Développer le potentiel économique : le plan du Canada pour le leadership industriel

Discours

Allocution de la ministre de l’Industrie et ministre responsable de Développement économique Canada pour les régions du Québec, l’honorable Mélanie Joly, devant des groupes d’affaires et des chambres de commerce en octobre 2025.

Je suis ravie d’être ici avec vous tous, des dirigeants qui comprennent une vérité simple : la force d’un pays est toujours fonction de la force de son économie.

Autrement dit, l’ancien guide qu’on suivait ne s’applique plus.

On vit dans un monde beaucoup plus compliqué, complexe et dangereux. Je l’ai vu de mes propres yeux, ayant assumé des fonctions diplomatiques en tant que ministre des Affaires étrangères.

J’ai pu constater les tensions commerciales à partir de la scène diplomatique. Maintenant, je me retrouve plutôt sur la scène économique. J’avais l’habitude de me pencher sur les causes, et je m’attarde désormais aux conséquences. Au cours des dernières années, la sécurité s’est détériorée partout dans le monde en raison des guerres, mais aussi de la hausse des tensions économiques.

Et on sait que la sécurité et l’économie vont de pair.

À bien y réfléchir, nos vieilles alliances ne fonctionnent plus vraiment. Le concept d’une base de consommateurs en constante expansion grâce au libre-échange est en péril.

Alors, que faire? Car, fondamentalement, on doit stimuler la croissance économique de notre pays. Il est important de pouvoir nous offrir, à nous-mêmes et aux Canadiens, une société juste, un filet de sécurité sociale, qui nous permet de nous faire confiance, de prendre soin les uns des autres et, au bout du compte, de maintenir la paix chez nous. On va devoir continuer de composer avec l’incertitude. Ça va être une réalité pour toutes les entreprises, et ça va être sans aucun doute la réalité du gouvernement. Il y a des choses qu’on ne peut pas contrôler, mais il y a beaucoup d’éléments qu’on peut contrôler.

Il faut donc se concentrer sur ces derniers éléments.

Notre mission, comme l’a dit le premier ministre, est de bâtir une seule économie canadienne forte. Et on a tout ce qu’un pays aimerait avoir. Il est évident qu’on dispose de gens, de talents et de ressources naturelles de grande qualité.

On a aussi droit à la paix, à l’ordre et à un bon gouvernement. Il faut mobiliser nos forces et élaborer un plan d’envergure.

Voici le plan. Tout d’abord, on va protéger. Deuxièmement, on va créer. Troisièmement, on va attirer.

Commençons par le premier pilier : protéger. On va protéger les industries et les emplois. Dans le contexte actuel, certains secteurs de l’économie sont encore victimes des droits de douane. Il s’agit bien sûr de l’acier, de l’aluminium, de l’automobile, du bois d’œuvre et du cuivre.

Et voici ce qu’on va faire. À court terme, on va protéger notre marché. On va soutenir les industries et les entreprises de ces secteurs.

À moyen terme, on va aider ces entreprises à s’adapter et à changer de cap. Elles doivent être en mesure de trouver de nouveaux marchés et de mettre au point de nouveaux produits. On leur offre un appui financier par l’entremise du nouveau Fonds de réponse stratégique de 5 milliards de dollars et de nos agences de développement régional.

Enfin, à plus long terme, on doit poursuivre sans relâche la mise en place d’un marché national, au moyen de nos investissements en défense, de notre politique « Achetez canadien », de notre stratégie en matière de logement et de nos grands projets nationaux.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples. Prenons l’acier. Il existe plusieurs usines d’envergure partout au pays. L’une d’entre elles est Algoma, qui appartient à des intérêts canadiens et qui est très importante pour l’Ontario et Sault Ste. Marie. On vient d’investir pour que l’entreprise puisse profiter d’un prêt de 400 millions de dollars. Mais vous savez quoi? Alors que le modèle d’affaires d’Algoma Steel était essentiellement lié au marché automobile américain, l’entreprise a maintenant reçu une nouvelle commande d’acier du chantier naval Irving de Halifax, qui construit des frégates canadiennes pour notre marine.

C’est un début. Bien sûr, ce n’est pas la seule solution, mais on veut voir plus de situations comme celle-là. L’entreprise a maintenant conclu un protocole d’entente avec Seaspan, l’autre chantier naval du côté du Pacifique, à Vancouver.

Je vous parlais également de l’importance d’exploiter de nouveaux marchés. La diversification du commerce est en cours. Je vous donne un autre exemple, celui d’Alouette, dans le nord du Québec, dans le secteur de l’aluminium. Au premier trimestre cette année, Alouette exportait une grande majorité de sa production vers les États-Unis, et seulement 4 % vers l’Europe. Au deuxième trimestre, 57 % de sa production a été envoyée en Europe.

C’est donc possible, même dans un secteur aussi important que celui de l’aluminium.

Ensuite, parlons de l’automobile. Je vous assure qu’on va se battre pour chaque emploi dans ce secteur. On va travailler de pair avec la main-d’œuvre, les syndicats, les usines, les entreprises et les industries parce qu’on doit être là pour le secteur automobile. On est déjà passés par là. Quand on a imposé des contre-mesures, on avait mis au point un système de remise de droits.

Grâce au Fonds de réponse stratégique, on s’emploie à faire les bons investissements stratégiques dans ces usines. Mais permettez-moi d’être de nouveau très claire : l’économie de l’Ontario ne peut pas bien aller si le secteur automobile ne se porte pas bien. On le sait tous. Mais je viens du Québec et je comprends que si l’économie de l’Ontario ne va pas bien, l’économie du pays ne va pas bien non plus. On va donc se battre pour que le secteur automobile soit vigoureux en Ontario.

Quand il s’agit de protéger les emplois, on ne va pas laisser tomber ces industries. On va travailler dans l’intérêt de notre main-d’œuvre, de nos industries et de notre pays.

Passons maintenant au deuxième pilier de ce plan : créer. On parle de la création d’emplois et, bien sûr, au-delà de ça, de la création d’industries. Chaque crise s’accompagne d’occasions. On doit agir avec audace, intention et détermination. Même si certains points échappent à notre contrôle, la création d’emplois est une chose qu’on peut contrôler. Et on peut le faire de trois manières. Je vais commencer par aborder nos investissements en défense, puisqu’on va investir dans la défense comme jamais auparavant.

Quand je parle de défense, je parle de notre capacité de faire face à diverses menaces visant notre pays. Les premières choses qui peuvent nous venir en tête sont la terre, la mer et l’air. Mais il faut également penser à la cybersécurité, aux menaces pour notre santé, comme les pandémies, ou même aux répercussions des changements climatiques, comme les feux de forêt. Notre définition de la défense est bien vaste.

On va se pencher sur l’élaboration d’une stratégie industrielle en défense. Et dans le cadre de cette stratégie, on va procéder à des achats. On va acheter, construire et former des partenariats.

Qu’est-ce que je veux dire exactement? En examinant les capacités militaires des Forces armées canadiennes, on constate parfois qu’il y a du matériel qu’on ne construit pas encore au Canada. On doit donc l’acheter. Le meilleur exemple est celui de notre approvisionnement actuel en sous-marins. Deux entreprises sont en concurrence pour accéder à notre marché. Ce sera soit le consortium dirigé par TKMS, de l’Allemagne et de la Norvège, ou Hanwha de la Corée du Sud. Qu’il s’agisse de TKMS ou de Hanwha, on va veiller à ce qu’il y ait du contenu canadien, à ce que les entreprises canadiennes fassent partie de la chaîne d’approvisionnement et, en fin de compte, à ce qu’on ait le contrôle de la propriété intellectuelle et qu’on puisse créer des emplois par l’intermédiaire de cet approvisionnement.

C’est ce que j’entends par « acheter ». Maintenant, on peut passer à la construction. On peut construire encore plus avec notre argent, c’est-à-dire avec nos investissements en défense. Plus tôt, j’ai mentionné nos chantiers navals. Depuis 15 ans, on a une Stratégie nationale de construction navale. Sur la côte atlantique, Irving construit de grands navires. Sur la côte pacifique, il y a Seaspan, à Vancouver. Et on a Davie, à Québec, qui construit des navires de classe mondiale et des brise-glaces pour l’Arctique.

À ce stade, on s’attend à ce que ces chantiers navals fassent beaucoup plus que de contribuer à renforcer les capacités militaires des braves hommes et femmes qui constituent nos forces armées. Ils doivent exporter. Tous les pays de la planète augmentent leurs dépenses en matière de défense, en particulier les pays de l’OTAN. Il existe donc un marché. Notre industrie de la construction navale arrive à maturité et c’est pourquoi on envisage de l’aider à exporter.

On sait qu’on peut en faire plus. De Havilland, à Calgary, construit de fantastiques bombardiers d’eau. Vous savez, ces bombardiers d’eau canadiens qu’on a vus à Los Angeles, ils avaient été fabriqués à Calgary. On doit veiller à ce que les bombardiers d’eau soient construits ici. On peut aussi fabriquer les satellites qu’il nous faut. En bref, on veut construire pour le Canada, mais également pour le monde. On pense évidemment à l’intelligence artificielle. Il existe une formidable entreprise canadienne dans ce domaine, Cohere, qui vient de l’Ontario, et on va assurer son expansion.

Enfin, on va former des partenariats. Parfois, on est plus forts dans le cadre d’un projet conjoint. Par exemple, Bombardier et la société suédoise Saab collaborent actuellement à la mise au point du meilleur avion de surveillance au monde, le GlobalEye. Les Émirats arabes unis viennent d’en acheter deux. La France en a aussi acheté. D’après ce que j’ai entendu dire, d’autres pays s’y intéressent également. On doit travailler en partenariat avec la Suède dans ce domaine, car il existe un marché. On va construire ces avions ici, ainsi qu’en Suède, et on va les vendre au monde entier.

C’est donc en achetant, en construisant et en formant des partenariats qu’on va créer des emplois grâce à notre stratégie industrielle de défense.

On peut construire les meilleurs navires, avions et drones, et on dispose de chaînes d’approvisionnement très solides partout au pays. On peut mettre à profit nos chercheurs, ingénieurs et soudeurs. On va veiller à ce que le Conseil national de recherches Canada, nos conseils de recherche et l’Agence spatiale canadienne soutiennent cet écosystème et on peut demander à la Banque de développement du Canada de le faire aussi. Et on vient tout juste d’annoncer la création de l’Agence de l’investissement pour la défense afin d’accélérer les efforts dans ce domaine. Finalement, on va utiliser le pouvoir de l’approvisionnement pour créer des emplois, puisque j’ai appris que les entreprises préfèrent avoir des contrats plutôt que des subventions du gouvernement.

On parle toujours de création d’emplois. On en est encore au deuxième pilier du plan. On a abordé la stratégie industrielle de défense. Le premier ministre accorde une grande importance aux grands projets. Vous êtes au courant des mesures qu’on met en place pour bâtir une seule économie canadienne forte. On a également adopté le projet de loi C-5 pour accélérer l’approbation des projets. On a mis sur pied le Bureau des grands projets et on a nommé sa première dirigeante, Dawn Farrell. On a soumis au nouveau Bureau, cinq projets dans les domaines de l’énergie, de l’exploitation minière et des transports afin de les mener à terme. Cette première tranche de cinq projets représente des investissements privés de 60 milliards de dollars et des milliers d’emplois.

Le Canada va être le premier pays du G7 à construire de petits réacteurs modulaires, et ça va se passer à Darlington, en Ontario. Ça correspond à 3 000 emplois. Et, bien sûr, n’oublions pas le train à grande vitesse entre Toronto et Québec.

Ensemble, on va créer des milliers d’emplois dans les secteurs de l’ingénierie et de la construction, ainsi que dans les chaînes d’approvisionnement, avec les PME. On va bâtir des communautés et travailler avec les communautés autochtones, ce qui est primordial, car elles doivent pouvoir participer à la prise de décisions. On va veiller à ce qu’elles aient leur place dans le processus décisionnel, et qu’elles puissent avoir des participations en capital dans ces grands projets et créer des leviers de développement économique qui sont si importants pour elles partout au pays. C’est la réconciliation en action.

Pendant qu’on se penche sur tous ces grands projets, pensons aux secteurs de l’acier et de l’aluminium qui vont voir leur demande augmenter. On doit donc s’assurer que les différentes entreprises sidérurgiques collaborent avec tous les promoteurs de grands projets.

Enfin, en ce qui concerne la création d’emplois, on va former des fleurons canadiens. Je sais que c’est un sujet dont les représentants gouvernementaux n’ont pas nécessairement beaucoup parlé dans le passé parce qu’il était un peu tabou. Mais je suis originaire de Montréal et on est très fiers d’avoir des entreprises canadiennes solides comme CGI, CAE, Alimentation Couche-Tard et Bombardier. Il nous en faut plusieurs autres. À Toronto, on a Agnico, une entreprise incontournable. On a aussi Thompson Reuters et Aliments Maple Leaf. À l’autre bout du pays, on a Aritzia et lululemon. On a besoin de plus d’entreprises comme celles-là et on doit assurer leur croissance. On a besoin d’entreprises canadiennes de plus grande importance. Et on doit veiller à ce que ces entreprises prennent de l’expansion et à ce qu’il y ait un plus grand nombre de ces fleurons canadiens.

Pourquoi? Évidemment pour créer des emplois chez nous et dans le monde entier. Mais dans un monde beaucoup plus complexe, de quoi a-t-on besoin? On doit accroître notre influence. On a besoin d’un pouvoir discret. C’est pourquoi il est important de mettre sur pied des entreprises canadiennes solides. On veut leur ouvrir des marchés, les promouvoir, les aider à prendre de l’expansion et, en fin de compte, assurer leur vigueur au pays et à l’étranger.

Passons au troisième pilier du plan : attirer. Il faut attirer les investissements et les talents. Commençons par attirer les talents. Alors que d’autres pays portent atteinte à la liberté universitaire et à la recherche, on va investir et redoubler d’efforts. On croit en la science et en la recherche.

Mon secrétaire parlementaire et moi, on a passé beaucoup de temps à rencontrer des représentants d’université et des chercheurs. Ils sont extrêmement importants pour notre système d’éducation, mais aussi pour notre économie. Notre objectif est d’attirer les meilleurs talents de la planète et d’accroître notre bassin de talents locaux. On va donc s’efforcer d’attirer encore plus de talents venant d’ailleurs dans le monde.

Enfin, mon dernier point est d’attirer des investissements. Les investisseurs cherchent actuellement à réduire leurs risques et certains d’entre eux sont beaucoup plus exposés à certains marchés. On peut les aider à réduire leurs risques. On peut leur procurer une certitude en matière d’investissement. On peut alléger le fardeau administratif, et on va le faire. On peut faire preuve de beaucoup plus de transparence, et on va le faire. On peut accélérer la délivrance des permis, et on va le faire en collaboration avec les différents ordres de gouvernement et les communautés autochtones. En fin de compte, ce que les investisseurs recherchent, c’est un environnement stable et sans surprises, et on peut leur offrir ça. On va s’assurer de saisir cette occasion.

Mon travail au sein du gouvernement consiste également à attirer les investissements directs étrangers. On va être prêts à faire des affaires et à attirer des investissements d’Europe, d’Asie et des pays du Golfe. Ça va être avantageux pour les Canadiens, tout comme pour les communautés autochtones. Le Canada est en tête de liste pour ce qui est d’attirer ce type d’investissement direct étranger, puisqu’il donne des résultats. Le Canada est l’un des meilleurs endroits au monde pour faire fructifier les capitaux.

En conclusion, je vous livre le message suivant : collaborons pour bâtir une seule économie canadienne forte en protégeant, en créant et en attirant.

Je vous ai présenté mes meilleures idées. Mais je suis prête à être remise en question, car c’est un moment charnière. Il ne s’agit pas de politiques abstraites. On a une vision. On a un plan. On parle de vrais investissements au profit de vraies personnes qui vont produire une vraie croissance ici même, chez nous.

On a un défi générationnel à relever, mais aussi une occasion générationnelle à saisir. Travaillons ensemble.

Merci.

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2025-10-21