Rapport annuel du Directeur du Service d'avocats de la défense 2011-12

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Introduction

1. Le rapport annuel couvre la période du 1er avril 2011 au 31 mars 2012. Il a été préparé conformément à l’article 101.20 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC) où sont énoncés les services juridiques dont l'exécution est confié au directeur du service d'avocats de la défense (DSAD) et qui exige de lui qu'il fasse un rapport annuel, au juge-avocat général (JAG), sur la prestation de ces services juridiques et l’exécution d'autres fonctions visant l'avancement du mandat du DSAD. Le colonel D.K. Fullerton agissait en qualité de directeur.

Rôle du DSAD et l'organisation et le personnel du Service d'avocats de la défense (SAD)

Rôle du DSAD

2. Conformément à l'article 249.18 de la Loi sur la défense nationale (LDN) le DSAD est nommé par le ministre de la Défense nationale. Bien qu’il exerce ses fonctions sous la direction générale du JAG, il le fait en toute indépendance, d'une manière compatible avec sa responsabilité de protection des intérêts personnels de ceux qui demandent à être conseillés ou représentés par le SAD ou par l'entremise de celui-ci. Tel qu'établi à l'article 101.20 des ORFC, le DSAD fournit et dirige la prestation des services juridiques suivants :

  • conseils juridiques à une personne arrêtée ou détenue;
  • service d'un avocat à un accusé dans les cas où il y a des motifs raisonnables de croire que l’accusé est inapte à subir son procès;
  • conseils juridiques à un officier chargé d'aider l'accusé ou à l'accusé sur des questions liées aux procès sommaires;
  • services d'un avocat pour une audition portant sur la détention avant procès, tenue aux termes du paragraphe 159(1) de la LDN;
  • services d'un avocat à un accusé en ce qui concerne une demande faite à une autorité de renvoi de connaître d'une accusation;
  • services d'un avocat à l’intimé lorsque le ministre interjette appel d'un verdict ou d'une sentence ou de la sévérité de la sentence prononcée par une cour martiale;
  • services d’un avocat à un appelant, avec l’approbation du comité d’appel prévu à l’article 101.21 des ORFC; et
  • conseils juridiques à une personne qui fait l’objet d’une enquête sous le régime du code de discipline militaire, d’une enquête sommaire ou d’une commission d’enquête.

Organisation et personnel du SAD

3. Au cours de la période visée par le présent rapport, le bureau du SAD était composé du directeur, de cinq avocats militaires de la Force régulière, d’un avocat militaire de la Force de réserve, en service de classe B, qui travaillaient au Centre Asticou de Gatineau, au Québec, et de cinq avocats militaires de la Force de réserve qui pratiquaient à divers endroits au Canada. Les avocats de la Force de réserve ont participé activement à la prestation de services juridiques et à l’exécution du mandat du SAD.

4. Le soutien administratif du SAD est assuré par deux commis de bureau occupant des postes classifiés CR5 et CR3 ainsi que par une parajuriste qui se charge des services de recherche juridique et du soutien administratif pour les cours martiales et les appels.

5. En vertu de l’article 249.2 de la LDN, le DSAD exerce ses fonctions sous la direction générale du JAG et celui-ci peut établir par écrit des lignes directrices ou donner des instructions concernant le SAD. Toutefois, au cours de la période visée par le rapport, aucune ligne directrice ni instruction n’a été émise.

Services et activités

Perfectionnement professionnel

6. Le Programme national de droit pénal est la principale source de formation sur le droit criminel pour les avocats de la défense du SAD. En juillet 2011, quatre avocats de la Force régulière et trois réservistes ont participé au programme. De plus, les avocats ont participé à un programme annuel du SAD qui comporte une formation interne de une journée traitant de sujets divers, y compris les développements survenus dans le droit criminel, les décisions de la Cour d’appel de la cour martiale (CACM) et les modifications à la LDN.

Services d’avocats de garde

7. Des services bilingues sont disponibles tous les jours, 24 heures sur 24 pour les membres des Forces canadiennes (FC) ainsi que pour toutes les autres personnes assujetties au code de discipline militaire pendant qu’elles sont en service à l’étranger. Les avocats du SAD assurent les communications verbales et écrites grâce à un numéro sans frais distribué à l'ensemble des FC, à un numéro du Réseau canadien de communications par commutation (RCCC) et par courriel, un moyen de communication dont la popularité grandit sans cesse. L'usage est habituellement comme suit :

  • une ligne d’accès 1-800 afin d'assurer la disponibilité d'avis juridiques au moment de l’arrestation ou de la détention; le numéro de cette ligne est fourni à la police militaire et aux autres autorités des FC susceptibles de participer à des enquêtes de nature disciplinaire ou criminelle, en plus d’être affiché sur le site Web du SAD;
  • un accès téléphonique direct standard, accessible aux personnes accusées qui sont assujettis au code de discipline militaire, afin qu’elles puissent obtenir des conseils concernant le choix entre la cour martiale et le procès sommaire, poser des questions sur d’autres sujets d’ordre disciplinaire ou sur tous les autres points autorisés en vertu des ORFC; et
  • les clients utilisent le courriel occasionnellement pour entrer en communication avec le SAD.

Au cours de la période visée par le rapport, les avocats du SAD ont traité 772 appels téléphoniques sur la ligne de l’avocat de service. La durée des appels a varié, mais, en moyenne, elle s'est établie à environ 20 minutes. Le nombre d’appels est inférieur à celui des années passées et il semble que les avocats de service ont oublié d’enregistrer un bon nombre d’appels dans notre système d'aide à la décision et de mesure du rendement. On croit que le nombre d’appels reçus est semblable à celui des années précédentes. Cette lacune a été corrigée et nous enregistrons maintenant plus de 100 appels par mois, ce qui correspond à nos attentes.

Services de cours martiales

8. Lorsqu’il fait face à une cour martiale, l’accusé a le droit de se faire représenter par un avocat du SAD aux frais de l'État, de retenir les services d’un avocat à ses propres frais ou de choisir de ne pas être représenté.

9. Nos dossiers indiquent, qu’au cours de la période visée par le rapport, les accusés ont été représentés par des avocats militaires du SAD dans soixante et une affaires devant des cours martiales. En vertu de l’autorité que lui confère l’article 249.21(2) de la LDN, le DSAD peut engager, aux frais de l'État, un avocat civil dans les cas où, après avoir reçu une demande de représentation par un avocat du SAD, il constate qu'aucun membre du bureau du SAD ne peut représenter la personne en particulier en raison, par exemple, d’un conflit d’intérêts ou parce qu’aucun officier approprié du SAD n’est disponible. Au cours de la période visée par le rapport, un avocat civil engagé par le SAD a plaidé lors de cinq cours martiales. Les accusations furent retirées dans deux autres causes faisant intervenir un avocat contractuel. Deux accusés ont été représentés, à leurs frais, par un avocat civil.

Services d’appel

10. Onze appels ont été devant la CACM à différents étapes pendant la période de référence 2011-2012. Dans tous les cas, sauf trois, l’appel a été interjeté par le militaire ou en son nom. Dans deux cas, l’appelant a subséquemment abandonné son appel parce que le comité d’appel a refusé sa demande de représentation par le DSAD aux frais de l'État.

11. Dans les trois cas où le Directeur – Poursuites militaires (DPM) a soumis un appel ou un appel incident, l’intimé a automatiquement eu le droit d’être représenté par un avocat du SAD. Dans l’un de ces dossiers, l’appelant a entamé la procédure en recourant aux services d’un avocat civil à ses propres frais, sans aucune assistance du SAD. Pendant cette période, des appelants ont soumis au comité d’appel, conformément à l’alinéa 101.20(2)h) des ORFC, huit demandes de représentation par le SAD. De ces huit demandes, six ont été approuvées par le comité d’appel et deux ont été refusées.

Le lecteur peut se rendre compte des points d'intérêts et de la teneur des appels logés pendant la période de référence en parcourant le résumé des dossiers en appendice.

Questions et préoccupations actuelles

12. Au cours de la période visée par le rapport, un certain nombre de domaines préoccupants ont été remarqués.

Personnel et soutien administratif du SAD

13. Au cours de cette période, nous nous sommes interrogés sur le caractère approprié des installations actuelles qui abritent le SAD au Centre Asticou. Le nombre de bureaux disponibles est inadéquat et le SAD empiète sur les installations de l’École de langues des Forces canadiennes pour loger sa parajuriste des appels. De plus, l’espace d’entreposage est inadéquat. Le DSAD a depuis trouvé de nouvelles installations au Centre Asticou et le déménagement se fera en 2012-2013.

14. Le poste d’assistante administrative de niveau CR-5 doit être réévalué et, peut-être, haussé à l’échelon AS pour refléter la nature du travail exécuté. Cela garantira un certain niveau de parité entre ce poste et les postes dont les titulaires effectuent des tâches similaires au sein d'autre organisation des FC d'où une continuité de la dotation en personnel du bureau et l'assurance que le SAD demeure un lieu de travail attrayant pour un personnel expérimenté.

15. Au terme de la période faisant l’objet du rapport, deux postes d’avocat de la défense de la Force de réserve demeuraient à combler. Nous avons actuellement des avocats de la réserve en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick, au Québec et en Ontario. Les effectifs de la Force de réserve du SAD est une importante ressource qui a de tout temps largement contribué à l’accomplissement de son mandat et y contribue toujours autant.

Questions concernant le système de justice militaire

17. En raison de ses fonctions, le personnel du SAD est dans une position unique qui lui permet d’observer les questions systémiques touchant le système de justice militaire. Je porte les deux questions suivantes à votre attention en votre qualité de surveillant du système de justice militaire.

18. Les infractions au sein du système de justice militaire sont jugées par procès sommaire ou par une cour martiale. Environ 95 p. 100 des causes sont jugées par procès sommaire. Dans de nombreux dossiers, les membres ont le droit de choisir d'être jugés par la cour martiale. Cette possibilité est la « soupape de sûreté » dans le système de justice militaire. Cela permet aux membres, s’ils le désirent, d’être représenté par un avocat et d’être jugé par une instance décisionnelle qui possède les caractéristiques juridiques d’un tribunal indépendant et impartial.

19. Malgré l’importance de ce droit, qui est fondamental à la légitimité du procès sommaire, son exercice pratique est confronté à des obstacles.

  1. L’avocat du SAD apprend souvent par des militaires, qui sont accusés d’infractions pour lesquelles ils ont le droit de choisir d'être jugé devant une cour martiale, qu’ils subissent des pressions dans l'exercice de ce droit. Parfois lorsqu’ils choisissent la cour martiale, ils sont renvoyés pour une période supplémentaire de reconsidération et pour faire un nouveau choix. Parfois ils se font dire que ce choix aura de grandes conséquences pour les cours professionnels, les possibilités de carrière ou pour leur carrière de façongénérale. Une cour martiale peut entraîner des difficultés pour un accusé, mais il est important d’éviter les obstacles artificiels à l’exercice de ce droit.
  2. L’alinéa 110.04(1)a) des ORFC permet au DPM de prononcer la mise en accusation de l'accusé sur l'accusation ou « sur toute autre accusation, fondée sur les faits révélés par la preuve, qu’il ajoute ou substitue à celle-ci ». Cette disposition est fréquemment utilisée par le DPM et de nouvelles accusations sont souvent prononcées des mois ou parfois même des années après les accusations initiales sur lequel le choix d'être jugé par cour martial avait été donné. Une telle situation crée des difficultés pour l’accusé et l'avocat qui doivent prendre des décisions sans connaître la nature des accusations auxquelles l’accusé doit faire face. Cette situation crée des problèmes quant à l'exercice du choix d'être jugé devant une cour martiale et sur son droit à une défense pleine et entière.
  3. Enfin, de nombreux accusés ne semblent pas bénéficier du choix d'être jugé devant la cour martiale lorsque le libellé de l’alinéa 108.17(1)a) des ORFC semble reconnaitre ce droit explicitement.

Conclusion

20. La dernière période a été occupée et semée de défis pour les avocats de la défense du SAD et, comme par les années passées, notre première priorité a été de collaborer avec les membres des FC qui sont accusés d’infractions d’ordre militaire et de travailler pour leur compte. Nous avons le privilège de les aider à traverser des moments très difficilesdans leur carrière et dans leur vie. Nombre d’entre eux poursuivront une pleine carrière et seront de solides membres de la communauté militaire. Pour d’autres, les accusations marqueront leur éloignement de la vie militaire et une occasion de reprendre leur place en tant que membres productifs de la société civile canadienne.

D.K. Fullerton
Colonel
Directeur du service d’avocats de la défense

17 octobre 2013

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