Faire des affaires avec les industries créatives autochtones au Canada

Préface

Patrimoine canadien (PCH) a élaboré ce guide dans le cadre de ses activités liées à la Stratégie d’exportation créative, dont le but est d’aider les créateurs canadiens à réaliser leurs objectifs commerciaux à l’étranger.

Entre juin 2021 et mars 2022, PCH a offert une série de séances de rétroaction pour comprendre comment la Stratégie pourrait mieux répondre aux divers besoins du secteur créatif et éliminer les obstacles liés à l’exportation. Pendant la séance offerte à l’intention des entrepreneurs créatifs autochtones, les participants ont affirmé être confrontés à un manque de compréhension et de sensibilité culturelles de la part d’acheteurs et de partenaires potentiels dans le cadre de leurs activités commerciales internationales.

Pour répondre à ces préoccupations, PCH a élaboré ce guide en collaboration avec un groupe consultatif de créateurs autochtones. L’objectif est de favoriser les interactions positives entre les acheteurs internationaux et les industries créatives autochtones du Canada, et d’aider les partenaires commerciaux internationaux potentiels à mieux comprendre les contextes commerciaux et les visions du monde des peuples autochtones au Canada.

Remerciements

Nous tenons à remercier Marcia Nickerson d’avoir été la principale responsable de cette publication, ainsi que les créateurs, artistes et directeurs artistiques autochtones suivants pour leurs conseils et leurs contributions : Denise Bolduc, Louise Flaherty, Alan Greyeyes, Gabrielle Hughes, Sandra Laronde, Maize Longboat, Sage Paul, Chelsa Racette (Reil), Sara Roque, ainsi que Camille Usher et les artistes dont les œuvres se retrouvent dans cette publication. (Sara Roque est malheureusement décédée avant que cette publication ne soit complétée. Elle était une créatrice, une dirigeante, une militante, une défenseuse et une mentore anishinaabekwe et nous lui sommes à jamais reconnaissants de son importante contribution).

Le gouvernement fédéral reconnaît également que les peuples autochtones sont les premiers habitants du territoire qui constitue aujourd’hui le Canada, où ils sont présents depuis des temps immémoriaux. Ils ont formé des systèmes sociaux, politiques, économiques et culturels complexes avant l’arrivée des Européens en Amérique du Nord. Malgré les efforts des forces coloniales pour faire disparaître leur culture, leur langue, leur société et leur mode de vie, les Premières Nations, les Métis et les Inuits continuent à croître et à prospérer. Nous vous encourageons à entreprendre votre propre voyage d’apprentissage pour en savoir plus sur les peuples autochtones du Canada.

Objet du présent guide

Les industries créatives sont florissantes au sein des communautés autochtones du Canada et continuent à susciter l’intérêt à l’échelle internationale. Les œuvres autochtones sont parmi les plus passionnantes, et elles proviennent des peuples originels de cette terre.

Le présent guide d’introduction vise à informer les acheteurs, entreprises et partenaires internationaux potentiels sur les pratiques commerciales et l’étiquette des industries créatives autochtones au Canada. Il donne une vue d’ensemble des processus artistiques, des pratiques commerciales et des contextes relationnels autochtones. De plus, nous avons inclus de nombreux liens vers des sources d’information supplémentaires qui vous aideront à apprendre et à vous préparer à effectuer des transactions commerciales adaptées et fructueuses.

Grâce aux renseignements contenus dans ce guide, les partenaires commerciaux internationaux sauront mieux comment travailler et communiquer efficacement avec les artistes et les créateurs autochtones afin de commercialiser leurs incroyables produits. Ces connaissances amélioreront les relations entre les partenaires internationaux et les commerçants, artistes et créateurs autochtones en favorisant une meilleure compréhension du contexte culturel des activités commerciales.

Ce qu’il faut savoir

Que gagnez-vous en tant qu’acheteur?

Tout d’abord : la qualité et l’authenticité. La génération actuelle de consommateurs et de publics se préoccupe de l’origine, de l’éthique, de l’impact social et de l’histoire des produits qu’ils consomment. L’authenticité du travail autochtone est éloquente. L’art autochtone raconte quelque chose, transmet l’histoire et la culture, et suit souvent une chaîne de valeur durable soucieuse de l’impact environnemental et social.

Conseil :

Le fait d’être informé des sujets ayant une incidence sur les pratiques et les ventes d’art autochtone, dont l’appropriation culturelle ou les différences de vision du monde, peut avoir un effet positif sur les processus commerciaux et la prise de décisions et, en fin de compte, contribuer à l’établissement de relations commerciales plus fructueuses.

Qu’est-ce que l’art autochtone?

« Tout simplement, une œuvre est autochtone lorsqu’elle est créée par un artiste autochtone, quel que soit le thème ou le sujet. Une histoire est autochtone, peu importe si elle provient d’un savoir ancestral, d’une expérience vécue ou de l’imagination. La musique autochtone n’est pas un genre en soi, et elle ne devrait pas être considérée comme de la musique du monde. Elle peut s’exprimer à travers n’importe quel genre ou combinaison de genres, et elle donne en fait naissance à des formes d’expression musicale entièrement nouvelles et inclassables. »

Conseil :

La narration est un élément essentiel des cultures autochtones. Il s’agit en outre du fondement des industries créatives, qu’il s’agisse de publications, de chansons ou de films. Les histoires sont perpétuées par les aînés à travers les récits oraux, et sont également mises à l’avant-plan par les artistes et les créateurs autochtones par l’intermédiaire de leur travail, sur tous les supports et dans tous les formats.

Utilisation du terme « autochtone »

Les termes « autochtone » (au sens de la Constitution canadienne ou des Nations Unies), « Premières Nations », « Métis » ou « Inuit » sont souvent utilisés pour distinguer les premiers peuples du Canada dans le cadre de la politique gouvernementale, de la législation et des interactions commerciales. Bien que la terminologie gouvernementale ait changé à plusieurs reprises, les peuples autochtones préfèrent être désignés par leur nation (p. ex. Mi’kmaq, Ojibwé, Haïda, Innu, Dakota). Le Canada est l’un des pays les plus diversifiés, mais en outre, ses populations autochtones le sont également. Cette diversité se reflète dans plus de 70 langues autochtones déclarées lors du recensement fédéral de 2021. Il faut savoir que chaque nation aura des formes de gouvernance et de diplomatie différentes.

Conseil :

Déterminez la nation à laquelle appartient le partenaire commercial ou l’artiste qui vous intéresse et, par respect, faites référence à la ou aux nations appropriées lors de votre discussion. Utiliser la prononciation appropriée des noms et des nations est un signe de respect. Demandez la prononciation correcte si nécessaire.

Qu’est-ce que le savoir traditionnel ?

« Les savoirs traditionnels autochtones, qui comprennent la manière de fabriquer certains objets, qui peut fabriquer ces objets, quels matériaux et représentations sont appropriés, et quelles sont leurs significations, ne sont pas l’œuvre ou la propriété d’individus. Il s’agit d’un savoir partagé, transmis par les gardiens depuis d’innombrables générations. La connaissance et son utilisation sont une responsabilité, plutôt qu’une propriété. Les connaissances traditionnelles comprennent les droits collectifs sur les histoires, les récits, les emblèmes, les symboles, les chants, les danses ou les œuvres d’art et les objets utilitaires qui s’y rapportent. »

Comprendre l’expression culturelle traditionnelle et la propriété intellectuelle

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA), que le Canada a ratifiée en 2021, prévoit que les peuples autochtones ont le droit de pratiquer et de revitaliser leurs traditions et coutumes culturelles. Le document suivant présente un examen approfondi de l’impact de ces enjeux sur les industries créatives autochtones : Promotion et protection de l’art et des expressions culturelles autochtones (ifrc.ca).

Regardez cette vidéo de cinq minutes de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle

S’attendre à la diversité dans la pratique

Lorsque vous travaillez avec des créateurs autochtones, vous pouvez être surpris par l’abondance de styles et par la variété des concepts, traditionnels ou non, qui sont pratiqués dans tout le Canada. Si certains artistes peuvent être formés aux pratiques coutumières (telles que le tannage des peaux ou le tambour à main) transmises de génération en génération par des activités et des enseignements oraux familiaux et les intégrer, ce n’est pas le cas de tous. Certains artistes peuvent être formés et éclairés par des pratiques et des espaces contemporains; d’autres peuvent être en contact avec les deux mondes. Dans un cas comme dans l’autre, ne soyez pas surpris si les œuvres autochtones ne correspondent pas à certaines des images auxquelles vous êtes habitués, comme les perles et les plumes. Réjouissez-vous plutôt que les artistes brisent les stéréotypes et imaginent l’avenir des Autochtones.

Conseil :

Il se peut que les artistes contemporains n’utilisent pas des pratiques ou des styles traditionnels.

Comprendre la complexité de l’identité

Historiquement, les identités autochtones ont été bouleversées par les politiques et les lois gouvernementales qui éliminent la langue et la culture et retirent les enfants à leur famille. Les pensionnats, les déplacements, les adoptions et le système de placement en famille d’accueil ont perturbé les liens communautaires de nombreux peuples autochtones. Au Canada, l’« identité » autochtone demeure une question controversée, tant au sein des nations elles-mêmes qu’entre les nations et le gouvernement fédéral.

En fait, il existe de nombreux cas où des personnes non autochtones se déclarent autochtones de manière erronée. « L’usurpation d’identité » se produit parmi les artistes, les universitaires et les personnes exerçant des fonctions de direction dans la communauté. Des inquiétudes et la colère surgissent lorsque de fausses revendications d’identité autochtone permettent d’avoir accès au financement, aux ressources, à la communauté, à l’histoire et à la pratique.

Conseil :

La meilleure façon d’aborder une personne autochtone dans le respect au Canada est de lui poser des questions sur sa nation ou sur ses liens familiaux. Si elle éprouve de la difficulté à exprimer ses liens avec une nation ou une communauté, il se peut qu’elle ne soit pas Autochtone. Ne lui demandez pas son degré de sang, puisque cela est considéré comme offensant.

Choses à faire

Collaborer avec des entreprises autochtones

Il existe une base croissante et diversifiée de publics et de consommateurs nationaux et internationaux désireux de découvrir l’art autochtone ou d’acheter des produits autochtones. À mesure que croissent les marchés, les entreprises et les organisations non autochtones tentent de tirer parti de cet attrait naissant. Souvent, dans un contexte international, les acheteurs sont attirés par des entreprises non autochtones ayant des projets autochtones parce qu’ils croient que ces entreprises sont mieux établies. Cela désavantage souvent les petits exportateurs autochtones qui sont des entrepreneurs, mais qui ne sont pas enregistrés en tant qu’entreprises. L’achat de créations autochtones authentiques célèbre et préserve la créativité, l’histoire, la langue et la culture des peuples autochtones, tout en appuyant la prospérité économique des peuples autochtones dans tout le Canada.

Conseil :

En règle générale, les entreprises autochtones au Canada sont majoritairement détenues et contrôlées par des individus ou des communautés autochtones (propriété autochtone d’au moins 51 %). Cela permet de garantir que l’entreprise à laquelle vous achetez quelque chose a des propriétaires ou des dirigeants autochtones.

Appuyer les approches souveraines

Les artistes et créateurs autochtones cherchent à établir leur « souveraineté » dans les secteurs créatifs. La culture est un élément fondamental de la souveraineté et de l’identité. Il est important de reconnaître que les Autochtones détiennent leur propriété intellectuelle et culturelle et en ont le contrôle, y compris le contrôle décisionnel sur le financement et les aspects créatifs de la production, la protection des droits et des intérêts de la propriété culturelle, et la garantie des consentements appropriés, de l’accès à la propriété culturelle et de son contrôle.

Conseil :

Les conteurs autochtones ne cherchent pas à être pris en compte au titre de la « diversité », mais à se voir reconnaître des droits spéciaux découlant de leur statut constitutionnel en tant que nations fondatrices du Canada. « Le contrôle du récit » est d’une importance capitale, de la création à l’expression, jusqu’à la commercialisation.

Respecter les protocoles culturels

Le respect des traditions et des protocoles culturels implique également le respect de la confidentialité des savoirs, de la culture et des objets sacrés, secrets ou de nature délicate. Apprenez ce qui est approprié et ce qui est confortable, et admettez que « NON » est une réponse valable. Il peut s’agir de ne pas toucher les tambours, les insignes ou les cheveux, ou d’autres questions relatives au contact personnel, de ne pas photographier ou filmer pendant une cérémonie, ou de savoir quand il est approprié ou non d’avoir de l’alcool. Souvent, l’accès aux protocoles nationaux et leur respect impliquent un surcroît de travail et de diligence pour les artistes et les créateurs autochtones. C’est une façon pour les créateurs autochtones de rendre des comptes à leurs communautés.

Conseil :

Chaque nation possède son propre droit coutumier et ses propres traditions qui doivent être respectés. Travaillez avec les créateurs autochtones afin de vous assurer que les protocoles de la nation sont respectés.

Suivre les références contemporaines pour travailler avec les artistes autochtones

Les artistes et les directeurs artistiques cherchent à établir de nouvelles pratiques, politiques et réglementations dans le secteur pour tenir compte de la situation particulière des créateurs autochtones. L’élaboration de normes et de lignes directrices est une pratique émergente dans les secteurs créatifs qui vise à atténuer les erreurs du passé. Ces ressources sectorielles permettent d’accéder aux protocoles et aux coutumes de la communauté et de la nation.

Ressource : Protocoles et chemins cinématographiques : Un guide de production médiatique pour la collaboration avec les communautés, cultures, concepts et histoires des peuples des Premières Nations, Métis, et Inuit (Bureau de l’écran autochtone)

Conseil :

Assurez-vous que l’accès aux pratiques et aux savoirs traditionnels soit reconnu et que les avantages découlant de l’utilisation de ces récits et connaissances soient communiqués aux personnes et aux communautés concernées.

Garantir les droits d’auteur applicables

En raison de l’appropriation continue, il a fallu protéger les savoirs autochtones (médicaments, cérémonies, chants ou symboles) de la production de masse, de l’utilisation abusive et de la commercialisation. Les lois internationales et canadiennes sur le droit d’auteur ne concordent pas toujours avec les points de vue autochtones concernant les concepts de propriété culturelle, souvent détenus par la communauté. Les droits de propriété intellectuelle (PI) sont déjà complexes et peuvent devenir plus difficiles à gérer lorsque des questions de droits collectifs ou communautaires sont soulevées.

Ressource : Introduction aux droits de propriété intellectuelle et à la protection du savoir et des expressions culturelles autochtones au Canada (ISDE Canada)

Respecter les relations communautaires

« Il peut arriver que des producteurs ne comprennent pas la relation qui nous unit aux collectivités ou l’importance de cette relation, ou ne s’intéressent pas au fait que la façon de consulter les collectivités est aussi importante que la façon de consulter les bailleurs de fonds. Chacun se fait sa propre hiérarchie quant à l’importance des gens, et les valeurs de l’industrie et de la collectivité sont souvent opposées. Une production axée sur les valeurs place les valeurs autochtones au sommet de la hiérarchie. Si des problèmes se posent, les priorités ne sont pas du tout les mêmes. Ce que j’ai appris, c’est que les dispositions les plus importantes sont celles qui portent sur les processus décisionnels. »

Danis Goulet, réalisatrice et scénariste cri-métisse primée

Conseil :

Pour de nombreux artistes et créateurs autochtones, la communauté est la priorité. L’impact sur la communauté, la participation de celle-ci et le fait de lui rendre la pareille seront probablement des facteurs pris en considération dans vos discussions commerciales. Si vous essayez d’intégrer les réalités et les perspectives autochtones, réfléchissez d’un point de vue communautaire et mettez l’accent sur la réciprocité dans les relations.

Choses à éviter

Éviter l’appropriation

L’appropriation culturelle est l’extraction sans permission, à des fins financières, une violation des droits d’auteur ou toute autre forme d’utilisation non autorisée d’œuvres artistiques autochtones. Cela comprend la conception, l’histoire, la pensée, l’identité et les objets culturellement distincts. Le vol et les fausses représentations conduisent à la dévalorisation de l’art autochtone, à la perpétuation de stéréotypes néfastes et à des dommages pour les industries créatives et les artistes.

Ressources :

Conseil :

Il faut demander une autorisation à une source appropriée, comme le créateur ou sa famille, une communauté ou une nation en particulier, ou leurs décideurs respectifs.

Éviter la marchandisation

La vision autochtone de l’art est très différente et unique. Malheureusement, les pratiques artistiques autochtones sont souvent banalisées. La création de produits culturels tels que les arts visuels, le perlage, les vêtements, la musique et le cinéma nécessite des compétences élevées; il s’agit d’une pratique précieuse qui se transmet de génération en génération. Les processus créatifs sont complexes et stratifiés, impliquant des couches de recherche, d’enseignements culturels et de savoirs, de protocoles, d’autorisations et d’engagement. Le processus peut être long, émotionnel et gratifiant. Pour les créateurs autochtones, l’échange de savoirs, l’offre de possibilités aux membres de la communauté, la responsabilité et les bonnes relations peuvent être aussi importants que la réussite financière.

Conseil :

Ne pas tenter de marchandiser les pratiques ou les produits culturels. Cela est considéré comme offensant.

Évitez le tokénisme

« Depuis la colonisation, la valeur culturelle, monétaire et fonctionnelle des œuvres réalisées par les Autochtones a été réduite à des marchandises digestes et kitsch. Cela a des répercussions sur les artistes autochtones d’aujourd’hui, car ils ne disposent que d’espaces symboliques où présenter leurs œuvres ou les vendre au détail; ils sont en concurrence sur un marché d’œuvres, de stéréotypes ou de biens d’inspiration autochtone inauthentiques offerts à des coûts bien inférieurs, ou encore ils sont contraints de créer des œuvres selon des normes eurocentriques pour être reconnus comme des artistes légitimes. »

Sage Paul, une artiste et designer primée Denesuliné tskwe urbaine, est membre de la Première Nation d’English River et directrice exécutive et artistique de Indigenous Fashion Arts

Conseil :

Reconnaissez les talents et respectez les contributions des Autochtones. Abordez les relations commerciales avec un sens de la réciprocité. Investir l’un dans l’autre est un aspect de l’établissement d’une relation mutuelle.

Établir des relations respectueuses

En tant qu’acheteur ou investisseur international, soyez conscient, dans vos interactions avec les peuples autochtones, que vos valeurs et vos pratiques commerciales sont peut-être différentes des leurs. Cette section s’appuie sur les principes fondamentaux énoncés dans la première section pour explorer certaines spécificités de l’étiquette professionnelle ainsi que les éléments à prendre en considération afin de garantir des interactions positives.

Les pratiques commerciales de l’industrie créative autochtone ne se limitent pas à l’échange d’argent ou à la génération de revenus. Les économies autochtones de commerce étaient traditionnellement réciproques et sont encore souvent centrées sur la famille et la communauté, par opposition à une entreprise ou à un individu. Le troc et l’échange de biens ou de compétences sont souvent utilisés à la place de l’argent, tandis que les avantages pour la famille, la communauté et la nation sont tout aussi importants que les gains financiers. Autrement dit, les mesures du succès ne sont pas toujours monétaires. Le don fait partie de l’économie. On dit souvent que si une personne profite de quelque chose, tout le monde en profite. Qu’il s’agisse de prendre soin des personnes dans le besoin ou de fournir activement du soutien à la prochaine génération, pour la plupart des créateurs autochtones, rendre la pareille est important.

Ressource (vidéo) : Indigenous Economic Reconciliation (en anglais seulement), (University of Victoria)

Avant de communiquer avec des partenaires ou des fournisseurs potentiels

Il est souvent demandé aux créateurs et aux artistes autochtones de renseigner leurs partenaires commerciaux sur les questions culturelles. En fin de compte, cela les empêche de se concentrer sur leur propre pratique et d’y consacrer du temps, sans parler du fait que ce travail n’est généralement pas rémunéré.

Premières interactions

Gardez à l’esprit des approches moins transactionnelles et plus relationnelles afin de garantir des avantages réciproques pour les deux parties.

  • Il est essentiel d’instaurer un climat de confiance avant de conclure un quelconque accord. Cela ne se fera pas en une seule réunion.
  • Il est considéré comme très important de se rencontrer en personne, ce qui peut entraîner des frais de déplacement plus élevés.
  • Songez à l’incidence possible sur l’avenir, ainsi qu’à la protection des générations futures.
  • Soyez aussi direct que possible. Soyez transparent au sujet de votre entreprise ou de votre projet. Partagez librement l’information.
  • Revoyez les ententes pour s’assurer qu’elles comprennent ce qui est important pour les artistes.

Soyez conscient de vos responsabilités d’hôte

Alors que la culture d’entreprise peut se préoccuper des résultats, les artistes et créateurs autochtones mettent davantage l’accent sur les processus créatifs et culturels.

  1. Les présentations sont importantes et prennent du temps. De nombreux Autochtones se présentent en disant d’où ils viennent, qui sont leurs parents, et parlent de l’histoire de leur territoire ou de l’histoire de leur peuple.
  2. La prise en charge des aînés est une priorité. Il peut s’agir de veiller à la présence d’un aidant ou de fournir des honoraires, un cadeau, de la nourriture, des moyens de transport et des médicaments. C’est ainsi que nous montrons notre respect. En cas de doute, demandez ce qui est approprié.
  3. L’échange de cadeaux fait partie de nombreuses cultures autochtones. Il importe de comprendre la culture du don d’une nation donnée et de veiller à donner des cadeaux appropriés aux bons destinataires. Donner et recevoir est une preuve de respect pour le temps, les connaissances et les compétences d’une personne.

Ressource : Guidelines for Working with First Nation, Metis and Inuit Elders and Knowledge Keepers (en anglais seulement), (Carleton University)

Styles de communication

Il est fortement recommandé de faire preuve de diligence dans l’utilisation des médias et des plateformes de médias sociaux. Un mauvais usage peut avoir des conséquences défavorables sur les entreprises et les relations.

  • De nombreux créateurs, artistes et aînés autochtones transmettent des messages au moyen de récits. Écoutez-les sans les interrompre. Cela témoigne votre respect. Soyez patient.

  • Il existe plus de 70 langues autochtones différentes au Canada. L’anglais est peut-être la deuxième langue de vos partenaires commerciaux potentiels. Apprendre la bonne prononciation de mots en langue autochtone, tels que les noms ou les nations, est une preuve de respect.

  • L’humour et les manifestations d’émotions sont couramment utilisés dans toutes les interactions, y compris dans le monde des affaires. L’humour autochtone peut parfois paraître sombre, mais il n’a pas pour but d’être offensant. Le recours à l’humour est un acte de résilience.

  • Certaines personnes peuvent ne pas vous regarder directement dans les yeux. Ne confondez pas le fait de ne pas parler avec le fait de ne pas comprendre

Conduite appropriée des affaires

Avoir une réunion fructueuse

Faire appel à un artiste

Tenir compte des besoins des artistes autochtones. Réserver longtemps à l’avance permet d’accéder aux subventions artistiques, de limiter les délais de financement et les priorités concurrentes, et de garantir que vous serez en mesure d’accueillir les artistes de manière appropriée. Il faut s’attendre à ce que les accords contiennent des dispositions relatives à la culture et aux préférences des artistes. Vous pouvez également consulter : Protocoles autochtones pour les arts visuels : Un guide pratique pour naviguer le monde complexe des protocoles autochtones pour les expressions culturelles dans le secteur des arts visuels (CARFAC).

  • Travaillez avec les conservateurs et les programmateurs autochtones pour assurer l’interprétation et la promotion appropriées des œuvres.
  • Faites approuver le matériel de marketing et le langage utilisé dans les communiqués de presse ou dans les expositions. Souvent, les artistes autochtones prennent l’initiative de décrire leurs œuvres ou leurs biens culturels.
  • Attribuez minutieusement les artistes, les nations et les communautés.
  • Payez les taux appropriés dans l’industrie.
  • Déterminez si des services de traduction ou d’interprétation sont nécessaires.
  • Informez votre équipe de la conduite à adopter et de ce à quoi il faut s’attendre.
  • Assurez-vous que vous avez reçu les autorisations nécessaires pour utiliser les images.

Ressources sur les taux :

Veiller à un tournage, une exposition ou un événement fructueux

Les artistes autochtones se trouvent souvent dans des espaces non autochtones. Prévoyez l’utilisation de protocoles culturels lors d’événements, et veillez à ce que tous les participants comprennent et respectent ces procédures.

Valoriser les décisions culturelles lors des événements

« Si des activités culturelles traditionnelles sont ouvertes et que les délégués non autochtones sont accueillis en tant qu’invités, ces derniers doivent comprendre l’importance du rassemblement et apprécier leur inclusion ou leur participation. Considérez que votre présence est un cadeau. Respectez le processus. En effet, il est considéré comme irrespectueux de quitter une cérémonie culturelle, quelle qu’en soit la durée. »

Denise Bolduc est Anishinaabe et Française, membre de la Première Nation de Batchewana, et elle a des liens familiaux avec la Première Nation de Garden River

Avancement, réservation, avenants et contrats

Valoriser les décisions culturelles dans les contrats

« La chanson faisant l’objet de cet accord comprend des éléments ou des enseignements traditionnels, et nous demanderons l’autorisation des aînés pour toute licence autorisant la synchronisation. Nous voulons utiliser notre musique pour remettre en question les stéréotypes et nous comprenons que les jeunes nous regardent. Nous devrons éviter les publicités pour l’alcool, la nicotine, le cannabis et le vapotage, les campagnes des compagnies pétrolières et gazières, les oléoducs, les compagnies hydroélectriques, les compagnies minières, les sociétés d’exploitation forestière, les jeux d’argent et les prêteurs abusifs (prêteurs sur gages, prêts sur salaire, concessionnaires de voitures d’occasion), les médias qui présentent ou incluent la violence à l’égard des femmes et les campagnes politiques. »

Alan Greyeyes, membre de la Première Nation de Peguis, la plus grande communauté des Premières Nations du Manitoba

Franchir les frontières internationales

Soyez conscient des restrictions locales concernant l’importation et l’exportation de certains produits et matériaux. L’utilisation de la flore et de la faune (comme la fourrure de phoque et les plumes d’aigle) est fréquente dans la conception et l’élaboration de certains produits. Malheureusement, cela rend difficile l’exportation de tels produits, de même que le franchissement des frontières. Par exemple, les expositions de mode et d’art inuit peuvent être interdites de voyage ou d’exposition à l’échelle internationale en raison de l’utilisation de la peau de phoque. La chasse au phoque revêt une importance culturelle, assure une sécurité alimentaire indispensable et fait partie intégrante de l’économie inuite et de la gestion de l’environnement. Pour des raisons environnementales, les peaux utilisées sur les tambours traditionnels sont considérées comme un problème en Nouvelle-Zélande et en Australie, car elles peuvent être porteuses de parasites et poser des problèmes lors du passage à la douane. Veillez à ce que les documents appropriés soient soumis à l’avance, et soyez prêts à aider l’artiste à son arrivée à destination.

Administration et processus administratifs

Il existe un nombre croissant de collectifs d’artistes et d’organisations artistiques dirigées par des Autochtones, et ce, dans toutes les disciplines. Au cours des dernières années, les organisations autochtones ont servi les artistes autochtones d’une manière qui correspond à leurs besoins propres, à leur situation et à leur vision du monde. Des organisations à but non lucratif, telles que le Bureau de l’écran autochtone (créé en 2017), Indigenous Fashion Arts (créé en 2017) et l’Indigenous Music Office (créé en 2023), ainsi que des organisations telles que l’Indigenous Performing Arts Alliance, l’Indigenous Editors Association et le Collectif des commissaires autochtones appuient la communauté créative grâce à des réunions, des publications et d’autres ressources sectorielles. Elles mettent l’accent sur la création d’écosystèmes créatifs fondés sur des modes de connaissance et d’action autochtones, et elles peuvent vous aider à atteindre vos objectifs commerciaux. Si ce n’est pas le cas, gardez à l’esprit ce qui suit :

Nous espérons avoir posé les jalons d’une interaction commerciale respectueuse. Nous savons que vous serez enthousiasmés par la profondeur et la portée des secteurs créatifs autochtones au Canada. Si votre formation commence ici, votre succès viendra de votre compréhension de la valeur des processus culturels de votre partenaire commercial potentiel et de l’impact considérable que les collaborations peuvent avoir sur les communautés autochtones.

Conseils en bref

Comment s’engager avec des partenaires ou des fournisseurs autochtones

Interactions générales

Réunions fructueuses

Culture commerciale

  • Alors que la culture d’entreprise peut se préoccuper des résultats, les artistes et créateurs autochtones mettent davantage l’accent sur les processus créatifs et culturels.
  • La prise de décisions peut prendre du temps et nécessiter la consultation d’autres personnes. L’artiste a notamment pour responsabilité de consulter la communauté dans son ensemble.
  • De nombreuses communautés des Premières Nations et des Inuits ou des établissements métis sont éloignés, ce qui a une incidence sur l’accès aux services, à Internet, à l’électricité, aux services bancaires et aux moyens de transport. N’hésitez pas à vous renseigner sur l’accès, ou téléphonez pour connaître les détails.
  • Déterminez les éventuels problèmes de consentement, de droits d’auteur ou de propriété dès le début d’un projet. Travaillez avec les créateurs autochtones afin de vous assurer que les protocoles de la nation sont respectés.
  • Rédiger les ententes pour s’assurer qu’elles comprennent ce qui est important pour les artistes.

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