Le présent rapport fournit une analyse empirique à jour de la conception des critères de sélection des immigrants économiques au Canada. L’un des objectifs clés de la sélection d’immigrants économiques par le Canada est de trouver des personnes dont les attributs en matière de capital humain permettraient d’« exploiter au maximum le potentiel à long terme des immigrants économiques dans un marché du travail de plus en plus complexe et une économie axée sur le savoir » (CIC 2010, p. 22). À l’appui de cet objectif, les auteurs du rapport examinent la mesure dans laquelle divers critères de sélection, envisagés seuls ou en combinaison avec d’autres, permettent de prédire les gains en emploi des demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique après l’obtention du droit d’établissement. Cette information est pertinente au moment d’établir le niveau de pointage correspondant à divers facteurs dans un système de sélection.
Le présent document fait suite à un rapport antérieur produit par Bonikowska, Hou et Picot (2015). Les conclusions du rapport précédent ont servi de guide technique pour le développement de l’actuel Système de classement global (SCG) utilisé pour sélectionner les immigrants économiques dans le cadre du système d’immigration Entrée express. L’étude précédente reposait sur l‘historique en matière de gains en emploi d’immigrants ayant obtenu le droit d’établissement entre 1997 et 1999 et entre 2002 et 2004.
Depuis le début des années 2000, de nombreuses nouvelles exigences de sélection ont été mises en œuvre, et les attributs des immigrants économiques ont beaucoup changé. Le Programme des candidats des provinces (PCP) a continué de grandir et a dépassé le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) [PTQF] au chapitre de l’admission d’immigrants économiques. Les immigrants admis dans le cadre du PCP tendaient à présenter un taux d’emploi et des gains en emploi supérieurs à ceux qui avaient été admis au titre du PTQF au cours des années suivant l’obtention du droit d’établissement, principalement parce que cette première catégorie affichait une plus forte proportion de personnes ayant de l’expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement au Canada (Hou, Crossman et Picot, 2020b). La catégorie de l’expérience canadienne (CEC), créée en 2008, facilite la transition des étudiants étrangers ayant de l’expérience de travail au Canada et des travailleurs étrangers temporaires vers la résidence permanente, dans certaines situations. La création de cette catégorie repose sur l’idée selon laquelle les personnes ayant déjà passé du temps au Canada avant leur immigration pourraient avoir plus de facilité à mettre à profit leur capital humain pré-immigration sur le marché du travail et, ainsi, obtenir de meilleurs résultats. L’expansion du PCP et l’instauration de la CEC sont associées à un fort accroissement de la proportion d’immigrants économiques ayant une expérience au Canada préalable à l’obtention du droit d’établissement (Hou, Crossman et Picot, 2020a)Note de bas de page 1. De plus, entre 2008 et 2014, une série d’instructions ministérielles a été mise en œuvre afin d’améliorer la réactivité des programmes d’immigration économique à une demande professionnelle perçue ainsi que de limiter le nombre de demandes. À partir de 2010, les demandeurs principaux du PTQF et de la CEC ont été soumis à des tests linguistiques obligatoires. Des modifications réglementaires apportées au PTQF sont également entrées en vigueur au milieu de 2013 en vue de renforcer les exigences linguistiques et les exigences en matière de scolarité envers les immigrants économiques, y compris de nouvelles exigences linguistiques minimales et des évaluations obligatoires des diplômes acquis à l’étranger. Ces changements allaient probablement améliorer l’appariement entre la demande sur le marché du travail et les compétences des immigrants et, par conséquent, la qualité des chiffres relatifs à la langue et aux études ainsi que leur rôle dans la prévision des gains en emploi après l’immigration.
Par comparaison à la période (1998–2010) visée par l’étude antérieure réalisée par Bonikowska, Hou et Picot (2015), la période visée par l’étude dont il est question ici a connu une conjoncture économique plus favorable. En effet, le taux de chômage national a oscillé entre 7,2 % et 8,3 % au cours de 8 des 13 années de la période de 1998 à 2010, alors qu’il a varié de 6 % à 7 % au cours de 7 des 12 années de la période de 2006 à 2017. Une conjoncture économique favorable tend à favoriser l’amélioration des résultats des immigrants sur le marché du travail.
Étant donné les importants changements apportés aux politiques et l’amélioration des conditions macroéconomiques, il y a lieu de s’interroger sur la pertinence de la comparaison des résultats empiriques par rapport à ceux obtenus par des cohortes d’immigrants antérieures. Pour assurer l’efficacité du SCG dans la sélection d’immigrants économiques, il importe de mettre à jour les données empiriques en utilisant des données plus récentes afin qu’on puisse évaluer à nouveau le rôle des facteurs de sélection et cerner tout nouveau facteur important dans la prévision des gains en emploi après l’immigration. À cette fin, le présent rapport examine les demandeurs principaux qui ont obtenu le droit d’établissement entre 2005 et 2015 ainsi que leurs gains en emploi au cours de la période de 2006 à 2017.
À l’instar de l’étude réalisée par Bonikowska, Hou et Picot (2015), les seuls facteurs étudiés ici sont ceux qui pourraient servir aux fins de la sélection d’immigrants, par exemple ceux qui sont utilisés dans le système de gestion des demandes Entrée express : le niveau de scolarité, la langue, l’âge, les années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, les années d’études au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, le fait d’avoir un conjoint et diverses caractéristiques du conjoint. Tous ces facteurs sont mesurés au moment de l’obtention du droit d’établissement. L’information relative à certains facteurs de sélection pris en compte dans l’actuel SCG, comme le fait d’avoir un emploi réservé ou des frères et sœurs au Canada, n’est pas disponible pour les cohortes étudiées aux fins du présent rapportNote de bas de page 2. Ces facteurs pourraient être examinés dans une étude future des immigrants sélectionnés au moyen du système Entrée express depuis 2015. Un nouveau facteur — les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, dont la forte incidence sur les gains en emploi après l’obtention du droit d’établissement a été démontrée dans des études récentes (Hou, Crossman et Picot, 2020a) — est également examiné dans le présent rapport.
En plus du pouvoir prédictif de ces variables, on a également prêté attention aux effets marginaux des facteurs de sélection sur les gains en emploi après l’obtention du droit d’établissement. Par exemple, quel écart observe-t-on à l’égard des gains en emploi entre les titulaires de baccalauréat et les personnes qui détiennent un diplôme d’études secondaires? Le pouvoir prédictif et les effets marginaux d’une variable sont deux questions différentes. L’une concerne l’importance relative de chaque prédicteur parmi tous les facteurs sélectionnés, alors que l’autre porte sur les écarts dans les gains en emploi entre les divers niveaux d’un facteur donné.
Données, variables et méthodes
Données
L’étude repose sur la Base de données longitudinales sur l’immigration (BDIM). Cet ensemble de données est construit en reliant les dossiers administratifs relatifs à l’admission d’immigrants et de résidents non permanents ayant un permis avec leurs dossiers fiscaux. Les données comprennent les immigrants admis au Canada depuis 1952 et les résidents non permanents ayant obtenu un permis depuis 1980 qui ont produit au moins une déclaration de revenus depuis 1982. Parmi les immigrants ayant obtenu le droit d’établissement entre 2000 et 2017 qui étaient dans la force de l’âge (de 25 à 54 ans) à ce moment-là, jusqu’à 94 % étaient associés à au moins un dossier fiscal (Statistique Canada, 2019).
La population utilisée aux fins de l’analyse réunit les immigrants qui étaient les demandeurs principaux dans le cadre de quatre programmes de la catégorie de l’immigration économique : Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), Programme des candidats des provinces, catégorie de l’expérience canadienne (CEC) et Programme des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral). Seuls les demandeurs principaux sont évalués en fonction des critères de sélection dans le système de pointage utilisé aux fins de la sélection des immigrants économiques. L’analyse est limitée aux immigrants qui étaient âgés de 20 à 54 ans l’année de l’obtention du droit d’établissement et qui affichaient des gains en emploi positifs pour l’année visée. Les immigrants économiques (demandeurs principaux) admis au moyen du système de sélection du Québec sont exclus en raison du caractère unique de ce systèmeNote de bas de page 3.
L’étude porte sur les immigrants de trois cohortes et les analyse en fonction du nombre d’années d’observation dans la BDIM : 2005–2007, 2008–2011 et 2012–2015 (voir le tableau 5 figurant en annexe pour connaître la taille des échantillons et les caractéristiques de chaque cohorte). Bien que les trois cohortes d’immigrants ayant obtenu le droit d’établissement servent à évaluer l’effet des variables liées au capital humain sur les gains en emploi à court terme (les deux années suivant l’immigration), les deux premières cohortes sont utilisées pour évaluer les effets à moyen terme (les 5 à 6 années suivant l’immigration), et seulement la première cohorte est utilisée pour évaluer les effets à long terme (les 10 à 11 années après l’immigration). L’analyse de régression ne comprend que les immigrants affichant au moins 500 $ de gains en emploi (en dollars constants de 2017) dans l’année visée.
Variables
Les gains en emploi annuels (traitements et salaires, commissions tirées de l’emploi et revenu d’un travail indépendant) pour les deux premières années complètes suivant l’obtention du droit d’établissement au Canada représentent les résultats à court terme, ceux pour les 5 à 6 années suivant l’obtention du droit d’établissement, les résultats à moyen terme, et ceux pour les 10 à 11 années suivant l’obtention du droit d’établissement, les résultats à long terme.
Les variables explicatives utilisées dans les modèles comportent certaines restrictions. Pour assurer la pertinence de l’analyse à l’égard de la politique de sélection, il importe d’inclure seulement les variables applicables au moment de l’immigration (obtention du droit d’établissement) qui pourraient servir aux fins de la sélection d’immigrants et pour lesquelles on dispose de données historiques. Par exemple, bien que l’effet important du pays source sur les gains en emploi des immigrants soit connu, le pays source ne fait pas partie du système de pointage utilisé pour la sélection des immigrants économiques, car son utilisation serait discriminatoire. Le pays source est donc exclu de la liste de variables explicatives. Son inclusion dans le modèle de régression pourrait modifier l’effet d’autres variables, comme la connaissance des langues officielles (qui est corrélée avec le pays source), au moment de prédire les gainsNote de bas de page 4.
De plus, la contribution des variables ne pouvait être évaluée qu’à l’aide de données historiques. Par conséquent, on a également limité les variables explicatives à celles qui étaient accessibles dans la meilleure source de données à cette fin, la BDIM. Compte tenu de ces contraintes, les variables explicatives utilisées, toutes traitées comme des variables discrètes et mesurées à l’obtention du droit d’établissement, sont les suivantes : âge à l’obtention du droit d’établissementNote de bas de page 5 (sept niveaux), niveau de scolarité (neuf niveaux), caractéristiques linguistiques (six niveaux), années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (six niveaux), conjoint à l’obtention du droit d’établissement, niveau de scolarité du conjoint (neuf niveaux), années d’expérience de travail au Canada du conjoint avant l’obtention du droit d’établissement (six niveaux), années d’études au Canada du conjoint avant l’obtention du droit d’établissement (sept niveaux). Le tableau 5 figurant en annexe indique les niveaux associés à ces variables. Dans l’analyse supplémentaire, le niveau des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (cinq niveaux) est également compris.
Il convient de fournir quelques explications à l’égard de quatre variables. La variable liée aux caractéristiques linguistiques combine l’information sur la langue maternelle et sur la langue officielle parlée. Cette approche permet de pleinement tirer parti des variables accessibles dans la BDIM. Dans l’actuelle SCG d’Entrée express, cependant, les capacités linguistiques de nombreux immigrants sont déterminées au moyen d’un test linguistique, approche supérieure aux mesures utilisées aux fins de l’étude. La note obtenue lors d’un test linguistique pourrait avoir une valeur supérieure à celle de la variable utilisée ici pour ce qui est de prédire les gains. Par conséquent, le pouvoir prédictif de la variable liée aux caractéristiques linguistiques pourrait être sous-estimé dans le cadre de l’étude.
Pour ce qui est des années d’expérience de travail au Canada, de nombreux immigrants ont travaillé au pays grâce à un visa temporaire avant de devenir résidents permanents et ont donc acquis de l’expérience de travail au Canada avant d’obtenir le droit d’établissement. La variable de l’expérience de travail au Canada est calculée à partir du nombre d’années où une personne affiche des gains en emploi positifs au Canada avant d’obtenir la résidence permanente.
De même, certains immigrants ont étudié au Canada grâce à un permis d’études avant de devenir résidents permanents. La variable de l’expérience d’études au Canada est calculée à partir du nombre d’années qu’une personne a détenu un permis d’études Note de bas de page 6.
Le niveau des gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement a été utilisé pour refléter la qualité de l’expérience de travail au Canada ou le niveau de compétence connexe et sert de complément aux années d’expérience de travail au Canada, qui est principalement une mesure de quantité. Il était fondé sur les gains en emploi annuels maximaux dans les 10 années qui précèdent l’obtention de la résidence permanenteNote de bas de page 7. Il était codé en cinq niveaux, établis en fonction des gains en emploi médians nationaux provenant d’un emploiNote de bas de page 8 (mesuré dans l’année qui précède l’obtention du droit d’établissement) pour tous les travailleurs âgés de 20 à 64 ans affichant des gains en emploi positifs :
pas de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement;
>0 et <= à la moitié des gains en emploi médians nationaux;
>à la moitié des gains en emploi médians nationaux et <= aux gains en emploi médians nationaux;
>aux gains en emploi médians nationaux et <= à 2* les gains en emploi médians nationaux;
>à 2* les gains en emploi médians nationaux.
Le nombre de catégories utilisées pour chacune des variables discrètes, comme le niveau de scolarité, peut influer sur la contribution de la variable au R-carré d’un modèle de régression, étant donné la méthode choisie (décrite plus bas). En général, plus une variable est précise (p. ex. plus les niveaux de scolarité sont précis), plus la variation des gains en emploi attribuable à cette variable est importante. Pour chaque variable discrète, on a utilisé dans le cadre de l’étude le nombre maximal de catégories disponibles dans les données sources, à moins qu’un tel degré de précision ne soit impossible en raison de la taille insuffisante de l’échantillon.
Méthodes
Diverses analyses de régression ont été réalisées afin de cerner les variables offrant la meilleure capacité de « prévoir» les gains en emploi des demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique. Des modèles de régression distincts (décrits plus bas) ont été établis pour les gains en emploi initiaux, les gains en emploi à moyen terme et les gains en emploi à long terme. Pour tous les modèles de régression, la variable dépendanteest le logarithme des gains en emploi annuels. Deux ensembles distincts de modèles de régression sont exécutés : le premier ensemble de modèles comprend toutes les variables explicatives décrites plus haut, sauf le niveau des gains en emploi avant l’obtention du droit d’établissement. Le deuxième ensemble de modèles de régression ajoute le niveau des gains en emploi avant l’obtention du droit d’établissement au premier ensemble.
L’analyse a pour but d’établir la mesure dans laquelle la variation des gains en emploi des demandeurs principaux est attribuable à une variable explicative. Les variables qui sont à l’origine d’une grande part de la variation des gains en emploi des immigrants sont les plus importantes lorsqu’on tente de prédire les gains en emploi d’un immigrant; celles qui engendrent peu de variation des gains en emploi sont moins importantes. L’approche la plus couramment utilisée pour déterminer les variables explicatives qui permettent le mieux de prédire la variable dépendante est la contribution de chaque variable explicative à la valeur globale du R-carré (c.-à-d. la statistique de qualité de l’ajustement) dans une équation de régression (Nathans et coll., 2012)Note de bas de page 9. La statistique du R-carré permet de mesurer la part de la variation globale de la variable dépendante (gains en emploi) attribuable aux variables explicatives Note de bas de page 10.
L’analyse commence par la contribution unique de chaque variable à la valeur globale du R-carré. On détermine la contribution unique d’un facteur précis au R-carré en exécutant d’abord le modèle complet, puis en retirant la variable d’intérêt de la régression. La réduction du R-carré est considérée comme étant la contribution indépendante ou unique de la variable d’intérêt pour expliquer la variation des gains en emploi des immigrants (c.-à-d. le R-carré)Note de bas de page 11. On peut considérer que cet exercice permet de mesurer le pouvoir prédictif de l’ajout (ou du retrait) de chaque variable, à condition que les autres variables demeurent présentes. En ce qui concerne l’élaboration d’un système de points, cette approche reflète la contribution unique d’une variable à un système de points, qui comprend toutes les autres variables explicatives. Comme seule la contribution explicative ou unique de chaque variable est reflétée, la contribution de toutes les variables ne s’additionne pas à la valeur totale du R-carré pour la régression.
En plus de la contribution unique d’un facteur, celui-ci peut chevaucher d’autres facteurs au chapitre de la prédiction de la variation de la variable dépendante. Autrement dit, un ensemble particulier de facteurs combinés peut servir à prédire la variable dépendante en raison de leur incidence partagée sur la variation de la variable dépendante. Cet « effet de chevauchement » correspond à ce qu’on appelle la contribution commune d’un ensemble de facteursNote de bas de page 12. On détermine la contribution commune au moyen d’une approche qui répartit le R-carré du modèle entre les contributions uniques à chaque variable explicative et les contributions associées à chaque combinaison possible de variables indépendantes (la variation commune). Cette « analyse des éléments communs » (Nathans et coll., 2012; Rowell, 1996; Amado, 1999) produit les valeurs des contributions uniques et communes qui correspondent à la valeur totale du R-carré. L’analyse de la contribution commune des facteurs dans l’étude était axée sur les quatre variables explicatives considérées comme les prédicteurs les plus importants (c.-à-d. qu’elles apportent la plus grande contribution unique au R-carré du modèle), et la combinaison de ces variables contribue probablement le plus au R-carré (c.-à-d. les variables les plus susceptibles d’être corrélées)Note de bas de page 13.
L’évaluation de l’effet causal d’une variable particulière (p. ex. le niveau de scolarité) sur les gains en emploi des immigrants n’est pas l’objectif principal de l’analyse. L’objectif ici consiste à obtenir le meilleur « ajustement » aux données possible au moyen des variables disponibles, ce qui accroît le pouvoir prédictif du modèle. Essentiellement, l’analyse vise à élaborer un modèle prévisionnel au moyen des variables qui contribuent le plus à la « qualité de l’ajustement ». Ce n’est pas un problème, ici, si certaines des variables sont des approximations pour d’autres variables non mesurées, tant que cette approximation demeure plus ou moins constante au fil du temps. Par exemple, l’expérience de travail au Canada peut servir en partie d’approximation pour d’autres variables non mesurées — comme la compréhension du marché du travail canadien et la disponibilité des réseaux — et d’autres variables latentes. Ces relations d’approximation pourraient correspondre aux raisons sous-jacentes de la contribution de l’« expérience au Canada » à la qualité de l’ajustement. Cela est acceptable, car l’inclusion de l’expérience de travail au Canada refléterait les effets de ces facteurs non mesurés sur la prévision des gains en emploi des immigrants. De même, une variable comme les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement pourrait refléter, en partie, des capacités et des attributs personnels latents et non mesurés — comme les relations interpersonnelles, la qualité de la scolarité et la motivation — qui vont au-delà des facteurs liés au capital humain, comme la scolarité, les facteurs linguistiques et l’expérience de travail.
Afin de déterminer si l’importance relative des variables peut varier en fonction de la durée de la période de résidence au Canada, on remplace la variable dépendante correspondant aux gains en emploi durant les deux premières années complètes suivant l’arrivée au Canada par les gains en emploi après 5 et 6 ans et, enfin, les gains en emploi après 10 et 11 ans. La contribution de chaque variable au R-carré dans chacun de ces trois modèles sert à évaluer dans quelle mesure l’importance relative de cette variable change à mesure que la durée de la résidence au Canada augmente.
L’étude permet aussi d’évaluer dans quelle mesure des paramètres d’interaction particuliers peuvent avoir une incidence sur le pouvoir prédictif des régressions. Par exemple, le niveau de scolarité pourrait avoir un pouvoir prédictif beaucoup plus élevé s’il est mis en interaction avec une connaissance du français ou de l’anglais. Autrement dit, le niveau de scolarité pourrait offrir un faible pouvoir prédictif (faible R-carré) si les immigrants ont peu de connaissances en anglais ou en français, mais un pouvoir prédictif élevé si leurs connaissances linguistiques sont approfondies. De faibles compétences linguistiques peuvent empêcher les immigrants de tirer des avantages économiques de leur haut niveau de scolarité. Si les études sont « mises en interaction » avec les compétences linguistiques dans l’équation de régression, ces effets peuvent être pris en compte. Il pourrait également y avoir des effets d’interaction importants entre d’autres variables. On évalue l’importance des effets d’interaction en mesurant l’augmentation du R-carré pour la régression lorsque des paramètres d’interaction particuliers sont ajoutés.
Variation des caractéristiques des demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique au cours de la période visée par l’étude
Les caractéristiques des demandeurs principaux visés par l’étude ont changé quelque peu entre la cohorte de 2005–2007 et celle de 2012–2015. La deuxième cohorte était beaucoup plus jeune, la proportion de demandeurs principaux âgés de moins de 35 ans passant de 45 % dans la première cohorte à 62 % dans la deuxième (tableau 5 figurant en annexe). Les demandeurs principaux sont toujours fortement instruits, même si le niveau de scolarité a baissé quelque peu. En effet, 80 % des demandeurs principaux dans la cohorte de 2005–2007 étaient titulaires d’un diplôme universitaire, alors que la proportion passe à 70 % dans la cohorte de 2012–2015. La maîtrise des langues officielles s’est améliorée, la proportion de demandeurs principaux parlant anglais ou ayant l’anglais comme langue maternelle passant de 80 % à 93 % (rappelons que les demandeurs principaux au Québec sont exclus de l’étude). La proportion de demandeurs principaux ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement a bondi, passant de 24 % dans la première cohorte à 62 % dans la cohorte de 2012–2015. De même, la proportion de demandeurs principaux ayant étudié au Canada avant l’obtention du droit d’établissement est passée de 13 % à 27 %. Enfin, la proportion de demandeurs principaux ayant un conjoint a baissé légèrement (passant de 68 % à 53 %), et le profil des conjoints montre une évolution comparable à celle observée chez les demandeurs principaux.
Résultats des modèles excluant la variable des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
Quelles sont les variables les plus efficaces pour prédire les gains en emploi ?
Prédiction des gains en emploi à court terme
Pour déterminer les meilleurs prédicteurs des gains en emploi à court terme, pendant les deux premières années de résidence au Canada, on construit un modèle de régression par les moindres carrés ordinaires (MCO). On utilise comme variable dépendante le logarithme de la rémunération annuelle pour les deux premières années complètes de résidence au Canada, et toutes les variables explicatives décrites dans la section relative aux méthodes sont incluses, sauf les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. L’échantillon est constitué de demandeurs principaux de la composante économique qui étaient âgés de 20 à 54 ans à l’obtention du droit d’établissement et qui avaient touché un revenu d’emploi d’au moins 500 $ dans au moins une de leurs deux premières années au CanadaNote de bas de page 14. Des régressions ont été exécutées pour trois cohortes distinctes, à savoir les cohortes de 2005–2007, de 2008–2011 et de 2012–2015.
L’objectif ici est de déterminer la mesure dans laquelle une variable contribue à la « qualité de l’ajustement », mesurée au moyen d’un R-carré. Selon la cohorte, le R-carré pour les modèles de régression applicables aux gains en emploi à court terme (gains en emploi durant les deux premières années complètes après l’obtention du droit d’établissement) oscille entre 14,9 % (c.-à-d. 0,149) et 17,3 % (tableau 1)Note de bas de page 15. Manifestement, les variables incluses dans les modèles n’expliquent pas une part importante de la variation (entre 83 % et 85 %) des gains en emploi initiaux parmi les demandeurs principaux. Le reste de la variation est imputable à d’autres facteurs inconnus, dont un grand nombre sont probablement latents et difficiles à mesurer, ou à des facteurs qui ne peuvent s’inscrire dans les critères de sélectionNote de bas de page 16.
L’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement était le plus important prédicteur des gains en emploi à court terme. Lorsque cette variable était retirée de l’équation de régression, la valeur du R-carré affichait une baisse de l’ordre de 5,3 à 8,4 points de pourcentage, selon la cohorte. La langue avait également un effet important, bien que beaucoup plus modeste, sur le pouvoir prédictif du modèle. Lorsque cette variable était retirée de l’équation de régression, la valeur du R-carré affichait une baisse de l’ordre de 0,9 à 1,5 point de pourcentage. Le carré unique associé à l’« expérience d’études au Canada » oscillait entre 0,009 et 0,023 pour ce qui est de prédire les gains en emploi à court terme. Toutefois, l’utilisation de cette variable pour prédire les gains en emploi est problématique. Une explication approfondie figure à l’annexe A. Essentiellement, les résultats pour la variable relative aux « études antérieures au Canada » ne procurent pas des renseignements convenables sur lesquels pourraient reposer des pointages dans un système de sélection. La contribution d’autres variables était minimale.
Comme l’indique la section relative aux méthodes, certaines des variables explicatives peuvent accentuer l’effet des unes sur les autres au-delà de la contribution unique de chaque variable au R-carré indiqué plus haut. Certaines variables apporteront une contribution au R-carré grâce à une variation commune avec une autre variable; c’est ce que l’on nomme les « composantes communes » dans cette approche (Nathan, Oswald et Nimon, 2012; Rowell, 1996). Parmi les composantes communes, seule la combinaison langue et expérience de travail apporte une contribution considérable au R-carré (au bas du tableau 1). La contribution apportée par cette composante oscillait entre 0,8 % et 1,1 % du R-carré du modèle, selon la cohorte. Aucune des autres combinaisons n’a apporté une contribution commune importante au modèle visant à prédire les gains en emploi à court terme. Par conséquent, parmi les variables accessibles (et exception faite de la variable relative à l’expérience d’études au Canada avant l’obtention du droit d’établissement), la langue et l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sont les deux plus importants prédicteurs des gains en emploi à court terme, du moins pour les cohortes étudiées. Les variables relatives aux conjoints ont peu d’effet sur le pouvoir prédictif du modèle de régression relatif aux gains en emploi à court terme.
Tableau 1 L’importance relative des prédicteurs des gains pour les demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par cohorte
Prédicteurs des gains
Cohorte de 2012‑2015 1‑2 ans
Cohorte de 2008‑2011
Cohorte de 2005-2007
1‑2 ans
5‑6 ans
1‑2 ans
5‑6 ans
10‑11 ans
R‑carré du modèle complet
0,149
0,173
0,097
0,166
0,103
0,092
Contribution unique au R‑carré
Âge
0,001
0,002
0,007
0,003
0,010
0,020
Études
0,005
0,006
0,007
0,003
0,004
0,006
Langue
0,010
0,009
0,009
0,015
0,009
0,006
Expérience de travail au Canada
0,075
0,084
0,032
0,053
0,026
0,018
Expérience d’études au Canada
0,009
0,023
0,005
0,020
0,004
0,002
Conjoint
0,006
0,005
0,006
0,005
0,007
0,007
Niveau de scolarité du conjoint
0,002
0,001
0,001
0,001
0,002
0,001
Langue du conjoint
0,002
0,002
0,001
0,002
0,001
0,002
Expérience de travail au Canada du conjoint
0,000
0,001
0,001
0,000
0,000
0,000
Expérience d’études au Canada du conjoint
0,001
0,001
0,001
0,001
0,001
0,001
Contribution des composantes communes sélectionnées au R‑carré
Âge, niveau de scolarité
0,000
0,000
0,000
0,000
-0,001
-0,001
Âge, langue
0,000
0,000
-0,001
-0,001
-0,001
-0,001
Âge, expérience de travail au Canada
0,001
0,001
0,001
0,000
0,000
0,000
Niveau de scolarité, langue
0,001
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Niveau de scolarité, expérience de travail au Canada
-0,001
0,002
-0,003
0,004
0,002
0,001
Langue, expérience de travail au Canada
0,010
0,008
0,004
0,011
0,006
0,004
Remarque : Les variables indiquées du côté gauche du tableau ont été mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Prédiction des gains en emploi à moyen terme
Un modèle de régression identique a été exécuté pour évaluer le pouvoir prédictif des variables explicatives en ce qui concerne les gains en emploi à moyen terme, c’est-à-dire après cinq ou six années au Canada. L’analyse est appliquée aux cohortes de 2005–2007 et de 2008–2011 de demandeurs principaux qui affichent des gains en emploi positifs à l’année 5 ou 6 suivant l’obtention du droit d’établissement. Le R-carré global passe d’environ 16 % dans le modèle à court terme à environ 10 % (9,7 % et 10,3 %) dans le modèle à moyen terme (tableau 1), ce qui indique que les variables explicatives sont plus efficaces pour prédire les gains en emploi à l’arrivée que les gains en emploi à moyen terme. Cette constatation s’explique probablement par le fait que, à mesure que les immigrants acquièrent de l’expérience au Canada, les valeurs de ces variables convergent pour les immigrants entrants. Par exemple, s’il existe une divergence considérable sur le plan des connaissances linguistiques à l’arrivée, ce qui a une incidence sur les gains, cette divergence diminue au fil du temps. Après quelques années, bon nombre d’immigrants dont les compétences linguistiques étaient faibles les auront améliorées; la variance au chapitre des compétences linguistiques des immigrants s’en trouve réduite, et il en va de même du pouvoir prédictif des compétences linguistiques à l’arrivée.
Parmi les variables incluses dans le modèle pour les gains en emploi à moyen terme, l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement était encore le plus important prédicteur des gains. Lorsque cette variable était retirée de l’équation de régression, la valeur du R-carré affichait une baisse de l’ordre de 2,6 à 3,2 points de pourcentage, selon la cohorte (tableau 1). La langue et l’âge à l’obtention du droit d’établissement contribuaient au R-carré, lequel tombait d’environ un point de pourcentage lorsque chacune de ces variables était retirée de l’équation de régression (tableau 1). La présence d’un conjoint avait peu d’incidence sur le pouvoir prédictif du modèle, car le R-carré ne baissait que de 0,7 point de pourcentage lorsque cette variable était écartée. Autrement, comme c’était le cas pour le modèle à court terme, les caractéristiques du conjoint avaient peu d’incidence sur le pouvoir prédictif du modèle. De même, la contribution au pouvoir prédictif du modèle par des variables explicatives grâce à une variation commune ou à des composantes communes était modeste (au bas du tableau 1). Aucune des composantes communes n’apportait plus de 0,6 point de pourcentage au R-carré. Les variables qui contribuaient le plus au pouvoir prédictif du modèle étaient l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ainsi que l’âge et la langue à l’obtention du droit d’établissement.
Prédiction des gains en emploi à long terme
La cohorte des demandeurs principaux ayant obtenu le droit d’établissement entre 2005 et 2007 a servi à étudier les gains en emploi à long terme, c’est-à-dire après 10 ou 11 années au Canada. Les régressions, identiques à celles utilisées dans les résultats à court et à moyen terme, figurent dans le tableau 1.
Le R-carré global dans le modèle à long terme était de 9,2 % (tableau 1). Autrement dit, après 10 ou 11 années au Canada, les variables utilisées dans le modèle comptaient pour 9,2 % de la variation dans les gains en emploi chez les demandeurs principaux. Les variables incluses dans le modèle se sont avérées moins efficaces pour les prédictions à long terme des gains en emploi que pour les prédictions à court terme. La part de la variation des gains en emploi imputables aux variables, bien que faible dans toutes les années, baisse au fil des années passées au Canada. Parmi les variables incluses dans le modèle de régression, l’âge à l’obtention du droit d’établissement et l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient les plus importants prédicteurs des gains en emploi à long terme. Lorsque l’âge à l’obtention du droit d’établissement était retiré de l’équation de régression, la valeur du R-carré baissait de 2,0 points de pourcentage. L’âge à l’obtention du droit d’établissement est plus efficace pour prédire les gains en emploi à long terme que les gains en emploi à court terme. L’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement a contribué 1,8 point de pourcentage au R-carré. Le pouvoir prédictif de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement était important à long terme, mais pas autant qu’à court terme. Le niveau de scolarité et la langue à l’obtention du droit d’établissement ainsi que le fait d’avoir un conjoint ont tous apporté une contribution modeste — autour de 0,6 point de pourcentage chacun — au R-carré. Aucune des composantes communes sélectionnées dans le tableau 1 n’a contribué de façon importante à la valeur du R-carré, ce qui donne à penser qu’aucune des principales variables explicatives n’a eu un effet substantiel sur le R-carré par le truchement d’une combinaison avec d’autres variables.
Effets d’interaction
Au-delà de variables comme les études, la langue et l’expérience de travail qui ont un effet unilatéral sur les gains, il est possible que d’autres variables aient une incidence lorsqu’elles interagissent. Autrement dit, l’effet de ces variables peut différer en fonction de la valeur d’autres variables. C’est ce qu’on appelle l’effet d’interactionNote de bas de page 17. Par exemple, s’il y a interaction entre le niveau de scolarité et l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, alors l’effet du niveau de scolarité sur les gains en emploi variera selon que l’intéressé a travaillé au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ou pas.
Pour cerner d’éventuels effets d’interaction importants, on ajoute les paramètres d’interaction entre les variables explicatives clés aux modèles décrits dans les sections précédentes. Les paramètres d’interaction sont ajoutés un par un et éliminés de la régression lorsqu’un paramètre d’interaction différent est ajoutéNote de bas de page 18. De cette façon, on peut mesurer l’effet de l’addition du paramètre d’interaction sur la valeur du R-carré. L’effet correspond simplement à la différence dans le R-carré entre la régression comprenant le paramètre d’interaction et la régression sans ce paramètre. Les résultats sont présentés au tableau 2. Parmi les effets d’interaction examinés, ceux entre l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et l’âge à l’obtention du droit d’établissement et entre l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et le niveau de scolarité ont apporté à la valeur du R-carré une augmentation de l’ordre de 0,4 à 0,9 point de pourcentage. Ces effets d’interaction ont influé sur le pouvoir prédictif des modèles à court et à moyen terme et ont eu peu d’incidence sur le modèle à long terme, alors que les effets des autres paramètres d’interaction étaient minimes.
Tableau 2 L’importance relative de l’interaction des facteurs pour expliquer les gains des demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par cohorte
Interaction des facteurs
Cohorte de 2012‑2015 1‑2 ans
Cohorte de 2008‑2011
Cohorte de 2005-2007
1‑2 ans
5‑6 ans
1‑2 ans
5‑6 ans
10‑11 ans
R‑carré du modèle complet
0,149
0,173
0,097
0,166
0,103
0,092
Accroissement du R‑carré lorsque l’interaction est ajoutée
Âge + niveau de scolarité
0,002
0,001
0,002
0,001
0,002
0,002
Âge + langue
0,003
0,002
0,002
0,001
0,001
0,001
Âge + expérience de travail au Canada
0,007
0,006
0,004
0,004
0,003
0,001
Âge + expérience d’études au Canada
0,001
0,001
0,001
0,001
0,000
0,001
Niveau de scolarité + langue
0,001
0,003
0,002
0,003
0,002
0,001
Niveau de scolarité + expérience de travail au Canada
0,009
0,007
0,006
0,005
0,005
0,004
Niveau de scolarité + expérience d’études au Canada
0,003
0,002
0,001
0,003
0,001
0,001
Langue + expérience de travail au Canada
0,001
0,001
0,001
0,001
0,001
0,001
Langue + expérience d’études au Canada
0,001
0,000
0,001
0,001
0,001
0,001
Expérience de travail au Canada + expérience d’études au Canada
0,003
0,003
0,001
0,004
0,001
0,001
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Comparaison avec les résultats d’une étude antérieure
Bonikowska, Hou et Picot (2016) ont réalisé une étude très comparable afin de cerner les variables les plus efficaces pour prédire les résultats en matière de gains en emploi des demandeurs principaux ayant obtenu le droit d’établissement en 1997–1999 et en 2002–2004. Les méthodes et les variables adoptées aux fins de cette étude sont pratiquement identiques à celles de l’étude visée par le présent rapport. De nombreuses conclusions sont similaires, mais certaines différences ressortent des deux études. Les valeurs du R-carré étaient supérieures pour les cohortes postérieures utilisées dans la deuxième étude (2005–2007, 2008–2011 et 2012–2014) que pour les deux cohortes de la première étude. Ce constat s’applique aux résultats à court, à moyen et à long terme. Par exemple, les valeurs du R-carré pour les modèles de prédiction à court terme étaient de 9,6 % et de 13,6 % pour les cohortes de la première étude et ont connu une augmentation de l’ordre de 14,9 % à 17,3 % pour les cohortes de la deuxième étude. Autrement dit, la capacité de prédire les gains en emploi des demandeurs principaux s’améliorait au fil du temps entre la cohorte de 1997–1999 et celle de 2012–2015.
Cette amélioration tenait probablement à l’accroissement du pouvoir prédictif de la variable de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Le pouvoir de prédiction des gains en emploi de cette variable était beaucoup plus marqué pour les cohortes de la deuxième étude que pour celles de la première. Parmi les variables examinées, cette variable était la plus efficace pour les prédictions à court, à moyen et à long terme visant les cohortes de la deuxième étude. Ce n’était pas le cas pour les cohortes de la première étude. Le niveau de scolarité n’a pas été aussi efficace en tant que variable prédictive pour les cohortes de la deuxième étude que pour celles de la première. Dans toutes les cohortes, le pouvoir prédictif du niveau de scolarité augmentait à mesure qu’on passait du court terme au long terme. Toutefois, même si le niveau de scolarité comptait parmi les principales variables prédictives à long terme pour les cohortes de la première étude, ce n’était pas le cas pour celles de la deuxième. Néanmoins, l’effet marginal du niveau de scolarité sur les gains en emploi demeurait substantiel. Les gains en emploi de titulaires de baccalauréat étaient de 12 % à 23 % supérieurs à ceux de demandeurs principaux comparables n’ayant fait que des études de niveau secondaire, mais cette « prime universitaire » était plus modeste que celle observée dans les cohortes de la première étude. Enfin, la variable « avec un conjoint à l’obtention du droit d’établissement » a procuré un certain pouvoir prédictif dans le cadre de l’étude visée par le présent rapport, mais il était inférieur à celui de nombreuses autres variables. Cette variable n’était pas prise en compte dans la première étude. Les caractéristiques du conjoint (niveau de scolarité, âge, etc.) avaient un pouvoir prédictif limité dans le cadre des deux études.
En somme, à court terme, la langue et l’expérience de travail au Canada étaient les meilleures variables prédictives pour l’ensemble des cinq cohortes examinées par les deux études, mais l’expérience de travail au Canada avait un pouvoir prédictif beaucoup plus marqué dans les cohortes de la deuxième étude. À moyen terme, la langue et l’expérience de travail au Canada étaient les meilleures variables prédictives pour l’ensemble des cinq cohortes, avec l’âge. Le niveau de scolarité comptait également parmi les variables prédictives efficaces dans les cohortes de la première étude, mais pas dans celles de la deuxième. Enfin, l’expérience de travail au Canada et l’âge étaient les meilleurs prédicteurs à long terme dans les cohortes de la deuxième étude, alors que les variables prédictives du niveau de scolarité et de l’âge se sont avérées plus efficaces dans les cohortes de la première étude. Le niveau de scolarité a été remplacé par l’expérience de travail parmi les meilleures variables prédictives à long terme.
Les effets marginaux des variables explicatives
La section précédente portait sur la mesure dans laquelle les variables explicatives peuvent prédire les gains en emploi après l’obtention du droit d’établissement (la variable dépendante). Toutefois, la plupart des analyses économiques ne s’attachent pas à cette question et se concentrent plutôt sur la relation entre la variable explicative et la variable dépendante (en l’occurrence, les gains), déterminée par la valeur des coefficients liés aux variables explicatives (c.-à-d. les effets marginaux). Dans l’analyse réalisée aux fins du présent rapport, ces relations devraient être considérées comme étant corrélationnelles plutôt que causalesNote de bas de page 19.
Les effets marginaux sur les gains en emploi à court terme
Les coefficients de régression sont présentés au tableau 3, et les résultats concordent avec ceux d’études antérieures. Les demandeurs principaux qui étaient plus âgés à l’obtention du droit d’établissement, en particulier ceux qui avaient plus de 45 ans, ont gagné moins d’argent au cours des deux premières années que les immigrants plus jeunes, après la prise en compte des différences dans les autres caractéristiques liées aux antécédents des immigrants. Dans la plus récente cohorte (2012–2015), les gains en emploi des personnes âgées de 45 à 49 ans à l’obtention du droit d’établissement étaient inférieurs d’environ 6 % à ceux des personnes âgées de 25 à 29 ans. Les différences entre les groupes d’âge étaient plus marquées dans les cohortes antérieures.
Tableau 3 : Coefficients des modèles de régression par les moindres carrés ordinaires visant à prédire les gains des demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par cohorte
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Le niveau de scolarité était positivement corrélé avec les gains en emploi initiaux, mais on se serait attendu à une corrélation plus forte. Les gains en emploi à court terme des titulaires de baccalauréat (>= 15 années d’études) étaient de 12 % à 24 % (ou de 0,111 à 0,214 point logarithmique) supérieurs à ceux des personnes ayant un diplôme d’études secondaires ou moins, selon la cohorte. Par comparaison aux immigrants détenant un baccalauréat, ceux ayant fait moins d’études affichaient tous des gains en emploi initiaux inférieurs dans les trois cohortes. Comme nous le verrons, les effets du niveau de scolarité étaient plus marqués à moyen et à long terme. Ces résultats concordent avec ceux de travaux de recherche antérieurs, lesquels ont révélé que l’avantage sur le plan des gains en emploi dont jouissaient habituellement les immigrants très instruits par rapport aux autres immigrants durant les premières années au Canada était fortement réduit, voire avait disparu, dans les cohortes arrivant après 2000. Des travaux de recherche antérieurs montrent également que l’avantage sur le plan des gains en emploi des nouveaux immigrants très instruits s’accroît au fil des années passées au Canada parce que leurs gains en emploi augmentent beaucoup plus rapidement que ceux des autres (Picot, Hou et Qiu, 2016).
La corrélation entre le profil linguistique et les gains en emploi était très forte. Par exemple, dans la cohorte de 2012–2015, les demandeurs principaux qui ne parlaient ni anglais ni français à l’obtention du droit d’établissement obtenaient 0,474 point logarithmique (38 %) de moins que ceux dont l’anglais était la langue maternelle, après la prise en compte d’autres variables liées aux antécédentsNote de bas de page 20. Les demandeurs ayant une langue maternelle autre que l’anglais ou le français, mais parlant l’une de ces deux langues à l’obtention du droit d’établissement — la grande majorité des demandeurs — gagnaient beaucoup moins d’argent que ceux dont l’anglais était la langue maternelle, mais plus que ceux qui ne parlaient ni anglais ni français. L’effet défavorable du fait d’avoir une langue maternelle autre que l’une des deux langues officielles du Canada s’atténuait à long terme, mais pas de façon importante.
Le nombre d’années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (c. à d. le nombre d’années de gains en emploi positifs avant l’obtention du droit d’établissement) avait une incidence importante sur les gains. Encore dans la cohorte de 2012–2015, même une seule année d’expérience entraînait une augmentation de 0,609 point logarithmique (84 %) des gains en emploi par rapport au demandeur n’ayant aucune expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. L’augmentation passait à 0,799 point logarithmique (122 %) dans le cas des demandeurs ayant au moins cinq années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Il semble que le fait d’avoir de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (par rapport au fait de n’en avoir aucune) apporte une contribution importante à l’augmentation des gains en emploi après l’obtention du droit d’établissement, mais que le nombre d’années d’expérience soit moins important. En effet, les gains en emploi associés au fait d’avoir davantage d’années d’expérience de travail sont relativement modestes.
Les coefficients de la variable « avec un conjoint à l’obtention du droit d’établissement» au tableau 3 renvoient aux différences dans les augmentations en points logarithmiques entre un demandeur principal ayant un conjoint au moment de l’obtention du droit d’établissement et un demandeur principal ayant un conjoint qui est titulaire d’un baccalauréat, dont l’anglais est la langue maternelle et qui n’a ni expérience de travail ni expérience d’études au Canada (c.-à-d. les groupes de références pour les variables liées aux caractéristiques du conjoint dans le modèle). Le fait d’avoir un tel conjoint était positivement corrélé avec les gains. Les demandeurs principaux ayant un tel conjoint tendaient à gagner de 0,253 à 0,345 point logarithmique (ou de 29 % à 41 %) de plus que ceux n’ayant pas de conjoint, après la prise en compte d’autres variables. L’effet d’un conjoint au moment de l’obtention du droit d’établissement dépend des caractéristiques du conjoint. Par exemple, au cours des deux années suivant l’obtention du droit d’établissement, les demandeurs principaux ayant un conjoint qui ne parlait ni français ni anglais, qui a fait tout au plus des études de niveau secondaire et qui n’avait ni expérience de travail ni expérience d’études au Canada gagnaient de 5 % à 8 % (selon la cohorte) de moins que les demandeurs principaux n’ayant pas de conjoint. Les effets marginaux (coefficients) associés aux variables liées aux antécédents du conjoint tendaient à être comparables, mais généralement plus faibles, que les effets marginaux décrits plus haut pour les demandeurs principauxNote de bas de page 21.
Les effets marginaux sur les gains en emploi à moyen terme
Dans l’ensemble, les effets marginaux des variables explicatives sur les gains en emploi à moyen terme ressemblent beaucoup à ceux observés dans le modèle relatif aux gains en emploi à court terme, mais certaines différences ont été relevées. La corrélation négative entre l’âge à l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi était plus forte. Par exemple, les demandeurs principaux âgés de 50 à 54 ans gagnaient de 0,316 à 0,423 point logarithmique (c.-à-d. de 27 % à 35 %) de moins que les 25 à 29 ans (tableau 3). L’effet de la scolarité était également plus fort. Les personnes ayant fait des études secondaires tout au plus gagnaient de 0,150 à 0,235 point logarithmique (de 14 % à 21 %) de moins que les titulaires d’un baccalauréat. L’association entre la langue parlée à l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi était très comparable à celle observée dans le modèle à court terme. La corrélation entre les années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi était plus faible que celle observée dans le modèle à court terme, mais demeurait très forte. Par exemple, les personnes ayant un an d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement gagnaient de 0,420 à 0,464 point logarithmique (de 52 % à 59 %) de plus que celles n’ayant aucune expérience de travail. Cet écart était de plus de 0,600 point logarithmique dans le modèle relatif aux gains en emploi à court terme. L’effet positif sur les gains en emploi du fait d’avoir un conjoint (qui est titulaire d’un baccalauréat, a pour langue maternelle l’anglais et n’a ni expérience de travail ni expérience d’études au Canada) n’a pas beaucoup changé au fil des années passées au Canada. Comme c’était le cas dans le modèle à court terme, les associations entre les caractéristiques du conjoint et les gains en emploi à moyen terme étaient comparables à celles observées pour les demandeurs principaux eux-mêmes, mais généralement plus faibles. On a observé peu de variation entre les modèles à court et à moyen terme en ce qui concerne ces variables.
Les effets marginaux sur les gains en emploi à long terme
L’association négative entre l’âge à l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi devient encore plus forte dans le modèle à long terme. Par exemple, dans la cohorte de 2005–2007, les personnes âgées de 50 à 54 ans à l’obtention du droit d’établissement gagnaient 0,241 point logarithmique (22 %) de moins à court terme que les 25 à 29 ans, et l’écart s’élargit à 0,423 point logarithmique (35 %) à moyen terme et à 0,580 point logarithmique (44 %) à long terme (tableau 5 figurant en annexe). Dans l’ensemble, l’obtention du droit d’établissement à l’âge de 45 ans ou plus était associée à un désavantage sur le plan des gains en emploi pour les trois cohortes et pour les gains en emploi à court, à moyen et à long terme; l’effet devenait plus fort au fil du temps passé au Canada.
L’effet positif du niveau de scolarité sur les gains en emploi tend à augmenter quelque peu au fil des années passées au Canada. L’avantage sur le plan des gains en emploi dont jouissent les titulaires de baccalauréat par rapport aux personnes ayant fait des études de niveau secondaire tout au plus passe de 0,111 point logarithmique (12 %) dans le modèle à court terme à 0,206 point logarithmique (23 %) dans le modèle à long terme. L’effet positif de la langue à l’obtention du droit d’établissement sur les gains en emploi baisse au fil des années passées au Canada. Cela n’a rien d’étonnant, dans la mesure où les demandeurs principaux ayant des compétences médiocres à l’égard des langues officielles perfectionneraient leurs compétences. Il est donc normal que l’effet de la langue à l’obtention du droit d’établissement sur les gains en emploi s’atténue avec le temps. Par exemple, dans la cohorte de 2005–2007, les personnes qui ne parlaient ni anglais ni français à l’obtention du droit d’établissement obtenaient 0,707 point logarithmique (51 %) de moins que ceux dont l’anglais était la langue maternelle. Ce résultat baissait à 0,544 point logarithmique (42 %) à moyen terme et à 0,424 point logarithmique (35 %) à long terme.
L’effet positif des années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sur les gains en emploi s’atténuait à mesure que les immigrants passaient du temps au Canada. Par exemple, à court terme, les personnes ayant un an d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement gagnaient 0,666 point logarithmique (95 %) de plus que celles n’ayant aucune expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement. Ce résultat baissait à 0,464 point logarithmique (59 %) à moyen terme et à 0,361 point logarithmique (43 %) à long terme. Ce résultat n’a rien d’étonnant, dans la mesure où les immigrants n’ayant aucune expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement accumuleraient de l’expérience une fois arrivés au Canada, réduisant ainsi l’écart lié aux facteurs sur le marché du travail canadien qui les désavantageaient par rapport à ceux qui possédaient de l’expérience avant d’obtenir le droit d’établissement. Cela réduirait ensuite l’écart sur le plan des gains en emploi entre les deux groupes. L’effet positif du fait d’avoir un conjoint variait peu avec le passage du temps au Canada. De même, la corrélation entre les caractéristiques du conjoint et les gains en emploi du demandeur principal variait peu avec le passage du temps.
En somme, au fil des années passées au Canada par les demandeurs principaux, l’effet négatif de l’âge à l’obtention du droit d’établissement sur les gains en emploi se renforçait, tout comme l’effet positif du niveau de scolarité sur les gains. L’effet positif de la langue sur les gains en emploi s’affaiblissait, tout comme l’effet positif des années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sur les gains. L’effet positif du fait d’avoir un conjoint ainsi que la corrélation entre les caractéristiques du conjoint et les gains en emploi du demandeur principal variaient peu avec le passage des années au Canada.
De quelle façon l’expérience de travail au Canada modère-t-elle l’effet du niveau de scolarité et de l’âge sur les gains?
L’interaction entre les variables analysées plus haut donne à penser que l’effet d’une variable peut dépendre de la valeur d’une autre variable. Afin de mieux évaluer les principaux effets d’interaction, des régressions distinctes ont été exécutées pour deux groupes : les personnes ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et les personnes n’en ayant pas. Les coefficients de ces modèles sont présentés au tableau 6 figurant en annexe. La présente section se limite aux résultats à court et à moyen terme pour la cohorte de 2008–2011 : cela permet de réduire la répétition dans l’analyse, car les résultats étaient comparables dans les autres cohortes. La tendance générale s’applique également aux gains en emploi à long terme pour la cohorte de 2005–2007.
Le R-carré est beaucoup plus élevé pour les personnes ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (à 16,4 % à court terme et à 10,1 % à moyen terme) que pour les personnes n’en ayant pas (à 3,8 % et à 4,5 %, respectivement). Ainsi, le pouvoir prédictif des principales variables explicatives est relativement faible dans le cas des demandeurs principaux qui n’ont pas d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Plus de 95 % de la variation des résultats liés aux gains en emploi restent inexpliqués après la prise en compte de l’âge, du niveau de scolarité, de la langue, etc. Le pouvoir prédictif des mêmes variables est beaucoup plus fort dans le cas des demandeurs principaux ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement.
Les effets de l’âge et du niveau de scolarité à l’obtention du droit d’établissement sur les gains en emploi sont tributaires du fait que le demandeur principal possède de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Rappelons que les demandeurs principaux qui étaient plus âgés à l’obtention du droit d’établissement tendaient à réaliser des gains en emploi moins élevés à court et à moyen terme que les demandeurs principaux plus jeunes. Ce résultat s’applique aux personnes n’ayant pas d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, mais pour celles ayant une telle expérience de travail, il n’y a pas d’effet négatif, et les demandeurs principaux plus âgés (à l’obtention du droit d’établissement) tendent à gagner davantage d’argent que les plus jeunes, en particulier à court terme. Autrement dit, les employeurs semblent reconnaître l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement comme étant un atout, comme on l’observe de façon générale sur le marché du travail canadien. En général, les travailleurs plus âgés ayant davantage d’expérience de travail gagnent plus d’argent que les jeunes travailleurs. En ce sens, les demandeurs principaux ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ressemblent davantage aux travailleurs nés au Canada que ceux qui n’en ont pasNote de bas de page 22.
Les résultats touchant l’effet du niveau de scolarité sont similaires. Les demandeurs principaux ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement réalisaient des gains en emploi beaucoup plus élevés lorsqu’ils étaient plus instruits, comme on s’y attendrait sur un marché du travail normal. Toutefois, la prime reliée au niveau de scolarité était beaucoup plus modeste lorsque la personne n’avait pas d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Par exemple, à moyen terme, parmi les demandeurs principaux n’ayant pas d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, les titulaires d’un baccalauréat gagnaient 0,097 point logarithmique (10 %) de plus que ceux n’ayant fait que des études de niveau secondaire tout au plus. Mais pour les demandeurs principaux ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, cette hausse des gains en emploi était de 0,383 point logarithmique (47 %). Encore ici, les demandeurs principaux qui avaient de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ressemblent davantage aux travailleurs nés au Canada pour ce qui est de la reconnaissance de leur niveau de scolarité supérieure, comme en témoignent les gains en emploi supérieurs touchés.
De quelle façon la maîtrise d’une langue officielle modère-t-elle l’effet du niveau de scolarité et de l’âge sur les gains?
L’effet du niveau de scolarité et de l’âge à l’obtention du droit d’établissement (qui sert d’approximation pour l’expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement) sur les gains en emploi dépend de la maîtrise d’une langue officielle par le demandeur principal, comme c’était le cas plus haut à l’égard de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Pour examiner cet effet, des régressions distinctes ont été exécutées à l’égard de trois groupes définis selon le profil linguistique : les personnes dont la langue maternelle est l’anglais ou le français (probablement la meilleure maîtrise d’une langue officielle); celles qui ont une autre langue maternelle que l’anglais ou le français, mais qui parlent l’une de ces langues; et les personnes qui ne parlent ni anglais ni français à l’obtention du droit d’établissement (tableau 7 figurant en annexe)Note de bas de page 23. Encore ici, l’analyse est limitée aux résultats pour la cohorte de demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique de 2008–2011. On obtient des résultats comparables pour les autres cohortes.
L’avantage sur le plan des gains en emploi d’un niveau de scolarité élevé est beaucoup plus grand chez les demandeurs principaux ayant de solides compétences linguistiques à l’obtention du droit d’établissement que chez les personnes ayant des compétences inférieures. Ce résultat ne devrait surprendre personne, puisque de solides compétences linguistiques faciliteraient probablement la réalisation des avantages économiques découlant d’un niveau de scolarité élevé. À court terme, les demandeurs principaux dont la langue maternelle est l’anglais ou le français touchaient des gains en emploi de 0,251 point logarithmique (29 %) supérieurs lorsqu’ils étaient titulaires d’un baccalauréat, par comparaison à ceux qui avaient fait des études secondaires tout au plus. Leurs homologues qui ne parlaient aucune langue officielle à l’obtention du droit d’établissement ne jouissaient d’aucun avantage sur le plan des gains en emploi lorsqu’ils avaient un baccalauréat. À court terme, l’avantage sur le plan des gains en emploi lié au fait d’avoir un baccalauréat plutôt qu’un diplôme d’études secondaires ou moins se situait entre 0,117 et 0,219 point logarithmique (11 % et 20 %) chez les demandeurs principaux qui avaient une langue maternelle autre que l’anglais ou le français, mais parlaient l’une de ces langues. Ces différences changeaient quelque peu à moyen terme, lorsque les immigrants ne connaissant aucune des langues officielles au départ développaient une certaine capacité à ce chapitre, mais un écart demeurait. À moyen terme, l’avantage sur le plan des gains en emploi lié au fait d’avoir un baccalauréat (plutôt qu’un diplôme d’études secondaires ou moins) était de 0,197 point logarithmique (22 %) chez les personnes dont la langue maternelle est l’anglais ou le français et de 0,250 point logarithmique (28 %) chez celles ayant une autre langue maternelle (que l’anglais ou le français) qui parlaient anglais ou français, mais il n’était que de 0,119 (13 %) chez les personnes qui ne parlaient ni anglais ni français à l’obtention du droit d’établissement. L’effet d’interaction du niveau de scolarité et de la langue pourrait également être lié en partie à l’effet du pays d’étudesNote de bas de page 24 ou du pays source, variables non prises en compte dans le cadre de l’analyseNote de bas de page 25.
Les capacités linguistiques ont également influé sur l’association entre l’âge à l’obtention du droit d’établissement (qui sert d’approximation pour l’expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement) sur les gains, en particulier à moyen terme. Parmi les personnes dont la langue maternelle est l’anglais ou le français, les travailleurs âgés de 45 à 49 ans à l’obtention du droit d’établissement obtenaient 0,061 point logarithmique (6 %) de plus que les 25 à 29 ans. Mais chez les personnes qui ne parlaient ni anglais ni français à l’obtention du droit d’établissement, dans les cinq à six années suivant l’obtention du droit d’établissement, les 45 à 49 ans obtenaient 0,418 point logarithmique (34 %) de moins que leurs homologues âgées de 25 à 29 ans, après la prise en compte des différences dans les autres caractéristiques liées aux antécédents des immigrants. Encore ici, le traitement réservé par les employeurs aux immigrants dont la langue maternelle est l’anglais ou le français et qui avaient de l’expérience de travail ressemble davantage à la façon dont ils traiteraient un travailleur né au Canada (Warman, 2010). Les personnes qui ne parlent ni anglais ni français à l’obtention du droit d’établissement ne tirent aucun avantage de l’expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement. Cela tient peut-être en partie au pays d’origine, variable non prise en compte (voir la note de bas de page 9). Fait intéressant, les avantages tirés à l’égard de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sont comparables chez les personnes dont la langue maternelle est l’anglais ou le français et chez celles qui ne parlaient aucune de ces langues à l’obtention du droit d’établissement. En effet, on a observé chez les membres de ces deux groupes qui avaient une année d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement une hausse importante des gains en emploi (environ 0,420 point logarithmique, ou 52 %) par comparaison avec ceux qui n’en avaient aucune (tableau 7 figurant en annexe).
Gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement en tant que prédicteur des gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement
Des travaux de recherche antérieurs ont révélé une forte corrélation entre les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement, à court et à long terme. Les demandeurs principaux affichant des gains en emploi élevés au Canada avant l’obtention du droit d’établissement qui arrivaient vers la fin des années 2010 gagnaient deux fois plus d’argent à court terme que les immigrants n’affichant pas de gains en emploi au pays avant l’obtention du droit d’établissement, après la prise en compte de caractéristiques liées aux antécédents comme le niveau de scolarité et l’âge. Cet avantage sur le plan des gains en emploi persistait, mais il s’atténuait à long terme. En revanche, on a observé peu de différence dans les gains en emploi entre les demandeurs principaux affichant peu de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et ceux qui n’en avaient pas (Hou, Crossman et Picot, 2020).
Il convient de rappeler que le but premier de l’analyse était de cerner les variables les plus efficaces pour prédire les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Si l’objectif était de déterminer les « causes » des divers niveaux de gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement, il n’aurait pas été raisonnable d’inclure les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement dans la régression. Manifestement, le fait d’avoir des gains en emploi élevés avant l’obtention du droit d’établissement ne « cause » pas la réalisation de gains en emploi élevés par la suite. Toutefois, si l’objectif est la prédiction plutôt que l’explication causale, les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement sont un bon prédicteur des gains en emploi postérieurs. La variable des gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement peut donc s’avérer utile dans le cadre de l’étude. Les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement reflètent probablement un certain nombre de caractéristiques latentes importantes, habituellement reliées au capital humain, qui influent sur les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Les résultats montrent que les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement sont de loin la plus efficace des variables utilisées dans le cadre de l’analyse pour ce qui est de prédire les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement.
Premièrement, le R-carré augmente de façon importante dans tous les modèles lorsque les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement sont ajoutés (tableau 4). La valeur du R-carré pour les modèles à court terme oscille entre 21,0 % et 25,7 %, selon la cohorte. Il s’agit d’une augmentation par rapport aux modèles sans les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement, qui variait entre 14,9 % et 17,3 % (tableau 1). Par conséquent, la part de la variation des gains en emploi à court terme des demandeurs principaux indiquée par les modèles passe d’environ 16 % à environ 23 %. Encore ici, les modèles sont moins efficaces pour prédire les gains en emploi à moyen et à long terme que les gains en emploi à court terme, mais il y a tout de même une amélioration considérableNote de bas de page 26.
La contribution unique des gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement au R-carré du modèle à court terme était plutôt élevée, à 10,7 points de pourcentage (pour la cohorte de 2012–2015). Elle est beaucoup plus élevée que la contribution unique observée pour toute autre variable dans les modèles antérieurs, ce qui démontre le pouvoir prédictif très supérieur de cette variable. Cette contribution unique était quelque peu inférieure dans les cohortes antérieures (tableau 4), peut-être parce que cette variable est devenue plus importante dans les cohortes récentes en raison de l’augmentation de la proportion de nouveaux immigrants affichant des gains en emploi élevés avant l’obtention du droit d’établissement. La contribution des gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement au R-carré diminuait pour ce qui est de prédire les gains en emploi à long terme. Dans la cohorte de 2005–2007, par exemple, sa contribution est passée de 4,4 points de pourcentage dans le modèle à court terme à 2,5 points de pourcentage dans le modèle à moyen terme et à 1,6 point de pourcentage dans le modèle à long terme. Lorsqu’on ajoute les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement au modèle, le pouvoir prédictif unique des autres variables devient presque nul (tableau 3). Sur le plan des prévisions, les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement servent d’approximation pour d’autres variables comme le niveau de scolarité, l’expérience de travail, la langue et l’âge, absorbant une grande part de leur capacité prédictive.
La seule « composante commune » ayant une importance quelconque dans ce modèle était la composante combinant les années d’expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Cette composante a ajouté entre 5,2 et 8,2 points de pourcentage au R-carré dans le modèle à court terme, de 2,4 à 3,0 points de pourcentage dans le modèle à moyen terme et 1,7 point de pourcentage dans le modèle à long terme. Encore une fois, la plus importante contribution de cette composante était la prédiction plus fiable des gains en emploi à court terme. Toutes les autres composantes communes sélectionnées étaient presque nullesNote de bas de page 27.
Tableau 4 L’importance relative des prédicteurs des gains pour les demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par cohorte, avec les gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement comme prédicteur
Prédicteurs des gains
Cohorte de 2012‑2015
Cohorte de 2008‑2011
Cohorte de 2005-2007
1‑2 ans
1‑2 ans
5‑6 ans
1‑2 ans
5‑6 ans
10‑11 ans
R‑carré du modèle complet
0,257
0,252
0,143
0,210
0,127
0,108
Contribution unique au R‑carré
Âge
0,001
0,003
0,009
0,004
0,011
0,022
Études
0,001
0,002
0,003
0,002
0,002
0,004
Langue
0,002
0,004
0,006
0,012
0,007
0,004
Expérience de travail au Canada
0,001
0,002
0,001
0,001
0,001
0,000
Expérience d’études au Canada
0,001
0,002
0,000
0,001
0,001
0,001
Conjoint
0,003
0,003
0,004
0,004
0,006
0,006
Niveau de scolarité du conjoint
0,001
0,001
0,001
0,001
0,002
0,001
Langue du conjoint
0,001
0,001
0,001
0,002
0,001
0,001
Expérience de travail au Canada du conjoint
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Expérience d’études au Canada du conjoint
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
0,107
0,079
0,047
0,044
0,025
0,016
Contribution des composantes communes sélectionnées au R‑carré
Âge, niveau de scolarité
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
-0,001
Âge, langue
0,000
0,000
0,000
0,000
-0,001
-0,001
Âge, expérience de travail au Canada
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Niveau de scolarité, langue
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Niveau de scolarité, expérience de travail au Canada
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Langue, expérience de travail au Canada
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Âge, gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
-0,001
-0,001
-0,002
-0,001
-0,002
-0,001
Niveau de scolarité, gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
0,004
0,003
0,003
0,001
0,001
0,002
Langue, gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
0,007
0,004
0,003
0,003
0,002
0,002
Années d’expérience de travail, gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
0,074
0,082
0,030
0,052
0,024
0,017
Remarque : Les variables indiquées du côté gauche du tableau ont été mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Fait peu étonnant, l’association entre les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement est plutôt forte par comparaison à toutes les autres variables (tableau 8 figurant en annexe). Par exemple, pour la cohorte de 2012–2015, les demandeurs principaux affichant plus du double des gains en emploi annuels médians nationaux avant l’obtention du droit d’établissement gagnaient 1,493 point logarithmique (ou 3,4 fois) de plus que leurs homologues comparables n’ayant pas de gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Il importe de souligner que ce résultat a été obtenu après la prise en compte des écarts éventuels touchant les autres variables explicatives, comme le niveau de scolarité, la langue, l’âge ou les années d’expérience de travail au Canada. Les personnes ayant moins de la moitié des gains en emploi médians nationaux au Canada avant leur arrivée ne jouissaient pas d’un avantage sur le plan des gains en emploi par rapport aux personnes n’affichant pas de gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Les personnes dont les gains en emploi antérieurs se situaient entre 1,0 et 2,0 fois la médiane nationale bénéficiaient d’une hausse des gains en emploi de l’ordre de 0,805 point logarithmique (124 %) par rapport à celles n’ayant pas de gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Cet avantage sur le plan des gains en emploi s’atténuait quelque peu, mais pas beaucoup, lorsqu’on passait des gains en emploi à court terme aux gains en emploi à moyen et à long termeNote de bas de page 28. Ainsi, même après la prise en compte de caractéristiques observables liées aux antécédents, les personnes dont les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient modérés ou élevés jouissaient d’un avantage important à court et à long terme par rapport à celles n’ayant pas de tels gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement.
De plus, l’association entre presque toutes les autres caractéristiques des demandeurs principaux et les gains en emploi était beaucoup plus faible lorsque les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient ajoutés au modèle (tableau 8 figurant en annexe). La seule exception était l’âge au moment de l’entrée, qui avait peu d’incidence. La variable des années d’expérience de travail au Canada, en particulier, est devenue pratiquement non significative sur le plan statistique. Ce phénomène a été observé pour les gains en emploi à court, à moyen et à long terme. Bien entendu, il ne faudrait pas l’envisager sous l’angle de la causalité. En effet, il ne faut pas s’étonner que les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement soient en corrélation avec toutes ces variables et que leur ajout au modèle reflète une grande part de la variance précédemment imputée au niveau de scolarité, à la langue, etc.
De quelle façon les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement modèrent-ils l’effet de l’âge et du niveau de scolarité sur les gains?
On a fait remarquer plus tôt que l’effet du niveau de scolarité et de l’âge (une approximation pour l’expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement) sur les gains en emploi était très différent selon qu’une personne possède de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ou pas. Cela donne à penser que les demandeurs principaux ayant une expérience antérieure au Canada obtiennent des résultats qui s’approchent de ceux qui sont attendus des travailleurs canadiens sur un marché du travail normal. Cela pourrait également s’appliquer aux individus ayant, ou pas, bénéficié de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, ou selon que leurs gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement soient faibles ou élevés.
Pour examiner cette question, des modèles de régression sont exécutés séparément pour les demandeurs principaux n’ayant pas de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ainsi que pour ceux dont les gains en emploi sont faibles (<= gains en emploi médians nationaux) ou élevés (> gains en emploi médians nationaux) (tableau 9 figurant en annexe). L’analyse ici est limitée aux gains en emploi à court et à moyen terme pour la cohorte de 2008–2011. Parmi les demandeurs principaux n’ayant pas de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement, les immigrants qui étaient âgés au moment de l’entrée affichaient beaucoup moins de gains en emploi à court et à moyen terme, et même à long terme, que ceux qui étaient plus jeunesNote de bas de page 29. Chez ceux dont les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient élevés, les travailleurs qui étaient âgés au moment de l’entrée gagnaient davantage que ceux qui étaient plus jeunesNote de bas de page 30. Ils semblent avoir tiré avantage de leur expérience de travail antérieure à l’obtention du droit d’établissement, comme on s’y attendrait, du moins à court terme. Cela ne s’applique peut-être pas à moyen terme, puisque l’âge à l’obtention du droit d’établissement avait peu d’effet sur les gains en emploi à moyen terme.
L’effet du niveau de scolarité sur les gains en emploi était également très différent selon que l’intéressé a des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ou pas. Chez les personnes n’ayant pas de tels gains, il y avait peu de différence dans les gains en emploi à court et à moyen terme entre les personnes ayant fait des études secondaires tout au plus et les titulaires d’un baccalauréat (tableau 9 figurant en annexe). Chez les demandeurs principaux dont les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient élevés, toutefois, le fait d’avoir un baccalauréat influait beaucoup plus sur les gains. En effet, ces personnes obtenaient 0,450 point logarithmique (57 %) de plus à court et à moyen terme que celles ayant fait des études secondaires tout au plus.
Une conclusion importante qui ressort de l’analyse selon le niveau des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement est que les avantages imputables aux variables liées au capital humain (en particulier l’âge à l’obtention du droit d’établissement et le niveau de scolarité) étaient généralement comparables chez les demandeurs principaux n’ayant pas de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et chez ceux dont les gains en emploi étaient faibles. Autrement dit, les immigrants affichant peu de gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement font face à des difficultés comparables à celles que connaissent les immigrants n’ayant pas d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement pour ce qui est du transfert du capital humain vers le marché du travail. Cette conclusion s’applique à l’ensemble des trois cohortes de demandeurs principaux visés par l’étude.
Conclusion
Le présent rapport vise à déterminer les facteurs de sélection qui permettent le mieux de prédire les gains en emploi des demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique. On évalue la capacité des variables de prévoir les gains en emploi à court (1 ou 2 ans), à moyen (5 ou 6 ans) et à long (10 ou 11 ans) terme après l’obtention du droit d’établissement. Il s’agit de variables pouvant être utilisées dans un système de sélection des immigrants économiquesNote de bas de page 31. En plus d’évaluer le pouvoir prédictif de ces variables, on se penche également sur les effets marginaux de ces variables sur les gains. Il s’agit de deux questions différentes qui supposent d’utiliser des mesures statistiques différentes.
Le pouvoir prédictif des facteurs de sélection est indiqué par la proportion de la variance dans les gains en emploi postérieurs à l’immigration imputable à ces facteurs, mesurée par la valeur du R-carré d’un modèle de régression visant à prédire les gains en emploi postérieurs à l’immigrationNote de bas de page 32. Ensemble, les facteurs de sélection étudiés aux fins du présent rapport comptent pour environ 15 % de la variance des gains en emploi à court terme des demandeurs principaux. Les 85 % qui restent sont imputables à des facteurs latentsNote de bas de page 33. Le pouvoir prédictif de ces facteurs est à son maximum à court terme. Leur capacité de prédire les gains en emploi s’atténue au fil des années passées au Canada, tombant à environ 10 % à moyen terme et à 9 % à long terme. La capacité de ces facteurs d’expliquer la variation des gains en emploi des demandeurs principaux n’ayant pas d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (variable comptant pour environ 4 % de la variation à court terme des gains) est beaucoup plus faible que dans le cas des demandeurs principaux ayant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement (environ 16 %).
Parmi les variables comprises, c’est l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement qui apporte la plus grande contribution unique à la prédiction des gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement, en particulier à court terme, mais également à moyen et à long termes. La langue à l’obtention du droit d’établissement est un autre prédicteur clé des gains en emploi à court terme. L’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement ainsi que la langue et l’âge à l’obtention du droit d’établissement sont les meilleurs prédicteurs des gains en emploi à moyen terme. L’âge à l’obtention du droit d’établissement et l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sont les plus importants prédicteurs des gains en emploi à long terme. Le jeune âge à l’obtention du droit d’établissement, souvent utilisé comme approximation pour un faible nombre d’années d’expérience de travail à l’étranger lorsque le niveau de scolarité et l’expérience de travail au Canada sont pris en compte, est un meilleur prédicteur à long terme qu’à court terme.
Le faible pouvoir prédictif à long terme des facteurs de sélection tient probablement en partie au fait que les valeurs de ces facteurs convergent à mesure que les immigrants acquièrent de l’expérience au Canada. Par exemple, après quelques années, bon nombre d’immigrants dont les compétences linguistiques étaient faibles les auront améliorées; la variance au chapitre des compétences linguistiques des immigrants s’en trouve réduite, et il en va de même du pouvoir prédictif des compétences linguistiques à l’arrivée.
L’interaction d’une variable avec une autre pourrait influer sur les résultats en matière de gains. On entend par « interaction » la situation où l’effet d’un facteur est tributaire du niveau d’un autre facteur. Par exemple, une personne possédant des compétences linguistiques médiocres pourrait avoir plus de mal à tirer parti de l’avantage sur le plan des gains en emploi associé au niveau de scolarité. Dans le SCG actuel, des facteurs de transférabilité sont conçus de façon à refléter les effets d’interactionNote de bas de page 34. Il ressort de l’analyse que l’effet des paramètres d’interaction examinés par les modèles sur le pouvoir prédictif des modèles était généralement modeste. Seulement deux interactions ont eu de petits effets : le niveau de scolarité à l’obtention du droit d’établissement et les années d’expérience au Canada; et l’âge à l’obtention du droit d’établissement et les années d’expérience au Canada.
En général, les variables relatives aux conjoints avaient peu d’effet sur le pouvoir prédictif des modèles axés sur les gains en emploi des demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique.
Lorsque les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient ajoutés au modèle avec les variables mentionnées plus haut, le pouvoir prédictif des modèles s’améliorait considérablement. Avec cet ajout, la part de la variation des gains en emploi à court terme indiquée par le modèle passait de 15 % à 26 %. Les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient de loin la plus efficace des variables utilisées pour ce qui est de prédire les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement. La contribution unique des autres variables au pouvoir prédictif tombait à presque zéro lorsque les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement étaient ajoutés. Comme de nombreuses autres variables (sauf l’âge à l’obtention du droit d’établissement), sa capacité prédictive s’atténuait au fil des années passées au Canada, mais demeurait forte.
En ce qui concerne les effets marginaux des variables sur les gains, les résultats étaient comparables à ceux observés dans une étude antérieure (Bonikowska et coll., 2015). Ces effets marginaux devraient être considérés comme corrélationnels plutôt que causaux. Le niveau de scolarité avait un faible effet positif sur les gains en emploi à court terme, mais un effet positif plus fort sur les gains en emploi à long terme. C’est parce que les gains en emploi des immigrants très instruits s’accroissent plus vite au fil des années passées au Canada que ceux des immigrants moins instruits. De plus, le niveau de scolarité a un effet positif beaucoup plus important sur les gains en emploi des immigrants qui ont de solides compétences linguistiques et de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement.
L’âge à l’obtention du droit d’établissement (souvent une approximation pour l’expérience de travail à l’étranger) est important. Les immigrants qui sont âgés à l’obtention du droit d’établissement tendent à gagner moins d’argent que ceux qui sont plus jeunes, mais cet effet négatif n’est pas observé chez les immigrants possédant de l’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement. Ces arrivants ressemblent davantage à des travailleurs nés au Canada, car ils semblent tirer avantage de l’expérience de travail.
Les années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sont en forte corrélation positive avec les gains en emploi après l’obtention du droit d’établissement, mais cette corrélation s’atténue au fil du temps passé au Canada. Il y a une corrélation positive entre le profil linguistique à l’obtention du droit d’établissement et les gains. Les demandeurs de la catégorie de l’immigration économique ayant un conjoint qui maîtrise une langue officielle et qui a fait des études universitaires tendent à gagner davantage que ceux qui n’en ont pas un, après la prise en compte d’autres facteurs. Les variables liées aux antécédents du conjoint (p. ex. : niveau de scolarité, langue et âge à l’obtention du droit d’établissement) tendent à avoir un effet plus faible sur les gains en emploi du demandeur principal que les observations relatives aux demandeurs principaux eux-mêmes. Le faible pouvoir prédictif et le faible effet marginal des variables liées aux antécédents du conjoint sur les gains en emploi du demandeur principal donnent à penser que ces variables contribuent peu à la prédiction des gains en emploi du demandeur principal. Cependant, bien que cela ne fasse pas partie de l’étude, il y a une autre façon d’envisager ces résultats. Il semble probable que ces variables, malgré leur faible effet sur les gains en emploi des demandeurs principaux, soient efficaces pour prédire les gains en emploi des conjoints eux-mêmes. La sélection de conjoints obtenant des pointages plus élevés (et, donc, touchant des gains en emploi plus élevés) accroîtrait probablement le revenu familial et, par conséquent, les résultats des immigrants économiques en général.
Pour les raisons exposées à l’annexe A, les études canadiennes antérieures à l’obtention du droit d’établissement, bien qu’elles soient incluses dans l’analyse, ne procurent pas des résultats utilisables comme renseignements sur les antécédents pour le système de sélection.
Enfin, le niveau des gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement était en forte corrélation positive avec les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Les personnes ayant de faibles gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement ne jouissent pas d’un avantage sur le plan des gains en emploi par rapport aux personnes n’affichant pas de gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement, mais l’avantage était important dans le cas des personnes ayant touché des gains en emploi plus élevés après l’obtention du droit d’établissement. Il importe de rappeler que ce résultat a été obtenu après la prise en compte de l’effet de variables liées aux antécédents comme le niveau de scolarité, la langue et l’âge. Les gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement sont en forte corrélation positive avec les gains en emploi dans les groupes établis par niveau de scolarité, langue et âge.
Les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement comme facteur dans le système de sélection des immigrants
Comme on l’a fait remarquer plus haut, la variable des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement est de loin la plus efficace des variables utilisées dans le cadre de l’analyse pour ce qui est de prédire les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement. Il n’est pas étonnant que les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement soient fortement corrélés avec les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement, puisque les résultats passés sont bien souvent les meilleurs prédicteurs des résultats futurs. Essentiellement, les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement reflètent un certain nombre de caractéristiques autrement latentes de demandeurs potentiels qui sont en corrélation avec des gains en emploi élevés. L’effet de ces caractéristiques est bien supérieur aux effets du niveau de scolarité, des compétences linguistiques et de l’expérience de travail, qui sont pris en compte dans l’analyse. Parmi les caractéristiques latentes probables, mentionnons les relations interpersonnelles, les capacités de résolution de problèmes, des compétences en communication, des aspects du profil linguistique qui ne sont pas mesurés par les variables linguistiques faisant l’objet d’une déclaration par l’intéressé et la qualité de la scolarité reçue. Les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement reflètent probablement « la valeur marchande effective » des compétences et des qualifications des immigrants (Hou et Picot, 2016). Bien que les « années d’expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement » reflètent la quantité d’expérience de travail antérieure, elle ne reflète pas la qualité de l’expérience de travail dans la même mesure que le niveau des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement.
Les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement sont de loin la variable la plus efficace pour prédire les gains en emploi postérieurs à l’obtention du droit d’établissement, comme l’indiquent clairement les résultats de la régression, et l’ajout de cette variable accroît de façon importante le pouvoir prédictif des modèlesNote de bas de page 35. Puisque les résultats en matière de gains en emploi sont une considération importante aux fins de la sélection de demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique, l’ajout des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement améliorerait les résultats économiques des immigrants ainsi que l’efficacité du système de sélection.
Cependant, la prudence s’impose au moment d’inclure ce facteur dans le système de pointage. En effet, l’attribution d’un trop grand nombre de points à ce facteur pourrait amener les travailleurs étrangers temporaires à devenir la principale source d’immigrants économiques. Or, un tel résultat s’accompagnerait du déplacement graduel du pouvoir de sélection du gouvernement vers les entreprises et les employeurs. Les employeurs qui embauchent des travailleurs étrangers temporaires pourraient accorder la priorité aux besoins en main-d’œuvre à court terme; leurs intérêts ne sont pas toujours alignés sur les objectifs à long terme du gouvernement pour ce qui est de la compétitivité et du développement du capital humain (Crossman, Hou et Picot, 2020). Il faudrait donc faire preuve de prudence au moment de déterminer le nombre de points à attribuer aux gains en emploi antérieurs à l’obtention du droit d’établissement.
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Annexe A : Interprétation de l’effet des « années d’études au Canada »
Les résultats de la régression présentés dans le tableau 5 figurant en annexe montrent que le nombre d’années d’études au Canada avant l’obtention du droit d’établissement est en corrélation négative avec les gains, particulièrement dans les premières années suivant l’obtention du droit d’établissement. Par exemple, dans la cohorte de 2012–2015, les personnes ayant deux ou trois années d’études au Canada avant l’obtention du droit d’établissement gagnaient 0,194 point logarithmique (18 %) de moins que celles n’ayant pas fait d’études au Canada. On pourrait penser le contraire, mais cette observation concorde avec les conclusions d’une étude antérieure (Bonikowska, Hou et Picot, 2015). Un certain nombre de raisons expliquent ce résultat.
Premièrement, si aucun autre facteur de sélection n’est pris en compte, il y a une corrélation positive entre les études au Canada avant l’obtention du droit d’établissement et les gains en emploi à court terme après l’obtention du droit d’établissement. Cette association devient négative après la prise en compte de nombreuses autres caractéristiques liées aux antécédents, y compris le niveau de scolarité (p. ex. : le fait de détenir un baccalauréat), les années d’expérience au Canada et la maîtrise d’une langue officielle. Il est possible — les caractéristiques observables étant similaires par ailleurs — que d’ex étudiants étrangers présentent une motivation ou des capacités latentes inférieures à celles d’autres immigrants économiques. Au moment d’expliquer une conclusion analogue aux États Unis, Lowell et Avato (2014) laissent entendre que les personnes qui commencent par faire des études aux États Unis ne sont probablement pas aussi prisées que les immigrants économiques qui doivent démontrer qu’ils sont compétents et prêts à travailler pour être sollicités à l’étranger par des employeurs américains. Une étude australienne révèle également que de nombreux ex étudiants étrangers obtiennent des résultats médiocres sur le plan de l’emploi et des gains en emploi par comparaison à d’autres immigrants qualifiés parce qu’ils ne possèdent pas une solide maîtrise de l’anglais et étudient dans un domaine peu recherché (Hawthorne et To, 2014).
Deuxièmement, les immigrants qui ont étudié au Canada avant d’obtenir le droit d’établissement sont plus susceptibles de poursuivre leurs études après leur établissement. Dans l’échantillon de l’étude, 16,6 % des immigrants ayant étudié au Canada avant d’obtenir le droit d’établissement poursuivaient leurs études tout en déclarant des revenus d’emploi durant la première année complète suivant l’obtention du droit d’établissement, alors que seulement 5,5 % des immigrants n’ayant pas étudié au Canada avant l’obtention du droit d’établissement faisaient la même chose. Par conséquent, les personnes ayant fait des études antérieurement au Canada seraient perçues comme gagnant moins d’argent que les autres.
Troisièmement, le résultat négatif pour les études canadiennes concernant les gains en emploi à court terme était surtout évident chez les demandeurs principaux qui avaient de l’expérience de travail antérieure au Canada. Pour les personnes n’ayant pas une telle expérience de travail, les études antérieures au Canada tendaient à ne pas influer de façon importante sur les gains en emploi à court terme (tableau 6 figurant en annexe). Encore ici, la sélection négative est une explication probable. Il est possible que des travailleurs étrangers temporaires ayant trouvé et conservé un emploi bien rémunéré avant d’obtenir le droit d’établissement n’avaient peut-être pas besoin de poursuivre leurs études au Canada et ont maintenu cet avantage après leur immigration. En revanche, les personnes qui n’ont pas pu trouver un emploi bien rémunéré avant d’obtenir le droit d’établissement pourraient choisir de poursuivre leurs études au Canada afin d’améliorer leur qualification; ainsi, elles seraient plus susceptibles de poursuivre leurs études et de réduire leurs heures de travail après avoir obtenu le droit d’établissement.
Annexe B : Tableaux annexes
Tableau 5 : Statistiques descriptives des variables appliquées aux demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique qui ont produit une déclaration de revenus pour la première année complète après l’obtention du droit d’établissement
Variables
Obtention du droit d’établissement
2012 to 2015
2008 to 2011
2005 to 2007
Groupe d’âge à l’admission
De 20 à 24
4,2 %
2,8 %
1,5 %
De 25 à 29
29,1 %
23,3 %
16,9 %
De 30 à 34
28,3 %
24,9 %
27,0 %
De 35 à 39
18,4 %
20,7 %
23,2 %
De 40 à 44
11,1 %
15,0 %
17,7 %
De 45 à 49
6,2 %
9,4 %
10,3 %
De 50 à 54
2,7 %
4,0 %
3,5 %
Niveau de scolarité à l’admission
Études secondaires tout au plus
10,2 %
9,3 %
4,6 %
Certificat professionnel
6,4 %
6,4 %
4,1 %
Diplôme ou certificat autre qu’universitaire
9,8 %
12,5 %
9,4 %
Études universitaires (aucun diplôme)
3,9 %
1,1 %
2,2 %
Baccalauréat, <= 14 années d’études
8,6 %
7,6 %
5,5 %
Baccalauréat, >= 15 années d’études
35,4 %
36,6 %
45,5 %
Maîtrise, <= 16 années d’études
2,3 %
2,2 %
3,3 %
Maîtrise, >= 17 années d’études
20,6 %
20,3 %
21,0 %
Doctorat
2,9 %
3,9 %
4,5 %
Langue à l’admission
Ne parle ni anglais ni français
3,9 %
7,0 %
12,6 %
Autre langue maternelle, bilingue
2,2 %
4,2 %
5,5 %
Autre langue maternelle, français
0,1 %
0,3 %
0,4 %
Autre langue maternelle, anglais
80,6 %
75,1 %
68,8 %
Français comme langue maternelle
1,2 %
1,1 %
0,8 %
Anglais comme langue maternelle
12,0 %
12,4 %
11,8 %
Années d’expérience de travail au Canada à l’admission
1
4,1 %
5,4 %
4,1 %
2
12,8 %
12,5 %
6,3 %
3
16,5 %
12,3 %
5,8 %
4
12,8 %
6,8 %
4,0 %
>= 5
16,1 %
7,0 %
3,8 %
Aucune expérience de travail au Canada
37,6 %
56,0 %
76,0 %
Années d’études au Canada à l’admission
De plus de 0 à moins de 1
1,6 %
0,6 %
0,5 %
De 1 à moins de 2
6,2 %
2,0 %
1,2 %
De 2 à moins de 3
6,0 %
2,3 %
2,0 %
De 3 à moins de 4
3,4 %
2,4 %
2,3 %
De 4 à moins de 5
3,5 %
3,3 %
2,7 %
5 ou plus
6,7 %
7,3 %
4,2 %
Aucune expérience d’études au Canada
72,6 %
82,1 %
87,1 %
Avec un conjoint à l’admission
Non
47,0 %
38,2 %
32,5 %
Oui
53,0 %
61,8 %
67,5 %
Niveau de scolarité du conjoint à l’admission
Célibataire
47,0 %
38,2 %
32,5 %
Études secondaires tout au plus
10,1 %
13,4 %
11,9 %
Certificat officiel d’une école de métiers ou formation d’apprenti
2,5 %
3,1 %
3,3 %
Diplôme ou certificat autre qu’universitaire
5,0 %
7,9 %
8,8 %
Études universitaires (aucun diplôme)
2,4 %
1,3 %
3,7 %
Baccalauréat, <= 14 années d’études
4,8 %
5,6 %
5,3 %
Baccalauréat, >= 15 années d’études
17,9 %
20,8 %
24,3 %
Maîtrise, <= 16 années d’études
1,4 %
1,5 %
2,0 %
Maîtrise, >= 17 années d’études
8,3 %
7,2 %
7,1 %
Doctorat
0,7 %
1,0 %
1,1 %
Langue du conjoint à l’admission
Célibataire
47,0 %
38,2 %
32,5 %
Ne parle ni anglais ni français
5,5 %
8,9 %
17,1 %
Autre langue maternelle, bilingue
0,9 %
1,7 %
2,0 %
Autre langue maternelle, français
0,1 %
0,2 %
0,4 %
Autre langue maternelle, anglais
41,5 %
44,1 %
40,8 %
Français comme langue maternelle
0,3 %
0,3 %
0,3 %
Anglais comme langue maternelle
4,7 %
6,6 %
6,9 %
Expérience de travail au Canada du conjoint à l’admission
Célibataire
47,0 %
38,2 %
32,5 %
1
3,6 %
3,5 %
2,1 %
2
3,6 %
3,1 %
2,0 %
3
2,5 %
1,8 %
1,2 %
4
1,5 %
0,8 %
0,5 %
>= 5
1,4 %
0,7 %
0,4 %
Aucune expérience de travail au Canada
40,5 %
51,9 %
61,2 %
Expérience d’études au Canada du conjoint à l’admission
Célibataire
47,0 %
38,2 %
32,5 %
De plus de 0 à moins de 1
0,2 %
0,2 %
0,2 %
De 1 à moins de 2
0,7 %
0,4 %
0,4 %
De 2 à moins de 3
0,7 %
0,5 %
0,4 %
De 3 à moins de 4
0,4 %
0,3 %
0,4 %
De 4 à moins de 5
0,4 %
0,3 %
0,3 %
5 ou plus
0,7 %
0,8 %
0,4 %
Aucune expérience d’études au Canada
49,9 %
59,3 %
65,3 %
Gains au Canada avant l’obtention du droit d’établissement à l’admission
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Tableau 6 : Coefficients des modèles de régression par les moindres carrés ordinaires visant à prédire les revenus d’emploi des demandeurs principaux de la catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et expérience de travail au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Tableau 7 : Coefficients des modèles de régression par les moindres carrés ordinaires visant à prédire les revenus d’emploi des demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par groupe linguistique
Cohorte de 2012–2015
Coefficients
1‑2 ans
Langue maternelle : anglais ou français
Autre langue maternelle, parle anglais/ français
Autre langue maternelle, ne parle aucune langue officielle
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Cohorte de 2008–2011
Coefficients
1‑2 ans
5‑6 ans
Langue maternelle : anglais ou français
Autre langue maternelle, parle anglais/ français
Autre langue maternelle, ne parle aucune langue officielle
Langue maternelle : anglais ou français
Autre langue maternelle, parle anglais/ français
Autre langue maternelle, ne parle aucune langue officielle
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Cohorte de 2005-2007
Coefficients
1‑2 ans
5‑6 ans
10‑11 ans
Langue maternelle : anglais ou français
Autre langue maternelle, parle anglais/ français
Autre langue maternelle, ne parle aucune langue officielle
Langue maternelle : anglais ou français
Autre langue maternelle, parle anglais/ français
Autre langue maternelle, ne parle aucune langue officielle
Langue maternelle : anglais ou français
Autre langue maternelle, parle anglais/ français
Autre langue maternelle, ne parle aucune langue officielle
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Tableau 8 : Coefficients des modèles de régression par les moindres carrés ordinaires visant à prédire les gains en emploi des demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par cohorte, avec les gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement comme prédicteur
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Tableau 9 : Coefficients des modèles de régression par les moindres carrés ordinaires visant à prédire les revenus d’emploi des demandeurs principaux d’une catégorie de l’immigration économique, par nombre d’années depuis l’obtention du droit d’établissement et par niveau des gains en emploi au Canada avant l’obtention du droit d’établissement
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.
Remarque : Les variables indépendantes dans ce tableau sont mesurées à l’obtention du droit d’établissement.
Source : Statistique Canada, Base de données longitudinales sur l’immigration.