Capitre quatre : Faits nouveaux dans la justice militaire : Bilan de l’année

Ce chapitre met en relief des cas de jurisprudence sélectionnés pour la période visée par ce rapport, ainsi que certaines initiatives législatives et réglementaires.

Jurisprudence – Cour suprême du Canada

Infractions de droit commun – R. c. Moriarity, 2015 CSC 55

Le Sous-lieutenant Moriarity, le Soldat Hannah, le Soldat Vézina et le Sergent Arsenault ont été reconnus coupables par des cours martiales d’avoir commis des infractions punissables en vertu du Code criminel, de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et de la Loi sur les aliments et drogues, conformément à l’alinéa 130(1)a) de la LDN. L’alinéa 130(1)a) de la LDN incorpore toutes les infractions du Code criminel et de toute autre loi fédérale dans le système de justice militaire à titre d’« infractions d’ordre militaire » susceptible d’être jugé dans le système de justice militaire.

Les quatre militaires ont interjeté appel devant la Cour d’appel de la cour martiale pour des motifs d’ordre constitutionnel. Ils ont soutenu que l’alinéa 130(1)a) de la LDN avait une portée excessive par rapport à l’atteinte de son objectif de maintien de la discipline, de l’efficacité et du moral, en ce qu’il intègre des infractions civiles sans lien avec le service militaire dans le Code de discipline militaire. Dans une série de décisions, la Cour d’appel de la cour martiale a déterminé que, lorsqu’il est interprété adéquatement, l’alinéa 130(1)a) de la LDN exige qu’il y ait un lien de connexité avec le service militaire, lequel existe lorsqu’il y a un lien direct entre les circonstances d’une infraction présumée et la discipline, l’efficacité ou le moral des militaires16. Puisqu’un tel lien existait dans chacune des causes des appelants, les déclarations de culpabilité ont été maintenues par la Cour d’appel de la cour martiale. Les contrevenants ont interjeté appel devant la Cour suprême du Canada.

Dans une décision unanime, la Cour suprême du Canada a rejeté les quatre appels et statué qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un lien militaire pour que l’alinéa 130(1)a) de la LDN soit en accord avec la Charte. La Cour a soutenu que l’alinéa 130(1)a) a pour effet d’étendre la compétence dont jouissent les tribunaux militaires à l’égard des infractions fédérales sous-jacentes à quiconque est assujetti au Code de discipline militaire. Le texte de l’alinéa 130(1)a) ne contient aucune restriction exigeant explicitement que l’infraction ait été commise dans un contexte militaire. Il transforme plutôt l’infraction sous-jacente en infraction d’ordre militaire « sans égard à la nature et aux circonstances de perpétration de l’infraction ».

La Cour a expliqué qu’il n’y avait pas d’intention apparente dans la LDN de limiter l’application de ces dispositions aux situations où il y a un « lien direct » entre les circonstances de l’infraction et le service militaire. Si le Parlement avait eu une autre intention, il aurait pu prévoir une application plus limitée du Code de discipline militaire. Il faut donc en conclure que le Parlement a porté son attention sur les circonstances dans lesquelles il est approprié d’assujettir les membres des FAC au système de justice militaire.

En maintenant la constitutionnalité de l’alinéa 130(1)a), la Cour soutient que l’objectif du système de justice militaire est « d’établir des processus visant à assurer le maintien de la discipline, de l’efficacité et du moral des troupes, » et qu’un comportement criminel « peut avoir une incidence sur les normes applicables au titre de la discipline, de l’efficacité et du moral des troupes ». Le comportement des membres des FAC est interdépendant de la discipline, de l’efficacité et du moral même lorsque ceux-ci ne sont pas en service, en uniforme ou sur une base militaire.

Cette décision est importante puisqu’au cours de la période visée par le rapport de 2015-2016, environ 27 p. 100 des accusations jugées devant les cours martiales l’ont été en vertu de l’alinéa 130(1)a) de la LDN. Par conséquent, la capacité de poursuivre les infractions aux termes de l’alinéa 130(1)a) a un impact significatif pour les utilisateurs du système de justice militaire.

Jurisprudence – Cour d’appel de la cour martiale

Droit d’appel du ministre de la Défense nationale – R. c. Cawthorne, 2015 CACM 1

Le Matelot de 3e classe Cawthorne était membre de l’équipage à bord du NCSM Algonquin. Pendant un exercice, un téléphone cellulaire contenant de la pornographie juvénile a été trouvé sur le navire. Le téléphone appartenait au Matelot de 3e classe Cawthorne qui a admis être en possession de pornographie; il a toutefois nié qu’il s’agissait de pornographie juvénile. Le Matelot de 3e classe Cawthorne a été reconnu coupable d’avoir eu en sa possession de la pornographie juvénile en violation du Code criminel et punissable en vertu de l’article 130 de la LDN.

Le Matelot de 3e classe Cawthorne a interjeté appel devant la Cour d’appel de la cour martiale qui, à la majorité, a ordonné la tenue d’un nouveau procès sur les deux accusations portées contre le Matelot de 3e classe Cawthorne. À la suite du jugement de la Cour d’appel de la cour martiale, le DPM a déposé un avis d’appel devant la Cour suprême du Canada. Peu après, le Matelot de 3e classe Cawthorne a déposé un avis de requête pour invalider l’avis d’appel du ministre au motif que le pouvoir du ministre d’interjeter appel devant la Cour suprême du Canada en vertu du paragraphe 245(2) de la LDN contrevient à l’article 7 et à l’alinéa 11d) de la Charte en ce que le ministre n’est pas un poursuivant indépendant qui dispose d’assez d’autonomie pour agir à ce titre. La Cour suprême du Canada a autorisé l’appel et la cause a été entendue le 25 avril 2016. La cause a été prise en délibéré.

Droit d’appel du ministre de la Défense nationale – R. c. Gagnon et Thibault, 2015 CACM 2

Ces causes portaient sur deux militaires qui étaient accusés d’infractions d’agression sexuelle non reliées entre elles. L’Adjudant Gagnon a été acquitté en cour martiale, tandis qu’il a été mis fin aux procédures contre le Caporal Thibault. La Couronne a porté en appel les deux décisions rendues en cour martiale.

L’avocat des accusés a demandé à ce que les appels soient rejetés au motif que le droit d’appel doit être attribué à un poursuivant indépendant et que d’accorder le droit d’appel au ministre va à l’encontre de l’article 7 de la Charte.

La Cour d’appel de la cour martiale a conclu que le rôle et les fonctions du ministre en vertu de la LDN sont incompatibles avec l’exercice d’un pouvoir concernant la nature et l’étendue d’une poursuite contre l’un de ses propres « employés ». La Cour d’appel de la cour martiale a jugé que le ministre ne peut être raisonnablement perçu comme un poursuivant indépendant qui peut agir d’une manière autonome et indépendante de la chaîne de commandement, car il est au sommet de celle-ci. Le tribunal a déclaré que l’article 230.1 de la LDN, qui confère au ministre le droit d’interjeter appel, ne respecte pas l’exigence constitutionnelle d’indépendance du poursuivant et que, par conséquent, l’article est inopérant. Le tribunal a suspendu la déclaration d’invalidité pour une période de six mois à partir de la date de la décision, mais a refusé d’autoriser les demandes des accusés visant à rejeter les appels du ministre parce que cette autorisation aurait été disproportionnée par rapport à l’intérêt de la société à ce que les appels soient entendus et évalués sur le fond.

Dans ses motifs concordants en partie, le juge en chef Bell a affirmé que le ministre devait conserver un pouvoir de supervision des poursuites dans le système de justice militaire canadien, un pouvoir qui devrait toutefois être limité par des paramètres semblables à ceux du procureur général dans la Loi sur le directeur des poursuites pénales.

La Couronne a demandé l’autorisation de porter cette décision en appel devant la Cour suprême du Canada. L’autorisation a été accordée et l’affaire a été entendue conjointement avec la cause de R. c. Cawthorne le 25 avril 2016. La cause a été prise en délibéré et la déclaration d’invalidité de la Cour d’appel de la cour martiale demeurera en suspens jusqu’à ce que la Cour suprême rende une décision.

Jurisprudence – Cour martiale

Infractions sexuelles – R. c. Morgan, 2015 CM 4005

Le Sergent Morgan était un technicien médical accusé d’avoir harcelé sexuellement trois subordonnées à différentes occasions entre 2005 et 2012. Les victimes ont subi diverses formes de flirt, des demandes répétées de rendez-vous et de relations personnelles, et elles ont subi des attouchements sur les fesses par-dessus leurs vêtements. Il a été jugé que les circonstances entourant les infractions constituaient un comportement de harcèlement sexuel à l’égard de trois femmes subordonnées au Sergent Morgan.

Le Sergent Morgan a plaidé coupable en cour martiale à trois accusations de comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline en contravention de l’article 129 de la LDN. Il a été condamné à un blâme et une amende de 2 000 $.

Infractions sexuelles – R. c. Scott, 2015 CM 1005

Au moment de l’infraction, l’Élève-officier Scott était étudiant au Collège militaire royal du Canada, à Kingston. Il fut allégué que l’Élève-officier Scott, à deux occasions en mars 2013, a touché la plaignante de façon déplacée et lui a fait des remarques à connotation sexuelle. Il a touché la plaignante, sans son consentement, sur diverses parties du haut du corps.

L’Élève-officier Scott a plaidé coupable à une accusation de voie de fait en vertu de l’article 266 du Code criminel, une infraction punissable aux termes de l’article 130 de la LDN, et à deux chefs d’accusation de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline en vertu de l’article 129 de la LDN pour harcèlement sexuel. À la suite d’une recommandation conjointe quant à la détermination de la peine, le tribunal a condamné le contrevenant à un blâme et une amende de 2 000 $.

Fraude – R. c. Jackson, 2015 CM 4012

Une carte de crédit du MDN a été remise au Caporal-chef Jackson, membre de la Force régulière, pour l’achat d’essence dans le cadre de son emploi. Le Caporal-chef Jackson a été informé que la carte de crédit ne devait être utilisée que pour acheter de l’essence dans le cadre de ses fonctions militaires normales. En janvier 2011, en raison de difficultés financières, le Caporal-chef Jackson a commencé à utiliser la carte de crédit pour acheter de l’essence à des fins personnelles. Le Caporal-chef Jackson a ainsi dépensé environ 20 000 $ à des fins personnelles.

Le Caporal-chef Jackson a plaidé coupable à une accusation en vertu de l’alinéa 117f) de la LDN pour avoir commis un acte à caractère frauduleux. Suite à une suggestion commune de la poursuite et la défense, le tribunal a condamné le contrevenant à une peine de détention de 60 jours. Le tribunal est d’avis que la période de détention était appropriée parce que l’accusé avait communiqué rapidement son intention de plaider coupable, qu’il s’agissait d’une première infraction et qu’il avait collaboré avec les enquêteurs tout au long de l’enquête.

Fraude – R. c. Boire, 2015 CM 4010

Le Matelot-chef Boire était cuisinier dans la Force régulière. Au cours de deux affectations à la BFC Petawawa en 2009 et à la BFC Borden en 2013, il a demandé le paiement de frais d’absence du foyer sans y avoir droit17. Le Matelot-chef Boire a frauduleusement reçu plus de 48 000 $ au total. Devant la cour martiale, le Matelot-chef Boire a plaidé coupable à deux accusations de fraude conformément au paragraphe 380(1) du Code criminel, en contravention de l’article 130 de la LDN. Il a été condamné à 60 jours d’emprisonnement et à une amende de 2 400 $. En plus de la condamnation, le Matelot-chef Boire est en voie de rembourser à la Couronne les fonds obtenus frauduleusement.

Au moment de l’imposition de la peine, l’accusé a fait valoir que la condamnation à l’emprisonnement devrait être suspendue en raison de ses troubles médicaux. Un élément de preuve a été présenté au moment de la condamnation pour expliquer que l’incarcération serait anti thérapeutique et aurait un effet négatif sur son bien-être et sa santé mentale. Par conséquent, la poursuite et la défense ont recommandé conjointement de suspendre la période d’emprisonnement. En fonction des circonstances exceptionnelles dans cette affaire, le juge militaire a déterminé que la période d’emprisonnement devrait être suspendue.

Conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline – R. c. Korolyk, 2016 CM 1002

Le Matelot de 1re classe Korolyk habitait à Victoria, en C.-B., et était admissible à une indemnité de vie chère (IVC)18. Cependant, celle-ci n’a pas déclaré qu’elle partageait une maison avec un autre membre en service et que, par conséquent, elle n’avait droit qu’aux trois quarts de l’IVC. Le Matelot de 1re classe Korolyk a été accusée d’avoir eu une conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline en application de l’article 129 de la LDN parce qu’elle n’a pas déclaré la situation domestique qui s’appliquait à son IVC. Subsidiairement, le Matelot de 1re classe Korolyk a été accusée d’un acte à caractère frauduleux en contravention de l’alinéa 117f) de la LDN.

Devant la cour martiale, le Matelot de 1re classe Korolyk a contesté la constitutionnalité du paragraphe 129(2) de la LDN. Elle a soutenu que le paragraphe 129(2) de la LDN, qui oblige un juge des faits à conclure qu’il existe un préjudice au bon ordre et à la discipline lorsque la faute reprochée contrevient à une disposition de la LDN, d’un règlement, d’un ordre ou d’une instruction, est contraire à la Charte puisque la disposition dispense la poursuite de l’obligation de prouver l’existence d’un préjudice au bon ordre et à la discipline hors de tout doute raisonnable.

Le juge militaire fut du même avis que le Matelot de 1re classe Korolyk et il a conclu que le paragraphe 129(2) de la LDN violait la présomption d’innocence protégée par la Charte. Il a déclaré que la disposition est entachée de nullité en ce sens qu’elle rend l’accusée susceptible d’être reconnue coupable en dépit de l’existence d’un doute raisonnable sur cet élément essentiel de l’infraction. En conséquence, la poursuite a retiré l’accusation conformément à l’article 129. Le tribunal a déclaré le Matelot de 1re classe Korolyk non coupable de l’accusation subsidiaire qui restait.

Conduite – R. c. Buckley, 2016 CM 1001

L’Adjudant-maître Buckley était commis surveillante de la 19e Escadre à Comox. À ce titre, l’Adjudant-maître Buckley était en charge des 35 commis en poste à l’Escadre et à la base et ses fonctions incluaient, entre autres, d’être la militaire du rang responsable du contrôle des Rapports d’appréciation du personnel. Grâce à ce poste, l’Adjudant-maître Buckley avait un accès privilégié au Système de gestion des ressources humaines (SGRH), le logiciel de gestion du personnel des FAC.

En 2014, l’Adjudant-maître Buckley a utilisé le mot de passe d’un collègue de travail pour accéder au SGRH dans le but de modifier son dossier personnel. Elle y a indiqué avoir réussi le test d’aptitude physique FORCE, ce qui était faux. Elle a ensuite perpétué l’inexactitude envers sa chaîne de commandement en déclarant avoir complété le test FORCE. Lorsqu’elle a fait la fausse déclaration dans le SGRH, l’Adjudant-maître Buckley savait qu’on s’y rapporterait pour le prochain Rapport d’appréciation du rendement, ce qui allait servir pour des fins de promotion ainsi que pour la vérification de son état de préparation préalable à un déploiement à la Station des Forces canadiennes Alert.

L’Adjudant-maître Buckley a plaidé coupable à deux infractions prévues à l’article 125 de la LDN, soit modifier un document dans l’intention de tromper et faire délibérément une fausse inscription dans un document. La cour martiale a jugé que l’Adjudant-maître Buckley a abusé de la confiance dont elle était investie à son grade et son poste et lui a imposé un blâme et une amende de 3 000 $.

Désertion et mandats d’arrestation des commandants – R. c. Levi-Gould, 2016 CM 4002

Le 7 janvier 2014, à la suite du congé du temps des fêtes, le Matelot de 3e classe Levi-Gould a omis de se présenter pour l’exercice ses fonctions conformément aux exigences. Un mandat d’arrestation a été lancé par le commandant pour autoriser l’arrestation du Matelot de 3e classe Levi-Gould dans une maison d’habitation. Un autre mandat d’arrestation a été lancé pour tenir compte du fait que le militaire avait été accusé de désertion et de désobéissance à un ordre légitime, mais ce mandat n’autorisait pas l’arrestation du Matelot de 3e classe Levi-Gould dans une maison d’habitation. Le 1er avril 2015, le Matelot de 3e classe Levi-Gould a été arrêté par la Gendarmerie Royale du Canada pour de présumées infractions criminelles non reliées. Il a été remis en liberté sous condition par un juge d’un tribunal provincial et a été arrêté ultérieurement par la police militaire au palais de justice en exécution du deuxième mandat émanant du commandant.

Devant la cour martiale, le Matelot de 3e classe Levi-Gould a soutenu que la disposition au paragraphe 157(1) de la LDN, qui permet à un commandant d’émettre un mandat d’arrestation, était inconstitutionnelle pour les motifs qu’un mandat d’arrestation doit être autorisé par une personne ayant la capacité d’agir de manière judiciaire et que les commandants n’ont pas cette capacité parce qu’ils ne sont ni impartiaux ni indépendants.

Le juge militaire a constaté que le paragraphe 157(1) de la LDN ne prévoit pas de limite quant au moment où un commandant peut exercer son pouvoir d’autoriser un mandat pouvant être exécuté dans une maison d’habitation. À son avis, un commandant est tellement impliqué dans les fonctions d’enquête qui sont effectuées par les membres de son unité qu’il ne peut pas avoir une capacité d’agir de manière judiciaire lorsqu’il autorise un mandat d’arrestation en vertu du paragraphe 157(1) de la LDN. Le juge militaire a ainsi conclu que le paragraphe 157(1) de la LDN viole les articles 7 et 8 de la Charte et a fait une déclaration d’invalidité conformément au paragraphe 52(1) de la Charte.

Malgré qu’il ait prononcé l’inconstitutionnalité du paragraphe 157(1) de la LDN, le tribunal a conclu que les droits individuels de l’accusé qui sont reconnus par la Charte n’avaient pas été violés. L’accusé a plaidé coupable à des accusations de désertion et de désobéissance à un ordre légitime. Lors de la détermination de la sentence, le tribunal a pris acte d’un certain nombre de problèmes que devaient surmonter l’accusé, ainsi que de la situation difficile dans laquelle celui-ci se trouvait lorsqu’il a commis les infractions. L’accusé a été condamné à un blâme. Le Matelot de 3e classe Levi-Gould a été libéré des FAC le 16 octobre 2014 et des mesures administratives ont été prises en vue de suspendre son salaire pour la période d’absence sans permission.

Initiatives législatives et réglementaires

Projet de loi C-71 : la Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et le Code criminel

Le 15 juin 2015, le ministre a présenté le projet de loi C-71, la Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et le Code criminel (Loi sur les droits des victimes au sein du système de justice militaire), à la Chambre des communes, lequel a fait l’objet d’une première lecture.

Le projet de loi C-71 aurait modifié les dispositions de la LDN qui guident le système de justice militaire. Le projet de loi aurait ajouté, entre autres, une « Déclaration des droits des victimes » qui prévoit que les victimes des infractions d’ordre militaire ont droit à l’information, à la protection, à la participation et au dédommagement, à l’instar de la Charte canadienne des droits des victimes qui accorde ces droits aux victimes de certaines infractions criminelles dans le système de justice criminelle civil.

Le projet de loi C-71 aurait aussi apporté un bon nombre de changements à la procédure qui permet de traiter les infractions militaires en vertu du Code de discipline militaire, principalement devant des cours martiales, pour rendre exécutoire la Déclaration des droits des victimes. Par exemple, le projet de loi aurait permis aux juges militaires, et parfois exigé d’eux, de rendre des ordonnances pour protéger les victimes, y compris des ordonnances d’interdiction de communication, des ordonnances de non-publication, des ordonnances autorisant un témoin à être accompagné d’une personne de soutien au moment de témoigner et des ordonnances interdisant à un accusé de contre-interroger personnellement un témoin.

Par ailleurs, le projet de loi C-71 aurait modifié le système de procès sommaire pour positionner clairement celui-ci en tant que tribunal militaire non criminel et non pénal visant à traiter les inconduites militaires mineures. En particulier, le projet de loi aurait éliminé la compétence de juger sommairement les infractions militaires et aurait remplacé celles-ci par la compétence de juger seulement une nouvelle catégorie d’« infractions disciplinaires » créée dans des règlements du gouverneur en conseil. Le projet de loi aurait aussi éliminé le pouvoir de l’officier président un procès sommaire d’imposer des peines (comme la détention et les amendes) et l’aurait remplacé par le pouvoir d’imposer de nouvelles sanctions disciplinaires à caractère non criminel et non pénal.

Le projet de loi est mort au Feuilleton lorsque le Parlement a été dissous le 2 août 2015.


Notes en bas de page

16 Dans les causes de R. c. Moriarity et R. c. Hannah, 2014 CACM 1, la Cour d’appel de la cour martiale a conclu que l’alinéa 130(1)a) de la LDN n’avait pas une portée excessive et que si l’alinéa était interprété correctement, il incluait un lien militaire. Quant à décrire sommairement ce qui constitue un lien militaire, la Cour a établi qu’un lien de connexité existe si une infraction a été à ce point liée à la vie militaire qu’elle serait susceptible d’influer sur le niveau général de discipline et d’efficacité des forces armées. Dans les affaires R. c. Vézina, 2014 CACM 3 et R. c. Arsenault, 2014 CACM 8, la Cour a estimé qu’elle était liée par la décision rendue dans la cause Moriarity. Dans R. c. Larouche, 2014 CACM 6, la Cour a conclu « que le paragraphe 130(1) de la LDN viole l’article 7 et l’alinéa 11f) de la Charte, car il a une portée excessive qui est susceptible - sans l’application du critère du lien de connexité avec le service militaire - de priver les militaires canadiens de leur droit constitutionnel de bénéficier d’un procès par jury ».

17 Les frais d’absence du foyer sont destinés à rembourser aux membres des FAC les frais de subsistance additionnels qui résultent d’une séparation temporaire de leurs personnes à charge à la suite d’un déménagement au Canada pour des raisons liées au service militaire.

18 L’IVC est une indemnité destinée à stabiliser le coût de la vie des membres des FAC et de leurs familles pour qu’ils puissent avoir un niveau de vie relativement prévisible peu importe où ils servent au Canada.

Détails de la page

2018-12-13