifique : Orcinus orca

Statut selon le COSEPAC : Espèce menacée

Justification de la désignation : Cette population compte un très faible nombre d’individus matures (~120). Elle est sujette aux menaces posées par les concentrations élevées de contaminants, les perturbations acoustiques et physiques et les éventuels déversements d’hydrocarbures. Toutefois, la population fait l’objet d’un suivi et semble stable.

Présence au Canada : Océan Pacifique

Historique de la situation selon le COSEPAC : Une seule désignation « menacée » a été accordée aux populations résidentes du Pacifique Nord en avril 1999. Divisées en trois populations en novembre 2001. La population océanique a été désignée « préoccupante » en novembre 2001. Réexamen du statut : l’espèce a été désignée « menacée » en novembre 2008. Dernière évaluation fondée sur une mise à jour d’un rapport de situation.

2 Information sur l'état de l'espèce

En tant qu’espèce, les épaulards sont cosmopolites, largement répandus dans les océans du monde et courants dans de nombreuses régions côtières, en particulier dans les latitudes élevées (Leatherwood et Dahlheim 1978). L’espèce est composée de populations régionales distinctes, isolées les unes des autres sur le plan génétique et social et présentant souvent différentes spécialisations écologiques (Bigg et al. 1990; Hoelzel et al. 1998; Barrett-Lennard et Ellis 2001). Certaines de ces populations pourraient être désignées comme des espèces ou des sous-espèces distinctes et comme présentant un risque plus élevé (Reeves et al. 2004; Morin et al. 2010; Taylor et al. 2013). En raison de cette incertitude taxonomique, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) considère que l’espèce Orcinus orca se situe dans la catégorie « Données insuffisantes » (Taylor et al. 2013).

La population d’épaulards du large du nord-est du Pacifique a été observée à plusieurs reprises dans les eaux au large de l’Alaska, de la Colombie-Britannique, de l’État de Washington et de la Californie, les eaux canadiennes du Pacifique représentant environ le cinquième de son aire de répartition connue. Depuis 2013, un peu plus de 70 % des 240 observations et détections acoustiques passives documentées ont eu lieu dans les eaux de la Colombie-Britannique. La population d’épaulards du large a été initialement évaluée par le COSEPAC en 2001, puis inscrite sur la liste des espèces préoccupantes au Canada en 2004 en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP), lorsqu’elle est entrée en vigueur. À la suite de cette première inscription sur la liste de la LEP, le Plan de gestion de l’épaulard du large (Orcinus orca) au Canada (MPO 2009a), qui décrit les menaces, ainsi que les buts, les objectifs et les mesures de gestion pour la conservation des épaulards du large (« population océanique »), a été élaboré et publié. En novembre 2008, la population a été de nouveau désignée par le COSEPAC comme étant menacée, puis inscrite en vertu de la LEP comme espèce menacée en 2011. En 2011, la cote S2 (en péril) a été attribuée à l’espèce en fonction de sa priorité de conservation à l’échelle d’une province, ce qui l’a placée sur la liste rouge de la Colombie-Britannique. À l’heure actuelle, elle n’est pas visée par l’Endangered Species Act des États-Unis d'Amérique.

3 Information sur l'espèce

Les renseignements sur l’espèce énoncés ci-dessous complètent le contenu de l’évaluation du COSEPAC (COSEPAC 2008) et du plan de gestion (MPO 2009a) susmentionnés. Pourplus d’information, le lecteur est invité à consulter ces documents.

3.1 Description de l’espèce

Les épaulards constituent le plus grand membre de la famille des dauphins (delphinidés)et, avec leur grande nageoire dorsale et leur robe blanche et noire au dessin caractéristique, l’une des espèces marines les plus largement reconnues. À maturité, les mâles sont plus grands et plus lourds que les femelles, leur nageoire dorsale plus droite, leurs nageoires pectorales et la pointe de leur queue plus grandes. Pour un néophyte, il est difficile de faire la distinction entre les trois « écotypes » sympatriques d’épaulards présents dans les eaux canadiennes du Pacifique : les épaulards résidents, les épaulards migrateurs (aussi appelés épaulards de Bigg) et les épaulards du large (aussi appelés épaulards hauturiers). Les épaulards du large tendent à être de plus petite taille, et leur nageoire dorsale présente plus d’entailles et d’encoches que celle des deux autres écotypes (Ford et al. 2000; Dahlheim et al. 2008). Ils sont socialement, acoustiquement et génétiquement distincts des épaulards résidents et migrateurs (Bigg et al. 1990; Ford 1991; Morin et al. 2010). La composition du régime alimentaire des épaulards du large n’est pas complètement connue à l’heure actuelle, mais elle diffère aussi de celle des épaulards résidents et migrateurs, qui sont respectivement des spécialistes des poissons et des mammifères. On pense que l’espèce se nourrit de poissons, et en particulier de requins (Dahlheim et al. 2008; Ford J., et al. 2011; Ford et al. 2014). Les épaulards du large ont une structure sociale matrilinéaire semblable à celle des épaulards résidents et migrateurs, mais ils présentent un degré élevé de grégarisme qui se manifeste par une grande sociabilité entre tous les membres de la population (Ford et al. 2014). Le plus souvent, ils vivent en grands groupes comptant de 50 à plus de 100 individus.

3.2 Population et répartition

Les épaulards du large sont considérés comme étant le type d’épaulards ayant la plus vaste aire de répartition dans le nord-est de l’océan Pacifique (Dahlheim et al. 2008; Ford et al. 2014). Les individus repérés en Colombie-Britannique ont également été observés de la mer de Béring au sud de la Californie (figure 1). Les données sur la génétique et les échouements indiquent que l’aire de répartition de la population s’étend probablement jusqu’aux eaux mexicaines également (Guerrero-Ruiz et al. 2006; Morin et al. 2006; Morin et al. 2010). L’étendue réelle de leur aire de répartition par rapport à la côte est actuellement inconnue, mais il semble qu’elle aille au moins des eaux côtières au bord du plateau continental. La population est connue sous le nom d’« épaulards du large » en raison de l’emplacement de son aire de répartition par rapport aux eaux côtières. Contrairement aux épaulards résidents et migrateurs, les épaulards du large sont rarement présents dans les eaux côtières; on considère donc qu’ils passent la majeure partie de leur temps dans les eaux plus pélagiques ou sur le bord du plateau continental (Ford et al. 2014). 2014).

Carte. Voir description ci-dessous.
Figure 1. Répartition des rencontres avec les épaulards du large (points rouges) entre 1988 et 2012, et nombre total de jours où les épaulards du large ont été détectés par voie acoustique sur des sites de surveillance fixes (carrés entourés de cercles) entre 2006 et 2012. Rencontres (n=157) et détections (n=83) telles qu’elles ont été documentées par le Programme de recherche sur les cétacés de Pêches et Océans Canada et les collaborateurs américains. La zone économique exclusive du Canada est présentée en gris. Les différentes profondeurs de l’eau sont représentées par des teintes de bleu, tandis que le plateau continental et les monts sous-marins sont plus clairs (tiré de Ford et al. 2014).
Description longue
La Figure 1 est une carte de l'océan Pacifique Nord-Est et de la côte Ouest de l'Amérique du Nord, qui montre la répartition des rencontres photographiées et des détections acoustiques d'épaulards du large entre 1998 et 2002. Les rencontres photographiées ont surtout eu lieu près des côtes, entre les îles Aléoutiennes au nord et les eaux proches de la frontière entre la Californie et le Mexique au sud. Ces rencontres sont en majorité regroupées le long de la côte de la Colombie-Britannique et du sud-est de l'Alaska, mais on constate des « trous » importants entre le golfe du Prince William et le sud-est de l'Alaska, ainsi qu'entre le nord-ouest de l'État de Washington et la côte centrale de la Californie. Les détections acoustiques sont les plus fréquentes près du détroit de la Reine-Charlotte et au nord de Haida Gwaii.

En date de 2014, les épaulards du large ont été photographiés et ont fait l'objet de documentations acoustiques à 172 reprises dans les eaux canadiennes du Pacifique et à environ 240 reprises dans toute leur aire de répartition connue (Ford et al. 2014). Les épaulards du large ayant été observés pour la première fois dans les eaux canadiennes en 1988, soit près de 15 ans après le début de l’étude sur les épaulards en Colombie-Britannique, l’apparition de cet écotype dans les eaux côtières de la Colombie-Britannique semble être un phénomène relativement récent (Ford et al. 1992; Heise et al. 1993). En particulier, leur première visite dans les eaux situées à l’intérieur de l’île de Vancouver a été observée en 1992 (Ford et al. 2014). Même si l’on pense que leur présence apparemment récente dans les eaux côtières peut refléter un changement associé aux conditions océanographiques ou à la répartition des proies, les données sont également confondues avec les efforts de relevé et l’intérêt public qui augmentent progressivement.

Les épaulards du large sont rarement observés, mais lorsqu’ils le sont, ils se trouvent généralement dans de grands groupes répartis dans de vastes zones, souvent dans des mers ouvertes et des conditions défavorables. Ces défis logistiques signifient que, contrairement à d’autres populations d’épaulards des eaux canadiennes du Pacifique, la taille de la population ne peut être dénombrée par des méthodes traditionnelles, comme le comptage annuel, aux fins de surveillance de l’abondance et de la démographie. Au lieu de cela, la taille de la population des épaulards du large doit être estimée à l’aide de techniques de marquage-recapture photographiques. En 2013, l’abondance de la population des épaulards du large a été estimée à environ 300 animaux (fourchette de 257 à 373); la tendance de la population semble stable, avec apparemment un taux de survie élevé et un taux de mortalité relativement faible (Ford et al. 2014).

3.3 Besoins de l’épaulard du large

Le COSEPAC a déterminé que la petite taille des cohortes d’épaulards du large ayant atteint la maturité reproductive constituait l’un des principaux facteurs nuisant à la survie et au rétablissement de la population. Les menaces posées par les concentrations élevées de contaminants, les perturbations acoustiques et physiques et les éventuels déversements d’hydrocarbure ont également été traitées comme des préoccupations relatives au bien-être de la population. Certains de ces facteurs sont décrits en détail ici, tandis que d’autres sont présentés dans la section 4.2 du présent programme de rétablissement.

3.3.1 Besoins alimentaires

Bien que de nombreuses incertitudes subsistent au sujet de l’alimentation des épaulards du large, ils semblent consommer principalement des poissons. De toutes les observations dans la nature, les études portant sur le comportement acoustique, la dentition et la toxicologie, les échantillonnages de l’estomac lors des autopsies, ainsi que les analyses génétiques des proies, il ressort nettement que cette espèce a un régime alimentaire à base de poisson, avec une spécialisation pour les poissons à grande longévité comme les requins (Herman et al. 2005; Krahn et al. 2007; Dahlheim et al. 2008; Ford J., et al. 2011; Ford et al. 2014). En Colombie-Britannique, on sait que les épaulards du large chassent la laimargue du Pacifique (Somniosus pacificus), le requin bleu (Prionace glauca), l’aiguillat commun du Pacifique Nord (Squalus suckleyi), le saumon quinnat (Oncorhynchus tshawytscha) et le flétan du Pacifique (Hippoglossus stenolepis) (Ford J. et al. 2011; Ford et al. 2014). La composition exacte du régime alimentaire des épaulards du large est inconnue à l’heure actuelle, mais il est évident que les requins en représentent une grande partie. Ces espèces constituent de précieuses sources de lipides riches en calories qui sont un élément important des régimes alimentaires de nombreuses populations d’épaulards.

Les épaulards ont des besoins métaboliques élevés, non seulement en raison des conséquences physiologiques de leur taille, mais également en raison de leurs vastes déplacements (Williams et al. 2004). Il a été estimé qu’un épaulard résident mâle adulte type – une espèce consommatrice de poissons, comme l’épaulard du large – peut avoir besoin d’environ 254 000 kilocaloriesNote de bas de page 2 chaque jour, soit environ 23 saumons quinnat (Ford et al. 2010). Cette exigence énergétique équivaut à peu près à la consommation de trois foies de laimargue du Pacifique, ce qui semble être une importante source de nourriture pour les épaulards du large (Ford J. et al. 2011).

Les épaulards du large ont besoin d’une abondance stable d’espèces de proies disponibles et de qualité adéquate (p. ex. à partir d’un environnement à faible teneur en contaminants), afin de répondre aux besoins alimentaires de la population. La baisse de l’abondance des proies pourrait se traduire par une réduction des taux de survie et de productivité de la population.

3.3.2 Besoins acoustiques

L’acoustique constitue une grande composante du milieu physique des épaulards, qui agit comme un important mécanisme sur le plan culturel, social et de la quête de nourriture. Fondamentalement, l’environnement acoustique des épaulards est important pour la navigation et la recherche de nourriture. Grâce à l’utilisation de l’écholocalisation (également connue sous le nom de biosonar) et de l’écoute passive, les épaulards détectent et chassent leurs proies. Ils peuvent utiliser ces capacités pour cartographier leur environnement physique immédiat (Bain et Dahlheim 1994; Bain 1995; Barrett-Lennard et al. 1996). Les épaulards du large semblent avoir des clics d’écholocalisation de fréquence légèrement plus basse que ceux des épaulards résidents sympatriques (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées). À l’heure actuelle, on ne sait pas à quoi est due cette différence; les hypothèses sont qu’il s’agit du résultat de la présence habituelle de l’épaulard du large dans les eaux plus profondes que celles où vit l’épaulard résident, ou du résultat des préférences différentes en matière de proies (Ford, comm. pers. 2013).

La communication au sein d’une population d’épaulards représente une question acoustique plus complexe, essentielle à la structure sociale, à la survie et à la productivité de chaque population. Les trois écotypes d’épaulards qui se trouvent en Colombie-Britannique ont chacun des répertoires de cris distincts (Ford et Fisher 1982; Bigg et al. 1990; Ford 1991; Ford et Ellis 2014). Les épaulards du large semblent avoir un grand répertoire acoustique et vocalisent beaucoup, selon les observations effectuées. Leur comportement acoustique est comparable à celui des épaulards résidents (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées). Chez les épaulards résidents, la transmission culturelle de cris propres au groupe de génération en génération conduit à un système de dialectes qui reflètent la filiation génétique. Ces dialectes semblent constituer un mécanisme d’évitement de la consanguinité (Barrett-Lennard 2000; Barrett-Lennard et Ellis 2001). Les analyses préliminaires semblent indiquer qu’il se peut que les épaulards du large aient un certain degré de cris propres au groupe qui pourrait éventuellement avoir la même fonction (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées).

À tout le moins, les épaulards du large ont besoin d’un milieu marin leur permettant de transmettre et de recevoir suffisamment de sons pour communiquer, exploiter les ressources en proies et se reproduire efficacement.

3.3.3 Taille de la population et diversité génétique

On pense qu’en raison de leur potentiel de reproduction naturellement faible et de la faiblesse générale de leur diversité génétique, les épaulards ont tendance à avoir de petites populations isolées les unes des autres sur le plan social et reproductif, même entre espèces sympatriques (Barrett-Lennard 2000). En théorie, cette caractéristique n’est pas un obstacle au rétablissement, à condition que la population présente une diversité génétique adéquate et un nombre suffisant d’individus en âge de se reproduire. On estime que la population d’épaulards du large compte environ 130 individus en âge de se reproduire (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées; voir la note 1 au bas de la page V). Des analyses génétiques préliminaires donnent à penser que la population est diversifiée sur le plan génétique, tout comme les populations d’épaulards résidents du nord et du sud combinées (Morin et al. 2010). Les épaulards du large semblent avoir une diversité génétique relativement élevée, ce qui pourrait refléter une taille de population autrefois plus grande ou un flux génétique antérieur avec les populations adjacentes (Morin, comm. pers. 2014). Cela peut également signifier que la consanguinité n’est pas une préoccupation importante au sein de cette population dans la mesure où le nombre d’individus matures en âge de se reproduire est suffisant.

La continuité de la petite population d’épaulards du large nécessite que la portion de la population en âge de se reproduire subisse un faible taux de mortalité et qu’elle présente un taux élevé de recrutement pour les générations futures. Le maintien de la diversité génétique est impératif, dans la mesure du possible, afin d’éviter que des goulots d’étranglement génétiques entravent le rétablissement de la population.

3.3.4 Aire de répartition continue

Comme il a été mentionné précédemment, les épaulards du large des eaux de la Colombie-Britannique sont les épaulards dont l’aire de répartition est la plus vaste. D’après les nombreuses identifications d’individus à l’aide de photographies et les preuves génétiques des épaulards du large couvrant les eaux de trois pays, cette population semble être très mobile, passant la majeure partie de son temps dans les eaux libres, au large des côtes. Cette tendance à se déplacer dans les eaux libres peut rendre les épaulards du large vulnérables au piégeage naturel et à l’échouement massif lorsqu’ils se déplacent plus près de la côte ou dans des eaux confinées et inhabituelles. L’augmentation de leurs visites dans les eaux côtières, constatée au cours des récentes années, pourrait accroître l’exposition de la population à une activité humaine de plus en plus concentrée, ainsi qu’aux perturbations et risques connexes. Lorsqu’ils sont présents dans les eaux côtières, les épaulards du large y restent souvent pendant de longues périodes et gravitent à l’embouchure des bras de mer (Ford et al. 2014). On ne sait pas si cela est dû à une désorientation ou à une confusion, ou s’il s’agit d’actions déterminées, telles que l’exploitation d’accumulations de proies. Tout obstacle à leur passage dans ces types de voies navigables, quelle qu’en soit la nature, pourrait leur nuire.

Les épaulards du large ont besoin, à tout le moins, de pouvoir utiliser les eaux du plateau continental sans obstacle ni élément dissuasif et d’avoir accès aux eaux côtières protégées ainsi qu’aux eaux sous compétence étrangère.

4 Menaces

4.1 Évaluation des menaces

Tableau 1. Tableau de l’évaluation des menaces
Catégorie Menace Niveau de préoccupationa Étendueb Occurrencec Fréquenced Gravitée Certitude causalef
Menaces anthropiques : Disponibilité des proies Baisse de l’abondance des proies Élevé Généralisée Inconnue Inconnue Élevée Élevée
Menaces anthropiques : Contaminants de l'environnement Exposition aux contaminants par l’intermédiaire des proies Élevé Généralisée Historique, actuelle et prévue (selon le contaminant) Continue Élevée Moyenne
Menaces anthropiques : Contaminants de l'environnement Déversements de substances nocives pour l’environnement marin Élevé Localisée Historique, actuelle, imminente et prévue Récurrente Élevée Élevée
Menaces anthropiques : Perturbations acoustiques Perturbations acoustiques (aiguës) Élevée Localisée Historique, actuelle, imminente et prévue Récurrente Élevée Moyenne
Menaces anthropiques : Perturbations acoustiques Perturbations acoustiques (chroniques) Moyen Généralisée (haute intensité localisée, p. ex. dans le détroit de Juan de Fuca) Actuelle, imminente et prévue Continue Élevée Faible
Menaces anthropiques : Perturbations physiques Perturbations physiques Moyen Localisée Actuelle, imminente et prévue Récurrente Faible Faible
Menaces anthropiques : Perturbations physiques Interactions avec la pêche commerciale et l’aquaculture Faible Localisée Inconnue Inconnue Inconnue (mais potentiellement élevée) Faible
Menaces anthropiques : Perturbations physiques Mise à mort directe Faible Localisée Historique et inconnue à l’avenir Inconnue Élevée Faible
Menaces anthropiques : Changement climatique Conditions océanographiques changeantes Incertain Généralisée Prévue Inconnue Inconnue Faible
Menaces anthropiques : Changement climatique Changements dans la propagation acoustique Incertain Généralisée Prévue Inconnue Inconnue Moyenne
Menaces anthropiques : Changement climatique Changement de la répartition des proies Incertain Généralisée Prévue Inconnue Inconnue Moyenne
Restrictions et vulnérabilités naturellesg Agents pathogènes Incertain Généralisée Inconnue Inconnue Élevée Élevée
Restrictions et vulnérabilités naturelles Préférences alimentaires fixes qui font diminuer la quantité de proies naturelles S.O.h Généralisée Inconnue Inconnue Élevée Moyenne
Restrictions et vulnérabilités naturelles Dépression consanguine S.O. Généralisée Inconnue Inconnue Élevée Moyenne
Restrictions et vulnérabilités naturelles Usure de la dentition S.O. Généralisée Inconnue Continue Inconnue (mais potentiellement élevée) Faible
Restrictions et vulnérabilités naturellesi Échouement massif ou piégeage naturel S.O. Localisée Historique et inconnue à l’avenir Récurrente Élevée Élevée

a Le « niveau de préoccupation » signifie que la gestion de la menace présente un niveau de préoccupation élevé, moyen ou faible pour le rétablissement des espèces, conformément aux objectifs relatifs à la population et à la répartition. Ce critère tient compte de l’évaluation de toute l’information contenue dans le tableau.

b L’« étendue » déterminée pour chaque menace, restriction ou vulnérabilité est prise en compte dans l’aire de répartition de l’espèce.

c « Historique » signifie que la menace a ou peut avoir touché la population par le passé, mais n’a pas nécessairement contribué à son déclin; « Imminente » signifie que l’on s’attend à ce que la menace touche très prochainement l’espèce, tandis que « Prévue » signifie que la menace pourrait toucher la population à l’avenir.

d Récurrente : signifie que la menace réapparaît de temps à autre, mais pas de façon annuelle ou saisonnière.

e Gravité : représente les effets du côté de la population (élevée : effets très importants; moyenne; faible; inconnue).

f Certitude causale : représente les preuves connues à l’égard de la menace (élevée : les preuves disponibles établissent un lien solide entre la menace et le risque à l’égard de la viabilité de la population; moyenne : il existe un lien entre la menace et la viabilité de la population, p. ex., l’opinion des spécialistes; faible : la menace est supposée ou possible).

g Les restrictions et vulnérabilités naturelles présentées dans le présent document sont celles qui sont exacerbées par les activités anthropiques qui, si elles ont lieu, auront un effet à l’échelle des populations.

h « S.O. » dans cette colonne signifie que le niveau de préoccupation ne s’applique pas, étant donné que la gestion de ces vulnérabilités particulière n’est pas faisable (c.-à-d. qu’il s’agit de processus naturels sur lesquels les humains ne peuvent pas avoir d’influence directe).

i Les restrictions et vulnérabilités naturelles présentées dans le présent document sont celles qui sont exacerbées par les activités anthropiques qui, si elles ont lieu, auront un effet à l’échelle des populations.

4.2 Description des menaces

En raison de la petite taille de la population et des grands regroupements d’épaulards du large, au moins le tiers de l’ensemble de la population connue peut être présent à un moment et à un emplacement donnés (Ford et al. 2014). Ce comportement de regroupement rend cette population particulièrement vulnérable aux événements stochastiques, comme les déversements de pétrole, les bruits aigus et les maladies infectieuses, qui peuvent causer des effets à l’échelle de la population. Une telle perturbation risque de réduire considérablement la taille de la population ou d’en modifier la composition démographique si un groupe important d’individus en âge de se reproduire est perdu. Bien que le comportement de regroupement puisse réduire la probabilité que les épaulards du large subissent des événements stochastiques, il accroît également considérablement la probabilité de conséquences à l’échelle de la population si un grand groupe de la population est touché par un événement stochastique. Comme il existe peu de recherches portant sur bon nombre des menaces évoquées ci-dessous pour les épaulards du large, dans de nombreux cas, le poids des données probantes tirées de recherches effectuées sur d’autres espèces de cétacés est utilisé.

4.2.1 Menaces anthropiques

Disponibilité des proies
Baisse de l’abondance des proies

En tant que prédateurs dominants, les épaulards sont limités par les forces « ascendantes », c’est-à-dire qu’ils sont finalement contraints par la disponibilité de leurs proies favorites, ce qui rend la réduction de la disponibilité des proies et les changements de la composition du régime alimentaire préoccupants, comme cela a été clairement démontré pour la population d’épaulards résidents sympatriques. Parmi les cinq espèces de proies des épaulards du large confirmées dans les eaux canadiennes du Pacifique, l’aiguillat commun du Pacifique Nord, le saumon quinnat et le flétan du Pacifique font l’objet de pêches gérées activement dans ces eaux. Cette compétition directe de la pêche peut potentiellement réduire l’abondance des proies disponibles pour la population d’épaulards du large.

Parmi les trois espèces de requins connues pour être consommées par les épaulards du large dans les eaux canadiennes, seul l’aiguillat commun est surveillé et géré uniquement par le MPO. Cette espèce est considérée comme étant relativement abondante dans les eaux canadiennes du Pacifique; toutefois, elle a été désignée comme espèce préoccupante par le COSEPAC (COSEPAC 2011). Les dernières évaluations des deux stocks d’aiguillat commun reconnus dans les eaux canadiennes du Pacifique montrent que l’abondance relative de ces stocks est stable (King et McFarlane 2009; Wallace et al. 2009; MPO 2010). Plus particulièrement, le « stock extérieur » (eaux du plateau continental sauf le détroit de Georgie) qui est susceptible d’être consommé par des épaulards du large est sain, et la pression de la pêche est jugée faible relativement à la taille estimée de la population (Wallace et al. 2009).

Le saumon quinnat fait l’objet d’une pêche gérée conjointement par le Canada et les États-Unis. L’abondance actuelle du saumon quinnat dans le nord-est de l’océan Pacifique est nettement inférieure aux niveaux historiques, et des changements ont été observés dans de nombreuses populations, avec des adultes plus jeunes et de plus petite taille (Myers 2011). De 1979 à 2012, les tendances de l’abondance totale de saumon quinnat le long de la côte ouest, de la Colombie-Britannique à la Californie, ont démontré une diminution globale d’environ 16 % (Kope et Parken 2011). À l’heure actuelle, neuf unités évolutionnaires significatives des États de Washington, de l’Oregon et de la Californie sont considérées comme des espèces menacées ou préoccupantes en vertu de la Endangered Species Act des États-Unis (Ford et al. 2011a; Williams, M., T., et al. 2011). En Colombie-Britannique, la population de l’Okanagan a été désignée par le COSEPAC (2006b) comme une espèce menacée, mais elle n’a finalement pas été inscrite en vertu de la LEP.

La troisième pêche active interagissant avec les intérêts des épaulards du large pour les proies concerne le flétan du Pacifique, qui est réglementé et géré par la Commission internationale du flétan du Pacifique. Le flétan du Pacifique présente un retard de maturité, mais une fécondité élevée, ce qui fait qu’il est modérément résilient face à la pression exercée par la pêche (Schmitt et Skud 1978). Les évaluations des stocks des dix dernières années donnent à penser que la population a continuellement été en déclin en raison de la baisse de la taille selon l’âge et du faible taux de recrutement, avec une biomasse exploitable dont le déclin a été estimé à environ 50 % dans les années 2000 (Hare 2010). Grâce aux limites de prises établies en réponse à ce déclin, les plus récentes évaluations et projections indiquent que le déclin de la population a ralenti et que la trajectoire du stock est relativement stable actuellement (Stewart et al. 2013). Cette espèce n’a pas été évaluée par le COSEPAC, l’IUCN, ou en vertu de la Endangered Species Act des États-Unis.

La plus grande incertitude concernant les autres espèces connues de proies des épaulards du large réside peut-être dans le manque de connaissances relatif à leur abondance historique et actuelle et dans l’absence d’évaluations. Ni la laimargue du Pacifique ni le requin bleu ne sont visés par des pêches dirigées dans les eaux canadiennes du Pacifique, mais les prises accessoires de ces espèces par la pêche au chalut ou à la palangre sont surveillées par le MPO. La laimargue du Pacifique est une espèce relativement courante dans le Pacifique Nord, mais aucune estimation de la biomasse ou des tendances n’existe pour les eaux canadiennes du Pacifique, et l’espèce demeure non évaluée par le COSEPAC (Ebert et al. 2009). Il n’y a pas non plus d’estimations de la biomasse ou des tendances dans les eaux canadiennes du Pacifique pour le requin bleu, bien que les récentes évaluations américaines suggèrent que les niveaux actuels de la population du Pacifique Nord sont comparables à ceux d’il y a 40 ans et que l’espèce est bien moins pêchée que son rendement maximal soutenu (Kleiber et al. 2009). Le requin bleu est considéré comme étant « régulièrement présent » dans les eaux canadiennes du Pacifique, avec un faible taux de prélèvement par prises accessoires, et les données le concernant sont considérées comme insuffisantes par le COSEPAC (2006a). Bien que ces deux espèces ne soient pas activement gérées, le Canada est l’un des pays signataires du Plan d’action international pour la conservation et la gestion des requins de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (1994), mis en œuvre par l’intermédiaire du Plan d’action national pour la conservation et la gestion des requins (MPO 2007a).

En raison des lacunes en matière de connaissances et d’évaluations des populations fondamentales d’espèces de proies clés des épaulards du large, les changements dans l’abondance et la disponibilité des proies pourraient passer inaperçus, ce qui pourrait nuire à la population d’épaulards du large si ces changements sont nocifs. Toutefois, il n’y a pas de données indiquant que l’abondance des trois espèces de requins prédominantes dans le régime alimentaire des épaulards du large ait baissé au cours des dernières années ou qu’elle soit susceptible de baisser dans un avenir prévisible.

Cela dit, la composition complète du régime alimentaire des épaulards du large est actuellement inconnue. Il y a une forte possibilité que d’autres proies importantes pour les épaulards du large ne soient pas encore connues et que des variations de la disponibilité de ces importantes proies supplémentaires puissent avoir d’importantes répercussions sur la population d’épaulards du large. Compte tenu de l’apparente préférence des épaulards du large pour les grands requins comme proies, les requins-pèlerins (Cetorhinus maximus) ont peut-être constitué par le passé une proie importante; le déclin marqué des requins-pèlerins dans les eaux canadiennes du Pacifique (MPO 2009b) pourrait avoir eu une incidence sur la population d’épaulards du large.

Contaminants de l'environnement
Exposition aux contaminants par l’intermédiaire des proies

La population d’épaulards du large est touchée par la qualité de ses proies. En raison de la longue espérance de vie et du niveau trophique élevé de la plupart de leurs proies, les épaulards du large sont probablement exposés à de grandes concentrations de contaminants bioaccumulés. Ces contaminants peuvent prendre la forme de substances bioaccumulables persistantes, de métaux lourds ou de polluants biologiques, anciens ou nouveaux. La consommation de proies contenant des substances nocives soulève des préoccupations relatives aux répercussions néfastes sur la santé des épaulards du large.

a. Anciens et nouveaux contaminants

Les contaminants existants sont ceux qui sont en grande partie abandonnés et souvent interdits sur le marché, mais qui demeurent présents dans l’environnement (p. ex. insecticide dichlorodiphényltrichloroéthane [DDT]; biphényles polychlorés [BPC]). Les contaminants émergents sont les substances nocives ayant des propriétés semblables à celles des contaminants existants, mais qui sont toujours utilisées et qui ne sont ni réglementées ni retirées du marché (p. ex. ppolybromodiphényléthers [PBDE]). Ces contaminants, considérés comme des toxines bioaccumulables persistantes (TBP) ou des polluants organiques persistants (POP), sont persistants, toxiques et bioaccumulables. Ils rendent les organismes de haut niveau trophique à longue espérance de vie, comme les épaulards, particulièrement vulnérables à une importante contamination et aux risques liés à la santé (Grant et Ross 2002). Ayant une fonction de perturbation endocrinienne et agissant comme « imitateurs endocriniens », il a été démontré que ces contaminants ont des effets néfastes, chroniques et à action lente, sur la croissance, le développement et la fonction immunitaire des individus, entraînant ainsi une diminution de la capacité de reproduction, et une augmentation de l’incidence des maladies, des anomalies squelettiques et des troubles neurologiques (Reijnders 1986, 1994; Ross et al. 2000; Darnerud 2003; Hall et al. 2003; Mos et al. 2006; Ross 2006; Tabuchi et al. 2006).

Il a été démontré que les épaulards du large présentent des concentrations élevées de contaminants anciens et nouveaux. Bien que les épaulards du large soient connus pour avoir un régime alimentaire à base de poissons, les concentrations de BPC des épaulards du large sont plus comparables à celles des épaulards migrateurs qui se nourrissent de mammifères qu’à celles des épaulards résidents qui se nourrissent de poissons (Herman et al. 2005; Krahn et al. 2007). Cela est probablement attribuable au régime alimentaire distinct des épaulards du large, spécialisé dans les poissons vivant plus longtemps, comme les requins, qui ont des concentrations plus élevées de substances bioaccumulables. Les épaulards du large présentent également des concentrations nettement plus élevées de DDT et d’EDP par rapport aux épaulards résidents et migrateurs (Herman et al. 2005; Krahn et al. 2007). Un rapport BPC/DDT élevé a été constaté dans les épaulards du large, ce qui est caractéristique des eaux et des sédiments au large de la côte californienne, où le DDT comprend une partie plus importante de contaminants et où les proies peuvent être exposées à des concentrations élevées de contaminants par rapport aux eaux des latitudes plus élevées (Brown et al. 1998); ce rapport caractéristique partagé est considéré comme une indication que les épaulards du large sont souvent présents au large de la Californie (Herman et al. 2005; Krahn et al. 2007). Ces substances persistantes proviennent de nombreuses sources, souvent de ruissellements urbains et agricoles le long de la côte ouest de l’Amérique du Nord. Les eaux de ruissellement provenant de zones urbaines sont particulièrement inquiétantes en Californie (Krahn et al. 2007), où les populations sont régulièrement observées en hiver, souvent près des grands centres urbains (p. ex. San Francisco, Monterey Bay, Santa Barbara, Los Angeles).

b. Métaux lourds

Il n’existe actuellement aucune information sur les concentrations de métaux lourds, comme le plomb, le mercure et le cadmium, chez les épaulards qui occupent le nord-est de l’océan Pacifique. Très peu d’information existe sur les niveaux de métaux lourds présents dans les cétacés en général (Endo et al. 2003) et, même s’il y a peu de données disponibles au sujet des effets sur les mammifères marins, on soupçonne que les métaux lourds peuvent provoquer une réponse immunitaire insuffisante chez les bélugas (Delphinapterus leucas) de la population de l’estuaire du fleuve Saint-Laurent (De Guise et al. 1996). Comme les contaminants décrits précédemment, les métaux lourds sont souvent rejetés dans le milieu marin à partir du ruissellement urbain et sont bioaccumulables de nature. Ce comportement bioaccumulable donne à penser qu’un prédateur de haut niveau trophique comme l’épaulard du large reçoit des quantités importantes de métaux lourds de ses proies, en particulier des poissons à grande longévité comme les requins.

Ce qui est le plus préoccupant, c’est que les épaulards du large semblent cibler le foie d’au moins une de leurs proies préférées, la laimargue du Pacifique. Le foie constitue un repas riche en lipides, mais également un réservoir de métaux lourds. Les trois espèces de requins connues pour être consommées par les épaulards du large ont une teneur élevée en mercure (Forrester et al. 1972; Branco et al. 2004; McMeans et al. 2007), ce qui est susceptible d’augmenter la gravité de la consommation et l’accumulation de métaux lourds chez les épaulards du large.

On pense que les épaulards ont développé la capacité de détoxifier les métaux lourds comme le mercure (Martoja et Berry 1980); cependant, on ignore si la fonction de détoxication des épaulards du large est suffisamment efficace pour gérer leur apparente préférence alimentaire pour le foie de proies de niveau trophique intermédiaire à élevé et leur exposition à un environnement dont la teneur en contaminants est élevée. Contrairement aux anciens et nouveaux contaminants, seule une faible quantité de métaux lourds est transmise aux petits de l’épaulard par le placenta ou l’ingestion de lait (Endo et al. 2006, 2007).

c. Polluants biologiques

La troisième catégorie de contaminants véhiculés par les proies chez les épaulards concerne les polluants biologiques. Ces polluants se composent de composés d’origine naturelle, dont l’amplification dans l’environnement en raison des activités humaines produit souvent des effets nocifs sur la faune. Les polluants biologiques peuvent être introduits directement dans le milieu marin par l’intermédiaire des eaux de ruissellement d’origine urbaine et agricole (p. ex. hormones, antibiotiques) ou peuvent être générés par la charge en éléments nutritifs de ces apports anthropiques (p. ex., proliférations d’algues toxiques).

fLes composés pharmaceutiques (p. ex. régulateurs hormonaux, antibiotiques) peuvent agir comme imitateurs et perturbateurs endocriniens, qui ont des effets néfastes sur le développement des organes, les fonctions immunitaires et la maturation sexuelle des animaux et sont parfois source de cancer et de malformations (Slater et al. 1995; Liney et al. 2006; Vajda et al. 2008; Bjerregaard 2012). Ces composés se rendent dans l’environnement marin par l’intermédiaire des usines de traitement des eaux usées, des fosses septiques, du ruissellement agricole et du lessivage. Bien que la bioaccumulation des hormones naturelles et synthétiques ait été observée chez les vertébrés marins, la bioaccumulation et les effets de ces composés n’ont pas été testés sur des animaux aquatiques de niveau trophique plus élevé que les poissons (Lai et al. 2002; Nagpal et Meays 2009). La concentration de ces composés et leurs effets sur les cétacés ont été relativement peu étudiés et sont complètement inconnus pour les épaulards.

Les proliférations d’algues nuisibles produisent périodiquement de fortes densités d’algues sécrétant des toxines. Bien que ces proliférations soient présentes naturellement, les activités anthropiques contribuent à la prolifération d’algues nuisibles par le biais de la charge en éléments nutritifs (Anderson et al. 2002), le transport et l’introduction accidentelle d’espèces nuisibles (Hallegraeff 1998), la surpêche (Eriksson et al. 2009) ainsi que les changements climatiques (Van Dolah 2005; Hallegraeff 2010). Contrairement aux contaminants présentés préalablement, les toxines d’algues agissent rapidement et de manière puissante. Bien que les mammifères marins puissent souffrir de l’exposition à des toxines provenant des algues directement par la respiration, les proies agissent le plus souvent comme vecteurs de ces toxines qui peuvent s’accumuler dans les tissus des espèces qui les consomment et qui s’amplifient le long de la chaîne alimentaire. Si les proliférations d’algues nuisibles ont été associées aux taux élevés de mortalité et à l’inhibition de la reproduction de certains mammifères marins (Durbin et al. 2002; Van Dolah 2005), la mort d’aucun épaulard n’a été attribuée directement aux toxines d’algues.

Les niveaux de métaux lourds sont modérément documentés pour les espèces de requin chassées par les épaulards du large, mais les niveaux de contaminants, anciens et nouveaux, et de polluants biologiques chez ces espèces de proies sont relativement inconnus. On ignore si le niveau élevé de toxicité observé dans les tissus des épaulards du large constitue actuellement une limite pour la population ou s’il aura un effet à l’avenir. Il reste la possibilité que les niveaux de contaminants puissent avoir un effet différé sur la population. L’abondance des sources anthropiques de contaminants dans les zones fréquentées par les épaulards du large fait ressortir la pertinence de cette menace pour cette population.

Déversements de substances nocives pour l’environnement marin

Les déversements de substances nocives pour l’environnement marin constituent une importante source de préoccupations pour les épaulards de Colombie-Britannique. À l’heure actuelle, rien n’indique que les épaulards peuvent détecter et éviter les déversements. Étant donné qu’ils n’ont pas d’odorat, il est peu probable qu’ils perçoivent un déversement lorsqu’ils nagent dedans. Il a été observé qu’ils ne cherchent apparemment pas à éviter les déversements et que l’inhalation de vapeurs pourrait entraîner leur mortalité directe. Le meilleur exemple que l’ont peut citer est le déversement de pétrole de l’Exxon Valdez en 1989 dans le golfe du Prince William, en Alaska, dans lequel des groupes d’épaulards résidents et migrateurs de l’Alaska ont été observés en train de nager, et après lequel un nombre de décès sans précédent s’est produit au sein de ces populations (Matkin et al. 1998, 1999, 2008, 2012).

Les déversements de substances dangereuses pour l’environnement marin constituent non seulement une source de mortalité directe pour certains animaux à cause de l’adhérence, de l’inhalation et des effets mutagènes et cancérigènes (Samanta et al. 2002), ainsi que des perturbations physiologiques et endocriniennes (Bilbao et al. 2010), mais elles ont aussi des répercussions indirectes potentielles en raison de la dégradation de l’habitat et des proies des épaulards. La pollution par les hydrocarbures nuit aux cétacés de plusieurs façons : ingestion de proies contaminées, irritation de la peau ou des yeux, inhalation des émanations et abandon des zones d’alimentation polluées (Clapham et al 1999).

Le déversement de pétrole de la plate-forme Deepwater Horizon survenu en 2010 dans le golfe du Mexique a été associé à 101 carcasses de cétacés qui se sont échoués sur les côtes septentrionales du golfe (Antonio et al. 2011). En tenant compte du faible taux de rétablissement lié aux carcasses ayant coulé, ayant été dévorées ou étant à la dérive, le taux de mortalité des cétacés causé par le déversement pourrait être jusqu’à 50 fois plus élevé (Williams, R. et al. 2011). En plus de la mortalité directe, il a été démontré que certaines espèces ont été déplacées par le déversement (Ackleh et al. 2012), et d’autres ont probablement subi les effets cumulatifs des agents de stress (Carmichael et al. 2012). Comme le rétablissement à la suite de ce déversement est toujours en cours, les effets à long terme du pétrole – et des surfactants et agents de dispersion utilisés pour contrôler le déversement – sur la santé des populations de cétacés et de certains animaux sont encore inconnus. Jusqu’à présent, la recherche s’est penchée sur les déversements catastrophiques, plus importants, et leurs effets potentiels. Peu d’études ont été consacrées aux répercussions de l’exposition liée à des déversements mineurs, accidentels ou intentionnels, qui peuvent être bien plus fréquents (CNR 2003; O’Hara comm. pers. 2014).

Comme il a été mentionné précédemment, la menace liée aux écoulements et déversements de pétrole présente un risque pour les épaulards du large, en raison de leur comportement de regroupement. Le trafic de grands navires (p. ex. les pétroliers) risque de s’accroître, étant donné que de multiples propositions d’accroissement du transport maritime des produits pétroliers et d’autres substances dangereuses en provenance et à destination de la Colombie-Britannique ont cours actuellement; cela augmente les risques de déversements de substances dangereuses pour l’environnement marin et pour les épaulards du large et leurs proies.

Perturbation acoustique
Bruits aigus

Les bruits anthropiques aigus dans le milieu marin peuvent provenir de nombreuses sources, notamment : les sonars militaires, les explosifs et les munitions; les levés sismiques; la construction, le battage de pieux et le dynamitage sous-marins; les dispositifs de dissuasion acoustiques. Ces bruits se caractérisent par des sons forts, intenses et impulsifs qui peuvent parcourir de grandes distances sous l’eau (de 10 km à plus de 100 km). Bien que les effets de ces bruits puissants sur les épaulards soient actuellement inconnus, il a été démontré qu’ils répondent généralement aux bruits aigus par un comportement d’évitement (Bain 1995). Il a également été prouvé que les bruits anthropiques aigus ont des effets nocifs sur de nombreuses autres espèces de cétacés. Ces effets comprennent les changements de comportement, la désorientation, le déplacement hors de l’habitat, les lésions physiques du système auditif, la déficience auditive temporaire ou permanente ainsi que la mortalité directe et indirecte, tant chez les baleines que chez leurs proies (Nowacek et al. 2007).

Les sonars navals actifs de moyenne fréquence (14 kHz) ont été fortement associés à de nombreux cas d’échouement et de mortalité massive de cétacés à dents (sous-ordre Odontoceti), en particulier les baleines à bec qui plongent en eau profonde (de la famille des Ziphiidés (Balcomb et Claridge 2001; Evans et England 2001). De récentes études montrent que la bathymétrie particulière à l’emplacement des activités navales est probablement un facteur important d’échouements liés aux sonars (Filadelfo et al. 2009). Elles donnent à penser que les zones de bathymétrie escarpées proches d’une côte adjacente, où des sonars militaires sont utilisés au large, sont les plus fortement corrélées avec ces échouements (D’Amico et al. 2009). Bien que tous les systèmes de sonars navals actifs de moyenne fréquence n’utilisent pas les mêmes plages de fréquences, puissance de sortie ou formes d’onde, et malgré les efforts visant à réduire les niveaux des sonars à moyenne fréquence, il a été constaté que les sonars navals actifs de moyenne fréquence peuvent toujours perturber et déplacer les baleines, même lorsque les signaux sont inférieurs à ceux actuellement autorisés pour la marine américaine (Tyack et al. 2011; DeRuiter et al. 2013; Goldbogen et al. 2013). Il n’a pas seulement été démontré que les sonars navals actifs de moyenne fréquence modifient les mouvements des animaux, ils ont également une incidence sur leur comportement acoustique. On a observé que les rorquals à bosse (Megaptera novaeangliae) prolongent la durée de leur chant en présence de sonars navals actifs de moyenne fréquence (Miller et al. 2000), alors que le rorqual bleu (Balaenoptera musculus) a tendance à émettre moins d’appels lorsqu’il se trouve à proximité de ces sonars (Melcón et al. 2012).

On a observé que les épaulards modifient leur comportement en réaction aux sonars navals actifs de moyenne fréquence. Le 5 mai 2003, un groupe d’épaulards résident du Sud a été exposé à un signal de sonar naval actif de moyenne fréquence pendant un peu plus de trois heures seulement en présence du contre-torpilleur américain USS Shoup, dans le cadre d’un exercice de formation. Les épaulards ont présenté des comportements anormaux qui indiquent une forte réaction d’évitement (NMFS 2005). On croit que l’exposition au sonar a probablement eu un effet masquant sur l’audition, mais on ne sait pas si cet événement a entraîné des modifications temporaires de la sensibilité auditive des épaulards, bien qu’on considère qu’il est peu probable qu’ils aient subi des modifications permanentes de la sensibilité auditive ou des blessures (NMFS 2005). De récentes expériences de marquage ont également montré que les épaulards modifient leur comportement en présence de transmissions de sonars, ce qui entraîne l’interruption de la quête de nourriture, l’arrêt prolongé des comportements acoustiques et un déplacement rapide hors de la zone soumise aux ondes acoustiques (Miller et al. 2012).

Les levés sismiques impliquent des détonations intenses provenant des séries de canons à air, dont le bruit se concentre dans les basses fréquences (moins de 1 kHz), mais est souvent détectable jusqu’à 100 kilomètres à la ronde. Bien qu’il n’existe actuellement pas de données au sujet de l’épaulard, il a été démontré que le marsouin commun (Phocoena phocoena vomerina) et l’otarie de Steller (Eumetopias jubatus) de la Colombie-Britannique adoptent un important comportement d’évitement de l’activité sismique, même à des niveaux de son relativement faibles et sur de longues distances (Bain et Williams 2006). Les baleines ont aussi été observées en train de se déplacer en raison d’activités sismiques, ce qui montre une forte réaction d’évitement des zones exposées à ces sons (Williams et al. 1983; Richardson et Williams 2004; Castellote et al. 2012). Il existe de nombreux cas d’impact des levés sismiques sur les cétacés à fanons, ce qui entraîne principalement des changements sur le plan du comportement de vocalisation et des déplacements hors de l’habitat. Il a été démontré que les rorquals bleus augmentent leur taux d’appel en présence de fortes ondes sismiques (Di Lorio et Clark 2010), alors que le rorqual à bosse et le rorqual commun (Balaenoptera physalus) cessent de chanter pendant toute la durée des activités sismiques, souvent durant plusieurs semaines (Clark et Gagnon 2006).

Il est également intéressant de noter que certaines des proies de l’épaulard du large ont une sensibilité potentielle aux bruits aigus et de basse fréquence. Certains téléostéens (poissons osseux) se sont révélés très sensibles aux événements de bruits aigus, par leur déplacement ou leur taux de mortalité (Skalski et al. 1992; Engås et al. 1996), une perte auditive temporaire ou à long terme (p. ex. Scholik et Yan 2002) et des lésions du système auditif (McCauley et al. 2003). Les élasmobranches (poissons cartilagineux; p. ex., les requins) sont considérés comme ayant un champ auditif à basse fréquence (de 20 Hz à 1 kHz) relativement restreint (Casper et Mann 2009) et ne semblent pas aussi sensibles aux sons de ces bandes passantes que les téléostéens (Casper et al. 2012). De nombreuses espèces de requins des eaux peu profondes et épipélagiques semblent être attirées par les trains d’impulsions à basse fréquence (Myrberg et al. 1972). Ces trains d’impulsion sont habituellement produits par les poissons morts ou blessés, ce qui explique l’attraction des requins pour ce son. À l’inverse, des études ont montré que les requins sursautent et quittent un endroit lorsqu’un son soudain et fort (de 20 dB à 30 dB au-dessus des niveaux sonores ambiants) se produit (Myrberg 2001). Il convient de noter qu’aucune de ces études n’a examiné précisément les espèces consommées par les épaulards du large, mais que la sensibilité marquée des espèces apparentées soulève la possibilité que les bruits aigus affectent les proies des épaulards du large.

En raison du développement accru prévu dans les milieux marins de Colombie­Britannique, et aux alentours, on s’attend à ce que les sources de bruits aigus augmentent dans ces eaux à cause de la construction maritime requise pour ces projets. Compte tenu des augmentations prévues de bruits aigus, des perturbations continues liées à l’utilisation de sonars militaires et au déploiement d’explosifs et de munitions, des pratiques de levés sismiques et de la sensibilité générale des cétacés aux bruits aigus, cette menace est considérée comme étant très préoccupante à l’égard de la population d’épaulards du large que la grande taille des groupes rend particulièrement vulnérables aux événements stochastiques.

Bruit chronique

Les niveaux de bruit ambiant des océans du monde ont considérablement augmenté au cours des dernières décennies. Cette augmentation s’est produite à basse et moyenne fréquence et est dictée par l’augmentation du bruit anthropique, notamment le trafic maritime (McDonald et al. 2006). Il est généralement admis que l’augmentation du nombre de navires et de leur vitesse est susceptible d’avoir un effet cumulatif réduisant la qualité de l’habitat des cétacés en augmentant le niveau de bruit sous-marin. Bien qu’aucune donnée au sujet des effets du bruit chronique sur les épaulards n’existe actuellement, les effets ont été recensés chez plusieurs autres espèces de cétacés. Il a été démontré que le bruit chronique produit par les navires modifie la nage et le comportement de quête de nourriture des baleines à bec (Pirotta et al. 2012) et a engendré des lésions de l’oreille interne des cachalots (Physeter macrocephalus) (André et al. 1997). Le bruit des navires a également été mis en corrélation avec le taux élevé de stress de la baleine noire de l’Atlantique Nord (Eubalaena glacialis) (Rolland et al. 2012), ainsi qu’avec les modifications du chant du rorqual commun (Castellote et al. 2012).

L’environnement acoustique de l’épaulard fait partie intégrante de son habitat. Le bruit peut couvrir la communication, l’écholocalisation et l’écoute passive d’un épaulard, ce qui réduit sa capacité à capturer des proies, à se déplacer et à maintenir la cohésion sociale au sein de son groupe. On sait très peu de choses sur la manière dont le bruit chronique affecte les épaulards ou leur capacité d’adaptation aux changements des niveaux de bruit ambiant. L’éventail d’appels efficace de l’épaulard semble être réduit par la présence de bruit anthropique chronique dans plusieurs zones côtières de la Colombie-Britannique, ce qui rend probablement plus difficile la communication efficace entre les groupes ou individus (Williams et al. 2013). Le bruit acoustique chronique qui nuit à la capacité de détecter les signaux de communication intraspécifique des animaux peut causer du stress et possiblement modifier le comportement de l’épaulard, ou réduire l’efficacité de la coordination pour la quête de nourriture dans les zones où les phoques sont couramment répartis sur de grandes distances (Williams et al. 2006; Holt 2008; Holt et al. 2012). Il a été démontré que les épaulards résidents modifient leur comportement d’appel en présence de bruits persistants de navires en augmentant l’amplitude, la fréquence et le nombre de leurs appels (Erbe 2002; Foote et al. 2004; Holt et al. 2008).

L’aire de répartition géographique de l’épaulard du large empiète sur les grandes routes de navigation (p. ex. Los Angeles, San Francisco, sud-ouest de l’île de Vancouver), soulignant ainsi la préoccupation à l’égard de leur exposition aux bruits chroniques. Toutefois, le bruit produit par les navires dans les eaux pélagiques et sur le bord du plateau continental, où l’on estime que les épaulards passent la majeure partie de leur temps, est probablement moins dense que dans les eaux plus proches des ports d’entrée ou des passages côtiers, mais aucune étude n’ait été entreprise pour évaluer précisément l’exposition des épaulards du large aux bruits d’origine anthropique dans leur habitat. Le trafic maritime de la Colombie-Britannique est en hausse (Nuka Research 2013; PMV 2013) et le bruit sous-marin chronique devrait augmenter en raison d’autres sources, comme les éventuels projets de production d’énergie éolienne et marémotrice, et d’énergie cinétique marine. Les effets cumulatifs éventuels de ces sources existantes et potentielles de bruit chronique sur les épaulards font l’objet de préoccupations.

Perturbations physiques

Les sources de perturbations physiques pour les épaulards des eaux canadiennes du Pacifique constituent une préoccupation constante : empiétement des navires, collisions avec les navires, développement industriel potentiel (p. ex. parcs éoliens en mer; turbines marémotrices; plateformes pétrolières extracôtières). Jusqu’à tout récemment, on a signalé relativement peu de cas d’épaulards heurtés par des bateaux, mais entre 2004 et 2016, il y a eu au moins huit observations fiables de collisions entre des bateaux et des épaulards en Colombie‑Britannique (Spaven, comm. pers. 2017).  La mortalité récente de J34, un mâle dans la fleur de l'âge, mort de traumatismes contondants, met l'accent sur cette menace (MPO 2016).

Les perturbations liées à la proximité des navires sont préoccupantes pour les épaulards en Colombie-Britannique, notamment en raison de la croissance de l’industrie commerciale d’observation des baleines dans ces eaux (Osborne et al. 2003; O’Connor et al. 2009). Les plus grandes concentrations de navires d’observation des baleines se trouvent aux extrémités nord-est et sud-est de l’île de Vancouver, où nous avons aussi découvert de grands groupes d’épaulards du large, bien visibles; il est probable que la plupart des visites d’épaulards du large dans ces eaux sont documentées et s’accompagnent d’un trafic maritime intense toute la journée. En raison de l’interruption possible du comportement de quête de nourriture et des préoccupations liées à l’inhalation d’échappement, la proximité des navires avec les épaulards constitue une menace importante (Williams et al., 2002, 2006; Lusseau et al. 2009; Lachmuth et al. 2011).

Il n’y a pas de signalement ou de rapport documenté de collisions avec des navires pour les épaulards du large dans les eaux canadiennes du Pacifique. Seul un épaulard du large présentant des blessures physiques vraisemblablement subies par l’interaction avec un navire a été recensé. En 2005, une femelle sans nageoire dorsale a été observée; la coupe nette donnait à penser que la blessure avait été infligée par une hélice de navire au cours des trois années précédentes (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées).

La plus grande préoccupation concernant les interactions entre les navires et les épaulards, y compris la population du large, est leur propension à « inspecter les hélices ». Les animaux qui adoptent ce comportement suivent un bateau et jouent dans le sillage de son hélice. Ce curieux comportement ressort dans l’historique des collisions avec des navires recensées en Colombie-Britannique : dans la moitié des cas, le décès ou les blessures ont été causés précisément par une hélice de navire.

Vu la grande taille de leurs groupes, les épaulards du large sont facilement remarqués lorsqu’ils pénètrent dans les eaux littorales. Cette attention les rend particulièrement vulnérables à la perturbation causée par les navires. Le fait qu’ils entrent rarement dans les eaux régulièrement utilisées par les plaisanciers devrait réduire au minimum la menace d’une perturbation physique causée par les navires, mais leur manque d’accoutumance au trafic maritime constitue une source de préoccupation. Le trafic de grands navires se déplaçant à haute vitesse à l’extérieur des eaux protégées, comme les navires de pêche commerciale et de croisière, a augmenté au cours de la dernière décennie et devrait continuer d’augmenter, et ainsi accroître les risques liés à cette menace.

Les structures artificielles présentes dans le milieu marin peuvent également déplacer les épaulards et créer des obstacles à leur passage. En Colombie-Britannique, il existe actuellement plusieurs projets de recherche visant l’installation éventuelle de turbines marémotrices dans les passages étroits et les autres eaux de marée. Bien que ces dispositifs soient source de préoccupations, car la collision avec les pales est une source potentielle de blessure physique ou de mortalité, ils peuvent également obstruer le passage des épaulards ou les déplacer, puisque leur présence physique, combinée aux bruits sous-marins qu’ils génèrent, pourrait inciter les épaulards à éviter les zones où ces dispositifs sont présents.

L’évitement d’une zone par les épaulards en raison de la présence physique d’un nouvel appareil n’est pas sans précédent. À plusieurs reprises, on a observé que les épaulards étaient gênés par des objets qui, sans entraver complètement le passage, semblaient constituer une barrière imaginaire suffisante pour qu’ils hésitent à passer. Ce type d’obstacle « psychologique » impliquant des objets artificiels a déjà été observé dans le passé; notamment le pont flottant du canal Hood dans l’État de Washington, qui semble être la raison pour laquelle deux groupes différents d’épaulards migrateurs sont restés piégés pendant une longue période (59 jours et 172 jours) en 2003 et en 2005 (London 2006; Ford et al. 2013). L’augmentation du développement de diverses industries maritimes dans l’aire de répartition des épaulards du large suscite la crainte que certaines parties de leur habitat subissent des perturbations physiques et entravent leur utilisation par les épaulards du large.

Interactions avec la pêche commerciale

Il y a sept rapports documentés et confirmés d’enchevêtrement d’épaulards dans des engins de pêche commerciale dans les eaux canadiennes du Pacifique (Programme d’intervention auprès des mammifères marins du MPO, données non publiées), mais il existe, au fil des ans, un certain nombre de rapports anecdotiques non confirmés d’épaulards juvéniles temporairement capturés dans des sennes pour saumon, puis remis à l’eau de façon sécuritaire, ainsi que d’épaulards nageant à travers des filets maillants (Ellis comm. pers. 2013). Parmi les sept cas d’animaux enchevêtrés confirmés, la majorité provenait de la population d’épaulards résidents du nord et cinq ont survécu, sans blessure apparente. Les deux autres rapports concernaient le décès de deux épaulards non identifiés en 1986, dans le cadre de la pêche expérimentale de l’encornet volant (Ommastrephes bartrami), une pêche commerciale au filet dérivant active entre 1979 et 1987, dans les eaux de l’océan Pacifique, loin de la côte de la Colombie-Britannique (Jamieson et Heritage 1987). Les documents relatifs à cette pêche en haute mer résument seulement les cas de mortalité. Par conséquent, on ne sait pas si d’autres animaux ont été touchés, mais se seraient échappés, sains ou blessés. Il n'y a aucun rapport, documenté ou non, faisant état de l'enchevêtrement ou du piégeage d'épaulards du large dans des engins de pêche commerciale ou d'aquaculture, ou dans des engins abandonnés, et il n'existe pas non plus de photos d'épaulards du large présentant des signes d'interactions avec les pêches (p. ex. cicatrices; engins traînés).

La déprédation (retrait des poissons capturés des filets ou des lignes par les animaux pour s’en nourrir) a été observée chez les épaulards résidents de la Colombie-Britannique et de l’Alaska (Ellis comm. pers. 2013). Cette activité est une menace, car les animaux peuvent accidentellement se trouver enchevêtrés dans des filets ou avaler des hameçons, et subir des abrasions ou des infections internes. À ce jour, il n’y a pas de données de déprédation par les épaulards du large. Cependant, on pense que la déprédation est un comportement acquis qui, une fois connu par une partie de la population, peut rapidement se propager au reste des individus.

Parmi les cinq espèces de proies confirmées des épaulards du large dans les eaux canadiennes du Pacifique, deux sont visées par la pêche à la ligne active, et les trois autres sont connues pour être prises accessoirement dans différentes pêches à la ligne. Les crochets brisés présents dans les proies constituent une autre source possible d’ingestion d’hameçon observée chez les épaulards résidents, qui pourrait entraîner des infections internes.

L’aire de répartition des épaulards du large dans les eaux pélagiques et sur le bord du plateau de la Colombie-Britannique pourrait rendre l’espèce moins vulnérable aux risques d’interactions avec la pêche commerciale, comparativement aux écotypes d’épaulards vivant plus proches des côtes. Cependant, le chevauchement entre la base de proies de l’épaulard du large et trois types de pêches commerciales d’envergure augmente les risques de chevauchement spatio-temporel pouvant entraîner des incidents d’enchevêtrement, de piégeage ou de déprédation.

Mise à mort directe

Il n’y a eu aucun rapport ou compte rendu de mise à mort directe (p. ex. tir) des épaulards du large depuis qu’ils ont été désignés comme un écotype distinct en 1988. De plus, aucune observation n’a relevé de cicatrices provenant vraisemblablement de blessures causées par une tentative de mise à mort. En 1955, un épaulard du large a été capturé pendant la période de chasse à la baleine en Colombie-Britannique (Ford, J. et al. 2011); en 1961, un autre a été capturé vivant et est mort deux jours plus tard (Caldwell et Brown 1964); et deux individus ont été harponnés au large de la côte californienne en 1964 et en 1966 à des fins de recherche (Morin et al. 2006). Jusqu’au milieu des années 1980, les épaulards étaient généralement considérés comme des animaux nuisibles en compétition avec la pêche dans les eaux canadiennes du Pacifique et ont souvent été abattus par des tirs de pêcheurs. Il n’y a pas de données faisant état de l’ampleur de la mortalité qui en a découlé; toutefois, certains épaulards résidents plus âgés portent des cicatrices qui ont probablement été causées par des tirs. L’apparente absence d’épaulards du large dans les eaux côtières au cours de cette période pourrait leur avoir permis d’éviter d’être tués ou blessés par ces fusillades.

Avec l’augmentation de la présence d’épaulards du large dans les eaux protégées et leur chevauchement avec les intérêts de plusieurs pêches commerciales et sportives, ainsi que leur possible déprédation, cette menace demeure réelle. Cependant, grâce au Règlement sur les mammifères marins du Canada et à la réglementation fédérale américaine interdisant de tuer des animaux qui interfèrent avec les opérations de pêche, au fait qu’il n’existe pas de données historiques de tentative d’abattage d’épaulards du large et à l’évolution des valeurs sociales, la mise à mort directe est considérée comme étant peu préoccupante pour cette population.

Changement climatique

Le changement climatique anthropique est une menace importante qui pèse sur la faune marine et les écosystèmes aujourd’hui (Pachauri 2007; Hoegh-Guldberg et Bruno 2010). Il est associé aux conditions océanographiques changeantes (p. ex. acidification des océans, augmentation de la fréquence des proliférations d'algues) (Orr et al. 2005; Van Dolah 2005; Cao et al. 2007; Doney et al. 2009; Hallegraeff 2010; Johnson et White 2014), aux changements dans la propagation acoustique (Munk et Forbes 1989) et aux changements de la répartition des proies (Stachowicz et al. 2002; Ling 2008). Le changement climatique agit selon toute vraisemblance en synergie avec de nombreuses autres menaces actuelles qui pèsent sur les épaulards du large. Les voies de passage par lesquelles cette menace peut avoir une incidence sur les épaulards du large sont nombreuses, complexes et mal comprises, ce qui crée une grande incertitude quant à la manière exacte dont le changement climatique peut influer sur eux.

4.2.2 Restrictions et vulnérabilités naturelles

Agents pathogènes

Les agents pathogènes sont les virus, les bactéries et les parasites qui peuvent causer des maladies et souvent se propager rapidement dans l’ensemble des espèces vulnérables. Les agents pathogènes peuvent avoir une incidence directe sur les épaulards, en interférant avec leur capacité de s’alimenter ou de se reproduire avec succès, ou indirecte, en infectant et affectant leurs proies. Bien qu’aucun cas de mortalité massive liée à la maladie n’ait été observé chez les mammifères marins dans les eaux canadiennes du Pacifique, de nombreux agents pathogènes ont été relevés dans les populations d’épaulards du Canada et ont entraîné une mortalité massive chez d’autres espèces de mammifères marins. À l’heure actuelle, il n’existe presque pas de données sur les agents pathogènes présents dans les épaulards du large, mais on peut supposer qu’ils sont exposés à bon nombre des mêmes agents pathogènes détectés chez les populations d’épaulards sympatriques et qu’ils en subissent les mêmes infections.

Les agents pathogènes « émergents », c’est-à-dire étrangers à l’environnement marin et introduits par les activités humaines (p. ex. par les effluents d’eaux usées et le ruissellement des terres agricoles, ou aéroportés), sont particulièrement préoccupants. L’exposition aux nouveaux agents pathogènes constitue une préoccupation particulière, car le système immunitaire d’un animal n’a probablement pas les anticorps appropriés pour lutter contre l’infection et, par conséquent, présente un risque plus élevé d’infection mortelle.

Agents pathogènes

Quatre agents pathogènes infectieux ont été détectés chez les épaulards sauvages : Brucella spp., Edwardsiella tarda, poxvirus des cétacés, et salmonella Newport.

Les agents pathogènes bactériens de la Brucella pénètrent dans le milieu marin par le ruissellement urbain et agricole, et ont été observés pour la première fois chez les mammifères marins dans le milieu des années 1990. L’exposition à la Brucella a été détectée chez des épaulards (Jepson et al. 1997; Raverty comm. pers. 2014A), mais à notre connaissance, n’a pas causé de mortalité par infection. Toutefois, d’autres espèces de cétacés ont montré que la Brucella a des effets nocifs, comme l’avortement, l’infection et l’enflure cérébrale, la pneumonie, l’infection de la peau (p. ex. abcès du petit lard) ou l’infection osseuse. La réduction de la fécondité des épaulards en raison d’une infection de Brucella (Gaydos et al. 2004) est également préoccupante.

La bactérie Edwardsiella tarda est un agent pathogène bactérien opportuniste transporté dans les matières fécales et dans la flore intestinale normale d’un épaulard. Elle peut causer une infection intestinale, un abcès, une septicémie ou une méningite lorsqu’elle est introduite dans la circulation sanguine d’un animal en raison de son affaiblissement ou de son immunosuppression. Il a été prouvé que la bactérie E. tarda a causé le décès d’un épaulard résident du sud (Ford et al. 2000).

Le poxvirus des cétacés est une infection virale qui entraîne des lésions cutanées et qui augmenterait le risque de mortalité des jeunes animaux (Van Bressem et Van Waerebeek 1996). Il a été relevé chez un épaulard en liberté dans le sud-est du Pacifique (Van Bressem et al. 1999), mais il n’a pas été démontré qu’il ait causé le décès d’un épaulard. Ce virus n’a pas encore été détecté chez les cétacés du Pacifique Nord.

La Salmonella Newport est un agent pathogène bactérien qui a été observé chez les humains et les bovins, plus particulièrement au cours de la dernière décennie, mais qui a rarement été détecté chez les mammifères marins. Il s’agit d’une souche virulente de la bactérie Salmonella, un agent pathogène gastro-intestinal qui peut se propager dans le sang et causer la mort, particulièrement chez les individus dont le système immunitaire est déjà affaibli. En 2005, en Californie, cet agent pathogène de source terrestre a été relevé chez un épaulard du large nouveau-né et est soupçonné d’avoir joué un rôle dans son échouage et son décès. Il s’agit du premier cas de Salmonella Newport chez un épaulard sauvage (Colegrove et al. 2010). La bactérie a aussi été observée chez un épaulard euthanasié à Hawaii en 2008, mais l’autopsie a révélé que l’animal était porteur asymptomatique (Raverty comm. pers. 2014b).

Il convient de noter que d’autres agents pathogènes appelés Morbillivirus spp. et Toxoplasma gondii Morbillivirus sont des agents pathogènes viraux qui comprennent le virus de la maladie de Carré, le morbillivirus du phoque et les morbillivirus des dauphins et des marsouins. Il a été démontré que ces agents pathogènes ont des effets nocifs chez d’autres mammifères marins, en particulier sur les poumons et le cerveau, entraînant souvent des lésions cutanées, des pneumonies, des infections et enflures cérébrales, ainsi que des infections secondaires ou latentes, en raison de systèmes immunitaires affaiblis par la production réduite de lymphocytes. Des cas de morbillivirus ont été observés chez les phoques, les loutres, les dauphins, les globicéphales et les baleines à bec, causant une mortalité massive chez les phoques et les dauphins (Rowles et al. 2011). Les morbillivirus se propagent rapidement; on a observé des épidémies chez les phoques et les dauphins se propageant jusqu’à 6 000 km à la ronde par an (McCallum et al. 2003). On ne sait pas si les épaulards sont vulnérables aux infections par morbillivirus, mais des anticorps ont été détectés chez des épaulards de l’ouest de l’océan Pacifique (Raverty comm. pers. 2014b), et ces agents pathogènes demeurent une source de préoccupation, car ils ont également été observés chez les espèces de mammifères sympatriques (Gaydos et al. 2004; Mos et al. 2003).

La bactérie Toxoplasma gondii est un agent pathogène protozoaire introduit dans l’écosystème marin par le ruissellement terrestre. Cet agent pathogène a été relevé chez les épaulards échoués, sans qu’il y soit associé d’effet significatif (Raverty comm. pers. 2014b). Toutefois, il a été déclaré comme étant la cause d’infections cérébrales ou cardiaques, de maladies neuromusculaires et d’avortements chez divers autres mammifères marins (Miller et al. 2002; Dubey et al. 2003; Omata et al. 2006).

Vulnérabilité aux infections

Plusieurs caractéristiques des épaulards du large rendent cette population particulièrement vulnérable aux agents pathogènes. Une analyse sociale préliminaire montre que les épaulards du large sont très sociables, et s’associent avec des individus de l’ensemble de leur population (Ford et al. 2014). Cette nature très sociale accroît le risque d’infection rapide et généralisée ainsi que la dispersion des agents pathogènes à l’échelle de la population. Leur vulnérabilité aux maladies infectieuses a aussi été liée à la contamination des cétacés aux BPC (Mos et al. 2006). Comme on sait que les épaulards du large sont fortement contaminés, ils pourraient être immunodéficients, ce qui amplifierait leur vulnérabilité aux agents pathogènes. Ayant une grande aire de répartition géographique adjacente à de nombreux grands centres urbains et à des zones d’activité agricole intensive, les épaulards du large sont exposés à de nombreuses sources d’agents pathogènes émergents, en particulier à proximité des décharges des rivières et des eaux de ruissellement, où les concentrations d’agents infectieux peuvent être introduites dans le milieu marin. Les cavités pulpaires des épaulards du large qui se trouvent exposées à cause de l’usure extrême des dents peuvent constituer une autre porte d’entrée pour les agents pathogènes, ce qui soulève aussi des inquiétudes.

Préférences alimentaires fixes qui font diminuer la quantité de proies naturelles

Les préférences alimentaires des épaulards sont considérées comme des attributs acquis, tout comme leurs vocalisations. Ces préférences semblent extrêmement rigides, avec des stratégies d’alimentation spécialisée conçues pour cibler des espèces de proies; il s’agit de traditions culturelles qui ont probablement évolué au fil de nombreuses générations. Les épaulards semblent limités dans leur capacité d’adaptation et d’acceptation de nouvelles proies. Le meilleur exemple est peut-être le sort qu’ont connu trois épaulards migrateurs capturés en 1970. À l’époque, on ignorait que les épaulards appartenaient à des populations distinctes ayant des régimes alimentaires précis et on a supposé que les épaulards consommaient du poisson. Ces trois épaulards se nourrissant de mammifères ont refusé de consommer les poissons jetés dans leurs parcs en filet pendant 79 jours, jusqu’à ce que deux des animaux acceptent enfin de manger les poissons après la mort du troisième individu, victime de sa tentative d’évasion. Après leur remise en liberté en milieu naturel, les deux épaulards ayant survécu sont retournés à leur régime alimentaire composé de mammifères marins (Ford et Ellis 1999).

Les épaulards du large ont peut-être un régime alimentaire tout aussi inflexible que celui de leurs deux écotypes sympatriques, ce qui les rendrait résistants au « remplacement de proies » si la disponibilité de leurs proies principales diminuait. Une baisse de la disponibilité de leurs proies pourrait probablement se produire par l’entremise de changements naturels de régime dans l’écosystème, qui entraînent souvent des changements dramatiques dans l’aire de répartition ou d’abondance de nombreuses espèces marines (Hare et Mantua 2000). Si cela se produisait, les épaulards du large pourraient être gravement atteints. La possible rigidité du régime alimentaire des épaulards du large est une vulnérabilité biologique et, par conséquent, cette menace ne peut être atténuée.

Dépression consanguine

La petite taille de la population et l’isolement culturel des épaulards du large soulèvent des préoccupations relatives à la dépression consanguine, soit la détérioration génétique de la population en raison de la reproduction entre individus apparentés. La dépression consanguine concerne souvent les espèces présentant une faible diversité génétique et une population reproductrice petite ou fondée sur le sexe. Cette menace est élevée pour la population sympatrique d’épaulards résidents du sud, dont la diversité génétique est faible et dont la population reproductrice compte très peu d’individus (MPO 2008). Les épaulards résidents, cependant, ont des mécanismes de croisement distant qui semblent efficaces pour réduire au minimum ce risque (Barrett-Lennard 2000; Ford, M. et al. 2011b), mais limite les options si la taille de la population devient très petite.

La population d’épaulard du large semble avoir une diversité génétique relativement élevée (Morin et al. 2010) et on estime la population reproductrice à environ 130 individus (Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées; voir la note 1 en bas de la page V). L’évaluation adéquate de la menace d’une dépression consanguine pour les épaulards du large est limitée, car les tendances en matière de dynamique sociale et d’accouplement de cet écotype demeurent inconnues. On suppose que les épaulards du large, comme les épaulards résidents, ont développé des mécanismes efficaces de croisement distant. Toutefois, la grande diversité génétique observée au sein des épaulards du large indique qu’il pourrait s’agir d’une population relique d’une population plus grande dans le passé où de tels mécanismes n’étaient pas nécessaires. La perte soudaine d’une grande partie de la population pourrait entraîner une pénurie de population multigénérationnelle; auquel cas, la dépression consanguine pourrait représenter une menace crédible.

L’isolement social de la population d’épaulards du large joue un rôle important dans le risque de dépression consanguine qu’elle court. Les épaulards du large ont une culture distincte de celle des trois autres populations d’épaulards sympatriques qui fréquentent les eaux canadiennes du Pacifique. Leur culture, définie par leurs préférences alimentaires, leur structure sociale et leur comportement acoustique, les isole de toutes les autres populations dans leur aire de répartition. Comme les autres populations, les épaulards du large font preuve de « xénophobie sociale », en cela qu’aucune association avec un individu provenant d’une autre population d’épaulards sympatrique n’a été observée. Cet isolement culturel est préoccupant, car il limite la possibilité pour la population d’effectuer des croisements distants avec les populations sympatriques. Même si cela ne constitue pas une importante source de préoccupations actuellement, si le bassin génétique des épaulards du large devenait extrêmement restreint, l’absence d’« immigration de source externe » serait une menace considérable. Les épaulards du large ne sont liés à aucune population sur le plan culturel ou génétique avec laquelle ils pourraient étendre leur patrimoine génétique dans leur aire de répartition, s’il advenait que la taille de leur population soit sérieusement réduite.

À l’heure actuelle, compte tenu de la diversité génétique apparemment vaste de la population d’épaulards du large et de l’estimation de sa population reproductrice adéquate, la menace de dépression consanguine qui pèse sur cet écotype est relativement faible.

Usure de la dentition

On a observé que les épaulards du large présentent une usure extrême des dents, parfois jusqu’aux gencives, et leurs cavités pulpaires sont souvent exposées. Cette usure de la dentition serait attribuable à leur prédation sur les requins, dont la texture de la peau est rugueuse (Ford J. et al. 2011). À l’heure actuelle, il n’existe pas de signes d’effet délétère de cette vaste usure de la dentition, ni à l’échelle d’un individu, ni à celle de la population, mais cette caractéristique présente deux problèmes possibles.

D’abord, on s’inquiète du fait que l’abrasion chronique des gencives et les cavités pulpaires exposées peuvent constituer des voies d’infection pouvant mener à des abcès, à la réduction de l’efficacité du système immunitaire, voire au décès. À l’heure actuelle, on n’a recensé le décès d’aucun épaulard du large en raison d’un abcès dentaire ou d’une infection introduite par l’intermédiaire d’une cavité pulpaire exposée. Il a aussi été suggéré que, comme l’exposition des cavités pulpaires est chronique chez les épaulards du large, cela pourrait ne pas représenter de problème de santé pour cette espèce (Haulena comm. pers. 2013).

Ensuite, l’usure de la dentition pourrait être un facteur limitatif restreignant la capacité d’alimentation d’un individu. En raison de l’usure extrême de ses dents, constatée même chez les jeunes individus subadultes (Ford, J. et al. 2011), la capacité d’un individu à saisir et à déchirer ses proies pourrait être sérieusement compromise. Cela pourrait restreindre la quête de nourriture aux espèces pour lesquelles les dents ne sont pas nécessaires ou rendre l’espèce dépendante d’autres épaulards du large, plus jeunes, dont les dents ne sont pas encore extrêmement usées.

Étant donné que l’historique, la source et l’effet de cette vaste usure de la dentition des épaulards du large sont incertains et qu’il n’existe, pour le moment, aucune indication que l’usure de la dentition a une incidence sur la survie des individus, on considère actuellement que cette limitation naturelle présente un risque minimal pour la population d’épaulards du large. Cela dit, en raison de l’importante usure de la dentition observée chez la plupart des individus de la population, si des répercussions sont déterminées à l’avenir, le risque présenté par l’usure de la dentition à l’échelle de la population pourrait être plus grand que celui qui est envisagé actuellement.

Échouement massif ou piégeage naturel

On recense deux échouements collectifs d’épaulards en Colombie-Britannique. Le premier a eu lieu en 1941, lorsque 11 épaulards se sont échoués sur une dune près d’Old Masset, à Haida Gwaii (Cameron 1941). Bien que la population à laquelle appartenaient ces épaulards n’ait toujours pas été confirmée, d’après les photos présentant des épaulards dont les dents sont extrêmement usées, on pense qu’il s’agissait de l’écotype des épaulards du large (Ford J. et al. 2011). Le deuxième concernait 20 épaulards, dont les analyses génétiques ont confirmé qu’il s’agissait d’épaulards du large, échoués en 1945 à la pointe Estevan, sur l’île de Vancouver (Carl 1946). On soupçonne également au moins deux échouements collectifs d’épaulards du large à l’extérieur des eaux canadiennes du Pacifique. En 2000, huit épaulards se sont échoués vivants, avant de perdre la vie, dans le golfe de Californie, au Mexique. On a constaté que les dents des animaux examinés étaient « complètement usées », ce qui laisse entendre qu’il s’agissait d’épaulards du large (Guerrero-Ruiz et al. 2006). En novembre 2013, deux épaulards dont les dents étaient extrêmement usées se sont échoués à Bristol Bay, en Alaska, et on suppose qu’il s’agissait d’épaulards du large (Jensen comm. pers. 2014).

Les épaulards du large semblent passer la majeure partie de leur temps dans les eaux libres et peuvent ne pas être habitués aux eaux côtières. Par conséquent, ils pourraient être particulièrement vulnérables au piégeage naturel lorsqu’ils circulent plus près des côtes, dans les eaux plus abritées. Lorsqu’ils se trouvent dans les eaux littorales, les épaulards du large ont souvent été observés en train de nager en profondeur dans les bras de mer étroits. Le piégeage naturel d’épaulards du large a été observé une fois : en 1994, neuf épaulards ont été pris dans les eaux de marée du lac Barnes, en Alaska, pendant six à dix semaines. Deux individus matures sont morts, et une importante opération de sauvetage a dû être mise en œuvre pour amener les sept survivantsen eaux libres (Bain 1995). Cet incident a de nouveau mis en évidence la vulnérabilité des épaulards face aux obstacles « psychologiques » (voir la section sur les perturbations physiques ci-dessus). Dans le cas de l’incident du lac Barnes, la barrière était une forêt de varech située à l’embouchure du lac. Elle était physiquement traversable, même à marée basse, mais les animaux n’étaient prêts à passer à travers que lorsque le courant aurait abaissé le varech (Bain 1995). Ce type de « piégeage psychologique » a aussi été observé chez les épaulards migrateurs (London 2006; Ford et al. 2013; Programme de recherche sur les cétacés du MPO, données non publiées).

5 Objectifs en matière de population et de répartition

Compte tenu du caractère inconnu de l’abondance historique et des incertitudes concernant la taille, les données démographiques et la répartition spatiale de la population, la définition des objectifs quantitatifs en matière de population et de répartition peut ne pas être possible. La rareté des observations et l’incapacité de recenser l’ensemble de cette population ont donné lieu à une estimation modélisée de la population avec une grande incertitude. Il est donc actuellement difficile de mesurer et de détecter tout changement apporté à la taille de la population ou à son utilisation précise de l’habitat. Il est possible de mesurer la diversité génétique de cette population et il est important d’en effectuer le suivi, car la diversité permet la résilience de la population, ce qui l’aide à s’adapter aux changements dans son environnement.

L’objectif en matière de répartition est fondé sur l’hypothèse que les eaux canadiennes de l’océan Pacifique fournissent un habitat bénéfique et important pour la population d’épaulards du large, tout en reconnaissant l’évolution de son utilisation et de son occupation de l’habitat.

6 Stratégies et approches générales en vue d'atteindre les objectifs

6.1 Mesures achevées ou en cours

Des mesures liées au rétablissement de cette population sont en cours depuis que les épaulards du large ont été inscrits sur la liste des espèces préoccupantes de la LEP en 2004. La section suivante est un résumé des mesures en cours ou déjà terminées, bien qu’il ne s’agisse pas d’une liste exhaustive. Pêches et Océans Canada reconnaît la contribution de nombreux collègues et collaborateurs indépendants et internationaux à la réalisation de ces mesures.

6.1.1 Mesures de gestion et de réglementation 

6.1.2 Mesures d’intendance

6.1.3 Mesures de recherche

6.2 Orientation stratégique du rétablissement

Les stratégies générales définies pour l'épaulard du large et énumérées dans le tableau 2 visent à : répondre aux menaces réelles qui pèsent sur les épaulards du large et leur habitat; obtenir des données crédibles pour évaluer l'importance des menaces préoccupantes, mais non appuyées par des faits; atteindre une tendance stable ou à la hausse de l'abondance et de la diversité génétique de la population; assurer l'utilisation continue des eaux canadiennes du Pacifique par les épaulards du large; obtenir des renseignements de base sur la population ainsi que ses données démographiques et sa répartition; répondre aux autres besoins clés en matière d'information aux fins de rétablissement.

6.2.1 Stratégies générales pour le rétablissement de l’épaulard du large

  1. Surveiller l'abondance de la population et les caractéristiques démographiques des épaulards du large et améliorer nos connaissances sur leur utilisation des eaux canadiennes du Pacifique
  2. Veiller à ce que l'approvisionnement en nourriture des épaulards du large soit adéquat et accessible afin de permettre leur rétablissement
  3. Veiller à ce que les perturbations découlant des activités humaines n'empêchent pas le rétablissement des épaulards du large
  4. S'assurer que les polluants chimiques et biologiques n'empêchent pas le rétablissement des populations d'épaulards du large
  5. Déterminer l'habitat essentiel à désigner et à protéger

Les approches générales pour appuyer ces stratégies générales sont indiquées dans le tableau 2. La majorité des approches devraient permettre d'obtenir des connaissances fondamentales sur la population d'épaulards du large. Des approches additionnelles devraient permettre de mieux comprendre les menaces anthropiques et naturelles qui ont été relevées et de les atténuer. Il est à noter que ces stratégies et approches sont complétées par les activités présentées dans le calendrier des études visant à désigner l'habitat essentiel (tableau 3).

Tableau 2. Tableau de planification du rétablissement
Stratégie générale Description générale des approches de recherche et de gestion Prioritéj Menace ou préoccupation visée
1 1-1. Surveiller l'abondance des épaulards du large, et améliorer nos connaissances sur l'identité et la structure de la population présente dans les eaux canadiennes du Pacifique Élevée Lacunes dans les connaissances – Restrictions et vulnérabilités naturelles
1 1-2. Mieux comprendre les effets de l'isolement sur la culture des épaulards du large Moyenne Lacunes dans les connaissances – Restrictions et vulnérabilités naturelles
1 1-3. Étudier la diversité génétique et l'histoire évolutive des épaulards du large, afin de déterminer s'ils constituent une population relique d'une population plus grande dans le passé, et de surveiller la tendance au fil du temps Faible Lacunes dans les connaissances – Restrictions et vulnérabilités naturelles
1 1-4. Préciser l'étendue de la menace pour la population d'épaulards du large. Affiner les connaissances sur la biologie générale, la physiologie, les charges en pathogènes et le profil pathogène des épaulards du large Faible, jusqu'à ce que des préoccupations au sujet de la menace soient confirmées. Lacunes dans les connaissances – Restrictions et vulnérabilités naturelles
Contaminants de l'environnement
1 1-5. Déterminer la source ou la cause de cet état de la dentition et si elle présente un risque réel de restriction, menace ou vulnérabilité pour les épaulards du large Faible Lacunes dans les connaissances – Restrictions et vulnérabilités naturelles
1 1-6. Étudier l'étendue de la menace d'échouement pour la population d'épaulards du large Faible Perturbations acoustiques
Perturbations physiques
Restrictions et vulnérabilités naturelles
1 1-7. Mieux comprendre comment le changement climatique peut avoir une incidence, directe ou indirecte, sur les épaulards du large Moyenne Changement climatique
2 2-1. Mieux connaître et comprendre l'écologie de l'alimentation des épaulards du large Élevée Disponibilité des proies
2 2-2. Déterminer les principales espèces de proies, et mieux connaître les populations de proies, leur abondance et leurs aires de répartition Élevée Disponibilité des proies
2 2-3. Examiner les impacts potentiels de la limitation des proies sur les épaulards du large et la probabilité de réalisation de ces impacts Élevée Disponibilité des proies
2 2-4. Évaluer les répercussions découlant des modifications de la dynamique de l'écosystème sur la population d'épaulards du large Faible Changement climatique
Restrictions et vulnérabilités naturelles
Disponibilité des proies
3 3-1. Élaborer et mettre en œuvre une réglementation, des lignes directrices, des désignations de sanctuaires et d'autres mesures en vue de réduire ou d'éliminer les perturbations acoustiques sur les épaulards du large.Il n'est pas possible Élevée Perturbations acoustiques
3 3-2. Déterminer les valeurs de référence associées aux profils du bruit ambiant et anthropique et surveiller les sources du bruit et les changements qui surviennent dans l'exposition des épaulards du large au bruit sous-marin Élevée Perturbations acoustiques
3 3-3. Déterminer les effets à court et à long terme de formes de perturbation chroniques et immédiates, notamment le bruit, sur la physiologie, l'alimentation et le comportement social des épaulards du large Élevée Perturbations acoustiques
3 3-4. Élaborer et mettre en œuvre une réglementation, des lignes directrices, des désignations de sanctuaires et d'autres mesures en vue de réduire ou d'éliminer les perturbations physiques sur les épaulards du large Moyenne Perturbations physiques
3 3-5. Déterminer les effets à court et à long terme de formes de perturbation chroniques et immédiates, notamment les bateaux, sur la physiologie, l'alimentation et le comportement social des épaulards du large Moyenne Perturbations physiques
4 4-1. Étudier les effets des polluants chimiques et biologiques sur la santé et la capacité de reproduction des épaulards du large à l'aide d'études scientifiques sur les individus en liberté et les individus en détresse Élevée Contaminants de l'environnement
4 4-2. Surveiller les niveaux de polluants chimiques et biologiques chez les épaulards du large, leurs proies et leur habitat Élevée Contaminants de l'environnement
4 4-3. Recenser et classer par ordre de priorité les sources des principaux polluants chimiques et biologiques qui touchent les épaulards du large et leur habitat Élevée Contaminants de l'environnement
4 4-4. Réduire l'introduction dans l'environnement de pesticides et d'autres produits chimiques qui pourraient nuire à la santé des épaulards du large ou de leurs proies au moyen de mesures comme des accords municipaux, provinciaux, nationaux et internationaux, l'éducation, la réglementation et l'application de la loi Élevée Contaminants de l'environnement
4 4-5. Atténuer les impacts des polluants « hérités » utilisés maintenant et autrefois dans l'environnement Élevée Contaminants de l'environnement
4 4-6. Réduire l'introduction de polluants biologiques, y compris d'agents pathogènes et d'espèces exotiques, dans les habitats des épaulards du large et de leurs proies Élevée Contaminants de l'environnement
5 5-1. Relever les principales zones d'alimentation et les autres habitats essentiels qu'utilisent les épaulards du large Élevée Disponibilité des proies
5 5-2. Protéger l'accès des épaulards du large à leur habitat essentiel Élevée Perturbations physiques
5 5-3. Encourager la collaboration transfrontalière dans la détermination et la protection de l'habitat essentiel Élevée Perturbations acoustiques

j « Priorité » reflète le degré auquel l'approche contribue directement au rétablissement de l’espèce ou est un précurseur essentiel à une approche qui contribue au rétablissement de l'espèce.

7 Habitat essentiel

7.1 Désignation de l’habitat essentiel de l’espèce

Il n'est pas possible de désigner l'habitat essentiel de l'épaulard du large pour le moment compte tenu de l'information actuellement disponible. Plus précisément, on manque d'information sur la répartition saisonnière de l'épaulard du large dans les eaux côtières extérieures et sur les proies qui peuvent déterminer la qualité de leur habitat (Ford et al. 2014). Le calendrier des études souligne les recherches requises pour déterminer l'habitat essentiel.

La désignation de l'habitat essentiel pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition sera abordée dans une version modifiée du présent programme de rétablissement.

7.2 Calendrier des études visant à désigner l’habitat essentiel

Des données à haute résolution sur la répartition saisonnière des épaulards du large, ainsi qu’une bonne compréhension des raisons pour lesquelles ils sont présents dans ces zones durant ces périodes, sont nécessaires pour déterminer leur habitat essentiel. Les activités décrites ci-dessous visent à répondre à ces besoins, dans le but de trouver au moins une partie de l’habitat essentiel de l’espèce pour l’inclure dans le ou les prochains plans d’action.

Tableau 3. Calendrier des études visant à désigner l’habitat essentiel
Description de l’activité Justification Échéancier

Poursuivre, dans les eaux intérieures et extérieures de la côte, les relevés par bateau, en concentrant les efforts sur les endroits que l’on pense que les épaulards du large occupent, en permettant :

  1. l’identification photographique;
  2. la collecte de fragments de proies et de matières fécales;
  3. les prélèvements par biopsie;
  4. les enregistrements acoustiques.

Les relevés par bateaux augmentent l’effort de collecte de données, en éclairant les analyses de la répartition et en permettant une meilleure compréhension des habitats confirmés et potentiels.

L’identification photographique d’individus permet d’étudier la démographie, la dynamique et l’abondance de la population.

La collecte de fragments de proies et de matières fécales est nécessaire pour les études du régime alimentaire, afin de déterminer l’importance et la qualité de chaque espèce de proie.

L’échantillonnage par biopsie permet de procéder à des études génétiques et à des analyses des concentrations de contaminants, des acides gras et des isotopes stables.

Les enregistrements acoustiques permettent : de déterminer les sous-ensembles de la population; de savoir si les sous-ensembles utilisent l’aire de répartition différemment et de comprendre pourquoi; d’établir un lien entre les sons et l’état; de déterminer le rôle des vocalisations dans le comportement de quête de nourriture et la structure sociale.

Cinq ans, puis de façon régulière.
Déployer des dispositifs de surveillance acoustique à distance, et utiliser les enregistrements en temps réel, les observatoires câblés et autres nouvelles technologies opportunistes déployées (p. ex. planeurs océaniques). Pour surveiller les épaulards du large toute l’année afin d’établir la saisonnalité de leurs activités, aider à peaufiner la conception des relevés par bateaux et obtenir une quantification de base du bruit présent dans les habitats clés. Trois ans, puis de façon régulière.
Déployer des étiquettes (p. ex. émetteurs satellitaires, enregistreurs d’aspiration) sur les épaulards du large. Pour faciliter l’interception des épaulards du large par des navires de recherche, afin de contribuer à la collecte de données et accroître la compréhension de l’habitat occupé ou potentiel, la compréhension des déplacements à petite et à grande échelle et le comportement de plongée. Cinq ans, puis de façon régulière.
Recueillir des données sur les principales espèces de proies des épaulards du large des eaux canadiennes du Pacifique; étudier la répartition essentielle, les déplacements et les populations, en plus d’évaluer les stocks, dans la mesure du possible, y compris analyser les données existantes qui n’ont pas encore été étudiées et toutes les nouvelles données recueillies. Pour mieux comprendre la répartition, les densités, les déplacements et les états des populations des espèces de proies clés, ainsi que les facteurs qui influent sur leur répartition et leur disponibilité (p. ex. processus océanographiques). Cinq ans, puis de façon régulière.

8 Mesure des progrès

Les indicateurs de rendement présentés ci-après permettent de définir et de mesurer les progrès accomplis relativement à l’atteinte des objectifs en matière de population et de répartition.

9 Énoncé sur les plans d'action

Un ou plusieurs plans d’action visant à mettre en œuvre le présent programme de rétablissement seront élaborés dans les cinq ans suivant la publication de la version définitive du programme de rétablissement dans le Registre public des espèces en péril. Dans la mesure du possible, les efforts de rétablissement de cette population au Canada seront coordonnés avec les mesures mentionnées dans d'autres programmes de rétablissement, plans d’action ou plans de gestion de la LEP pour les mammifères marins.

Références

Annexe A : effets sur l'environnement et les autres espèces

Une évaluation environnementale stratégique (EES) est effectuée pour tous les documents de planification du rétablissement en vertu de la LEP, conformément à La directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes. Ce type d’évaluation vise à intégrer des considérations environnementales dans l’élaboration de politiques publiques, de plans et de propositions de programme pour appuyer une prise de décision éclairée en matière d’environnement et évaluer si les résultats d’un document de planification du rétablissement peuvent avoir des répercussions sur certains éléments de l’environnement ou sur les objectifs et les cibles de la Stratégie fédérale de développement durable (SFDD).

La planification du rétablissement vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est toutefois reconnu que des programmes peuvent entraîner des effets environnementaux non voulus au-delà des avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient compte directement de tous les effets environnementaux, en s’attachant particulièrement aux impacts possibles sur les espèces ou les habitats non ciblés. Les résultats de l’évaluation environnementale stratégique sont directement intégrés au programme lui-même, mais sont également résumés ci-après dans le présent énoncé.

Le présent programme de rétablissement sera manifestement bénéfique pour l’environnement en favorisant le rétablissement des épaulards du large, car le maintien de la biodiversité dans les eaux canadiennes du Pacifique contribue à favoriser la résilience de divers écosystèmes du Pacifique Nord. À ce titre, le présent programme de rétablissement contribue de façon positive à la Stratégie fédérale de développement durable (SFDD) : Thème III (Protéger la nature et les Canadiens); Objectifs 4 (Conserver et restaurer les écosystèmes, la faune et l’habitat, et protéger les Canadiens) et 5 (Ressources biologiques); et Cibles 4.1 (Espèces en péril), 4.4 (Améliorer la santé des parcs nationaux), 4.5 (Écosystèmes marins) et 5.1 (Pêches durables). Les activités particulières inscrites dans le programme de rétablissement peuvent également contribuer : au Thème II (Maintenir la qualité et la disponibilité de l’eau); à l’Objectif 3 (Qualité de l’eau et quantité d’eau); et aux Cibles 3.8 (Pollution des mers – déversements de polluants nocifs), 3.9 (Pollution des mers – l’immersion en mer), 3.10 (Paramètres de rendement agroenvironnemental) et 3.11 (Effluents des eaux usées et industrielles).

Étant donné les menaces communes et la similarité des techniques utilisées pour combler les lacunes dans les connaissances et enrichir les connaissances actuelles, de nombreuses activités contenues dans ce programme pourraient profiter à d’autres mammifères marins et aux tortues de mer. Elles pourraient également appuyer les initiatives de planification du rétablissement pour ceux de ces animaux qui sont des espèces en péril.

La possibilité que ce programme de rétablissement ait des effets négatifs non voulus sur l’environnement et d’autres espèces a été prise en compte. L’EES a permis de conclure que le programme de rétablissement apporte des avantages nets importants pour l’environnement et pour d’autres espèces et n’entraînera pas effets néfastes importants. Les effets bénéfiques de l’utilisation d’avions et de navires pour mener les recherches dépassent les effets néfastes relativement minimes du recours à ces plateformes de recherche selon chaque stratégie de rétablissement aux fins de respect du thème général de la SFDD : Réduire l’empreinte environnementale – en commençant par le gouvernement (Thème IV), et en ce qui a trait à la pollution de l’air (Thème I, Objectif 2), à la qualité de l’eau (Thème II, Objectif 3) ainsi qu’au bruit et aux perturbations anthropiques liés à la présence de navires.

Annexe B : registre des initiatives de collaboration et de consultation

L'épaulard du large (Orcinus orca) a été inscrit en tant qu'espèce menacée à l'annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) en 2011. Le ministre des Pêches et des Océans et de la Garde côtière et le ministre de l'Environnement et du Changement climatique sont les ministres compétents en vertu de la Loi sur les espèces en péril pour l'épaulard du large et ont préparé ce programme, conformément à l'article 37 de la Loi sur les espèces en péril.

En mars 2013, le MPO a organisé un atelier technique pour obtenir des commentaires sur la version préliminaire du programme de rétablissement et veiller à ce que le document intègre l'expertise technique et scientifique la plus solide possible sur cette espèce. Des représentants de Pêches et Océans Canada, de Transports Canada, de Parcs Canada, du ministère de la Défense nationale, de la province de la Colombie-Britannique, de la National Oceanic and Atmospheric Administration, de l'Aquarium de Vancouver, du B.C. Cetacean Sightings Network, de Hemmera, de la Sea Mammal Research Unit et de la North Gulf Oceanic Society ont assisté à l'atelier.

Les consultations sur la version préliminaire du programme de rétablissement se sont tenues entre le 26 mars et le 27 avril 2015. Les activités de consultation ont comporté :

Nous avons reçu six formulaires de commentaires et deux lettres. Le cas échéant, tous les commentaires reçus ont été pris en compte dans le programme de rétablissement proposé.

La publication du programme de rétablissement proposé sur le Registre public des espèces en péril a demandé la participation d'autres intervenants, des Premières nations et du public pour une période de commentaires publics de 60 jours du 5 avril au 4 juin 2018. Aucun commentaire n'a été reçu pendant cette période. aucun changement n'a été apporté par la suite à la stratégie de rétablissement de l'épaulard de l'océan lors de sa finalisation.

Annexe C : équipes ayant contribué à l'élaboration du présent programme de rétablissement

Équipe de rétablissement de l’épaulard du large de 2012 à 2015

Robin Abernethy — Pêches et Océans Canada, Station biologique du Pacifique
Heather Bettger — Pêches et Océans Canada, Tofino
Paul Cottrell — Pêches et Océans Canada, Vancouver
Doug Cowen — Pêches et Océans Canada, Queen Charlotte City
Graeme Ellis — Pêches et Océans Canada, Station biologique du Pacifique
John Ford — Pêches et Océans Canada, Station biologique du Pacifique
Pippa Shepherd — Agence Parcs Canada, Vancouver
Eva Stredulinsky — Pêches et Océans Canada, Station biologique du Pacifique
Jonathan Thar — Pêches et Océans Canada, Vancouver
Bob Tupniak — Pêches et Océans Canada, Bella Coola

Participants à l’atelier technique des épaulards du large de 2013

Sandy Argue
Ken Balcomb
Paul Cottrell
Volker Deecke
John Durban
Graeme Ellis
John Ford
Bud Graham
Annely Greene
Alex Grzybowski (animateur)
Marty Haulena
Jackie King
Jeanette LaPointe
Sarah Miller (rapporteuse)
Chad Nordstrom (rapporteur)
Stephen Raverty
Hawsun Sohn
Danielle Smith
Eva Stredulinsky
Renny Talbot
Jonathan Thar
Nat Tollit
Jared Towers
Bob Tupniak
Svein Vagel
Emily Watson (rapporteuse)
Rob Williams
Harald Yurk

*Avis et avertissement : Le MPO n'est pas responsable de la qualité des renseignements, produits ou services offerts par les sites Internet mentionnés plus haut. Les utilisateurs doivent aussi reconnaître que les renseignements provenant de sources externes ne sont disponibles que dans la langue d'origine.

 

Détails de la page

Date de modification :