Discours de la vice-première ministre et ministre des Finances au Peterson Institute for International Economics
Discours
Le 12 avril 2023 - Washington, États-Unis
Le Canada s’étend sur près de dix millions de kilomètres carrés, du Pacifique à l’océan Atlantique en passant par l’Arctique, mais il ne compte que 39 millions d’habitants, soit à peine un dixième de la population des États-Unis.
Par conséquent, il ne va pas de soi que le Canada, qui figure au 39e rang des pays du monde au chapitre de la population, puisse s’enorgueillir d’avoir la dixième économie en importance.
C’est parce que le Canada a la chance d’être doté de ce dont le monde a besoin, et en quantité beaucoup plus importante que celle dont nous avons besoin nous‑mêmes.
Aux fourrures destinées aux riches Européens ont succédé le bois et les céréales qui ont permis de bâtir et de nourrir un empire.
Aujourd’hui, le Canada constitue le plus important exportateur de pétrole vers les États-Unis. En effet, nous lui en fournissons au moins deux fois plus que l’Arabie saoudite et le Mexique réunis. Par ailleurs, nous vendons nos avions, notre intelligence artificielle et notre aluminium dans le monde entier.
Voilà pourquoi, dans un pays où se déroule un sain débat politique sur un grand nombre d’enjeux – cinq partis sont représentés dans notre Parlement, et notre gouvernement détient une minorité de sièges – nous nous entendons sur une chose : l’importance du commerce.
Le Canada est immense, mais il est également petit. Le commerce est nécessairement indissociable de notre identité. Le Canada est un pays commerçant.
C’est pourquoi, comme dirigeante politique, je suis fière d’être membre d’une équipe qui a assuré le maintien de l’ALENA pour une nouvelle génération. Je suis fière que nous ayons pu conclure des accords commerciaux autant avec l’Union européenne qu’avec nos partenaires du Pacifique.
Et comme Canadienne, je suis tout aussi fière du vaste appui que tous les partis ont manifesté à l’égard de ces accords.
Mais en tant que vice-première ministre du Canada, je suis également très consciente d’être ici, à Washington, à un moment délicat.
Alors que les dirigeants économiques du monde entier se réunissent ici cette semaine, une inquiétude majeure viendra teinter une large part de nos conversations, à savoir la question entourant la Loi sur la réduction de l’inflation, et ce qu’elle signifie pour nos relations commerciales et économiques avec votre grand pays.
Ce n’est pas pour rien que plus de 90 % des Canadiennes et des Canadiens vivent à moins de 150 miles de la frontière américaine.
Nos alliés d’Europe et de la région indopacifique sont plus éloignés, mais il leur serait presque aussi difficile que nous d’imaginer un avenir économique qui ne soit pas intimement lié aux États-Unis.
C’est pourquoi, alors que les États-Unis réalisent un investissement sans précédent dans leur économie propre, les travailleurs, les gens d’affaires et les dirigeants politiques du reste du monde – de Toronto à Turin en passant par Tokyo – s’interrogent sur la place qui leur est faite dans ce projet.
C’est donc de cela que je voudrais parler ce matin : de la Loi sur la réduction de l’inflation et de ce qu’elle signifie du point de vue d’un ami, d’un voisin et d’un ardent partisan du libre-échange.
Permettez-moi de dire d’abord ceci : la Loi sur la réduction de l’inflation est une mesure législative historique et transformatrice qui fera du monde un endroit meilleur. Elle s’inscrit dans les intérêts des États-Unis comme dans ceux du Canada et du monde.
Et pour mes amis, y compris les gens ici présents aujourd’hui, qui sont peut-être réticents, voici pourquoi je pense que ce point de vue est le bon.
D’abord, parce que c’est la voie qui va permettre aux États-Unis de bâtir une économie propre.
La transition vers la carboneutralité constitue la transformation la plus importante depuis la révolution industrielle.
Depuis 2015, le Canada investit massivement pour bâtir notre économie propre, notamment par le biais d’un investissement sans précédent annoncé dans le budget que j’ai déposé le mois dernier et qui porte notre investissement total à plus de 120 milliards de dollars.
Aujourd’hui, 83 % de l’électricité canadienne est produite à partir d’énergies propres, ce qui fait de notre réseau l’un des plus propres au monde. Nous comptons le rendre encore plus propre et doubler, voire tripler, la quantité d’électricité que nous produisons.
Nous investissons dans les véhicules électriques et leurs chaînes d’approvisionnement, dans l’hydrogène et dans le captage, l’utilisation et le stockage du carbone.
Nous ferons du Canada un fournisseur fiable d’énergie propre et de minéraux critiques pour le monde entier.
Depuis 2019, nous imposons un tarif pour la pollution par le carbone – un tarif qui a survécu à deux élections nationales et qui a été maintenu par notre Cour suprême. Notre tarification est passée au début de ce mois à 65 dollars la tonne, et l’argent que nous récoltons ainsi retourne directement dans les poches des Canadiennes et des Canadiens sous la forme de paiements de l’Incitatif à agir pour le climat pouvant atteindre 1 500 dollars par année pour une famille de quatreFootnote 1.
Mais peu importe à quel point le Canada prend au sérieux le défi climatique – et nous y accordons une très grande importance –, ou encore à quel point le Royaume-Uni, la France ou le Japon le prennent au sérieux, nous savons que sans les États-Unis, nous n’avons aucune chance de bâtir une économie propre à l’échelle mondiale.
Tout le monde ici se souvient du sentiment d’effroi que nous avons ressenti lorsque les États-Unis ont laissé tomber leurs engagements de Paris et donc, nous le craignions, notre chance collective de laisser une planète vivable à nos enfants.
Mais la Loi sur la réduction de l’inflation marque le retour de la force la plus essentielle pour l’action climatique, et je suis très reconnaissante d’avoir à nos côtés les États‑Unis, avec leur ingéniosité et leur immense capacité économique, pour mener à bien cet effort existentiel.
Ensuite, ce qui est peut-être encore plus important, la Loi sur la réduction de l’inflation jouera un rôle dans le rétablissement de la classe moyenne des États-Unis.
Les travailleurs américains ont été malmenés et se sont avérés les perdants pendant l’époque du nivellement vers le bas provoqué par la mondialisation débridée, en particulier dans les États des Grands Lacs qui sont si intimement liés au Canada.
Leur douleur était bien réelle, et elle l’est encore. Le fait que cette douleur ait menacé de déstabiliser la démocratie américaine ne devrait surprendre personne. La population des États-Unis est intelligente et elle perpétue la tradition de rejeter les systèmes politiques qui ne lui conviennent pas. En fait, on pourrait dire que cette impulsion est à l’origine même de l’Amérique.
Tout comme la mise en place de mesures climatiques par les États-Unis est essentielle pour que nos efforts communs aient une chance de réussir, il faut que la démocratie américaine soit solide pour permettre à la démocratie de s’épanouir dans le monde.
La Loi sur la réduction de l’inflation, avec ses exigences élevées en matière de main-d’œuvre et son engagement envers les régions des États-Unis qui ont été vidées de leur substance, est un investissement dans la classe moyenne tout autant qu’un investissement dans l’action climatique.
Et des mesures comme les obligations en matière de garde d’enfants prévues dans la CHIPS Act vont appuyer les femmes qui travaillent. Au Canada, en 2021, nous avons investi plus de 30 milliards de dollars dans un système national d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, en promettant de ramener les frais à seulement dix dollars par jour d’ici 2025.
Déjà, les frais de garde ont été réduits de 50 % et le taux d’activité des femmes canadiennes dans la force de l’âge a atteint un niveau sans précédent de 85,7 %, contre seulement 77,1 % au sud de notre frontière.
À une époque où les pénuries de main-d’œuvre pèsent sur notre économie et contribuent à l’inflation, les services de garde d’enfants abordables viennent renforcer notre économie et aident nos familles à prospérer. C’est d’une importance capitale.
Parce qu’au Canada et aux États-Unis, comme, en fait, dans toutes les démocraties du monde, la première, la dernière et la plus fondamentale mesure du succès de nos politiques est de savoir si elles sont efficaces pour les travailleuses et les travailleurs.
Si nous échouons sur ce critère important entre tous, nous pouvons oublier les objectifs de Paris et les réductions d’émissions, sans parler du PIB ou de la géopolitique.
Nous avons tous besoin de bâtir notre classe moyenne dans nos pays respectifs, et chacun d’entre nous bénéficie de la force de la classe moyenne des États-Unis et, par conséquent, des politiques qui favorisent l’atteinte de cet objectif.
En tant que ministre qui voyage régulièrement aux quatre coins de son pays, et de députée qui fait du porte-à-porte dans sa circonscription et qui a été élue à quatre reprises, j’ai découvert que les Canadiennes et les Canadiens d’un océan à l’autre attachent de l’importance aux mêmes choses.
Un emploi qui leur offre un salaire convenable pour accomplir un travail respecté. La capacité de mener une vie digne et prospère, et la conviction que leurs enfants connaîtront une meilleure vie que la leur.
Les démocraties capitalistes réussissent lorsque nous pouvons tenir ces promesses essentielles. Elles s’affaiblissent quand nous n’y arrivons pasFootnote 2.
L’approche du président Biden, qui consiste à bâtir l’économie à partir de la base et du centre, est certainement partagée par le Canada. Au fond, il s’agit d’une approche à laquelle adhèrent nos alliés démocratiques dans le monde entier.
La Loi sur la réduction de l’inflation vise à accroître la prospérité des gens que le premier ministre appelle la classe moyenne et ceux qui travaillent fort pour s’y joindre.
C’est une politique industrielle et climatique dont bénéficient les travailleuses et les travailleurs.
C’est une politique économique qui va renforcer la démocratie américaine à un moment où toutes les démocraties du monde ont besoin d’une Amérique solide.
Mais tout comme la réussite des États-Unis s’inscrit dans l’intérêt de ses alliés, je pense que notre réussite s’inscrit dans celle des États-Unis.
Dans son discours devant le Parlement du Canada le mois dernier, le président Biden nous a dit que nous sommes à un tournant de l’histoire.
Il a raison.
Pris ensemble, la lutte mondiale entre la démocratie et la dictature, et de la menace existentielle des changements climatiques que nous vivons font d’aujourd’hui le moment le plus déterminant depuis la Deuxième Guerre mondiale.
Le président Kennedy avait déclaré qu’une capacité accrue doit s’accompagner d’une responsabilité accrue. Et dans leur capacité à relever les défis actuels pour la démocratie et notre planète, les États‑Unis sont en effet uniques parmi les nations.
L’histoire a prouvé que face aux missions les plus difficiles, les États-Unis peuvent sans aucun doute faire beaucoup – plus que n’importe quel autre pays sur terre aujourd’hui. Mais si vous pouvez faire beaucoup par vous‑mêmes, l’ampleur des exigences d’aujourd’hui est telle qu’elle dépasse même votre seule capacité.
Et ce que l’histoire nous montre également, c’est que les États-Unis ne peuvent relever les plus grands défis qu’en travaillant avec des alliés. Le monde d’aujourd’hui doit pouvoir compter sur des États-Unis forts, mais cette force n’est pas suffisante. Vos alliés doivent eux aussi être forts.
Par conséquent, même si je comprends parfaitement l’importance et le pouvoir de la Loi sur la réduction de l’inflation en tant que mesure législative pouvant contribuer à sauver la planète et à renforcer la démocratie américaine, permettez-moi de vous faire part de quelques mises en garde – ou, peut-être, de quelques rappels polis – je suis Canadienne après tout – de la part d’un ami, d’un voisin et de quelqu’un qui croit en la force unificatrice des États‑Unis pour le bien.
Tout d’abord, nous savons tous que la croissance de nos économies propres et la création de bons emplois pour la classe moyenne vont nécessiter beaucoup de capitaux. Alors, soyons conscients d’un danger : il ne sera que trop facile pour nous de nous laisser entraîner dans un nivellement par le bas pour attirer ces capitaux.
C’est exactement ce qui s’est passé lorsque, dans nos efforts individuels pour promouvoir l’investissement et stimuler la croissance économique, nous avons abaissé les taux d’imposition des sociétés dans le monde entier et affaibli les bases fiscales nationales qui sont essentielles pour investir dans la classe moyenne.
Les trois décennies qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale ont été une période d’opportunités durant laquelle se réalisait la promesse démocratique de prospérité, de dignité et d’espoir en l’avenir.
L’économiste français Jean Fourastié a eu raison de surnommer cette période « les trente glorieuses » – période où les pays du G7 ont connu une croissance moyenne de 3 % par année sur toute une génération.
Mais au cours des dernières décennies, la croissance a ralenti. Au même moment, les salaires moyens ont stagné et les inégalités de revenus se sont grandement accrues. Il s’agissait là d’une trahison de la promesse du capitalisme démocratique.
Nous nous efforçons tous d’inverser cette tendance. Au Canada, depuis 2015, les inégalités de revenus ont diminué de 11 % et le nombre de Canadiennes et de Canadiens vivant dans la pauvreté a baissé de 56 %.
Une solide assiette fiscale intérieure est essentielle à cet effort soutenu. C’est pourquoi l’accord fiscal à deux piliers de l’Organisation de coopération et de développement économiques, défendu par la secrétaire Janet Yellen, et convenu en 2021, est si important – et c’est pourquoi le Canada travaille avec enthousiasme à l’entrée en vigueur de ces deux piliers.
C’est une raison de plus pour ne pas lancer une nouvelle compétition qui nous nuit mutuellement en vue d’accorder des subventions toujours plus importantes aux entreprises.
En effet, tout comme le nivellement par le bas de l’impôt sur le revenu des sociétés a peut-être amélioré les résultats financiers, mais appauvri nos classes moyennes, une guerre des subventions aux entreprises pourrait être profitable pour certains actionnaires, mais épuiserait nos trésors publics nationaux et affaiblirait les filets de sécurité sociale qui sont le fondement des démocraties efficaces.
Il est dans notre intérêt collectif, en tant qu’amis, partenaires et alliés, de travailler ensemble pour veiller à ce que nos mesures d’encouragement stimulent l’innovation et l’investissement, plutôt que de créer une spirale vicieuse d’appauvrissement du voisin.
Bien entendu, c’est bien plus facile à dire qu’à faire. C’est pourquoi je pense que nous pourrions tous bénéficier de l’expérience historique et du savoir-faire actuel de nos alliés de l’Union européenne.
Depuis des décennies, au sein de leur union, ils ont trouvé un équilibre entre la nécessité de stimuler l’investissement industriel dans leurs économies nationales et le danger des guerres de subventions aux entreprises. C’est ce que nous devons essayer de faire aujourd’hui, à plus grande échelle.
Mon deuxième rappel poli serait que le libre-échange, lorsqu’il est équitable et donc réellement libre, fonctionne réellement.
La stagnation des revenus de la classe moyenne au cours des dernières décennies a rendu beaucoup de gens sceptiques quant à la formule néolibérale du libre-échange et des faibles taux d’impôt sur le revenu des sociétés.
Au Canada, aux États-Unis et dans les démocraties du monde entier, les travailleurs ont compris depuis longtemps qu’ils étaient les perdants dans la compétition avec le prolétariat sans voix des usines des économies autoritaires.
Ce n’est pas pour rien que le centre industriel est devenu la « Rust Belt ».
Nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre nos propres travailleurs sur un pied d’égalité. L’engagement résolu du Canada à bannir de ses chaînes d’approvisionnement les produits issus du travail forcé en est un exemple, tout comme les mesures similaires prises aux États-Unis et dans l’Union européenne.
Mais ce serait une erreur énorme et sans précédent de réagir aux abus du système commercial mondial en adoptant l’autarcie.
J’ai dit tout à l’heure que les efforts déployés pour bâtir l’économie propre du 21e siècle constituent la transformation économique la plus importante depuis la révolution industrielle, et c’est vrai.
Par conséquent, il est également vrai qu’aucun pays, pas même les États-Unis, ne peut inventer toutes les nouvelles technologies ou posséder toutes les ressources naturelles dont l’économie mondiale carboneutre a besoin.
Le Canada s’est battu avec acharnement pour s’assurer une place malgré les exigences de la Loi sur la réduction de l’inflation en matière de véhicules électriques et de batteries. Nous l’avons fait parce que c’était essentiel pour l’avenir de l’industrie automobile canadienne, et également parce qu’un véhicule et ses pièces traversent la frontière canado-américaine au moins sept fois avant l’achèvement du véhicule. Vous avez besoin de nous autant que nous avons besoin de vous.
Nos alliés asiatiques et européens ont exprimé des arguments similaires et nous sommes heureux que les États-Unis les aient entendus. Notre réussite économique individuelle dépendra de notre capacité à traverser ensemble cette transition, et le leadership des États-Unis sera essentiel.
Et lorsque les États-Unis intégreront la loi « Buy America » dans leurs marchés publics ou leurs mesures d’incitation pour soutenir leur classe moyenne meurtrie, il sera normal de la part des partenaires des États-Unis de réagir en imposant leurs propres exigences.
Voilà l’intention derrière les mesures de réciprocité en matière de marchés publics que le Canada a proposées dans son budget le mois dernier.
En fin de compte, nous cherchons à bâtir des économies propres qui protègent les travailleuses et les travailleurs. Nous ne devons jamais oublier que, lorsqu’il est pratiqué de la bonne façon, le commerce libre et équitable peut nous aider à atteindre cet objectif.
Et aujourd’hui, il existe un autre défi, tout aussi pressant, que nous devons prendre en compte lorsque nous élaborons nos politiques économiques et que nous concevons nos relations commerciales : la sécurité nationale et la grande lutte entre la dictature et la démocratie qui se déroule dans le monde aujourd’hui.
L’économie mondiale a été fondamentalement modifiée le 24 février 2022.
En braquant ses armes sur l’Ukraine, Poutine a également ouvert le feu sur l’économie mondiale interreliée que bon nombre d’entre nous considéraient comme un rempart contre la guerre.
La marche de ses armées criminelles et la prise en otage des réserves énergétiques européennes ont mis en évidence une leçon que la Chine tentait également de nous enseigner depuis des années : la sécurité économique est une question de sécurité nationale urgente.
La Russie contrôle l’énergie et la Chine contrôle de nombreux minéraux critiques. L’hiver dernier, l’Europe a appris une dure leçon sur la folie de dépendre autant du gaz russe. Pourtant, aujourd’hui, notre dépendance à l’égard du lithium et du sulfate de nickel chinois est encore plus exclusive.
Comme la présidente von der Leyen l’a déclaré la semaine dernière, Beijing travaille sans relâche et depuis des décennies à rendre « la Chine moins dépendante du monde et le monde plus dépendant de la Chine ».
Ces vulnérabilités stratégiques face aux économies autoritaires mettent en péril notre propre sécurité.
Nous devons réduire les risques pour nos économies, ce qui nécessite le resserrement de notre collaboration. Lorsque nous devons être vulnérables sur le plan stratégique, nous devrions choisir d’être vulnérables les uns envers les autres – une approche que la secrétaire au Trésor Yellen a décrit comme étant « l’amilocalisation ».
C’est dans ce domaine que les États-Unis montrent la voie à suivre et qu’ils doivent continuer de le faire.
Le financement de la production de minéraux critiques canadiens dans le cadre de la loi américaine sur la production de défense, que le président Biden a annoncé le mois dernier, rendra nos deux économies plus sûres.
L’intégration du Japon et de la Corée du Sud dans les dispositions de la Loi sur la réduction de l’inflation relatives aux véhicules propres créera des emplois pour les Américains et renforcera la sécurité économique de deux de nos partenaires les plus importants.
Une adaptation de la Loi sur la réduction de l’inflation pour l’Europe peut accélérer la réduction des risques visant les chaînes d’approvisionnement les plus essentielles de l’Europe, tout en créant de nouvelles opportunités pour les travailleurs et les entreprises des deux côtés de l’Atlantique.
Enfin, nous devons anticiper et avoir un plan pour travailler ensemble lorsqu’il s’agit de coercition économique.
L’Europe s’est admirablement mobilisée cet hiver lorsqu’elle a été privée du gaz russe. Mais bien avant cela, des économies plus petites comme la Norvège, l’Australie ou mon propre pays ont subi des sanctions économiques pour avoir déplu à Pékin.
L’initiative interne de l’Union européenne sur la coercition économique – une réponse directe à l’intimidation de la Lituanie – est importante à la fois comme politique d’assurance et comme moyen de dissuasion. Nous devrions nous efforcer d’adopter une mesure similaire au sein d’un groupe plus large d’alliés.
Enfin, nous devons nous rappeler que les défis interreliés dont j’ai parlé aujourd’hui, à savoir la lutte contre les changements climatiques, l’édification de notre classe moyenne et le renforcement de notre démocratie – ne sont pas l’apanage de l’Occident non géographique.
En effet, ces problèmes sont encore plus criants dans les pays du Sud. C’est pourquoi les efforts comme l’Initiative de Bridgetown sont si importants. C’est également pourquoi notre travail doit englober et inviter le groupe de partenaires le plus large possible.
Les événements de l’année écoulée ont confirmé ce que le premier ministre Trudeau a déclaré le mois dernier : toute politique climatique est en même temps une politique économique et une politique de sécurité.
Les défis et les opportunités auxquels nous faisons face aujourd’hui sont les plus importants de notre époque, et ils sont intimement liés.
Défendre la démocratie sur les champs de bataille de l’Ukraine tout en consolidant ses racines dans nos propres pays – et les liens qui nous unissent tous. Rebâtir la classe moyenne tout en sauvant notre planète, et travailler ensemble pour construire les économies propres du 21e siècle.
Des économies propres avec de bons emplois bien rémunérés. Où nos citoyennes et citoyens peuvent vivre dans la dignité et la prospérité, et avoir la certitude que leurs enfants s’en tireront encore mieux qu’eux.
Car c’est la promesse de la démocratie.
Si nous procédons correctement, si nos efforts nationaux pour bâtir des économies propres et faire croître nos classes moyennes sont complémentaires et non contradictoires, nous pourrons tous tenir cette promesse fondamentale.
C’est ce que nous devons faire, comme dirigeants, comme intellectuels et comme citoyens : bâtir un monde où nous prenons soin de nos amis.
Car le président Biden avait raison lorsqu’il a dit, lors de son allocution devant le Parlement canadien le mois dernier, qu’il n’y a rien que nous ne puissions faire lorsque nous le faisons ensemble.
Merci beaucoup.