Bram Abramson à la conference Digital Media at the Crossroads

Discours

Toronto (Ontario)
20 janvier 2024

Bram Abramson, conseiller pour l’Ontario
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC)

Le discours prononcé fait foi

Bonjour à tous et merci pour cette aimable présentation.

Quelle différence une seule année peut faire!

L’année dernière, j’ai participé à un groupe d’experts qui s’est penché sur le rôle et l’incidence des algorithmes qui régissent des fonctions comme la sélection des listes de lecture et la présentation à l’écran – sur la question de savoir s’il pouvait ou devrait y avoir un rôle de contrôle public sur la manière dont les entreprises déploient ces algorithmes et, le cas échéant, dans quel but. Cette année, je suis ici en tant que conseiller régional du CRTC pour l’Ontario, et on m’a demandé de vous informer de la situation. Nous y reviendrons dans un instant.

Bien sûr, l’événement de l’année dernière était entièrement en ligne. Cette fin de semaine, nous sommes heureux de pouvoir nous réunir, en personne, dans une ville et un campus situés sur un carrefour qui est le territoire traditionnel de nombreuses nations – y compris les Mississaugas de Credit, les Anichinabés, les Chippewas, les Haudenosaunee et les Wendats – et qui fait l’objet du traité 13 entre la Couronne et les Mississaugas de Credit. C’est un privilège d’être ici et de faire partie d’un groupe de personnes passionnées par les activités dont le CRTC supervise les marchés.

Comme beaucoup d’entre vous le savent, c’est l’une de mes passions. Dans mon cas, et bien avant de faire carrière comme juriste en communication, ma passion a été nourrie par des racines développées dans cette ville à des époques et dans des contextes où tout semblait possible. Gérer un système de tableau d’affichage en ligne branché au réseau mondial FidoNet, où les leçons sur la modération du contenu et les médias sociaux étaient omniprésentes. Jouer avec des groupes aux Elvis Mondays à l’époque où le Drake était un petit bar avec de la bière bon marché. Préparer des cassettes pour les mettre à l’essai, aussi brièvement que ce fût, avec l’éclairage des stations de radio comme CFNY à ses débuts, ou Brave New Waves de la CBC, ou les radios communautaires, auxquelles j’ai participé plus tard.

Ensuite, l’essor de l’Internet commercial et du Web, et les débuts de la conception de sites Web. L’explosion du trafic Internet et de son infrastructure physique. L’évolution de la réglementation des télécommunications, qui est passée d’un réseau téléphonique public commuté à un environnement orienté vers l’Internet, la large bande et la téléphonie mobile.

Nous sommes encore dans les affres de ce changement, et de son pendant dans le domaine des médias audiovisuels. Les technologies numériques et les formes d’expression culturelle, personnelle et démocratique qui en découlent continuent d’évoluer à un rythme de plus en plus rapide. D’une certaine manière, il semble donc que tout soit encore possible. Mais ce n’est plus l’apanage des seuls amateurs. Les domaines pour lesquels nous avons en commun une passion sont désormais au centre de l’attention. Les plateformes numériques sont le moteur de certaines des plus grandes entreprises du monde. Nous sommes donc confrontés à un paradoxe. À certains niveaux, nous sommes plus que jamais capables de parler, d’écouter et de nous faire entendre. Or, ces fonctions sont liées à des structures de marché dans lesquelles la concurrence oligopolistique à laquelle nous étions habitués sur la scène nationale est en train d’être réécrite à une échelle beaucoup plus grande pour un environnement mondial.

Nous sommes donc à la croisée des chemins, et ceci n’est pas unique au Canada. Nous avons beaucoup à apprendre de nos homologues étrangers qui ont été confrontés à des enjeux très similaires. D’une certaine manière, nous vivons cette croisée des chemins plus intensément que d’autres pays. Nulle part ailleurs qu’au Canada, autant de contenu étranger n’a été disponible pendant si longtemps en tant qu’élément de base du système de radiodiffusion national.

Peu d’endroits à part le Canada anglais appliquent un « rabais culturel » aussi faible aux contenus importés de l’étranger. Il s’agit d’une occasion rare, car l’inverse est également vrai – c’est pourquoi le Canada a si bien réussi à exporter autant de contenu à l’échelle mondiale pendant de nombreuses années. Il n’est pas facile de rivaliser avec Hollywood, qui a une portée mondiale et des économies d’échelle considérables au niveau national.

Les créateurs, diffuseurs, distributeurs et fournisseurs de services canadiens ont survécu – et dans de nombreux cas prospéré – grâce à un large partenariat régi par les règles du jeu établies par les régulateurs. Lorsque ce partenariat a fonctionné au mieux, il a pris la forme d’un engagement commun à servir et à soutenir les Canadiens dans tous leurs rôles, leurs identités et leur diversité. Le débat que nous menons depuis de nombreuses années porte sur la meilleure façon de faire progresser ce partenariat et les règles dont les marchés pourraient avoir besoin pour obtenir des résultats conformes aux normes politiques auxquelles nous les soumettons. Ce débat s’est intensifié au cours de la dernière décennie. L’écoute de la télévision spécialisée a dépassé l’écoute de ce que nous appelions les radiodiffuseurs.  Aujourd’hui, l’écoute sur Internet semble dépasser le contenu audiovisuel consommé par l’intermédiaire de réseaux spécialisés comme ceux des fournisseurs de services par câble et satellite.

La manière de moderniser la réglementation du marché a été un débat à la croisée des chemins, depuis les audiences sur l’exemption des nouveaux médias jusqu’à Parlons télé, en passant par l’examen de la législation en matière de   radiodiffusion et de télécommunications, les changements législatifs et la phase 1 des trois phases que nous avons mises en place pour poursuivre la révision de nos cadres réglementaires en matière de radiodiffusion.

Et, bien sûr, la Digital Media at the Crossroads conference (Conférence à la croisée des chemins sur les médias numériques) a été présente à chaque étape, puisqu’elle célèbre sa dixième année dans un bâtiment où j’ai occupé l’un de mes premiers emplois d’été, à l’époque de l’école secondaire, en tant qu’assistant de recherche ici à la Faculté de musique et, de l’autre côté du parc, au Centre de musique canadienne. Plus ça change.

La conversation a évolué au gré des marchés. Quels sont les domaines qui connaissent, ou sont susceptibles de connaître, une défaillance du marché, le cas échéant? Que signifie l’évolution du pouvoir de marché et de la concentration? Inévitablement, de nombreux débats anciens sont de nouveau d’actualité.

Il y a longtemps, Mark Fowler, alors président de la Commission fédérale des communications des États-Unis, a résumé son approche de la manière suivante : « L’intérêt public est ce qui intéresse le public. » Est-ce tout ce qu’il y a à dire? Qu’est-ce que les téléspectateurs, les consommateurs et les citoyens ont besoin et sont en droit d’attendre des marchés des médias audiovisuels? Quel contenu doit être accessible à qui et dans quelles conditions, et pourquoi les marchés n’y parviendraient-ils pas d’eux-mêmes? Le débat sur la promotion d’un écosystème de l’information qui soutient la démocratie délibérative bat son plein. Comment faire en sorte que le débat prenne en compte à la fois les contenus à courte durée de vie et ceux à longue durée de vie?

Les instances du CRTC jouent un rôle essentiel dans le régime réglementaire. Chaque décision du CRTC est – et doit être – basée sur des idées soumises au dossier public. Le travail de documentation et d’analyse des demandes est au cœur de notre système réglementaire. Pour guider la mise en œuvre des modifications apportées à la Loi sur la radiodiffusion, le CRTC a lancé une série d’instances en trois phases, parallèlement à d’autres travaux en cours.

Dans la phase 1 de 3, nous avons dit que les groupes de médias qui gagnent 10 millions de dollars en revenus de radiodiffusion au Canada doivent remplir un formulaire d’enregistrement et sont soumis à des règles de préférence indue sur la concurrence loyale. Un processus est en cours pour déterminer quels groupes de médias sont responsables des droits de radiodiffusion. Bien entendu, les groupes de médias dont les revenus de radiodiffusion au Canada s’élèvent à 50 millions de dollars étaient déjà tenus de présenter un rapport annuel dans le cadre du processus de collecte de données par lequel nous surveillons les marchés que nous réglementons.

Pour la question plus générale de la modernisation de nos règles relatives aux dépenses de programmation obligatoires, dans lesquelles les acteurs du marché doivent investir dans une certaine quantité de programmes canadiens pour leur propre usage, et aux contributions obligatoires, dans lesquelles ils doivent verser des fonds, nous venons de terminer l’une des audiences les plus longues de notre histoire.  120 personnes et organisations y ont comparu pendant trois semaines, et beaucoup d’autres ont soumis des mémoires écrits.

Je ne faisais pas partie du panel et je ne participerai pas à cette décision. J’ai cependant fait remarquer que les discussions constructives sur les effets des défaillances du marché n’empêchent pas la production de contenus canadiens et autochtones diversifiés et indépendants à longue et courte durée de vie, y compris les nouvelles. J’ai ajouté que le pouvoir du marché n’empêche pas injustement ces contenus d’atteindre les publics qui les souhaitent; et que des styles de réglementation efficaces, transparents et accessibles facilitent la participation à des marchés qui respectent ces principes.

Nous examinons toutes ces contributions, alors que nous passons de la phase 1 à la phase 2, qui abordera des questions comme les diverses définitions du contenu canadien, la protection des consommateurs et du public, et l’accès au marché et la concurrence.

Et, bien sûr, d’autres domaines de travaux sont en cours. Avec la nouvelle Loi sur les nouvelles en ligne publiée par le ministère du Patrimoine canadien, nous prévoyons lancer des consultations publiques sur la manière d’assumer les responsabilités qui nous sont confiées en vertu de cette loi.

Nous prévoyons lancer une consultation sur le financement des intervenants d’intérêt public, ce que nous faisons actuellement de manière très différente dans les secteurs des télécommunications et de la radiodiffusion. En ce qui concerne les télécommunications, nous poursuivons la transition vers un cadre réglementaire entièrement axé sur la large bande, avec notamment une audience à venir sur le marché de la large bande et la poursuite des travaux sur la question non moins importante de la concurrence dans le domaine des transports.

En tant que régulateur, le CRTC vise à établir des cadres qui garantissent aux Canadiens l’accès à une diversité de musique, d’histoires et de programmes d’actualités et d’information qui correspondent à leurs réalités. Cela signifie une réglementation si nécessaire, mais pas nécessairement une réglementation. Une grande diversité de points de vue permet de s’assurer que nous utilisons les bons instruments pour atteindre les bons objectifs, conformément à la politique qui nous est imposée par la loi.

Je ne saurais donc trop insister sur l’importance de l’apport des parties prenantes, comme tous ceux qui sont présents ici aujourd’hui. De nombreux avenirs sont possibles. Mais les seuls outils que le CRTC peut mettre à disposition sur le marché sont ceux qui sont basés sur les preuves qui nous ont été présentées. Les industries numériques et notre régime réglementaire étant tous deux à la croisée des chemins, il est plus important que jamais de s’assurer que notre conversation informelle ici à la conférence devienne une preuve formelle déposée devant nous. J’ai bien hâte de poursuivre notre collaboration.

Merci. 

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