Le faible revenu et l’immigration : Survol et orientation future de la recherche

Par Eden Crossman

Mars 2013

Les avis et opinions exprimés dans le présent document sont ceux de l'auteur et ne sont pas nécessairement ceux de Citoyenneté et Immigration Canada ni du gouvernement du Canada.

Ci4-126/2014F-PDF
978-0-660-22519-7

Numéro de référence : R21-2012

Table des matières

Sommaire

Les tendances récentes indiquent que l’écart entre les taux de faible revenu des immigrants et ceux des personnes nées au Canada s’est considérablement élargi depuis 1980. Cette augmentation des taux de faible revenu chez les immigrants récents par rapport aux personnes nées au Canada et aux immigrants qui sont au Canada depuis plus longtemps est matière à inquiétude, car le faible revenu peut éventuellement empêcher les immigrants et leurs familles de participer avec dignité à la vie économique, sociale et culturelle de leur collectivité. Bien que les études récentes révèlent une amélioration des résultats économiques des immigrants par rapport aux personnes nées au Canada, il reste des immigrants pour qui il n’y a pas eu d’augmentation du rendement économique relatif et qui vivent en situation de faible revenu chronique. C’est là l’un des défis les plus graves auxquels le Canada est confronté sur le plan social et sur le plan du marché du travail. Le présent rapport a pour objectif de présenter un aperçu de la situation de faible revenu des immigrants au Canada en faisant ressortir les aspects de cette question qui méritent de faire l’objet d’une recherche supplémentaire. Ce rapport se présente en quatre parties. La partie un examine l’importance stratégique de la question du faible revenu et de l’immigration. La partie deux présente une description des mesures de faible revenu et mentionne les différences à prendre en compte au moment d’utiliser ces indicateurs pour évaluer les résultats économiques des immigrants. La partie trois poursuit avec un examen, fondé sur une analyse des documents de recherche, des facteurs qui contribuent aux situations de faible revenu des immigrants au Canada. Enfin, la partie quatre présente un bref résumé accompagné d’éléments de recherche et de données pour l’étude de la question du faible revenu et de l’immigration à l’avenir.

Un certain nombre de lignes de faible revenu sont utilisées pour l’élaboration des politiques dans le domaine de l’intégration économique des immigrants. Les mesures de faible revenu, comme le seuil de faible revenu (SFR) et les mesures de faible revenu (MFR) de Statistique Canada, ainsi que la mesure du panier de consommation (MPC) de Ressources humaines et Développement des compétences Canada peuvent être utilisées pour identifier les membres de la population à faible revenu, tandis que les mesures de faible revenu chronique et d’intensité de faible revenu sont souvent utilisées pour étudier les tendances de la gravité et de la durée des périodes de faible revenu vécues par les immigrants. Il est utile de comprendre si une situation de faible revenu est passagère ou persistante, puisque les mesures politiques peuvent être très différentes. Les mesures actuelles relatives au faible revenu ont pour objet d’identifier les personnes à faible revenu sous différents angles. Étant donné les nombreuses dimensions du faible revenu, il se peut qu’il ne soit pas possible de trouver une seule mesure qui présente un tableau complet; nombre des études examinées indiquent plutôt qu’il serait plus utile de mettre au point ou d’adopter plusieurs mesures de faible revenu. Bien que l’usage du SFR ait été prévalent jusqu’à présent dans les études portant sur les immigrants et le faible revenu, l’obsolescence croissante de cette mesure (qui accumule un nombre croissant d’années à partir d’une année de base de 1992), accompagnée des nouveautés en matière de données, laisse entrevoir la probabilité d’un usage plus prévalent à l’avenir des mesures fondées sur la MFR (mesure dérivée de la répartition des revenus dans la population sous-jacente chaque année).

Le faible revenu est largement accepté en tant qu’indicateur de la mesure dans laquelle les membres de la société ont accès aux ressources économiques, et il est donc souvent utilisé comme indicateur clé de l’intégration et du bien-être des immigrants. La présente étude examine les facteurs qui contribuent aux résultats en matière de salaire parmi les immigrants récents (le faible revenu chez les immigrants suivant de près les tendances des salaires, puisque ces derniers sont l’élément le plus important du revenu familial, qui est utilisé pour calculer les taux de faible revenu), avec un accent sur la relation entre les caractéristiques des immigrants, ou les attributs socioéconomiques que les immigrants apportent avec eux (y compris la catégorie d’immigration, l’année d’entrée au pays et le nombre d’années au Canada, l’âge, l’éducation, le sexe, le pays d’origine, le type de famille, la province de résidence, la profession, etc.), ainsi que les occasions et les obstacles dans la société d’accueil, que ce soit sur le plan économique, social ou institutionnel. Seules des comparaisons peuvent révéler les facteurs qui pourraient expliquer pourquoi certains groupes peuvent en fin de compte être plus ou moins touchés par le faible revenu. Dans l’ensemble, le faible revenu chez les immigrants a de multiples causes. Par exemple, pour les immigrants en âge de travailler, un décalage dans leurs caractéristiques et la nature cyclique de l’économie peuvent créer pour eux des obstacles supplémentaires sur le marché du travail, alors que pour les immigrants d’âge mûr, la taille et le type de famille, ainsi que les raisons pour lesquelles ils ont immigré peuvent produire différents niveaux de revenus.

Après une revue des publications récentes sur la situation de faible revenu des immigrants au Canada et un examen des différentes mesures de faible revenu, le présent rapport détermine en conclusion les possibilités de nouvelles recherches. Plus précisément, il y a une lacune sur le plan des études sur le faible revenu chez les immigrants après 2006, année du dernier recensement de la population canadienne. Sur le plan des politiques, la période suivant 2006 est d’importance cruciale pour deux raisons clés en ce qui concerne la compréhension de la situation de faible revenu des immigrants au Canada aujourd’hui. Tout d’abord, de nombreux changements dans les politiques d’immigration ont eu lieu depuis 2002, à commencer par la mise en œuvre de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR), et il est important de comprendre l’effet de ces changements sur la situation des nouveaux immigrants. Deuxièmement, la conjoncture du marché du travail dans tout le Canada (et dans de nombreuses autres régions du monde) depuis 2006 a changé considérablement (p. ex. l’économie canadienne a subi une récession récente, d’octobre 2008 à octobre 2009). Compte tenu des récents changements dans les politiques d’immigration ainsi que du ralentissement et de la reprise économique tant au Canada que dans le monde, c’est dans ce nouveau contexte qu’il faut examiner la situation de faible revenu des immigrants récents.

À cette fin, il faudra disposer de données qui contribueront à la compréhension de la situation de faible revenu des immigrants de toutes les catégories, y compris la catégorie de l’immigration économique, et surtout les catégories du regroupement familial et des réfugiés. Il y a eu par le passé un usage assez constant de nombreuses études de Statistique Canada pour l’examen de la situation de faible revenu des immigrants et des autres Canadiens, plus particulièrement le recensement, l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) et, dans une moindre mesure, la banque de Données administratives longitudinales (DAL) – Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM) (la base de données DAL-BDIM). L’évolution récente de ces enquêtes utilisées par le passé a d’importantes répercussions (examinées dans le présent rapport) sur les analyses subséquentes de la situation de faible revenu des immigrants. Il est probable qu’une BDIM récemment restructurée, comprenant aussi maintenant la composition de la famille, deviendra la principale source d’information pour l’examen des transitions des immigrants sur le marché du travail, y compris les débuts et fins de périodes de faible revenu. Compte tenu de l’accent stratégique mis sur l’amélioration de la situation économique des immigrants, la recherche et la production de données dans le domaine du faible revenu – incidence et causes – est une priorité.

Introduction

Les résultats d’études révèlent le problème inquiétant du faible revenu chez les immigrants récents au Canada (voir, par exemple, Picot, Lu et Hou, 2009; Fleury, 2007; Picot, Hou et Coulombe, 2007; Picot et Sweetman, 2005; Palameta, 2004; et Picot et Hou, 2003). Il ressort systématiquement que les immigrants récents sont l’un des groupes de personnes non âgées les plus susceptibles d’avoir un faible revenuNote de bas de page 1. Le faible revenu est bien plus fréquent chez les immigrants récents que chez les personnes nées au Canada, et les tendances récentes indiquent une augmentation des taux de faible revenu chez les immigrants récents (bien que ces taux soient moins élevés chez les immigrants établis au Canada depuis plus longtemps)Note de bas de page 2. De plus, bien que les taux de faible revenu chez les immigrants récents aient accusé une tendance à la hausse, ils ont baissé chez les personnes nées au CanadaNote de bas de page 3. Par conséquent, plutôt que de se refermer, l’écart entre les taux de faible revenu chez les immigrants et les personnes nées au Canada s’est considérablement accru.

Selon les données du recensement, la forte augmentation de l’écart entre les taux de faible revenu des immigrants et ceux des Canadiens de naissance s’est produite au cours des trois dernières décennies. En 1980, les immigrants récents avaient un taux de faible revenu de 25 %, soit 1,4 fois celui des personnes nées au Canada; en 2000, ce taux était passé à 35,8 %, soit 2,5 fois plus élevéNote de bas de page 4. Les résultats du recensement de 2006 révèlent que les immigrants qui sont arrivés au Canada en 2004 étaient trois fois plus susceptibles que la plupart des Canadiens d’avoir un faible revenu. Parmi ces nouveaux arrivants, 34,1 % figuraient dans la catégorie de faible revenu du recensement, par comparaison à 9,7 % pour tous les CanadiensNote de bas de page 5. Picot et Hou (2003) affirment que l’augmentation ne peut être attribuée à une mauvaise conjoncture économique en 2000 comparativement aux pointes des cycles économiques précédents; le taux de chômage en 2000 était de 6,8 %, inférieur à celui observé en 1990 (8,1 %) ou en 1980 (7,5 %). Il semble donc qu’il y ait eu une hausse structurelle du taux de faible revenu des immigrants récents.

Bien que les résultats des études récentes indiquent une amélioration des résultats économiques des immigrants par rapport aux personnes nées au Canada (voir, par exemple, le document de la Division de l’évaluation de Citoyenneté et immigration Canada, 2010; Kustec et Xue, 2009), il reste des immigrants pour qui il n’y a pas eu d’augmentation du rendement économique relatif et qui vivent dans un état de faible revenu chroniqueNote de bas de page 6. C’est là l’un des défis les plus grands auxquels le Canada doit faire face sur le plan social et sur le plan du marché du travail. Le présent rapport a pour objectif de présenter un aperçu de la situation de faible revenu des immigrants au Canada en faisant ressortir les aspects de cette question pour lesquels d’autres recherches s’imposent. Ce rapport se présente en quatre parties. La première partie comprend un examen de l’importance stratégique de la question du faible revenu et de l’immigration. La deuxième partie présente une description des mesures de faible revenu et mentionne les différences à prendre en compte au moment d’utiliser ces indicateurs pour évaluer les résultats économiques des immigrants. Ensuite, la troisième partie comporte un examen, fondé sur une revue des documents de recherche, des facteurs qui contribuent aux situations de faible revenu des immigrants au Canada. Enfin, la quatrième partie présente un bref résumé accompagné d’éléments de recherche et de données pour l’étude de la question du faible revenu et de l’immigration à l’avenir.

Enjeu

Le faible revenu influe éventuellement sur la capacité des immigrants et de leur famille à participer avec dignité à la vie économique, sociale et culturelle de leurs collectivités. Le faible revenu est largement accepté en tant qu’indicateur de l’accès aux ressources économiques qu’ont les membres de la société, et il est donc souvent utilisé comme indicateur clé de l’intégration et du bien-être des immigrants. Par exemple, si la représentation des groupes d’immigrants parmi ceux qui ont un faible revenu est élevée, cela peut avoir de graves répercussions sur leur d’intégration. Le faible revenu est couramment utilisé dans les recherches comme indicateur subrogatif du niveau de pauvreté (voir les détails dans l’encart intitulé Faible revenu, pauvreté et bien-être), et de nombreux spécialistes des sciences sociales reconnaissent que vivre dans la pauvreté non seulement affecte la sécurité physique de la vie des personnes, mais a aussi une incidence négative sur leur bien-être psychologique et social et leur capacité de participer aux activités de la vieNote de bas de page 7. Camarota (1999) affirme qu’un faible revenu généralisé rend beaucoup plus difficile la participation aux échanges équitables qui font partie intégrante du processus démocratiqueNote de bas de page 8. D’après lui, la recherche en sciences sociales indique que la répartition du revenu a une incidence sur la façon dont les gens se perçoivent mutuellement, et une prévalence du faible revenu s’accompagne d’une diminution de la confiance envers les autres et d’une augmentation de la méfiance. Par conséquent, dit-il, les grands écarts de revenu ne peuvent que contribuer à créer une distance sociale accrue entre les membres d’une collectivité, ce qui pourrait peut-être nuire à l’harmonie politique et sociale.

Du point de vue fiscal, il y a aussi lieu de se préoccuper de la situation de faible revenu des immigrants. D’après Camarota (1999), il y a certainement lieu de s’inquiéter de l’influence de l’immigration sur l’incidence de faible revenu en raison de l’effet que cela cause sur les pauvres déjà dans le pays, tant ceux qui sont nés au Canada que les immigrants. Selon cet argument, si l’immigration augmente le nombre de personnes qui ont besoin d’aide, le coût de cette aide ne peut qu’augmenter. Parallèlement, toujours selon cet argument, si les dépenses globales du gouvernement en matière de programmes destinés à ceux dont le revenu est faible demeurent constantes, l’ampleur de cette aide pour chaque bénéficiaire doit être réduite de sorte que tout le monde puisse être couvert. Par conséquent, si l’on s’inquiète des pauvres déjà présents, augmenter le nombre de personnes qui ont un faible revenu ou presque au moyen de l’immigration va à l’encontre des objectifs de réduction du faible revenu dans la société. Camarota signale également dans son étude que, compte tenu de leur très faible revenu et de la nature dégressive de la plupart des impôts, les personnes à faible revenu paient très peu d’impôt. Aussi, elles tendent à utiliser un grand nombre des services fournis par le gouvernement et, par conséquent, représentent une perte nette des fonds publics. Si l’immigration augmente la taille de la population à faible revenu, il est très probable que cela aura une incidence négative sur l’assiette fiscale, surtout dans les endroits où la plupart des immigrants s’établissent.

Camarota conclut en précisant que dans tout débat concernant l’immigration comme étant la cause du faible revenu, il convient de se rappeler que l’immigration est une politique discrétionnaire du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral détermine la taille, la croissance et les caractéristiques de la population d’origine étrangère en établissant le niveau d’immigration. Autrement dit, même si le gouvernement peut prendre des mesures pour améliorer le faible revenu causé par des facteurs comme les changements de structure familiale ou l’économie, il n’en demeure pas moins que ce sont là des phénomènes sociaux complexes qui ne sont pas un résultat direct d’une politique fédérale précise. Par contre, il est possible d’éviter le faible revenu découlant de l’immigration, ce qui n’est pas le cas du faible revenu causé par la conjoncture dans le pays.

Faible revenu, pauvreté et bien-être

Les mesures de faible revenu ne sont pas des mesures de pauvreté ni de bien-être. Les seuils de faible revenu s’obtiennent plutôt à l’aide d’une méthodologie logique et bien définie qui permet de déterminer qui s’en tire beaucoup moins bien que la moyenne sur le plan du revenu. Mais s’en tirer beaucoup moins bien que la moyenne ne signifie pas nécessairement qu’on soit pauvreNote de bas de page 9. Les mesures de faible revenu (qui sont fondées sur le revenu familial, y compris les transferts gouvernementaux, les revenus de placements et de pensions de retraite, ainsi que les revenus d’emploi, et présentent un tableau des ressources économiques à la disposition des familles) ne comprennent pas les aspects non économiques du bien-être de l’être humain. Quand on a établi un seuil de revenu en deçà duquel un ménage est considéré comme ayant un faible revenu, la société se divise en deux groupes – ceux dont le revenu est au-dessous de la ligne (les non-nantis) et ceux dont le revenu est au-dessus (les nantis)Note de bas de page 10. Le principal facteur sur lequel repose la méthode fondée sur le revenu est la disponibilité de renseignements concernant le revenu et la répartition de ceux-ci. D’après Sarlo (1996), même si l’on reconnaît que le revenu est un indicateur imparfait du bien-être sur le plan individuel, globalement il constitue une approximation raisonnable des choix de consommation qui s’offrent aux ménages. Cela étant, bien que les mesures de faible revenu soient couramment utilisées comme des indicateurs de pauvreté, elles ne sont pas officiellement reconnues comme des indicateurs de pauvreté au CanadaNote de bas de page 11.

Contrairement aux mesures de faible revenu, les mesures de pauvreté tiennent compte de nombreux aspects non économiques du bien-être. Selon les Nations Unies (1995), « [l]es manifestations de la pauvreté sont diverses : revenus et moyens de production insuffisants; faim et malnutrition; mauvaise santé; difficulté d'accès à l'éducation et autres services de base; taux croissants de morbidité et de mortalité dus aux maladies; absence de logement et mauvaises conditions de logement; insécurité, discrimination sociale et marginalisation. Elle se caractérise également par l'exclusion de la prise de décisions et de la vie civile, sociale et culturelle. Tous les pays sont touchés : de nombreux pays en développement par le paupérisme massif et les pays développés par l'existence de foyers de pauvreté au milieu de la prospérité. La pauvreté peut être causée par une récession économique entraînant une perte d'emplois ou par une catastrophe ou un conflit. Il ne faut pas oublier la pauvreté des travailleurs mal payés à bas revenu et l'indigence totale de ceux qui ne sont pas protégés par les réseaux d'entraide familiale, par des services sociaux ou par des filets de sécurité. » Ceci dit, il n’est pas simple de définir la pauvreté (Statistique Canada, 2012). La difficulté sous-jacente tient au fait que la pauvreté est une question de consensus social, définie à un moment particulier dans un pays donné. Par conséquent, les décisions sur la façon de définir la pauvreté sont subjectives et, à la limite, arbitraires.

Si le faible revenu est un indicateur de la mesure dans laquelle certains Canadiens sont moins bien nantis que d’autres exclusivement fondé sur le revenu, il n’est pas non plus une mesure globale du bien-être. Le mieux-être comporte une panoplie multidimensionnelle de facteurs sociaux, économiques et environnementaux. La façon dont ils sont interreliés et interagissent influence profondément notre mieux-êtreNote de bas de page 12. On évalue généralement le bien-être en tenant compte d’un large éventail de facteurs, comme la qualité du logement, le revenu, l’emploi, les réseaux de soutien social, l’éducation, la gouvernance, la santé, la satisfaction à l’égard de la vie, la sécurité et l’équilibre travail-vie (voir, par exemple, Indicateur du vivre mieux, de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Indice canadien du mieux-être, et Indicateurs de mieux-être de Ressources humaines et Développement des compétences Canada). Ainsi donc, le faible revenu en tant que mesure d’égalité est un élément clé dans l’analyse du bien-être économiqueNote de bas de page 13.

Les mesures de faible revenu

Afin de déterminer les situations de faible revenu dans la population du Canada, plusieurs indicateurs ont été créés, dont le seuil de faible revenu (SFR) de Statistique Canada, les mesures de faible revenu (MFR) et la mesure du panier de consommation (MPC) de Ressources humaines et Développement des compétences Canada. Chacune de ces mesures établit des seuils précis et, par conséquent, rend compte de différentes incidences de faible revenu. Selon Murphy, Zhang et Dionne (2012), les lignes de faible revenu de Statistique Canada visent principalement à donner une idée de l’étendue, de la nature et de l’évolution des personnes à faible revenu pouvant être considérées comme menacées de pauvreté.

L’état de faible revenu est déterminé en fonction du revenu de la famille ou du ménage. Comme le faible revenu est un concept familial, il donne une meilleure idée du bien-être économique des familles ou des ménages que les gains individuelsNote de bas de page 14. Étant donné que les membres d’une famille se soutiennent normalement les uns les autres financièrement, il est logique de considérer la famille comme unité économique plutôt que de prendre chacun de ses membre individuellement (voir l’encart intitulé Définitions de la famille utilisées dans les mesures de faible revenu). Par conséquent, les taux de faible revenu sont fondés sur le revenu de la famille ou du ménage (c.-à-d. la somme des revenus de tous les membres du groupe). Si cette somme se situe en deçà du seuil de faible revenu, tous les membres sont considérés comme étant en état de faible revenu, indépendamment de ce que chaque personne gagne. Les mesures de faible revenu se fondent sur la taille de la famille ou du ménage pour prendre en compte l’augmentation des besoins de la famille ou du ménage au fur et à mesure que le nombre de ses membres augmente.

Comme dans le cas de toute mesure, il est important de prendre en considération tant les points forts que les points faibles de l’indicateur. Comme il a été mentionné, les mesures de faible revenu offrent l’avantage clé de mieux dépeindre le bien-être économique des familles d’immigrants que ne le font les gains individuels. Un autre avantage du critère de faible revenu par rapport aux gains d’emploi comme mesure de résultats est le fait que le taux de faible revenu inclut ceux qui sont sans emploi ou inactifs sur le marché du travailNote de bas de page 15. De plus, le faible revenu prend également en compte les sources de revenu autres que les gains, comme les transferts sociauxNote de bas de page 16. Cependant, deux inconvénients que présentent toutes les mesures de faible revenu méritent d’être signalés. Premièrement, quand l’on utilise une mesure du faible revenu, il est possible que ceux identifiés comme ayant un faible revenu ne soient pas tous pauvresNote de bas de page 17. La richesse (comme les actifs, les maisons, les subventions au logement, etc.) ne sont pas pris en compte dans la mesure du faible revenu; cela peut avoir une importance plus marquée pour certains segments de la population (c.-à-d. immigrants par opposition à personnes nées au Canada). Si les calculs standard du faible revenu fondés sur le revenu étaient amenés à inclure la consommation et les actifs, les taux de faible revenu seraient bien moins élevés que ceux estimés au moyen des mesures standard. Par exemple, les travailleurs indépendants ayant un revenu négatif et les personnes qui perçoivent des gains en capital ou des transferts entre ménages, mais ayant très peu de revenus d’emploi. Deuxièmement, les mesures de faible revenu peuvent ne pas identifier tous ceux qui sont réellement en situation de faible revenuNote de bas de page 18. Par exemple, ceux qui ont de très grandes dépenses en soins de santé et qui pourraient en bout de compte ne disposer que de très peu de revenus pour la nourriture, le logement et les vêtements.

Définitions de la famille par Statistique Canada

Famille de recensement s’entend des couples mariés (avec ou sans enfants, du couple ou de l’un ou l’autre des conjoints), des couples en union libre (avec ou sans enfants, du couple ou de l’un ou l’autre des partenaires), des parents seuls, sans égard à leur état matrimonial, habitant avec au moins un enfant dans le même logement. Un couple peut être de sexe opposé ou de même sexe. Les petits-enfants habitant avec leurs grands-parents sans leurs parents constituent également une famille de recensement.

Famille économique s’entend d’un groupe de deux personnes ou plus habitant dans le même logement et apparentées par le sang, par alliance, par union libre ou par adoption. Le couple peut être de sexe opposé ou de même sexe. Toute personne qui est membre d’une famille de recensement est également membre d’une famille économique; cependant, la réciproque n’est pas vraie. Par conséquent, le concept de famille économique peut s’étendre à un plus grand groupe de personnes que celui de la famille de recensement.

Ménage s’entend d’une personne ou d’un groupe de personnes (autres que des résidents étrangers) qui occupent le même logement et n’ont pas de domicile habituel ailleurs au Canada. Le ménage peut se composer d’un groupe familial (famille de recensement) avec ou sans autres personnes, de deux familles ou plus partageant le même logement, d’un groupe de personnes non apparentées ou d’une personne vivant seule.

Le concept de famille économique exige seulement que les membres de la famille soient apparentés par le sang, par alliance, par union libre ou par adoption. Par contre, le concept de famille de recensement exige que les membres de la famille soient des conjoints (de sexe opposé ou de même sexe), des partenaires en union libre (de sexe opposé ou de même sexe), un parent seul (homme ou femme) ou un enfant avec un parent. Le concept de famille économique peut donc s’étendre à un plus grand groupe de personnes que celui de la famille de recensement. Par exemple, selon la définition de famille de recensement, une mère veuve vivant avec son fils et sa belle-fille ne serait pas considérée comme membre de la famille. Cependant, cette même personne serait comptée comme membre d’une famille économique, avec son fils et sa belle-fille. Deux familles de recensement ou plus vivant ensemble constituent aussi une famille économique; par exemple, un homme et sa femme vivant avec leur fils et leur belle-fille. Deux frères ou sœurs ou plus vivant ensemble, sans leurs parents, constituent une famille économique, mais pas une famille de recensement, puisqu’ils ne répondent pas aux critères de la définition de cette dernière. Toute personne qui est membre d’une famille de recensement est également membre d’une famille économique. Par contre, les familles de recensement sont exclusivement des familles de « deux générations seulement ». Par conséquent, la définition de famille de recensement ne tient pas compte des immigrants vivant dans des logements abritant plusieurs générations, des familles étendues ou plusieurs familles.

La structure de la famille se rapporte à la combinaison des personnes apparentées qui composent la famille. La classification de la structure familiale consiste en la présence ou l’absence de conjoints mariés légalement ou de partenaires en union libre, d’enfants et, dans le cas de la famille économique, d’autres personnes apparentées. Statistique Canada utilise le concept du principal soutien économique pour catégoriser les familles (c.-à-d. dans une famille, le principal soutien économique est la personne qui a le revenu avant impôt le plus élevé).

Source : Statistique Canada, 2007.

Seuils de faible revenu (SFR)

Les seuils de faible revenu (SFR) de Statistique Canada sont les mesures les plus couramment disponibles pour établir le faible revenu au Canada, avec les séries historiques les plus longues (données remontant aux années 1960). Les SFR sont les limites de revenu en deçà desquelles une famille est susceptible de consacrer une part plus importante de son revenu à l’achat de nécessités comme la nourriture, le logement et l’habillement qu’une famille moyenneNote de bas de page 19. L’approche consiste essentiellement à estimer un seuil de revenu à partir duquel on s’attend à ce que les familles dépensent 20 points de plus que la famille moyenne pour l’alimentation, le logement et l’habillementNote de bas de page 20. On considère qu’une personne a un faible revenu quand son revenu familial total est en dessous du SFR, et qu’une famille a un faible revenu si le revenu familial total est en dessous du SFR.

Le SFR est fondé sur la famille économique. Il varie selon la taille de la famille et la population du lieu de résidence. On compte sept catégories de taille de famille, allant d’une personne à sept personnes ou plus, et cinq tailles de collectivité, allant de zones rurales à villes de 500 000 habitants ou plusNote de bas de page 21. Il en résulte 35 seuils; cette variabilité vise à tenir compte des différences du coût de la vie entre les zones rurales et les zones urbaines. Ces SFR ont été établis selon un sondage sur les dépenses (Enquête sur les dépenses des familles de 1992), puis comparés à un sondage sur les revenus (Enquête sur la dynamique du travail et du revenu, EDTR). Statistique Canada met à jour ces seuils tous les ans à partir de l’indice des prix à la consommation.

Le SFR est considéré une mesure relativeNote de bas de page 22, car les SFR sont estimés en fonction d’une moyenne des dépenses consacrées aux nécessités. Cependant, en pratique, le SFR est devenu une mesure absolue, c’est-à-dire un seuil très déterminé de revenu en deçà duquel une famille peut être considérée comme ayant un faible revenu. Les SFR ont été conçus afin de repérer le faible revenu dans les situations avant impôt et après impôt. Les SFR avant impôt sont fondés sur le revenu total, y compris les paiements de transfert, mais avant les déductions fiscales fédérales et provinciales ou territoriales. Les SFR après impôt sont fondés sur le revenu après que l’impôt fédéral et provincial ou territorial a été payé, mais pas les autres types d’impôt qui peuvent influer sur le revenu disponible (p. ex. les taxes de vente, les impôts fonciers, etc.). L’utilisation des SFR avant impôt (par opposition aux SFR après impôt) surestime l’incidence de faible revenu pour deux raisonsNote de bas de page 23 : premièrement, les taux avant impôt ne reflètent qu’en partie l’incidence totale de la redistribution découlant du système canadien d’impôt et de transferts, puisqu’ils prennent en compte l’effet des transferts, mais non l’effet de l’impôt sur le revenu; deuxièmement, étant donné que l’achat de nécessités est effectué avec des dollars après impôt, il est logique d’utiliser le revenu après impôt des gens pour tirer des conclusions au sujet de leur bien-être économique global. D’après Murphy, Zhang et Dionne (2012), le nombre de personnes tombant sous ces seuils est toujours demeuré plus faible sur une base après impôt qu’avant impôt – en effet, les taux d’imposition « progressifs » engendrent souvent une distribution du revenu plus comprimée; par conséquent, certaines familles se situant dans la catégorie du faible revenu avant de tenir compte des impôts se retrouvent en posture relativement meilleure lorsque le calcul est fondé sur le revenu après impôt et, selon ce critère, ne figurent pas parmi les familles à faible revenuNote de bas de page 24.

Quelques restrictions méritent d’être mentionnées en ce qui concerne l’utilisation et la compréhension des résultats des analyses de faible revenu en fonction des SFR. Tout d’abord, le SFR ne tient pas compte de l’écart du coût de la vie entre les provinces. Le SFR national (en fonction de la taille de la famille et d’une région urbaine) est appliqué aux provinces et aux régions. Par exemple, pour une famille de quatre, le même SFR est appliqué aux familles vivant dans un grand centre urbain en Ontario et au Québec (comme Toronto et Montréal). Par conséquent, les SFR ne tiennent pas compte des variations du coût de la vie entre les communautés de même taille dans des provinces différentes, et il peut y avoir un écart de coût de la vie entre ces villes dont les SFR ne tiennent pas compte (p. ex. le coût de la vie à Montréal peut être beaucoup moins élevé que celui à Toronto ou à Vancouver). Cela peut biaiser toute comparaison de niveaux de faible revenu entre les provincesNote de bas de page 25. C’est là un facteur très important en ce qui concerne l’analyse du faible revenu des immigrants, étant donné que la plupart des immigrants tendent à s’établir dans les grands centres urbainsNote de bas de page 26.

Deuxièmement, avec le temps, il est possible que les SFR deviennent moins pertinents. Les SFR actuels sont fondés sur la relation entre les revenus et les tendances de consommation des ménages canadiens observés en 1992. Bien que l’indice des prix à la consommation soit utilisé pour mettre à jour les seuils, c’est-à-dire pour prendre en compte l’inflation, cela ne représente pas les nouvelles habitudes de dépense pour les nécessitésNote de bas de page 27. Par conséquent, la consommation réelle devient moins pertinente d’année en année, et continuera de l’être en l’absence d’un changement de l’année de baseNote de bas de page 28. Il serait utile de redéfinir les nouvelles habitudes de consommation de nécessités (p. ex. le changement des habitudes de consommation des Canadiens causé par l’essor récent du prix du pétrole et la hausse des coûts de transport, par l’explosion récente du marché immobilier ainsi que par le coût des articles de santé et de soins personnels)Note de bas de page 29.

Troisièmement, il a aussi été dit que le SFR n’est pas transparent pour le public (on l’accuse de ne pas être « simple »)Note de bas de page 30, en raison de ses nombreux choix arbitraires (p. ex. ce qui est inclus et ce qui est exclu en ce qui concerne l’alimentation, le logement et l’habillement, les choix et hypothèses du modèle de régression et ce qui est inclus ou non dans le revenu)Note de bas de page 31. Quatrièmement, les SFR ne perçoivent pas les écarts (l’intensité) et les tendances de faible revenu et, par conséquent, Myles et Picot (2000) déclarent que les chercheurs utilisant les SFR devraient être conscients de la sensibilité de leurs résultats au choix des niveaux de seuil. Cinquièmement, les SFR ne se prêtent pas à une comparaison à l’échelle internationale, étant donné que le SFR porte exclusivement sur le Canada. Malgré certaines des inquiétudes, les SFR sont couramment utilisés pour établir les taux de faible revenu et pour aider à identifier la population à faible revenu. Cela étant, il a été récemment suggéré que le SFR devrait être éliminé puisqu’il est désuet quant à un certain nombre de pointsNote de bas de page 32.

Mesures de faible revenu (MFR)

Essentiellement conçue aux fins de comparaisons internationales, la MFR de Statistique Canada est la mesure de faible revenu la plus couramment utiliséeNote de bas de page 33. Statistique Canada produit la MFR depuis 1991 (bien que la série historique ait été prolongée dans le passé)Note de bas de page 34. Selon la MFR, une personne est considérée comme ayant un faible revenu si son revenu est inférieur à la moitié du revenu médian de la population corrigé selon la taille du ménage (« corrigé » signifie que les besoins du ménage sont pris en compte)Note de bas de page 35. La moyenne est calculée pour toute la population, chaque personne étant représentée par son revenu ménager corrigéNote de bas de page 36. La MFR est ensuite définie comme étant 50 % de la moyenne du revenu ménager corrigé observé au niveau de la personneNote de bas de page 37. Une personne dont le revenu ménager corrigé est inférieur à ce niveau est considérée comme ayant un faible revenu.

La MFR est fondée sur l’unité ménage. Auparavant, l’unité de référence était la famille économique au sein de laquelle les personnes mettaient en commun leur revenu pour bénéficier des économies d’échelle; cependant, le ménage a désormais remplacé la famille économique dans la MFR. Selon le Groupe Canberra (2001), ce changement a été fait pour deux raisons. Premièrement, il est probable que les personnes vivant sous un même toit partagent les coûts du logement, comme l’intérêt de l’hypothèque ou le loyer et les services publics, qu’ils fassent ou non partie d’une autre famille économique (autrement dit, la notion de « ménage » permet un plus grand regroupement des ressources que la famille économique)Note de bas de page 38. Deuxièmement, c’est le ménage qui est la norme internationale dans l’analyse des revenus.

La MFR est une mesure relative dont les résultats sont calculés, ou comparés à la population à un moment donné (p. ex. 50 % de la moyenne du revenu familial corrigé), c’est-à-dire dérivés de la répartition des revenus dans la population sous-jacente tous les ans. (Le faible revenu est relatif selon le revenu de la personne par rapport à celui d’autres.) La MFR est calculée de trois façons – à partir du revenu du marché, du revenu avant impôt et du revenu après impôt, et ce, à partir de l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR). Les MFR varient selon la taille de la famille et sont les mêmes dans toutes les régions du pays. Cela signifie qu’elles ne reflètent pas les différences de coût de la vie entre les diverses régions du pays. Elles n’ont pas aussi à être mises à jour au moyen d’un indice de l’inflation, parce qu’elles sont calculées à partir d’une enquête annuelle sur le revenu des ménages, l’EDTR. Cependant, bien que la MFR soit une ligne de mesure à l’échelle du Canada, des variations géographiques peuvent être aisément prises en compte dans des MFR à l’échelle localeNote de bas de page 39.

Deux restrictions méritent d’être signalées en ce qui concerne l’utilisation et la compréhension des résultats des analyses de faible revenu fondées sur la MFR. Tout d’abord, la MFR n’établit aucun lien direct avec ce qui serait considéré comme les besoins essentiels, puisqu’elle présente exclusivement l’écart entre le revenu d’une personne et la moyenneNote de bas de page 40. Deuxièmement, les seuils de MFR changent tous les ans; par conséquent, il est difficile de fixer des objectifs. De nombreux scientifiques établissent la MFR pour une période donnée afin de pouvoir présenter un seuil constant sur toute la période de l’analyseNote de bas de page 41. Aussi, étant donné qu’il est difficile de faire état de l’avancement annuel vers une cible puisque celle-ci change tous les ans (la MFR étant une mesure relative), on pourrait envisager une moyenne mobile du revenu moyen (c.-à-d. trois ou cinq ans).

Mesure du panier de consommation (MPC)

Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) a mis au point la mesure du panier de consommation (MPC) pour faire état d’un niveau de vie qui soit un compromis entre subsistance et intégration sociale, et qui tienne compte des disparités régionales du coût de la vieNote de bas de page 42. L’année d’instauration de la MPC est 2000. La MPC est fondée sur le coût d’un panier de biens et services correspondant à un niveau de vie de base, modesteNote de bas de page 43. La mesure prend en considération les disparités régionales dans le coût du panier au CanadaNote de bas de page 44. Le panier comprend la nourriture, l’habillement, le transport, le logement et autres biens et services comme les dépenses en soins personnels, le service téléphonique de base, ainsi qu’une modeste mesure de documents de lecture, de loisirs et de divertissementsNote de bas de page 45. Dans le calcul de la MPC, on procède à un certain nombre de rajustements du revenu familial, y compris la déduction des coûts de soin des enfants, des paiements de pension alimentaire, des retenues salariales et autres cotisations, ainsi que des frais non remboursés de soins de santé et le coût des aides sur ordonnance pour personnes handicapées. On aboutit ainsi à un revenu disponible approximatif plutôt qu’à un revenu total ou revenu après impôt utilisé pour les autres mesures de faible revenuNote de bas de page 46. Le grand avantage de la MPC est le fait qu’elle établit un lien entre les seuils établis de faible revenu et les conditions de vie réelles et donc, dans une certaine mesure, ce dont une personne a besoin pour vivre dignement dans une société donnéeNote de bas de page 47.

La MPC est fondée sur la famille économique. Une personne à faible revenu est quelqu’un dont le revenu familial disponible se situe en deçà du coût des biens et services que comprend le panier dans leur collectivité ou une collectivité de taille analogueNote de bas de page 48. Les seuils sont produits pour une famille de deux adultes de 25 à 49 ans et deux enfants de 9 à 13 ans. La MPC produit des seuils à un niveau géographique plus détaillé que les SFR en prévoyant, par exemple, des coûts différents pour les zones rurales dans chaque province. Une échelle d’équivalence permet de déterminer les seuils de revenu pour les autres tailles de famille. L’échelle d’équivalence correspond à la racine carrée de la taille de la famille économique.

La MPC est une mesure absolue, c’est-à-dire un seuil de revenu prédéterminé en deçà duquel une famille peut être considérée comme ayant un faible revenu. Statistique Canada recueille les prix de diverses sources pour calculer la MPC. Les montants de revenu utilisés pour estimer les taux de la MPC sont tirés de l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR)Note de bas de page 49. Étant donné que la notion de revenu utilisée aux fins de la MPC est le revenu disponible pour l’achat de biens et de services contenus dans le panier de la MPC, il n’y a pas de ligne de faible revenu avant ou après impôt pour la MPC, contrairement au SFR et à la MFR. La démarche générale consiste plutôt à retrancher d’abord l’impôt sur le revenu du revenu total, de même que les autres dépenses non discrétionnaires (notamment les cotisations au Régime de pensions du Canada/Régime de rente du Québec, les cotisations d’assurance-chômage, les cotisations à un régime de pension agréé, les cotisations syndicales et professionnelles annuelles, les paiements de soutien versés, les frais de garde d’enfant pour le travail, les dépenses médicales non remboursées et les primes de régime public d’assurance-maladie)Note de bas de page 50. Cette définition élargit la notion classique du revenu après impôt, qui tient compte de l’impôt sur le revenu, mais non des autres dépensesNote de bas de page 51.

Quelques restrictions méritent d’être mentionnées au sujet de l’utilisation de la compréhension des résultats des analyses de faible revenu fondées sur la MPC. Tout d’abord, des restrictions sur le plan des données signifient qu’il faut s’appuyer sur certaines hypothèses dans le calcul des coûts du panier de la MPC. Par exemple, le coût du panier dans les régions rurales est le même que celui dans les plus petits centres urbains analysés au sein d’une provinceNote de bas de page 52. Deuxièmement, il a été dit que le panier (fondé sur le Panier de provisions nutritives – Canada, version 2008) contient un plus grand nombre d’aliments crus et des aliments moins consommés de manière générale au sein de la population à faible revenuNote de bas de page 53. D’aucuns estiment aussi que le panier ne correspond pas exactement aux choix de nourriture des minorités visibles, des immigrants et des Autochtones du CanadaNote de bas de page 54. Troisièmement, les choix arbitraires peuvent avoir d’importantes répercussions. Par exemple, Michaud, Cotton et Bishop (2004) estiment que l’âge de la voiture usagée et le calendrier d’achat de cette voiture dans les calculs de la MPC ont une incidence sur le montant de la composante Transport privé. Par exemple, si une voiture usagée de six ans était achetée tous les six ans, au lieu d’une voiture usagée de cinq ans tous les cinq ans, le coût du transport privé serait réduit de 900 $Note de bas de page 55. En dépit de certaines restrictions, la MPC fournit une mesure absolue du faible revenu qui représente un niveau de vie qui est un compromis entre subsistance et intégration sociale, et tient compte des disparités régionales du coût de la vieNote de bas de page 56.

Comparaison des mesures

La question suivante vient naturellement à l’esprit : comment les mesures se comparent-elles les unes aux autres? Comme le décrivent Zhang, Murphy et Michaud (2011), les trois lignes mesurent différemment le faible revenu. Selon le SFR, le nombre de personnes à faible revenu représente la proportion de la population qui est susceptible de consacrer une portion relativement plus élevée de son revenu aux nécessités. Comparativement, l’incidence de faible revenu selon la MFR correspond à la proportion des personnes dont le revenu est inférieur à la moitié du revenu médian de la population, alors que selon la MPC, elle correspond à la proportion des personnes dont le revenu disponible est inférieur au coût du panier de la MPC dans leur région. Les trois lignes ont chacune des points forts et des points faibles, bien résumés par Zhang, Murphy et Michaud (2011). Sur le plan des points forts, ces auteurs estiment que le SFR a des données historiques qui remontent le plus loin dans le temps, la MFR est simple et se prête à des comparaisons à l’échelle internationale, et la MPC est intuitive et tient compte des disparités régionales. Sur le plan des points faibles, les auteurs estiment que le SFR est de moins en moins pertinent, la MFR peut être contre-intuitive à l’occasion, et la MPC comporte de nombreux jugements et choix arbitraires. Quoique différentes, ces mesures donnent en général, d’après Statistique Canada (2012b), un compte rendu homogène de la situation du faible revenu dans le temps. Toujours dans ce rapport, il est dit qu’il n’y a pas de mesures meilleures que les autres. Chacune possède ses avantages et aborde l’étude du faible revenu selon sa propre perspective; lorsque combinées, elles apportent une meilleure compréhension du phénomène du faible revenu dans sa globalitéNote de bas de page 57.

Dans le graphique ci-dessous (figure 1), cinq mesures différentes de faible revenu sont présentées pour une famille de quatre au Canada en 2010. Lorsque disponibles, les lignes de faible revenu indiquées s’appliquent à une grande ville. Selon le graphique, en dépit de la diversité des mesures de faible revenu fondées sur des bases différentes, les lignes de faible revenu produites ont des résultats semblables. La ligne de faible revenu la plus basse est la MPC, établie à 31 789 $ pour Vancouver et à 33 177 $ pour Toronto, en 2010. La ligne de faible revenu la plus élevée s’élève à 43 544 $, pour la MFR avant impôt au Canada en 2010. Les autres lignes de faible revenu sont à quelques milliers de dollars les unes des autres.

Figure 1 : Les différentes mesures de faible revenu - divers seuils de faible revenu pour une famille de quatre, 2010

Figure 1 : Les différentes mesures de faible revenu - divers seuils de faible revenu pour une famille de quatre, 2010 décrite ci-dessous.
Version texte : Figure 1 : Les différentes mesures de faible revenu - divers seuils de faible revenu pour une famille de quatre, 2010
Mesures Seuils de faible revenu
MFR avant impôt (Canada) 43 544 $
SFR avant impôt (500 000 habitants et plus) 42 065 $
MFR après impôt (Canada) 38 322 $
SFR après impôt (500 000 habitants et plus) 35 469 $
MPC (Toronto) 33 177 $
MPC (Vancouver) 31 789 $

Source : Statistique Canada (2012), « Lignes de faible revenu, 2010 à 2011 », Série de documents de recherche - Revenu.

Dans une étude exhaustive, Zhang (2010) examine et compare la sensibilité de diverses lignes de faible revenu (le SFR, la MFR, une MFR fixe et la MPC)Note de bas de page 58. L’auteur déclare avoir constaté que, à long terme, les résultats des lignes de faible revenu étaient semblables (et sensibles aux indicateurs du cycle économique comme le taux de chômage); cependant, à long terme, elles produisaient des résultats différents. L’auteur avance que ces constatations portent à croire qu’une seule ligne ou un seul indice peut, dans certaines circonstances, prêter à confusion. Pour démontrer cette affirmation, l’étude examine différentes lignes de faible revenu dans des groupes de personnes défavorisées et conclut, par exemple, qu’une MFR fixe n’est pas aussi inclusive que la MPC, ni aussi apte que la MPC à détecter les personnes provenant de familles ayant à leur tête des nouveaux immigrants, bien que globalement, les groupes contribuaient davantage à la prévalence du faible revenu sous une MFR fixe que sous la MPC. L’auteur précise avoir constaté qu’en examinant la capacité des divers indices à déceler les personnes ayant un faible revenu, il a constaté que les personnes classées dans la catégorie de faible revenu en fonction de la MPC étaient susceptibles de ne pas être classées dans cette catégorie selon les autres seuils de faible revenu; cependant, les personnes dont le revenu se situait au-dessus de la MPC étaient peu susceptibles d’être comptées parmi les personnes à faible revenu en fonction des autres seuils. En revanche, les personnes se situant au-dessus de la MFR fixe avaient des chances non négligeables d’être classées dans la catégorie de faible revenu par les autres seuils. Donc, il semble que la MPC décèle un plus grand nombre de personnes à faible revenu que la MFR fixe, ce qui donne à penser que l’année de base d’une MFR fixe doit être modifiée périodiquement afin que la mesure demeure pertinente. L’auteur affirme également que selon ces résultats, dans l’avenir, l’élaboration des seuils de revenu pour la MFR devrait tenir compte des écarts régionaux de coût de la vie.

Application des mesures (taux de faible revenu, écart de faible revenu et durée des périodes de faible revenu)

Le SFR, la MFR et la MPC sont utilisés pour déceler la population à faible revenu au Canada et analyser les tendances importantes et la composition des Canadiens au bas de l’échelle des revenus. Statistique Canada (2012b) explique l’application des diverses mesures de faible revenu, y compris le calcul des taux de faible revenu et des écarts de faible revenu. Tout d’abord, pour déterminer si une personne est à faible revenu, on compare la ligne de faible revenu appropriée (SFR ou MFR, avant ou après impôt, ou MPC,) au revenu de sa famille (ou du ménage) et, si son revenu est inférieur au seuil de faible revenu, la personne est en situation de faible revenu. Autrement dit, l’expression « personne à faible revenu » devrait être interprétée comme désignant les personnes faisant partie d’une famille ou d’un ménage à faible revenu, y compris les personnes vivant seules dont le revenu tombe sous le seuil de faible revenu. Les taux de faible revenu (souvent appelés incidence de faible revenu) comparent le nombre de personnes ou de familles considérées comme ayant un faible revenu dans une catégorie particulière à toutes les personnes ou familles de la même catégorie. Par exemple, le taux de faible revenu chez les immigrants (ou un sous-groupe d’immigrants selon l’âge, le sexe, etc.) peut être calculé d’après le nombre d’immigrants (ou de sous-groupe d’immigrants) à faible revenu divisé par le nombre total de la population d’immigrants (ou du sous-groupe). Deuxièmement, selon le même rapport de Statistique Canada, après avoir déterminé qu’une personne est à faible revenu, on peut analyser l’écart du faible revenu en utilisant le montant correspondant à la différence entre le revenu familial (ou ménager) et le seuil de faible revenu applicable. Par exemple, une personne qui vit dans une famille (ou ménage) ayant un revenu de 15 000 $ et dont le seuil de faible revenu applicable est de 20 000 $ aurait un écart de faible revenu de 5 000 $; cela représente un écart de 25 %. L’écart moyen pour une population donnée, qu’il soit exprimé en dollars ou en pourcentage, est alors la moyenne de ces valeurs telle que calculée pour chaque unitéNote de bas de page 59.

Il est aussi important de tenir compte de la distinction entre ceux qui ont un faible revenu pendant de courtes périodes (peut-être des nouveaux ou tout nouveaux immigrants) et ceux dont le faible revenu est prolongé ou chronique, car les considérations de politique peuvent être différentesNote de bas de page 60. Les analystes stratégiques s’inquiètent davantage des périodes de faible revenu persistant ou chronique que de toutes les autres périodes de faible revenu, dont plusieurs sont très courtesNote de bas de page 61. Sawhill (1988) précise que les estimations de faible revenu sont extrêmement sensibles aux périodes prises en compte. Cet auteur affirme que bien plus de personnes connaissent de courtes périodes de faible revenu temporaire que de longues périodes de faible revenu persistant. Ainsi, les taux de faible revenu fondés sur les courtes périodes, comme un mois, ou dans le cas des immigrants, même une année, seront beaucoup plus élevés et plus volatiles que les taux fondés sur des périodes plus longues. La durée des périodes de faible revenu peut être particulièrement pertinente lorsqu’on examine l’intégration des immigrants. Par exemple, il peut être particulièrement pertinent sur le plan stratégique de savoir quels immigrants sont en situation de faible revenu, à quel moment après être entrés au Canada et pendant combien de temps ils demeurent dans cet état.

Des chercheurs ont mis au point des techniques statistiques selon lesquelles examiner la durée et la « profondeur » du faible revenu. Par exemple, Picot, Hou et Coulombe (2007) ont mis au point une mesure du faible revenu chronique, qui est utilisée pour évaluer la durée des périodes de faible revenu et qui s’est révélée efficace dans l’examen des tendances de taux de faible revenu (plutôt que les mesures de faible revenu à un moment donné). Ces auteurs évaluent la mesure dans laquelle les cohortes d’immigrants sont susceptibles d’entrer dans une période de faible revenu et d’en sortir, l’association entre les caractéristiques des cohortes et les taux d’entrée et de sortie, et la durée des périodes de faible revenu parmi des cohortes choisies d’immigrants et de comparaison entre 1992 et 2004. Compte tenu de la non-existence d’une norme de mesure de faible revenu dans les données utilisées (la base de données DAL-BDIM)Note de bas de page 62, l’étude définit l’état de faible revenu comme étant 50 % du revenu familial médian corrigé en fonction du nombre d’équivalents-adulteNote de bas de page 63. Le revenu familial médian corrigé est calculé en dollars constants (l’indice des prix à la consommation rajusté selon la valeur de 2003) pour chacune des années visées par l’étude (1992 à 2004), et la moyenne de ces valeurs est utilisée comme le seuil de faible revenu pour toutes ces années (c.-à-d. une MFR fixe). Les auteurs arrivent à la conclusion que la probabilité d’entrer dans la première période de faible revenu est très élevée durant la première année au Canada, de 35 à 45 % parmi les cohortes entrées au cours des années 1990 et au début des années 2000. Cependant, la deuxième année au Canada, cette probabilité chute à environ 10 % et demeure faible par la suite. Un grand nombre de ces périodes de faible revenu étaient assez courtes. Environ le tiers de ces personnes sort de la première période de faible revenu après un an, et un pourcentage légèrement plus élevé reste en situation de faible revenu après trois ans. Passant ensuite aux périodes répétitives de faible revenu, les auteurs abordent une perspective à plus long terme en appliquant leur mesure de « faible revenu chronique », c’est-à-dire identifiant les immigrants qui sont demeurés en situation de faible revenu durant au moins quatre des cinq premières années au Canada. Selon cette définition, 19 % des immigrants arrivés au cours des années 1990 étaient en situation de faible revenu chronique (taux deux fois et demie plus élevé que celui observé pour les non-immigrants). Aussi, selon un faible revenu chronique défini sur une période de dix ans plutôt que de cinq ans (en état de faible revenu au moins sept des dix premières années au Canada), environ 17 % des immigrants arrivants étaient en situation de faible revenu chronique pendant cette période plus longue. Entre autres conclusions, les chercheurs ont constaté que, si les familles d’immigrants n’étaient pas exposées au faible revenu immédiatement après leur entrée, elles pouvaient l’éviter complètement.

Par ailleurs, une étude menée par Ren et Xu (2011) dans un effort de compréhension de la nature transitoire ou persistante des situations de faible revenu examine les résultats et la durée des situations de faible revenu au moyen de l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR)Note de bas de page 64, en prenant en compte les trois mesures de faible revenu (le SFR, la MFR et la MPC). L’étude arrive (au moyen de modèles de régression logit) à faire une distinction entre les déterminants d’une situation de faible revenu transitoire et les déterminants d’une situation de faible revenu persistante : le fait d’être étudiant et le fait d’être immigrant récent étant les déterminants clés les plus susceptibles d’un faible revenu transitoire (une personne étant en faible revenu de 1 à 3 ans des 6 années des données du panel), alors que la composition de la famille (personnes seules et parents seuls), les limitations d’activité et un niveau de scolarité moins élevé sont probablement les principaux facteurs entraînant à la fois une situation de faible revenu transitoire et une situation de faible revenu persistante (une personne étant en situation de faible revenu pendant 4 à 6 ans). Ces observations sont assez robustes selon chacun des trois seuils de faible revenu et dans les deux panels.

L’intensité des faibles revenus constitue une mesure du faible revenu qui comporte des renseignements sur le taux de faible revenu (la proportion de la population en deçà du seuil de faible revenu) et l’écart de faible revenu (la « profondeur » du faible revenu). Picot, Morissette et Myles (2003) décrivent l’écart de faible revenu comme étant la différence entre le seuil de faible revenu et le revenu familial moyen (chez les familles à faible revenu), que l’on divise par le seuil de faible revenu; l’écart représente la « profondeur » du faible revenu exprimée en tant que proportion du seuil de faible revenu. Un écart de 0,32 signifie que le revenu familial moyen des familles à faible revenu était 32 % inférieur au seuil de faible revenu. Une augmentation de l’écart, par exemple un écart qui passe de 0,32 à 0,34, signifie une augmentation de la « profondeur » du faible revenuNote de bas de page 65. Myles et Picot (2000) observent que la mesure de l’intensité du faible revenu peut détecter des changements de niveau de revenu chez les familles à faible revenu. De plus, dans cette étude, la mesure dégage l’incidence des transferts sociaux aux familles en comparant les variations d’écart au cours des périodes précédant et suivant les transferts. Selon Picot, Morissette et Myles (2003), l’intensité des faibles revenus, qui incorpore les variations du taux de faible revenu et l’écart de faible revenu, est de nature très cyclique.

Il en ressort manifestement que le choix du moment auquel examiner les mesures de faible revenu des immigrants est un élément important à prendre en considération. Un nombre considérable d’études révèlent l’existence de tendances claires et constantes dans les résultats des immigrants sur le marché du travail. Il y a un effet d’arrivée – les immigrants étant pénalisés par des revenus d’emploi plus bas à leur arrivée au Canada, probablement parce qu’ils ne connaissent pas bien le marché du travail canadien. Il y a un effet d’intégration – quand les résultats de l’immigrant tendent à s’améliorer plus son séjour au Canada s’allonge, avec l’acquisition d’une expérience « locale ». Il y a un effet de cohorte – différents résultats peuvent découler de la diversité des caractéristiques des personnes et du marché du travail; par exemple, le taux de chômage peut être élevé au moment de l’arrivée des immigrants, posant un obstacle à leur intégration dans le marché du travail. Par conséquent, il faut étudier attentivement le moment auquel évaluer la situation de faible revenu des immigrants. Après combien d’années au Canada devrait-il y avoir certains résultats? Un an? Cinq ans? La réponse dépend probablement de la question de recherche stratégique en cause.

Par ailleurs, en ce qui concerne la population des immigrants, le choix d’un groupe de référence approprié pour l’évaluation des tendances de faible revenu au fil du temps est un autre élément important à prendre en considération. Picot, Lu et Hou (2009) conseillent de concentrer l’analyse sur les tendances de faible revenu parmi les immigrants par rapport aux personnes nées au Canada. Les auteurs expliquent que toute fluctuation des taux associée au cycle économique aura probablement une incidence sur les tendances tant pour les personnes nées au Canada que pour les immigrants. Par conséquent, d’après eux, la comparaison aux personnes nées au Canada constitue une sorte de contrôle des effets des cycles économiques. Là encore, cependant, la réponse dépend probablement de la question de recherche stratégique en cause.

Facteurs influençant le faible revenu chez les immigrants

Le faible revenu est généralement accepté comme étant un indicateur de l’accès aux ressources économiques dans la société et, par conséquent, il est souvent utilisé comme indicateur clé de l’intégration et du bien-être des immigrants. L’importance des caractéristiques et des conditions socioéconomiques qui distinguent les diverses populations est au cœur du concept de faible revenu. Autrement dit, une analyse du faible revenu chez les immigrants exige forcément de découvrir les raisons pour lesquelles les choses sont différentes chez les divers groupes d’immigrants et les personnes nées au Canada. La figure 2 ci-dessous présente les facteurs qui contribuent aux résultats (revenus d’emploi) des immigrants sur le marché du travail. Il est largement reconnu dans les documents de recherche que le faible revenu chez les immigrants suit de près les tendances des gains d’emploi, puisque les gains d’emploi sont la composante la plus importante du revenu familial, qui est utilisé pour le calcul des taux de faible revenuNote de bas de page 66. De fait, selon Picot et Hou (2003), les raisons du déclin des gains d’emploi chez les immigrants expliqueraient sans doute en grande partie la hausse du taux de faible revenu. Noël (2012) affirme que de trouver un emploi demeure absolument le meilleur moyen de sortir d’une situation de faible revenu, bien que la qualité de l’emploi influe sur la trajectoire des gains de la personne : les emplois à temps partiel ou précaires peuvent maintenir une personne en situation de faible revenu.

Comme l’indique la figure 2, la compréhension des résultats des nouveaux immigrants sur le marché du travail exige de prendre en compte la relation entre les caractéristiques des immigrants, ou les attributs socioéconomiques que les immigrants apportent avec eux (y compris la catégorie d’immigration, l’année d’entrée et le nombre d’années au Canada, l’âge, l’éducation, le sexe, le pays d’origine, le type de famille, la province de résidence, la profession, etc.), et les possibilités et les obstacles dans la société d’accueil, que ceux-ci soient d’ordre économique, social ou institutionnel. Dans l’ensemble, les causes de faible revenu chez les immigrants sont nombreuses. Pour les immigrants en âge de travailler, par exemple, le changement de leurs caractéristiques et la nature cyclique de l’économie peuvent constituer d’autres obstacles encore sur le marché du travail, alors que pour les immigrants âgés, la taille de la famille, le type de famille et les motifs d’immigration peuvent mener à d’autres niveaux de revenu. Dans cette section, on présente un certain nombre de ces facteurs socioéconomiques importants, y compris les résultats de l’analyse de la façon dont ils influent sur le faible revenu des immigrants.

Figure 2 : Facteurs influençant les résultats des immigrants sur le marché du travail

Figure 2 : Facteurs influençant les résultats des immigrants sur le marché du travail décrite ci-dessous.
Version texte : Figure 2 : Facteurs influençant les résultats des immigrants sur le marché du travail

Attributs socioéconomiques des immigrants (offre)

  • Catégorie d’immigration
  • Caractéristiques personnelles (p. ex. âge et sexe)
  • Compétences que les immigrants apportent avec eux (p. ex. éducation, expérience, connaissance des langues officielles et littératie)
  • Pays d’origine (p. ex. différences perçues ou réelles des systèmes d’éducation, reconnaissance des compétences, difficultés linguistiques, « réseaux » ethniques, différence de culture)
  • Facteurs démographiques (p. ex. taille et composition de la famille)
  • Niveaux d’immigration et tendances d’établissement

Possibilités et obstacles dans la société d’accueil (demande)

  • Conditions économiques (contexte global et local du marché du travail; emploi et gains)
  • Attitudes du public à l’endroit de l’immigration et des différences de culture
  • Disponibilité des programmes d’intégration des nouveaux arrivants et admissibilité à ceux-ci
  • Ouverture ou compétitivité du marché du travail (p. ex. protection des titulaires)
  • Établissements (p. ex. équivalence ou acceptation des titres de compétence et de l’expérience du travail acquis à l’étranger)
  • Gouvernement (p. ex. effets directs et indirects des programmes de transfert)

Source : Thompson, 2004

Pour obtenir une meilleure représentation de la situation de faible revenu des immigrants, il faut aussi prendre en compte la richesse des immigrants, leurs revenus étrangers et les montants qu’ils envoient dans leurs pays d’origine. Cela étant, ce genre de renseignement n’est généralement pas disponible, ni inclus dans les calculs du revenu utilisé pour mesurer le faible revenu. Les actifs étrangers non déclarés des immigrants (p. ex. maisons dont ils sont encore propriétaires dans leur pays d’origine, épargnes dans des comptes bancaires à l’étranger, traites qu’ils reçoivent de membres de leur famille dans leur pays d’origine), et traites versées à des membres de leur famille qui vivent encore dans leur pays d’origine, peuvent tous fausser l’analyse à cet égard. Il est important de tenir compte du fait que la richesse ne figure pas dans le tableau ci-dessus. La richesse peut être définie comme étant la différence entre le montant total des éléments d’actif et le montant total des dettes ou des éléments de passif de la personne ou du ménage (aussi couramment appelée valeur nette)Note de bas de page 67. Dalgliesh (2008) affirme que pour les immigrants, la richesse a un rôle clé dans leur installation et leur intégration car, par exemple, elle peut leur fournir un coussin de sécurité financière au cours de la période initiale de recherche d’emploi, et pourrait être utilisée, par la suite, en tant que garantie pour le lancement d’une entreprise. La richesse a aussi un rôle clé dans l’obtention de crédit, tandis que les économies peuvent servir à financer des études supérieures, à lancer une petite entreprise ou à financer une retraiteNote de bas de page 68. Par conséquent, la richesse offre un important coussin de sécurité en cas de contraintes économiques et au cours des périodes de faibles résultats sur le marché du travail. La documentation sur les résultats économiques des immigrants au Canada bénéficierait grandement d’être enrichie par une meilleure compréhension des épargnes des immigrants, de leur consommation, de leur accumulation d’actifs et de leurs placementsNote de bas de page 69. Dalgliesh (2008) mentionne que le niveau des éléments d’actif des immigrants peut aussi constituer un meilleur tableau de la richesse des ménages, surtout parce que les éléments d’actif comme les maisons et les entreprises peuvent souvent être convertis en capitaux liquides au cours de la retraite. Malgré cela, Dalgliesh (2008) affirme que les deux facteurs les plus importants contribuant à l’accumulation de richesse par les immigrants sont le rendement sur le marché du travail et les gains relatifs. Voilà pourquoi, et peut-être parce que la richesse n’est pas prise en compte dans les mesures du faible revenu, la section qui suit est axée sur les facteurs qui contribuent aux résultats des immigrants sur le marché du travail et sur la façon dont ces résultats influent sur leur situation de faible revenu.

Attributs socioéconomiques des immigrants

Dans l’analyse du faible revenu, il est essentiel de déterminer l’importance des caractéristiques et conditions socioéconomiques pour ce qui est des disparités constatées entre les différentes populations étudiées, dans le cas présent, les personnes nées au Canada et les divers groupes d’immigrants. En théorie, de nombreux facteurs associés aux immigrants pourraient faire que ceux-ci n’aient pas des taux de faible revenu relativement élevés par rapport aux personnes nées au Canada. Spigelman (1998) décrit quelques-uns de ces facteurs : premièrement, de nombreux nouveaux immigrants entrent par le biais du système de points, qui accepte les personnes qui ont les compétences et les ressources jugées en demande dans les entreprises canadiennes; deuxièmement, les immigrants sont plus susceptibles que les personnes nées au Canada d’avoir un diplôme universitaire; troisièmement, la participation à la main-d’œuvre des immigrants en âge de travailler est proche de celle des personnes nées au Canada, et une plus grande proportion de personnes en âge de travailler combinée à des taux de participation semblables à ceux des personnes nées au Canada permet de supposer la présence d’une plus forte proportion de travailleurs dans la population active; enfin, les familles d’immigrant sont moins susceptibles d’avoir à leur tête un parent seul, et les familles monoparentales ont des taux de faible revenu considérablement plus élevés. Cela étant, il a été indiqué au début du présent rapport que les immigrants ont, de fait, des taux de faible revenu plus élevés que ceux des personnes nées au Canada, et cet écart s’est agrandi au fil du temps. Quels sont les facteurs qui contribuent au fait que les études effectuées jusqu’à présent portent à croire que ce groupe est de plus en plus susceptible d’avoir un faible revenu? Au nombre des attributs socioéconomiques des immigrants, les facteurs qui contribuent le plus à leurs résultats économiques sont les suivants :

La catégorie d’admission des immigrants

Le programme d’immigration du Canada couvre trois grands objectifs, qui correspondent aux trois grandes catégories (voir la figure 3). Tout d’abord, la catégorie d’immigration économique sert à encourager le développement d’une économie forte et viable dans toutes les régions du pays. Deuxièmement, la catégorie de regroupement familial sert à faciliter la réunion au Canada de personnes résidant au Canada avec des membres de leur famille proche qui sont à l’étranger. Troisièmement, la catégorie des réfugiés sert à s’acquitter des obligations juridiques du Canada à l’endroit des réfugiés et à poursuivre la tradition humanitaire du pays. À l’intérieur de chacune de ces grandes catégories, il y a plusieurs catégories et programmes. Par exemple, dans la catégorie de l’immigration économique, il y a les travailleurs qualifiés, les candidats des provinces, diverses catégories d’immigration pour les gens d’affaires et les aides familiaux résidants. Ensuite, à l’intérieur de chacune de ces catégories, il y a le demandeur principal – la personne qui est acceptée – et son conjoint ou sa conjointe et ses personnes à charge. La catégorie du regroupement familial inclut les membres de la famille proche parrainés par un citoyen ou un résident du Canada, y compris les conjoints, les fiancés, les enfants à charge, ainsi que les parents et les grands-parents. Les réfugiés, eux aussi, entrent au Canada de différentes façons. Les personnes réinstallées à l’étranger entrent soit par l’entremise du Programme des réfugiés pris en charge par le gouvernement (PRPG), soit par le Programme de parrainage privé de réfugiés (PPPR); il y a aussi le statut de demandeur d’asile au Canada (personne déjà au Canada). On peut s’attendre à ce que les immigrants dans les différentes catégories adoptent un « comportement » différent, et ce comportement doit être évalué en fonction des politiques au titre desquelles ils ont été admis.

Les différents motifs d’immigration, représentés par les différentes catégories d’immigration, ont une incidence importante sur les résultats en matière de revenu. On s’attend à ce que les immigrants économiques et leurs personnes à charge devancent les autres catégories sur le marché du travailNote de bas de page 70. On s’attend aussi à ce que les immigrants de la catégorie du regroupement familial, qui sont pris en charge par des membres de leur famille bien établis qui les parrainent, ne dépendront pas de l’assistance socialeNote de bas de page 71. Il n’est pas étonnant, cependant, que les réfugiés continuent de dépendre du soutien public pendant de longues périodes suivant leur arrivée. De fait, les réfugiés sont relativement grandement tributaires d’une aide au revenu à leur arrivée (p. ex. les réfugiés pris en charge par le gouvernement reçoivent une aide financière dans le cadre du Programme d’aide à la réinstallation), mais au fil du temps, une proportion croissante de leur revenu provient de gains d’emploi. Autrement dit, la détérioration du taux de faible revenu national des immigrants ne révèle pas grand-chose au sujet de la réponse stratégique appropriée ni même si une réaction s’imposeNote de bas de page 72. Le résultat peut démontrer un changement dans la composition parmi les catégories d’immigration, un changement des conditions du marché du travail national ou un changement des attributs des immigrants, ou encore une combinaison de tous ces facteursNote de bas de page 73.

Figure 3 : Les immigrants entrent au Canada selon différentes catégories d’immigration
Figure 3 : Les immigrants entrent au Canada selon différentes catégories d’immigration décrite ci-dessous.
Version texte : Figure 3 : Les immigrants entrent au Canada selon différentes catégories d’immigration
Catégories d'immigration Pourcentage
Immigrants économiques, demandeur principal 27 %
Immigrants économiques, conjoints et p. à charge 39 %
Regroupement familial 21 %
Réfugiés parrainés par le gouvernement 3 %
Réfugiés parrainés par un parrain privé 2 %
Réfugiés à l'intérieur du Canada 3 %
Autres immigrants (inclut les personnes à charge des réfugiés) 4 %

Source : Citoyenneté et Immigration, Faits et chiffres, MDR, 2010

Jusqu’à présent, la principale source de renseignements concernant le faible revenu des immigrants a été les données du recensement. Par conséquent, il y a eu très peu de renseignements disponibles en ce qui concerne la situation de faible revenu des immigrants pour ce qui est de la catégorie d’admissionNote de bas de page 74. Une seule étude se distingue dans ce domaine : Picot, Hou et Coulombe (2007) utilisent la banque de Données administratives longitudinales (DAL) et la Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM) pour les années 1992 à 2004, pour analyser les taux de faible revenu des immigrants par catégorie d’admission. (Cette étude a été décrite plus tôt en détail.) Les résultats de cette étude sont reproduits à la figure 4 ci-dessous, qui présente les taux de faible revenu des immigrants récents (au Canada depuis 10 ans ou moins), par catégorie d’admission (regroupement familial, réfugié et économique – à l’exclusion de la catégorie des gens d’affaires) pour les années d’imposition 1992 à 2004. Le groupe de référence est constitué principalement de personnes nées au CanadaNote de bas de page 75. Comme on peut le constater, les taux de faible revenu étaient considérablement plus faibles chez les immigrants de la catégorie économique (27,4 % au cours de l’année d’imposition 2004), suivi par les immigrants de la catégorie du regroupement familial (35,4 % au cours de l’année d’imposition 2004), et les plus élevés chez les réfugiés (39,0 % au cours de l’année d’imposition 2004).

Figure 4 : Taux de faible revenuNote de bas de page 76 des immigrants (âgés de 20 ans ou plus) par catégorie d’admission, années d’imposition 1992 à 2004
Figure 4 : Taux de faible revenu des immigrants (âgés de 20 ans ou plus) par catégorie d’admission, années d’imposition 1992 à 2004 décrite ci-dessous.
Version texte : Figure 4 : Taux de faible revenu des immigrants (âgés de 20 ans ou plus) par catégorie d’admission, années d’imposition 1992 à 2004
Année Regroupement familial - au Canada
10 ans ou moins
Travailleurs qualifiés - au Canada
10 ans ou moins
Réfugiés - au Canada
10 ans ou moins
Groupe de référence
(principalement personnes nées au Canada)
1992 33 % 22 % 36 % 14 %
1997 41 % 29 % 42 % 17 %
2000 35 % 26 % 38 % 14 %
2001 33 % 26 % 38 % 13 %
2002 35 % 28 % 39 % 13 %
2003 36 % 29 % 41 % 13 %
2004 35 % 27 % 39 % 13 %

Source: Picot, Hou et Coulombe, (2007), banque de Données administratives longitudinales (DAL) et Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM).

Dans leur étude, Picot, Hou et Coulombe (2007) examinent les variations de probabilité d’entrer dans une période de faible revenu et d’en sortir, ainsi que la prévalence du faible revenu chronique chez les cohortes de nouveaux immigrants. Les résultats de l’étude révèlent que les réfugiés sont beaucoup plus susceptibles d’entrer en situation de faible revenu et beaucoup moins susceptibles d’en sortir que les autres immigrants, et que les nouveaux immigrants de la catégorie des travailleurs qualifiés sont devenus plus susceptibles d’entrer en situation de faible revenu et également susceptibles d’en sortir que les immigrants de la catégorie du regroupement familial. D’après les auteurs, cela est probablement dû au fait qu’au moment de leur arrivée au pays, de nombreux immigrants de la catégorie du regroupement familial sont affiliés à des familles qui sont déjà établies au Canada. De plus, les résultats indiquent qu’au cours des années 1990, la proportion des immigrants appartenant à la catégorie économique des travailleurs qualifiés en situation de faible revenu est passée de 16 % à 50 %, et la proportion des immigrants détenteurs d’un diplôme universitaire en situation de faible revenu est passée de 12 % à 36 %.

La catégorie d’admission peut servir à éclairer la perspective stratégique en ce qui concerne le faible revenu croissant chez les immigrants. Par exemple, la croissance du nombre d’immigrants de la catégorie des travailleurs qualifiés, dont une forte proportion est destinée au travail dans les technologies de l’information (53 % de tous les demandeurs principaux qualifiés au Canada en 2003)Note de bas de page 77, conjuguée au revers du secteur de la technologie de l’information explique probablement le fait que les taux de faible revenu parmi les travailleurs qualifiés se sont aggravés malgré la force de l’économie en général au cours de la période de 2000 à 2003Note de bas de page 78. Manifestement, ces renseignements offrent une perspective cruciale lorsqu’on envisage la situation du point de vue des politiques.

Années depuis l’immigration

Les études indiquent systématiquement que les taux de faible revenu des immigrants qui sont au Canada depuis de plus longues périodes sont considérablement inférieurs à ceux des immigrants récents (voir, par exemple, Statistique Canada, 2008; Picot et Hou, 2003)Note de bas de page 79. Souvent, les immigrants et les réfugiés ont besoin d’un peu de temps pour s’établir dans leur nouveau pays et, par conséquent, les années depuis l’immigration correspondent généralement aux meilleurs résultats sociaux et économiques. Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 1 présente la situation de faible revenu après impôt (SFR et MFR) des immigrants par nombre d’années écoulées depuis l’immigration, pour le Canada, en 2005. On peut constater que les taux de faible revenu des immigrants qui sont au Canada depuis plusieurs années sont inférieurs et vont décroissant au fur et à mesure des années pendant lesquelles l’immigrant a vécu au Canada. Par exemple, si l’on prend le cas des personnes de revenu familial inférieur au SFR; les immigrants qui sont arrivés au Canada entre 2001 et 2004 avaient un taux de faible revenu après impôt de 27,4 % en 2005. Ce taux est au moins trois fois plus élevé que le taux correspondant des personnes nées au Canada qui est de 9,5 %. Cependant, plus un immigrant a vécu longtemps Canada plus cet écart se rétrécit. Les immigrants qui sont au Canada depuis 5 à 10 ans (ceux qui sont arrivés entre 1996 et 2000) avaient un taux de faible revenu de 20,6 % en 2005, tandis que dans le cas de ceux ayant vécu au pays 10 à 15 ans (ceux qui sont arrivés entre 1991 et 1995), ce taux chute à 17,5 %. Les tendances sont semblables pour la situation de faible revenu des immigrants selon la MFR après impôt. Un fait mérite d’être mentionné : comme on le verra, les immigrants qui sont établis au Canada depuis de longues périodes sont généralement plus âgés.

Tableau 1 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants, par nombre d’années écoulées depuis l’immigration, Canada, 2005
Statut d'immigrant Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Personnes nées au Canada 24 651 925 2 343 940 9,5 % 2 697 195 10,9 %
ImmigrantsNote du tableau * 6 166 770 1 025 185 16,6 % 988 115 16,0 %
Période d'immigration Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Ayant immigré avant 1981 2 393 355 187 350 7,8 % 175 200 7,3 %
Ayant immigré entre 1981 et 1985 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Ayant immigré entre 1986 et 1990 640 440 92 220 14,4 % 88 495 13,8 %
Ayant immigré entre 1991 et 1995 822 220 143 740 17,5 % 138 705 16,9 %
Ayant immigré entre 1996 et 2000 843 035 173 855 20,6 % 168 765 20,0 %
Ayant immigré entre 2001 et 2004 824 670 226 200 27,4 % 217 440 26,4 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

Les résultats d’étude confirment systématiquement cette tendance. En se fondant sur les données de l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) pour la période de 1993 à 2001, Palameta (2004) indique que les immigrants récents (admis au Canada 1 à 6 ans plus tôt) sont deux ou trois fois plus susceptibles d’entrer dans une situation de faible revenu (selon un SFR après impôt) par comparaison aux personnes nées au Canada. De plus, il constate dans cette étude que les immigrants récents, quels que soient leur sexe, leur niveau de scolarité, leur type de famille ou leur province de résidence, sont aussi plus susceptibles de vivre des périodes répétitives de faible revenu par comparaison aux personnes nées au CanadaNote de bas de page 80. Dans cette étude, les immigrants qui étaient au Canada depuis 7 à 16 ans (immigrants de période moyenne) et ceux qui étaient au Canada depuis au moins 17 ans (immigrants anciens) n’étaient pas plus susceptibles que les non-immigrants de vivre des périodes de faible revenu, et l’auteur avance que le résultat porte à croire qu’après une période d’adaptation, les immigrants s’intègrent généralement bien dans l’économie canadienne.

En se fondant sur les données du panel de 1993 à 1998 d’EDTR, Morissette et Zhang (2001) étudient la persistance du faible revenu (selon le SFR après impôt) des différents groupes qui présentent un risque de faible revenu. Ils ont constaté qu’au moins 20 % des immigrants qui sont entrés au Canada depuis 1976 ont vécu une période de faible revenu de quatre ans ou plus comparativement à 7 % des personnes nées au Canada. En revanche, seuls 6 % des immigrants qui sont entrés avant 1976 ont vécu une situation de faible revenu pendant quatre ans ou plus. Bien que cette étude ne comprenne pas une analyse économétrique vérifiant les années de résidence au Canada – avec par conséquence le fait que les constatations ne représentent pas forcément les véritables différences entre cohortes –, ces observations semblent confirmer des écarts considérables entre les groupes d’immigrants pour ce qui est des situations de faible revenu au fil du temps.

Dans l’ensemble, toute analyse du faible revenu chez les immigrants exige forcément la prise en compte du nombre d’années de résidence au Canada. La disparité des tendances de faible revenu entre les immigrants récents et les immigrants établis suggèrent des mesures politiques différentes. Par exemple, les immigrants récents peuvent avoir un faible revenu pendant de courtes périodes à leur arrivée, pendant une année ou deux, tandis qu’ils s’installent dans leur nouveau pays, alors que d’autres peuvent avoir un faible revenu chronique, et les mesures politiques envisagées peuvent devoir être très différentes. Comme cela a été mentionné plus tôt, une étude fondée sur les panels de 1999 à 2004 et de 2002 à 2007 de l’EDTR, menée par Ren et Xu (2011), révèle que l’immigration récente (et la situation d’étudiant) est probablement un déterminant clé du faible revenu transitoire, par opposition à la composition de la famille (personnes seules et parents seuls), à la limitation d’activités et aux études secondaires incomplètes, qui sont probablement des déterminants clés du faible revenu tant transitoire que persistant. Cela étant, toujours selon les données de l’EDTR pour 2002 à 2004, Fleury (2007) constate que les immigrants récents (ceux qui sont entrés au Canada entre 1990 et 2004) sont plus susceptibles de vivre tant des courtes que des longues périodes de faible revenu (selon le SFR après impôt). Par contre, la présente étude a conclu que, comme pour les autres Canadiens, le faible revenu chez les immigrants récents est un phénomène très dynamique, la durée du faible revenu pour les adultes en âge de travailler est très semblable, qu’il s’agisse d’immigrants récents ou pas. Là encore, les renseignements sur les années passées au Canada sont d’importance cruciale lorsqu’on envisage les mesures politiques en réaction à la situation de faible revenu des immigrants.

Caractéristiques personnelles (p. ex. âge et sexe)

Le fait d’être en situation de faible revenu est pour une bonne part un phénomène propre au cycle de vieNote de bas de page 81. Ainsi donc, l’âge est un facteur crucial dans l’étude de la situation de faible revenu tant des immigrants que des personnes nées au Canada. Aussi, l’âge de l’immigrant au moment de son arrivée compte pour beaucoup dans les résultats économiques : les études indiquent de façon constante que plus l’immigrant est jeune à son arrivée au Canada, meilleurs sont ses résultats à long terme sur le marché du travail par rapport à ceux qui arrivent au Canada à un âge plus avancé, et plus ses résultats se rapprochent de ceux des personnes nées au CanadaNote de bas de page 82. Plus l’immigrant est jeune à son arrivée au Canada, plus il a le temps d’acquérir les compétences et le capital humain adaptés au marché du travail canadien. Autrement dit, plus les immigrants sont jeunes à leur arrivée, plus leur éducation et leur expérience de travail ressembleront à celles de leurs homologues nés au Canada, et plus il leur sera facile d’apprendre une langue officielle. En revanche, plus l’immigrant est âgé à son arrivée, plus son capital humain et son expérience de travail auront été acquis à l’étranger et plus son intégration dans le marché du travail lui sera difficile.

De tous les immigrants, ce sont les enfants et les jeunes adultes qui sont les plus susceptibles de vivre dans un état de faible revenu, par comparaison à ceux âgés de 45 ans ou plus. Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 2 présente le faible revenu après impôt (selon le SFR et la MFR) des immigrants par nombre d’années écoulées depuis l’immigration et l’âge d’entrée, pour le Canada, en 2005. Tel qu’indiqué, dans le cas des personnes dont le revenu familial est en deçà du SFR, 33 % des immigrants de moins de 15 ans vivaient dans un état de faible revenu en 2005, tout comme le faisaient 26,7 % de ceux âgés de 15 à 24 ans. Pour les immigrants âgés de 25 à 44 ans, ceux les plus en âge de travailler, 19,5 %, vivaient une situation de faible revenu en 2005. Les enfants immigrants âgés de moins de 15 ans étaient trois fois plus susceptibles que leurs homologues nés au Canada (11,7 %) d’être dans une situation de faible revenu en 2005. En revanche, les taux de faible revenu étaient bien plus bas chez les immigrants plus âgés au cours de la même année, 13,2 %, pour les immigrants âgés de 45 à 64 ans, et 8,7 % pour ceux âgés de 65 ans ou plus (les taux correspondants pour les personnes de même âge nées au Canada étaient 8,9 % et 5,7 %, respectivement)Note de bas de page 83. Selon le nombre d’années passées au Canada, les taux de faible revenu après impôt étaient plus élevés en 2005 pour les cohortes d’immigrants les plus récentes (ceux ayant immigré entre 2001 et 2004) et parmi les plus jeunes, avec une incidence de faible revenu de 30,8 % pour ceux âgés de moins de 15 ans, et de 31,8 % pour ceux âgés de 15 à 24 ans; cela se compare à 25,7 % chez ceux âgés de 25 à 44 ans, 25,8 % chez ceux âgés de 45 à 64 ans et 20,1 % chez ceux âgés de 65 ans ou plus. En revanche, les taux de faible revenu après impôt étaient les plus faibles en 2005 dans les cohortes d’immigrants plus établies. Par exemple, parmi ceux ayant immigré entre 1991 et 1995, ceux âgés de moins de 15 ans avaient une incidence de faible revenu de 19,2 % en 2005, et ceux de 15 à 24 ans une incidence de 20,5 %; cela se compare à 16,8 % chez ceux de 25 à 44 ans, 17,3 % chez ceux de 45 à 64 ans et 15,3 % chez ceux de 65 ans ou plus. Les tendances sont similaires dans le cas des situations de faible revenu des immigrants selon la MFR après impôt.

Tableau 2 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants par nombre d’années depuis l’immigration et l’âge d’entrée, Canada, 2005
Tableau 2A : Personnes nées au Canada
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Personnes nées au Canada 24 651 925 2 343 940 9,5 % 2 697 195 10,9 %
Moins de 15 5 182 635 605 780 11,7 % 705 155 13,6 %
15 à 24 3 577 980 428 160 12,0 % 483 145 13,5 %
25 à 44 6 654 865 574 045 8,6 % 656 895 9,9 %
45 à 64 6 438 070 575 445 8,9 % 677 490 10,5 %
65 ou plus 2 798 375 160 510 5,7 % 174 510 6,2 %
Tableau 2B : ImmigrantsNote du tableau *
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Immigrants 6 166 770 1 025 185 16,6 % 988 115 16,0 %
Moins de 15 345 405 113 965 33,0 % 110 925 32,1 %
15 à 24 547 525 145 990 26,7 % 148 000 27,0 %
25 à 44 1 972 225 384 465 19,5 % 365 830 18,5 %
45 à 64 2 095 825 275 765 13,2 % 277 455 13,2 %
65 ou plus 1 205 800 105 000 8,7 % 85 900 7,1 %
Tableau 2C : Ayant immigré avant 1981
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré avant 1981 2 393 355 187 350 7.8 % 175 200 7.3 %
Moins de 15 s/o s/o s/o s/o s/o
15 à 24 s/o s/o s/o s/o s/o
25 à 44 323 905 28 335 8.7 % 28 760 8.9 %
45 à 64 1 123 460 99 110 8.8 % 102 405 9.1 %
65 ou plus 945 995 59 905 6.3 % 44 040 4.7 %
Tableau 2D : Ayant immigré entre 1981 et 1985
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1981 et 1985 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Moins de 15 s/o s/o s/o s/o s/o
15 à 24 11 635 1 925 16,5 % 1 935 16,6 %
25 à 44 135 630 16 430 12,1 % 15 790 11,6 %
45 à 64 164 300 18 280 11,1 % 18 305 11,1 %
65 ou plus 48 880 7 810 16,0 % 6 615 13,5 %
Tableau 2E : Ayant immigré entre 1986 et 1990
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1986 et 1990 640 440 92 220 14,4 % 88 495 13,8 %
Moins de 15 s/o s/o s/o s/o s/o
15 à 24 84 230 13 845 16,4 % 13 925 16,5 %
25 à 44 260 325 37 135 14,3 % 35 020 13,5 %
45 à 64 238 575 32 395 13,6 % 31 665 13,3 %
65 ou plus 57 305 8 840 15,4 % 7 890 13,8 %
Tableau 2F : Ayant immigré entre 1991 et 1995
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1991 et 1995 822 220 143 740 17,5 % 138 705 16,9 %
Moins de 15 22 530 4 325 19,2 % 4 390 19,5 %
15 à 24 137 920 28 275 20,5 % 28 945 21,0 %
25 à 44 349 815 58 830 16,8 % 55 030 15,7 %
45 à 64 236 305 40 770 17,3 % 39 630 16,8 %
65 ou plus 75 655 11 540 15,3 % 10 710 14,2 %
Tableau 2G : Ayant immigré entre 1996 et 2000
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1996 et 2000 843 035 173 855 20,6 % 168 765 20,0 %
Moins de 15 99 840 22 620 22,7 % 22 035 22,1 %
15 à 24 146 750 37 610 25,6 % 37 940 25,9 %
25 à 44 374 640 67 390 18,0 % 62 755 16,8 %
45 à 64 181 040 37 465 20,7 % 37 560 20,7 %
65 ou plus 40 760 8 775 21,5 % 8 475 20,8 %
Tableau 2H : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Âge Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 2001 et 2004 824 670 226 200 27,4 % 217 440 26,4 %
Moins de 15 160 520 49 380 30,8 % 47 200 29,4 %
15 à 24 121 805 38 780 31,8 % 39 310 32,3 %
25 à 44 394 965 101 695 25,7 % 94 840 24,0 %
45 à 64 117 550 30 330 25,8 % 30 075 25,6 %
65 ou plus 29 830 6 010 20,1 % 6 010 20,1 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

Il est difficile de définir et de mesurer l’incidence du faible revenu chez les enfants, ceux âgés de 15 ans ou moins et les jeunes adultes, ceux âgés de 15 à 24 ans, car, dans la plupart des cas, les enfants n’ont pas de revenu. Cependant, la plupart des gens s’entendent pour déclarer qu’il est malheureux que des familles avec des enfants n’aient pas un revenu suffisamment élevé pour se procurer le logement, la nourriture et l’habillement essentiels ou certaines activités de familleNote de bas de page 84. Selon une étude de Fleury (2007) fondée sur les données de l’EDTR pour la période de 1994 à 2004, les enfants qui vivent dans une famille dont le principal soutien économique n’avait pas travaillé pendant une majeure partie de l’année étaient les plus à risque de faible revenu (SFR après impôt) en 2004, suivis par ceux dont le principal soutien économique était sans emploi ou encore aux études. Les enfants dont le principal soutien économique était un travailleur indépendant risquaient plus d’être en situation de faible revenu que ceux dont le principal soutien économique était un employé. De plus, indépendamment de la situation du principal soutien économique sur le marché du travail, les enfants des familles monoparentales risquaient plus d’être en situation de faible revenu que les enfants de familles biparentales. Ceux qui vivaient dans des familles avec plusieurs frères et sœurs présentaient aussi un risque plus élevé de faible revenu. Fleury constate que les enfants qui dépendent principalement d’un nouvel immigrant constituaient un des nombreux groupes présentant un risque élevé de faible revenu familial en 2004 (tout comme : un parent possédant au plus un diplôme d’études secondaires âgé de moins de 30 ans, ou encore une personne autochtone vivant hors réserve ou ayant des restrictions de travail). De plus, bien que le taux de faible revenu des enfants fondé sur leurs caractéristiques familiales ait peu évolué au cours de la période, il a augmenté pour les enfants des immigrants récents et les enfants des familles avec un seul soutien économique, et a chuté pour les enfants des familles qui n’avaient aucun soutien économique et les enfants des familles monoparentales. Dans son étude, Fleury avance que le taux de faible revenu relativement élevé des enfants immigrants semble, dans une large mesure, représenter leur situation d’enfants d’immigrants récents.

Les études révèlent qu’un âge plus avancé à l’arrivée au pays peut augmenter les probabilités pour un immigrant d’avoir un faible revenu par rapport au revenu de ses homologues nés au Canada. Dans son étude, Palameta (2004) constate que les immigrants âgés qui étaient venus au Canada à la fin de la quarantaine ou dans la cinquantaine avaient un plus grand risque de faible revenu que les autres Canadiens. Palameta affirme que les immigrants âgés de moyenne date (au Canada depuis 7 à 16 ans) qui sont entrés à la fin de la quarantaine ou dans la cinquantaine et qui ont trouvé du travail peuvent n’avoir pas eu beaucoup de temps pour accumuler des fonds de retraite leur permettant d’échapper au faible revenu. Ce groupe s’est révélé être cinq fois plus susceptible d’avoir un faible revenu que ses homologues nés au Canada. Dans l’étude menée par Picot, Hou et Coulombe (2007), les auteurs indiquent également que l’incidence de faible revenu et les taux de faible revenu chroniques augmentent proportionnellement avec l’âge de l’immigrant à son arrivée. Bien qu’ils attribuent ceci à l’évidence du rendement à la baisse de l’expérience sur les marchés du travail étrangers, ce résultat peut, de fait, provenir de changements au niveau de l’âge, de la catégorie d’admission et de la composition de la population immigrante. La majorité de ceux ayant 50 ans ou plus à leur arrivée, par exemple, sont des immigrants de la catégorie du regroupement familial; ces immigrants se joignent généralement à une famille déjà établie au Canada, réduisant de ce fait leurs taux d’entrée en période de faible revenuNote de bas de page 85. Les immigrants de ces groupes d’âge peuvent aussi avoir différentes intentions sur le marché du travail que les autres immigrants (éducation, retraite, etc.).

Cela étant, les immigrants d’âge mûr (ceux entrés au pays à un âge avancé ou ceux qui ont vieilli au Canada) peuvent avoir des défis particuliers dans l’obtention d’un revenu adéquat. Lee (2000) signale qu’ils pourraient ne pas avoir accès aux programmes de sécurité du revenu accessibles aux autres aînés canadiens, comme la Sécurité de la vieillesse (SV) et le Supplément de revenu garanti (SRG). De fait, en se fondant sur la Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM) et les données de l’Agence du revenu du Canada, Dempsey (2006) remarque que les immigrants âgés s’appuient davantage sur un revenu tiré de régimes de retraite non contributifs que les non-immigrants aînés et les immigrants de la catégorie du regroupement familial (66 % des immigrants âgés), et les réfugiés (8 %) reçoivent moins de la moitié de leur revenu de suppléments provinciaux, de la Sécurité de la vieillesse (SV), du Supplément de revenu garanti (SRG) ou de l’Allocation. Par contre, les immigrants de la catégorie de l’immigration économique (18 %) ont des liens plus forts sur le marché du travail et reçoivent 60 % de leur revenu provenant du marché du travail, surtout des gains d’emploi. De plus, les principaux demandeurs économiques âgés figurent dans la catégorie la plus susceptible de déclarer un revenu du RPC ou du RRQ et la moins susceptible de déclarer des allocations de SV ou SRG. En conséquence de ces constatations, Dempsey affirme que les immigrants âgés sont moins autonomes que les non-immigrants âgés.

Il a été dit que les immigrantes font face à un « double défi » sur le marché du travail canadien, d’abord en tant qu’immigrante, ensuite en tant que femme. Les immigrantes peuvent avoir à faire face, sur le marché du travail, à une discrimination sexuelle semblable à celle que peuvent subir les Canadiennes de naissance, ou cette discrimination peut être exacerbée par leur origine étrangère. Les immigrantes peuvent être plus susceptibles d’être en situation de faible revenu que leurs homologues masculins – tout comme c’est le cas chez les personnes nées au CanadaNote de bas de page 86. Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 3 présente la situation de faible revenu après impôt (selon le SFR et la MFR) des immigrants par nombre d’années écoulées depuis l’immigration et le sexe, pour le Canada, en 2005. Dans la catégorie des personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR, 17,2 % des immigrantes avaient un faible revenu par rapport à 16,0 % des immigrants en 2005; les taux comparables pour les femmes et les hommes nés au Canada étaient 10,1 % et 8,9 %, respectivement. Les écarts de faible revenu entre les sexes étaient moins prononcés en 2005 chez les cohortes d’immigrants plus récentes, les hommes et les femmes ayant immigré entre 2001 et 2004 ayant des taux de faible revenu de 27,6 % et 27,3 %, respectivement. Cependant, parmi ceux qui étaient au Canada depuis 10 à 15 ans (ceux ayant immigré entre 1991 et 1995), les taux de faible revenu étaient plus élevés chez les immigrantes en 2005, à 18,1 % comparativement aux hommes, dont le taux s’élevait à 16,8 %. Bien que les différences quant à l’ampleur de l’écart de faible revenu entre les hommes et les femmes soient évidentes, les tendances sont généralement semblables pour le faible revenu des immigrants fondées sur la MFR après impôt.

Tableau 3 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants par nombre d’années depuis l’arrivée et le sexe, Canada, 2005
Tableau 3A : Personnes nées au Canada
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 12 489 665 1 262 585 10,1 % 1 448 400 11,6 %
Homme 12 162 265 1 081 360 8,9 % 1 248 800 10,3 %
Tableau 3B : ImmigrantsNote du tableau *
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 3 212 365 551 065 17,2 % 526 680 16,4 %
Homme 2 954 405 474 120 16,0 % 461 430 15,6 %
Tableau 3C : Ayant immigré avant 1981
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 1 240 120 108 330 8,7 % 97 655 7,9 %
Homme 1 153 240 79 020 6,9 % 77 545 6,7 %
Tableau 3D : Ayant immigré entre 1981 et 1985
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 189 715 25 280 13.3 % 24 090 12.7 %
Homme 170 735 19 170 11.2 % 18 565 10.9 %
Tableau 3E : Ayant immigré entre 1986 et 1990
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 328 735 49 070 14,9 % 47 305 14,4 %
Homme 311 705 43 150 13,8 % 41 195 13,2 %
Tableau 3F : Ayant immigré entre 1991 et 1995
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 438 425 79 170 18,1 % 76 120 17,4 %
Homme 383 795 64 570 16,8 % 62 590 16,3 %
Tableau 3G : Ayant immigré entre 1996 et 2000
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 436 735 92 575 21,2 % 89 840 20,6 %
Homme 406 300 81 280 20,0 % 78 930 19,4 %
Tableau 3H : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Sexe Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Femme 429 665 117 105 27,3 % 112 650 26,2 %
Homme 395 010 109 095 27,6 % 104 790 26,5 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

En utilisant principalement les données du recensement de 2001, Statistique Canada (2006) signale une proportion plus élevée de femmes étrangères en situation de faible revenu (SFR) en 2001 (23 % par opposition à 16 % pour les femmes canadiennes de naissance et 20 % pour les hommes immigrants). Pour la même année, l’étude indique que les femmes nées à l’étranger étaient moins susceptibles d’avoir un emploi par rapport aux femmes nées au Canada et aux hommes (tant ceux nés au Canada que ceux nés à l’étranger). Les femmes immigrantes ont également reçu une proportion légèrement supérieure de leur revenu total sous forme de paiements de transfert gouvernementaux (p. ex. allocations familiales, assurance-chômage et autre type d’aide sociale) par rapport aux Canadiennes de naissance. Par conséquent, les auteurs avancent que les femmes nées à l’étranger font face à une série complète d’obstacles pendant qu’elles tentent de s’intégrer à la société canadienne, y compris s’adapter à un nouveau style de vie et des inégalités fondées sur le sexe au Canada (p. ex. écarts de taux d’emploi et de chômage).

Comme il en ressort de cette section, l’analyse de la situation de faible revenu des immigrants exige forcément de prendre en compte l’âge (au moment de l’enquête et à l’arrivée) et le sexe. Les écarts de tendance de faible revenu selon l’âge et le sexe peuvent indiquer des séries différentes de circonstances auxquelles les politiques doivent réagir. Par exemple, la situation des enfants immigrants en situation de faible revenu peut être causée par des facteurs complètement autres que ceux des immigrantes mères en famille monoparentale ou des hommes immigrants en âge de travailler, ou encore des immigrantes âgées qui vivent avec leur famille étendue. Les caractéristiques personnelles comme l’âge et le sexe représentent des renseignements cruciaux dans l’examen de la situation des immigrants en faible revenu dans une optique corrective.

Pays d’origine (différences perçues ou réelles des systèmes d’éducation, difficultés linguistiques, réseaux ethniques et différences culturelles)

Les immigrants de pays non membre de l’OCDE peuvent être plus susceptibles d’être en situation de faible revenu par rapport à ceux venant de pays membres de l’OCDE. Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 4 présente la situation de faible revenu après impôt (selon le SFR et la MFR) des immigrants, par lieu de naissance, pour le Canada, en 2005. Dans le cas des personnes dont le revenu familial est en deçà du SFR, 10,2 % des immigrants de pays membres de l’OCDE avaient un faible revenu par comparaison à 20,5 % des immigrants de pays non membres de l’OCDE en 2005. Si l’on prend seulement les immigrants les plus récents (ceux ayant immigré entre 2001 et 2004), l’écart de pourcentage est plus prononcé, 29,8 % de ceux venant des pays de l’OCDE étant en situation de faible revenu par rapport à 50,5 % de ceux de pays non membres de l’OCDE. Pour cette cohorte d’immigrants, parmi ceux venant de pays membres de l’OCDE, les immigrants de la Corée du Sud avaient l’incidence la plus élevée de faible revenu, à 51,9 %. Parmi ceux venant de pays non membres de l’OCDE, les immigrants récents de plusieurs pays avaient des taux de faible revenu relativement élevés : Somalie (60,0 %), Taïwan (56,2 %) et Koweït (52,8 %). Le fait que les immigrants récents venant de Somalie aient un tel taux relatif de faible revenu peut être expliqué par la catégorie d’admission, bon nombre de ces personnes étant des réfugiés. Par contre, il est possible que les taux élevés de faible revenu chez les immigrants venant de la Corée du Sud, de Taïwan et du Koweït découlent de l’incapacité des mesures de faible revenu de prendre en compte la richesse, y compris les avoirs étrangers, étant donné que la Corée du Sud, Taïwan et le Koweït figurent parmi les pays ayant le plus gros produit intérieur brut par habitant, et ne sont pas des sources importantes de réfugiés au CanadaNote de bas de page 87. De fait, la Corée du Sud et Taïwan figurent parmi les pays sources du plus grand nombre de gens d’affaires immigrants (une catégorie qui comprend les investisseurs, les entrepreneurs et les travailleurs autonomes) au CanadaNote de bas de page 88. Les gens d’affaires sont admis au Canada en raison de leur capacité de créer des emplois et de stimuler l’économie par la consommation et des investissements. Les tendances sont semblables pour les immigrants ayant un faible revenu selon la MFR après impôt.

Tableau 4 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants, par lieu de naissance, Canada, 2005
Tableau 4A : Tous les immigrantsNote du tableau *
Lieu de naissance Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Lieu de naissance 6 166 775 1 025 185 16,6 % 988 120 16,0 %
Total - Pays membres de l'OCDE 2 316 145 235 780 10,2 % 236 270 10,2 %
Total - Pays non membres de l'OCDE 3 850 625 789 405 20,5 % 751 845 19,5 %
Pays membres de l'OCDE Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
France 79 060 10 655 13,5 % 10 265 13,0 %
Allemagne 170 180 13 835 8,1 % 15 255 9,0 %
Grèce 73 030 8 955 12,3 % 7 640 10,5 %
Italie 296 265 20 215 6,8% 17 360 5,9%
Corée du Sud 98 075 36 420 37,1 % 35 690 36,4 %
Mexique 49 745 8 875 17,8 % 10 965 22,0 %
Pays-Bas 111 170 6 520 5,9 % 8 365 7,5 %
Pologne 169 790 17 225 10,1 % 15 630 9,2 %
Portugal 150 245 12 125 8,1% 11 155 7,4%
Royaume-Uni 575 405 38 030 6,6 % 39 175 6,8 %
États-Unis 248 240 27 105 10,9 % 30 035 12,1 %
Autres pays membres de l'OCDE 294 945 35 820 12,1 % 34 730 11,8 %
Pays non membres de l'OCDE Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Afghanistan 36 145 14 440 40,0 % 14 390 39,8 %
Algérie 32 145 12 180 37,9 % 11 370 35,4 %
Bosnie-Herzégovine 28 700 3 565 12,4 % 3 525 12,3 %
Chine, République populaire de 465 925 119 785 25,7 % 113 520 24,4 %
Colombie 39 075 13 540 34,7 % 13 790 35,3 %
El Salvador 42 730 6 910 16,2 % 6 390 15,0 %
Éthiopie 19 630 6 825 34,8 % 6 300 32,1 %
Guyana 87 075 10 445 12,0 % 9 315 10,7 %
Haïti 63 270 15 885 25,1 % 14 175 22,4 %
Hong Kong, ZAS 215 065 38 995 18,1 % 37 695 17,5 %
Inde 443 105 56 135 12,7 % 53 945 12,2 %
Iraq 33 505 11 270 33,6 % 11 380 34,0 %
Iran 91 945 28 240 30,7 % 27 160 29,5 %
Jamaïque 123 160 20 035 16,3 % 18 050 14,7 %
Koweït 10 515 3 750 35,7 % 3 865 36,8 %
Liban 75 180 20 370 27,1 % 19 275 25,6 %
Maroc 38 895 12 390 31,9 % 11 460 29,5 %
Pakistan 133 185 47 190 35,4 % 45 490 34,2 %
Philippines 302 850 32 600 10,8 % 30 235 10,0 %
Roumanie 82 465 13 920 16,9 % 13 005 15,8 %
Russie, Fédération de 63 780 13 555 21,3 % 12 980 20,4 %
Somalie 19 470 10 040 51,6 % 10 130 52,0 %
Afrique du Sud, République d' 38 145 2 970 7,8 % 2 840 7,4 %
Sri Lanka 105 600 20 950 19,8 % 18 915 17,9 %
Taïwan 65 075 26 495 40,7 % 26 240 40,3 %
Ukraine 59 235 10 215 17,2 % 9 300 15,7 %
Viet Nam 159 935 27 235 17,0 % 25 840 16,2 %
Autres pays non membres de l'OCDE 974 820 189 475 19,4 % 181 265 18,6 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

Tableau 4B : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Lieu de naissance Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Lieu de naissance 1 107 270 226 200 20,4 % 217 435 19,6 %
Total - Pays membres de l'OCDE 187 835 31 225 16,6 % 32 235 17,2 %
Total - Pays non membres de l'OCDE 919 435 194 970 21,2 % 185 205 20,1 %
Pays membres de l'OCDE Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
France 17 045 1 765 10,4 % 1 675 9,8 %
Allemagne 7 560 870 11,5 % 1 255 16,6 %
Grèce 1 050 170 16,2 % 150 14,3 %
Italie 2 265 245 10,8 % 255 11,3 %
Corée du Sud 35 355 13 265 37,5 % 12 990 36,7 %
Mexique 16 455 2 360 14,3 % 2 790 17,0 %
Pays-Bas 3 640 450 12,4 % 755 20,7 %
Pologne 6 480 750 11,6 % 740 11,4 %
Portugal 2 950 340 11,5 % 295 10,0 %
Royaume-Uni 25 565 1 550 6,1 % 1 715 6,7 %
États-Unis 38 580 4 520 11,7 % 4 730 12,3 %
Autres pays membres de l'OCDE 30 895 4 945 16,0 % 4 875 15,8 %
Pays non membres de l'OCDE Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Afghanistan 16 225 5 710 35,2 % 5 790 35,7 %
Algérie 16 155 5 600 34,7 % 5 095 31,5 %
Bosnie-Herzégovine 2 605 560 21,5 % 490 18,8 %
Chine, République populaire de 154 785 40 115 25,9 % 38 235 24,7 %
Colombie 25 260 5 125 20,3 % 5 450 21,6 %
El Salvador 2 870 530 18,5 % 495 17,2 %
Éthiopie 6 605 1 600 24,2 % 1 415 21,4 %
Guyana 7 270 700 9,6 % 600 8,3 %
Haïti 10 680 2 635 24,7 % 2 285 21,4 %
Hong Kong, ZAS 7 365 2 440 33,1 % 2 340 31,8 %
Inde 128 985 12 330 9,6 % 11 560 9,0 %
Iraq 9 975 3 420 34,3 % 3 490 35,0 %
Iran 27 535 9 185 33,4 % 8 740 31,7 %
Jamaïque 9 410 1 465 15,6 % 1 320 14,0 %
Koweït 2 720 1 080 39,7 % 1 170 43,0 %
Liban 11 320 3 390 29,9 % 3 110 27,5 %
Maroc 14 710 5 280 35,9 % 4 940 33,6 %
Pakistan 57 615 19 190 33,3 % 17 970 31,2 %
Philippines 77 815 5 140 6,6 % 4 240 5,4 %
Roumanie 28 065 4 110 14,6 % 3 670 13,1 %
Russie, Fédération de 21 100 3 905 18,5 % 3 880 18,4 %
Somalie 3 865 1 595 41,3 % 1 695 43,9 %
Afrique du Sud, République d' 6 520 380 5,8 % 375 5,8 %
Sri Lanka 22 295 4 080 18,3 % 3 740 16,8 %
Taïwan 10 680 4 345 40,7 % 4 385 41,1 %
Ukraine 15 375 3 020 19,6 % 2 775 18,0 %
Viet Nam 10 535 1 605 15,2 % 1 545 14,7 %
Autres pays non membres de l'OCDE 211 095 46 450 22,0 % 44 420 21,0 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

Les pays sources d’immigrants peuvent aussi être étroitement liés à la valeur accordée à l’expérience et à la formation acquises à l’étranger. Par conséquent, les caractéristiques du pays source des immigrants récents sont souvent considérées comme étant des indicateurs clés dans les études portant sur le faible revenu des immigrants. Dans leur étude de 2003, Picot et Hou ont conclu que les régions sources qui représentaient la plus grosse part de la population d’immigrants récente tendaient aussi à avoir la plus forte augmentation des taux de faible revenu, comme l’Afrique, l’Asie et le sud de l’Europe. Comme le signalent Picot et Sweetman (2005), entre 1981 et 2001, il y a eu une diminution du nombre d’immigrants venant des États-Unis, de l’Europe du Nord, de l’Europe du Sud, des Caraïbes, de l’Amérique du Sud et de l’Amérique centrale, ainsi que de l’Asie du Sud; le pourcentage des immigrants récents venant de ces régions a chuté de 65 % à 28 %. En revanche, la part des régions comme l’Europe de l’Est, l’Asie du Sud, l’Asie de l’Est, l’Asie de l’Ouest et l’Afrique est passée de 35 % en 1981 à 72 % en 2001. De plus, Picot et Sweetman (2012) constatent qu’en ce qui concerne la hausse des taux de faible revenu observée chez les immigrants, ce taux a peu augmenté chez les immigrants des régions sources traditionnelles (comme l’Europe de l’Ouest et les États-Unis); la majeure partie de l’augmentation était chez les immigrants des nouvelles régions sources (comme la Chine, l’Inde et les autres pays asiatiques, ainsi que l’Afrique). Les immigrants récents venant de ces régions peuvent avoir de plus faibles niveaux de revenu au cours de leurs premières années au Canada, puisque initialement, leur capital humain peut être moins transférable en raison des problèmes éventuels concernant la langue, les différences culturelles, la qualité de l’éducation et, peut-être même, la discrimination. Par conséquent, le pays d’origine peut être un facteur utile à prendre en considération dans les politiques à mettre en œuvre face à l’incidence du faible revenu chez des groupes précis d’immigrants.

Données démographiques (taille et composition de la famille)

Les immigrants qui vivent avec des personnes non apparentées ou les immigrants qui vivent seuls peuvent être plus susceptibles d’avoir un faible revenu par rapport à ceux qui vivent dans une famille. Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 5 présente la situation de faible revenu après impôt (selon le SFR et la MFR) des immigrants selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et la situation dans la famille économique, pour le Canada, en 2005. Dans la catégorie des personnes ayant un revenu inférieur au SFR, 46,9 % des immigrants ne vivant pas avec des membres de la famille étaient en situation de faible revenu en 2005, par comparaison à 29,2 % des immigrants vivant seuls, et 14,4 % des immigrants vivant dans une famille économique (les taux correspondants pour les Canadiens de naissance étaient 38,3 %, 22,5 % et 6,8 %, respectivement). Bien que les tendances demeurent les mêmes indépendamment de la période d’immigration, les écarts de taux de faible revenu entre ceux qui vivent avec des personnes non apparentées et ceux qui vivent seuls étaient, dans une certaine mesure, moins prononcés en 2005 dans les cohortes d’immigrants plus établies. Par exemple, dans le cas des immigrants résidant au Canada depuis 10 à 15 ans (ceux ayant immigré entre 1991 et 1995), 46,3 % de ceux vivant avec des personnes non apparentées en 2005 avaient un faible revenu, par comparaison à 41,9 % de ceux vivant seuls, alors que le taux était de 15,3 % pour ceux vivant dans une famille économique. Comparativement, dans le cas des immigrants récents (ceux ayant immigré entre 2001 et 2004), 55,6 % de ceux vivant avec des personnes non apparentées en 2005 avaient un faible revenu, par comparaison à 44,1 % de ceux vivant seuls, alors que le taux était de 25,6 % pour ceux vivant dans une famille économique. Bien que l’ampleur varie dans une certaine mesure, ces tendances sont semblables pour la situation de faible revenu des immigrants par type de famille, selon la MFR après impôt.

Tableau 5 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants, selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et la situation dans la famille économique, Canada, 2005
Tableau 5A : Personnes nées au Canada
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Personnes nées au Canada 24 651 925 2 343 940 9,5 % 2 697 195 10,9 %
Membre d'une famille économique 21 161 145 1 435 200 6,8 % 1 809 035 8,5 %
Personne vivant seule 2 705 005 607 575 22,5 % 597 685 22,1 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 785 775 301 165 38,3 % 290 480 37,0 %
Tableau 5B : ImmigrantsNote du tableau *
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Immigrants 6 166 770 1 025 185 16,6 % 988 115 16,0 %
Membre d'une famille économique 5 421 250 781 000 14,4 % 781 640 14,4 %
Personne vivant seule 594 670 173 375 29,2 % 143 150 24,1 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 150 850 70 810 46,9 % 63 320 42,0 %
Tableau 5C : Ayant immigré avant 1981
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré avant 1981 2 393 355 187 350 7,8 % 175 200 7,3 %
Membre d'une famille économique 1 966 790 89 100 4,5 % 98 275 5,0 %
Personne vivant seule 385 390 84 800 22,0 % 65 160 16,9 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 41 175 13 450 32,7 % 11 770 28,6 %
Tableau 5D : Ayant immigré entre 1981 et 1985
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1981 et 1985 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Membre d'une famille économique 317 400 28 320 8,9 % 29 010 9,1 %
Personne vivant seule 33 395 12 455 37,3 % 10 285 30,8 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 9 650 3 675 38,1 % 3 355 34,8 %
Tableau 5E : Ayant immigré entre 1986 et 1990
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1986 et 1990 640 440 92 220 14,4 % 88 495 13,8 %
Membre d'une famille économique 578 925 67 680 11,7 % 66 890 11,6 %
Personne vivant seule 44 665 17 530 39,2 % 15 385 34,4 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 16 845 7 010 41,6 % 6 220 36,9 %
Tableau 5F : Ayant immigré entre 1991 et 1995
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1991 et 1995 822 220 143 740 17,5 % 138 705 16,9 %
Membre d'une famille économique 757 775 115 875 15,3 % 114 340 15,1 %
Personne vivant seule 45 030 18 890 41,9 % 16 590 36,8 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 19 410 8 980 46,3 % 7 775 40,1 %
Tableau 5G : Ayant immigré entre 1996 et 2000
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1996 et 2000 843 035 173 855 20,6 % 168 765 20,0 %
Membre d'une famille économique 784 740 149 085 19,0 % 146 690 18,7 %
Personne vivant seule 38 370 15 085 39,3 % 13 335 34,8 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 19 935 9 690 48,6 % 8 740 43,8 %
Tableau 5H : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Situation dans la famille économique Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 2001 et 2004 824 670 226 200 27,4 % 217 440 26,4 %
Membre d'une famille économique 759 845 194 340 25,6 % 189 485 24,9 %
Personne vivant seule 36 350 16 035 44,1 % 14 150 38,9 %
Personne vivant avec personnes non apparentées seulement 28 475 15 820 55,6 % 13 800 48,5 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

Les études indiquent de façon constante que, selon le type de famille, les parents seuls et les personnes seules sont les plus susceptibles d’être en situation de faible revenu. Par conséquent, les taux de faible revenu varient selon les variations démographiques comme une augmentation du nombre de familles monoparentales, qui peuvent entraîner une hausse du taux agrégéNote de bas de page 89. Certaines études indiquent qu’une augmentation du nombre de familles monoparentales a entraîné une augmentation du faible revenu chez les immigrants récents (arrivés au cours des 10 dernières années) (analyse fondée sur l’Enquête sur les finances des consommateurs, 1977 à 1997, Liu et Kerr, 2003). Dempsey (2006) observe que les immigrants vivant en situation monoparentale et les immigrants vivant seuls déclarent le plus faible revenu parmi tous les groupes. De plus, selon l’étude de Dempsey, les parents seuls et les personnes seules de plus de 60 ans ont la pire situation de revenu de tout leur groupe d’âges, étant donné le nombre réduit de personnes contribuant au revenu familial. Par ailleurs, toujours selon cette étude, les immigrants en situation monoparentale et personnes seules de 60 ans ou plus sont moins susceptibles de déclarer des revenus d’emploi et plus susceptibles de déclarer des revenus de transferts gouvernementaux, et des revenus de retraite de source non contributive comme des suppléments provinciaux, la SV et le SRG. Dans le cas du groupe d’âges de moins de 60 ans, les immigrants en situation monoparentale et personnes seules sont aussi susceptibles d’être les seuls contributeurs et d’avoir un revenu d’emploi familial inférieur. Tenant compte du type de famille, Dempsey observe dans son étude que les immigrants en situation monoparentale et personnes seules ont les revenus d’emploi familiaux les moins élevés et que les immigrants âgés sont moins autonomes que les immigrants plus jeunes.

De fait, la composition de la famille peut avoir une forte incidence sur les taux de faible revenu observés. Par exemple, Plante et van den Berg (2011) utilisent les données de l’EDTR pour les années 1996 à 2008 et appliquent la technique de décomposition pour déterminer quelle serait la situation dans quatre provinces canadiennes – l’Alberta, la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Québec – si elles avaient les mêmes profils démographiques (p. ex. le même nombre de familles biparentales et de familles monoparentales). La mesure utilisée dans cette analyse est 50 % du revenu médian, les seuils de faible revenu et les taux de faible revenu estimés indépendamment pour chaque province et année d’analyse en dollars de 2008, gradués selon l’indice des prix à la consommation provincial. L’analyse révèle que, avant de tenir compte de l’impact des profils démographiques provinciaux, le Québec a des taux de faible revenu plus bas que ceux des trois autres provinces (selon le taux de faible revenu moyen dans chaque province, pour les 13 années de l’analyse)Note de bas de page 90. Cependant, une fois les corrections apportées pour tenir compte du fait que le Québec a moins de familles biparentales que les autres provinces, les auteurs ont constaté que si l’Ontario, l’Alberta et la Colombie-Britannique avaient les mêmes caractéristiques démographiques que le Québec, leurs taux de faible revenu seraient bien plus élevés que celui du Québec. Qui plus est, si le Québec avait les caractéristiques démographiques de l’Ontario, son taux de faible revenu serait encore plus bas.

Les résultats d’étude permettent de conclure que les immigrants récents seraient plus susceptibles de faire partie d’une famille de travailleurs pauvres que les autres Canadiens à faible revenu. L’étude de Fleury (2007) utilise les données de l’EDTR pour examiner le phénomène du faible revenu et du faible revenu au travail parmi les immigrants arrivés au Canada depuis le début des années 1990 (aussi appelés dans cette étude « les immigrants récents »). L’étude démontre que la population d’immigrants récents qui vivent en situation de faible revenu diffère à plusieurs égards de celle des autres Canadiens à faible revenu. Notamment, les immigrants récents en âge de travailler qui vivaient en situation de faible revenu dépendaient moins des transferts gouvernementaux et davantage de l’appui des membres de leur famille afin de combler leurs besoinsNote de bas de page 91. Pour les immigrants récents qui ne vivent pas une situation de faible revenu, Fleury avance qu’il est aussi beaucoup plus probable qu’ils évitent le faible revenu grâce au soutien de leur famille plutôt qu’à leur revenu sur le marché du travail.

L’évolution au fil du temps de la composition ethnique du groupe des immigrants âgés et de leur tendance à vivre dans des familles multigénérationnelles pourrait avoir une incidence sur les tendances de faible revenu. Par exemple, Picot, Lu et Hou (2009) expliquent comment les taux de faible revenu sont fondés sur le revenu total de la famille dans laquelle les personnes âgées vivent. Par conséquent, par exemple, si les immigrants âgés étaient davantage susceptibles de vivre dans des familles économiques multigénérationnelles comptant des soutiens économiques plus nombreux et plus jeunes, il s’ensuivrait une hausse du revenu du marché disponible pour les personnes âgées. Les auteurs affirment que la situation familiale des immigrants âgés est importante, puisque plus le temps qu’ils ont passé au Canada est court, plus l’effet du système de transfert sur leurs taux de faible revenu est faible. Pour être efficaces, les politiques élaborées au sujet du faible revenu et des immigrants doivent tenir compte du rôle que la composition de la famille pourrait avoir dans les résultats et les tendances observées.

Niveaux d’immigration et tendances en matière d’établissement

Dans le cas de la population née au Canada, les résultats économiques relatifs des immigrants varient selon la province. Des variations de revenu d’emploi peuvent exister d’une province à l’autre, en raison de nombreux facteurs, y compris la conjoncture du marché du travail, les lois applicables au salaire minimal et les différentes concentrations industrielles et professionnelles à travers les régions. L’endroit où un immigrant s’établit peut influer sur ses résultats économiques en raison des variations de composition industrielle régionale et de diverses répercussions du cycle des affaires sur la composition industrielle. Par exemple, les salaires en Ontario ont subi un dur coup causé par le déclin de l’emploi dans le secteur de la technologie de l’information au début des années 2000, ce qui a eu une incidence négative sur les salaires des immigrants récents arrivant dans cette province. Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 6 présente la situation de faible revenu après impôt (selon le SFR et la MFR) des immigrants, selon les années écoulées depuis l’immigration et la province, pour le Canada, en 2005. Si l’on prend le cas des personnes dont le revenu familial est en deçà du SFR, les plus fortes proportions d’immigrants en situation de faible revenu en 2005 étaient aussi les trois provinces recevant le plus grand nombre d’immigrants, c’est-à-dire le Québec, dont le taux de faible revenu après impôt des immigrants était de 24,1 %, suivi par la Colombie-Britannique et l’Ontario, à 17,8 % et 15,4 %, respectivement. Chez les personnes nées au Canada, le tableau change, les taux de faible revenu les plus élevés en 2005 étant au Manitoba (10,9 %), au Québec (10,7 %), en Colombie Britannique (10,3 %) et à Terre-Neuve-et-Labrador (10,0 %). En revanche, pour 2005, les taux de faible revenu les plus bas étaient ceux des immigrants vivant en Saskatchewan (10,1 %), à Terre-Neuve-et-Labrador (11,0 %), et au Nouveau-Brunswick (11,3 %). Si l’on compare les cohortes les plus récentes d’immigrants (ceux entrés entre 2001 et 2004) aux immigrants plus établis (ceux admis entre 1991 et 1995), des tendances semblables se dégagent, mais les taux de faible revenu sont plus élevés pour ceux qui sont arrivés le plus récemment. Par exemple, les taux de faible revenu des immigrants entrés entre 2001 et 2004 étaient de 37,6 % au Québec, de 28,9 % en Colombie-Britannique et de 25,9 % en Ontario; pour ceux admis entre 1991 et 1995, ces proportions s’élevaient à 24,1 %, 20,4 % et 16,0 %, respectivement. Il est à noter que la proportion d’immigrants en situation de faible revenu était relativement élevée à l’Île-du-Prince-Édouard en 2005, avec un taux de 28,3 % chez les cohortes les plus récentes, et de 22,2 % chez les immigrants arrivés entre 1991 et 1995. Au chapitre de la MFR après impôt, il existe certaines variations intéressantes dans la situation de faible revenu selon la province fondées sur la MFR. Par exemple, dans le cas des personnes dont le revenu familial est en deçà de la MFR, les proportions les plus élevées d’immigrants en situation de faible revenu en 2005 étaient au Québec, avec un taux de faible revenu après impôt des immigrants de 22,3 %, suivi de l’Île-du-Prince-Édouard et de la Colombie-Britannique, à 19,6 % et 17,6 %, respectivement. Dans le cas des personnes nées au Canada, le tableau change, les taux de faible revenu selon la MFR les plus élevés en 2005 étant à Terre-Neuve-et-Labrador (15,9 %), en Nouvelle-Écosse (14,0 %), et au Nouveau-Brunswick (13,8 %).

Tableau 6 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants, selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et la province, CanadaNote de bas de page 92, 2005
Tableau 6A : Personnes nées au Canada
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Personnes nées au Canada 24 651 925 2 343 940 9,5 % 2 697 195 10,9 %
Terre-Neuve-et-Labrador 489 440 48 880 10,0 % 77 805 15,9 %
Nouvelle-Écosse 851 600 78 335 9,2 % 119 135 14,0 %
Île-du-Prince-Édouard 128 310 8 550 6,7 % 14 590 11,4 %
Nouveau-Brunswick 688 165 61 955 9,0 % 94 735 13,8 %
Québec 6 499 785 692 700 10,7 % 746 030 11,5 %
Ontario 8 479 355 753 745 8,9 % 842 245 9,9 %
Manitoba 961 500 104 505 10,9 % 117 550 12,2 %
Saskatchewan 893 615 82 195 9,2 % 120 535 13,5 %
Alberta 2 676 790 216 130 8,1 % 231 830 8,7 %
Colombie-Britannique 2 890 260 296 960 10,3 % 332 740 11,5 %
Tableau 6B : ImmigrantsNote du tableau *
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Immigrants 6,166,770 1,025,185 16.6% 988,115 16.0%
Terre-Neuve-et-Labrador 8,315 915 11.0% 1,095 13.2%
Nouvelle-Écosse 44,880 5,425 12.1% 7,040 15.7%
Île-du-Prince-Édouard 4,755 695 14.6% 930 19.6%
Nouveau-Brunswick 26,220 2,970 11.3% 4,305 16.4%
Québec 848,920 204,420 24.1% 189,145 22.3%
Ontario 3,389,130 523,270 15.4% 502,635 14.8%
Manitoba 150,665 21,550 14.3% 21,850 14.5%
Saskatchewan 47,860 4,815 10.1% 6,450 13.5%
Alberta 524,845 62,980 12.0% 58,565 11.2%
Colombie-Britannique 1,115,005 198,135 17.8% 196,100 17.6%
Tableau 6C : Ayant immigré avant 1981
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré avant 1981 2 393 355 187 350 7,8 % 175 200 7,3 %
Terre-Neuve-et-Labrador 4 340 235 5,4 % 320 7,4 %
Nouvelle-Écosse 24 100 1 340 5,6 % 2 015 8,4 %
Île-du-Prince-Édouard 2 770 130 4,7 % 235 8,5 %
Nouveau-Brunswick 14 320 690 4,8 % 1 290 9,0 %
Québec 296 445 35 175 11,9 % 29 815 10,1 %
Ontario 1 320 280 94 920 7,2 % 88 275 6,7 %
Manitoba 68 110 5 280 7,8 % 4 720 6,9 %
Saskatchewan 24 005 1 260 5,2 % 2 010 8,4 %
Alberta 202 505 13 100 6,5 % 10 855 5,4 %
Colombie-Britannique 433 695 35 220 8,1 % 35 670 8,2 %
Tableau 6D : Ayant immigré entre 1981 et 1985
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1981 et 1985 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Terre-Neuve-et-Labrador 345 25 7,2 % 40 11,6 %
Nouvelle-Écosse 2 470 150 6,1 % 220 8,9 %
Île-du-Prince-Édouard 245 10 4,1 % 15 6,1 %
Nouveau-Brunswick 1 750 100 5,7 % 155 8,9 %
Québec 54 680 9 835 18,0 % 9 440 17,3 %
Ontario 184 080 21 315 11,6 % 20 210 11,0 %
Manitoba 10 250 1 075 10,5 % 1 110 10,8 %
Saskatchewan 2 950 225 7,6 % 265 9,0 %
Alberta 39 845 3 645 9,1 % 3 105 7,8 %
Colombie-Britannique 63 415 8 070 12,7 % 8 080 12,7 %
Tableau 6E : Ayant immigré entre 1986 et 1990
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1986 et 1990 640,440 92,220 14.4% 88,495 13.8%
Terre-Neuve-et-Labrador 670 60 9.0% 75 11.2%
Nouvelle-Écosse 3,535 490 13.9% 620 17.5%
Île-du-Prince-Édouard 300 70 23.3% 75 25.0%
Nouveau-Brunswick 1,880 185 9.8% 295 15.7%
Québec 86,370 18,115 21.0% 16,840 19.5%
Ontario 373,100 50,210 13.5% 48,050 12.9%
Manitoba 13,810 1,575 11.4% 1,510 10.9%
Saskatchewan 3,435 250 7.3% 335 9.8%
Alberta 51,380 5,170 10.1% 4,635 9.0%
Colombie-Britannique 105,550 16,100 15.3% 16,060 15.2%
Tableau 6F : Ayant immigré entre 1991 et 1995
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1991 et 1995 822 220 143 740 17,5 % 138 705 16,9 %
Terre-Neuve-et-Labrador 695 115 16,5 % 130 18,7 %
Nouvelle-Écosse 3 520 590 16,8 % 755 21,4 %
Île-du-Prince-Édouard 270 60 22,2 % 65 24,1 %
Nouveau-Brunswick 1 875 140 7,5 % 340 18,1 %
Québec 109 425 26 425 24,1 % 24 555 22,4 %
Ontario 461 250 74 000 16,0 % 71 485 15,5 %
Manitoba 13 145 1 525 11,6 % 1 490 11,3 %
Saskatchewan 4 310 410 9,5 % 505 11,7 %
Alberta 62 100 6 880 11,1 % 6 485 10,4 %
Colombie-Britannique 164 870 33 595 20,4 % 32 900 20,0 %
Tableau 6G : Ayant immigré entre 1996 et 2000
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1996 et 2000 843 035 173 855 20,6 % 168 765 20,0 %
Terre-Neuve-et-Labrador 850 105 12,4 % 115 13,5 %
Nouvelle-Écosse 4 405 715 16,2 % 930 21,1 %
Île-du-Prince-Édouard 320 25 7,8 % 70 21,9 %
Nouveau-Brunswick 2 120 285 13,4 % 440 20,8 %
Québec 108 835 28 130 25,8 % 26 380 24,2 %
Ontario 470 790 92 135 19,6 % 88 925 18,9 %
Manitoba 14 255 2 065 14,5 % 2 385 16,7 %
Saskatchewan 5 090 515 10,1 % 670 13,2 %
Alberta 65 600 7 755 11,8 % 7 615 11,6 %
Colombie-Britannique 170 035 42 140 24,8 % 41 230 24,2 %
Tableau 6H : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Province Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 2001 et 2004 824 670 226 200 27,4 % 217 440 26,4 %
Terre-Neuve-et-Labrador 1 055 190 18,0 % 215 20,4 %
Nouvelle-Écosse 4 795 1 150 24,0 % 1 410 29,4 %
Île-du-Prince-Édouard 530 150 28,3 % 210 39,6 %
Nouveau-Brunswick 2 810 605 21,5 % 770 27,4 %
Québec 141 485 53 135 37,6 % 49 240 34,8 %
Ontario 439 330 113 820 25,9 % 109 495 24,9 %
Manitoba 21 685 4 955 22,8 % 5 340 24,6 %
Saskatchewan 5 485 920 16,8 % 1 330 24,2 %
Alberta 75 575 13 350 17,7 % 12 665 16,8 %
Colombie-Britannique 131 140 37 925 28,9 % 36 750 28,0 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

Selon Picot et Hou (2003), la province de résidence des immigrants récents a un rôle considérable dans leur situation de faible revenu. Ces auteurs affirment que cela s’applique particulièrement aux régions métropolitaines de recensement (RMR) en Ontario et en Colombie-Britannique, où les immigrants représentent une grande proportion de la population et où la dégradation des résultats en matière de faible revenu tend à se concentrer chez les immigrants. De plus, ces auteurs affirment que les taux de faible revenu croissants chez les immigrants récents, surtout à Toronto et Vancouver depuis 1990, sont particulièrement inquiétants, étant donné que les Canadiens de naissance dans ces villes ont connu un déclin de leurs taux de faible revenu au cours de cette période. Dans une étude s’appuyant sur les données du recensement, Ley et Smith (1997) examinent la relation entre l’immigration et le faible revenu dans les villes canadiennes au cours de la période de 1971 à 1991. Tout comme Picot et Hou, ils arrivent à la conclusion que la concentration du faible revenu dans les villes canadiennes se situe effectivement dans la population nouvellement immigrante (bien que l’importance de leur rôle dans les mesures de faible revenu n’est pas aussi grande qu’elle l’est dans les études européennes). Ces auteurs constatent que la plus grande incidence de très faible revenu est à Montréal. De plus, les auteurs concluent que la transition des logements abordables hors du centre-ville de Toronto a mené à une augmentation du faible revenu dans les banlieues (voir également Ley et Smith, 2000).

En effet, sur le plan géographique, la plupart des immigrants au Canada s’établissent dans les trois grandes RMR : Toronto, Vancouver et Montréal. Des proportions relativement plus faibles d’immigrants s’établissent dans les RMR de taille moyenne, comme Calgary et Winnipeg, bien que ces proportions aient augmenté au cours des dernières années. Ces tendances d’établissement des immigrants combinées à la capacité du marché du travail local d’absorber l’arrivée d’immigrants peuvent avoir contribué aux tendances de faible revenu observées. Avant le début des années 1990, le gouvernement a réduit les niveaux d’immigration au cours des périodes de récession, lorsque la capacité d’absorption dans l’économie était jugée faibleNote de bas de page 93. De grands nombres d’immigrants se sont établis vers la fin des années 1980 et le début des années 1990, tandis que l’économie entrait dans une grave récession au cours de la période de 1990 à 1991. Les arrivées ont continué à ce rythme tout au long du début des années 1990, une période de chômage élevé et de faible croissance de l’emploi. Thompson (2004) affirme qu’il peut y avoir eu diminution structurelle des taux d’emploi des immigrants récents par rapport aux Canadiens de naissance dans les grandes RMR qui ont connu des taux d’immigration relativement élevés au cours de la récession du début des années 1990, alors que les probabilités seraient moindres dans les villes dont les taux d’immigration étaient inférieurs au cours de cette période. Cela pourrait être le cas, affirme cet auteur, s’il y a, par exemple, une accumulation importante d’immigrants qui n’ont pas été capables d’entrer dans le marché du travail; par conséquent, une fois l’économie rétablie, la capacité du marché du travail d’absorber de nouvelles cohortes est réduite par les cohortes précédentes qui sont encore en train d’essayer d’entrer dans le marché du travail. Picot et Sweetman (2012) notent que d’aucuns estiment que les résultats économiques des immigrants s’amélioreraient s’il y avait une plus grande répartition régionale des immigrants.

En bref, pour comprendre les facteurs qui contribuent aux situations de faible revenu des immigrants, il est crucial de tenir compte des tendances d’établissement des immigrants, ainsi que des niveaux (densité) de cet établissement. En établissant une concordance entre ces caractéristiques et les conditions économiques et sociales, il est possible d’élaborer des politiques ciblées qui s’appliquent spécifiquement aux personnes, aux endroits et aux périodes. Des études appuient la possibilité que les facteurs composition des immigrants, niveau économique et composition de l’éducation dans les endroits où les immigrants vivent, influent sur leur revenu. De plus, la majorité des mesures actuellement en vigueur pour aider ceux qui sont en situation de faible revenu (comme l’assistance sociale, les initiatives de logement abordable, etc.), relèvent des gouvernements provinciaux et municipaux.

Les compétences que les immigrants apportent avec eux (éducation, connaissance des langues officielles et littératie, expérience, etc.)

La relation entre la connaissance des langues officielles et les résultats économiques des immigrants a été amplement étudiée dans la documentation de recherche (voir, par exemple, Bonikowska, Green et Riddell, 2008; Grondin, 2005; Picot et Sweetman, 2005). Bien que le manque de données ait fait qu’il a été difficile de mesurer avec exactitude l’impact de la connaissance des langues officielles sur les résultats sur le marché du travail, il semble très évident que ce soit un obstacle important à la réussite économique des immigrantsNote de bas de page 94. Les études indiquent que dans l’ensemble, les immigrants qui connaissent une des langues officielles du Canada, ou les deux, s’intègrent beaucoup mieux dans le marché du travail que ceux qui ne connaissent ni l’anglais ni le français à leur arrivée. De plus, la non-connaissance de l’une ou l’autre des langues officielles peut considérablement limiter la transférabilité du capital humain, comme l’éducation et l’expérience. Un diplôme obtenu à l’étranger, quelle qu’en soit la valeur intrinsèque pour le marché du travail canadien, à peu de valeur si le détenteur ne parle ni l’une ni l’autre des langues officielles. Par exemple, en se fondant sur l’Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada (ELIC), Goldmann, Sweetman, et Warman (2011) constatent que la valeur de l’éducation des nouveaux immigrants est modeste et statistiquement significative seulement pour ceux qui exercent au Canada la même profession qu’ils exerçaient dans leur pays d’origine et (ou) ont un degré élevé de compétences en anglais. En général, d’après cette étude, les compétences linguistiques semblent être d’importance cruciale dans l’utilité de l’éducation officielle précédant l’immigration (mais non l’expérience du travail) sur le marché du travail canadien.

Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 7 présente la situation de faible revenu après impôt (SFR et MFR) des immigrants, selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et la connaissance des langues officiellesNote de bas de page 95, pour le Canada, en 2005. Si l’on examine les personnes dont le revenu familial est en deçà du SFR, les plus fortes proportions d’immigrants en situation de faible revenu en 2005 étaient ceux qui déclaraient n’avoir une connaissance que du français seulement (28,3 %) ou ne connaître ni l’anglais ni le français (25,5 %). Ils sont suivis par ceux qui déclarent connaître le français et l’anglais (17,4 %), alors que ceux qui déclarent ne parler que l’anglais avaient le plus faible taux de faible revenu en 2005, soit 15,2 %. Une tendance similaire est observée en 2005 chez les Canadiens de naissance, avec un taux de faible revenu de 21,7 % pour ceux qui déclarent ne parler ni l’anglais ni le français, 10,8 % pour ceux qui déclarent ne parler que le français, suivis par ceux qui déclarent ne parler que l’anglais ou parler l’anglais et le français, avec 9,2 % dans le cas de ces deux groupes. Ces degrés de connaissance des langues officielles autodéclarée par les immigrants demeurent vrais, quel que soit le nombre d’années passées au Canada (même si l’ampleur des taux de faible revenu diminue selon le nombre d’années passées au Canada pour la connaissance déclarée de chacune des langues officielles en 2005), et bien que ces résultats puissent sembler surprenants, de nombreux facteurs pourraient les expliquer. Plus précisément, la relation entre la capacité autodéclarée de parler le français et les probabilités d’obtention de revenu d’emploi et de ne pas être en situation de faible revenu n’est pas claire. Il en est ainsi à l’échelle du Canada, ainsi qu’au Québec, où la capacité de parler le français n’est pas statistiquement liée aux probabilités d’obtention d’un emploi pour les immigrants. Par exemple, Citoyenneté et Immigration Canada (1998b) constate que, bien que la capacité de parler l’anglais améliore considérablement les résultats des immigrants sur le marché du travail, il n’en est pas de même pour ceux qui parlent le français, surtout hors du Québec. Avant de tirer des conclusions des données du tableau 7, il est important de tenir compte des variations d’âge, d’éducation, de secteur d’emploi, de mobilité professionnelle, de pays source et de catégorie d’admission entre les divers groupes d’immigrants selon leurs capacités déclarées de connaissance de l’anglais et du français. Il se peut que ces résultats concernant le rendement des immigrants de langue française fassent état d’autres facteurs reliés à la maîtrise des langues.

Moins d’immigrants ont, à leur entrée au pays, le français ou l’anglais comme langue parlée à la maison ou langue maternelle; or, la compétence linguistique et l’aptitude à communiquer sont liées à la productivité et donc aux salaires que reçoivent les travailleurs. Par conséquent, une moindre compétence linguistique des immigrants à leur arrivée peut avoir un effet évident sur les gainsNote de bas de page 96. Ayant analysé de façon exhaustive les études portant sur les résultats économiques des immigrants, Picot et Sweetman (2005) citent les études comme celles de Baker et Benjamin (1994), Frenette et Morissette (2003), et Aydemir et Skuterud (2005), qui semblent indiquer que, pour peut-être un tiers, la décroissance des gains initiaux est imputable à cette évolution des caractéristiques des immigrants à leur entrée au pays et, plus précisément, à celle des régions d’origine et de la langue parlée à la maison. En se fondant sur les données de l’Enquête sur l’alphabétisme de la population immigrante de l’Ontario menée en 1998, Ferrer, Green et Riddell (2004), constatent que la littératie et la numératie des immigrants sont, en moyenne, considérablement inférieures à la moyenne de scolarité et de caractéristiques équivalente des Canadiens de naissance. Sur le marché du travail canadien, la littératie et la numératie des immigrants semblent être récompensées de la même façon que le sont celles des Canadiens de naissance : une augmentation de 100 points de la cote de littératie produisait le même rendement chez les deux groupes. Dans une étude plus récente, fondée sur les résultats d’examen de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes (EIACA) qui évaluait les compétences de littératie, de numératie et de résolution de problèmes des adultes canadiens, Skuterud (2011) relève des preuves de grands écarts dans les compétences linguistiques des immigrants, qui sont non seulement fortement reliées aux gains sur le marché du travail, mais aussi considérablement plus prononcées pour les immigrants dont la langue maternelle est une langue étrangère ou qui parlent une langue étrangère à la maisonNote de bas de page 97. Compte tenu de cette preuve, l’auteur utilise les données sur la langue maternelle et la langue parlée à la maison des nouveaux immigrants de quatre recensements (1971 à 2006) pour produire une approximation des capacités linguistiques et dégager les possibilités d’augmenter le rendement des compétences linguistiques sur le marché du travail canadien. Ce faisant, l’auteur constate une détérioration des gains des immigrants, par rapport aux travailleurs d’âge et d’éducation semblables nés au Canada, qui est manifestement plus prononcée chez les immigrants de langue maternelle étrangère et qui parlent une langue étrangère à la maison. Cela semble particulièrement évident dans les résultats des femmes et demeure évident même après les années 1990, lorsque le pourcentage des immigrants récents de langue maternelle étrangère et qui parlaient une langue étrangère à la maison a commencé à baisser. Cela est encore vrai après l’analyse selon la région de naissance d’un immigrant, portant à croire que cela fait état d’un changement du rendement des compétences linguistiques plutôt que d’un changement des compétences linguistiques elles-mêmes. L’auteur affirme que les résultats de l’analyse laissent supposer que la langue a un rôle plus important dans les motifs des difficultés bien documentées des immigrants récents sur le marché du travail canadien.

Tableau 7 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants, selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et la connaissance des langues officielles, Canada, 2005
Tableau 7A : Personnes nées au Canada
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Personnes nées au Canada 24 651 930 2 343 945 9,5 % 2 697 195 10,9 %
Anglais seulement 16 056 635 1 479 275 9,2 % 1 746 725 10,9 %
Français seulement 3 863 900 415 875 10,8 % 480 190 12,4 %
Anglais et français 4 630 145 426 810 9,2 % 447 625 9,7 %
Ni l'anglais ni le français 101 245 21 985 21,7 % 22 655 22,4 %
Tableau 7B : ImmigrantsNote du tableau *
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Immigrants 6 166 770 1 025 185 16,6 % 988 115 16,0 %
Anglais seulement 4 769 740 723 830 15,2 % 703 345 14,7 %
Français seulement 240 730 68 105 28,3 % 63 690 26,5 %
Anglais et français 758 915 132 090 17,4 % 124 890 16,5 %
Ni l'anglais ni le français 397 390 101 165 25,5 % 96 180 24,2 %
Tableau 7C : Ayant immigré avant 1981
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré avant 1981 2 393 355 187 350 7,8 % 175 205 7,3 %
Anglais seulement 1 930 750 139 670 s/o 133 610 s/o
Français seulement 68 625 8 790 s/o 7 625 s/o
Anglais et français 300 700 26 835 8,9 % 24 725 8,2 %
Ni l'anglais ni le français 93 280 12 055 12,9 % 9 240 9,9 %
Tableau 7D : Ayant immigré entre 1981 et 1985
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1981 et 1985 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Anglais seulement 268 585 29 705 s/o 28 765 s/o
Français seulement 15 255 3 205 21,0 % 3 110 20,4 %
Anglais et français 49 590 6 335 12,8 % 6 050 12,2 %
Ni l'anglais ni le français 27 020 5 205 19,3 % 4 725 17,5 %
Tableau 7E : Ayant immigré entre 1986 et 1990
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1986 et 1990 640 440 92 225 14,4 % 88 495 13,8 %
Anglais seulement 492 725 65 585 s/o 63 355 s/o
Français seulement 20 955 5 020 24,0 % 4 690 22,4 %
Anglais et français 82 745 12 870 15,6 % 12 315 14,9 %
Ni l'anglais ni le français 44 010 8 745 19,9 % 8 140 18,5 %
Tableau 7F : Ayant immigré entre 1991 et 1995
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1991 et 1995 822 220 143 740 17,5 % 138 705 16,9 %
Anglais seulement 622 035 101 995 16,4 % 99 210 15,9 %
Français seulement 29 015 7 430 25,6 % 6 770 23,3 %
Anglais et français 98 390 18 625 18,9 % 17 780 18,1 %
Ni l'anglais ni le français 72 790 15 695 21,6 % 14 945 20,5 %
Tableau 7G : Ayant immigré entre 1996 et 2000
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 1996 et 2000 843 040 173 860 20,6 % 168 765 20,0 %
Anglais seulement 652 880 128 320 19,7 % 125 090 19,2 %
Français seulement 33 620 8 835 26,3 % 8 360 24,9 %
Anglais et français 99 115 20 245 20,4 % 19 340 19,5 %
Ni l'anglais ni le français 57 430 16 455 28,7 % 15 980 27,8 %
Tableau 7H : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Langues officielles Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total - Ayant immigré entre 2001 et 2004 824,675 226,195 27.4% 217,440 26.4%
Anglais seulement 607,020 154,240 25.4% 148,905 24.5%
Français seulement 53,470 21,810 40.8% 20,450 38.2%
Anglais et français 98,465 29,090 29.5% 27,100 27.5%
Ni l'anglais ni le français 65,730 21,060 32.0% 20,975 31.9%

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

La relation entre l’éducation et les résultats économiques des immigrants a été bien documentée (voir, par exemple, Plante, 2010; Xue et Xu, 2010). Fondé sur les données du recensement de 2006, le tableau 8 présente la situation de faible revenu après impôt (selon le SFR et la MFR) des immigrants selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et le plus haut niveau de scolarité et, au Canada, en 2005. Si l’on examine le groupe des personnes âgées de 15 ans ou plus avec un revenu familial en deçà du SFR, les proportions les plus élevées des immigrants en situation de faible revenu en 2005 étaient ceux qui détenaient un certificat, un diplôme ou un grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur de l’étranger (19,4 %), suivis de ceux ayant un niveau d’éducation inférieur au diplôme d’études secondaires (17,4 %), de ceux ayant des études secondaires ou un certificat ou diplôme d’une école de métiers (16,1 %) et de ceux détenant un certificat ou diplôme d’un collègue ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou un certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat, de l’étranger (16,1 %). En revanche, les immigrants détenant un certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur du Canada avaient le taux de faible revenu le moins élevé, à 9,1 %, suivis de ceux ayant un certificat ou diplôme d’un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou un certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat, également du Canada (11,1 %). Pour les personnes nées au Canada, des tendances semblables sont observées pour 2005, bien que les taux soient, en général, bien plus bas. Par exemple, les Canadiens de naissance ayant obtenu au Canada un certificat, un diplôme ou un grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur, avaient le taux de faible revenu le plus bas, à 5,0 %, alors que ceux détenant un certificat ou diplôme d’un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou un certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat, obtenu également au Canada, avaient un taux de faible revenu de 6,8 %; les taux correspondants de leurs homologues ayant fait leurs études à l’étranger étaient de 5,9 % et de 10,9 %, respectivement. Tant pour les immigrants que pour les Canadiens de naissance, à la fois le plus haut degré de scolarité et le lieu des études constituent des facteurs importants dans la détermination des situations de faible revenu.

Tableau 8 : Situation de faible revenu après impôt des immigrants, selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et le plus haut niveau de scolarité, Canada, 2005
Tableau 8A : Personnes nées au Canada
Personnes nées au Canada Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 24 651 930 2 343 945 9,5 % 2 697 195 10,9 %
Population de moins de 15 ans 5 182 635 605 780 11,7 % 705 155 13,6 %
Population de 15 ans ou plus 19 469 290 1 738 160 8,9 % 1 992 045 10,2 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Personnes nées au Canada - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 4 767 500 621 505 13,0 % 755 940 15,9 %
Études secondaires ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 7 377 770 671 530 9,1 % 761 350 10,3 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 4 211 775 284 565 6,8 % 313 715 7,4 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 42 255 4 620 10,9 % 4 830 11,4 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 2 927 160 147 510 5,0 % 147 700 5,0 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 142 830 8 425 5,9 % 8 505 6,0 %
Tableau 8B : ImmigrantsNote du tableau *
Immigrants Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 6 166 770 1 025 185 16,6 % 988 115 16,0 %
Population de moins de 15 ans 345 405 113 965 33,0 % 110 920 32,1 %
Population de 15 ans ou plus 5 821 365 911 220 15,7 % 877 190 15,1 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Immigrants - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 1 239 940 216 085 17,4 % 206 710 16,7 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 1 849 625 298 445 16,1 % 288 970 15,6 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 651 845 72 485 11,1 % 70 410 10,8 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 600 370 96 915 16,1 % 93 225 15,5 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 575 360 52 230 9,1 % 50 225 8,7 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 904 230 175 050 19,4 % 167 665 18,5 %
Tableau 8C : Ayant immigré avant 1981
Ayant immigré avant 1981 Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 2 393 355 187 350 7,8 % 175 205 7,3 %
Population de moins de 15 ans s/o s/o s/o s/o s/o
Population de 15 ans ou plus 2 393 355 187 350 7,8 % 175 205 7,3 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Ayant immigré avant 1981 - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 610 520 60 320 9,9 % 52 845 8,7 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 814 685 67 320 8,3 % 64 625 7,9 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 328 145 23 480 7,2 % 23 280 7,1 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 200 645 13 045 6,5 % 11 995 6,0 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 284 245 13 430 4,7 % 13 045 4,6 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 155 120 9 755 6,3 % 9 420 6,1 %
Tableau 8D : Ayant immigré entre 1981 et 1985
Ayant immigré entre 1981 et 1985 Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Population de moins de 15 ans s/o s/o s/o s/o s/o
Population de 15 ans ou plus 360 450 44 450 12,3 % 42 650 11,8 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Ayant immigré entre 1981 et 1985 - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 71 895 12 465 17,3 % 11 840 16,5 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 115 820 16 550 14,3 % 15 880 13,7 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 54 380 5 280 9,7 % 5 075 9,3 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 34 355 3 590 10,4 % 3 640 10,6 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 48 855 3 300 6,8 % 3 110 6,4 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 35 150 3 275 9,3 % 3 100 8,8 %
Tableau 8E : Ayant immigré entre 1986 et 1990
Ayant immigré entre 1986 et 1990 Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 640 440 92 225 14,4 % 88 495 13,8 %
Population de moins de 15 ans s/o s/o s/o s/o s/o
Population de 15 ans ou plus 640 440 92 220 14,4 % 88 495 13,8 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Ayant immigré entre 1986 et 1990 - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 120 135 23 415 19,5 % 22 710 18,9 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 222 105 36 875 16,6 % 35 265 15,9 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 86 520 9 680 11,2 % 9 285 10,7 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 65 570 8 175 12,5 % 7 685 11,7 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 73 235 6 305 8,6 % 6 045 8,3 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 72 880 7 785 10,7 % 7 510 10,3 %
Tableau 8F : Ayant immigré entre 1991 et 1995
Ayant immigré entre 1991 et 1995 Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 822 220 143 740 17,5 % 138 705 16,9 %
Population de moins de 15 ans 22 530 4 325 19,2 % 4 390 19,5 %
Population de 15 ans ou plus 799 695 139 415 17,4 % 134 320 16,8 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Ayant immigré entre 1991 et 1995 - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 162 900 35 155 21,6 % 34 265 21,0 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 272 675 53 500 19,6 % 51 475 18,9 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 91 105 13 575 14,9 % 12 985 14,3 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 86 875 13 220 15,2 % 12 605 14,5 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 72 280 8 975 12,4 % 8 555 11,8 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 113 870 14 985 13,2 % 14 430 12,7 %
Tableau 8G : Ayant immigré entre 1996 et 2000
Ayant immigré entre 1996 et 2000 Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 843 040 173 860 20,6 % 168 765 20,0 %
Population de moins de 15 ans 99 840 22 620 22,7 % 22 040 22,1 %
Population de 15 ans ou plus 743 200 151 245 20,4 % 146 730 19,7 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Ayant immigré entre 1996 et 2000 - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 129 710 32 580 25,1 % 32 160 24,8 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 213 535 51 460 24,1 % 50 215 23,5 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 59 275 10 905 18,4 % 10 500 17,7 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 86 895 16 850 19,4 % 16 330 18,8 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 56 545 8 555 15,1 % 8 320 14,7 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 197 230 30 885 15,7 % 29 205 14,8 %
Tableau 8H : Ayant immigré entre 2001 et 2004
Ayant immigré entre 2001 et 2004 Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Total 824 675 226 195 27,4 % 217 440 26,4 %
Population de moins de 15 ans 160 520 49 385 30,8 % 47 200 29,4 %
Population de 15 ans ou plus 664 155 176 815 26,6 % 170 240 25,6 %
Plus haut certificat, diplôme ou grade, par lieu des études (Ayant immigré entre 2001 et 2004 - population de 15 ans ou plus) Total - Nombre de personnes Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur au SFR (après impôt) % Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) Personnes dont le revenu familial est inférieur à la MFR (après impôt) %
Aucun, ou niveau inférieur au secondaire 109 245 33 025 30,2 % 33 365 30,5 %
Études secondaires, ou certificat ou diplôme d'apprenti ou d'une école de métiers 157 680 45 860 29,1 % 44 560 28,3 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (Au Canada) 27 005 6 975 25,8 % 6 745 25,0 %
Certificat ou diplôme d'un collège ou cégep ou autre certificat ou diplôme non universitaire, ou certificat ou diplôme universitaire de niveau inférieur au baccalauréat (À l'étranger) 90 710 22 970 25,3 % 21 915 24,2 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (Au Canada) 32 800 7 670 23,4 % 7 230 22,0 %
Certificat, diplôme ou grade universitaire de niveau baccalauréat ou supérieur (À l'étranger) 246 720 60 315 24,4 % 56 420 22,9 %

Source : Statistique Canada, Recensement de 2006, tableau de CIC, calculs de l'auteur.

De nombreuses études révèlent que les compétences et l’expérience acquises dans un autre pays sont considérées beaucoup moins valables que le capital humain acquis au Canada, et qu’il est plus avantageux pour les immigrants de faire leurs études dans leur nouveau pays plutôt qu’à l’étranger (voir, par exemple, Green et Worswick, 2010; Aydemir et Skuterud, 2005). Il semble, systématiquement, que le faible rendement de l’éducation et de l’expérience acquises à l’étranger est grandement responsable des écarts de résultats sur le marché du travail entre les immigrants et les Canadiens de naissance aux caractéristiques apparemment semblables. À partir des données des recensements de 1986, 1991 et 1996, Sweetman (2004) constate que les immigrants ayant reçu une éducation de moindre qualité dans leur pays d’origine, telle que mesurée par les résultats aux examens internationaux (en mathématiques et en sciences) reçoivent un rendement moyen inférieur par rapport à leur scolarisation sur le marché du travail canadien que ceux qui viennent de pays où l’éducation est de meilleure qualité. Fait intéressant, Picot et Hou (2003) arrivent à la conclusion que l’écart entre les taux de faible revenu observés pour les Canadiens de naissance et les nouveaux immigrants est le plus prononcé chez les titulaires d’un diplôme, particulièrement les titulaires d’un diplôme en génie et en sciences appliquées. Cette tendance est aussi confirmée par Picot et Sweetman (2005), qui remarquent que les immigrants récents ayant un bagage universitaire ont été de moins en moins capables de monnayer professionnellement leur formation et leur expérience comme avaient pu le faire les cohortes antérieures. L’augmentation du faible revenu chez les immigrants récents peut être le résultat d’un rendement moindre de l’éducation étrangère en raison de changements dans les pays d’origine. Bien que le rendement de l’éducation acquise dans différents pays n’ait pas diminué au fil du temps, la proportion d’immigrants venant de pays offrant un rendement inférieur a augmenté.

De même, l’expérience de travail étrangère n’est pas considérée aussi valable que l’expérience de travail canadienne. Dans leur examen approfondi des études, Picot et Sweetman (2005) notent un certain nombre d’études récentes qui indiquent que l’expérience de travail à l’étranger des immigrants arrivants est de moins en moins prisée sur le marché du travail canadien (voir, par exemple, Schaafsman et Sweetman, 2001; Green et Worswick, 2002; Frenette et Morissette, 2003; Aydemir et Skuterud, 2005). Selon les auteurs, la diminution progressive des bénéfices de l’expérience est un des principaux facteurs, sinon le facteur le plus important, associé au déclin des gains chez les immigrants récents. Des études subséquentes par Aydemir et Skuterud (2005), et Frenette et Morissette (2003) entérinent cette notion. Ces deux groupes d’auteurs observent qu’entre 1980 et 2000, les gains n’ont pas diminué chez les très jeunes travailleurs immigrants récents (âgés de 25 à 29 ans), et que le déclin était concentré parmi les travailleurs masculins immigrants âgés de 30 ans ou plus. Selon l’étude de Goldmann, Sweetman et Warman (2011), même les immigrants qui arrivent à exercer après leur arrivée la profession qu’ils exerçaient avant l’immigration (et à percevoir un revenu considérablement plus élevé) voient un rendement presque nul de leur expérience acquise avant d’immigrer. De fait, ces auteurs affirment dans cette étude que ni la concordance de profession ni les compétences linguistiques n’ont un impact sur le rendement de l’expérience du travail avant l’immigration, qu’ils observent comme étant considérablement négatif sur le plan statistique. Le faible rendement de l’éducation et de l’expérience acquises à l’étranger par rapport à celles acquises au Canada peut expliquer la situation de faible revenu chez certains groupes d’immigrants récents.

Occasions et obstacles dans la société d’accueil

Si pertinents les facteurs socioéconomiques mentionnés plus haut puissent-ils être, ils n’expliquent pas entièrement l’incidence du faible revenu et les tendances relevées chez les diverses populations au Canada. En particulier, ces facteurs déterminants ne tiennent pas compte des occasions et des obstacles dans la société, ni du rôle des conditions, des politiques et des établissements d’enseignement en ce qui concerne le marché du travail. En plus d’un examen des caractéristiques socioéconomiques des groupes d’immigrants dans l’analyse des tendances de faible revenu, il y a lieu de procéder à un examen efficace des occasions et des obstacles qui se trouvent dans la société. C’est la conjugaison des caractères socioéconomiques des immigrants aux occasions et aux obstacles dans la société hôte qui détermine, en fin de compte, les résultats économiques des immigrants. Au nombre des occasions et des obstacles qui se trouvent dans la société d’accueil, ceux qui contribuent le plus aux résultats économiques des immigrants sont décrits ci-après.

Conditions économiques (environnement global et local du marché du travail, professions en demande, emploi et possibilités de travail, etc.)

Le marché du travail influe sur les taux de faible revenu par l’intermédiaire de l’emploi et des gainsNote de bas de page 98. La nature cyclique de l’économie canadienne (fluctuations des conditions macro-économiques) joue un rôle important dans l’intégration économique des immigrants, les taux de faible revenu augmentant en périodes de récession et diminuant en périodes d’expansionNote de bas de page 99. Par exemple, en se fondant sur l’Enquête sur les finances des consommateurs (EFC) et l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR), Brink et Dhawan-Biswal (2002) notent une amélioration modérée des taux de faible revenu des immigrants récents au cours des conditions favorables sur le marché du travail à la fin des années 1990. Ces constatations concordent généralement avec celles de nombreuses études sur les gains en ce qui concerne les résultats économiques (voir, p. ex., Green et Worswick, 2002). En se fondant sur les données de l’EDTR, Smith et Jackson (2002) examinent les niveaux d’emploi, les gains, les revenus familiaux et les taux de faible revenu des immigrants récents par rapport à ceux du reste de la population canadienne au cours de la période de relance économique de 1995 à 1998. L’écart au niveau des possibilités d’emploi et de revenu qui existe entre les immigrants récents et les autres Canadiens semble s’être rétréci entre 1995 et 1998 – et indépendamment de la mesure utilisée, le faible revenu a diminué considérablement chez les familles d’immigrants récents au cours de cette période. Cependant, les auteurs affirment que les écarts demeurent très grands : en 1998, le taux de faible revenu des immigrants récents s’élevait à 27 %, le double du taux de 13 % chez le reste de la population canadienne; leurs gains et salaires étaient inférieurs d’un tiers à ceux des autres Canadiens. Il n’en demeure pas moins que, malgré les grands écarts, la poussée de la relance économique au cours de la deuxième moitié des années 1990 a eu une incidence positive sur les occasions d’emploi et les revenus des immigrants récents. D’après ces auteurs, c’est une indication qu’un marché du travail sain peut constituer un puissant levier en faveur de l’égalité et de l’inclusion des nouveaux immigrants à l’économie normale, bien que d’autres politiques s’imposent encore. Il a aussi été dit (voir, p. ex., McDonald et Worswick, 1998; Aydemir et Skuterud, 2005) que les immigrants, surtout les tout récents, tendent à avoir des résultats sur le marché du travail qui sont plus vulnérables aux tendances à la baisse dans le cycle des affaires que les Canadiens de naissance, et peuvent aussi subir pendant longtemps les effets d’une entrée difficile sur le marché du travail canadien.

Les professions pour lesquelles la demande est relativement plus forte que l’offre – tant pour les immigrants que pour les Canadiens de naissance – peuvent aussi influer sur les possibilités d’emploi et de gain des immigrants. Par exemple, un certain nombre d’études (Dempsey et Kustec, 2006; Picot, Hou et Coulombe, 2007; Statistique Canada, 2008; Picot et Hou, 2009) démontrent que le déclin des emplois dans le secteur de la technologie de l’information (TI) au cours de la première moitié des années 2000 a eu une incidence importante sur les gains des immigrants récents. Cela s’explique par le fait que la formation et l’emploi d’une proportion démesurément élevée des immigrants récents étaient en informatique et en génie. Après l’effondrement du secteur de la TI, de nombreux immigrants peuvent s’être tournés vers des emplois moins spécialisés et généralement moins bien payés pour entrer sur le marché du travail. De fait, Picot, Hou et Coulombe (2007) estiment que le nombre croissant d’immigrants qualifiés, dont une forte proportion avait l’intention de travailler dans le domaine de la TI, conjugué au ralentissement dans le secteur informatique, peut expliquer la dégradation des taux de faible revenu parmi les travailleurs qualifiés malgré la force de l’économie générale au cours de la période de 2000 à 2003.

Comme cela a été dit précédemment, la comparaison des taux de faible revenu des immigrants à ceux des personnes nées au Canada est un moyen de contrôle approximatif des répercussions du cycle économiqueNote de bas de page 100. C’est cette démarche, entreprise par Picot et Hou (2003), qui analyse les taux de faible revenu des immigrants selon principalement les données des fichiers principaux des recensements des années 1981 à 2001, menant à la conclusion qu’il y a eu une hausse structurelle des taux de faible revenu des immigrants récents. L’analyse couvre la période de 1980 à 2000, et se penche particulièrement sur les changements survenus entre 1980 et 1990, et 1990 et 2000, années qui correspondaient aux sommets du cycle économique. Les auteurs constatent que le taux agrégé de faible revenu chez les Canadiens de naissance a baissé entre 1980 et 2000, alors qu’il a augmenté chez les groupes d’immigrants. Par exemple, pour tous les immigrants, le taux de faible revenu est passé de 17,0 % en 1980 à 20,2 % en 2000; chez les immigrants récents, il est passé de 24,6 % à 35,8 %, respectivement. En revanche, dans la plupart des groupes de Canadiens de naissance, le taux de faible revenu a chuté. Pour la population des Canadiens de naissance dans son ensemble, le taux de faible revenu est descendu de 17,2 % en 1980 à 14,3 % en 2000. Par conséquent, les auteurs affirment que la hausse ne peut être attribuée à la piètre conjoncture économique de 2000 par rapport aux sommets précédents du cycle économique; le taux de chômage était de 6,8 % en 2000, plus bas que celui observé en 1990 (8,1 %) ou en 1980 (7,5 %)Note de bas de page 101.

En fin de compte, c’est la concordance entre ce qu’un immigrant a à offrir et la demande sur le marché du travail canadien qui influe sur les tendances d’intégration dans le marché du travail. Voilà pourquoi, malgré le fait que ce soit les professions hautement qualifiées (exigeant généralement des études universitaires) qui motivent la croissance de la main-d’œuvre canadienne, un niveau de scolarité élevé ne garantit pas l’obtention d’un emploi exigeant ce niveau d’éducation, dans le cas tant des personnes nées au Canada que des immigrants. Cela s’explique par le fait que les conditions économiques (généralement à l’échelle locale) ou l’offre et la demande de professions influent ensemble sur les résultats sur le marché du travail. Si la demande est faible pour une profession particulière, une personne ayant la formation et l’expérience applicables à cette profession peut avoir de la difficulté à trouver un emploi dans ce domaine, malgré son niveau d’éducation élevé. Par conséquent, les conditions du marché du travail peuvent influer sur la situation de faible revenu des immigrants au Canada en raison des répercussions sur les possibilités de gains d’emploi, un facteur important à prendre en considération lorsqu’on envisage des solutions possibles.

Attitudes du public envers l’immigration et le changement culturel

L’attitude du public envers l’immigration peut avoir une incidence sur les taux de faible revenu des immigrants par la mesure dans laquelle les employeurs et employés sont disposés à recruter, garder et rémunérer des immigrants. L’influence de l’opinion publique sur le faible revenu des immigrants peut aussi se transmettre par la disponibilité des services et programmes disponibles pour l’intégration des nouveaux arrivants (voir la section suivante), ainsi que par l’aide disponible pour ceux en situation de faible revenu. La discrimination, quelle soit raciale, culturelle, ethnique ou fondée sur l’expérience, l’éducation et les titres de compétence étrangers, ou encore sur un accent en anglais ou en français parlés, est aussi une autre façon dont l’attitude du public envers l’immigration et le changement culturel peut influer sur l’emploi et les conséquences sur la situation de revenu des immigrants.

Les études révèlent que les facteurs économiques ont une forte incidence sur l’attitude du public envers l’immigration. Par exemple, Reitz (2011) examine les tendances récentes dans l’attitude du public et les motifs fondamentaux sociaux et économiques du soutien d’un degré élevé d’immigration, en se fondant sur une analyse du sondage d’opinion Focus Canada mené par Environics en novembre 2010. Cette étude indique que ceux qui ont confiance en l’économie nationale et ceux qui estiment que leur niveau de vie personnel s’est amélioré au cours des dix dernières années figurent fréquemment parmi ceux qui appuient l’immigration. L’auteur affirme que cet effet est causé principalement, ou presque entièrement, par le fait que cette perspective optimiste encourage l’impression que l’immigration a une incidence positive. L’analyse de Reitz constate que, quand les répercussions économiques perçues de l’immigration sont contrôlées, l’effet de ces points de vue plus généraux sur l’économie devient presque insignifiant. Parallèlement, l’étude constate que ceux dont la situation n’est pas aussi brillante et qui pensent que l’économie a déraillé sont moins enclins à estimer que l’immigration a des répercussions favorables. Si l’on en juge d’après ces résultats, on peut conclure que l’attitude du public envers l’immigration peut suivre dans une certaine mesure le cycle économique : positive en période de croissance et moins positive en période de ralentissement.

L’attitude du public envers l’immigration peut aussi être motivée par les politiques officielles. Un exemple est la politique de multiculturalisme canadienne, adoptée en 1971, qui pourrait encourager les Canadiens à avoir une opinion plus positive de l’immigration. Le multiculturalisme canadien découle, à la base, de la conviction que tous les citoyens sont égaux, et il permet à tous les citoyens de conserver leur identité, d’être fiers de leurs ancêtres et d’éprouver un sentiment d’appartenanceNote de bas de page 102. Tout ceci peut amener les employeurs à être davantage disposés à recruter et à rémunérer correctement les immigrants, ainsi qu’encourager la société à appuyer les services et programmes à l’appui de l’intégration des immigrants sur le marché du travail. Reitz (2011) décrit quatre façons dont le multiculturalisme a une incidence positive. Premièrement, il peut encourager la reconnaissance des cultures minoritaires; le multiculturalisme encourage l’opinion selon laquelle l’immigration procure un avantage culturel aussi bien qu’économique. Deuxièmement, la politique de multiculturalisme encourage la notion voulant que, si les groupes minoritaires d’immigrants conservent leur culture, cela ne signifie pas nécessairement qu’ils n’adopteront pas les valeurs culturelles canadiennes et ne deviendront pas de bons Canadiens. Troisièmement, une politique de multiculturalisme encouragerait l’opinion positive de l’immigration en facilitant une plus grande inclusion sociale pour les immigrants et leurs enfants, facilitant leur intégration et produisant des avantages économiques et socioculturels. Finalement, en adoptant une politique nationale de multiculturalisme, on crée la perception selon laquelle l’immigration est une caractéristique fondamentale de la tradition canadienne, et donc, un objet de fierté nationale. Ainsi, déclare Reitz, une politique de multiculturalisme peut servir de campagne de relations publiques pour l’immigration.

Les politiques publiques peuvent aussi avoir une incidence sur la situation de faible revenu de différents groupes, selon les politiques et programmes destinés précisément à certains groupes. Par exemple, Proulx, Faustmann, Raïq, et van den Berg (2011) affirment que les variations de taux de faible revenu entre les provinces peuvent être attribuées à la diversité des politiques publiques. En particulier, ces auteurs affirment que le Québec a amélioré son problème de faible revenu par le truchement de politiques publiques axées sur les ménages avec enfants, et il consacre aussi davantage de fonds (en proportion du PIB) à ce domaine que les autres provinces, pour aider les familles moins nanties. Il est aussi souligné dans cette étude que le Québec consacre davantage de fonds à des politiques sur le marché du travail et des politiques sur l’équilibre travail-famille, comme le congé parental et les services de garderie. Ces politiques auraient eu pour résultat une augmentation de la participation au marché du travail des femmes ayant des enfants de moins de six ans. Les auteurs considèrent que la situation favorable du Québec est en grande partie le résultat de ses choix de politiques. De même, selon différentes caractéristiques socioéconomiques, diverses politiques pourraient influer de nombreuses façons sur la situation de faible revenu des immigrants et d’autres groupes au Canada.

Certaines études proposent des formes de discrimination qui font obstacle à l’intégration sociale et économique des immigrants. La plus probante de ces propositions est peut-être celle qui détermine les immigrants de statut de minorité visibleNote de bas de page 103. Étant donné la transition vers l’immigration de pays sources non traditionnels et l’augmentation correspondante des « minorités visibles », les probabilités de discrimination raciale s’exerçant contre les immigrants ont augmenté; le cas échéant, cela pourrait en partie expliquer l’augmentation des taux de faible revenu des plus récents immigrants par rapport à ceux arrivés plus tôt. Les constatations portent à croire que certains immigrants de minorités visibles sont surreprésentés parmi ceux en situation de faible revenu. Une étude effectuée par Morissette et Zhang (2001) à partir des données de l’EDTR pour 1993 à 1998 révèle que les membres d’une minorité visible (tant immigrants que Canadiens de naissance) étaient plus susceptibles d’avoir un faible revenu pendant quatre années ou plus (21 %), par rapport aux autres Canadiens (7 %). En se fondant aussi sur les données de l’EDTR, Fleury (2007) constate que la majorité des immigrants récents en situation de faible revenu étaient membres d’une minorité visible (86 %). Des études antérieures ont révélé des résultats semblables : à partir des données du recensement de 1991, Kazemipur et Halli (2001) ont constaté un taux de faible revenu considérablement plus élevé chez les nouveaux arrivants des pays de l’Asie du Sud-Est (30,8 %), des pays arabes (40,9 %), des pays de l’Amérique latine (38,8 %) et des pays des Caraïbes (Noirs) (29,4 %) par rapport à la moyenne canadienne. Ces auteurs affirment que les immigrants de plus jeune génération venant de pays en voie de développement sont plus susceptibles d’être en situation de faible revenu que les personnes nées au Canada. Palameta (2004) constate que les minorités visibles nées au Canada n’étaient pas plus susceptibles que les autres personnes nées au Canada d’être en situation de faible revenu; en revanche, les immigrants membres des minorités visibles étaient considérablement plus susceptibles que les autres immigrants d’être en situation de faible revenu, indépendamment du nombre d’années passées au Canada. Qui plus est, Palameta constate que les minorités visibles qui ont été en situation de faible revenu au moins une fois, y compris celles nées au Canada, étaient plus susceptibles que les autres Canadiens d’être en situation de faible revenu à plusieurs reprises.

Les résultats sont encore plus complexes de par le fait que la discrimination raciale peut être aggravée par d’autres formes de discrimination, comme la discrimination fondée sur l’âge, le sexe ou l’accent. Par exemple, il est possible que des employeurs adoptent des pratiques de recrutement discriminatoires d’après leur perception de différence culturelle. Oreopoulos (2009) a mené une expérience sur le terrain avec 6 000 curriculum vitae envoyés en réponse à des annonces d’emploi touchant plusieurs professions dans la région du Grand Toronto. Les C.V. étaient formulés pour représenter des immigrants entrant au Canada selon le système des points en provenance de trois principaux pays sources (la Chine, l’Inde et le Pakistan), ainsi que des non-immigrants britanniquesNote de bas de page 104. Les auteurs ont trouvé que les candidats avec des noms à consonance anglaise étaient rappelés par les employeurs 40 % plus souvent que les candidats ayant un nom chinois, indien ou pakistanais. Dans la mesure où le C.V. indiquait quatre à six années d’expérience canadienne, la formation à l’étranger (que ce soit dans un établissement de prestige ou pas) n’avait pas une grande incidence sur les taux de rappel. Cependant, le simple changement de l’expérience du candidat, de canadienne à étrangère, a diminué davantage le taux de rappel d’environ 10 % à 5 %. L’ajout d’autres qualifications linguistiques, d’une formation canadienne supplémentaire ou d’activités paraprofessionnelles a eu peu d’incidence sur ces résultats d’ensemble. Les effets sont demeurés essentiellement les mêmes, que les emplois postulés aient exigé plus ou moins de compétences linguistiques ou sociales. En revanche, l’étude conclut que les différences concernant les rappels s’estompent dans la plupart des cas quand on compare les candidats nés au Canada et les immigrants britanniques, et lorsque l’échantillon était limité à des recruteurs qui avaient eux-mêmes des voix ou des noms de consonance ethnique. Dans l’ensemble, les résultats révèlent une discrimination considérable de la part des employeurs contre les candidats qui avaient un nom ethnique ou avaient acquis leur expérience dans des sociétés étrangères.

De nombreuses études (p. ex. K. Pendakur et R. Pendakur, 1998) affirment que la discrimination à l’endroit des immigrants – peut-être plus précisément à l’endroit des immigrants membres des minorités visibles – est un facteur qui contribue à leurs résultats économiques relativement mauvais. D’autres études, cependant, déclarent que les écarts des résultats entre les immigrants et les personnes nées au Canada, qui pourraient sembler être causés par la discrimination, résulteraient plutôt de disparités sur le plan de l’éducation et d’autres facteurs non quantifiables (p. ex. Wanner, 1998). Tant qu’il n’y aura pas un moyen efficace de déterminer les tendances et de mesurer la discrimination, la mesure dans laquelle ce phénomène peut toucher les immigrants sur le marché du travail canadien et leur situation de faible revenu continuera de faire l’objet d’un vaste débat.

Présence de programmes d’intégration des nouveaux arrivants et admissibilité à ces programmes

Les programmes destinés à aider les nouveaux arrivants à s’intégrer peuvent influencer les taux de faible revenu des immigrants en ayant une incidence sur les compétences sur le marché du travail (p. ex. recherche d’emploi, langues officielles, possibilités de réseautage professionnel, renseignements sur le marché du travail), de même que sur les résultats d’emploi et de gains. Les programmes d’établissement des immigrants sur le marché du travail ont généralement pour objet d’« investir » dans les immigrants afin de faciliter leur intégration dans le marché du travail dans leurs domaines respectifs, d’augmenter en bout de compte l’impôt contribué par les immigrants et d’en réduire le recours à l’assistance sociale, et d’élargir le bassin de travailleurs qualifiés au Canada. Ces programmes ont, par extension, l’objectif de réduire l’incidence de faible revenu chez les immigrants. Il y a peu de renseignements disponibles concernant la participation des immigrants aux programmes d’intégration des nouveaux arrivants et la façon dont ceux-ci influent sur les résultats économiques à long terme des immigrants, surtout en ce qui concerne le faible revenu. On manque de données, ou de données uniformes, concernant l’usage que font les immigrants des services d’établissement et les transitions sur le marché du travail (p. ex. obtention et perte d’un emploi rémunéré, réception de paiements de transfert, faible revenu). Les données existantes, c’est-à-dire les évaluations des programmes, quoiqu’informatives, présentent des lacunes sur le plan de l’existence d’un groupe témoin (c.-à-d. ceux qui n’accèdent pas au service), ou des mesures de la situation économique d’un immigrant une fois sorti du programme. Autrement dit, pour évaluer l’incidence des programmes d’établissement des immigrants sur leur situation de faible revenu, il faudrait procéder à une collecte systématique des données de mesure des résultats après la participation au programme.

Il y a tout lieu de penser que bon nombre des programmes à l’intention des immigrants contribuent à de meilleurs résultats pour ces derniers et, par extension, réduisent l’incidence du faible revenu. Par exemple, Citoyenneté et Immigration Canada (2011b) a évalué un programme appelé le Programme d’établissement et d’adaptation des immigrants (PEAI), qui offrait des services visant à faciliter l’adaptation, l’établissement et l’intégration des nouveaux arrivants au Canada afin qu’ils puissent participer à la vie économique et sociale du pays aussi rapidement que possible après l’arrivée, et dans la pleine mesure de leurs capacitésNote de bas de page 105. Dans le cas de ce programme en œuvre de 1974 à 2008, l’impact positif le plus important a été l’amélioration de la capacité des nouveaux arrivants à cerner et à aborder leurs besoins en matière d’établissement et de se renseigner sur les autres services dont ils peuvent profiter dans leur collectivité. L’évaluation a révélé – chose particulièrement intéressante dans le présent contexte – que les services avaient aussi beaucoup aidé les nouveaux arrivants à chercher et à trouver un emploi. Les clients du PEAI ont confirmé qu’ils avaient dû parfaire leur technique de recherche d’emploi; près de la moitié des clients interrogés estimaient que leur participation au PEAI les avait aidés à trouver un emploi. Par extension, on peut conclure que ce programme a probablement aidé certains immigrants et leurs familles à éviter des situations de faible revenu en les aidant à trouver un emploi. Cela étant, en l’absence de données sur les résultats à long terme pour ces immigrants après leur participation au programme, il est difficile de déterminer dans quelle mesure celui-ci a eu une incidence sur leur revenu.

L’accessibilité et l’admissibilité des nouveaux arrivants aux programmes d’intégration est un moyen par lequel les mesures politiques peuvent avoir une incidence indirecte sur la situation économique des immigrants. En encourageant l’acquisition des outils adaptés au marché du travail canadien chez les immigrants qui bénéficieraient de tels outils, ces programmes peuvent mener à une amélioration des résultats des immigrants sur le marché du travail et, par conséquent, les aider à éviter les situations de faible revenu. On pourrait mieux évaluer la mesure dans laquelle de tels programmes réussissent en établissant des évaluations à long terme des résultats économiques des participants au programme (et d’un groupe témoin de non-participants). Ce faisant, les programmes et les mesures politiques visant à réduire le faible revenu chez les immigrants pourraient être améliorés et personnalisés au fil du temps pour qu’ils contribuent mieux à la réussite économique des immigrants.

Degré d’ouverture du marché du travail et compétitivité (p. ex. protection des titulaires)

Le degré d’ouverture du marché du travail canadien et la compétitivité sur ce marché peuvent agir sur les taux de faible revenu des immigrants par leur effet sur l’accès à l’emploi, aux promotions et aux gains. L’ouverture du marché du travail peut être vue dans l’optique de l’accès aux emplois. Au Canada, les facteurs qui peuvent influer sur l’accès aux emplois sont, entre autres, l’ancienneté professionnelle et l’affiliation syndicale et, dans une certaine mesure, les occasions de formation dans le milieu de travail. Les immigrants récents peuvent avoir très peu l’occasion de postuler des emplois auxquels seuls les personnes ayant une ancienneté professionnelle et (ou) une affiliation syndicale peuvent accéder. En ce sens, les pratiques dans le milieu de travail sont au cœur de la réussite des nouveaux venus sur le marché du travail. À l’heure actuelle, on ne connait pas très bien la mesure dans laquelle les pratiques en milieu de travail peuvent influencer les résultats d’emploi des immigrants sur le marché du travail. Les études actuelles se penchent principalement sur les obstacles à l’emploi du point de vue des employés – l’offre. Cependant, l’autre membre de l’équation est un facteur important, c’est-à-dire les lieux de travail, ou encore les employeurs : il est important de tenir compte des pratiques d’embauche dans les milieux de travail, des efforts consacrés à la conservation des travailleurs et à la promotion des employés, ainsi que des pratiques concernant l’évaluation et la reconnaissance de l’éducation et de l’expérience de travail acquise à l’étranger. La compétitivité du marché du travail est souvent prise dans l’optique d’un bassin de candidats qualifiés pour un emploi, mesurée par la prise en considération de ceux qui ont l’éducation, les études, la formation professionnelle ou l’expérience appropriées. Il est possible qu’une concurrence accrue de la part d’un nombre croissant de travailleurs hautement instruits sur le marché du travail canadien ait contribué à la dégradation des résultats économiques des plus récents immigrantsNote de bas de page 106.

Un nombre limité d’études examinent le lien entre l’ouverture du marché du travail et les résultats de faible revenu des immigrants, mais des études connexes dans le domaine pourraient être informatives. Pendakur et Woodcock (2008) tentent de déterminer si l’accès limité des immigrants et des travailleurs membres d’une minorité aux emplois à salaire élevé (« plafond de verre ») est attribuable au fait qu’ils accèdent difficilement aux emplois dans les entreprises offrant une rémunération élevée, un phénomène que les auteurs appellent les « portes de verre ». Une porte de verre est définie comme étant une barrière qui empêche les travailleurs défavorisés d’accéder à des emplois dans des entreprises versant des salaires élevés. Tout comme un plafond de verre réduit la distribution des salaires auxquels les travailleurs défavorisés peuvent accéder, les auteurs affirment qu’une porte de verre réduit la distribution des entreprises dans lesquelles ils pourraient trouver un emploi. En se fondant sur les données de l’Enquête sur le milieu de travail et les employés (EMTE), un sondage des travailleurs et de leurs employeurs, les auteurs examinent la mesure dans laquelle l’exclusion des emplois à salaire élevé – autrement dit, un plafond de verre – est causée par la porte de verre. Cette étude constate que les travailleurs faisant partie d’une minorité ethnique nés au Canada ne se heurtent pas de façon considérable aux plafonds de verre ni aux portes de verre. En revanche, les immigrants font face à des écarts de salaire considérables, causés essentiellement par les portes de verre – un accès limité aux emplois dans les entreprises qui offrent des salaires élevés.

L’ancienneté professionnelle est considérée un élément important de la sécurité d’emploi, et les employeurs qui recrutent peuvent aussi la voir favorablement comme un signe de loyauté. Plus quelqu’un occupe un emploi particulier dans un organisme donné pendant longtemps, plus il est probable que d’autres mesures, comme la permanence de l’emploi, la rémunération et les avantages non salariaux, s’améliorerontNote de bas de page 107. De façon générale, les écarts dans l’ancienneté entre les immigrants et les personnes nées au Canada sont facilement prévisibles, la plupart des immigrants n’ayant pas été au Canada suffisamment longtemps pour que leur ancienneté auprès de leur employeur actuel soit très longueNote de bas de page 108. En se fondant sur l’Enquête sur la population active (EPA), l’Enquête sur le milieu de travail et les employés (EMTE) et l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC), Gilmore (2009) compare les nombreux facteurs qui constituent la qualité d’emploi pour les immigrants et pour les personnes nées au Canada, un exercice qui a fait ressortir des aspects de l’ouverture du marché du travail aux nouveaux arrivants. Gilmore conclut que les travailleurs d’âge moyen nés au Canada étaient plus susceptibles d’avoir une très longue ancienneté, même en comparaison avec les immigrants établis depuis plus de 10 ansNote de bas de page 109.

La protection syndicale est aussi considérée un facteur important qui contribue tant à la sécurité d’emploi qu’à l’accès aux emplois dans un grand nombre de milieux de travail et de secteurs. De plus, la force des syndicats semble pouvoir expliquer certaines des écarts de revenuNote de bas de page 110. Une récente étude effectuée par Brady (2011) met en relief l’importance de la force des syndicats dans la réduction de l’ampleur des disparités de revenu, même dans le contexte américain où les syndicats sont considérés faibles et sont virtuellement absents des secteurs où les salaires sont bas. Dans son étude, Gilmore (2009) avance que la protection des négociations collectives est une caractéristique de la qualité de l’emploi liée à d’autres indicateurs, y compris la rémunération et les avantages non salariaux. Elle est aussi liée à l’ancienneté dans l’emploi actuel et à la profession. Selon cette étude, la protection syndicale est plus répandue dans le cas des employés nés au Canada et, en 2008, elle était plus faible chez les employés immigrants de 25 à 54 ans que chez les personnes nées au Canada, indépendamment de la période d’établissement. Par exemple, la proportion d’employés nés au Canada membres d’un syndicat était près de 1,5 fois plus élevée que pour les immigrants globalement, et 1,3 fois plus élevée que pour les immigrants établis depuis plus de 10 ans. Dans une étude antérieure, Reitz et Verma (2004) ont relevé des résultats semblables. Ces auteurs se fondent sur les données des deux panels de 1997 de l’EDTR et constatent que les minorités raciales ont des taux de syndicalisation plus bas (tant affiliation que protection) que les membres de la majorité de la population active d’origine européenne. Ils attribuent cela au fait que les immigrants appartenant aux groupes des minorités visibles ont un nombre d’années moyen inférieur depuis leur établissement que les autres immigrants. Ces auteurs aussi constatent des taux de syndicalisation des nouveaux immigrants qui ont augmenté au fil du temps au Canada. Cependant, ils ne trouvent à la syndicalisation qu’un faible avantage sur le plan des écarts de salaire entre immigrants et non-immigrants. Un autre facteur qui pourrait expliquer les écarts de taux de syndicalisation entre les travailleurs nés au Canada et les immigrants (selon la période d’immigration) pourrait être les différences de compositions industrielles et professionnelles entre les groupes – certains secteurs et certaines professions sont plus susceptibles d’être syndicalisés que d’autres (y compris les différences entre les provinces).

La formation offre aux employés l’occasion d’apprendre et de se perfectionner, et on peut supposer qu’elle représente éventuellement un moyen de faciliter leur accès à des emplois mieux payés qui exigent des compétences plus poussées. Gilmore (2009) affirme que l’accès à la formation, formelle ou informelle, est considéré comme une caractéristique d’emploi importante. L’auteur constate que des proportions similaires de travailleurs immigrants et de travailleurs nés au Canada ont reçu de la formation en cours d’emploi – en 2005, il y avait peu de différence dans les proportions d’immigrants et d’employés nés au Canada ayant reçu de la formation en cours d’emploi au cours des 12 mois précédents. Toutefois, les employés d’âge moyen nés au Canada étaient plus susceptibles d’avoir reçu de la formation en classe que les immigrants (40,6 % comparativement à 32,3 %); le plus grand écart séparait les personnes nées au Canada et les immigrants établis depuis plus de 10 ans, ce groupe étant le moins susceptible d’avoir reçu de la formation en salle de classe au cours des 12 mois précédents.

La concurrence sur le marché du travail peut jouer sur la situation de faible revenu des immigrants par l’influence qu’elle exerce sur la disponibilité des emplois. Le déclin des résultats économiques des immigrants récents au Canada a été expliqué, entre autres, par les variations des niveaux d’éducation des personnes nées au Canada, qui peuvent avoir diminué l’importance des titres de compétence dont bénéficiaient les cohortes d’immigrants précédentes. Reitz (2000) examine comment les changements institutionnels associés à l’émergence de l’économie du savoir – plus particulièrement l’expansion de l’éducation et l’évolution du marché du travail – ont coloré l’expérience d’emploi des nouveaux immigrants au Canada. Tout comme d’autres auteurs d’étude, cet auteur relève une tendance progressive vers des taux de participation à la main-d’œuvre inférieurs et des salaires moins élevés pour les immigrants comparativement aux personnes nées au Canada, tant globalement que dans la plupart des régions précises de groupes d’origine. Bien que ces tendances puissent être partiellement attribuées aux fluctuations cycliques de la demande en main-d’œuvre, Reitz affirme qu’il y a eu un déclin des revenus des immigrants au fil du temps qui est relié aux niveaux de scolarité et pour lequel il propose trois causes : premièrement, le niveau de scolarité de plus en plus élevé des personnes nées au Canada réduit l’avantage traditionnel que représentait l’instruction pour les immigrants, atténuant les effets d’une plus grande sélectivité au chapitre des compétences chez les immigrants. Deuxièmement, l’augmentation du rendement de l’éducation chez les personnes nées au Canada ne s’applique pas aux immigrants, et il existe d’autres obstacles institutionnels qui entravent la réussite de ces derniers. Troisièmement, un déclin de la valeur relative de l’éducation des immigrants peut être attribuable à localisation pointue des procédés de validation des titres de compétence.

De fait, le niveau d’éducation de la population canadienne a augmenté considérablement. Picot et Sweetman (2005) avancent que les immigrants de la catégorie économique font face à une forte concurrence de la part des travailleurs nés au Canada dont le niveau de scolarité est de plus en plus élevé. L’offre de main-d’œuvre hautement qualifiée a augmenté très rapidement au cours des deux dernières décennies, surtout chez les femmes. En 1980, 8 % de la population possédait un diplôme universitaire; en 2010, la proportion des personnes nées au Canada détenant un diplôme universitaire avait plus que doublé, à 18 %Note de bas de page 111. On remarque une tendance similaire au niveau des études postsecondaires (p. ex. certificats d’une école de métiers et diplômes non universitaires). À l’autre extrémité du spectre, la proportion de la population ayant fait des études secondaires complètes ou partielles a diminué de façon constante au cours des trois dernières décennies. Cette augmentation croissante de l’éducation de la population canadienne peut avoir changé la nature de la concurrence sur le marché du travail. Picot et Hou (2009) estiment que l’incapacité du marché du travail d’absorber un accroissement aussi important du bassin de travailleurs très instruits – d’où une pression à la baisse sur les salaires relatifs – pourrait être une des raisons pour lesquelles de nombreux nouveaux immigrants ont obtenu un rendement relatif très faible de leurs études universitaires au cours des années 1990 et se sont trouvés dans la tranche inférieure de la répartition des gains. Burbidge, Magee, et Robb (2002) comparent l’avantage associé aux études – le ratio des gains des diplômés universitaires par rapport aux diplômés des écoles secondaires – au Canada et aux États-Unis. Ces auteurs constatent qu’au cours des années 1980 et 1990, l’avantage associé aux études est demeuré constant ou a diminué au Canada. En revanche, cette étude révèle qu’aux États-Unis, l’avantage associé aux études a augmenté considérablement au cours de la même période. Cette constatation pourrait s’expliquer par le fait, entre autres, que l’augmentation de l’offre relative de travailleurs plus instruits est reliée de façon négative à l’avantage associé aux études. La croissance de la demande en diplômés universitaires influence l’avantage associé aux études et elle peut avoir été tout à fait différente dans les deux pays. Aussi, une faible demande dans des professions précises – soit dans l’absolu, soit par rapport à l’offre – crée la possibilité d’une inadéquation des compétences et de leur sous-utilisationNote de bas de page 112. Les caractéristiques de l’offre sur le marché du travail du Canada sont des facteurs clés à prendre en considération sur le plan des résultats économiques des immigrants. Le maintien de la tendance actuelle à la hausse de la demande en diplômés postsecondaires au Canada, conjugué au nombre croissant d’immigrants hautement instruits, pourrait continuer à avoir une influence négative sur les résultats économiques des immigrants instruits. Lorsqu’on envisage des moyens d’améliorer la situation de faible revenu des immigrants, il est important de tenir compte des caractéristiques de la main-d’œuvre au Canada, car il pourrait y avoir des facteurs circonstanciels externes qui contribuent aux résultats économiques des immigrants.

Établissements (p. ex. équivalence ou reconnaissance des titres de compétence et de l’expérience acquis à l’étranger)

Les établissements peuvent jouer sur les taux de faible revenu chez les immigrants par leur influence sur l’accessibilité du soutien social, des avantages sociaux, des programmes de formation et de perfectionnement, de l’emploi et des possibilités de gains, et l’admissibilité à ces éléments. Par exemple, les établissements ont une influence directe sur la situation des immigrants sur le marché du travail de par leur rôle dans la reconnaissance des titres de compétence étrangers. Au Canada, les systèmes existants de réglementation des professions ont été conçus pour les personnes ayant été formées dans le système d’éducation canadien et, par conséquent, les immigrants peuvent avoir de la difficulté à obtenir des renseignements précis sur les exigences réglementaires et les attentes du milieu de travail avant d’arriver au Canada. Ainsi, certains immigrants peuvent avoir de la difficulté à trouver un emploi dans leur domaine, un phénomène qui peut contribuer à une réduction du revenu d’emploi attendu et, éventuellement, à des situations de faible revenu. Une non-concordance entre les compétences et l’éducation des professionnels et des corps de métiers étrangers avec le travail qu’ils font effectivement une fois au Canada peut aussi engendrer des coûts considérables, tant pour les immigrants et leurs familles que pour les gouvernements, les entreprises et l’économie du Canada. Bien que les données dont on dispose pour l’évaluation de la façon dont les titres de compétence des immigrants sont évalués au Canada soient limitées, les études révèlent que l’éducation et l’expérience d’un immigrant, surtout lorsque celles-ci ont été obtenues à l’étranger, sont considérées comme étant moins valables que celles des personnes nées au Canada.

Par exemple, Picot et Hou (2003) mentionnent le rôle de la « reconnaissance des titres de compétence » dans les résultats économiques des immigrants, déclarant que les diplômes et certificats décernés par les pays d’origine non traditionnels détenus par les immigrants pourraient ne pas être reconnus dans la même mesure que ceux décernés aux Canadiens de naissance. Par exemple, Gilmore et Le Petit (2008) ont analysé les taux d’emploi en 2007 des immigrants âgés de 25 à 54 ans ayant des diplômes ou grades postsecondaires, à partir des données de l’Enquête sur la population active (EPA), et ont constaté que ceux arrivés au cours des cinq années précédentes avaient un taux d’emploi plus faible si leurs diplômes avaient été obtenus ailleurs qu’en Amérique du Nord ou en Europe. En revanche, les immigrants ayant un diplôme universitaire du Canada, des États-Unis ou de l’Europe qui sont arrivés au Canada plus de cinq ans plus tôt avaient un taux d’emploi comparable à celui des diplômés universitaires nés au Canada. Les études démontrent de façon constante un revenu moyen plus faible pour les immigrants de scolarité étrangère comparativement aux Canadiens de naissance qui ont fait leurs études au CanadaNote de bas de page 113. La plupart des études laissent entendre aussi que la valeur accordée à l’expérience à l’étranger est à peu près nulle, et lorsque cette expérience a été un facteur positif dans les résultats économiques des immigrants, son importance est considérablement plus faible que l’expérience canadienne, et elle a diminué au cours des années 1990Note de bas de page 114. La connaissance des langues officielles complique davantage la question de la reconnaissance des titres de compétence étrangersNote de bas de page 115.

Les difficultés se rapportant à la reconnaissance des titres de compétence étrangers sont essentiellement attribuables à deux problèmes institutionnels qui se recoupent. Tout d’abord, les employeurs ont accès à très peu de renseignements sur bon nombre de pays sources, surtout en ce qui concerne la qualité des établissements d’enseignement, leurs programmes et la mesure dans laquelle les compétences qu’ils enseignent à leurs étudiants sont pertinentes dans le contexte du marché du travail canadien. Par conséquent, les employeurs peuvent avoir la réaction d’éviter tout risque dans leurs décisions d’embauche en accordant la préférence aux travailleurs ayant étudié au Canada. Cela étant, la qualité des titres de compétence étrangers peut être perçue comme n’étant pas la même que les titres de compétence canadiens. Par exemple, la qualité inférieure des méthodes d’enseignement par rapport aux méthodes des établissements d’enseignement canadiens peut être un des facteurs. Dans ce cas, le nom d’un diplôme peut être le même, mais sa valeur au Canada est inférieure en raison de son origine étrangère. De plus, les choses se compliquent par le fait que les associations d’employeurs, les conseils sectoriels ou les regroupements professionnels provinciaux sont des intervenants clés dans la reconnaissance des titres de compétenceNote de bas de page 116. La réglementation est de compétence provinciale : les gouvernements régissent les professions et les métiers de façon à réduire les risques pour ce qui est de la santé du public et de la protection des consommateurs. De nombreux travailleurs ne peuvent exercer leur profession ou leur métier sans avoir une licence d’un organisme de réglementation provinciale, même s’ils ont déjà été formés et obtenu le permis d’exercer dans un autre pays (ou une autre province canadienne).

En résumé, les problèmes de reconnaissance des titres de compétence peuvent découler d’un manque de connaissances (ou de renseignements accessibles) de la part des nouveaux arrivants en ce qui concerne les compétences reconnues, d’un manque de connaissances (ou de renseignements disponibles) de la part des employeurs en ce qui concerne les titres de compétence étrangers, de la qualité inférieure de ces titres par rapport aux titres canadiens, ou encore des obstacles institutionnels causés par le système de réglementation provinciale et de regroupements professionnels. Ces défis font ressortir l’influence que peuvent avoir les établissements d’enseignement sur les résultats économiques des immigrants et, partant, leur situation de faible revenu. La détermination et la compréhension des défis que peuvent poser actuellement les établissements d’enseignement en ce qui concerne la situation unique des immigrants récents permettent l’élaboration de politiques favorisant mieux leurs résultats économiques. Par exemple, en réaction au repérage de ces défis, le gouvernement du Canada a jugé bon de créer le Bureau d’orientation relatif aux titres de compétence étrangers pour aider les personnes formées ailleurs dans le monde à recevoir les renseignements, l’orientation et les services d’aiguillage leur permettant de faire évaluer leurs titres de compétence de sorte qu’ils puissent trouver du travail dans leur spécialité. Parallèlement, le Bureau d’orientation relatif aux titres de compétence étrangers collabore avec des partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, ainsi que des organes d’évaluation et de reconnaissance des titres de compétence étrangers, afin de solidifier les méthodes de reconnaissance dans l’ensemble du pays par le truchement d’une meilleure coordination des enjeux, des politiques, des programmes et des services, du partage de l’information et de l’échange de pratiques exemplaires en matière de reconnaissance de titres étrangersNote de bas de page 117. Les chercheurs ont tenté de comprendre le processus de reconnaissance des titres de compétence étrangers en vue de recommander des politiques visant à améliorer les résultats économiques des immigrants au Canada (un récent exemple dans Schwartz, 2012). La question de la reconnaissance des titres de compétence étrangers est un des exemples de la façon dont le cadre institutionnel approprié doit être pris en considération relativement aux résultats économiques précis des immigrants.

Gouvernement (p. ex. effets directs et indirects des programmes de transfert)

Les gouvernements exercent une influence sur les taux de faible revenu en raison des effets directs et indirects des programmes de transfertNote de bas de page 118. Les transferts gouvernementaux servent à augmenter le revenu familial et, ainsi, à réduire le nombre de personnes en situation de faible revenu. La participation des immigrants aux programmes de transfert du Canada varie considérablement, selon des facteurs comme la catégorie d’admission, le niveau de scolarité et la connaissance des langues officielles. Par exemple, les réfugiés s’appuient relativement beaucoup sur cette aide de revenu à leur arrivée, mais au fil du temps la proportion de leur revenu provenant de gains d’emploi va croissant. Cette dépendance initiale relativement élevée, cependant, s’explique en partie par le fait que les réfugiés pris en charge par le gouvernement reçoivent un soutien au revenu – et toute une gamme d’autres services – dans le cadre du Programme d’aide à la réinstallation (PAR) pendant 12 mois (et jusqu’à 24 mois pour ceux ayant des besoins spéciaux)Note de bas de page 119. Parallèlement, les demandeurs d’asile sont autorisés à travailler pendant que leur demande est traitée; on s’attend à ce que leur dépendance de l’assistance sociale diminue au fil du temps et à ce que leur revenu d’emploi augmente.

Certains documents indiquent qu’au fur et à mesure que les années s’écoulent depuis l’arrivée des immigrants, leur participation aux programmes d’aide gouvernementale se rapproche de celle de la moyenne canadienneNote de bas de page 120. Cela dépend, cependant, des programmes de transfert en cause, car ils ont tous des objectifs et des conditions d’admissibilité différents. Par exemple, l’assistance sociale, dans la plupart des cas, est un programme de dernier recours pour les personnes en grande difficulté financière, car il offre une aide aux familles et à ceux qui n’ont aucun autre moyen de subsistance et qui n’ont pas suffisamment de ressources financières pour subvenir à leurs besoins. L’assistance sociale est fondée sur les besoins de la famille plutôt que sur ceux de la personne et, par conséquent, la participation à ce programme peut varier selon les différentes structures de famille des immigrants par rapport à d’autres immigrants et aux familles de Canadiens de naissance. Autre exemple : le programme d’assurance-emploi dont l’objet est de fournir un revenu de soutien aux membres de la population active qui sont temporairement sans emploi. Pour être admissible aux prestations, une personne doit avoir accumulé un nombre minimal de semaines de travail au Canada. Tout examen des prestations d’assurance-chômage reçues par les immigrants devrait tenir compte des personnes non admissibles, y compris celles qui ne font pas partie de la population active ou n’ont aucun lien direct avec celle-ci, les travailleurs autonomes, et ceux dont les prestations auxquelles elles ont droit sont épuisées. Ainsi donc, à leur arrivée la plupart des immigrants ne sont pas admissibles à l’assurance-emploi puisqu’ils n’ont récemment occupé aucun emploi au Canada.

Certains signes portent à croire que les plus récents immigrants ont recours aux paiements de transfert dans une proportion plus élevés que les immigrants antérieursNote de bas de page 121. Picot, Lu et Hou (2009) examinent les tendances des taux de faible revenu chez les immigrants et chez les personnes nées au Canada afin de déterminer si l’évolution des taux de faible revenu a été, en premier lieu, associée aux changements du revenu du marché (principalement, le revenu d’emploi) ou, plutôt, au système de transferts sociaux (Assurance-emploi, Sécurité de la vieillesse, Supplément de revenu garanti, Régime de pensions du Canada ou Régime de rentes du Québec, assistance sociale et prestations pour enfants). Cette étude est fondée sur les données du recensement des années 1981 à 2006 et le faible revenu est évalué au moyen du SFR de Statistique Canada pour déterminer l’état de faible revenu. Les auteurs examinent l’écart entre les taux de faible revenu avant et après transferts pour dégager une mesure de l’incidence directe du système de transferts sur les taux de faible revenu. L’étude conclut que le taux de faible revenu selon le revenu du marché pour tous les immigrants a considérablement augmenté durant la période, passant de 24 % en 1980 à 33 % en 2005, une augmentation de 36 %. L’évolution à la baisse du revenu familial du marché s’est donc traduite par une hausse importante du taux de faible revenu. Cela étant, ce taux, après transferts, est plus bas puisque les transferts augmentent le revenu familial et réduisent le nombre de personnes en situation de faible revenu. Le taux après transferts a augmenté, passant de 17 % à 22 % durant la période, soit une hausse de 27 %. Puisque l’augmentation du taux après transferts est plus faible que celle avant transferts, cela suppose que le système de transferts a compensé de plus en plus le faible revenu selon le revenu du marché au cours de la période de 1980 à 2005. D’après les auteurs, qu’il soit calculé en fonction des points de pourcentage absolus ou d’une réduction en pourcentage, le système de transferts a réduit le taux de faible revenu des immigrants davantage en 2005 qu’en 1980, et ils affirment que la hausse du taux de faible revenu chez tous les immigrants est principalement attribuable à la baisse des gains familiaux.

Les augmentations des transferts gouvernementaux ont également eu tendance à réduire le taux de faible revenu des immigrants âgés, comme elles l’ont fait chez les personnes nées au CanadaNote de bas de page 122. Les transferts reçus par bon nombre d’immigrants âgés durant leurs dix premières années au Canada dépendent dans une certaine mesure des règles d’admissibilité associées aux trois principales sources de transferts à l’intention des personnes âgées – la Sécurité de la vieillesse (SV), le Supplément de revenu garanti (SRG) et l’assistance sociale. La Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti (SRG)/Allocation sont des moyens par lesquels le gouvernement protège les citoyens canadiens contre le faible revenu. Picot, Lu et Hou (2009) constate que plus le temps que les immigrants âgés passent au Canada est long, plus le système de transferts réduit leur taux de faible revenu; par rapport aux personnes âgées nées au Canada, le système de transfert a pour effet de réduire de manière comparable le taux de faible revenu seulement chez les immigrants qui sont au Canada depuis plus de 20 ans. (Voir l’encart Sécurité de la vieillesse : admissibilité des immigrants récents.)

En résumé, les effets directs et indirects des programmes de transferts constituent l’un des moyens par lesquels le gouvernement a une influence directe sur la situation de faible revenu de tous les Canadiens. Les écarts d’admissibilité des immigrants à de tels programmes peuvent avoir une incidence sur les tendances de faible revenu. Par exemple, les immigrants peuvent ou non être admissibles à certains programmes de transferts dont les exigences se rapportent au nombre d’années de résidence ou à la participation au marché du travail canadien. Autrement dit, plus le temps que les immigrants ont passé au Canada ou sur le marché du travail canadien est court, moins le système de transferts actuel a de l’effet sur leurs taux de faible revenu.

Sécurité de la vieillesse : Admissibilité des immigrants récents

Sécurité de la vieillesse (SV)

La Sécurité de la vieillesse (SV) est le plus grand programme de pensions du Canada. À l’heure actuelle, il verse une pension mensuelle à la plupart des personnes dès l’âge de 65 ans. La SV est comme un grand gâteau divisé en 40 parts égales. Si vous êtes admissible à une « pleine pension », vous avez alors le droit de recevoir les 40 parts tous les mois. Si vous n’êtes admissible qu’à une « pension partielle », vous ne recevez alors que quelques-unes des 40 parts chaque mois. L’admissibilité à une pleine pension ou une à pension partielle est fonction du nombre d’années où vous avez résidé au Canada.

Toute personne ayant vécu au Canada pendant 10 ans après l’âge de 18 ans reçoit la SV à partir de 65 ans (ou après la dixième année, si celle-ci tombe après l’âge de 65 ans). Les personnes qui n’ont pas résidé au Canada pendant la période requise de 10 ans peuvent quand même percevoir la SV si elles ont vécu et travaillé dans un des pays avec lesquels le Canada a des Accords internationaux en matière de sécurité sociale. Chaque pays est responsable du versement de « sa part » seulement. La durée minimale de résidence au Canada est d’un an; autrement dit, une personne peut recevoir un quarantième d’une pleine pension de SV après un an seulement. Tant les immigrants parrainés que les immigrants non parrainés sont admissibles à une prestation de SV partielle.

Supplément de revenu garanti (SRG), Allocation au conjoint (AAC), et Allocation au survivant (ALS)

Une fois qu’une personne reçoit la SV, un montant de Supplément de revenu garanti (SRG) est versé si la personne est « pauvre » (c.-à-d. un montant mensuel supplémentaire pour les retraités de la SV ayant un faible revenu). Pour recevoir le SRG, une personne doit déjà recevoir la SV. Le Canada verse aussi l’Allocation du SRG – c.-à-d. l’Allocation au conjoint (AAC) et l’Allocation au survivant (ALS) – aux personnes âgées de 60 à 64 ans qui ont résidé dans le pays pendant la période requise de 10 ans et qui sont « pauvres » (à condition qu’elles soient conjointes ou partenaires en union de fait d’une personne à la retraite, ou soient veufs ou veuves). Toutes les personnes doivent avoir résidé au Canada pendant 10 ans, quel que soit leur pays d’origine (c. à d. même si elles viennent de pays avec lesquels le Canada a un Accord international en matière de sécurité sociale) pour être admissibles aux pleines prestations de SRG, d’AAC ou d’ALS.

Sauf en cas de circonstances exceptionnelles, les immigrants parrainés admis au Canada en tant que résidents permanents dans le cadre d’un accord de parrainage ne sont pas admissibles aux prestations de SRG, d’AAC ou d’ALS au cours de la période pendant laquelle le répondant s’est engagé à assumer la responsabilité financière de l’immigrant, jusqu’à un maximum de 10 ans. (Par exemple, si un immigrant est arrivé en 1995 dans le cadre d’un Accord de parrainage et est admissible à présenter une demande de SV en 2004 quand il aura 65 ans, il ne serait pas admissible au SRG, à l’AAC ou à l’ALS avant que sa période de parrainage ne se termine en 2005.)

Les immigrants non parrainés ayant vécu au Canada moins de 10 ans qui sont admissibles à la SV dans le cadre d’un Accord international en matière de sécurité sociale verront les prestations de SRG, d’AAC et d’ALS auxquelles ils ont droit augmenter graduellement sur une période de 10 ans – un dixième de la prestation pour chaque année de résidence. Cela comprend les personnes qui n’ont pas vécu au Canada pendant 10 ans après l’âge de 18 ans. (Par exemple, un immigrant non parrainé peut présenter une demande de SRG, d’AAC ou d’ALS dès qu’il atteint l’âge de 65 ans. Cependant, le montant maximal auquel il aurait droit serait, selon l’exemple ci-dessus, neuf dixièmes du SRG, de l’AAC ou de l’ALS s’il était arrivé en 1995 et a atteint l’âge de 65 ans en 2004. En 2005, il aurait droit au plein montant de prestations, soit dix dixièmes.)

Source : Thompson et Worswick, 2005.
De plus amples détails sur le site Web de Service Canada.

Résumé et orientation de recherches futures

L’examen des documents portant sur l’immigration révèle que certains immigrants (surtout les plus récents) peuvent avoir de la difficulté à s’intégrer de façon réussie dans l’économie, en raison de l’augmentation des taux de faible revenu. Plus particulièrement, les tendances récentes indiquent que l’écart entre les taux de faible revenu des immigrants et ceux des personnes nées au Canada s’est considérablement élargi depuis 1980. Le présent rapport avait pour objectif de présenter un survol de la situation de faible revenu des immigrants au Canada en faisant ressortir les aspects de cette question qui méritent de faire l’objet d’une recherche plus approfondie. Dans ce rapport, on a tout d’abord examiné l’importance de la question du faible revenu et de l’immigration sur le plan des politiques. L’augmentation des taux de faible revenu chez les immigrants récents par rapport aux personnes nées au Canada et aux immigrants qui sont au Canada depuis plus longtemps est matière à inquiétude, car le faible revenu peut éventuellement empêcher les immigrants et leurs familles de participer avec dignité à la vie économique, sociale et culturelle de leurs collectivités. Ces constatations soulèvent d’autres inquiétudes encore, dont le potentiel de répercussions d’une génération à l’autre de la marginalisation au sein de ces groupes. Bien que les études récentes révèlent une amélioration des résultats économiques des immigrants par rapport aux personnes nées au Canada, il reste des immigrants pour qui il n’y a pas eu d’augmentation du rendement économique relatif, et qui vivent en situation de faible revenu chronique. C’est là l’un des défis les plus grands auxquels le Canada fait face sur le plan social et sur le plan du marché du travail.

Ensuite, ce rapport a présenté une description des mesures de faible revenu et mentionné les écarts à prendre en compte lorsqu’on utilise ces indicateurs pour évaluer les résultats économiques des immigrants. Un certain nombre de lignes de faible revenu sont utilisées pour l’élaboration des politiques dans le domaine de l’intégration économique des immigrants. Les mesures de faible revenu, comme le SFR, la MFR et la MPC peuvent être utilisées pour identifier les membres de la population à faible revenu, tandis que les mesures de faible revenu chronique et d’intensité de faible revenu sont souvent utilisées pour étudier les tendances de la gravité et de la durée des périodes de faible revenu vécues par les immigrants. Il est utile de comprendre si une situation de faible revenu est passagère ou persistante, puisque les mesures politiques peuvent être très différentes. Les mesures actuelles relatives au faible revenu ont pour objet d’identifier les personnes à faible revenu sous différents angles. Étant donné les nombreuses dimensions du faible revenu, il se peut qu’il ne soit pas possible de trouver une seule mesure qui présente un tableau complet; nombre des études examinées indiquent plutôt qu’il serait plus utile de mettre au point ou d’adopter plusieurs mesures de faible revenu. Bien que l’usage du SFR ait été prévalant jusqu’à présent dans les études portant sur les immigrants et le faible revenu, l’obsolescence croissante de cette mesure (qui accumule un nombre croissant d’années à partir d’une année de base de 1992), accompagnée des nouveautés en matière de données, laisse entrevoir la probabilité d’un usage plus prévalent à l’avenir des mesures fondées sur la MFR (mesure dérivée de la répartition des revenus dans la population sous-jacente chaque année).

Par la suite, on a procédé à un examen, après une revue des documents de recherche, des facteurs qui contribuent aux situations de faible revenu chez les immigrants au Canada. Le faible revenu est largement accepté en tant qu’indicateur de la mesure dans laquelle les membres de la société ont accès aux ressources économiques, et il est donc souvent utilisé comme indicateur clé de l’intégration et du bien-être des immigrants. La présente étude a examiné les facteurs qui contribuent aux résultats en matière de salaire parmi les immigrants récents (le faible revenu chez les immigrants suivant de près les tendances des salaires, puisque ces derniers sont l’élément le plus important du revenu familial, qui est utilisé pour calculer les taux de faible revenu), avec un accent sur la relation entre les caractéristiques des immigrants, ou les attributs socioéconomiques que les immigrants apportent avec eux (y compris la catégorie d’immigration, l’année d’entrée au pays et le nombre d’années au Canada, l’âge, l’éducation, le sexe, le pays d’origine, le type de famille, la province de résidence, la profession, etc.), ainsi que les occasions et les obstacles dans la société d’accueil, que ce soit sur le plan économique, social ou institutionnel. Seules des comparaisons peuvent révéler les facteurs qui pourraient expliquer pourquoi certains groupes peuvent en fin de compte être plus ou moins touchés par le faible revenu. Dans l’ensemble, le faible revenu chez les immigrants a de multiples causes. Par exemple, pour les immigrants en âge de travailler, un décalage dans leurs caractéristiques ainsi que la nature cyclique de l’économie peuvent mener à des obstacles supplémentaires sur le marché du travail, alors que pour les immigrants d’âge mûr, la taille et le type de famille, ainsi que les raisons pour lesquelles ils ont immigré peuvent produire différents niveaux de revenus.

Enfin, le présent rapport avait le principal objectif de déterminer les possibilités éventuelles de nouvelles recherches après une revue des publications récentes sur la situation de faible revenu des immigrants au Canada et un examen des différentes mesures de faible revenu. Comme le décrit la dernière section ci-dessous, il existe un besoin de recherche et de données qui contribueront à la compréhension de la situation de faible revenu des immigrants dans toutes les catégories, y compris la catégorie de l’immigration économique, et surtout les catégories du regroupement familial et des réfugiés. Compte tenu de l’accent stratégique mis sur l’amélioration de la situation économique des immigrants, la recherche et la production de données dans le domaine du faible revenu – incidence et causes – est une priorité.

Considérations en matière de recherche

D’autres recherches doivent être effectuées si l’on veut comprendre les facteurs qui empêchent les Canadiens d’atteindre un niveau de vie acceptable. La plupart des études portant sur l’intégration économique des immigrants sont fondées exclusivement sur les gains individuels, plutôt que sur le revenu familial global. En tant que concept qui s’articule sur la famille, le faible revenu offre une meilleure perspective du bien-être économique des familles immigrantes que les gains individuels. Au cœur du concept de faible revenu, l’effet des caractéristiques et conditions socioéconomiques sur les écarts constatés entre les diverses populations est d’une importance cruciale. Il faut que les analyses produisent les raisons pour lesquelles les choses sont différentes entre les diverses populations identifiées avant qu’on ne puisse formuler des mesures politiques appropriées. La recherche en matière de faible revenu chez les immigrants offre les bases sur lesquelles peut s’appuyer l’élaboration des politiques qui permettront aux familles et aux particuliers à risque de faible revenu d’améliorer leurs perspectives et résultats afin que soient réduites l’incidence, la profondeur et la durée des périodes de faible revenu.

Plus particulièrement, le besoin de recherche se fait sentir quant aux effets des tendances de faible revenu au niveau microsociologique – quels genres de personnes, de familles et de collectivités vivent le faible revenu, et pourquoi. Les recherches dans ce domaine doivent prendre en compte les diverses mesures de faible revenu utilisées, établir des comparaisons des tailles de famille et de ménage, ainsi que des comparaisons entre diverses villes (pour tenir compte des écarts de coût de la vie). L’analyse du faible revenu chez les immigrants doit aussi tenir compte de la catégorie d’admission des immigrants, de leur statut de minorité visible, de leur ethnicité, religion, type de famille et de ménage (couples mariés, parents seuls, personnes seules, etc.), sexe, sources de revenu (marché du travail et transferts), et âge (enfants, âge actif et aînés). Il est aussi significatif de prendre en considération les résultats du faible revenu chez les immigrants selon le nombre d’années passées au Canada, étant donné que les immigrants et les réfugiés ont souvent besoin d’un certain temps pour s’établir dans leur nouveau pays; par conséquent, le nombre d’années depuis l’immigration correspond généralement à l’amélioration des résultats économiques et sociaux. Si la recherche doit servir à éclairer adéquatement l’élaboration des politiques, il est également important qu’elle tienne compte des écarts entre ceux qui ont un faible revenu pendant de courtes périodes (peut-être les immigrants récents ou très récents), comparativement à ceux qui ont de longues périodes de faible revenu, ou un faible revenu chronique. Les autres facteurs qui contribuent à la réussite économique des immigrants et qui doivent être pris en considération sont les conditions du marché de travail locales et régionales, la connaissance des langues officielles et la littératie, ainsi que la reconnaissance des titres de compétence étrangers et l’expérience de travail au Canada.

Il y a encore un grand nombre de choses que nous avons besoin de mieux comprendre dans le cas des immigrants et du faible revenu. Les points suivants sont les domaines clés dans lesquels une recherche plus approfondie serait indiquée :

Questions de recherche

La présente revue des documents de recherche a révélé une lacune relativement aux études sur le faible revenu chez les immigrants après 2006, année du dernier recensement de la population canadienne. Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles la période suivant 2006 est d’importance cruciale du point de vue des politiques pour ce qui est de comprendre la situation de faible revenu des immigrants au Canada aujourd’hui. En premier lieu, de nombreux changements de politiques en matière d’immigration ont eu lieu depuis 2002, à commencer par la mise en œuvre de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR), et il est important de comprendre l’influence que ces changements ont eue sur la situation des immigrants récents. Par exemple, les résultats économiques de certains immigrants se sont améliorés quelque peu après l’adoption de la LIPR, amélioration qui a eu des retombées sur leur situation de revenu individuel et familial, réduisant éventuellement ainsi l’incidence d’immigrants dont le revenu familial descend en dessous les diverses mesures de faible revenu. Notamment, une récente évaluation du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) a indiqué que les travailleurs qualifiés admis après l’adoption de la LIPR avaient des revenus plus élevés de 65 % au cours de leur première année que ceux des personnes admises dans le cadre de l’ancien régime (avant la LIPR), et sont aussi plus susceptibles d’avoir un emploiNote de bas de page 123. Qui plus est, il y a eu augmentation de la prévalence des immigrants admis dans le cadre des programmes des candidats des provinces, programmes ayant essentiellement pour objet d’attirer les immigrants ayant les compétences les plus adaptées aux besoins du marché local. Là encore, une évaluation récente du Programme des candidats des provinces révèle que la vaste majorité des candidats ont réussi leur établissement économique, déclarant des revenus d’emploi ou de travail autonome chaque année depuis leur arrivée (cohortes de 2000 à 2008), et très peu d’entre eux ont recours à des prestations d’assurance-emploi ou d’assistance socialeNote de bas de page 124. Plus récemment, le gouvernement fédéral a manifesté le désir de faire en sorte que les compétences des immigrants correspondent davantage aux besoins immédiats du marché du travailNote de bas de page 125, avançant la possibilité de meilleurs résultats économiques pour les immigrants. Parmi les mesures prises, il y a eu la création de la catégorie de l’expérience canadienne en 2008, qui offre le statut de résident permanent aux immigrants qui font la demande à partir du Canada, attirant les travailleurs étrangers temporaires et les étudiants étrangers. Cette mesure est motivée par l’hypothèse selon laquelle ceux qui sont déjà au Canada avant l’immigration peuvent arriver à transféré plus facilement au marché du travail canadien le capital humain qu’ils ont acquis avant l’immigration, ce qui mènerait à des résultats plus positifs sur le marché du travail. Une série récente d’instructions ministérielles (la première remontant à 2008) a aussi donné lieu à plusieurs changements clés qui pourraient améliorer la situation économique de certains immigrants. Par exemple, les IM concernant les travailleurs qualifiés (fédéral) (IM-1, IM-2 et IM-3) comprennent la liste des professions (déterminées comme étant les plus en demande) au titre desquelles les travailleurs qualifiés (fédéral) peuvent faire une demande, des exigences d’emploi réservé ainsi que l’exigence voulant que les candidats au titre de ces instructions ministérielles présentent les résultats de tests d’aptitude linguistique pour prouver leur connaissance de l’une des langues officielles du Canada. Cela s’applique aussi aux candidats de la catégorie de l’expérience canadienne et indique à quel point les compétences linguistiques constituent l’un des facteurs les plus importants pour la prédiction de la réussite d’un immigrant sur le marché du travail. Les instructions ministérielles concernant les travailleurs qualifiés (fédéral) émises en 2011 comportent un nouveau plafond relatif au nombre de demandes présentées par des travailleurs qualifiés (fédéral) et un nouveau volet d’admissibilité des doctorants. Il y a aussi eu une série récente d’instructions ministérielles imposant un moratoire temporaire aux demandes de la catégorie fédérale des entrepreneurs (2011). D’autres changements ministériels concernent l’immigration au titre de la catégorie du regroupement familial, y compris un moratoire temporaire sur les demandes de parrainage de parents et de grands-parents au titre de la catégorie du regroupement familial (2011). Enfin, la Loi visant à protéger le système d’immigration du Canada ayant reçu la sanction royale récemment (juin 2012)Note de bas de page 126, il sera important de prendre en considération les effets des éventuels changements au profil des réfugiés sur la situation de faible revenu des immigrants récents au cours des années futures. En résumé, la politique d’immigration a connu de nombreux changements au cours des dix dernières années (dont bon nombre visaient une meilleure concordance entre les compétences des immigrants et la demande sur le marché du travail); l’incidence de ces changements sur la situation de faible revenu des immigrants constitue un domaine de recherche clé en matière de politique.

En deuxième lieu, la conjoncture du marché du travail dans tout le Canada (et dans de nombreuses autres régions du monde) depuis 2006 a considérablement évolué. Bien que 2006 et 2007 aient été considérées, sous divers aspects, des années d’expansion économique, le pays a connu une récession récente (d’octobre 2008 à octobre 2009) représentant une période de difficultés économiques pour de nombreux Canadiens, et surtout pour ceux en Ontario où l’important secteur de la fabrication a été particulièrement frappéNote de bas de page 127. De fait, le chemin vers la relance a été vécu de différentes façons dans le pays, certaines provinces réussissant mieux que d’autres. En particulier, bien que l’Alberta ait aussi été durement touchée par la récession mondiale (principalement par le déclin des marchés de pétrole brut), cette province a démontré des indicateurs économiques relativement plus solides tout au long de la période par rapport aux autres provinces (p. ex. pour ce qui est de la participation, et des taux d’emploi et de chômage); c’est peut-être pour cela qu’un plus grand nombre que jamais d’immigrants choisissent cette province. Par contre, la destination de prédilection traditionnelle qu’est l’Ontario a connu une réduction dans la proportion d’immigrants choisissant cette province. De fait, l’immigration vers l’Alberta est passée de 8,2 % du nombre total d’immigrants à destination du Canada en 2006 à 12,4 % en 2011. En revanche, la proportion d’immigrants à destination de l’Ontario est passée de 50,0 % à 40,0 % au cours de la même période.

Ainsi donc, ces provinces ont vécu chacune une expérience différente au cours de la récession. En effet, pendant le ralentissement économique, le nombre d’immigrants que l’Alberta a reçus a augmenté alors que le nombre d’immigrants choisissant l’Ontario a diminué. De plus, tandis que l’Alberta continuait à ressentir les effets de la crise économique mondiale en 2010 et s’en remettait plus lentement, il y a eu en Ontario une relance du secteur de la construction automobile.

Des changements dans la conjoncture économique à l’étranger peuvent aussi avoir influencé les caractéristiques socioéconomiques des personnes demandant à immigrer au Canada. Par exemple, il est possible qu’un ralentissement économique plus marqué aux États-Unis et dans de nombreux pays européens au cours des dernières années par rapport au ralentissement au Canada puisse avoir motivé un nombre relativement plus élevé de personnes de ces pays à immigrer au Canada pour profiter d’un climat économique qu’ils perçoivent meilleur. De fait, le gouvernement du Canada a entrepris récemment des activités visant à encourager l’immigration à partir de l’Irlande, un pays actuellement aux prises avec une main-d’œuvre instruite et un marasme économiqueNote de bas de page 128. En résumé, il y a eu d’importants changements dans les conditions du marché du travail au Canada et à l’étranger depuis 2006 qui peuvent avoir eu une incidence sur la situation de faible revenu des immigrants récents.

Compte tenu des récents changements dans les politiques en matière d’immigration et du ralentissement et de la relance économiques tant au Canada que dans le monde, c’est dans ce nouveau contexte qu’il faut examiner la situation de faible revenu des immigrants. La recherche devra produire la réponse à des questions comme les suivantes :

La documentation examinée révèle que relativement très peu d’études se sont concentrées sur le bien-être économique des immigrants à l’échelle familiale. Les taux de faible revenu constituent une mesure du bien-être économique des familles immigrantes. Ces taux se fondent sur le revenu total de la famille, qui comprend les transferts gouvernementaux et les revenus de placements et de pensions, de même que les gains provenant d’un emploi; ainsi donc, ils dressent un portrait plus complet des ressources économiques disponibles aux familles que n’en donnent les études ciblant uniquement les gainsNote de bas de page 129. Les taux de faible revenu sont donc influencés non seulement par la variation des gains d’emploi médians ou moyens et de leurs nombreux déterminants, mais aussi par celle des gains d’emploi et de l’inégalité des revenus, de l’accès aux transferts sociaux et de l’utilisation de ces derniers, du comportement d’investissement et des profils de création d’une familleNote de bas de page 130. À l’égard de ces profils, l’évolution démographique, comme l’augmentation du nombre de familles monoparentales qui peut pousser le taux agrégé à la hausse, est un des facteurs qui ont une incidence sur les taux agrégés de faible revenuNote de bas de page 131. Les profils de création d’une famille pourraient évoluer chez les immigrants, comme ils l’ont fait pour la population du Canada dans son ensemble, phénomène qui aurait tendance à accentuer l’inégalité des gains d’emploi familiauxNote de bas de page 132. Il est peut-être plus courant chez les immigrants de vivre en famille étendue, et cela peut servir soit à réduire, soit à augmenter l’incidence de leur faible revenu.

Il est nécessaire de procéder des recherches plus poussées concernant la situation de faible revenu des immigrants récents dans l’optique de la famille, pour répondre aux questions comme les suivantes :

D’autres études sur les sources de revenu s’imposent pour que l’on puisse mieux comprendre la situation de faible revenu chez les immigrants : le cas des immigrants qui se trouvent en situation de faible revenu en raison d’un emploi insuffisamment rémunéré requiert des mesures politiques tout autres que le cas d’un immigrant âgé qui a un faible revenu en raison de revenus de retraite insuffisants. Le revenu de la famille est divisé en deux composantes : le revenu du marché et les transferts gouvernementaux. Le revenu du marché comprend le revenu d’emploi, le revenu de placements, les pensions et les rentes de retraite privée ainsi que les autres revenus en espèces. Les transferts gouvernementaux comprennent l’Assurance-emploi (AE), la Sécurité de la vieillesse (SV), le Supplément de revenu garanti (SRG), le Régime de pensions du Canada ou le Régime de rentes du Québec et les prestations pour enfant, de même que d’autres transferts gouvernementaux (y compris l’assistance sociale et les indemnités d’accident du travail). Picot, Lu et Hou (2009) affirment que l’effet direct des transferts renvoie à la mesure dans laquelle les dollars reçus de programmes comme l’Allocation au conjoint, l’AE, et les crédits d’impôt pour enfant font passer les familles de sous le seuil de faible revenu à au-dessus de ce seuil. Cependant, selon ces auteurs, les transferts gouvernementaux peuvent dissuader les gens de travailler : les personnes peuvent être moins susceptibles de chercher un emploi lorsqu’elles reçoivent des transferts, par comparaison au cas hypothétique où il n’existerait aucun système de transfert. Le rôle du gouvernement dans la situation de faible revenu des immigrants mérite aussi d’être étudié dans l’optique des programmes d’établissement des immigrants.

Les causes de l’augmentation du faible revenu chez les immigrants qui travaillent sont peu claires et peuvent se rapporter davantage à la structure du marché du travail qu’à la politique en matière d’immigration. Selon Fleury (2007), il serait intéressant de poursuivre les recherches en ce qui a trait aux conditions de travail des immigrants déclarant un faible revenu. L’auteur mentionne les résultats d’une étude menée sur des groupes, à savoir que certains immigrants récents semblent avoir tendance à adopter l’approche du « tout ou rien » par rapport au marché du travail, c’est-à-dire qu’ils choisissent de ne pas travailler du tout plutôt que d’accepter un emploi en deçà de leur niveau de qualifications, et de faire partie de la catégorie des travailleurs pauvresNote de bas de page 133. L’étude indique aussi que les immigrants récents se fient souvent à plusieurs emplois – certains dans le marché du travail structuré et d’autres dans l’économie monétaire. Citant toujours cette même étude, Fleury affirme que certains immigrants choisiraient ou seraient forcés d’occuper des emplois dans l’économie monétaire. Si cette réalité signifie que leur niveau de revenu déclaré est inférieur à celui dont ils disposent pour vivre, elle signifie également que, souvent, ils ne sont pas admissibles à certains programmes gouvernementaux comme l’Assurance-emploi et le Régime de pensions du Canada. Comme ces observations ont été tirées d’une série de groupes de discussion, Fleury affirme qu’il serait intéressant de pousser la recherche et de vérifier l’ampleur de ces phénomènes à l’échelle nationale. Fleury estime aussi qu’il serait pertinent de s’interroger davantage sur les stratégies familiales des immigrants récents par rapport au marché du travail, précisant que les immigrants récents en âge de travailler qui sont en situation de faible revenu ont un plus grand nombre de soutiens économiques potentiels dans leurs familles, mais sans que la participation familiale dans le marché du travail soit particulièrement élevée. Par conséquent, conclut l’auteur, il serait intéressant de vérifier si c’est en raison de plus grandes responsabilités familiales, de barrières à l’emploi plus importantes pour certains membres de la famille, de la participation à l’économie monétaire ou encore en raison de différences culturelles ou d’autres facteurs.

Une recherche plus approfondie s’impose au sujet de la situation de faible revenu des immigrants récents dans l’optique des sources de revenu, du soutien gouvernemental et de la participation au marché du travail par tous les membres de la famille, afin de répondre aux questions comme les suivantes :

Considérations en matière de données

Par le passé, un usage assez constant de bon nombre des études de Statistique Canada a été fait pour l’analyse des situations de faible revenu chez les immigrants et les autres Canadiens, notamment le recensement, l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) et, dans une moindre mesure, la banque de Données administratives longitudinales (DAL)-Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM) (la base de données DAL-BDIM). L’évolution récente de ces enquêtes couramment utilisées a des répercussions importantes sur la poursuite des études sur le faible revenu des immigrants à l’avenir. Dans la présente section, certains des changements sont examinés et des moyens par lesquels ces études pourraient façonner à l’avenir les analyses concernant le faible revenu des immigrants sont proposés.

Voici certaines des considérations clés en matière de données à envisager :

Le Recensement de la population canadienne et l’Enquête nationale auprès des ménages (ENM)

Tous les cinq ans, Statistique Canada procède à un recensement de la population. Traditionnellement, le recensement a produit un ensemble complet de renseignements au sujet de la population canadienne. Par exemple les personnes devaient répondre à des questions au sujet de leur âge, état matrimonial, emploi, origine ethnique, statut d’immigration, sexe, éducation, revenu, langue et autres sujets. Lors du Recensement de 2006, 80 % des ménages canadiens ont reçu le questionnaire abrégé contenant huit questions, alors que 20 % ont reçu le questionnaire complet de 61 questions (toutes les questions du questionnaire abrégé, plus 53 autres questions). Les questions du formulaire abrégé portaient sur les sujets de base comme l’âge, le sexe, l’état matrimonial et la langue maternelle de tous les membres de la famille. Les questions du formulaire complet produisaient des données décrivant le statut d’immigration, le lieu de naissance, le lieu de résidence, le marché du travail, l’éducation, la langue et d’autres caractéristiques et renseignements socioéconomiques identifiant les citoyens naturalisés et les pays dont ils sont citoyens. Le recensement produit aussi des renseignements détaillés sur le plan communautaire. Étant donné que le recensement est effectué tous les cinq ans et que les questions sont semblables, les chercheurs ont utilisé ces données pour comparer l’évolution de la composition de la population canadienne au fil du temps. De fait, aucune autre source de renseignements sur notre pays et notre société n’est plus essentielle que le recensementNote de bas de page 134. De plus, grâce à son formulaire complet, le recensement est la source la plus fiable de données détaillées qui permettent des comparaisons entre des sous-segments importants de la population (comme les immigrants, les groupes ethniques et les minorités visibles). Il n’est donc pas surprenant que le recensement soit la base de données la plus couramment utilisée dans la recherche sur les immigrants et, jusqu’à présent, il a été la source d’information la plus précieuse sur les tendances de faible revenu chez les immigrants.

Lors du Recensement de 2011, les questions posées à 20 % de la population (le formulaire abrégé) sont devenues l’Enquête nationale auprès des ménages (ENM) à participation volontaireNote de bas de page 135. L’ENM a été menée en mai 2011 auprès d’un échantillon d’environ 4,5 millions de ménages et comprend toutes les questions que Statistique Canada pouvait souhaiter inclure dans un formulaire complet de recensement pour 2011. Par conséquent, le Recensement de 2011 n’a recueilli que les données fondamentales (âge, sexe, familles, ménages, état matrimonial et langue) et donc il ne contiendra plus de données sur l’immigration, ou d’autres renseignements recueillis dans le formulaire complet. Autrement dit, le contenu de l’ENM est identique à ce qui aurait été recueilli dans le formulaire complet du Recensement de 2011. À l’avenir, l’ENM contiendra les renseignements auparavant disponibles dans le recensement et utilisés pour examiner la situation de faible revenu des Canadiens, y compris les immigrants. Le questionnaire de l’ENM contenait, entre autres, des questions sur la démographie, la citoyenneté et l’immigration, la langue, la langue de travail, l’origine ethnique, le groupe de population, la religion, le lieu de naissance des parents, l’éducation, les activités sur le marché du travail et le revenu provenant de toutes sources. Tandis que leur diffusion se fera en plusieurs étapes, tous les renseignements de l’ENM seront accessibles auprès de Statistique Canada d’ici octobre 2013.

La transition à l’ENM pour les renseignements sur les immigrants à faible revenu peut se répercuter sur notre compréhension de la situation de faible revenu des immigrants. Premièrement, l’ENM peut influer sur l’analyse des tendances de faible revenu au fil du temps, étant donné que la comparabilité avec les données du Recensement de 2006 peut être problématique. Selon Statistique Canada, toute modification significative des méthodes d’enquête peut avoir une incidence sur la comparabilité des données au fil du temps, et il existe un risque réel que ce soit le cas pour l’ENMNote de bas de page 136. Comme le précise Statistique Canada, il est clair qu’on ne pourra jamais déterminer avec certitude si et dans quelle mesure la modification d’une variable est attribuable à un changement réel ou découle de la transition du recensement à formulaire détaillé obligatoire à l’ENM à participation volontaire. Deuxièmement, bien que toutes les enquêtes puissent comporter un biais de non-réponse (même un recensement ayant un taux de réponse de 98 %), on croit que le biais de non-réponse sera la principale source d’erreur non due à l’échantillonnage dans l’ENMNote de bas de page 137. Le risque du biais de non-réponse s’accroît rapidement à mesure que le taux de réponse diminue, car les non-répondants ont tendance à avoir des caractéristiques autres que celles des répondants et, par conséquent, les résultats ne sont pas représentatifs de la population réelleNote de bas de page 138. Ainsi donc, bien qu’un taux de réponse de 70 %Note de bas de page 139 à l’ENM puisse sembler élevé, les 30 % manquants pourraient être importants, car il se pourrait que ceux qui ne répondent pas à l’enquête aient certaines caractéristiques en commun : par exemple, ils pourraient être davantage susceptibles d’avoir des difficultés de langue et de littératie, ou de ne pas avoir accès à un ordinateur ou ne pas savoir l’utiliser, des caractéristiques qui pourraient être celles de segments considérables de la population à faible revenu. En d’autres termes, les données recueillies par l’étude pourraient, dans une certaine mesure, exclure certains segments de la population qui présentent un intérêt lorsqu’il s’agit d’examiner la situation de faible revenu des immigrants. En dépit de ces deux éléments préoccupants, tout en admettant que cette enquête n’offrira pas le niveau de qualité qui aurait été obtenu au moyen d’un questionnaire détaillé obligatoire de recensement, Statistique Canada déclare avoir confiance que l’ENM produira des données utilisables et utiles qui répondront aux besoins de nombreux utilisateurs. Tenant compte de ces nuances, il semble donc qu’un tableau mis à jour de la situation de faible revenu de tous les Canadiens (fondé sur le revenu de 2010), sera chose possible avec les données de l’ENM d’ici la fin de 2013.

Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR)

L’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) est une enquête annuelle qui examine l’évolution de la situation des particuliers au fil du temps sur le plan de leurs activités sur le marché du travail et de leur revenu. Au cœur des objectifs visés par l’enquête, on trouve le désir de comprendre le bien-être économique des Canadiens : à travers quels changements économiques doivent passer les personnes et les familles, et quel rôle jouent à cet égard les changements touchant le travail rémunéré, la composition de la famille, la réception de paiements de transferts gouvernementaux, ou d’autres facteurs? Le caractère longitudinal de l’EDTR permet d’évaluer des faits concomitants et souvent interdépendantsNote de bas de page 140. L’EDTR produit des renseignements sur leurs personnes et leur travail, notamment : activité hebdomadaire des particuliers sur le marché du travail; caractéristiques de chaque emploi occupé au cours de l’année, caractéristiques de la personne, de la famille ou du ménage, et sources de revenu, y compris l’assurance-emploi et l’assurance sociale. L’échantillon de l’EDTR se compose de deux panels. Chaque panel comprend environ 15 000 ménages. Un panel est étudié pendant six ans, et un nouveau panel est ouvert tous les trois ans; ainsi donc, il y a toujours deux panels qui se chevauchentNote de bas de page 141. Initialement, l’EDTR a été conçue par Statistique Canada en tant que première et plus importante étude longitudinale visant principalement la main-d’œuvre et le revenu, ainsi que la relation qui existe entre eux et la composition de la familleNote de bas de page 142. Par la suite, il a été décidé d’élargir les objectifs de l’EDTR pour en faire la principale source de données transversales sur le revenu des ménagesNote de bas de page 143. Le fichier de microdonnées transversales à grande diffusion de l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) est une collection des variables revenu, main-d’œuvre et famille applicables aux personnes vivant au Canada et à leurs familles.

Jusqu’à présent, l’EDTR a été la source de données la plus utilisée dans l’examen de la participation stable au marché du travail d’un certain nombre de groupes (y compris les immigrants récents) de la société canadienne qui sont particulièrement à risque de tomber dans des périodes prolongées de faible revenu et d’être exclus du marché du travail. Le plus grand avantage que présente l’EDTR est le fait qu’elle a permis l’analyse de la durée des périodes de faible revenuNote de bas de page 144. Cependant, en juin 2012, Statistique Canada a annoncé des changements à l’EDTR. Plus précisément, Statistique Canada a annoncé que « le dernier communiqué des données longitudinales de l’Enquête sur la dynamique du travail et du revenu a été publié le 18 juin 2012. Statistique Canada continuera de mener une enquête permettant de produire des estimations annuelles sur le revenu »Note de bas de page 145. En d’autres termes, Statistique Canada éliminera l’aspect longitudinal de l’EDTR, mais continuera d’utiliser certaines parties du questionnaire en tant qu’étude transversale. En tant que telle, l’EDTR conservera la capacité de calculer les taux de faible revenu, mais aura une capacité bien plus restreinte d’expliquer la durée des périodes, ce qui en cause le début et la fin, et combien de personnes ont des gains ou des pertes de revenuNote de bas de page 146. Cela étant, sans sa composante longitudinale, l’EDTR devrait continuer à fournir une estimation, quoique bien plus limitée, des interactions entre les conditions économiques et le capital humain des immigrants dans l’intégration de ces derniers sur le marché du travail, permettant un examen de certains aspects du faible revenu.

Banque de Données administratives longitudinales (DAL) – Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM) (base de données DAL-BDIM)

À ce jour, la seule source de données à grande échelle pouvant être consultée pour l’analyse du faible revenu est des immigrants par catégorie d’admission a été ce que l’on appelle la banque de Données administratives longitudinales (DAL) – Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM) (base de données DAL-BDIM). La base de données DAL-BDIM de Statistique Canada conjugue les données de la banque de Données administratives longitudinales (DAL) et de la Base de données longitudinales sur les immigrants (BDIM). La banque DAL est un échantillon aléatoire de 20 % du fichier T1 sur les familles, qui est un fichier transversal annuel de tous les contribuables canadiens et de leurs familles. Les personnes sélectionnées pour la banque DAL sont reliées au fil des années pour créer un profil longitudinal de chaque personne. Les familles sont examinées pour déterminer le revenu familial. Les immigrants établis au Canada depuis 1980 sont identifiés dans la base de DAL qui comprend aussi leur catégorie d’immigration, leur niveau d’éducation, leur profession visée et leurs compétences linguistiques autodéclarées tirées de leur fiche d’établissement. Les données sur les immigrants contenues dans la base DAL viennent de la BDIM. La BDIM comprend les données de la fiche d’établissement des immigrants ainsi que leurs renseignements fiscaux, et elle constitue la principale source de renseignements à consulter pour analyser le rendement économique des immigrants en fonction d’une vaste gamme de caractéristiques socioéconomiques. Le fichier d’impôt contient les données courantes – celles de l’année d’imposition – alors que la fiche d’établissement contient des données générales – c’est-à-dire des données saisies une seule fois, à l’arrivée. Les personnes qui figurent dans la BDIM sont les immigrants établis entre 1980 et l’année d’imposition la plus récente et ceux qui ont soumis au moins une déclaration de revenu depuis leur entrée au Canada. La base de données DAL-BDIM est produite par la correspondance des deux bases de données; il en résulte que 20 % des immigrants qui se trouvent dans la BDIM sont identifiés dans la banque DAL. La base de données DAL-BDIM permet de comparer les données des immigrants connus à celle d’autres déclarants canadiens. De plus, étant donné que les familles sont formées dans la banque DAL, la conjugaison de cette base de données avec la BDIM permet d’examiner la question du faible revenu chez les immigrants.

La base de données DAL-BDIM offre le grand avantage de permettre aux chercheurs de faire un examen longitudinal de questions comme le faible revenu, et donc de dégager les éléments comme l’incidence, le début, la fin et la durée des périodes de faible revenu. Cependant, la base de données DAL-BDIM ne permet pas une analyse très détaillée. Plus précisément, étant donné que la banque DAL est un échantillon de 20 % de la population (20 % des données de la BDIM sont accessibles dans la base de données DAL-BDIM), certaines analyses effectuées à partir des renseignements détaillés sur les immigrants peuvent produire des estimations de faible grandeur, créant des problèmes de grande variabilité. Par exemple, la variabilité pourrait être plus élevée dans le cas de certaines catégories d’immigration (p. ex. gens d’affaires), certains niveaux d’éducation (p. ex. maîtrises ou doctorats), certains groupes d’âge (p. ex. les personnes plus âgées) et certaines régions dans le mondeNote de bas de page 147.

Base de données longitudinales sur les immigrants reconçue (BDIM)

Généralement, la BDIM a fourni des renseignements sur le rendement économique des immigrants par catégorie, au fil du temps, avec un accent particulier sur les sources de revenu personnelles des déclarants immigrants et non sur le revenu familial. Cependant, en mai 2012, Statistique Canada a officiellement lancé la restructuration de la BDIM, dont le but fort valable était de permettre de nouvelles façons d’examiner une vaste gamme d’éléments de recherche sur les politiques concernant l’intégration des immigrants sur le marché du travail, y compris le sujet du faible revenu. Dans le cadre de la restructuration, la BDIM passe des données brutes du fichier sur le revenu des particuliers au fichier T1 sur les famillesNote de bas de page 148. La transition à cette source de données offre de nombreux avantages, notamment en ce qui a trait à l’analyse du faible revenu chez les immigrants. En passant au fichier T1 sur les familles, la BDIM adopte une structure harmonisée avec celle de la banque de Données administratives longitudinales (DAL), soit une structure organisée en fonction des segments « particulier », « conjoint/parent », « famille » et « enfant ». De plus, compte tenu de la constitution des familles de recensement, et le faible revenu étant un concept de la famille, il devient alors possible d’examiner les diverses questions de faible revenu. On a aussi ajouté de nouvelles mesures du revenu et des transferts gouvernementaux, créant des renseignements non seulement sur la mesure du revenu des particuliers, mais aussi la mesure du revenu familial (revenu avant et après impôt, revenu de gains, revenu de travail indépendant, revenu de placements, Assurance-emploi, Sécurité de la vieillesse, Régime de pensions du Canada ou Régime de rentes du Québec, assistance sociale, revenu de Régime enregistré d’épargnes retraite, crédits d’impôt pour famille et enfant, et paiements de transfert). Aussi, grâce à l’harmonisation avec la DAL, il est possible de reproduire des recherches identiques pour d’autres déclarants canadiens, créant un groupe de référence fort utile aux fins de l’analyse.

Étant donné que la famille de recensement est l’unité d’analyse dans la BDIM remaniée et la banque DAL, aucune des trois lignes officielles de faible revenu ne sont directement applicables. Tant le SFR que la MPC sont fondés sur les familles économiques, alors que la MFR est fondée sur les ménagesNote de bas de page 149. Toutefois, étant donné l’harmonisation de la BDIM reconçue et de la banque DAL, il est possible de créer dans la base de données de la DAL une mesure de faible revenu fondée sur la MFR qui pourrait être utilisée pour l’analyse du faible revenu chez les immigrants dans la BDIM. On peut voir des exemples de cela dans les documents de recherche fondés sur la banque DAL (p. ex. Finnie et Sweetman, 2003), ou fondés sur la base de données DAL-BDIM (p. ex. Picot, Hou et Coulombe, 2007). Le fait de se servir de la banque DAL pour calculer une mesure de faible revenu à appliquer à la population dans la BDIM prend en considération la répartition du revenu chez les déclarants canadiens. Il ne serait pas approprié de ne se servir que de la BDIM pour créer une ligne de faible revenu, puisqu’il n’est pas souhaitable de calculer une mesure de faible revenu en fonction seulement de la population des déclarants immigrants. Il est plus utile plutôt, du point de vue des politiques, de prendre en compte la population canadienne tout entière dans l’estimation d’une mesure de faible revenu. Dans la BDIM remaniée, (tout comme dans le cas de la banque DAL), les particuliers peuvent être considérés être en situation de faible revenu une année donnée lorsque leur revenu familial annuel est en deçà d’un seuil établi (p. ex. revenu familial inférieur à 50 % du revenu médian de la population entière, corrigé en fonction de la taille de la famille).

Sous sa nouvelle forme, la BDIM a le potentiel de combler la lacune au niveau de l’analyse du faible revenu des immigrants créée par l’élimination de la composante longitudinale de l’EDTR, qui a été mentionnée plus haut. La BDIM remaniée deviendra probablement la principale source de données sur lesquelles fonder l’analyse des entrées et sorties des immigrants sur le marché du travail, y compris le début et la fin des situations de faible revenu. Qui plus est, tandis que l’EDTR offrait l’inconvénient de la petite taille de l’échantillon d’immigrants, la taille plus importante de l’échantillon des immigrants (la population des déclarants) dans la BDIM permettra les comparaisons de changements de situation des immigrants sur le marché du travail (p. ex. début et fin d’emplois rémunérés, dépendance de l’assistance sociale et de l’assurance-emploi). Comparativement aux résultats de la banque DAL, il sera aussi possible de comparer ces résultats à ceux d’autres déclarants canadiens ayant des caractéristiques semblables. On s’attend à ce que la BDIM remaniée devienne la principale source de données sur laquelle fonder les décisions quant à l’orientation des mesures politiques destinées à faciliter la transition vers du travail rémunéré pour les immigrants qui, à l’heure actuelle, ne font pas partie de la population active et dépendent de l’aide du gouvernement, sont sans emploi ou sont en situation de faible revenu.

Références

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