Le ministre Mendicino s’adresse au Canadian Club
Discours
L’honorable Marco E.L. Mendicino C.P., député
Le 28 février 2020
Canadian Club
Hôtel Fairmont Royal York, 100, rue Front Ouest
Toronto (Ontario)
Bonjour tout le monde.
Merci, Bruce.
En tant que journaliste, je ne peux vous dire à quel point je suis reconnaissant pour cette présentation inhabituellement brève. Je souhaite également souligner que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel de la Première Nation des Mississaugas de Credit et des Haudenosaunee, et vous remercier de nous avoir rappelé le fait important que nous partageons effectivement ces terres et de nous permettre d’entreprendre ces travaux comme il se doit.
C’est un plaisir de vous voir tous et toutes. J’ai l’impression de connaître quelques-uns d’entre vous.
Au cours des 75 prochaines années, le Canada devrait être l’étoile qui attirera tous les amants du progrès et de la liberté. Certains parmi vous vivrez assez longtemps pour voir la population de notre pays franchir le cap des 60 millions d’habitants. Qui aurait cru que Sir Wilfrid Laurier allait être considéré comme un visionnaire lorsqu’il a prononcé ces mots en 1904 au Massey Hall, près d’ici? Personne.
À l’époque, ce calcul tenait la route, mais 116 ans plus tard, nous savons que même si les prédictions de Laurier étaient légèrement inexactes, sa perspective à long terme était juste, à une différence près : de nos jours, notre croissance n’est plus un luxe ni même un choix. En 2020, l’avenir du Canada repose sur l’immigration.
C’est pourquoi nous allons devoir entreprendre un dialogue qui changera fondamentalement notre façon de percevoir l’immigration. Nous nous demandons beaucoup trop souvent « quel est le seuil à ne pas dépasser? » Mais est-ce la bonne question à poser? Les taux de naissance sont à la baisse, le nombre de départs à la retraite explose, et l’espérance de vie n’a jamais été aussi élevée.
Malgré nos politiques progressives comme l’Allocation canadienne pour enfants, qui contribue à la croissance de centaines de milliers de familles, nous n’arriverons pas à renverser la vapeur pour rajeunir ni même renouveler notre population dans un avenir rapproché.
La question que nous devons nous poser n’est donc pas « quel est le seuil à ne pas dépasser? », mais « combien de personnes devons-nous accueillir pour garantir la prospérité du Canada, renouveler notre main-d’œuvre, attirer des talents de partout dans le monde, respecter nos engagements en matière de soins de santé et de retraite, et doter notre vaste et magnifique pays d’une population diverse? »
Notre gouvernement n’arrivera pas seul à réussir le virage nécessaire. Nous avons besoin de vous et de vos idées.
Vous, les chefs d’entreprise, les chefs des syndicats, les professionnels, des partenaires dans cette salle avez un rôle incroyablement important à jouer dans cette conversation.
C’est pourquoi je suis emballé d’être ici, non seulement pour faire mon discours – et croyez-moi, mon épouse Diana est là pour m’empêcher de m’éterniser, je l’en remercie – mais de communiquer avec vous et d’apprendre ce que vous savez, parce qu’accueillir nous fait grandir. Nous devons relever certains défis en tant que population, mais nous pourrons relever ces défis au moyen de politiques d’immigration efficaces, dans la mesure où nous comprenons quelques tendances démographiques importantes.
Nous avons franchi une étape importante en 2016. Pour la première fois de notre histoire, les Canadiens âgés de plus de 65 ans étaient plus nombreux que les Canadiens âgés de moins de 15 ans. Aujourd’hui, le pays compte 6,5 millions d’habitants de plus de 65 ans, soit environ 17 % de notre population. De 2011 à 2046, le pourcentage de la population canadienne de plus de 75 ans passera de 7 % à 14,5 %, soit plus du double. L’espérance de vie moyenne au Canada est maintenant de 82,5 ans. En 1960, elle n’était que de 71 ans. D’ici 2036, le nombre de personnes âgées pourrait se situer entre 9,9 et 10,9 millions.
En combinant ces chiffres à notre taux de fécondité de 1,54 %, deux conclusions simples et inéluctables s’imposent : nous vivons plus longtemps et n’avons plus assez d’enfants. Aussi, les Canadiens prennent leur retraite plus tôt. Selon Statistique Canada, l’âge moyen du départ à la retraite était de 64 ans en 2019. Voyons quelques faits qui illustrent la tendance en matière de départs à la retraite.
En 1971, il y avait 15 personnes âgées pour 100 personnes en âge de travailler. Aujourd’hui, le ratio est de 25 personnes âgées pour 100 personnes en âge de travailler, soit environ 4 travailleurs pour chaque retraité. En 2036, on prévoit qu’il y aura 39,5 personnes âgées pour 100 travailleurs. En 2056, il n’y aura que deux travailleurs pour chaque retraité. Qu’est-ce qui explique cette baisse rapide?
En gros, les baby-boomers. Les 9,6 millions de Canadiens nés entre 1946 et 1965 quittent la population active et continueront de le faire par vagues. Nos parents…
Mon père est ici lui aussi. Bonjour papa, comment vas-tu?
Désolé, ce n’était pas prévu.
Si vous avez des grands-parents, remerciez-les et bénissez-les parce qu’ils ont mérité leur retraite, mais cette tendance se traduit par une pression accrue sur les fonds publics parce qu’une portion réduite de la population doit, par ses contributions à la source, financer les régimes de retraite, les soins de santé, le système d’éducation, l’assurance-emploi et d’autres besoins essentiels en infrastructure.
Cette accélération des départs à la retraite survient également dans un contexte de faibles taux de chômage et de pénuries de main-d’œuvre de plus en plus marquées. Selon un rapport de la Banque de développement du Canada publié en 2018, environ 40 % des petites et moyennes entreprises canadiennes ont de la difficulté à recruter du personnel; toujours selon ce rapport, il y a un lien direct entre la pénurie de travailleurs et le ralentissement des ventes, et les turbulences sont particulièrement marquées dans les secteurs de la fabrication, du commerce au détail et de la construction.
Ironiquement, l’étude a également permis de constater que les entrepreneurs sont les moins susceptibles d’envisager d’embaucher des nouveaux arrivants au Canada.
C’est pourquoi nous devons redoubler d’efforts pour dialoguer et faire comprendre à tout le monde que la seule solution passe par l’immigration.
La compréhension des défis relatifs au vieillissement, à la retraite et aux pénuries de main-d’œuvre est révélatrice pour beaucoup de personnes, mais elle ne représente qu’une facette du problème. L’autre facette consiste à chercher des solutions. Je ne suis pas ici pour vous convaincre que l’immigration réglera tous les problèmes qui pèsent sur notre population ou notre économie, mais il s’agit d’une importante ressource dont on ne peut se passer. Les chiffres montrent qu’en ce moment, près de 80 % de la croissance de la population canadienne est attribuable à l’immigration.
Selon un rapport du Conference Board du Canada, cette proportion passera à 100 % d’ici 2033. Quel est le rôle du gouvernement fédéral dans l’élaboration des politiques qui régissent l’immigration? Je sais qu’il y a parmi vous quelques mordus de politique qui savent ce qu’est une lettre de mandat. Pour les autres, qui profitent davantage de leurs temps libres, je vous apprends que la mission principale que m’a confiée le premier ministre consiste à accueillir plus d’un million d’immigrants au cours des trois prochaines années.
C’est écrit dans la lettre. Je suis impatient de dévoiler mon plan au cours des prochaines semaines.
Je suis donc ici pour vous parler de cela, de mes priorités. Comment nous le ferons stratégiquement pour soutenir l’économie et répartir les avantages de l’immigration à travers le pays. Pour que nous réussissions vraiment il faudra le partenariat et le soutien actif de personnes comme vous.
Entre-temps, je souhaite vous donner un aperçu du rendement de l’an dernier et me concentrer sur quelques initiatives importantes qui, je l’espère, orienteront notre discussion par la suite. L’année 2019 a été marquante pour l’immigration au Canada. Nous avons accueilli environ 341 000 nouveaux immigrants, ce qui est davantage que notre objectif de 330 800.
Parmi ces immigrants, une forte majorité, soit environ 60 %, sont des immigrants de la catégorie économique. Nous avons également continué de faire des progrès au chapitre des parrainages au titre de regroupement familial et des parrainages de réfugiés. Je souhaite souligner que notre gouvernement sera toujours un chef de file en ce qui concerne la réunification des familles et la réinstallation des réfugiés. Si vous travaillez dans ce domaine, je vous remercie au nom de notre gouvernement.
Récemment, j’ai eu l’occasion de me rendre à Genève pour assister au tout premier forum mondial sur les réfugiés du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui s’est tenu à la fin de l’année dernière. Il s’agissait en fait de mon tout premier voyage à l’étranger en qualité de ministre. Je peux vous dire sans hésiter que le Canada est perçu comme la référence en matière de parrainage communautaire, ce que nous devons à notre travail dans le domaine de l’aide humanitaire.
Je n’oublierai jamais le jour où ma fille Michaela, qui n’avait que huit ans, m’a accompagné à l’aéroport international Pearson pour accueillir les premières familles syriennes. Ce fut l’un des moments les plus profondément émouvants que j’ai vécus, non seulement en tant que parlementaire, mais en tant que père, et je suis heureux d’avoir pu faire vivre cette expérience à ma fille, et je suis extrêmement fier de savoir qu’elle se souvient encore de cette expérience.
Je me souviens que c’est Diana qui m’avait suggéré d’amener notre fille. Je prends toujours de meilleures décisions quand je fais ce qu’elle me suggère. Il m’a fallu un certain temps pour le découvrir, et je la remercie. Ce n’est pas en raison du gouvernement que nous avons une si bonne réputation. Nous devons notre réputation à nos intervenants et aux milliers d’honnêtes Canadiens qui retroussent leurs manches et font le travail.
Nous devons notre réussite aux réfugiés eux-mêmes, qui ne sont pas, permettez-moi de le répéter, simplement des victimes. Nous ne devrions pas les laisser être stigmatisés de la sorte. Ce sont des médecins, des ingénieurs, des entrepreneurs, des avocats, des artistes et des musiciens. Lorsque j’ai accueilli Mustafa Aiello à titre de membre de notre délégation, c’était la première fois qu’un réfugié était invité aux Nations Unies à titre officiel.
Nous l’avons invité non seulement pour montrer notre bonne volonté, mais littéralement pour montrer au monde que les réfugiés doivent prendre part à la discussion si nous souhaitons mettre en place des partenariats efficaces en vue de leur intégration dans nos collectivités et, oui, dans notre population active. À ce sujet, permettez-moi de souligner quelques importantes réussites concernant nos voies économiques.
Premièrement, le programme Entrée express. Il s’agit de la voie rapide pour les immigrants qui possèdent les compétences et l’expérience nécessaires pour commencer à travailler dès leur arrivée. Les chiffres sont révélateurs : 95 % des participants occupent un emploi, 83 % travaillent dans leur profession principale, et 20 % touchent un salaire plus élevé que les demandeurs principaux qui ne participent pas au programme Entrée express.
Entrée express est la figure de proue de nos initiatives d’admission aux fins de l’immigration économique, mais nous obtenons d’excellents résultats ailleurs au chapitre de l’immigration économique. Mentionnons par exemple la Stratégie en matière de compétences mondiales. Cette stratégie lancée en 2017 permet aux entreprises canadiennes d’attirer les travailleurs de talent dont elles ont besoin pour réussir sur le marché mondial.
Les entreprises qui utilisent le Volet des talents mondiaux se sont engagées à créer plus de 48 000 emplois pour des Canadiens et des résidents permanents et plus de 12 500 stages rémunérés, et à investir plus de 113 millions de dollars dans les compétences et la formation. Au cours des deux premières années de la Stratégie en matière de compétences mondiales, 40 000 participants ont bénéficié d’un délai de traitement de leur demande de 14 jours, ce qui est incroyablement rapide.
Il y a quelques questions que je souhaite vous soumettre. Premièrement : « Comment pouvons-nous rehausser ce programme de façon significative? » Cette question est importante parce que ce programme est déterminant pour les employeurs. Le Programme de visa pour démarrage d’entreprise est une autre façon pour nous de soutenir les entrepreneurs qui possèdent les compétences et le potentiel nécessaires pour bâtir des entreprises novatrices au Canada qui créeront des emplois pour les Canadiens qui sont prêts à se conquérir les marchés mondiaux.
Créé à l’origine sous forme de projet pilote, il a été transformé en programme permanent en 2018. En mai 2019, plus de 650 entrepreneurs et les membres de leur famille avaient vu leur résidence permanente approuvée et ils représentent environ 200 entreprises en démarrage lancées au Canada. Enfin, le Canada a créé différents projets pilotes novateurs et axés sur la communauté qui ont pour but de répondre aux divers besoins de main-d’œuvre du pays.
Le Programme pilote d’immigration au Canada atlantique est le programme le plus avancé, et c’est littéralement le programme préféré de mes collègues de cette région du pays. Ce projet de trois ans, soutenu par les gouvernements provinciaux, les municipalités et des dirigeants d’entreprises locales, a été lancé en 2017 et avait pour objectif de voir à assurer l’installation durable et l’intégration des nouveaux arrivants dans les Maritimes et le Canada atlantique.
Depuis la création du programme, près de 3 000 résidents permanents ont été admis. Le programme connaît une progression spectaculaire, et c’est pourquoi nous nous engageons à le rendre permanent. Les tendances en matière d’établissement au Canada révèlent que les immigrants sont attirés par les centres urbains.
Toutefois, j’avoue avoir des partis pris, mais je crois qu’il y a d’incroyables occasions à saisir en dehors des grandes villes. C’est pourquoi nous avons mis en place le Programme pilote d’immigration dans les communautés rurales et du Nord. Ce programme pilote de cinq ans vise à répartir les avantages découlant de l’immigration économique dans les petites collectivités en mettant à l’essai un nouvel accès à la résidence permanente pour les immigrants qualifiés.
Je suis impatient de travailler avec mes collègues, les ministres Monsef et Chagger, pour assister aux prochaines étapes de ce programme en collaboration avec les 11 villes canadiennes sélectionnées.
Le dernier programme pilote que je mentionnerai est le Programme de candidats municipaux. Il s’agit d’un nouveau concept dans lequel notre plan consiste à puiser dans les connaissances et les perspectives locales pour que les compétences des nouveaux arrivants correspondent encore mieux aux besoins des municipalités d’une manière ciblée jamais vue auparavant.
Nous sommes toujours à l’étape des préconsultations, et je prévois collaborer étroitement avec mes homologues et les intervenants provinciaux pour préparer la mobilisation qui précédera la mise en œuvre du Programme de candidats municipaux. Toutes ces mesures prises ensemble constituent un plan d’immigration complet pour le Canada.
Tout en accordant une importance suffisante à l’immigration économique, nous continuons de promouvoir les voies par lesquelles le Canada réunit les familles et protège les personnes vulnérables. Je crois que nous sommes sur la bonne voie, mais nous ne pouvons nous permettre d’être complaisants. Le monde est de plus en plus complexe et compétitif.
Il s’agit d’une occasion à saisir pour que le Canada continue d’attirer les meilleurs candidats les plus brillants de partout dans le monde. Les gouvernements, les entreprises, les syndicats et les intervenants doivent travailler de concert pour relever les défis qui nous attendent. Nous pouvons collaborer à de nombreux chapitres, en particulier les travailleurs étrangers temporaires, les étudiants étrangers, la mobilité et la reconnaissance des titres de compétence étrangers.
J’ai très hâte que nous entreprenions ce dialogue, mais je vous demande dès maintenant de soutenir fermement l’idée selon laquelle l’immigration représente un avantage net pour le Canada. Nous le répétons sans cesse parce que le Canada est au premier rang. J’adore partager ces messages dans mes comptes Facebook et Twitter.
Notre système d’immigration est présenté par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) comme « une référence pour [les autres pays] en matière d’intégration ». Je pars en Allemagne demain pour parler de la réussite du Canada en matière d’intégration et pour échanger sur notre réussite avec un proche allié dont les vues sont similaires à celles du Canada.
L’immigration est supportée par la population tant qu’elle est considérée comme fondée sur des principes et largement bénéfique pour le pays.
Toutefois, nous devons demeurer à l’affût des dessous plus sombres de la société. Rappelons-nous l’incident récent du restaurant syrien de la famille Soufi, sur la rue Queen.
L’automne dernier, la famille El Soufi a fermé son restaurant parce qu’elle était la cible de menaces racistes et d’intimidation. Toutefois, presque du jour au lendemain, la haine a été complètement effacée par une vague d’amour et de soutien des résidants et des clients; la famille a rouvert son restaurant, et la clientèle est au rendez-vous.
Voilà le Canada dont je suis fier, et j’espère que c’est également votre cas.
En conclusion, je rappelle que le Canada est bâti sur la force de son immigration. Un certain nombre de défis nous attendent. Toutefois, grâce à une croissance et à une immigration soutenues, nous pourrons combler nos pénuries de main-d’œuvre, stimuler la croissance, créer de l’emploi, contribuer à la diversité et assurer notre avenir.
Les gouvernements ne peuvent y arriver seuls. Je m’engage à poursuivre le dialogue avec vous pour contribuer à orienter les politiques d’immigration économique du Canada de demain. Par cette collaboration, nous verrons à ce que les entreprises et les travailleurs canadiens aient accès aux ressources dont ils ont besoin pour être concurrentiels et se démarquer sur les marchés mondiaux et nous assurer de demeurer le meilleur pays au monde.
Merci.
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