Plan de gestion de la réserve nationale de faune du Ruisseau-Portobello: chapitre 2


2 Ressources écologiques

2.1 Habitats terrestres et aquatiques

La flore de la réserve nationale de faune (RNF) du Ruisseau-Portobello est celle d’une région de basses terres ayant un microclimat chaud. La réserve renferme un large éventail de terres humides : forêt de plaine d’inondation, marécage arbustif, cariçaie, baissière boisée, marais ouvert et eaux libres à la végétation partiellement submergée dense (figures 8 et 9). La grande superficie boisée de la RNF du Ruisseau-Portobello est dominée par l’érable argenté (Acer saccharinum), le bouleau à papier (Betula papyrifera), le chêne rouge (Quercsus rubra), l’orme d’Amérique (Ulmus american), le bouleau jaune (Betula lutes), l’épinette rouge (Picea rubra), l’épinette noire (Picea mariana) et le sapin baumier (Abies balsamea). Le tapis végétal sous le couvert forestier est en général clairsemé par suite du retard du développement causé par les crues printanières. La fougère-plume-d’autruche - l’iconique « tête-de-violon » - et l’onoclée sensible (Pteretis penslyvanica) couvrent de grandes étendues dans cet habitat (figure 10).

La plus grande partie du tapis végétal des marécages arbustifs est formée de cassandres caliculés (Chamaedaphne calyculata), de spirées à larges feuilles (Spirea latifolia), de myriques baumiers (Myrica gale) et d’aulnes rugueux (Alnus rugosa). Le trèfle d’eau (Menyanthes trifoliata), le calla des marais (Calla palustris) ainsi que divers carex et graminées peuvent être observés dans l’eau stagnante de ces marécages. Les baissières boisées sont confinées aux rives et aux îles des ruisseaux Portobello et Noonan. Ces terres humides ouvertes sont caractérisées par des tapis denses de graminées et de carex dans lesquels pousse un couvert clairsemé d’aulnes et de saules (Hinds, 1983; Blaney, 2003; Deichmann, 2004).

Dans les zones de marais, la végétation émergente est dominée par les carex (Carex spp.), les scirpes (Scirpus spp.), le riz sauvage (Zizania aquatica), la pontédérie cordée (Pontederia cordata) et le trèfle d’eau. La calamagrostide du Canada (Calamagrostis canadensis) et la spartine pectinée (Spartina pectinata) dominent aussi à certains endroits. Les plantes presque complètement submergées dominantes dans les zones de marais sont la cornifle nageante (Ceratophyllum demersum) et les myriophylles (Myriophyllum spp.). Parmi les autres plantes presque submergées et à feuilles flottantes communes, il y a les lentilles d’eau (Lemna minor) et (Spirodella polyrhiza), les utriculaires (Utricularia spp.), les potamots (Potomageton spp.), le nymphéa odorant (Nymphea odorata), les nénuphars (Nuphar spp.) et l’élodée du Canada (Elodea canadensis).

Compte tenu d’une telle diversité de terres humides, il n’est pas surprenant que cette réserve compte une grande variété de libellules et de demoiselles, dont 61 espèces ont été observées (Brunelle, 2011).

Figure 8 : Eaux libres et terres humides bordées d’arbres caractéristiques de la RNF du Ruisseau-Portobello.
Photo de eaux libres et terres humides
Photo : L. Wilson © Environnement et Changement climatique Canada, 2012

 

Figure 9 : Calmes eaux d’amont de la RNF du Ruisseau-Portobello.
Photo de calmes eaux d’amont de la RNF du Ruisseau-Portobello
Photo : C. MacKinnon © Environnement et Changement climatique Canada, 2011

 

Figure 10 : Forêt de plaine d’inondation caractéristique de la RNF du Ruisseau-Portobello.
Photo de forêt de plaine d’inondation caractéristique de la RNF du Ruisseau-Portobello
Photo : C. MacKinnon © Environnement et Changement climatique Canada, 2011

 

2.2 Faune

2.2.1 Oiseaux

Les terres humides du ruisseau Portobello offrent un habitat de reproduction de qualité pour la sauvagine (Carter, 1952; Prince, 1965; Wright, 1967; Whitman, 1968). L’espèce reproductrice la plus commune est le canard noir (Anas rubripes), bien que d’autres oiseaux aquatiques, comme le canard colvert (Anas platyrhynchos), la sarcelle à ailes bleues (Anas discors), le canard d’Amérique (Anas americana), le canard branchu (Aix sponsa), le fuligule à collier (Aythya collaris) et le garrot à œil d’or (Bucephala clangula) y nichent souvent aussi. D’autres espèces de canards, comme la sarcelle à ailes vertes (Anas carolinensis), le canard souchet (Anas clypeata), le canard pilet (Anus acuta), le harle couronné (Lophodytes cucullatus) et le grand harle (Mergus merganser), fréquentent régulièrement la réserve. La bernache du Canada (Branta canadensis) s’y arrête pendant la migration printanière.

La composition des espèces de sauvagine fluctue selon les populations de migrants qui traversent la réserve. Le canard noir et le garrot à œil d’or sont les premiers à arriver au printemps. Le nombre d’oiseaux aquatiques atteint un sommet à la mi-avril et, la première semaine de mai, il ne reste que des oiseaux nicheurs. Le canard branchu, le fuligule à collier et la sarcelle à ailes bleues arrivent pendant la première semaine d’avril, mais leur nombre n’est maximal qu’à la fin du mois. Ces espèces ne nichent en général pas avant mai, après que le niveau de la crue printanière a baissé. Pendant la migration d’automne, en septembre, des canards branchus, des sarcelles à ailes bleues, des canards noirs et des fuligules à collier arrivent en grand nombre. Le canard branchu et la sarcelle à ailes bleues partent en général à la mi-septembre, tandis que d’autres espèces ne s’en vont pas avant octobre et novembre.

Les gros arbres feuillus des peuplements anciens de la plaine d’inondation, comme l’érable argenté et l’orme d’Amérique, sont essentiels pour les espèces qui nichent dans les cavités, comme le canard branchu, le harle couronné et le garrot à œil d’or. La perte de bon nombre de vieux ormes, tués par la maladie hollandaise de l’orme, a considérablement limité le nombre de cavités que peuvent utiliser ces oiseaux (Johnsen, 1992).

De nombreux autres oiseaux aquatiques utilisent la réserve, surtout pendant la période de reproduction. Il y a un nid occupé de pygargue à tête blanche (Haliaeetus leucocephalus) sur l’île French et plusieurs nids de balbuzards pêcheurs (Pandion haliaetus) dans le réseau hydrographique du ruisseau Portobello. Le grèbe à bec bigarré (Podilymbus podiceps), le plongeon huard (Gavia immer), la marouette de Caroline (Porzana Carolina), le butor d’Amérique (Botaurus lentiginosus), le chevalier grivelé (Actitis macularius) et le martin-pêcheur d’Amérique (Megaceryle alcyon) comptent parmi les autres oiseaux des terres humides fréquemment observés. Le grand héron (Ardea herodius), la guifette noire (Chlidonias niger) et la sterne pierregarin (Sterna hirundo) sont fréquemment vus en train de se nourrir dans les marais ouverts.

La bécassine des marais (Gallinago gallinago) niche dans les marais et la bécasse des bois (Scolopax minor) et la gélinotte huppée (Bonasa umbellus) se reproduisent dans les zones boisées. Parmi les autres oiseaux terrestres qui utilisent la réserve pendant la migration ou la période de nidification, il y a la crécerelle d’Amérique (Falco sparverius), le buzard Saint-Martin (Circus cyaneus), la petite buse (Buteo platypterus), le grand-duc d’Amérique (Bubo virginianus), la chouette rayée (Strix varia), l’engoulevent d’Amérique (Chordeiles minor) et divers pics, en particulier le grand pic (Dryocopus pileatus). De nombreuses espèces d’oiseaux chanteurs, comme l’hirondelle bicolore (Tachycineta bicolor), la grive fauve (Catharus fuscescens), la paruline jaune (Setophaga petechia) et la paruline masquée (Geothlypis trichas), nichent et s’alimentent dans les divers habitats.

2.2.2 Mammifères

La présence de 35 espèces de mammifères a été consignée dans la RNF du Ruisseau-Portobello. L’orignal (Alces alces) et le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus) sont couramment présents en été dans le complexe du ruisseau Portobello (figures 11 et 12). Les orignaux utilisent les buttes arbustives près de l’eau pendant la mise bas printanière et sont souvent obligés de se réfugier en terrain plus élevé lorsque les terres humides sont inondées. Il y a des cerfs dans les peuplements de feuillus et les aires en régénération de la RNF. Tous les animaux à fourrure fréquemment rencontrés dans la province, dont le castor (Castor canadensis), le rat musqué (Ondatra zibethicus), le raton laveur (Procyon lotor) et le coyote (Canis latrans), fréquentent la réserve (Dilworth, 1966). Le vison (Mustela erminea), la loutre de rivière (Lutra canadensis), le renard roux (Vulpes vulpes), le pékan (Martes pennanti), le lièvre d’Amérique (Lepus americanus) et le porc-épic (Erethizon dorsatum), sont également présents. Parmi les petits mammifères communs, il y a le tamia rayé (Tamias striatus), l’écureuil roux (Tamiasciurus hudsonicus), l’écureuil gris (Sciurus carolinensis) et la souris sylvestre (Peromyscus maniculatus). Les zones de feuillus fournissent un habitat pour la petite chauve-souris brune (Myotis lucifugus) et la pipistrelle de l’Est (Perimyotis subflavus) [Banfield, 1974].

Figure 11 : Cerf de Virginie traversant une terre humide dans le cours supérieur du ruisseau Portobello, RNF du Ruisseau-Portobello.
Photo de cerf de Virginie traversant une terre humide
Photo : L. Wilson © Environnement et Changement climatique Canada, 2012

 

Figure 12 : Orignal mâle, RNF du Ruisseau-Portobello.
Photo de orignal mâle
Photo : A. Macfarlane © Environnement et Changement climatique Canada, 1996

 

2.2.3 Reptiles et amphibiens

Toute la réserve fournit un excellent habitat aux reptiles et aux amphibiens. La RNF du Ruisseau-Portobello en compte au moins neuf espèces, comme la grenouille verte (Rana clamitans), la rainette crucifère (Hyla crucifer), le crapaud d’Amérique (Bufo americanus) et la grenouille léopard (Rana pipiens). Les autres espèces qui devraient être présentes sont la salamandre à points bleus (Ambystoma laterale), le triton vert (Notophthalmus viridescens), la salamandre rayée (Plethodon cinereus), la grenouille du Nord (Rana septentrionalis), la tortue des bois (Clemmys insculpta), la couleuvre rayée des Maritimes (Thamnophis sirtalis), la couleuvre à collier (Diadophis punctatus), la couleuvre verte (Opheodrys vernalis) et la couleuvre à ventre rouge (Storeria occipitomaculata). Les tortues peintes (Chrysemys picta) sont très communes et il existe une mince possibilité que la rainette versicolore (Hyla versicolor) soit présente dans la réserve, puisqu’un certain nombre d’individus de cette espèce ont été repérés dans la région de Fredericton (Brannen, 2004).

2.2.4 Poissons

Le brochet maillé (Esox niger), le baret (Morone americana) et la perchaude (Perca flavescens) frayent au printemps dans les marais inondés. Ces espèces sont souvent prises par les pêcheurs à la ligne tout au long de l’année et surtout pendant la saison de la pêche sous la glace. Dans les eaux avoisinant les zones de marais, les espèces de poissons importantes sur les plans économiques ou récréatifs sont le gaspareau, l’anguille d’Amérique (Anguilla rostrata) et l’achigan à petite bouche (Micropterus dolomieu). Le gaspareau (utilisé comme appât pour le homard) et l’anguille d’Amérique sont pêchés commercialement dans le réseau du ruisseau Portobello.

2.3 Espèces en péril

On trouve des noyers cendrés (Juglans cinerea), une espèce préoccupante inscrite en vertu de la Loi sur les espèces en péril , dans la RNF du Ruisseau-Portobello. Cette espèce est présente sporadiquement dans toute la plaine d’inondation du cours inférieur du fleuve Saint-Jean. L’assemblage le plus proche de noyers cendrés digne de mention se trouve sur l’île Gilbert avoisinante (tableau 3).

Un seul adulte de gomphe ventru (Gomphus ventricosus), espèce considérée par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada comme en voie de disparition, a été trouvé dans la RNF en 2004, mais l’espèce n’a pas été observée au cours des relevés plus récents, en 2009.

Tableau 3 : Espèces en péril dans la RNF du Ruisseau-Portobello
Espèce Noms commun et scientifique de l’espèce Statut :
Canada
LEPnotea
Statut :
Canada
COSEPACnoteb
Statut :
Nouveau-Brunswick
Classification à l’échelle provincialenotec
Présence ou potentiel de présencenoted
Oiseaux Hirondelle rustique
Hirundo rustica
Aucun statut Menacée Aucun statut Présence probable
Oiseaux Paruline du Canada
Wilsonia canadensis
Menacée Menacée Aucun statut Présence probable
Oiseaux Martinet ramoneur
Chaetura pelagica
Menacée Menacée Aucun statut Présence probable
Oiseaux Engoulevent d’Amérique
Chordeiles minor
Menacée Menacée Aucun statut Présence probable
Oiseaux Râle jaune
Coturnicops noveboracensis
Préoccupante Préoccupante Aucun statut Présence probable
Plantes vasculaires Noyer cendré
Juglans cinerea
Préoccupante Préoccupante Aucun statut Présence confirmée
Arthropodes Monarque
Danaus plexippus
Préoccupante Préoccupante Aucun statut Présence probable
Arthropodes Gomphe ventru
Gomphus ventricosus
Aucun statut En voie de disparition - Présence confirmée

 

2.4 Espèces envahissantes

On rencontre des espèces de poissons envahissantes, comme le maskinongé (Esox masquinongy) et l’achigan à petite bouche (Micropterus dolomieu), dans le réseau du ruisseau Portobello; de plus, le rejet ou l’expansion de poissons illégaux ou exotiques sont préoccupants en raison des incidences qu’ils pourraient avoir sur les populations de poissons indigènes et sur la dynamique du réseau trophique. Une espèce végétale envahissante, la salicaire pourpre, est présente, mais n’occupe pas encore de grandes superficies de terres humides.

Détails de la page

2017-09-10