Le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés rurales du Nord de l’Ontario et du Nord du Nouveau-Brunswick
Par Mariève Forest, Guillaume Deschênes-Thériault et Virginie Cimonde de Sociopol.
11 juillet 2025
Le projet a été financé par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
Table des matières
- Sommaire
- Introduction
- Méthodologie
- Revue de la littérature
- Profil sociodémographique de la population immigrante francophone du Nord de l’Ontario et du Nord du Nouveau-Brunswick
- Cartographie des services
- Profil des personnes immigrantes ayant participé aux entretiens
- Analyse des entretiens
- Constats et recommandations
- Bibliographie
- Annexe I – Guide d’entretien (personnes immigrantes)
- Annexe II – Guide d’entretien (parties prenantes)
- Annexe III – Formulaire de consentement de participation à la recherche
- Annexe IV – Questionnaire de recrutement
- Annexe V - Caractéristiques de l’échantillon de personnes immigrantes interrogées
- Annexe VI – Profil sociodémographique des populations du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario
Acronymes
- AMINA
- Association Multiculturelle d’Intégration des Nouveaux Arrivants
- AMRC
- Association multiculturelle région Chaleur
- AFNOO
- Association des francophones du Nord-Ouest de l’Ontario
- CAIENA
- Comité d’accueil, d’intégration et d’établissement des nouveaux arrivants de la Péninsule acadienne
- CRNA-NO
- Centre de ressources pour nouveaux arrivants au Nord-Ouest inc.
- CLOSM
- Communauté de langue officielle en situation minoritaire
- CFSM
- Communauté francophone en situation minoritaire
- SÉO
- Société économique de l’Ontario
Sommaire
Dès 2003, le gouvernement du Canada définissait la régionalisation de l’immigration francophone comme un objectif prioritaire dans son premier Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire. Près de vingt ans plus tard, force est de constater que l’immigration francophone est encore fortement concentrée en milieu urbain et majoritairement en Ontario. L’objectif général de la présente étude est de mieux comprendre le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés francophones situées en milieu rural dans le Nord de l’Ontario et le Nord du Nouveau-Brunswick. Pour réaliser ce projet, l’équipe de recherche a employé une méthodologie mixte qui s’appuie sur la collecte de données primaires et secondaires. Cette méthodologie inclut une revue de la littérature, une analyse des données du Recensement de 2021 ainsi que des entrevues menées auprès de personnes immigrantes francophones (n=40), de parties prenantes et d’entreprises (n=6).
Le profil sociodémographique. Dans les deux provinces à l’étude, les personnes immigrantes ou qui déclarent appartenir à un groupe de minorité visible représentent une part considérablement moins importante de la population du Nord comparativement à la population de l’ensemble de la province. Dans le Nord du Nouveau-Brunswick, l’immigration francophone s’inscrit dans un contexte où le français est la langue d’usage de la majorité. En Ontario, près du tiers de la population du Nord-Est (30 %) a une connaissance du français comparativement à 7 % de la population du Nord-Ouest. Par ailleurs, les données sur les admissions de résidents permanents témoignent d’une régionalisation croissante de l’immigration francophone au Nouveau-Brunswick, même si une majorité de ces personnes s’installe toujours dans le Sud de la province (60 % dans la région du Grand Moncton). En Ontario, l’immigration francophone reste toutefois fortement concentrée dans le Sud de la province (plus de 90 %).
Le recrutement. Des localités rurales ayant peu d’historique en matière d’immigration doivent souvent déployer des efforts supplémentaires pour faire connaitre les occasions d’emploi qu’elles peuvent offrir. Le recrutement à l’étranger peut s’avérer particulièrement complexe pour des entreprises peu familières avec les bassins de recrutement à l’international, les procédures d’immigration et les manières d’accompagner les personnes recrutées à l’étranger, ce qui témoigne des besoins en matière d’accompagnement. Les évènements de recrutement, comme Destination Canada, sont considérés comme étant très utiles, mais ils demeurent peu accessibles aux personnes d’Afrique subsaharienne et n’offrent pas toujours suffisamment d’information sur les régions rurales. En ce qui concerne le choix d’un lieu d’installation par les personnes immigrantes, une majorité des personnes interrogées ne connaissait pas la région dans laquelle elles se sont installées avant qu’une occasion d’emploi ou d’études se présente à elles. Près des trois quarts des personnes rencontrées ou des partenaires de ces dernières avaient déjà reçu une offre d’emploi avant leur arrivée, constat qui confirme le rôle de premier plan joué par les employeurs dans le recrutement. Le fait que le lieu de travail soit en milieu rural n’influence pas toujours la décision du lieu d’installation, bien que le quart des personnes interrogées souhaitait justement s’installer dans une petite communauté. La présence du français dans une communauté influence positivement plus du tiers des personnes interrogées.
La période prédépart. De manière générale, les personnes interrogées qui ont bénéficié de conseils de la part de personnes dont le travail consiste à appuyer la préparation de l’établissement – personnel des services prédépart, des services d’établissement et des employeurs – ont vécu des expériences plus positives. Les personnes mal informées ont vécu davantage de déceptions ou de stress à l’arrivée au pays, certains projets migratoires ayant même été mis en péril. Il semble que le niveau d’accompagnement offert par les employeurs avant l’arrivée au Canada peut varier considérablement d’une personne à l’autre. Environ le quart des personnes interrogées a eu accès aux services prédépart, cet accès variant notamment en fonction du statut d’immigration et du lieu d’installation. D’une part, les services prédépart demeurent indisponibles pour les personnes qui arrivent au Canada avec un permis temporaire. D’autre part, un plus grand nombre de personnes ont bénéficié de ces services en Ontario comparativement au Nouveau-Brunswick et elles ont indiqué avoir eu une expérience plus positive. Néanmoins, dans les deux provinces, des personnes ont mentionné que l’information reçue était trop générale pour être véritablement utile et qu’elles auraient préféré avoir accès à un contenu plus adapté aux réalités rurales.
La période d’accueil et d’établissement. La collaboration entre différentes parties prenantes et l’implication d’un service d’établissement dans les premières démarches des personnes nouvellement arrivées semblent importantes et efficaces, surtout pour les personnes arrivées récemment au pays. Les personnes interrogées étaient très nombreuses à reconnaitre le sens de l’hospitalité de la population de la localité où elles se sont installées. Nous avons aussi observé une tolérance croissante à l’égard de l’appui à l’établissement de personnes détenant le statut de résidence temporaire, et ce, non seulement de la part des directions des services d’établissement, mais aussi d’IRCC. Il n’empêche que plusieurs localités ne peuvent toujours pas compter sur des services d’établissement et que dans certaines localités, des services d’établissement doivent se contenter d’offrir des services de moindre qualité ou une gamme réduite de services en raison d’un manque de ressources. De plus, pour une majorité de localités, l’accès à des logements abordables semble avoir diminué au cours des dernières années.
L’insertion économique. Au moins le quart des personnes interrogées occupe un emploi qui ne correspond pas à leur domaine professionnel de compétences ou pour lequel elles sont surqualifiées. Cette situation découle en grande partie de la difficulté des personnes immigrantes à faire reconnaitre leurs acquis (expérience et formation), en particulier dans le domaine de la santé. D’autres enjeux ont été relevés en matière d’insertion professionnelle : les risques d’abus de la part de l’employeur lorsqu’une personne détient un permis de travail fermé; l’ouverture à la diversité, qui varie d’un milieu de travail à un autre; l’importance de maitriser l’anglais (en particulier en Ontario); le bassin limité d’emplois en milieu rural pour les personnes à la recherche d’un nouveau travail; le manque de places en services de garde. Néanmoins, plus de la moitié des personnes consultées a dit être satisfaites des efforts déployés par leur employeur afin de faciliter leur accueil au sein de l’entreprise, certaines précisant même que l’accompagnement offert avait dépassé leurs attentes.
L’insertion sociale. Les activités qui permettent aux personnes nouvellement arrivées de socialiser sont majoritairement organisées par les services d’établissement, mais aussi parfois par l’employeur ou les collègues ainsi que par la municipalité, les associations ethnoculturelles ou d’autres organismes francophones. Toutefois, près de la moitié des personnes interrogées ressent la solitude. Alors que certaines personnes considèrent que la taille réduite de leur localité facilite la création de liens, d’autres ont souligné la difficulté à tisser des liens dans une petite communauté où tout le monde a déjà développé son propre réseau. Dans notre échantillon, le racisme et la discrimination liée à la race sont des phénomènes peu répandus, mais ils sont vécus plus fréquemment par les personnes vivant au Nouveau-Brunswick. La difficulté à tisser des liens affectifs en dehors des cercles de personnes immigrantes était parfois perçue comme une certaine fermeture. Enfin, les personnes interrogées apprécient les repères sociolinguistiques qu’offrent les communautés à majorité francophone, où elles peuvent rapidement échanger avec des membres de la population locale. En revanche, lorsque le français est moins présent dans une localité, pour les personnes nouvellement arrivées au pays, un faible niveau de compétence en anglais peut être un obstacle à l’insertion sociale et à l’accès aux services.
La rétention. Les personnes interrogées qui ont exprimé leur intention de rester à long terme dans leur communauté d’accueil associent ce souhait à une multitude de facteurs plutôt qu’à un motif précis : une insertion professionnelle satisfaisante pour soi et son partenaire, un milieu de vie qui correspond aux attentes, de nouvelles amitiés, une communauté ouverte, un environnement sécuritaire, etc. Ces mêmes facteurs peuvent aussi expliquer pourquoi une personne quitte la région ou envisage de le faire lorsque les expériences vécues sont moins positives. Par exemple, la tranquillité ou l’éloignement d’une région rurale peuvent répondre aux aspirations d’une personne comme ils peuvent en rebuter d’autres. Néanmoins, il s’avère que le principal facteur pouvant mener à un départ est une situation professionnelle insatisfaisante. Plus de la moitié des personnes interrogées soutient qu’elles pourraient migrer à nouveau pour cette raison.
Les recommandations. Les principaux constats qui se sont dégagés de la présente étude ont servi à formuler les recommandations suivantes :
- Appuyer la régionalisation de l’immigration francophone au moment de la sélection;
- Appuyer les activités visant à jumeler des employeurs avec des candidates et des candidats éventuels à l’étranger;
- Mener des missions de recrutement adaptées aux réalités des pays sources et des communautés francophones en milieu rural;
- Garantir aux personnes qui détiennent le statut de résidence temporaire l’accès à toute la gamme des services prédépart et des services d’établissement;
- Miser sur des services prédépart qui reflètent les réalités locales et sur la collaboration avec les partenaires locaux;
- Reconnaitre et valoriser l’importance de liens solides entre les services d’établissement, les employeurs et les autres composantes de la communauté d’accueil;
- Rendre obligatoire la collaboration des entreprises qui embauchent des personnes francophones à l’étranger avec les services d’établissement francophones;
- Tenir compte des réalités particulières des régions rurales dans les ententes de financement en matière d’établissement;
- Accélérer la reconnaissance des acquis et faciliter l’accès à l’information sur le sujet;
- Appuyer les activités de valorisation de la diversité culturelle et les campagnes de démystification.
Introduction
Depuis une vingtaine d’années, les communautés francophones en situation minoritaire au Canada (CFSMs) ont fait de l’immigration une priorité nationale. Ce faisant, ces communautés ont déployé d’importants efforts pour recruter, accueillir et appuyer l’établissement des personnes immigrantes francophones ainsi que pour intégrer et retenir ces dernières au sein des communautés francophones (CLO, 2021).
Dès 2003, le gouvernement du Canada définissait la régionalisation de l’immigration francophone comme un objectif prioritaire dans son premier Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire (Citoyenneté et Immigration Canada). Près de vingt ans plus tard, force est de constater qu’à l’extérieur du Québec, l’immigration francophone est encore fortement concentrée en milieu urbain et majoritairement en Ontario. De fait, « les deux plus grandes régions métropolitaines de l’Ontario, Toronto et Ottawa, étaient les destinations où prévoyaient de s’établir plus de la moitié (52 %) des résidents permanents francophones admis entre 2016 et 2020 » à l’extérieur du Québec (Deschênes-Thériault et Forest, 2022, p. 21).
L’objectif général de la présente étude est de mieux comprendre le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés francophones situées en milieu rural dans le Nord de l’Ontario et le Nord du Nouveau-Brunswick. Cette étude s’est déroulée en trois étapes. Premièrement, un portrait statistique des personnes immigrantes d’expression française des régions ciblées a été élaboré. Deuxièmement, les parcours d’établissement et d’insertion sociale et économique ont été précisés au moyen d’entretiens auprès de personnes immigrantes et de parties prenantes. Troisièmement, ces entretiens ont permis de mettre en évidence les facteurs qui influencent l’établissement, l’inclusion et la rétention des personnes immigrantes dans ces régions ainsi que les ressources disponibles.
En conclusion, des recommandations ont été formulées à l’intention du ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada afin que les parcours des personnes immigrantes qui s’installent dans les régions rurales du Nord de l’Ontario et du Nord du Nouveau-Brunswick mènent à une inclusion et une rétention réussies.
Méthodologie
Nous avons adopté une méthodologie mixte fondée sur diverses méthodes de collecte de données. Pour réaliser ce projet, l’équipe de recherche a employé une méthodologie mixte qui s’appuie sur la collecte de données primaires et secondaires. Cette méthodologie inclut une revue de la littérature, une analyse des données du Recensement de 2021 ainsi que des entrevues auprès de personnes immigrantes francophones, de parties prenantes et d’entreprises.
Principes ayant guidé la revue de la littérature
La revue de la littérature a été réalisée au début de la recherche pour que les résultats de celle-ci guident les outils de collecte de données et le cadre de l’analyse. Cette recension a puisé principalement dans la littérature scientifique et la littérature grise des dix dernières années portant sur l’immigration au sein des communautés rurales, avec un accent particulier sur l’immigration francophone, tout en privilégiant les thèmes du recrutement, de l’accès aux services d’établissement, de l’insertion sociale ou économique et de la rétention.
Portrait statistique
À partir des données du Recensement de 2021 de Statistique Canada, nous avons brossé un portrait statistique de la population immigrante d’expression française établie depuis dix ans ou moins dans les communautés rurales des deux régions ciblées. Les divisions géographiques du Nord de chacune des provinces ont servi à délimiter les deux régions à l’étude. Pour le Nouveau-Brunswick, nous avons utilisé les trois comtés situés les plus au nord, soit le Madawaska, le Restigouche et Gloucester (qui englobe la région Chaleur et la Péninsule acadienne). Pour l’Ontario, nous avons plutôt retenu les régions économiques du nord, qui incluent le Nord-Est et le Nord-Ouest de la province. L’ensemble des personnes ayant pris part aux entretiens habitent une localité située dans ces comtés ou ces régions économiques. Les deux principales variables qui ont permis de délimiter la population à l’étude sont la première langue officielle parlée (uniquement le français ou le français et l’anglais) et la période d’immigration (dix ans ou moins).
Entrevues auprès de la population immigrante
Les entrevues auprès de la population immigrante visaient à approfondir notre compréhension du parcours des personnes immigrantes francophones, de la période prédépart à aujourd’huiNote de bas de page 1 . La population cible était la suivante : les personnes immigrantes d’expression française de plus de 18 ans qui vivent ou qui ont vécu dans une région rurale du Nord de l’Ontario ou du Nord du Nouveau-Brunswick et qui ont été admises au pays au cours des dix dernières années. Ces entrevues étaient semi-dirigées et adoptaient une approche rétrospective, par trajectoire et intersectionnelle. Les personnes participantes ont été identifiées principalement par l’entremise des services d’établissement offrant des services aux résidents permanents dans les deux régions à l’étude. En Ontario, la Société économique de l’Ontario (SÉO) a également été sollicitée. Nous avons demandé à ces fournisseurs de services de transmettre un lien menant à un bref questionnaire en ligne à leurs clientèles actuelle et passée. Le questionnaireNote de bas de page 2 contenait des questions sociodémographiques et géographiques visant à déterminer l’admissibilité à l’étude et à cibler des personnes selon divers critères d’inclusion. Nous avons visé une représentativité en ce qui a trait à l’âge, au genre, à l’appartenance à une minorité visible, au lieu d’établissement et au statut d’immigration. L’objectif de réaliser 40 entretiens, soit 20 en Ontario et 20 au Nouveau-Brunswick, a été atteint.
Entrevues auprès de parties prenantes et d’employeurs
Les entretiens avec des parties prenantes et des employeurs visaient à approfondir notre compréhension des pratiques prometteuses mises en place par des fournisseurs de services ou des entreprisesNote de bas de page 3 et de déterminer les conditions de succès de ces pratiques. L’objectif de mener au moins cinq entretiens avec des parties prenantes et des employeurs a été atteint, puisque nous en avons réalisé six.
Considérations éthiques
La recherche a été menée conformément à l’Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains du gouvernement du Canada (CRSH, CRSNG et IRSC, 2022). À chaque étape de la collecte de données, un formulaire de consentementNote de bas de page 4 a été remis aux personnes participantes pour lecture et signature. Le traitement des données a été effectué dans le strict respect de la confidentialité. Les extraits d’entrevues cités dans ce rapport ont été anonymisés de manière à éviter toute possibilité d’identification des personnes participantes.
Revue de la littérature
La revue de la littérature qui suit a permis de constater un intérêt continu à l’égard de la régionalisation de l’immigration, bien que les écrits recensés portent peu sur l’immigration francophone. Les particularités du recrutement, de l’accueil, de l’inclusion et de la rétention au sein de petites communautés et de communautés éloignées sont mises en lumière ci-après.
Période prédépart
Étudier les motivations qui mènent une personne, d’une part, à migrer et, d’autre part, à choisir une communauté francophone en milieu rural permet de mieux comprendre les attentes qu’entretiennent les personnes immigrantes à l’égard de leur communauté d’accueil et d’établir des liens avec les activités de promotion et de recrutement à l’international.
Les premières tentatives de théoriser les causes des migrations sont généralement associées aux travaux d’Ernest George Ravenstein (Piguet, 2013). À partir d’une analyse des données sur les migrations au Royaume-Uni et à l’international, Ravenstein (1889) établit une série de « lois migratoires » expliquant pourquoi les gens migrent. Il met l’accent sur les facteurs d’ordre économique dans son cadre d’analyse. Les postulats de base des travaux de Ravenstein ont influencé de manière durable l’émergence et le développement du champ d’études des migrations internationales (Piguet, 2013; Piché, 2013).
Les recherches récentes portant sur les facteurs qui incitent une personne migrante à s’établir dans une région rurale du Canada concordent avec les approches classiques dans le champ d’études des migrations, puisqu’elles insistent sur les motivations économiques (Traisnel et coll., 2020; Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020; Arcand et coll., 2021). Les résultats de l’étude de Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc (2020, p. 19) « viennent confirmer les nombreuses recherches de la littérature scientifique qui ont souligné l’importance des caractéristiques du marché du travail, des postes vacants et du rôle majeur de l’emploi comme dimensions prédominantes de l’attraction des immigrants dans les régions ».
Toutefois, l’étude de Sall et Bolland (2018), qui porte sur l’immigration française et belge au Nouveau-Brunswick, invite à relativiser l’importance du facteur de l’emploi. De fait, plusieurs personnes interrogées dans cette étude recherchaient d’abord une qualité de vie associée aux petites communautés et un environnement propice à élever une famille. La recherche d’un « endroit paisible pour élever la famille » est aussi mise en lumière dans l’étude d’Arcand, Ben Mansour et Robichaud (2021, p. 9).
En plus du facteur de l’emploi et des raisons familiales, les études de Traisnel et coll. (2020) et de Deschênes-Thériault (2021) montrent que les raisons motivant l’installation dans une communauté francophone hors des grands centres sont très variables. Elles comprennent notamment la recherche d’une qualité de vie correspondant à ses aspirations, une volonté de rejoindre des amis ou des membres de la famille déjà sur place, un cout de la vie moins élevé qu’en ville, un souhait d’améliorer son niveau de compétence linguistique en anglais ou, tout simplement, une envie de nouvelles découvertes.
Enfin, il semble que de l’information facilement accessible sur les possibilités d’immigration en région et les services en place puisse influencer les décisions d’y migrer (Arcand, Ben Mansour et Robichaud, 2021). Ce constat permet de souligner l’importance de pouvoir compter sur des services prédépart adaptés aux réalités des régions rurales et de diffuser de l’information sur les possibilités de s’établir en région lors d’activités de promotion organisées à l’international.
« Les programmes et services offerts aux immigrants peuvent également exercer une influence sur le choix du lieu de résidence d’un immigrant [...]. Les informations concernant ces programmes et services [accessibles via les plateformes virtuelles], les réseaux sociaux et les médias fournissent des indicateurs sur le potentiel des régions, un incitatif à s’établir » (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020, p. 3). À ce sujet, l’étude de Traisnel et coll. (2020) note que les activités de promotion à l’étranger se sont intensifiées depuis le début des années 2000 et qu’une diversité d’acteurs sont engagés dans le recrutement de personnes immigrantes francophones. Cette étude rappelle toutefois l’importance de diffuser une information fidèle à la réalité locale lors de ces activités de promotion, des expériences décevantes pouvant nuire à la rétention des nouveaux arrivants. De plus, l’étude de Deschênes-Thériault (2022) portant sur l’Ouest canadien souligne que, malgré le potentiel que recèlent les services prédépart, ceux-ci sont souvent méconnus et encore sous-utilisés par les personnes immigrantes francophones. En 2023, ces services demeurent indisponibles pour les personnes qui arrivent au Canada avec un permis temporaire, alors même que l’immigration en deux étapes est de plus en plus facilitée (GGI, 2023a et 2023b).
Accueil en milieu rural
L’accueil et l’établissement des personnes immigrantes sont des éléments importants d’une stratégie durable en matière d’immigration. Les recherches sur le sujet mettent en évidence plusieurs défis auxquels peuvent faire face les personnes immigrantes durant la phase d’installation, comme l’accès à un logement abordable ou adapté à leurs besoins, la recherche de places en service de garde d’enfants et l’absence de transport en commun en région rurale (CCNÉF, 2022).
De plus, nombreux sont les écrits qui abordent la question de l’accueil, de l’établissement et de l’intégration et qui mettent en évidence des structures et des pratiques favorisant la mise en place de communautés accueillantes et inclusives (Esses et Carter, 2019). Les services d’établissement sont bien souvent le premier point de contact des personnes immigrantes avec la communauté francophone et ils permettent de répondre à plusieurs besoins de ces personnes à l’arrivée comme la recherche d’un logement, les démarches administratives, la recherche d’emploi, l’insertion scolaire des enfants et l’apprentissage des langues (Kamano, Benimmas et Côté, 2020; Traisnel et coll., 2019).
L’accès à ces services d’établissement est un facteur qui contribue à une insertion réussie au sein de la communauté d’accueil et qui favorise l’accès à une information de qualité et à jour (Melançon, Kikulwe et Akinpelu, 2022). Les services officiels ne sont toutefois pas toujours connus des personnes immigrantes à l’arrivée (Traisnel et coll., 2019) ou ne sont pas accessibles à certaines catégories de migrants, comme les personnes ayant un statut de résidence temporaire (GGI, 2023a et 2023b). Les personnes qui « découvrent » la communauté francophone plusieurs mois ou années après leur arrivée semblent avoir plus de difficulté à tisser des liens avec celle-ci. De plus, en région rurale, la gamme de services disponibles est souvent plus limitée qu’en milieu urbain. Sall (2019) parle d’une « incomplétude institutionnelle » en matière d’immigration dans l’Acadie du Nouveau-Brunswick.
Bien que ces services soient nécessaires, dans le contexte de l’immigration en milieu rural, certains auteurs proposent de pousser la réflexion au-delà du modèle classique de l’accueil et de l’établissement. En effet, les milieux ruraux se trouvent dorénavant au centre de plusieurs dynamiques, notamment la répartition des migrants, les stratégies de redynamisation des territoires, le repeuplement et l’essor économique (Flamant, Fourot et Aisling, 2021).
Dans le cadre de la répartition des personnes immigrantes en dehors des grands centres urbains, l’immigration rurale est devenue une réalité plus visible et elle mobilise les populations locales, qui souhaitent tantôt la développer, tantôt s’y opposer, tantôt tisser des liens de solidarité avec les nouveaux arrivants. Cette migration s’est diversifiée : réfugiés, travailleurs saisonniers, migrants économiques, étudiants. Comment le milieu rural se mobilise-t-il alors pour accueillir les nouveaux arrivants? Comment considérer le rôle des individus dans l’accueil et l’intégration des personnes migrantes? Comment se tisse cette relation entre les nouveaux arrivants et les citoyens de la communauté d’accueil? Peu d’études abordent ces questions concernant les formes que peuvent prendre les actes de solidarité et d’hospitalité (Belkhodja, 2023).
Dans un rapport de recherche intitulé Au-delà des grandes villes, Esses et Carter (2019) soulignent que le succès de l’immigration dans les régions périphériques dépend de plusieurs facteurs mesurables, mais aussi de la mise en place d’une dynamique collective. Les auteures soulignent que pour développer un projet porteur en immigration, il faut du temps et des efforts collectifs. Le message clé est que la vitalité des petits centres et des régions rurales peut passer par l’immigration si le milieu rural se développe de manière concertée en tant que destination attrayante et ouverte à la diversitéNote de bas de page 5.
Les petits centres du Canada possèdent des caractéristiques uniques et bon nombre d’entre eux peuvent offrir un mode de vie attrayant aux nouveaux résidents [éventuels]. Des solutions de politiques raisonnables et la collaboration aideront les petits centres et les collectivités rurales du Canada à tirer profit des contributions économiques et sociales des nouveaux arrivants (Esses et Carter, 2019, p. 6).
D’ailleurs, un espace accueillant s’observe dans le cadre d’interactions à petite échelle, soit dans des rencontres quotidiennes au sein d’espaces comme des centres communautaires, des quartiers, des lieux de travail, des établissements postsecondaires, des bibliothèques, des marchés publics, des espaces récréatifs (Radice, 2015; Veronis et Huot, 2019). Par conséquent, la communauté accueillante en milieu rural gagne à planifier un tel développement de liens entre les résidents et les nouveaux arrivants.
Une autre caractéristique importante de la communauté d’accueil se rapporte aux aptitudes, aux valeurs et à l’éthique au cœur de la logique relationnelle qui se développe entre les personnes. Il s’agit dès lors de réfléchir aux enjeux de l’hospitalité, de la solidarité et de la résilience (Coutant, 2018; LeBlanc et Burgère, 2017). Ce type de réflexion rappelle que l’accueil entraine des changements plus profonds que ceux se rapportant seulement à des critères quantifiables tels que la livraison des services d’établissement, par exemple. Ici, l’accueil implique pour la communauté un travail plus profond sur ses valeurs et une participation plus engagée. Cette dimension rejoint un ensemble de valeurs et d’aptitudes collectives et citoyennes (Isin et Nielsen, 2008). Elle fait référence à une éthique de l’accueil fondée en particulier sur la compassion, la résilience et la responsabilité des individus et des communautés.
Insertion économique
Dans le parcours d’établissement d’une personne immigrante, l’insertion économique revêt une importance particulière. Une situation professionnelle adéquate est une des conditions du succès de l’intégration des personnes immigrantes, voire le principal pilier de l’installation de ces dernières (Traisnel et coll., 2019; Hypolite, 2012). La littérature consultée révèle que les obstacles freinant l’insertion économique des personnes immigrantes en régions rurales sont nombreux et que les embûches tendent à se complexifier lorsque les individus s’établissent dans une CFSM.
L’obstacle qui revient le plus souvent est la difficulté pour les personnes arrivant de l’international à décrocher un poste qui soit à la hauteur de leur formation et de leurs compétences (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020; Traisnel et coll., 2019; Sall, 2021). En effet, les personnes immigrantes se retrouvent souvent à occuper des emplois qui ne correspondent pas vraiment, voire pas du tout, à leur formation ou à leur niveau d’expérience (Traisnel et coll., 2020, p. 125).
Cette réalité peut s’expliquer en partie par des limites structurelles imposées, d’une part, par les processus gouvernementaux de sélection des immigrants, qui visent dans une large mesure à recruter des travailleurs diplômés et qui ne prendraient pas suffisamment en compte les besoins en main-d’œuvre des entreprises régionales (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020), et, d’autre part, par l’enjeu de la reconnaissance des acquis (diplômes, compétences et expériences professionnelles) des nouveaux arrivants en sol canadien (Sall et Bolland, 2021).
Les caractéristiques ethnoraciales des personnes immigrantes, les particularités de la communauté d’accueil de ces dernières et la proximité entre les deux sont également des facteurs qui pourraient permettre de comprendre cette situation (Sall et Bolland, 2021). Par exemple, il arrive que la personne immigrante et l’employeur nourrissent des attentes qui soient difficilement conciliables, entre autres pour des raisons culturelles (Arcand, Ben Mansour et Robichaud, 2021). Dans le même ordre d’idées, les agents de développement économique régional consultés par Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc dans une étude menée dans des régions rurales du Québec « associent la non-reconnaissance des diplômes à la méfiance des employeurs face à la diversité culturelle » (2020, p. 20). Enfin, dans leurs travaux sur l’Acadie du Nouveau-Brunswick, Sall et Bolland (2021) soutiennent que des secteurs d’emploi essentiels à la vitalité des communautés francophones, comme l’éducation et la santé, sont difficilement accessibles aux personnes immigrantes. Ces chercheurs parlent des réticences des membres de la communauté d’accueil à ouvrir ces secteurs aux personnes de l’extérieur, ce qui les mènent à conclure que pour « des raisons identitaires, il semble y avoir une discrimination à l’emploi des immigrants francophones » (Sall et Bolland, 2021, p. 76).
Un autre élément qui vient complexifier l’insertion professionnelle des personnes immigrantes dans les CFSM en régions rurales est le bilinguisme asymétrique qui caractérise souvent ces milieux. Comme l’anglophonie canadienne offre un plus grand nombre de services et propose un plus large éventail d’occasions d’emploi aux personnes immigrantes, celles qui maitrisent l’anglais ou ont la possibilité d’apprendre cette langue peuvent décider de se réorienter vers un milieu anglophone si leur insertion professionnelle en français se révèle insatisfaisante (Sall et coll., 2022). Selon Sall et Bolland, certaines personnes immigrantes soutiennent même que, en Acadie du Nouveau-Brunswick, la réussite de leurs projets professionnels est conditionnelle à leur maitrise de l’anglais (2021).
Enfin, Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc observent qu’au Québec, un autre obstacle qui compromet la réussite de l’insertion en emploi des personnes immigrantes est le nombre restreint de ressources pour soutenir les employeurs en région rurale (2020). Toujours dans cette province, les auteurs notent que le transport collectif en dehors des zones urbaines serait insuffisant ou inadapté « aux horaires de travail et à la localisation de certaines entreprises ainsi qu’à la réalité des travailleurs issus de l’immigration », qui ne possèdent souvent pas de permis de conduire canadien ou de véhicule (2020, p. 12).
Par conséquent, « [l’emploi] peut être un facteur d’enracinement lorsqu’il [répond] aux attentes alors que dans le cas contraire, il peut pousser un nouvel arrivant à quitter la région » (Traisnel et coll., 2019, p. 111). Les écrits ont permis de mettre en évidence des conditions qui pourraient empêcher cet exode. D’abord, les personnes immigrantes qui développent localement un réseau social voient croitre « leur employabilité ainsi que leur désir de demeurer dans la région d’accueil » (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020, p 3). Ensuite, une approche adaptée et équitable lors de l’insertion en entreprise des personnes immigrantes favoriserait la rétention de ces dernières dans le milieu. Veiller à ce que les employés immigrants aient en main tous les renseignements nécessaires au sujet du travail à accomplir et de la culture organisationnelle de l’entreprise et veiller à ce que leurs collègues soient avisés de l’arrivée et du rôle de ces derniers au sein de l’organisation sont des exemples de bonnes pratiques. Selon Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, certains employeurs vont jusqu’à positionner les personnes immigrantes sur l’échelle salariale de l’entreprise en reconnaissant de leur propre chef les compétences et les diplômes de ces personnes afin d’en favoriser la rétention (2020).
Insertion sociale
L’intégration à la communauté d’accueil est également une étape charnière du parcours d’établissement des personnes immigrantes en régions rurales et elle peut jouer un rôle déterminant sur la rétention de ces personnes à long terme (Traisnel et coll., 2019). C’est en fréquentant des espaces communs, comme les établissements d’enseignement, les lieux de culte et les centres communautaires, et en utilisant les organismes responsables de les accueillir et de les accompagner dans leur établissement que les personnes immigrantes se bâtissent un réseau social (Forest et Deschênes-Thériault, 2021; Melançon, Kikulwe et Akinpelu, 2022; Kamano, Benimmas et Côté, 2020). Dans les CFSM, les espaces communautaires francophones sont de première importance pour l’insertion sociale des nouveaux arrivants (Veronis et Huot, 2018).
Néanmoins, Melançon, Kikulwe et Akinpelu soutiennent que ces espaces ne répondent qu’en partie aux besoins de contacts conventionnels et d’interactions quotidiennes des personnes immigrantes et que les « besoins de compréhension [de ces dernières] demeurent présents » (2022, p. 92). Dans les CFSM de la Saskatchewan où Melançon, Kikulwe et Akinpelu ont mené leur étude, il est apparu que c’est en s’impliquant à leur tour auprès des nouveaux arrivants que les personnes immigrantes arrivent à réellement combler leurs besoins d’établissement, communicationnels, relationnels et institutionnels : « Une fois les premiers obstacles surmontés et les premiers liens établis, plusieurs nouveaux arrivants ressentent [le] besoin de s’engager au sein de leurs communautés d’accueil […]. Ce besoin peut être une réponse au sentiment d’être capable de s’engager et de contribuer à son tour […], de rejoindre autrui, de bâtir les réseaux et de tisser les liens qui pourront bénéficier à soi-même comme aux autres » (2022, p. 96).
De même, de nombreux auteurs abordent la question de l’ouverture à la diversité, à la personne « qui n’est pas de chez nous » (Racine et Tapia, 2020, p. 32). Les membres de la population locale, influencés par la ruralité et par le contexte particulier de la francophonie en situation minoritaire, manifestent parfois des réticences à l’égard des personnes immigrantes, ce qui donne lieu à une situation paradoxale au moment d’accueillir ces nouveaux arrivants. Même si les personnes immigrantes ressentent une ouverture de la part de leurs communautés d’accueil, ces dernières sont difficiles à pénétrer (Traisnel et coll., 2019). Dans les régions du Québec, Racine et Tapia rapportent que les membres de la population locale sont peu portés à participer aux activités de valorisation de la diversité culturelle et que les personnes immigrantes s’y retrouvent « entre étrangers » (2020, p. 29). De l’avis de Vatz Laaroussi, Bernier et Guilbert, en ce qui concerne ces communautés, ce n’est pas leur caractère rural qui explique leur attitude à l’égard de l’immigration, mais leur exposition limitée à la diversité (cités par Fourot, 2014). Dans le cas des CFSM, le fait d’appartenir à une francophonie différente vient aussi s’ajouter aux facteurs cités précédemment et « la langue peut [alors] paraitre autant comme un élément unificateur qu’un obstacle » (Benimmas et coll., 2014, p. 112).
Les caractéristiques personnelles des nouveaux arrivants et le manque de connaissance des populations d’accueil ont donc une incidence sur le capital d’ouverture à l’immigration et, par conséquent, sur les interactions entre les deux groupes (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020; Melançon, Kikulwe et Akinpelu, 2022). Une communauté d’accueil ayant déjà en son sein des personnes provenant de cultures diverses et étant sensibilisée à cette diversité présente ainsi des conditions de succès pour l’insertion sociale d’un nouvel arrivant immigrant (Forest et Deschênes-Thériault, 2021; Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020).
En outre, plusieurs études ont démontré que la présence d’un conjoint ou d’une conjointe est bénéfique pour l’intégration sociale des personnes immigrantes, en particulier si ce partenaire est bien intégré dans le milieu (Castro et Villeneuve, 2019; Racine et Tapia, 2020). De la même façon, les chances de rétention des personnes immigrantes s’accroissent lorsque les enfants de celles-ci s’insèrent positivement dans la communauté d’accueil (Forest et Deschênes-Thériault, 2021).
L’implication des employeurs peut aussi favoriser l’intégration sociale des personnes immigrantes. En offrant des formations et en faisant de la sensibilisation à la diversité culturelle dans leurs entreprises respectives et dans la communauté, les employeurs considèrent qu’ils contribuent à « atténuer les effets négatifs des stéréotypes et [qu’ils encouragent] l’ouverture de la communauté à la diversité culturelle » (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020, p. 15).
Rétention
Plutôt que de chercher à expliquer seulement les facteurs qui contribuent à un établissement réussi, plusieurs écrits recensés ont aussi permis de mieux comprendre les raisons qui mènent à quitter la région d’accueil. Soulignons d’emblée la complexité des dynamiques se rapportant à la rétention (Fourot, 2014; Vatz Laaroussi, 2008; Traisnel et coll., 2020). Les facteurs pouvant avoir une incidence sur la rétention sont de différentes natures. D’ailleurs, plusieurs facteurs d’attraction peuvent aussi être considérés comme des facteurs de rétention (Esses et Carter, 2019).
Néanmoins, Fourot (2014) précise qu’il est plus difficile de retenir des personnes immigrantes dans les petites communautés que dans les centres urbains. Traisnel et coll. (2020) comparent les parcours de personnes immigrantes francophones s’étant établies à leur arrivée au Canada atlantique et ayant quitté cette région par la suite aux parcours de personnes immigrantes qui sont demeurées sur place. La principale différence qui est ressortie entre ces deux groupes est la réussite de l’insertion professionnelle. Pour une personne immigrante, l’obtention d’un emploi correspondant à ses attentes et à ses compétences est donc un facteur central qui pèse sur sa décision de s’établir à long terme dans sa communauté d’accueil. « L’emploi se trouve au cœur des motivations de mobilité et d’installation et […] peut également conduire (paradoxalement) au départ, c’est-à-dire à la poursuite (ailleurs) de l’expérience de mobilité. Les mêmes raisons liées à l’emploi font en effet venir [au] Nouveau-Brunswick [puis repartir de la région] » (Traisnel et coll., 2020, p. 88).
Parmi les autres facteurs mis en évidence dans la littérature qui ont une incidence sur la rétention (Traisnel et coll., 2020; Castro et Villeneuve, 2019; Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020; Sall et Bolland, 2021; Esses et Carter, 2019), on note :
- La situation professionnelle du partenaire conjugal;
- Le développement d’un réseau social;
- La présence de stratégies visant à mettre en place des milieux de travail inclusifs;
- L’appui reçu à l’arrivée;
- La présence d’une situation de crise imprévue;
- L’accès au transport en commun;
- L’accès à un logement abordable et adapté aux besoins;
- La discrimination;
- L’éloignement et le mal du pays;
- La présence d’une communauté de même origine;
- Une situation qui ne répond pas aux attentes initiales;
- Le facteur de la langue en contexte minoritaire;
- Les embûches administratives;
- La fin d’un séjour temporaire prévu.
Profil sociodémographique de la population immigrante francophone du Nord de l’Ontario et du Nord du Nouveau-Brunswick
Comme mentionné, pour brosser le portrait de la population des deux régions à l’étude, nous nous sommes appuyés sur des divisions de recensement de Statistique Canada qui permettent d’isoler les régions du Nord de chacune des provinces. Pour le Nouveau-Brunswick, nous avons utilisé les trois comtés situés les plus au nord de la province, soit Madawaska, Restigouche et Gloucester (qui englobe la région Chaleur et la Péninsule acadienne). Pour l’Ontario, nous avons plutôt utilisé les régions économiques qui incluent le Nord-Est et le Nord-Ouest de la province.
Nord du Nouveau-Brunswick
La population du Nord du Nouveau-Brunswick affiche un déclin entre 2016 et 2021, tandis que la population provinciale dans son ensemble est légèrement en hausseNote de bas de page 6. Alors que la population du Madawaska, du Restigouche et de Gloucester représente 19 % de la population provinciale totale en 2016, cette proportion chute à 18 % en 2021. De plus, en 2021, la population du Nord est plus âgée (âge médian variant de 52 à 53,6 ans) que la population provinciale (âge médian de 46,8 ans) et a un revenu médian légèrement inférieur.
Une majorité de la population du Nord du Nouveau-Brunswick a le français comme première langue officielle parlée, la proportion variant de 62 % dans le Restigouche à 90 % dans le Madawaska. Cette proportion est de 30 % à l’échelle provinciale. Une très grande majorité de la population déclare être en mesure de soutenir une conversation en français, soit 73 % dans le Restigouche, 89 % dans Gloucester et 94 % dans le Madawaska, comparativement à 41 % dans l’ensemble du Nouveau-Brunswick. L’immigration francophone dans le Nord de la province s’inscrit ainsi dans un contexte où le français est la principale langue d’usage. Pour ce qui est du taux de bilinguisme (anglais et français), il est de 50 % dans les comtés de Restigouche et de Gloucester et de 58 % dans le Madawaska, comparativement à 34 % à l’échelle provinciale.
Une plus faible proportion de la population du Nord de la province (2 % à 3 %) déclare appartenir à une minorité visible, comparativement à celle de la population provinciale totale (6 %). Les personnes immigrantes représentent aussi une part moins importante de la population du Nord (de 1 % à 4 %) que de celle de la province (6 %).
En 2021, dans les trois comtés, la population immigrante récente (2016 à 2021) est moins nombreuse que celle des résidents non permanents. Au total, 715 personnes ayant obtenu leur résidence permanente entre 2016 et 2021 vivent dans l’un ou l’autre de ces comtés, comparativement à 970 résidents non permanents.
Madawaska | Restigouche | Gloucester | ||||
---|---|---|---|---|---|---|
Données | Proportion | Données | Proportion | Données | Proportion | |
Population totale | 32 603 | 30 700 | 78 256 | |||
Taux de variation de la population entre 2016 et 2021 | -0,4 % | -0,8 % | -0,2 % | |||
Âge médian de la population | 52 ans | 53,6 ans | 53,6 ans | |||
Revenu total médian en 2020 des bénéficiaires d’un revenu | 36 400 $ | 34 800 $ | 34 000 $ | |||
Population déclarant appartenir à une minorité visible | 865 | 3 % | 475 | 2 % | 1 270 | 2 % |
Personnes ayant le français comme première langue officielle parlée (seulement ou le français et l’anglais) | 29 465 | 90 % | 19 185 | 62 % | 64 695 | 83 % |
Personnes ayant une connaissance du français (seulement ou du français et de l’anglais) | 30 640 | 94 % | 22 525 | 73 % | 69 660 | 89 % |
Personnes ayant une connaissance du français et de l’anglais | 18 945 | 58 % | 15 235 | 50 % | 39 465 | 50 % |
Population immigrante | 1 170 | 4 % | 515 | 2 % | 1 140 | 1 % |
Population immigrante récente (2016 à 2021) | 320 | 1 % | 100 | 0 % | 295 | 0 % |
Population de résidents non permanents | 405 | 1 % | 155 | 1 % | 410 | 1 % |
Source : Statistique Canada (2021)
Dans le comté de Madawaska, quatre des cinq principaux pays de naissance de la population immigrante récente appartiennent à la Francophonie (le Maroc, le Congo [RDC], Haïti et la France). Les États-Unis sont le premier pays d’origine de la population immigrante du comté, ce qui peut s’expliquer par la proximité de la frontière. Dans Gloucester, la France et Haïti font partie des principaux lieux de naissance de la population immigrante, alors que dans le comté de Restigouche, la population immigrante ne provient d’aucun pays de la Francophonie.
Madawaska | Restigouche | Gloucester | ||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Pays | Nombre | Proportion | Pays | Nombre | Proportion | Pays | Nombre | Proportion |
États-Unis | 65 | 20 % | Inde | 60 | 60 % | Philippines | 100 | 34 % |
Maroc | 40 | 13 % | États-Unis | 10 | 10 % | France | 60 | 20 % |
Congo (RDC) | 30 | 9 % | Philippines | 10 | 10 % | Haïti | 15 | 5 % |
Haïti | 20 | 6 % | - | - | - | Russie | 15 | 5 % |
France | 20 | 6 % | - | - | - | États-Unis | 10 | 3 % |
Total | 320 | Total | 100 | Total | 295 |
Source : Statistique Canada (2021)
Nord de l’Ontario
La population du Nord de l’Ontario présente un taux de croissance moins élevé (1,6 % pour le Nord-Est et 0,3 % pour le Nord-Ouest) que celui observé à l’échelle provinciale (5,8 %)Note de bas de page 7. Tout comme au Nouveau-Brunswick, la population du Nord de l’Ontario est un peu plus âgée (âge médian variant de 42,8 à 46,8 ans) que la population provinciale (âge médian de 41,6 ans). Toutefois, le revenu médian de la population de la région à l’étude est comparable à celui de l’ensemble de la province.
En Ontario, le français est plus présent dans le Nord-Est que dans le Nord-Ouest. Dans le Nord-Est, il s’agit de la première langue officielle parlée de 19 % de la population et près du tiers de celle-ci (30 %) est en mesure de soutenir une conversation en français. Dans le Nord-Ouest, le français est la première langue officielle parlée de seulement 2 % de la population et 7 % de celle-ci connait cette langue. Ces proportions sont respectivement de 4 % et de 11 % pour la population de l’ensemble de la province. En ce qui concerne le taux de bilinguisme (anglais et français), il est de 29 % dans le Nord-Est, de 7 % dans le Nord-Ouest et de 11 % dans l’ensemble de l’Ontario. Ces données confirment que la forte majorité de la population qui connait le français est bilingue, contrairement au Nouveau-Brunswick, où la population unilingue francophone est plus importante.
En ce qui concerne la proportion de la population qui déclare appartenir à une minorité visible, celle-ci est moindre dans le Nord de la province (de 4 % à 5 %) comparativement à l’ensemble de l’Ontario (34 %). Les personnes immigrantes représentent aussi une part considérablement moins importante de la population du Nord (de 5 % à 6 %) que de l’ensemble de la province (30 %).
En 2021, dans les deux régions à l’étude, la population immigrante récente (2016 à 2021) est deux fois moins nombreuse que la population de résidents non permanents. Au total, 4 990 personnes ayant obtenu leur résidence permanente entre 2016 et 2021 vivent dans le Nord de la province, comparativement à 9 485 résidents non permanents.
Nord-Est | Nord-Ouest | |||
---|---|---|---|---|
Données | Proportion | Données | Proportion | |
Population totale | 557 220 | 232 299 | ||
Taux de variation de la population entre 2016 et 2021 | 1,60 % | 0,30 % | ||
Âge médian de la population | 46,8 ans | 42,8 ans | ||
Revenu total médian en 2020 des bénéficiaires d’un revenu | 40 800 $ | 42 400 $ | ||
Population déclarant appartenir à une minorité visible | 22 275 | 4 % | 10 715 | 5 % |
Personnes ayant le français comme première langue officielle parlée (seulement ou le français et l’anglais) | 104 810 | 19 % | 5 145 | 2 % |
Personnes ayant une connaissance du français (seulement ou du français et de l’anglais) | 166 025 | 30 % | 16 245 | 7 % |
Personnes ayant une connaissance du français et de l’anglais | 159 815 | 29 % | 16 000 | 7 % |
Population immigrante | 29 610 | 5 % | 14 825 | 6 % |
Population immigrante récente (2011 à 2021) | 3 350 | 1 % | 1 640 | 1 % |
Population de résidents non permanents | 6 245 | 1 % | 3 240 | 1 % |
Source : Statistique Canada (2021)
Dans le Nord-Est de l’Ontario, la Côte d’Ivoire est le seul pays membre de la Francophonie qui figure parmi la liste des dix principaux pays de naissance de la population immigrante récente, le nombre de personnes immigrantes provenant de ce pays étant semblable à celui des personnes originaires des États-Unis et des Philippines. Dans le Nord-Ouest, aucun pays appartenant à la Francophonie ne figure sur cette liste.
Nord-Est | Nord-Ouest | ||||
---|---|---|---|---|---|
Pays | Nombre | Proportion | Pays | Nombre | Proportion |
Inde | 665 | 20 % | Inde | 370 | 23 % |
États-Unis | 260 | 8 % | Philippines | 240 | 15 % |
Philippines | 255 | 8 % | États-Unis | 155 | 9 % |
Côte d'Ivoire | 245 | 7 % | Syrie | 100 | 6 % |
Syrie | 210 | 6 % | Chine | 60 | 4 % |
Nigéria | 170 | 5 % | Corée du Sud | 50 | 3 % |
Chine | 110 | 3 % | Royaume-Uni | 45 | 3 % |
Royaume-Uni | 80 | 2 % | Bangladesh | 35 | 2 % |
Pakistan | 65 | 2 % | Égypte | 30 | 2 % |
Jamaïque | 50 | 1 % | Afrique du Sud | 30 | 2 % |
Total | 3 350 | Total | 1 640 |
Source : Statistique Canada (2021)
Admissions de résidents permanents francophones dans le Nord du Nouveau-Brunswick et le Nord de l’Ontario
Les mises à jour mensuelles d’IRCC permettent d’effectuer un suivi continu des admissions de résidents permanents d’expression française au paysNote de bas de page 8. Les tableaux 5 et 6 présentent le nombre d’admissions annuelles dans certaines localités du Nord du Nouveau-Brunswick et du Nord de l’Ontario, soit celles où au moins cinq personnes ont été admises lors d’une même année de la période de référence (2015 à 2023).
Dans le Nord du Nouveau-Brunswick, on note une augmentation du nombre de résidents permanents francophones admis annuellement. La croissance la plus marquée est observée dans la région d’Edmundston, où les admissions sont passées de 15 en 2015 à 310 en 2023. Après Moncton, cette région est la deuxième en importance de la province pour ce qui est du nombre d’admissions de francophones. En 2023, 11 % des résidents permanents francophones admis au Nouveau-Brunswick se sont installés dans la région d’Edmundston, 6 % dans la région de Bathurst et 2 % dans la région de Campbellton, alors que la région du Grand Moncton recensait 60 % des admissions. De 2018 à 2022, cette proportion était plutôt d’environ 70 %, ce qui témoigne d’une régionalisation croissante de l’immigration francophone au Nouveau-Brunswick, même si une majorité des personnes immigrantes s’installe toujours dans le Sud de la province.
2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Edmundston | 10 | 15 | 15 | 60 | 70 | 60 | 185 | 310 | |
Bathurst | 15 | 45 | 70 | 35 | 45 | 30 | 35 | 100 | 190 |
Campbellton | 0 | 10 | 15 | 40 | 65 | ||||
Total | 195 | 260 | 320 | 420 | 875 | 650 | 790 | 2 320 | 2 935 |
Source : IRCC, mises à jour mensuelles (2024)
Peu de localités du Nord de l’Ontario comptent annuellement plus de cinq admissions de résidents permanents francophones. On observe une certaine croissance dans les régions du Grand Sudbury, de Thunder Bay et de Timmins. L’immigration francophone dans la province reste toutefois fortement concentrée à Ottawa, à Toronto et, dans une moindre mesure, à Hamilton, ces trois villes totalisant 91 % des admissions en 2023. On compte seulement un peu plus d’un millier (1 080) d’admissions de résidents permanents francophones en dehors de ces trois villes en Ontario en 2023, sur un total de 11 905 admissions.
2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Grand Sudbury | 15 | 5 | 15 | 15 | 20 | 15 | 35 | 130 | 90 |
Kenora | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 5 | 0 |
North Bay | 0 | 5 | 0 | 0 | 5 | ||||
Sault Ste. Marie | 0 | 10 | 0 | ||||||
Thunder Bay | 10 | 10 | 25 | 15 | |||||
Timmins | 0 | 0 | 0 | 0 | 10 | 5 | |||
Total | 1 620 | 2 070 | 2 255 | 2 945 | 5 240 | 3 390 | 3 905 | 9 765 | 11 905 |
Source : IRCC, mises à jour mensuelles (2024)
Cartographie des services
À partir de l’information accessible au public et de la documentation transmise par IRCC, nous avons recensé les différents services d’établissement offerts en français et mis à la disposition des personnes immigrantes dans les deux régions à l’étude. Des appels et des entrevues avec des parties prenantes nous ont permis de compléter l’information.
Dans les tableaux suivants, il convient de noter que la langue de service est définie en fonction du mandat de l’organisme et de la capacité réelle de celui-ci à offrir activement des services en français. Ainsi, les organismes qui ont un site Web en français et en anglais, mais qui ne semblent pas en mesure d’offrir des services de qualité en français dans un délai raisonnable ne sont pas inclus dans ces tableaux.
Organisme | Mandat et langue de service | Services ou initiatives | Financement d’IRCC (oui ou non) |
---|---|---|---|
Centre francophone du Grand Toronto |
|
Services prédépart | Oui |
Collège Boréal |
|
|
Oui |
Association des francophones du Nord-Ouest de l’Ontario (AFNOO) |
|
|
Oui |
Centre de santé communautaire du Grand Sudbury |
|
|
Oui |
Société économique de l’Ontario (SÉO) |
|
|
Oui |
Le Groupe InnovaNor (Services d’établissement du Nord-Est de l’Ontario) |
|
|
Oui |
Centre multiculturel de North Bay et du District |
|
|
Oui |
Sault Community Career Centre |
|
|
Oui |
Yes Employment Services– Oui services d’emploi |
|
|
Oui |
Organisme | Mandat et langue de service | Services ou initiatives | Financement d’IRCC (oui ou non) |
---|---|---|---|
Immigration francophone Nouvelle-Écosse |
|
Services prédépart | Oui |
Collège communautaire du Nouveau-Brunswick |
|
|
Oui |
Conseil multiculturel du Nouveau-Brunswick |
|
Réseau d’établissement rural (offre de services d’aide à l’établissement à Campbellton, dans la Péninsule acadienne et dans Restigouche-Ouest) | Oui |
RDÉE Nouveau-Brunswick |
|
|
Oui |
Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick |
|
Communauté francophone accueillante du Haut-Saint-Jean | Oui |
Association multiculturelle région Chaleur inc. |
|
|
Oui |
Centre de ressources pour nouveaux arrivants au Nord-Ouest inc. |
|
|
Oui |
Association Multiculturelle d’Intégration des Nouveaux Arrivants (AMINA) |
|
|
Non |
Association Multiculturelle du Restigouche |
|
|
Non |
Comité d’accueil, d’intégration et d’établissement des nouveaux arrivants de la Péninsule acadienne |
|
|
Non |
Profil des personnes immigrantes ayant participé aux entretiens
Les 40 personnes immigrantes francophones interrogées qui vivent ou qui ont vécu dans une région rurale du Nord de l’Ontario (20) ou du Nord du Nouveau-BrunswickNote de bas de page 9 (20) présentent des caractéristiques semblables à celles de l’ensemble de la population à l’étude :
- L’échantillon est composé d’un nombre semblable de femmes (21) et d’hommes (19);
- Une majorité des personnes interrogées indiquent faire partie d’une minorité visible (24);
- Une grande majorité des personnes sont âgées de moins de 45 ans (36) et près de la moitié d’entre elles (19) ont 35 ans ou moins;
- Une majorité de personnes sont nées en Afrique subsaharienne (25), sept personnes proviennent d’Europe, six d’Afrique du Nord et deux, d’Amérique du Sud.
Le temps passé au Canada varie au sein de l’échantillon, allant de moins d’un an à dix ans. Une majorité des personnes rencontrées (31) sont toutefois arrivées au pays il y a moins de deux ans. Au moment d’effectuer l’entretien, 27 personnes avaient le statut de résident permanent, une personne était un citoyen naturalisé, 10 étaient des travailleurs temporaires et deux étaient des étudiants étrangers.
Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total | |
---|---|---|---|
Étudiant international | 1 | 1 | 2 |
Travailleur temporaire | 4 | 6 | 10 |
Résident permanent | 14 | 13 | 27 |
Citoyen naturalisé | 1 | 0 | 1 |
Les 28 personnes interrogées qui ont ou qui ont eu le statut de résident permanent ont utilisé divers programmes d’immigration. Une majorité de celles-ci a toutefois obtenu la résidence permanente au moyen d’un programme économique fédéral géré par Entrée Express (13) ou du Programme des candidats des provinces (11). Une distinction est à faire entre les deux provinces à l’étude, un plus grand nombre de personnes ayant obtenu leur résidence permanente au moyen du Programme des candidats des provinces au Nouveau-Brunswick (10) comparativement à l’Ontario (1).
Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total | |
---|---|---|---|
Programme des candidats des provinces | 10 | 1 | 11 |
Expérience canadienne ou Programme des travailleurs qualifiés | 2 | 11 | 13 |
Voie d’accès de la résidence temporaire vers la résidence permanente | 2 | 1 | 3 |
Demandeur secondaire | 1 | 0 | 1 |
Enfin, en ce qui concerne la connaissance des langues officielles, presque toutes les personnes interrogées (38) estiment avoir un niveau de compétence linguistique avancé en français. Seulement deux personnes considèrent avoir niveau de compétence intermédiaire en français, bien qu’il s’agisse de leur principale langue officielle d’usage. Pour ce qui est du niveau de compétence en anglais, une majorité des personnes composant l’échantillon estime avoir un niveau débutant (17) ou intermédiaire (19) et seulement quatre personnes déclarent avoir un niveau avancé.
Niveau de compétence | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Débutant | 7 | 10 | 17 |
Intermédiaire | 13 | 6 | 19 |
Avancé | 0 | 4 | 4 |
Analyse des entretiens
Recrutement
Le recrutement dans les régions éloignées des grands centres ne s’effectue pas de la même façon que dans les milieux urbains. Dans plusieurs localités rurales, l’immigration est encore un phénomène relativement nouveau, qui exige des capacités d’adaptation et d’innovation de la part des parties prenantes et des entreprises. Pour les personnes immigrantes, le tout début du parcours migratoire est une période où les choix à faire sont nombreux (quitter son pays, choisir un lieu d’installation, trouver le bon programme d’immigration, trouver un nouvel emploi, entreprendre des études à l’étranger, etc.) et où le niveau et les formes d’accompagnement varient d’une personne à l’autre.
Le choix d’un lieu d’installation. Quand elle pense à son lieu de destination, une personne immigrante envisage souvent le Canada, plutôt qu’une région précise, comme le Nord du Nouveau-Brunswick ou le Nord de l’Ontario. Une majorité des personnes interrogées ne connaissait pas la région dans laquelle elles se sont installées avant qu’une occasion d’emploi ou d’études se présente à elles. De fait, près des trois quarts des personnes ayant participé aux entretiens ou leurs partenaires avaient déjà une offre d’emploi avant leur arrivée. Un cas de figure commun est une personne qui postule à des postes dans plusieurs localités d’une même province ou dans tout le Canada, puis qui entreprend ses démarches d’immigration après avoir obtenu une réponse favorable d’un employeur. Le fait que le lieu de travail soit en milieu rural ou urbain n’influence pas toujours la décision de la personne. Ce constat quant à l’importance de l’emploi dans la décision de migrer rejoint la littérature sur le sujet (Gravel, Dupuis et Robidoux-Bolduc, 2020; Arcand et coll., 2021).
Les témoignages recueillis font état d’une diversité de moyens mobilisés depuis l’étranger pour obtenir un emploi au Canada, notamment les offres affichées sur le Guichet-Emplois ou d’autres sites Internet, les évènements Forum mobilité auxquels participent des employeurs, les séances virtuelles de recrutement sectoriel, les agents de recrutement à l’étranger d’employeurs canadiens, les initiatives de jumelage pilotées par des organismes communautaires francophones, l’information circulant par le bouche-à-oreille dans un réseau de connaissances ou encore sur les médias sociaux. De plus, quelques personnes rencontrées, qui se sont initialement installées dans des villes comme Toronto, Montréal ou Sudbury, ont fait face à une situation professionnelle insatisfaisante et ont migré en région après avoir obtenu un emploi qui semblait davantage correspondre à leurs attentes.
« J'ai connu ce village quand j’ai eu le contrat de travail. Avant, je n'avais aucune idée où ça se trouvait ».
« C’est [la possibilité] d’emploi qui a fait pencher [la balance] pour le Nouveau-Brunswick. J'ai aussi essayé d'autres provinces, mais je n'ai pas eu de réponses favorables ».
« S’installer dans une zone rurale? Je n’avais pas de préférence. Je savais qu’il fallait mettre les pieds au Canada avec un emploi ».
La présence d’un campus universitaire ou collégial est aussi un important facteur d’attrait pour une région. Les agents de recrutement des établissements d’enseignement et les diplômés qui sont retournés dans leur pays d’origine après leurs études contribuent à la visibilité des petites villes canadiennes à l’étranger. La bonne réputation des établissements postsecondaires canadiens est aussi un atout. Environ le quart des personnes rencontrées était actuellement ou avaient été des étudiants internationaux. Alors que certaines personnes ont soumis des demandes d’admission à plusieurs établissements situés à différents endroits au Canada et ailleurs dans le monde, d’autres ont obtenu une offre d’admission du premier coup d’un établissement d’enseignement situé en Ontario ou au Nouveau-Brunswick. Pour ces personnes, c’est davantage la recherche d’un programme de formation offert en français qui les intéressait, plutôt qu’un lieu d’installation précis. La période des études est une période propice à l’établissement de liens dans une communauté (Forest et Deschênes-Thériault, 2022; DPMR, 2020). Les deux personnes interrogées qui étaient aux études souhaitaient rester à plus long terme dans le Nord du Nouveau-Brunswick ou le Nord de l’Ontario, à condition que les occasions d’emploi soient au rendez-vous.
« J'ai toujours souhaité poursuivre mes études universitaires à l'étranger, donc du coup, j'ai essayé partout en France et au Canada. Il s'avère que c'est à Timmins au Canada que ça a marché ».
Bien que, pour certaines personnes, l’obtention d’un emploi ou d’une offre d’admission dans un programme d’études soit une raison suffisante pour choisir un lieu d’installation, d’autres ont des critères plus précis pour restreindre la zone de recherche d’un lieu d’installation. Un peu plus du tiers des personnes rencontrées a souligné l’importance du caractère bilingue et francophone de leur localité de destination. Les municipalités majoritairement francophones du Nord du Nouveau-Brunswick ou celles ayant une forte présence francophone en Ontario sont particulièrement intéressantes pour les personnes qui ont une connaissance limitée de l’anglais. Pour d’autres, le caractère bilingue d’une localité représente une occasion de rehausser leur niveau de compétence linguistique en anglais, tout en étant en mesure d’accéder à des services en français.
Le quart des personnes interrogées souhaitait précisément s’installer dans une petite communauté, loin de l’agitation et de la congestion associées aux grands centres urbains. Ces personnes étaient à la recherche d’une communauté à « taille humaine », tranquille et sécuritaire et, dans certains cas, d’une proximité avec la nature. Elles n’auraient pas accepté un emploi dans une grande ville. La recherche de Sall et Bolland (2018) aborde justement le cas de personnes qui recherchent d’abord une qualité de vie associée aux petites communautés. Plusieurs autres facteurs ont aussi été mis de l’avant pour expliquer le choix du lieu de destination, dont les suivants :
- Un volet du Programme des candidats des provinces qui correspond au profil de la personne immigrante;
- Des procédures d’immigration considérées comme moins complexes qu’au Québec;
- Des connaissances ou des membres de la famille qui habitent déjà la région;
- La présence d’une école francophone pour les enfants.
« Je préférais une province qui est bilingue ou [où on] parle français. Je peux me débrouiller un peu en anglais, mais ce n’est pas vraiment au top ».
« Je savais que je ne voulais pas rester dans une grande ville. Je voulais quelque chose d’un peu plus calme. J’étais dans une grande ville avant, avec le trafic, c’est justement pour ça que je voulais changer ».
« Le programme des travailleurs qualifiés du Nouveau-Brunswick, c'est un programme qui n’est pas compliqué. J’avais regardé le Québec, mais c’était trop complexe ».
« J'ai mon frère ici. Ça fait que déjà, j'ai de la famille. J'avais quelqu'un qui pouvait m'accueillir, m'orienter et me donner pas mal de conseils ».
Destination Canada et les autres missions de recrutement. Le quart des personnes rencontrées, principalement des personnes de la France ou de l’Afrique du Nord, a participé à un évènement Destination Canada Forum Mobilité. Ce type d’évènement est considéré comme étant très utile pour en apprendre davantage sur les procédures d’immigration, les possibilités d’emploi et les spécificités des différentes provinces, en plus d’être une occasion d’établir un premier contact avec des organismes d’établissement et des employeurs éventuels. Quelques-unes des personnes rencontrées ont même obtenu une offre d’emploi à la suite de leur participation à un évènement Destination Canada Forum Mobilité. Toutefois, pour les personnes d’Afrique subsaharienne, un tel évènement n’est pas accessible, puisqu’il n’a lieu qu’à l’extérieur de leur région. De plus, des personnes ont souligné une certaine incohérence entre les qualifications professionnelles exigées pour participer à ce type d’évènement et le faible niveau de compétences demandé pour plusieurs offres d’emploi affichées. Bien que certaines personnes aient fait mention d’une réalité quelque peu embellie lors des présentations effectuées à Destination Canada, ce problème semble moins important qu’il était il y a quelques années. Il s’agissait d’un enjeu majeur mis en lumière dans la recherche de Traisnel et coll. (2020).
En plus de Destination Canada, plusieurs autres activités de recrutement, en personne et en ligne, sont menées tout au long de l’année par le gouvernement fédéral, les provinces ou les organismes communautaires. À titre d’exemple, les séances d’information en ligne sur différents métiers organisées par le gouvernement du Nouveau-Brunswick ont été citées à plusieurs reprises lors des entretiens. Les séances portant sur des secteurs d’emploi précis, comme les soins infirmiers, ont l’avantage de proposer une information plus adaptée aux profils des personnes qui y participent et de faciliter la mise en relation avec des employeurs éventuels.
« C'était vraiment chouette qu'on ait les différentes provinces qui soient là, ça permet d'avoir une bonne vision du pays et de réfléchir à ses options ».
« Il faudrait un meilleur arrimage entre les offres d’emploi affichées et le niveau de formation demandé. On cherche des personnes [hautement] qualifiées et beaucoup de postes affichés demandent un niveau de compétences moindre ».
Les visites exploratoires. Le tiers des personnes rencontrées qui se sont installées au Nouveau-Brunswick a participé à une visite exploratoire, une exigence de l’un des volets du Programme des candidats de la province. Ce type de visite est l’occasion de déterminer si la province convient réellement aux attentes, de rencontrer des employeurs éventuels et d’explorer différentes localités. Même si cette visite ajoute une étape couteuse au processus d’immigration, une majorité de personnes y ayant pris part considère qu’elle leur a permis de donner à leur projet migratoire des assises plus solides et de confirmer leur intérêt pour la région. L’étude de Deschênes-Thériault (2022) sur le parcours d’intégration francophone dans l’Ouest canadien avait justement mis en évidence que les visites exploratoires au Manitoba étaient une bonne pratique.
Les personnes immigrantes. Les personnes immigrantes peuvent aussi jouer un rôle d’ambassadeur de leur communauté d’accueil auprès de leurs compatriotes. En partageant leur expérience avec les membres de leurs réseaux, elles peuvent susciter un intérêt chez d’autres personnes qui n’avaient pas encore eu l’idée de migrer au Canada. Ce constat rejoint la littérature qui porte sur l’influence des réseaux sur les migrations (Massey et coll., 1998; Krissman, 2005). Ainsi, quelques-unes des personnes rencontrées ont postulé à des offres d’emploi que des personnes de leur région d’origine vivant en Ontario ou au Nouveau-Brunswick avaient diffusées sur les réseaux sociaux.
Le recrutement dans la perspective des entreprises et des parties prenantes. Au cours des dernières années, le bassin de population locale ne suffisant plus à combler les besoins en main-d’œuvre de certaines entreprises canadiennes, celles-ci se sont tournées pour la première fois vers le recrutement à l’international. De plus, des localités rurales ayant peu d’historique en matière d’immigration doivent souvent déployer des efforts supplémentaires pour faire connaitre les occasions d’emploi qu’elles peuvent offrir. Les entretiens ont révélé que d’importants efforts restent à faire pour réellement régionaliser l’immigration au Canada. À titre d’exemple, des parties prenantes ont mentionné que des partenaires en immigration francophones établis dans un centre urbain du sud de la province connaissent mal les réalités des régions rurales du Nord de l’Ontario et du Nord du Nouveau-Brunswick de même que les occasions d’emploi offertes dans ces régions. Par conséquent, même si leur mandat a une portée provinciale ou nationale, ces partenaires abordent peu – ou n’abordent pas – les possibilités d’immigration à l’extérieur des centres urbains lorsqu’ils participent à des activités de recrutement à l’international ou lorsque des personnes immigrantes les contactent.
De plus, le recrutement à l’étranger peut s’avérer particulièrement complexe pour des entreprises peu familières avec les bassins de recrutement à l’international, les procédures d’immigration et les manières d’accompagner les personnes recrutées. Au Nouveau-Brunswick, le gouvernement provincial offre un accompagnement aux entreprises par l’entremise de Travail NB, alors que dans le Nord de l’Ontario, la SÉO est le principal organisme qui offre du soutien aux entreprises désireuses de recruter à l’étranger au bénéfice des communautés francophones. À cet effet, la SÉO a mis sur pied un système de jumelage en tenant à jour des listes de postes disponibles et de candidatures possibles. Lorsqu’un poste correspond à une candidature, l’organisme met en contact la personne à la recherche d’un emploi et l’employeur et offre un accompagnement à ces derniers pour faciliter le placement, puis l’établissement. Au moins cinq personnes immigrantes interrogées ont obtenu un emploi grâce à l’appui de la SÉO. Sans ce service de jumelage, elles n’auraient probablement pas envisagé d'immigrer dans le nord de la province, n’étant pas au fait des occasions d’emploi offertes dans la région.
« J’avais à peine commencé mes démarches de recherche d’emploi. C’est la SÉO qui m’a dit qu’il y avait un employeur dans mon domaine qui est en train de chercher des candidats. Sinon je n’en aurais pas eu connaissance ».
En plus d’une bonne adéquation entre le profil professionnel et le poste à pourvoir, un représentant d’une entreprise du Nord du Nouveau-Brunswick a aussi insisté sur la correspondance entre le profil linguistique des personnes recrutées et celui de la communauté d’accueil. Les activités de recrutement de cette entreprise, située dans une municipalité à forte majorité francophone, ciblent particulièrement des pays de l’Afrique francophone afin de favoriser la réussite de l’intégration des nouveaux arrivants au sein de la communauté d’accueil et, par conséquent, d’accroitre le potentiel de rétention de ces personnes. Les entretiens menés avec les parties prenantes ont aussi permis de cerner plusieurs autres éléments à considérer dans les activités de recrutement en contexte rural, dont les suivants :
- Tenir compte des particularités propres à chaque région (historique d’immigration, principales industries, etc.) pour offrir un accompagnement adéquat et cibler les bons profils;
- Travailler de près avec les entreprises locales pour faire connaitre à ces dernières les possibilités de recrutement à l’international et pour bien les accompagner dans le processus;
- Adopter une approche personnalisée en prenant le temps de bien connaitre le profil professionnel d’une personne avant de jumeler celle-ci à des offres d’emploi;
- Veiller à ce que les personnes recrutées soient bien conscientes de l’environnement rural dans lequel elles viennent s’établir;
- Tenter de joindre les futurs résidents permanents alors qu’ils en sont au début de leur processus d’immigration et qu’ils n’ont pas encore fait un choix définitif sur leur lieu d’installation afin de leur faire connaitre les possibilités qui existent hors des grands centres;
- Considérer le contexte familial de la personne recrutée (transmettre à cette dernière de l’information sur le système scolaire, aider son partenaire à trouver un emploi, etc.);
- Prévoir davantage d’évènements virtuels de recrutement (webinaires, fiches informatives, etc.) pour joindre un public qui habite à l’extérieur des grandes villes et en Afrique subsaharienne;
- Participer à des foires de l’emploi dans différentes villes canadiennes pour promouvoir les possibilités de migrations secondaires.
Récit type fictif du recrutement et de la préparation de l’arrivée – Nord du Nouveau-Brunswick
Huguette n’est pas satisfaite de sa situation personnelle et professionnelle dans son pays. Sa cousine, qui habite à Toronto, lui a parlé du Canada comme d’un endroit où il y a de nombreuses possibilités d’emploi. Elle ne sait trop par où commencer et effectue des recherches sur Internet. Pendant plusieurs mois, elle postule à des dizaines d’offres d’emploi, mais n’obtient pas de réponse. Elle s’inscrit alors à un groupe Facebook sur l’immigration au Canada et voit passer une publication concernant une offre dans une usine au Nouveau-Brunswick. Elle ne connait pas cet endroit, mais postule quand même. Deux jours plus tard, l’employeur la contacte et l’invite à passer un entretien. Elle effectue alors des recherches sur la ville où est située l’usine et découvre que c’est une très petite localité. Cela ne la dérange pas, car elle se dit qu’obtenir cet emploi est sa meilleure chance de venir au Canada. Son employeur participe à un programme qui permet à Huguette d’avoir un permis de travail en attendant que sa demande de résidence permanente soit traitée. Son employeur l’informe qu’une personne viendra la chercher à l’aéroport à son arrivée et l’appuiera dans sa recherche d’un logement.
Période prédépart
Après avoir décidé de migrer et avoir entamé les procédures d’immigration, les personnes doivent préparer leur départ de leur pays et leur arrivée au Canada. Il ressort des entretiens que l’accès à une information de qualité est d’une importance capitale à cette étape du parcours afin d’éviter les faux pas qui peuvent avoir des conséquences à plus long terme. Les expériences varient, allant des personnes qui s’informent dans les moindres détails auprès d’une diversité de sources à celles qui font peu de recherche, la majorité des personnes immigrante se situant entre ces deux pôles.
De manière générale, les personnes interrogées qui ont bénéficié de conseils de la part de personnes dont le travail consiste à appuyer la préparation à l’établissement – personnel des services prédépart, des services d’établissement et des employeurs – ont vécu des expériences plus positives. Les personnes mal informées ont vécu davantage de déceptions ou de stress à l’arrivée, certains projets migratoires ayant même été mis en péril. À titre d’exemple, des personnes qui n’avaient pas bien saisi le caractère rural de leur lieu d’installation ont vécu difficilement leur arrivée. Parmi les autres principaux sujets mentionnés lors des entretiens et à propos desquels les personnes interrogées auraient aimé avoir plus d’information, on note l’état du transport en commun en région, l’accès aux places en garderie, la recherche d’un logement, le processus de reconnaissance des acquis, les délais associés aux procédures d’immigration et le climat au Canada.
Les sources d’information varient, les personnes interrogées profitant souvent de plusieurs sources mentionnées ci-après.
Les sources d’information informelles avant l’arrivée. Une vaste majorité des personnes rencontrées affirment s’être informées à la fois auprès de sources officielles (documentation gouvernementale, organismes communautaires, etc.) et de sources informelles pour préparer leur arrivée au Canada, ce qui rejoint la littérature sur le sujet (Traisnel et coll, 2020). Les personnes qui ont de la famille ou des connaissances au Canada se tournent souvent vers celles-ci pour obtenir des conseils et poser des questions. Elles apprécient ces échanges sensibles avec des personnes qui ont effectué le même parcours que celui qu’elles s’apprêtent à entreprendre.
En outre, un peu plus du tiers des personnes rencontrées a cherché de l’information auprès de groupes en ligne, notamment sur Facebook et WhatsApp. Les entretiens ont révélé l’existence d’une diversité de groupes sur les réseaux sociaux, certains rassemblant des membres ayant en commun l’un ou l’autre des éléments suivants : un lieu d’origine, une destination, une langue, un programme d’immigration ou encore un employeur (à titre d’exemples, le groupe des Guinéens au Nouveau-Brunswick, le groupe des personnes postulant au Programme des candidats de l’Ontario, etc.). Ces groupes sont généralement considérés comme étant utiles pour trouver rapidement des réponses, pour obtenir des renseignements sur divers sujets sur lesquels on n’aurait pas pensé s’informer et même pour établir des contacts au Canada avant l’arrivée. Toutefois, des témoignages révèlent qu’il peut parfois être difficile de distinguer ce qui s’applique à tous et ce qui relève du cas particulier ou de déterminer les renseignements qui sont erronés. À ce sujet, une observation échelonnée sur plusieurs mois du contenu publié dans quatre différents groupes Facebook pour les personnes immigrantes a permis de constater que l’information diffusée est de qualité variable et qu’elle peut parfois induire en erreur (Deschênes-Thériault, 2022). L’Association des francophones du Nord-Ouest de l’Ontario (AFNOO) a développé une bonne pratique en la matière. Des membres de l’équipe de l’organisme sont membres de différents groupes Facebook et ils contactent des personnes à la recherche d’information pour s’assurer que ces dernières ont bien obtenu les bons renseignements.
« J'ai eu des informations d’amis qui étaient déjà installés au Canada, qui avaient des connaissances sur la vie au Nouveau-Brunswick et qui partageaient leur expérience, ce qu'ils avaient entendu, ce qui était bien ou pas ».
« Je dirais que j’ai lu trop d’information. Il y a beaucoup de mauvaises informations aussi sur les réseaux sociaux. Quand je cherchais, il y a une personne qui me donnait une information sur la résidence permanente et une autre me disait autre chose ».
Les sources d’information officielles. Pouvoir accéder à de l’information provenant de sources officielles, gouvernementales ou communautaires, permet de confirmer les renseignements recueillis dans le cadre de recherches personnelles. Les personnes qui ont été en contact direct avec un organisme communautaire ou le service d’accueil d’un établissement d’enseignement postsecondaire ont habituellement vécu des expériences plus positives en ce qui a trait à la préparation de leur arrivée.
Les personnes qui s’établissent dans le Nord de l’Ontario ont accès à un accompagnement offert par l’AFNOO (Nord-Ouest) ou la SÉO. L’AFNOO semble particulièrement efficace, puisque dès que l’organisme est informé de l’arrivée imminente d’une personne immigrante, il prend contact avec celle-ci, par courriel d’abord, puis par téléphone ou visioconférence, afin de veiller à ce qu’elle reçoive toute l’information nécessaire avant son arrivée. Les personnes qui ont bénéficié de cet appui considèrent que celui-ci est très utile pour bien se préparer, en plus d’être sécurisant.
« Je pensais que c’était la même chose partout, que Timmins, ce serait comme à Toronto ou à Montréal. Quand je suis arrivée, j’étais super sous le choc ».
Les employeurs. Comme mentionné précédemment, les trois quarts des personnes de notre échantillon avaient déjà un emploi avant leur arrivée. Le niveau d’accompagnement offert par les employeurs aux personnes immigrantes avant leur arrivée au Canada varie d’un cas à l’autre. Certains employeurs ont des employés qui se consacrent à l’accompagnement des personnes recrutées à l’étranger. Ils offrent alors une gamme de services, incluant des webinaires, des rencontres préparatoires, des documents informatifs, l’accès à un consultant en immigration et l’organisation logistique du déplacement. D’autres employeurs aiguillent les personnes recrutées vers les ressources disponibles dans la communauté et répondent aux questions au besoin. Enfin, quelques employeurs n’offrent aucun appui particulier et limitent l’échange d’information aux questions relatives au travail.
« Mon employeur a mis sur pied une équipe qui est chargée de faire l'accueil de leurs employés recrutés à l'étranger. J’ai bénéficié d'un accompagnement avec ma famille depuis mon pays jusqu'au Nouveau-Brunswick. La personne responsable s'est chargée de nous expliquer un peu la vie au Nouveau-Brunswick, les difficultés qu'on pourrait rencontrer, bref tout ce qu'on devait savoir avant d'arriver ».
« Mon employeur nous a préparés. On savait bien que là où on partait travailler, ce n'était pas très animé et que c’était assez éloigné des grandes villes. Ma boss nous a bien préparés psychologiquement ».
« L’employeur m’a offert un emploi, qui me permettait d’avoir une désignation. Les courriels qu’ils m’ont envoyés, c’était concernant le travail et la date que je devais commencer à travailler. C’est tout ».
Les services prédépart. Les services prédépart (Connexions francophones) permettent aux personnes d’avoir accès à des renseignements, à des formations et à des outils avant leur arrivée au Canada pour bien se préparer. Au sein de notre échantillon, le nombre de personnes ayant eu accès à ces services varie largement, et ce, en fonction du statut d’immigration et du lieu d’installation. Seul le quart des personnes interrogées a eu accès à des services prédépart. D’une part, ces services ne sont toujours pas disponibles aux personnes qui arrivent au Canada avec un permis temporaire et, d’autre part, plus de personnes ont bénéficié de ces services en Ontario qu’au Nouveau-Brunswick et ont indiqué avoir vécu une expérience plus positive.
En Ontario, les services prédépart génèrent des retombées concrètes, qui ont été soulignées lors des entretiens : décrocher un emploi grâce à la transmission d’offres d’emploi, être référé à un organisme à même d’appuyer la recherche d’un logement, avoir effectué des démarches administratives avant l’arrivée, etc. Toutefois, des personnes arrivées récemment ont mentionné que l’information reçue était trop générale pour être véritablement utile et qu’elles auraient préféré que le contenu soit plus adapté au Nord de l’Ontario. Les parties prenantes consultées regrettent que l’organisme responsable de ces services ne collabore pas avec elles et n’offre pas de renseignements adaptés au contexte du Nord.
Une grande majorité des personnes rencontrées du Nouveau-Brunswick n’était pas au courant de l’existence des services prédépart et celles qui les ont utilisés auraient préféré avoir de l’information portant plus particulièrement sur leur lieu d’installation. Les ateliers offerts concernaient plutôt la vie en général au Canada et traitaient moins des réalités des régions rurales, comme le Nord du Nouveau-Brunswick. Dans une étude portant sur l’immigration francophone aux Territoires du Nord-Ouest (Deschênes-Thériault et Bacher, 2021), un même constat de méconnaissance des services prédépart et d’information peu adaptée au contexte local s’est dégagé.
« J'ai assisté à pratiquement toutes les sessions disponibles. Une personne de Connexion francophone m’a [transmis] une offre d’emploi qui pourrait m’intéresser en fonction de mon profil et c’est comme ça que j’ai obtenu mon emploi actuel ».
« Pour être honnête, je n’ai pas trouvé pertinentes les informations de Connexion francophone. Ce n’était pas vraiment d’une aide tangible ».
« C’étaient des informations qui étaient intéressantes, mais j'ai envie de dire, si on prend un petit peu de temps pour chercher par nous-mêmes, on peut trouver ces informations. J’aurais aimé avoir des informations sur Edmundston, comme comment trouver un logement, comment se déplacer, etc. ».
« Pour moi, un service qui n’est pas local, ça ne sert à rien ».
Période d’accueil et d’établissement
Lorsqu’on aborde la période d’accueil, les personnes interrogées ressentent régulièrement de vives émotions. Ces émotions renvoient parfois à un étonnement heureux face à la mobilisation efficace et chaleureuse de personnes à l’égard de leur propre bienêtre. Elles renvoient également à des souvenirs douloureux lorsque les tâches à accomplir étaient semées d’obstacles ou lorsqu’elles étaient même difficiles à cerner.
L’hospitalité. Les personnes interrogées reconnaissent très majoritairement le sens de l’hospitalité de la population de la localité où ils se sont installés. Cela dit, elles ont souvent de la difficulté à préciser la provenance du soutien offert, ne sachant pas si celui-ci est lié à la gouvernance officielle de l’établissement, à l’intérêt de l’employeur ou au désir de la population locale d’aider (Belkhodja, 2023). Malgré ce flou, le dévouement des membres du personnel des services d’établissement est sans nul doute à l’origine de ce témoignage d’hospitalité, puisque ces derniers abordent leur métier avec une éthique de soin et mobilisent des personnes de la communauté pour aider à orchestrer un accueil humanisant.
Alors que les localités situées à proximité de petites villes dotées d’établissements postsecondaires ont déjà des communautés ethnoculturelles, d’autres ont reçu leurs premières familles immigrantes au cours des dernières années. La présence de ces communautés ethnoculturelles contribue à l’hospitalité de la localité. Toutefois, même avec une présence limitée de ces communautés, plusieurs récits témoignent d’interventions volontaires, officielles et informelles, qui contribuent à l’hospitalité de plusieurs localités.
« On avait des amis qui étaient venus avant nous. Il s’était acheté une voiture, et puis, on s’est arrangé entre nous pour faire les courses et aller au travail. Maintenant, on a une voiture, et c’est nous qui faisons ça pour ceux qui arrivent ».
« J’ai été surprise par le fait que les gens n’étaient pas habitués à voir une Africaine ou une noire. À mon arrivée, il y a des gens qui essayaient de savoir d’où je viens. J’attirais la curiosité de gens […]. Je ne l’ai pas mal vécu. Ils avaient je dirais une bonne curiosité, parce qu'ils avaient envie de me parler ».
« Je ne connaissais personne et j’ai été très bien accueilli par la population. À vrai dire, ça m’a surpris : tu pars d’un pays et tu ne sais pas comment ça va être. Puis, j’ai une femme, des enfants. Mais la population de [nom de la localité], pour les nouveaux arrivants, c’est le meilleur endroit où être. Ils m’ont tout donné ».
L’aéroport. Les premières heures en sol canadien comportent déjà des défis particuliers, puisque la distance séparant le logement de l’aéroport international est souvent très grande et non desservie par du transport collectif. Dans le Nord de l’Ontario, des localités rurales éloignées peuvent être situées jusqu’à près d’une douzaine d’heures de route de l’aéroport. Dans ces cas de figure, une majorité des personnes interrogées a été accueillies à l’aéroport par un service d’établissement ou un employeur. Au Nouveau-Brunswick, les services d’établissement interrogés étaient moins impliqués à l’étape de l’arrivée à l’aéroport, principalement en raison d’un manque de ressources. Plusieurs fournisseurs de services au Nouveau-Brunswick n’ont accès à aucune navette pour transporter des gens depuis l’aéroport. En Ontario, l’accès à une deuxième navette permettrait à l’AFNOO d’aller chercher davantage de personnes, notamment celles qui atterrissent à Winnipeg.
Le logement. Les expériences concernant la recherche d’un logement varient également beaucoup. Au moins le tiers des personnes interrogées a indiqué avoir reçu un appui de leur employeur pour trouver un logement avant leur arrivée. Certains employeurs, comme Irving au Nouveau-Brunswick, ont des logements réservés aux nouveaux arrivants, qui y demeurent au moins quelques mois. Les personnes qui ont pu bénéficier de ce type d’appui étaient reconnaissantes. D’autre part, quelques personnes détenant la résidence permanente ont pu bénéficier d’un accompagnement efficace de la part de leur service d’établissement. Tout de même, environ la moitié des personnes interrogées a vécu un défi et du stress au moment de chercher un premier logement ou d’emménager dans celui-ci : cout trop élevé, rareté, logement inadéquat, etc. En outre, pour une majorité de localités, l’accès au logement abordable semble avoir diminué au cours des dernières années. Les personnes arrivées plus récemment ont donc vécu davantage de stress à cet égard, soit durant leurs premiers jours au Canada, soit au moment de quitter leur premier logement temporaire.
« Notre contrat de travail est venu avec le logement. Tout était prêt. L’appartement était déjà meublé ».
« Pour nous qui arrivons, c’est difficile se loger. Il n’y a pas beaucoup d’appartements et de maisons disponibles, et en plus, c’est beaucoup de bouche-à-oreille ».
Les grandes entreprises dont les besoins en main-d’œuvre provenant de l’étranger sont importants innovent parfois en matière de logement en ayant recours, par exemple, aux solutions suivantes :
- Signer des ententes pluriannuelles avec des promoteurs immobiliers pour s’engager à louer un certain nombre d’appartements. De telles ententes permettent au promoteur d’avoir accès à des fonds tout en garantissant l’accès à des logements aux employés de l’entreprise;
- Acheter des propriétés qui pourraient contenir plusieurs logements;
- Construire de petites maisons et signer des contrats de location avec option d’achat avec les nouveaux arrivants. Si une personne décide d’acheter la maison, l’argent versé en loyer peut servir de mise de fonds.
Les services d’établissement. Au Nouveau-Brunswick, au moins quatre services d’établissement couvrent une partie des grandes régions étudiées, soit Restigouche-Ouest (l’Amina), la Péninsule acadienne (le Comité d’accueil, d’intégration et d’établissement des nouveaux arrivants de la Péninsule acadienne [CAIENA]), la région Chaleur (l’Association multiculturelle région Chaleur [AMRC]) et le Madawaska (le Centre de ressources pour nouveaux arrivants au Nord-Ouest [CRNA-NO]). Alors que le CRNA-NO et l’AMRC existent depuis plusieurs années et disposent d’une équipe plus considérable, quoiqu’insuffisante par rapport aux besoins, les deux autres services se sont structurés plus récemment, en particulier l’Amina, qui n’existe officiellement que depuis 2022. Le Nord de l’Ontario, qui couvre un territoire de plus de 800 000 km2, ne compte que deux services d’établissement (l’AFNOO et les Services d’établissement du Nord-Est de l’Ontario), qui se révèlent insuffisants pour couvrir toutes les localités de cette région.
Rappelons que notre échantillon a surtout été recruté au moyen de listes d’envoi de services d’établissement et, de ce fait, nous avons parlé à peu de personnes n’ayant bénéficié d’aucun service. Grâce aux propos recueillis durant nos entretiens, il est facile de constater que la collaboration entre les différentes parties prenantes et la présence d’un service d’établissement durant les premières démarches des personnes nouvellement arrivées semblent importantes et efficaces, surtout pour les personnes arrivées récemment. En outre, la petite taille des localités fait en sorte qu’il semble plus facile d’identifier les nouveaux arrivants, en amont ou en aval de l’arrivée de ces derniers.
Tout de même, en Ontario comme au Nouveau-Brunswick, les ressources disponibles ne permettent pas d’offrir des services de qualité à l’ensemble des nouveaux arrivants. L’arrivée croissante de personnes immigrantes au cours des dernières années et la dépendance de certains employeurs envers ces personnes ont certes contribué à une structuration des parties prenantes et à une meilleure collaboration de celles-ci. Il n’empêche que plusieurs localités ne peuvent toujours pas compter sur des services d’établissement et que, dans certaines localités, des services d’établissements doivent se contenter d’offrir des services de moindre qualité ou une gamme réduite de services. Les entretiens montrent un manque de ressources. Par conséquent, les organismes qui souffrent d’un tel manque de ressources sont aux prises avec des problèmes d’éthique et d’excellence. Ces organismes :
- Doivent réduire les suivis, c’est-à-dire que leur personnel s’occupe des « nouveaux », mais ne peut faire de suivis après quelques semaines suivant l’installation;
- Ne peuvent répondre à tous les besoins des nouveaux arrivants en matière de transport lors de l’arrivée de ces derniers à l’aéroport, parce qu’ils n’ont pas les ressources nécessaires ou ne disposent pas d’une navette;
- Ne peuvent offrir des services dans certaines localités trop éloignées (par exemple celles situées à sept heures de route de leur siège social), même si celles-ci font partie, en théorie, de leur territoire.
Pour le personnel du Centre de ressources pour nouveaux arrivants au Nord-Ouest, dont le mandat consiste à offrir des services aux personnes réfugiées, il est difficile d’accompagner ces personnes dans leurs démarches de réinstallation, qui sont complexes, tout en ne pouvant pas offrir à ces dernières une gamme de ressources appropriées.
La résidence temporaire. Dans le cadre de notre étude et à la lecture d’autres recherches (GGI, 2023a, GGI, 2023b, Forest, 2022), nous avons observé une tolérance croissante à l’égard de l’appui à l’établissement de personnes détenant le statut de résidence temporaire, et ce, non seulement de la part des directions des services d’établissement, mais aussi d’IRCC. De manière générale, les parties prenantes soulignent la dépendance de leur localité à l’égard du recrutement à l’international de travailleurs étrangers, temporaires ou permanents. Elles notent également que, si l’établissement de ces personnes se déroule bien et si l’emploi convient à ces dernières, elles chercheront à s’établir en permanence dans la région. Dans les localités où des organismes communautaires sont présents, on constate une collaboration accrue de ces organismes avec des employeurs, mais aussi parfois avec la municipalité et des personnes bénévoles, qui favorisent l’accueil d’une manière de plus en plus efficace, sécurisante et conviviale.
Les employeurs. Comme suggéré précédemment, plusieurs employeurs considèrent qu’ils dépendent des nouveaux arrivants pour développer leur entreprise, pour maintenir leurs activités et en améliorer le rendement. C’est pourquoi ils s’investissent de plus en plus dans le recrutement, la préparation à l’établissement et l’installation de leur personnel formé de nouveaux arrivants. Conséquemment, bien que les services d’établissement demeurent essentiels, ils ne sont plus nécessairement la première ou la seule ressource des nouveaux arrivants, contrairement à ce qui était observé dans la littérature il y a plus de cinq ans (Kamano, Benimmas et Côté, 2020; Traisnel et coll., 2019). Au Nouveau-Brunswick, le Projet pilote sur les travailleurs critiques a mis en évidence cinq employeurs participants qui devaient démontrer une « capacité à fournir un soutien accru aux employés en matière d'établissement » (gouvernement du N.-B., s.d.). Nos entretiens avec du personnel responsable des démarches migratoires et d’installation et avec de nouveaux arrivants embauchés par ces entreprises ont confirmé l’efficacité de ce programme, du moins à court et à moyen termes.
En ce qui concerne l’Ontario et les autres employeurs du Nouveau-Brunswick, l’implication des entreprises varie largement. Trop souvent, aux dires de parties prenantes responsables des services d’établissement interrogées, l’employeur néglige de transmettre les coordonnées de la personne recrutée à l’international au service d’établissement avant l’arrivée de cette dernière. Si nombre de personnes immigrantes parviennent à se débrouiller toutes seules, les témoignages montrent bien que certaines décisions auraient gagné à être mieux informées.
« [Parfois] on apprend la journée même qu’une personne arrive! Alors personne n’est là pour le transport, le logement, l’accueil à l’aéroport ou la visite de la ville. Rien de ça n’est pris en charge. L’employeur n’est pas conscient qu’il faut faire ça quand tu fais venir une personne d’un autre pays ».
Récit type fictif d’un accueil sans problèmes majeurs – Nord-Ouest de l’Ontario
Quelques semaines avant de mettre les pieds en Ontario, Augustin participe à une rencontre virtuelle avec des personnes représentant la SÉO, son service d’établissement régional et son employeur, pour organiser avec lui son installation. Qui ira le chercher à l’aéroport? Qui l’aidera dans ses démarches administratives? Quels meubles aimerait-il avoir? Qui l’amènera au travail le premier jour? Augustin arrive à l’aéroport de Toronto le 4 novembre 2022. Il est accueilli par un collègue de travail qui lui offre des vêtements pour affronter les températures sous zéro qui l’attendent. Ce collègue le conduit pendant près de dix heures et aborde plusieurs réalités qui l’attendent. Augustin a du mal à bien comprendre, tout est si différent. Il arrive dans un logement temporaire que son employeur lui a déniché et qu’il pourra quitter quand il le souhaitera. Il aimerait trouver un logement plus grand, pour accueillir sa femme et ses enfants qui, si tout va bien, arriveront dans quelques mois. Lors des premiers jours, Augustin reçoit la visite de personnes qui lui offrent des objets utiles à son quotidien et qui le guident dans ses premières démarches. Il ne sait trop quelles organisations les envoient, mais leur présence est réconfortante. Alors qu’il est accompagné pour faire sa première épicerie, il comprend que la distance est grande entre son logement et son lieu de travail ou les commerces. Il avait vaguement lu qu’il n’y aurait pas de transport en commun, mais il réalise plus concrètement ce que ça implique, notamment le froid à affronter. Il se dit qu’il devra rapidement se trouver une voiture, mais qu’il n’en a peut-être pas les moyens.
Insertion économique
Sur le plan du parcours d’insertion économique, les personnes consultées peuvent être réparties en deux grandes catégories, quelques-unes de ces dernières s’étant retrouvées successivement dans ces deux catégories (en raison de mises à pied ou de décisions personnelles) :
- Les personnes qui ont été recrutées à l’étranger (environ les trois quarts de l’échantillon);
- Les personnes dont la recherche d’emploi s’est effectuée ou s’effectue sur place (près de la moitié de l’échantillon).
L’accueil en entreprise. Plus de la moitié des personnes consultées disent être satisfaites des efforts déployés par leur employeur afin de faciliter leur accueil au sein de l’entreprise, certaines précisant même que l’accompagnement offert avait dépassé leurs attentes. Un employeur interrogé a cité une pratique exemplaire mise en place pour favoriser l’insertion en milieu de travail des employés provenant de l’étranger : des séances de formation, qui couvrent des sujets tels que les différents codes sociaux, les attentes, la ponctualité et les relations de travail, sont offertes en partenariat avec un organisme multiculturel local.
À l’inverse, au moins sept personnes établies au Nouveau-Brunswick et deux en Ontario ont mentionné avoir eu de la difficulté à s’adapter, ce qui s’expliquerait, entre autres, par le manque de soutien offert par l’employeur et des écarts entre les conditions de travail et l’entente conclue. Pour pallier cette situation, la SÉO propose d’accompagner les employeurs au moyen d’ateliers et de formations abordant notamment l’adaptation au milieu de travail des personnes immigrantes et les compétences culturelles. De même, bien que les démarches concernant l’insertion en entreprise des nouveaux arrivants ne fassent pas partie de la mission des organisations chargées de l’accueil et de l’intégration de ces personnes, l’AFNOO organise des séances de sensibilisation aux relations et à la communication interculturelles.
« Au niveau de l’entreprise, les dirigeants ont été très accueillants. Même les collègues. Certains me proposaient d’aller à la pêche, de faire des balades, de me faire goûter des spécialités de la région, de manger de l’orignal pour la première fois ».
Les recours en cas de situations problématiques. Lorsqu’un nouvel arrivant juge que ses conditions de travail ne respectent pas son contrat de travail ou les normes d’emploi en vigueur dans sa province, il peut déposer une plainte à IRCC. Or, en raison de la taille des milieux ruraux francophones, il est difficile, voire impossible, d’assurer la confidentialité des dossiers traités. Les propos recueillis lors d’un entretien ont bien démontré l’ampleur de la détresse que peut causer une telle situation et la perte de confiance à l’égard du système de traitement des plaintes qui en résulte. La SÉO, qui est parfois appelée à intervenir en cas de situations problématiques, observe que les employeurs qui la contactent sont prêts à s’investir pour régler le conflit et maintenir en poste le nouvel arrivant.
La reconnaissance des acquis et des compétences. Au moins le quart des personnes consultées occupent un emploi qui ne correspond pas à leur domaine professionnel de compétences ou pour lequel elles sont surqualifiées. Il s’agit d’un enjeu qui semble particulièrement toucher les personnes qui travaillent dans le domaine de la santé. Cette situation découle en grande partie de la difficulté à faire reconnaitre l’expérience et la formation acquises à l’étranger et à en évaluer correctement l’équivalence.
D’une part, l’interdiction de suivre des formations qui s’applique aux personnes détentrices d’un permis de travail temporaire est une entrave majeure à la reconnaissance des acquis. D’autre part, les nouveaux arrivants à qui il est permis de suivre des formations s’étonnent des couts, du temps et de l’effort nécessaires pour faire valoir les diplômes acquis à l’étranger. Certains doivent chercher à obtenir les diplômes manquants, et ce, à leurs frais, tout en continuant de subvenir aux besoins de leur famille, ce qui les met dans une situation financière difficile. Selon un participant, les subventions offertes par le gouvernement ne seraient pas suffisantes pour couvrir la totalité des couts liés à la reconnaissance des acquis et des compétences.
« [L’Association des infirmières et] infirmiers du Nouveau-Brunswick ne nous donne pas la possibilité d’effectuer un retour facile aux études […]. [Étudier en] soins infirmiers sur deux ans à temps partiel, travailler à temps plein et s’occuper d’une famille, c’est vraiment pas easy. Donc on a commencé à se poser des questions : "Est-ce qu’on va vraiment continuer ici [au Nouveau-Brunswick]?" ».
« Je considérais ne plus avoir de chance d’évoluer professionnellement à Edmundston. J’avais un emploi, mais ce n’était pas équivalent à mon expérience ni à mes attentes ».
« J'ai comme 20 ans d'expérience en France, mais mes diplômes n’étaient même pas reconnus. Il a fallu que je fasse un processus de reconnaissance des diplômes avec le Collège et [que je passe] l’examen pour la licence ».
La connaissance des langues officielles. Que ce soit pour la recherche d’un emploi ou pour l’intégration en entreprise, la connaissance de l’anglais joue un rôle déterminant dans l’insertion professionnelle des nouveaux arrivants interrogés et de leurs proches, en particulier en Ontario. Toutefois, le niveau de compétence linguistique en anglais de l’échantillon consulté est relativement faible, seulement quatre personnes se considérant d’un niveau avancé et 19, d’un niveau intermédiaire. Pour les personnes installées dans une localité où le français est la langue très majoritairement utilisée, cette langue est généralement privilégiée sur les lieux de travail et le niveau de compétence en anglais a moins d’importance. Les localités à forte majorité francophone, où le niveau de compétence en anglais importe peu, sont principalement situées dans le Madawaska, le Restigouche et la Péninsule acadienne, dans le Nord du Nouveau-Brunswick. Toutefois, dans la région Chaleur, au Nouveau-Brunswick, et dans le Nord de l’Ontario, les nouveaux arrivants ont avantage à posséder un bon niveau de compétence en anglais.
L’AFNOO encourage les entreprises à puiser dans la main-d’œuvre francophone, mais cette façon de faire engendre des démarches et des couts supplémentaires, comme le recours à un interprète lors de l’entrevue d’embauche. Un participant interrogé, employé au sein d’une entreprise anglophone, a indiqué que son employeur bilingue avait lui-même facilité son adaptation dans les premiers temps. Toutefois, malgré ce fait, en raison de sa connaissance insuffisante de la langue anglaise, ce participant a fait face à des problèmes à long terme.
La recherche d’emploi. Près de la moitié des personnes interrogées s’est retrouvée en situation de recherche d’emploi. La plupart du temps, ces personnes possédaient la résidence permanente et cherchaient un premier emploi, souhaitaient changer d’emploi après avoir obtenu la résidence permanente ou intégraient le marché du travail dans le cadre des études ou suivant l’obtention d’un permis d’études. Le tiers des personnes en recherche d’emploi a fait état des démarches ardues et parfois infructueuses qu’elles ont dû entreprendre. Il semble que l’aspect rural et francophone des territoires à l’étude limite les possibilités d’emploi offertes et complexifie la recherche d’emploi des nouveaux arrivants et des partenaires de ces derniers. Les entretiens ont permis de faire ressortir plusieurs autres facteurs qui entrent en jeu, notamment :
- Le niveau de compétence linguistique en anglais;
- L’expérience de travail au Canada;
- Le réseau de contacts locaux;
- Les moyens de transport à la disposition de la personne;
- La connaissance de la région, des employeurs et du Code canadien du travail;
- La réticence des employeurs à embaucher des personnes issues de l’immigration.
Faute de trouver des débouchés liés à leur domaine d’études, des personnes interrogées ont mentionné qu’elles, ou des membres de leur réseau, avaient migré vers un centre urbain ou une autre province pour améliorer leur situation professionnelle. D’autres ont choisi d’accepter un poste qui ne correspondait ni à leur profil professionnel ni à leurs ambitions, par exemple en raison d’une situation financière précaire ou pour acquérir une première expérience de travail canadienne.
« Il faut que vous soyez un travailleur expérimenté, que vous ayez une plus-value au travail, que vous ayez des diplômes et puis, en réalité, ce n’est pas vraiment reconnu si on n’a pas d’expérience canadienne ».
« C’était très difficile de trouver un travail [pour mon conjoint], car il ne parlait pas anglais. À notre surprise, il n’y avait presque pas de français ».
« Les offres d’emploi ne sont pas toujours affichées. C’est parfois difficile pour un nouvel arrivant de connaitre les [occasions d’emploi] dans la communauté ».
Le permis de travail fermé. Moins du quart des personnes interrogées avait un permis de travail fermé. Les entretiens indiquent que ce type de statut crée un rapport de force inégal entre la personne employée et l’employeur, ce qui mène parfois les employeurs à commettre des abus (GGI, 2023a). Ne pouvant pas se réinsérer rapidement en emploi, certaines des personnes consultées qui avaient perdu ou quitté leur emploi à un moment où elles détenaient un permis de travail fermé se sont retrouvées dans une situation économique précaire et ont vécu un stress important.
« J’avais un permis de travail fermé. Ça ne s’est pas nécessairement très bien passé, parce que ça donnait tout le pouvoir à l'employeur. Les conditions prévues au départ n’étaient pas toujours respectées ».
« J’ai cherché du travail partout. J’avais des entrevues, mais dès que je parlais de programmes d’immigration et de mon permis de travail, je sentais que les employeurs étaient moins intéressés. Ils ne me rappelaient pas ».
L’ouverture à la diversité. Un peu moins du quart des personnes interrogées a rapporté des situations où elles ont été victimes de racisme ou de discrimination au travail. Certaines ont constaté un décalage entre le discours d’ouverture à la diversité de l’employeur et la réalité vécue sur le terrain. Les personnes étaient plus nombreuses au Nouveau-Brunswick qu’en Ontario à mentionner qu’elles avaient observé des situations discriminatoires au travail à l’encontre de nouveaux arrivants. Il était alors question d’un fossé socioculturel entre le personnel né au Canada et les personnes immigrantes, du refus de certains bénéficiaires de se faire servir par une personne noire ou étrangère et de possibilités d’avancement limitées pour les nouveaux arrivants.
Une majorité des personnes participantes a néanmoins décrit leur milieu de travail comme étant ouvert à la diversité. Elles ont mentionné avoir vécu un accueil cordial, voire chaleureux. La présence de personnes immigrantes avait contribué dans certains cas à accélérer l’intégration. En revanche, dans les milieux où une majorité des personnes immigrantes était reléguée à des postes moins valorisés, l’impression de relations discriminatoires était plus vive.
« Sur mon lieu de travail, j'ai déjà eu des familles qui viennent, puis elles me voient, et demandent à être servies par quelqu’un d’autre […]. Quand on se retrouve dans le milieu de travail […], on se retrouve entre immigrants. Ça crée deux groupes, un groupe de Canadiens d'un côté et un groupe d'immigrants de l’autre côté ».
« L'image qu'ils ont pour quelqu'un de l'extérieur, c’est pour faire le travail qu’ils ne veulent pas faire ».
« Vraiment les gens sont extrêmement gentils, accueillants. Ils t’expliquent. Le management est vraiment sain ».
Les services de garde. Le succès de l’insertion professionnelle des personnes ayant des enfants d’âge préscolaire est souvent conditionnel à la disponibilité de places en services de garde. En effet, au moins quatre des personnes consultées ont indiqué qu’elles ou leur conjoint ne pouvaient pas travailler en raison du manque de places en garderie. Cette situation a, d’une part, d’importantes répercussions financières sur les familles immigrantes, qui ne s’attendaient pas à devoir vivre avec un seul revenu, et, d’autre part, des répercussions sociales sur la personne qui se voit forcée de rester au foyer. De plus, les couts liés aux services de garde se révèlent trop élevés pour certaines personnes, qui doivent y consacrer une part importante de leur salaire. Une personne consultée a indiqué que, comme ils n’avaient pas de place en garderie, elle devait travailler de nuit et son conjoint, de jour, pour arriver à payer leur loyer.
Insertion sociale
Les activités qui permettent aux personnes nouvellement arrivées de socialiser sont, la plupart du temps, organisées par les services d’établissement, mais aussi parfois par l’employeur, les collègues, la municipalité, les associations ethnoculturelles ou d’autres organismes francophones. Par conséquent, des liens de solidarité sont tissés non seulement par l’entremise des milieux professionnels, associatifs et communautaires, mais aussi à l’église ou dans le voisinage.
Les effets de la petite taille des localités et de l’éloignement. Les entretiens montrent une grande appréciation du mode de vie en milieux ruraux ou éloignés, qui sont décrits comme étant plus tranquilles, moins stressants, plus sécuritaires, plus conviviaux ou moins couteux. Cette appréciation a été exprimée tant par des personnes provenant de petites localités que par des personnes ayant vécu dans des villes ou des métropoles. L’absence d’embouteillages et un mode de vie plus lent sont particulièrement appréciés des personnes qui ont d’abord vécu dans de grandes agglomérations. La proximité des espaces naturels se révèle également un atout. Les quelques personnes interrogées qui ont eu la chance de pratiquer des activités de plein air appréciaient particulièrement cette dimension. L’entraide est l’élément qui est revenu le plus souvent au moment de souligner les aspects positifs des milieux de vie plus éloignés, les gens de ces milieux semblant s’entraider plus souvent qu’en ville.
« On voit l’entraide communautaire ici, c’est beau à voir. C’est quelque chose que l’on ne trouve pas partout ».
« Il n’y a pas grand-chose, mais c’est bien ici et il n’y a pas tout le stress de la ville ».
« Les petites communautés, je crois que ça facilite l’intégration. Par exemple, tu croises quelqu’un dans la rue, tu vas partager ».
Les entretiens témoignent également de la difficulté à imaginer, depuis l’Afrique en particulier, à quoi ressemblera concrètement une municipalité rurale du Nord du Nouveau-Brunswick ou du Nord de l’Ontario. Par conséquent, les personnes interrogées s’étonnent de certains contextes ruraux ou s’adaptent plus difficilement à ceux-ci. Ainsi, des personnes peinent à s’adapter à la rigueur de l’hiver, mais plus encore aux grandes distances, d’autant que leur revenu ne leur permet pas toujours de se procurer rapidement une voiture après leur arrivée. Plusieurs personnes déplorent de ne pas avoir accès au transport en commun et regrettent qu’on ne leur ait pas expliqué à l’avance les conséquences concrètes des distances à parcourir. Pour d’autres, le fait d’être loin des services médicaux semble être un enjeu qui altère considérablement leur qualité de vie et qui augmente leur stress. La distance des aéroports, l’incomplétude des services, le peu de diversité des activités offertes, la rareté des produits africains dans les épiceries et l’absence de transport interurbain sont d’autres facteurs négatifs qui ont été nommés.
« Je marchais pendant une année à -20, -30. Aussi, souvent, quand j’avais des rendez-vous médicaux, c’était compliqué, car il fallait parcourir 300 kilomètres ».
« On est quand même dans une région qui est très bienveillante, mais on sent que de plus en plus les gens sont un peu plus méfiants. On a beaucoup d'immigration. Parmi toutes les personnes qui arrivent, il y en a qui ne cherchent pas vraiment à s'intégrer. Je pense qu'il suffit d'un "mauvais immigrant" pour créer une barrière. On peut tous un peu être mis dans le même sac, même si ce n'est pas la réalité ».
« Il n’y a pas grand-chose qui se passe. Je sais qu’il y a un club de bingo qui n’est pas loin de chez moi, mais moi je ne joue pas au bingo ».
Le vieillissement des populations rurales est visible et certains nouveaux arrivants peinent parfois à socialiser avec d’autres adultes de leur âge. En outre, certains adultes n’ayant pas d’enfants à charge déplorent le peu d’activités communautaires organisées à leur intention, celles-ci étant surtout destinées aux familles ou aux personnes âgées.
Les activités sociales et les bénévoles. Face à la solitude, la participation à des activités plus ou moins structurées demeure fort appréciée. Une majorité de personnes, tant au Nouveau-Brunswick qu’en Ontario, a participé à au moins une activité sociale organisée par un service d’établissement. Parfois, dans les petites municipalités, les principaux employeurs sont impliqués dans l’organisation de ces activités. Il semble plus facile de participer aux activités de connexion communautaire du service d’établissement, du fait que des liens positifs ont été tissés dans les premiers jours lors de l’établissement et que d’autres personnes vivant des réalités similaires participent également à ces activités. Le fait que certains organismes offrent des occasions d’échanges informels semble important. Par exemple, des organismes contribuent à mettre en contact de nouveaux arrivants et des personnes immigrantes provenant du même pays.
« Avec des collègues, [le personnel du service d’établissement] organisait des activités extraprofessionnelles en hiver. J’étais heureux d’y participer. Pour moi, faire de la raquette, de la motoneige, c’était très plaisant ».
« L’organisme d’accueil, avec les activités qu’il organise, m’a permis de faire le pont avec d'autres Africains qui sont sur place. Ces activités sont l'occasion de rencontrer plein d'autres personnes et de comprendre que, finalement, on n’est pas seul dans la localité ».
Nos entretiens ont montré que des personnes installées depuis un peu plus longtemps se mobilisent volontairement à l’occasion pour organiser des activités. Celles-ci peuvent viser à mettre en place des équipes sportives (soccer) ou à créer des occasions de rencontres entre francophones. Ces personnes bénéficient d’appuis importants de la localité pour réaliser leurs projets.
Les liens affectifs et la solidarité. L’église demeure un lieu de socialisation et de solidarité pour plusieurs nouveaux arrivants, surtout ceux en provenance d’Afrique. Les activités officielles organisées par l’employeur – festivités de Noël, sortie à la cabane à sucre, etc. – semblent également être assez fréquentes et efficaces pour tisser des liens affectifs. En outre, ces activités se révèlent moins intimidantes que d’autres offertes par des organisations moins connues, comme la municipalité. Il arrive plus rarement que des collègues organisent des activités informelles et se soucient d’inviter les nouveaux arrivants. Les parents qui ont de jeunes enfants se servent souvent des parents des amis de leurs enfants – à l’école, à la garderie ou lors d’activités parascolaires – pour tisser des liens d’amitié.
« Si on a des urgences à faire, on peut appeler quelqu'un de l'église pour nous emmener, par exemple à l'hôpital, si on est malade ».
La solitude. Près de la moitié des personnes interrogées vit de la solitude. Alors que les premiers contacts sont généralement bienveillants et que les personnes interrogées apprécient la gentillesse de la population, certaines regrettent de se retrouver souvent seules à la maison. Ces personnes notent le mode de vie plus casanier de la population canadienne, en comparaison aux habitudes de socialisation de leur pays d’origine. Alors que certaines personnes considèrent que la taille réduite de leur localité facilite la création de liens, d’autres soulignent la difficulté à tisser des liens dans une petite communauté où tout le monde a déjà son propre réseau.
« C’est un peu plus dur de sympathiser à un certain niveau avec les gens. On peut se voir durant les activités, mais il y a un certain plafond de verre en quelque sorte ».
« La plupart des personnes se connaissent, ce qui fait que l’on développe un sentiment d'appartenance à une communauté ».
La mixité et les communautés ethniques. Dans les municipalités où l’immigration est très récente, la solitude est rattachée également au fait de ne pas avoir la chance de socialiser avec des personnes dont les coutumes sont similaires. Toutefois, dans les municipalités où l’immigration est importante, certaines personnes s’inquiètent d’avoir très peu d’occasions de socialiser en dehors des cercles de nouveaux arrivants. D’autant que ces cercles se révèlent volatiles, plusieurs amitiés étant à refaire après quelques années, lorsque de nouveaux arrivants quittent la localité pour déménager vers des centres urbains ou d’autres provinces, en particulier le Québec.
« C'est vraiment une difficulté, parce qu'on aimerait bien être entouré des gens avec qui on partage de mêmes expériences, une même culture et des traditions. Même quand on va à l'église, nous sommes la seule famille noire ».
« Après, la population locale, quand il y a des activités organisées par [le service d’établissement], elle est invitée, mais j’ai l’impression que ça reste un huis clos avec les nouveaux arrivants ».
Le racisme et la discrimination. Dans notre échantillon, le racisme et la discrimination liée à la race sont des phénomènes peu répandus, mais ils sont vécus plus fréquemment par les personnes vivant au Nouveau-Brunswick. Cette province ayant été historiquement peu exposée à la diversité, ceci pourrait notamment en expliquer la cause, comme le suggère la littérature (Vatz Laaroussi, Bernier et Guilber, 2013; Fourot, 2014). Ce racisme s’exprime sous forme de phrases lancées dans l’espace public, comme « retourne chez vous » ou « vous venez voler nos emplois ». La difficulté de tisser des liens affectifs en dehors des cercles de personnes immigrantes est parfois perçue comme une certaine fermeture. En Ontario, les manifestations de discrimination à l’égard des francophones, par exemple au moment de chercher un emploi ou un logement, semblent plus fréquentes.
L’incidence des langues officielles. Plusieurs personnes interrogées vivent dans des localités où le français est majoritaire ou très majoritaire, comme à Kedgwick (N.-B.) ou à Hearst (Ont.). Ces personnes apprécient les repères sociolinguistiques qu’offrent ces communautés, où ils peuvent rapidement échanger avec des membres de la population locale, que ce soit à l’église, lors d’activités communautaires ou dans les commerces. Toutefois, lorsque le français est moins présent dans une localité, le bilinguisme limité a surpris et parfois déçu les nouveaux arrivants, de même que le manque de visibilité de la communauté francophone. Dans ces localités, si les personnes interrogées ont un faible niveau de compétence en anglais, elles peuvent rencontrer des obstacles sur le plan de l’insertion sociale et de l’accès aux services. Pour les personnes détenant un statut de résidence temporaire, le fait de ne pas avoir accès aux cours d’anglais offerts par IRCC semble être un obstacle supplémentaire à leur insertion.
En ce qui a trait à l’accès au système de santé en français, les commentaires reçus divergent. En Ontario, trois personnes interrogées qui ont dû faire affaire avec le système de santé ont dit regretter la difficulté ou l’impossibilité de recevoir des services en français, certaines situations d’incompréhension s’avérant réellement problématiques. Au Nouveau-Brunswick, les personnes interrogées qui ont dû faire affaire avec le système de santé ont pu profiter du Réseau Vitalité, où l’offre de services en français est la norme.
L’inclusion et l’incidence des enfants. Toutes les personnes interrogées qui ont de jeunes enfants ont jugé positive ou très positive l’intégration sociale de leurs enfants. Elles ont souligné en outre la rapidité avec laquelle leurs enfants s’étaient intégrés à l’école ou à la garderie. Deux parents ont toutefois souligné le peu de diversité des activités organisées à l’intention des enfants dans leur localité. Quelques parents ayant des enfants en voie d’aller étudier dans un établissement postsecondaire étaient préoccupés qu’un tel établissement n’offre pas de services dans leur région ou que les possibilités de s’engager dans un sport de compétition soient réduites.
Plusieurs parents ont indiqué que la recherche d’un service de garde et les frais associés à ce service sont des défis, surtout au Nouveau-Brunswick. Parmi les personnes interrogées, trois ont indiqué que leur conjointe ou conjoint avait dû se priver de travailler pendant plusieurs mois, jusqu’à ce qu’une garderie soit trouvée. Au Nouveau-Brunswick, des personnes qui n’ont pas encore d’enfants s’inquiétaient de fonder une famille dans une localité où l’accès à la garderie est si difficile. Quelques personnes ont souligné être surprises que l’école n’offre pas de service de garderie après l’école ou ne subventionne pas les frais liés à la garde des enfants après l’école.
« Les enfants ont des amis qui viennent les chercher et ils font des sorties en bateau. Ils [vont à] la pêche. Il y a aussi le plus jeune qui a reçu gratuitement un vélo. Il y a beaucoup de petites attentions et ils se font des amis ».
Rétention
Rester ou partir? Il n’y a que peu de réponses précises et définitives à cette question. Les personnes interrogées qui ont exprimé l’intention de rester à long terme dans leur communauté d’accueil associaient ce souhait à une multitude de facteurs et non à un motif précis : une insertion professionnelle satisfaisante pour soi et son partenaire, un milieu de vie correspondant aux attentes, de nouvelles amitiés, une communauté ouverte, un environnement sécuritaire, etc. Ces mêmes facteurs peuvent aussi expliquer pourquoi une personne quitte une région ou envisage de le faire lorsque les expériences vécues sont moins positives (Esses et Carter, 2019; Traisnel et coll., 2020). Par exemple, la vie en région rurale peut répondre aux aspirations d’une personne tout comme elle peut en rebuter d’autres.
« Je crois que je vais rester longtemps ici. J’ai trouvé un bon emploi, mon mari aussi. J’ai un appartement que j’aime. Les personnes sont très accueillantes ».
« Il y a plusieurs facteurs qui font que je ne veux pas me déplacer. D'abord, la communauté est accueillante. Ensuite, c’est l’environnement avec plein d’activités de plein air. Et aussi, j’ai un employeur avec lequel je m'entends très bien ».
La situation professionnelle. Le fait de détenir un emploi, lorsque celui-ci correspond aux attentes et au niveau de compétences professionnelles, est un facteur qui peut contribuer à une installation à long terme, alors qu’il peut être un motif pour partir lorsque ce n’est pas le cas. Rappelons que la majorité des personnes rencontrées s’est initialement installées en région rurale en raison d’une occasion d’emploi. En fait, plus de la moitié des personnes interrogées soutient qu’elles pourraient migrer à nouveau si leur situation professionnelle était insatisfaisante ou devait le devenir. Il est ressorti des entretiens que le fait d’avoir un emploi n’est pas une condition suffisante pour retenir une personne immigrante dans une communauté, plusieurs autres éléments étant aussi à considérer, comme les possibilités d’avancement professionnel, le salaire, les conditions de travail, le style de gestion et la qualité des relations avec les collègues. Les personnes qui ont de la difficulté à faire reconnaitre leurs acquis et qui occupent un poste pour lequel elles sont surqualifiées ont davantage tendance à exprimer le souhait de tenter leur chance ailleurs. D’ailleurs, l’étude de Traisnel et coll. (2020) sur l’immigration francophone en Atlantique a mis en évidence que l’accès à un emploi à la hauteur des attentes était le principal frein à la rétention. Un cas de figure commun est de trouver un premier emploi, peu importe lequel, le temps d’obtenir une expérience canadienne (et la résidence permanente), avant de chercher un poste qui correspond davantage à ses compétences et à son expertise, quitte à quitter la région initiale d’établissement. Plusieurs personnes mentionnent qu’elles sont prêtes à accepter un emploi insatisfaisant, mais idéalement, seulement pour un certain temps.
« On m’a dit d’aller faire mon diplôme et que je pourrais devenir superviseure. J’aime mon emploi et on veut m’accompagner pour progresser ».
« J’aimerais changer, surtout pour aller dans une grande ville. Ici, on ne peut pas se développer. C’est restreint par rapport à nos ambitions. Je suis dans la production, et quand j’ai essayé de postuler pour un poste en gestion, on m’a dit non ».
« Je ne pense pas rester au Nouveau-Brunswick, car on me bloque la route pour être infirmière. Je ne vais pas rester préposée aux bénéficiaires toute ma vie. Je dois évoluer, je dois pouvoir mettre mes connaissances en pratique ».
Les liens sociaux et l’attachement à la communauté. Le contenu des entretiens a mis en lumière que l’accès à un bon emploi est un facteur nécessaire à l’établissement à long terme, mais qu’il ne s’agit généralement pas d’une condition suffisante. L’accueil reçu, le niveau d’ouverture de la communauté et la qualité des relations sociales sont des éléments qui peuvent avoir une incidence importante sur la rétention. Les personnes qui ont vécu un accueil chaleureux et une insertion sociale positive ont davantage tendance à développer un sentiment d’appartenance à leur communauté d’accueil et à vouloir y rester. À l’inverse, les personnes qui, plusieurs mois après leur arrivée, ont peu d’amis ou n’en ont pas, ou qui ont vécu une expérience de rejet ou de discrimination, songent davantage à quitter leur communauté, et ce, même si elles ont un emploi satisfaisant.
« Je suis arrivée dans un monde que je ne connaissais pas et la chaleur avec laquelle on m’a accueillie me fait penser que je peux passer plus de temps ici ».
« La communauté acadienne a joué un grand rôle dans notre arrivée et notre insertion sociale. Quelque chose qui fait qu’aujourd’hui, je me sens à ma place, c’est que les enfants ont un accent acadien. Je ne ressens pas l’envie de rentrer ».
Le contexte rural et l’éloignement. Vivre en région éloignée n’est pas fait pour tout le monde. Lors des entretiens, des personnes ont exprimé qu'elles trouvaient difficile de vivre dans un endroit où peu d’activités socioculturelles étaient offertes, où l’accès à des produits spécialisés, comme des aliments « ethniques », était limité, où les couts pour se déplacer en avion vers son pays d’origine étaient plus élevés et où il était plus difficile d’avoir accès aux services publics comme des soins de santé spécialisés. À l’inverse, d’autres personnes ont exprimé leur appréciation de la qualité de vie associée à la ruralité (tranquillité, sentiment de sécurité, communauté à taille humaine, accès à la nature, etc.) et ont souligné qu’elles ne voudraient pas vivre dans un grand centre urbain, quitte à devoir se déplacer à l’occasion pour accéder à certains services. Les personnes qui n’ont pas de voiture ont davantage tendance à insister sur les défis associés à l’éloignement des grands centres, compte tenu de la présence limitée ou inexistante de transport en commun dans une localité ou de transport interurbain.
« C’est une très belle région. C'est calme et il y a les grands espaces naturels autour. Je me vois bien rester ici. C’est très agréable vivre ici ».
« Ici, côté santé, il n’y a plus de gynécologue. Donc, si tu es en couple et que ta femme doit accoucher, tu dois aller dans une autre communauté. C’est des points qui enlèvent l’attrait de rester à long terme ici. C’est aussi difficile à gérer avec l’aéroport. Il y a la limitation des loisirs, des boutiques et tout. On a des produits limités ».
« Si on veut voir autre chose, on fait un tour en ville. On visite et on rentre ensuite ».
« Quand on veut retourner visiter la famille, à partir d’ici, c'est le double du prix et c'est le double du temps. Il faut prendre un vol intérieur en plus du vol international ».
L’accès à un logement abordable. L’achat d’une propriété ressort comme un facteur d’enracinement au sein d’une communauté. À la question portant sur leurs intentions de rester, près du quart des personnes rencontrées a mentionné le fait qu’elles étaient déjà propriétaires d’une maison ou qu’elles souhaitaient en acheter une sous peu. Devenir propriétaire est un projet qui semble plus réalisable en région qu’en ville, les propriétés étant généralement plus abordables en région. Toutefois, les personnes qui sont locataires et dont les moyens financiers sont limités ont davantage tendance à considérer le logement comme étant un facteur qui pourrait les mener à déménager dans une autre région. Certaines petites localités font face à une pénurie de logements et il peut s’avérer difficile d’en trouver un dont le prix soit abordable et qui réponde aux besoins, en particulier à ceux d’une famille.
« Je suis locataire, mais ce serait possible d’acheter une maison. C’est un projet à long terme ».
« Les maisons à Hearst sont encore très abordables. Mais je ne pourrais pas acheter de maison dans les grandes villes. Ici, on peut prétendre à une maison ».
La famille. Il semble plus facile de migrer dans une autre région en étant seul qu’en étant en couple ou en ayant des enfants, en particulier lorsque ceux-ci sont bien intégrés à l’école et se sont fait des amis. Plusieurs parents ont indiqué vouloir rester dans leur localité d’accueil pour offrir une stabilité à leurs enfants, et ce, malgré les défis qu’ils peuvent rencontrer dans leur propre parcours d’intégration. De plus, le contexte rural est considéré comme étant propice à élever une famille dans la tranquillité et la sécurité. Toutefois, d’autres personnes rencontrées considèrent plutôt que le fait de vivre en région rurale offre des possibilités limitées à leurs enfants, notamment en matière d’activités sportives et socioculturelles, de programmes spécialisés à l’école ou d’études postsecondaires. Cela pourrait mener ces personnes à s’établir ailleurs lorsque leurs enfants atteindront l’adolescence.
« Quand vous avez des enfants, il faut tout prévoir à l’avance et bien s’organiser. On les a déjà beaucoup déplacés, ils se sont fait des amis ici et on ne veut pas les perturber en bougeant encore une fois ».
« Tôt ou tard, pour les enfants [la question de migrer en ville] va se poser. Moi, mes enfants, ils aiment jouer au soccer. Là, il n’y a pas de soccer, pas d’équipe ».
Le changement de statut. Plusieurs personnes interrogées arrivées au pays avec un statut de résident temporaire ont indiqué que l’obtention de la résidence permanente était un moment charnière où la question de rester ou de partir se posait de façon particulière. Lorsqu’une personne a établi de bons liens dans la communauté, que ce soit pendant ses études ou la durée de son permis de travail temporaire, et que ses conditions d’emploi sont satisfaisantes, il peut être intéressant de rester. À l’inverse, quand l’expérience vécue a été plutôt négative, l’obtention de la résidence permanente rend plus accessible la mobilité au sein de la province ou du Canada.
De plus, des personnes qui avaient encore le statut de résident temporaire au moment de l’entretien ont souligné qu’il est difficile de se projeter pleinement dans l’avenir sans avoir auparavant obtenu la résidence permanente. Quelques personnes ont aussi mentionné des difficultés rencontrées lors des procédures d’immigration pour faire venir un partenaire de vie resté à l’étranger, ce qui peut remettre en cause l’installation permanente au Canada.
« Après les études, je dirais que les choses étaient rendues familières pour moi, comme si j'étais chez moi. Je me suis donc dit : "Pourquoi ne pas rester et essayer d’avoir un emploi?" ».
« La résidence permanente vous donne la flexibilité d'aller ailleurs pour trouver quelque chose qui correspond à vos attentes ».
Les autres facteurs. Lors des entretiens, plusieurs autres facteurs qui peuvent avoir une incidence sur la rétention ont été évoqués. Parmi eux, on note les suivants :
- Le climat trop rude pour certains semble favorable aux activités de plein air pour d’autres;
- Les personnes détenant davantage d’information et de l’information de qualité vivent moins de déceptions et de stress à leur arrivée;
- La présence d’une communauté de la même origine ethnique permet de partager avec celle-ci des référents culturels et des expériences migratoires similaires;
- Le mal du pays peut peser sur la décision de rester au Canada, en particulier lorsque des membres de la famille sont restés à l’étranger;
- Le fait d’être en couple peut favoriser la rétention pour certains, alors que pour d’autres, il peut être difficile de faire de nouvelles rencontres dans une petite communauté.
« Ma famille est à l’autre bout du monde. Je ne me vois pas rester encore très longtemps sans les voir. C’est vraiment difficile pour moi ».
« Il y a beaucoup d’immigrants qui viennent avec une offre de travail et ils ne savent pas qu’ils arrivent dans une très petite communauté. Ils ne savent pas qu’il neige ».
Constats et recommandations
Cette étude a montré, somme toute, que les personnes interrogées ont un rapport positif avec le fait de vivre en région rurale et éloignée. Plus encore, une intégration sociale et professionnelle jugée positive est étroitement corrélée à une appréciation de la région d’accueil et à une volonté d’y demeurer. Par conséquent, les personnes établies dans des localités où les parties prenantes du parcours d’intégration (services d’établissement, employeurs et autres partenaires) sont nombreuses, collaborent étroitement et offrent davantage de services, expriment également une plus grande satisfaction à l’égard de leur projet migratoire.
Une majorité des expériences vécues en Ontario peut se rapprocher de celles vécues au Nouveau-Brunswick. Il importe toutefois d’établir deux distinctions. De manière générale, un faible niveau de compétence linguistique en anglais est un obstacle plus important à l’insertion et à la rétention des personnes interrogées vivant en Ontario. En revanche, les expériences de discrimination ou de racisme, bien que rares, semblent plus fréquentes au Nouveau-Brunswick.
Les recommandations qui suivent rejoignent les principaux constats tirés de la présente étude.
1) Appuyer la régionalisation de l’immigration francophone au moment de la sélection
- Les données d’IRCC révèlent que l’immigration francophone est toujours fortement concentrée en zone urbaine, la proportion d’admissions en 2023 atteignant 60 % dans la région du Grand Moncton, au Nouveau-Brunswick, et plus de 90 % dans les grandes villes du Sud de l’Ontario. Lors de l’évaluation des programmes d’accès à la résidence permanente existants et au moment de la création d’un nouveau programme économique d’immigration francophone (prévu dans le cadre de la politique d’IRCC en matière d’immigration francophone), il serait pertinent de définir des critères favorisant l’immigration à l’extérieur des centres urbains, comme l’attribution de points supplémentaires aux personnes qui souhaitent s’établir en milieu rural. Une pratique similaire est déjà en place dans des volets du Programme des candidats de la Colombie-Britannique pour appuyer la régionalisation de l’immigration dans la province.
2) Appuyer les activités visant à jumeler des employeurs avec des candidates et des candidats éventuels à l’étranger
- Des localités rurales ayant peu d’historique en matière d’immigration doivent souvent déployer des efforts supplémentaires pour faire connaitre les occasions d’emploi qu’elles peuvent offrir. De plus, le recrutement à l’étranger peut s’avérer particulièrement complexe pour des entreprises peu familières avec les bassins de recrutement à l’international, les procédures d’immigration et les manières d’accompagner les personnes recrutées. Dans ce contexte, le modèle de jumelage mis sur pied par la SÉO semble être particulièrement pertinent et aurait avantage à être reproduit ailleurs au pays. IRCC pourrait consacrer un financement particulier à ce type d’initiative. Rappelons que la SÉO a mis sur pied un système de jumelage en tenant à jour des listes de postes disponibles et de candidatures possibles. Lorsqu’un poste correspond à une candidature, l’organisme met en contact la personne à la recherche d’un emploi et l’employeur et offre un accompagnement à ces derniers pour faciliter le placement. Elle appuie également l’établissement de la personne recrutée, notamment en facilitant la collaboration entre cette dernière, le service d’établissement et l’employeur.
3) Mener des missions de recrutement adaptées aux réalités des pays sources et des communautés francophones en milieu rural
- Les entretiens ont montré que l’Afrique subsaharienne est une région où les activités de recrutement organisées à l’international sont beaucoup moins fréquentes par rapport à l’Europe et à l’Afrique du Nord. Pourtant, cette région est celle où les francophones sont les plus nombreux à l’échelle de la planète (OIF, 2022). Pour accroitre l’immigration francophone, y compris en région rurale, il importe d’élaborer une véritable stratégie de recrutement assortie d’importantes ressources et adaptée à l’Afrique subsaharienne. Par ailleurs, des parties prenantes ont mentionné que des partenaires en immigration francophones établis dans un centre urbain du Sud de la province connaissent mal les réalités des régions rurales du Nord de l’Ontario et du Nord du Nouveau-Brunswick, de même que les occasions d’emploi offertes dans ces régions. Pour réellement appuyer la régionalisation de l’immigration, il importe de veiller à ce que les communautés rurales soient bien représentées et de faire en sorte que les personnes responsables du recrutement soient bien au fait des réalités de ces communautés. De plus, il semble nécessaire d’assurer une meilleure adéquation entre les exigences professionnelles pour participer à des évènements comme Destination Canada et les besoins du marché du travail dans les communautés rurales.
4) Garantir aux personnes qui détiennent le statut de résidence temporaire l’accès à toute la gamme des services prédépart et des services d’établissement
- La littérature et les données montrent bien la croissance fulgurante de l’immigration temporaire, notamment dans les régions du Nord du Nouveau-Brunswick et du Nord de l’Ontario. Or, les personnes ayant le statut de résidence temporaire gagnent à être accompagnées en français avant et après leur arrivée au Canada pour que leur expérience mène à un établissement à long terme. Lorsque nécessaire, la prise en charge du projet migratoire de l’ensemble de la famille importe, puisque la décision de demeurer dans une région rurale et éloignée dépend largement du bienêtre des autres membres de la famille.
5) Miser sur des services prédépart qui reflètent les réalités locales et sur la collaboration avec les partenaires locaux
- Rappelons que la majorité des personnes interrogées ne connaissait pas l’existence des services prédépart et que celles les ayant utilisés auraient préféré avoir de l’information portant plus particulièrement sur leur lieu d’installation. Par conséquent, l’information transmise et les ateliers organisés par les organismes offrant des services prédépart gagneraient à être réellement adaptés aux réalités des régions. L’installation en milieu rural est une expérience très différente de celle vécue par les personnes qui s’installent dans un centre urbain. Des initiatives de collaboration en continu avec les organismes locaux contribueraient à combler les lacunes observées. À titre d’exemple, l’approche de l’AFNOO semble particulièrement efficace, puisque dès que l’organisme est informé de l’arrivée imminente d’une personne immigrante, il prend contact avec celle-ci, par courriel d’abord, puis par téléphone ou visioconférence, afin de veiller à ce qu’elle reçoive toute l’information nécessaire avant son arrivée. Toutefois, pour le moment, cette pratique n’est pas liée aux services prédépart. En outre, elle dépend de la volonté des employeurs et des partenaires communautaires de la région de partager l’information sur les personnes qui viennent s’établir.
6) Reconnaitre et valoriser l’importance de liens solides entre les services d’établissement, les employeurs et les autres composantes de la communauté d’accueil
- Les expériences migratoires sont beaucoup plus positives dans les localités où les employeurs reconnaissent l’importance de l’accompagnement offert lors de l’établissement et où le service d’établissement a développé des modes de collaboration efficaces avec les autres services et organismes de la communauté (formation linguistique, services en emploi, centre culturel, municipalité, etc.) en plus d’avoir accès à des bénévoles. Toutefois, la manière dont cet écosystème doit être mis en place, mobilisé et préservé doit être mieux comprise. Cette fonction de navigation et cette nécessité de cultiver et d’entretenir une « communauté accueillante » auraient également avantage à être reconnues afin d’assurer la rétention linguistique et géographique à long terme des personnes immigrantes.
7) Rendre obligatoire la collaboration des entreprises qui embauchent des personnes francophones à l’étranger avec les services d’établissement francophones
- De plus en plus d’entreprises développent des expertises et mobilisent des ressources pour appuyer les périodes de prédépart et d’établissement de leur personnel embauché à l’étranger. Toutefois, peu de mesures contraignent ces entreprises à s’engager à offrir de tels services et ce ne sont pas toutes les entreprises qui ont les capacités de le faire. Le niveau d’accompagnement offert par les employeurs aux travailleurs étrangers avant et après leur arrivée au Canada varie ainsi d’un cas à l’autre. Cet accompagnement pourrait impliquer à la fois une obligation de partage d’information et une obligation de collaboration avec les services d’établissement locaux. Il serait donc important que tout manquement à ces obligations entraine des conséquences. Un modèle qui pourrait servir d’exemple est celui du Programme d’immigration au Canada atlantique. Les employeurs qui souhaitent recruter des personnes par l’entremise de ce programme doivent s’engager à collaborer avec un fournisseur de services pour faciliter l’établissement des travailleurs et favoriser la rétention de ces derniers. Ces employeurs sont tenus de fournir un plan d’établissement personnalisé par l’intermédiaire d’un fournisseur de services d'établissement et ce plan doit être cosigné par la personne recrutée. Une telle pratique gagnerait à être adoptée par les autres programmes d’immigration économique, lorsqu’une offre d’emploi est incluse au dossier d’immigration.
8) Tenir compte des réalités particulières des régions rurales dans les ententes de financement en matière d’établissement
- Comme nous l’avons vu, dans le Nord de l’Ontario et le Nord du Nouveau-Brunswick, les ressources disponibles ne permettent pas d’offrir des services de qualité à l’ensemble des nouveaux arrivants. Plusieurs localités ne peuvent toujours pas compter sur des services d’établissement et d’autres doivent se contenter d’offrir des services de moindre qualité ou une gamme réduite de services. Par exemple, des fournisseurs ne peuvent offrir de services dans certaines localités trop éloignées, même si celles-ci font partie, en théorie, de leur territoire. Ou encore, ils ne peuvent répondre à tous les besoins des nouveaux arrivants en matière de transport lors de l’arrivée de ces derniers à l’aéroport, parce qu’ils n’ont pas les ressources nécessaires ou ne disposent pas d’une navette. Dans les ententes de financement, il apparaît essentiel de tenir compte des réalités associées à l’établissement en milieu rural et des couts supplémentaires liés à l’offre de services à l’échelle de grands territoires. Offrir des services à une personne immigrante dans une petite localité du Nord de l’Ontario demande en général davantage de ressources que d’offrir des services à une personne au profil similaire qui s’installerait au centre-ville de Toronto.
9) Accélérer la reconnaissance des acquis et faciliter l’accès à l’information sur le sujet
- Il s’avère que le principal facteur pouvant mener à un départ est une situation professionnelle insatisfaisante. Or, plusieurs personnes rencontrées occupent un poste pour lequel elles sont surqualifiées, notamment en raison de défis liés à la reconnaissance de leurs acquis (formation et compétences) au Canada. Pour appuyer la rétention, les provinces, avec l’appui du gouvernement fédéral, gagneraient à financer davantage de projets novateurs visant la reconnaissance des acquis au moyen d’une formation accélérée, en collaboration avec les établissements d’enseignement postsecondaire et les ordres professionnels. De plus, avant d’entreprendre leurs démarches d’immigration, les personnes immigrantes ont besoin d’information claire, précise et en français sur la reconnaissance des acquis (procédure à suivre, durée et couts associés). Des fiches personnalisées, tenant compte des domaines professionnels prioritaires et adaptées aux principaux pays d’origine et à la province de destination, pourraient être élaborées pour vulgariser cette information.
10) Appuyer les activités de valorisation de la diversité culturelle et les campagnes de démystification
- En ce qui concerne l’accueil de personnes immigrantes, les communautés n’ont pas le même niveau de préparation et le même historique. D’ailleurs, le Nord du Nouveau-Brunswick est parmi les régions ayant la plus faible proportion de population immigrante au pays. La littérature souligne que l’exposition limitée à la diversité est un facteur qui peut contribuer à des situations de discrimination et de méfiance à l’égard des personnes immigrantes. Dans de tels contextes, les activités de valorisation de la diversité culturelle revêtent une importance particulière pour sensibiliser les membres de la communauté d’accueil. Qui plus est, il semble aussi pertinent de lutter contre la désinformation et les mythes liés à l’immigration. Un financement pourrait être prévu pour mener des campagnes de sensibilisation à la diversité culturelle et de démystification des réalités de l’immigration. Pour joindre le public cible, il importe que les initiatives soient ancrées dans les réalités locales et reprennent des exemples concrets tirés des localités visées.
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Violette, I. (2014). L’immigration francophone en Acadie : langue, nation et minorité. Minorités linguistiques et Société, 4, 126–153.
Annexe I – Guide d’entretien (personnes immigrantes)
Le recrutement
- Quelles sont les raisons qui vous ont incité à venir vivre dans la région X?
- - En quoi la présence d’une communauté francophone a-t-elle affecté votre choix?
- - En quoi le caractère rural de la région a-t-il affecté votre choix?
- Comment avez-vous entendu parler des possibilités d’immigration dans la région X?
- - Rôle de l’employeur? D’organismes communautaires francophones? Des gouvernements? Des connaissances? Par les réseaux sociaux ou sur Internet?
- - Aviez-vous déjà visité la région X auparavant? Lors d’une visite exploratoire?
- Avez-vous participé à des salons, des foires ou d’autres grands évènements de recrutement (en personne ou en virtuel)? Pouvez-vous nous partager votre expérience?
- - En quoi cette participation vous a-t-elle été utile? Comment cela a-t-il contribué à votre installation dans la région X?
- - Est-ce que des éléments pourraient être faits différemment pour améliorer les activités de recrutement?
La période prédépart
- Avant d’arriver au Canada, comment avez-vous préparé votre arrivée? Comment vous êtes-vous informé sur la région X? Est-ce que la région X était votre première destination au Canada?
- - Êtes-vous satisfait des informations auxquelles vous avez eu accès avant votre arrivée?
- - Quelles informations auriez-vous aimé avoir avant votre arrivée au pays et que vous n’avez pas eues?
- - Avez-vous vécu des défis particuliers dans l’organisation de votre arrivée?
- Avez-vous utilisé des services prédépart? Le cas échéant, pouvez-vous nous partager votre expérience?
- - Comment avez-vous appris l’existence de ces services?
- - Est-ce que ces services ont répondu à vos besoins? Comment pourraient-ils être bonifiés?
La période d’accueil
- Comment s’est déroulée votre arrivée dans la région X? Les premiers jours? Les premières semaines?
- - Quels ont été les principaux défis rencontrés lors de votre période d’installation (recherche d’un logement, formalités administratives, orientation, inscription des enfants à l’école, transport, etc.)?
- - Quels ont été les principaux facteurs (réseaux, services, etc.) qui ont facilité votre installation? Quelle aide avez-vous trouvée à votre arrivée?
- - Quels appuis complémentaires auraient facilité votre installation? Quelle organisation est la plus à même de fournir cet appui?
- Quels services d'établissement avez-vous utilisés depuis votre arrivée dans la région X? Pouvez-vous nous partager votre expérience?
- - Comment avez-vous appris l’existence de ces services?
- - Est-ce que ces services ont répondu à vos besoins?
- Le cas échéant, pourquoi n’avez-vous pas fait appel aux services d'établissement?
L’insertion économique
- Aujourd’hui, comment décririez-vous votre insertion professionnelle? Est-ce que votre travail correspond à votre formation et à votre niveau d’expérience?
- Quels ont été les principaux obstacles (réseaux, ressources, services, compétences, connaissances, attitudes, etc.) rencontrés en ce qui a trait à votre insertion économique?
- - En ce qui a trait à la recherche d’emploi?
- - En ce qui a trait à l’intégration en emploi?
- - En ce qui a trait aux conditions de travail?
- - Pensez-vous que les employeurs hésitaient à vous embaucher en raison de votre statut de personne immigrante? De minorité visible? De francophone? Expliquez.
- - En quoi vos compétences en anglais et/ou en français ont-elles affecté vos capacités à intégrer le marché du travail?
- Quels ont été les principaux facteurs (réseaux, ressources, services, compétences, etc.) qui ont facilité votre insertion économique?
- - En ce qui a trait à la recherche d’emploi? Le cas échéant, quels réseaux personnels, quelles ressources ou quels services vous ont aidé à trouver un emploi? De quelle façon ces éléments ont-ils été utiles?
- - En ce qui a trait à l’intégration en emploi?
- Quels appuis complémentaires auraient facilité votre insertion économique?
- - Quelle organisation est la plus à même de fournir cet appui?
L’insertion sociale
- Aujourd’hui, comment décririez-vous votre insertion sociale?
- - Avez-vous tissé des liens significatifs depuis votre arrivée dans la région X? Dans la communauté francophone?
- Selon votre expérience, comment décririez-vous l'ouverture de la population locale par rapport à ceux et celles qui viennent d’ailleurs? par rapport aux francophones?
- - Quel est votre rapport à la population dans son ensemble? À la communauté francophone?
- Quels ont été les principaux obstacles rencontrés en ce qui a trait à votre insertion sociale?
- - En quoi vos compétences en anglais et/ou en français ont-elles affecté votre insertion sociale?
- - Est-ce que votre statut de personne immigrante a eu un impact sur votre insertion sociale? De minorité visible? De francophone? Expliquez.
- Quels sont les principaux facteurs (réseaux, ressources, services, compétences, etc.) qui ont facilité votre insertion sociale?
- - Avez-vous participé à des activités sociales organisées par des organismes francophones? Par d’autres organismes? Pouvez-vous nous partager votre expérience?
- - Vous impliquez-vous dans votre milieu d’accueil? Pourquoi? Qu’en est-il des membres de votre famille (si applicable)?
- En quoi le fait de vivre en région rurale a-t-il eu un impact sur votre parcours d’intégration?
- Si vous avez des enfants, pouvez-vous nous parler de leur intégration à l’école? Facteurs de succès? Défis? Quelle est la langue d’enseignement principale de l’établissement qu’ils fréquentent?
- Si vous avez une conjointe ou un conjoint, pouvez-vous nous parler de leur intégration sociale et professionnelle? Facteurs de succès? Défis?
- Quels appuis complémentaires auraient facilité votre insertion sociale?
- - Quelle organisation est la plus à même de fournir cet appui?
La rétention
- Avez-vous plutôt l’intention de rester dans la région X ou de partir?
- - Le cas échéant, dans combien de temps pensez-vous partir? Pour aller où?
- Quelles sont les raisons qui vous incitent ou qui pourraient vous inciter à quitter la région X (emploi, contexte rural, qualité de vie, la famille ou les amis, l’accès aux services, etc.)?
- Quelles sont les raisons qui vous incitent ou qui pourraient vous inciter à rester dans la région X (emploi, contexte rural, qualité de vie, la famille ou les amis, etc.)?
Généralités
- En quoi votre expérience dans la région X correspond-elle aux attentes que vous aviez avant votre arrivée?
- Selon vous, quels sont les principaux atouts de la région X pour l’accueil et la rétention de personnes immigrantes francophones? Les principaux défis?
- [Pour les personnes qui habitent désormais une autre région]. Quels sont les principaux atouts de votre nouveau lieu de vie par rapport à la région X? Les principaux défis?
- - Envisagez-vous un retour dans la région X? Pourquoi?
- Avez-vous quelque chose à ajouter quant à la manière dont votre parcours migratoire aurait pu être plus positif?
Annexe II – Guide d’entretien (parties prenantes)
- En quoi consiste votre fonction professionnelle se rapportant à l’immigration francophone? Quel est le rôle de votre organisation à l’égard des personnes immigrantes francophones?
- Comment se déploient les activités de recrutement de la population immigrante francophone dans la région X?
- - Quel est le rôle joué par divers acteurs (Par ex. entrepreneurs locaux, représentants municipaux, organismes communautaires) dans le recrutement?
- - En quoi les activités de recrutement actuelles sont-elles optimales? Quelles sont les pratiques prometteuses en place?
- - En quoi les activités de recrutement actuelles présentent-elles des limites? Comment pourraient-elles être améliorées?
- - Selon vous, quels facteurs incitent les personnes immigrantes francophones à s’installer dans la région X?
- D’après vous, comment se déroule l’accueil des personnes immigrantes francophones dans la région X?
- - Quel est votre rôle à cet égard?
- - Dans quels contextes cet accueil est-il plutôt positif? Plutôt négatif? Quels sont les enjeux rencontrés?
- - Quelles ressources ou quels services formels ou informels sont mobilisés pour faciliter l’accueil et l’établissement des personnes immigrantes francophones? En quoi ces ressources et services sont-ils comparables à ce qui existe en anglais ou en milieu urbain?
- D’après vous, comment se déroule l’insertion économique des personnes immigrantes francophones dans la région X?
- - Quel est votre rôle à cet égard?
- - Dans quels contextes cette insertion est-elle plutôt positive? Plutôt négative? Quels sont les enjeux rencontrés?
- - Quelles ressources ou quels services formels ou informels sont mobilisés pour l’insertion économique des personnes immigrantes francophones? En quoi ces ressources et services sont-ils comparables à ce qui existe en anglais ou en milieu urbain?
- D’après vous, comment se déroule l’insertion sociale des personnes immigrantes francophones dans la région X?
- - Quel est votre rôle à cet égard?
- - Dans quels contextes cette insertion est-elle plutôt positive? Plutôt négative? Quels sont les enjeux rencontrés?
- - Quelles ressources ou quels services formels ou informels sont mobilisés pour l’insertion sociale des personnes immigrantes francophones? En quoi ces ressources et services sont-ils comparables à ce qui existe en anglais ou en milieu urbain?
- Selon vous, quels sont les facteurs qui incitent la population immigrante francophone à continuer de vivre dans une communauté rurale ou, au contraire, à migrer vers un centre urbain?
- - Qu’est-ce qui pourrait être fait pour davantage favoriser la rétention des personnes immigrantes au sein des communautés francophones en milieu rural?
- Quelles ressources ou quels services devrait-on mettre en place pour faciliter l’établissement, l’insertion sociale et économique ainsi que la rétention des personnes immigrantes francophones en milieu rural? Existe-t-il quelque chose de similaire du côté anglophone ou en milieu urbain?
- - Quels services et initiatives devraient être modifiés ou davantage soutenus par IRCC afin de favoriser l’immigration francophone en milieu rural?
Annexe III – Formulaire de consentement de participation à la recherche
Le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés rurales du nord de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick
J’accepte de participer à ce projet de recherche codirigé par Mariève Forest et Guillaume Deschênes-Thériault de la firme Sociopol. Cette recherche bénéficie d’un appui financier de la part du ministère Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
Objectifs de la recherche
L'objectif de cette recherche est de mieux comprendre le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés francophones situées en milieu rural dans le Nord de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick. Ce faisant, nous chercherons à saisir les obstacles et les facteurs de réussite quant au recrutement, à l’établissement, à l’intégration et à la rétention de personnes immigrantes d’expression française en milieu rural et la manière dont cette population peut vivre des expériences d’établissement et d’intégration plus positives.
Ma participation
Ma participation consistera essentiellement à réaliser une entrevue enregistrée d’une durée d’environ une heure (1h). Pendant cette entrevue, je serai invité.e à répondre aux questions du chercheur à propos de ma trajectoire professionnelle. Je comprends que les passages pertinents de l’entrevue seront transcrits par l’équipe de recherche ou par un logiciel et qu’ils seront ensuite analysés. Je confirme être âgé de 18 ans ou plus.
Pourquoi participer à cette recherche?
Il est très important pour une communauté linguistique en situation minoritaire de comprendre ce qui conduit ses membres à s’insérer socialement et économiquement au sein de la communauté et à y demeurer. Par mon expérience, je suis à même de contribuer de manière déterminante à une meilleure connaissance de ces facteurs. C’est pour cela que l’équipe de recherche s’est permis d’entrer en contact avec moi. Cette participation peut aussi permettre de faire un bilan de mon expérience humaine et professionnelle ici. Bien entendu, l’aide sollicitée est facultative, même si celle-ci reste très importante!
Compensation financière
Je recevrai une compensation financière de 30 $ pour ma participation à l’entrevue.
Utilisation des données
Je m’attends à ce que le contenu ne soit utilisé qu’aux fins de la recherche et que l’équipe de recherche respecte la confidentialité et l’anonymat de mes propos. L’équipe s’engage à ce que toutes les mesures soient prises pour conserver l’anonymat des personnes interrogées : les informations nominatives et les références à d’autres personnes ou organismes connus seront omises de la transcription.
Engagement de l’équipe de recherche et droits des personnes participantes
Je comprends que ma participation à ce projet n’entraine pas de risques plus grands que ceux encourus dans la vie de tous les jours. Le respect du droit continu du sujet à l’information concernant ce projet est garanti. Je comprends aussi que je suis libre de me retirer de la recherche à tout moment, avant ou pendant une entrevue, sans justification ni préjudice. De même, je peux refuser de répondre à certaines questions.
L’équipe s’engage à ce que toutes les mesures soient prises pour conserver l’anonymat des personnes interrogées : les informations nominatives et les références à d’autres personnes ou organismes connus seront omises de la transcription. Les fichiers électroniques des entrevues et des autres données recueillies seront entreposés sur un serveur virtuel sécurisé. Ils seront accessibles seulement pour l’équipe de recherche et seront entreposés pour une période d’au moins cinq ans suivant la réalisation de l’entretien. Avant la publication de la recherche, je peux demander à tout moment que le contenu de l’entretien ne soit pas utilisé en communiquant avec les responsables de la recherche.
Communications
Pour obtenir de plus amples renseignements sur ce projet ou sur mes droits comme participant.e à cette recherche, je peux communiquer avec les personnes responsables de cette recherche, soit Mariève Forest ou Guillaume Deschênes-Thériault.
Coordonnées de la cochercheuse et du cochercheur principaux
Mariève Forest
Chercheuse principale chez Sociopol et
Professeure invitée à l’École d’études sociologiques et anthropologiques – Université d’Ottawa
marieveforest@sociopol.ca
(819) 661-4787
Guillaume Deschênes-Thériault
Chercheur associé chez Sociopol et
Doctorant à l’École d’études politiques – Université d’Ottawa
guillaumedt@sociopol.ca
(506) 284-0226
Signatures
Il y a deux copies du formulaire de consentement, dont une que je peux garder.
J’ai compris les informations relatives à ce projet de recherche et je comprends que je peux poser des questions en tout temps. Je comprends que je peux mettre fin à ma participation à tout moment sans avoir à me justifier de quelque manière que ce soit et que, si je me retire avant la fin de l’entrevue, les enregistrements et les données collectées seront détruits. Par la présente, je consens librement à participer à ce projet de recherche selon les conditions qui viennent d’être spécifiées ci-dessus.
Nom de la personne consentante en lettres moulées
Signature de la personne consentante
Date
Je certifie avoir expliqué au signataire les termes du présent formulaire, les objectifs et les implications du projet de recherche, avoir répondu clairement à ses questions et lui avoir indiqué qu’elle ou il reste à tout moment libre de mettre fin à sa participation au projet de recherche décrit sans avoir à se justifier de quelque manière que ce soit et sans préjudice.
Nom de la chercheuse ou du chercheur en lettres moulées
Signature de la chercheuse ou du chercheur
Date
Annexe IV – Questionnaire de recrutement
Le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés rurales du nord de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick
Nous vous remercions de votre intérêt à participer à une entrevue dans le cadre de l'étude sur le parcours des personnes immigrantes d’expression française au sein des communautés rurales du nord de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick, commanditée par le ministère Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
Nous estimons qu'il vous faudra moins de 5 minutes pour remplir ce questionnaire qui sert à préciser les profils migratoires et sociodémographiques des personnes désirant participer à l'étude et à assurer la diversité des profils des personnes interrogées.
Vos réponses au questionnaire resteront confidentielles et n'auront aucune incidence sur vos relations présentes ou futures avec les instances gouvernementales au Canada. Tous les renseignements recueillis au cours du questionnaire seront traités conformément aux lois relatives à la protection des renseignements personnels.
Si vous désirez recevoir plus d'informations au sujet du projet, nous vous invitons à communiquer avec la Direction de la recherche sur les politiques d'IRCC (IRCC.OLImmigrationResearch-RechercheImmigrationLO.IRCC@cic.gc.ca) ou avec Mariève Forest (marieveforest@sociopol.ca), responsable du projet à Sociopol.
Q1 Où êtes-vous né?
- Au Canada
- À l’extérieur du Canada (précisez le pays svp)
Q2 Quel est votre groupe d’âge?
- 17 ans ou moins
- 18 à 25 ans
- 26 à 35 ans
- 36 à 45 ans
- 46 à 55 ans
- 56 à 65 ans
- 66 ans et plus
Q3 Vivez-vous présentement ou avez-vous vécu (plus de 6 mois) dans le Nord du Nouveau-Brunswick ou dans le Nord de l’Ontario?
- Non
- Oui, j’habite présentement dans le Nord du Nouveau-Brunswick
- Oui, j’ai déjà habité le Nord du Nouveau-Brunswick, mais j’habite ailleurs maintenant
- Oui, j’habite présentement dans le Nord de l’Ontario
- Oui, j’ai déjà habité le Nord de l’Ontario, mais j’habite ailleurs maintenant
Si oui, veuillez préciser la ou les localités habitées dans le Nord du Nouveau-Brunswick ou de l’Ontario.
Q4 Depuis combien de temps vivez-vous au Canada?
- Moins d’un an
- 1 an ou 2 ans
- De 3 à 5 ans
- De 6 à 10 ans
- Plus de 10 ans
Q5 Quel est votre statut actuel au Canada?
- Citoyen de naissance
- Citoyen naturalisé
- Résident permanent
- Résident temporaire (permis d’études)
- Résident temporaire (permis de travail)
- Résident temporaire (demandeur d’asile)
[Les questions 1 à 5 déterminent l’admissibilité à l’étude. Seules les personnes admissibles seront invitées à poursuivre le questionnaire.]
Q6 Où habitez-vous présentement (localité et province)?
Q7 À travers quelle catégorie ou quel programme avez-vous obtenu votre résidence permanente? [Question qui s’affichera uniquement pour les personnes ayant indiqué être résident permanent ou citoyen canadien]
- Programmes économiques fédéraux gérés dans Entrée express (travailleurs qualifiés, métiers spécialisés ou catégorie de l’expérience canadienne)
- Programme des candidats des provinces
- Programme d’immigration au Canada atlantique
- Programme pilote d’immigration dans les communautés rurales et du Nord
- Voie d’accès de la résidence temporaire à la résidence permanente
- Programme des gens d’affaires
- Famille parrainée
- Personnes réfugiées réinstallées et personnes protégées au Canada
- Autre (veuillez préciser)
Q8 Comment évaluez-vous votre maitrise des langues officielles
Aucune | Débutante | Intermédiaire | Avancée | |
Français | ||||
Anglais |
Q9 Considérez-vous faire partie d’une minorité visible?
- Oui
- Non
- Je préfère ne pas répondre
Q10 Quel est votre genre?
- Femme
- Homme
- Trans, genre fluide, non binaire ou bispirituel
- Je préfère ne pas répondre
Q11 Pour que nous puissions communiquer avec vous en vue de réaliser une entrevue, veuillez partager les informations suivantes :
Prénom
Nom de famille
Adresse courriel
Numéro de téléphone
Merci beaucoup d'avoir pris le temps de remplir ce questionnaire! Nous communiquerons avec vous sous peu pour planifier une entrevue si vous êtes sélectionné(e).
Annexe V - Caractéristiques de l’échantillon de personnes immigrantes interrogées
Genre | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Femme | 13 | 8 | 21 |
Homme | 7 | 12 | 19 |
Groupe d’âge | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
18 à 25 ans | 2 | 2 | 4 |
26 à 35 ans | 8 | 7 | 15 |
36 à 45 ans | 7 | 10 | 17 |
46 à 55 ans | 2 | 1 | 3 |
56 à 65 ans | 1 | 0 | 1 |
Minorité visible | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Oui | 6 | 18 | 24 |
Non | 14 | 2 | 16 |
Lieu de naissance | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Afrique du Nord | 3 | 3 | 6 |
Afrique subsaharienne | 9 | 16 | 25 |
Amérique du Sud | 2 | 0 | 2 |
Europe | 6 | 1 | 7 |
Niveau de compétence en anglais | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Débutant | 7 | 10 | 17 |
Intermédiaire | 13 | 6 | 19 |
Avancé | 0 | 4 | 4 |
Niveau de compétence en français | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Débutant | 0 | 0 | 0 |
Intermédiaire | 2 | 0 | 2 |
Avancé | 18 | 20 | 38 |
Temps passé au Canada | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Moins d'un an | 5 | 7 | 12 |
1 à 2 ans | 9 | 10 | 19 |
3 à 5 ans | 4 | 1 | 5 |
6 à 10 ans | 2 | 2 | 4 |
Statut | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Étudiant étranger | 1 | 1 | 2 |
Travailleur temporaire | 4 | 6 | 10 |
Résident permanent | 14 | 13 | 27 |
Citoyen naturalisé | 1 | 0 | 1 |
Programme d’immigration | Nouveau-Brunswick | Ontario | Échantillon total |
---|---|---|---|
Programme des candidats des provinces | 10 | 1 | 11 |
Catégorie de l’expérience canadienne ou Programme des travailleurs qualifiés | 2 | 11 | 13 |
Voie d’accès de la résidence temporaire à la résidence permanente | 2 | 1 | 3 |
Demandeur secondaire | 1 | 0 | 1 |
Annexe VI – Profil sociodémographique des populations du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario
Nouveau-Brunswick | Ontario | |||
---|---|---|---|---|
Données | Proportion | Données | Proportion | |
Population totale | 775 610 | 14 223 942 | ||
Taux de variation de la population entre 2016 et 2021 | 3,8 % | 5,8 % | ||
Âge médian de la population | 46,8 ans | 41,6 ans | ||
Revenu total médian en 2020 des bénéficiaires d’un revenu | 37 600 $ | 41 200 $ | ||
Population déclarant appartenir à une minorité visible | 44 205 | 6 % | 4 817 360 | 34 % |
Personnes ayant le français comme première langue officielle parlée (seulement ou le français et l’anglais) | 234 370 | 30 % | 583 145 | 4 % |
Personnes ayant une connaissance du français (seulement ou du français et de l’anglais) | 320 295 | 41 % | 1 558 675 | 11 % |
Personnes ayant une connaissance du français et de l’anglais | 260 120 | 34 % | 1 519 365 | 11 % |
Population immigrante | 44 120 | 6 % | 4 206 585 | 30 % |
Population immigrante récente (2011 à 2021) | 16 040 | 2 % | 584 680 | 4 % |
Population de résidents non permanents | 10 860 | 1 % | 387 850 | 3 % |
Source : Statistique Canada (2021)
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