Conseils sur l’utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices dans les sources d’approvisionnement en eau potable canadiennes - Document de conseils pour consultation publique
Organization: Health Canada
Publiée : 2018-11-23
La période de consultation se termine le 25 janvier 2019
Table des matières
- Objet de la consultation
- Sommaire
- Partie A. Conseils sur l'utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices dans les sources d'approvisionnement en eau potable canadiennes
- Partie B. Renseignements complémentaires
- B.1 Descriptions, sources et exposition
- B.2 Effets sur la santé
- B.3 Méthodes analytiques
- B.4 Technologies de traitement
- B.5 Contexte international
- B.6 Lacunes en matière de recherche
- Partie C. Références et acronymes
Novembre 2018
Conseils sur l'utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices dans les sources d'approvisionnement en eau potable canadiennes
Objet de la consultation
Ce document a été élaboré dans le but de fournir aux organismes de réglementation et aux décideurs des recommandations des conseils sur l'utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices dans les sources d'approvisionnement en eau potable canadiennes.
Ce document est mis à la disposition du public pour une période de consultation de 60 jours. La présente consultation vise à solliciter des commentaires sur le document de conseils proposée. Les commentaires, avec justification pertinente le cas échéant, sont les bienvenus. Ils peuvent être envoyés à Santé Canada par courrier électronique (HC.water-eau.SC@canada.ca) ou au besoin par la poste au Bureau de la qualité de l'eau et de l'air, Santé Canada, 3e étage, 269, avenue Laurier Ouest, IA 4903D, Ottawa (Ontario) K1A 0K9. Les commentaires doivent nous parvenir avant le 25 janvier 2019.
Les commentaires reçus dans le cadre de la consultation seront transmis, avec le nom et l'affiliation de leurs auteurs, aux membres concernés du Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable (CEP). Les personnes qui ne veulent pas que leur nom et leur affiliation soient communiqués aux membres du CEP doivent joindre à leurs commentaires une déclaration à cet égard.
Il est à noter que ce document de conseils sera révisé après l'analyse des commentaires reçus, après quoi le document définitif sera publié. Le présent document devrait donc être considéré strictement comme une ébauche pour commentaires
Conseils sur l'utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices dans les sources d'approvisionnement en eau potable canadiennes
Sommaire
Les entérocoques sont un indicateur bactérien de contamination fécale qui peut servir à évaluer la salubrité de l'eau potable. Dans le cadre d'un programme de surveillance de l'eau potable, ils peuvent fournir de l'information sur la qualité de la source d'eau, l'adéquation du traitement et la salubrité de l'eau acheminée jusqu'au consommateur.
Santé Canada a récemment terminé son examen sur les entérocoques dans l'eau potable. Les présentes recommandations décrivent l'importance des entérocoques comme bactéries indicatrices de la qualité et de la salubrité de l'eau potable, ainsi que les considérations relatives à l'échantillonnage et au traitement. Lors de sa réunion du printemps 2017, le Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable a examiné le document de conseils concernant les entérocoques dans les sources d'approvisionnement en eau potable canadiennes et approuvé qu’il soit rendu public à des fins de consultation.
Évaluation
Les tests de détection des entérocoques peuvent fournir un complément d'information utile aux paramètres microbiologiques qui servent habituellement à la surveillance de l'eau potable, soit E. coli et les coliformes totaux. Les entérocoques peuvent persister plus longtemps dans l'environnement et être transportés à plus grande distance qu'E. coli. Ainsi, la présence d'entérocoques peut révéler une contamination fécale de l'eau qui serait autrement passée inaperçue. L'inclusion des entérocoques dans un programme de surveillance peut bonifier l'information dont disposent les programmes existants de surveillance bactériologique. Le présent document vise à fournir aux intervenants des recommandations sur l'utilisation des entérocoques dans un programme de surveillance en vue de cerner et d'atténuer les risques microbiologiques dans les systèmes d'approvisionnement en eau canadiens. Ces recommandations s'adressent notamment aux organismes de réglementation provinciaux et territoriaux, aux décideurs, aux propriétaires de réseaux d'eau et aux consultants.
Situation internationale
Les recommandations, normes et / ou directives relatives à la qualité de l'eau potable établies par des gouvernements étrangers ou des agences internationales peuvent varier en raison des connaissances scientifiques disponibles au moment de l'évaluation, ainsi que de l'utilisation de différentes politiques et approches. Les entérocoques servent couramment à l'évaluation de la qualité de l'eau dans plusieurs régions du monde, quoique d'autres indicateurs comme E. coli soient plus souvent utilisés. L'Organisation mondiale de la Santé affirme que des mesures supplémentaires doivent être envisagées advenant la détection d'entérocoques, sans pour autant fixer une valeur guide. La directive sur l'eau potable de l'Union européenne inclut les entérocoques à titre de paramètre pour la réalisation de contrôles complets - aucun entérocoque ne devant être détecté dans un volume de 100 ml d'eau - mais elle n'exige pas qu'ils fassent l'objet de contrôles fréquents. Les lignes directrices australiennes sur l'eau potable n'incluent pas de valeur guide pour les entérocoques, mais indiquent que ceux-ci peuvent servir à évaluer la qualité des sources d'eau, l'adéquation du traitement, la présence d'une contamination post-traitement dans le réseau de distribution et la salubrité de l'eau potable distribuée aux consommateurs. Aux États-Unis, la Ground Water Rule de l'Environmental Protection Agency inclut les entérocoques dans la liste des trois indicateurs bactériens de contamination fécale spécifiés par les États, dont font aussi partie E. coli et les coliphages.
Partie A. Conseils sur l'utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices dans les sources d'approvisionnement en eau potable canadiennes
Ce document fournit des renseignements à quiconque s'intéresse à l'utilisation des entérocoques comme bactéries indicatrices de contamination fécale dans le contexte de la qualité et de la salubrité de l'eau potable.
Au Canada, les règlements provinciaux et territoriaux en matière d'eau potable requièrent généralement de vérifier et de surveiller la présence d'E. coli et des coliformes totaux dans tous les systèmes d'approvisionnement en eau potable qui desservent le public. E. coli est un important indicateur de contamination fécale, mais, à l'instar de tout indicateur, il présente aussi des limites : il est plus sensible aux stress environnementaux et aux désinfectants que les entérovirus, les protozoaires et certaines bactéries pathogènes.
L'utilisation d'un plus large éventail d'indicateurs fécaux plutôt qu'E. coli uniquement augmente la possibilité de détection de problèmes et, par conséquent, notre capacité à y répondre.
Les entérocoques présentent des avantages qui pourraient permettre d'améliorer la détection de la contamination fécale des milieux aquatiques. Les entérocoques sont largement utilisés comme outils d'évaluation de la qualité de l'eau dans bien des pays, car ils sont relativement abondants dans les matières fécales animales et humaines, ils croissent aisément en culture et ils sont corrélés à des effets sur la santé humaine autant en eau douce qu'en eau salée. Ils sont employés pour indiquer la présence de matières fécales dans les eaux utilisées à des fins récréatives, dans l'eau potable et dans les eaux recirculées.
Les entérocoques appartiennent au genre Enterococcus, un groupe qui comprend plus de 30 espèces. Plusieurs espèces, telles qu'Enterococcus faecalis et Enterococcus faecium, font partie du microbiome intestinal et sont excrétés dans les selles humaines et animales. Les entérocoques peuvent être détectés dans les milieux aquatiques contaminés par des eaux usées ou des déchets fécaux d'origine animale ou humaine. Certaines espèces ont aussi été trouvées dans différents milieux environnementaux.
Il y a des indications que les entérocoques résistent mieux aux stresseurs environnementaux des milieux aquatiques et aux désinfectants utilisés dans l'industrie de l'eau potable (chlore, monochloramine, rayons ultraviolets [UV]) qu'E. coli. De plus, dans certains milieux aquatiques, ils peuvent survivre plus longtemps et être transportés plus loin qu'E. coli. Leur présence pourrait donc signaler des lacunes relatives à la qualité de l'eau qui n'auraient peut-être pas été relevées à l'aide des indicateurs classiques utilisés dans la surveillance de la qualité de l'eau.
Les entérocoques peuvent servir d'indicateurs de vérification pour obtenir des renseignements additionnels utiles sur la qualité de la source d'eau potable, sur l'efficacité du traitement de l'eau potable et sur la présence de microorganismes dans le réseau de distribution. Leur détection peut être ajoutée au programme d'essais courants pour compléter les renseignements fournis par les autres paramètres de vérification microbiologique, soit E. coli et les coliformes totaux. La détection des entérocoques peut aussi être utilisée lors de la vérification des systèmes d'approvisionnement en eau potable pour obtenir des renseignements supplémentaires sur la qualité microbiologique du système et pour vérifier l'existence de vulnérabilités possibles.
Des études en cours semblent indiquer que la surveillance des entérocoques pourrait être particulièrement utile dans le cas des puits d'eaux souterraines non traitées et celui des réseaux de distribution de l'eau potable. En effet, les entérocoques parviendraient à survivre plus longtemps qu'E. coli dans certaines sources d'eaux souterraines contaminées. Donc, dans le cas des réseaux de distribution d'eaux souterraines non traitées, la présence d'entérocoques révélerait l'existence d'une vulnérabilité possible de la source d'eau. Les entérocoques peuvent également demeurer plus longtemps qu'E. coli dans les milieux où la désinfection de l'eau potable est inadéquate. Dans les réseaux de distribution, la présence d'entérocoques peut révéler la défaillance d'un procédé de traitement en place ou signaler la présence d'une voie d'accès pour la contamination fécale. Certains ont avancé l'idée que les entérocoques pourraient constituer un bon indicateur de la qualité bactériologique de l'eau des conduites principales nouvellement installées ou récemment réparées ou encore des secteurs à débit faible, comme les extrémités du réseau de distribution.
Ce qui pourrait inciter les décideurs à utiliser les entérocoques dans les stratégies de gestion de l'eau potable est que les entérocoques sont un bon outil pour évaluer l'efficacité des procédés de traitement de l'eau en place et pour possiblement détecter des lacunes en matière de qualité de l'eau qui n'auraient pas été révélées en utilisant seulement E. coli comme indicateur de contamination fécale.
Il est important que les autorités compétentes en matière d'eau potable comprennent que les indicateurs de vérification permettent d'évaluer l'efficacité des procédés de traitement utilisés pour assurer la salubrité de l'eau potable. Ils ne permettent pas d'évaluer le nombre de maladies qui pourraient être causées par l'exposition à des agents pathogènes se trouvant dans l'eau potable. Malgré qu'E. coli soit actuellement considéré comme l'indicateur fécal principal, les renseignements obtenus par la surveillance des entérocoques peuvent permettre aux services des eaux de mieux comprendre leur système d'approvisionnement en eau potable et les aider à atteindre leurs objectifs en matière d'atténuation des risques et de qualité de l'eau potable.
Comme c'est le cas d'autres indicateurs microbiens, notre connaissance de la biologie et de l'écologie des entérocoques est incomplète. L'existence d'habitats servant de sources potentielles de bactéries indicatrices de contamination fécale dans l'environnement constitue un défi tant pour ce qui est des entérocoques que d'E. coli. Ces lacunes dans nos connaissances soulignent le besoin d'effectuer davantage de recherches afin d'améliorer notre compréhension des bactéries utilisées comme indicateurs d'une contamination fécale.
Ce sont les autorités responsables qui devraient juger de la pertinence d'inclure la surveillance des entérocoques dans les systèmes d'approvisionnement en eau potable dans le cadre d'une approche à barrières multiples ou d'un plan de salubrité de l'eau. Le nombre d'échantillons et la fréquence des échantillonnages nécessaires à la détection des entérocoques varient selon l'objectif poursuivi. Si l'on vise à effectuer une analyse régulière pour vérifier l'efficacité du traitement ou la présence de microorganismes dans le système d'approvisionnement, alors il est recommandé de réaliser des échantillonnages à une fréquence semblable à celle utilisée pour la détection des autres indicateurs microbiens, comme E. coli et les coliformes totaux. Toutefois, si l'on vise à détecter les entérocoques lors de la vérification des systèmes d'approvisionnement en eau potable, alors il se pourrait que le nombre d'échantillons requis au cours d'une année soit moins grand. Les documents techniques sur E. coli et sur les coliformes totaux contiennent de plus amples renseignements sur le rôle d'E. coli et des coliformes totaux dans la gestion de la qualité de l'eau.
Un système d'approvisionnement en eau potable qui est bien conçu, entretenu soigneusement et que l'on fait fonctionner convenablement peut produire de l'eau potable sans traces d'entérocoques. Par conséquent, on ne devrait pas trouver des entérocoques dans un système d'approvisionnement en eau potable. Si des entérocoques y sont dépistés, alors il faut confirmer leur présence, la déclarer, puis mettre en place les mêmes mesures correctives que celles décrites dans le document technique sur E. coli. Afin de prendre en temps opportun des décisions adéquates en matière de santé publique, il est impératif d'appliquer des méthodes de détection validées ou normalisées. Les étapes de vérification requises dans les méthodes d'analyse peuvent prolonger le temps nécessaire pour terminer les analyses. Comme c'est le cas chaque fois que la présence d'un indicateur microbiologique est relevée, les décisions relatives aux mesures correctives requises doivent être prises après évaluation de l'intégrité et de l'état physique du système d'approvisionnement et vérification des indicateurs opérationnels (p. ex. résidus de désinfectant, turbidité).
En règle générale, il est utile de recourir à des indicateurs supplémentaires de la qualité de l'eau. L'utilisation d'un plus large éventail d'indicateurs permet d'assurer une meilleure protection de la santé publique, étant donné les limites de chaque indicateur. Selon les données probantes, les entérocoques et E. coli peuvent tous deux révéler une contamination fécale, mais la présence de l'un ne signifie pas nécessairement la présence de l'autre. Comme les entérocoques sont de bons indicateurs de la pollution fécale, qu'ils sont relativement plus résistants qu'E. coli et qu'ils peuvent être transportés sur de plus grandes distances que ce dernier, leur détection dans un programme de surveillance permettrait de fournir des renseignements additionnels ou des données qu'il serait possible de comparer à celles obtenues par le programme de surveillance d'E. coli et des coliformes totaux actuellement en place. En optimisant les activités en cours, la surveillance et les traitements actuels, les services des eaux pourront mieux atteindre leurs objectifs en matière de qualité de l'eau, et, de ce fait, mieux protéger la santé publique. Afin d'assurer la salubrité de l'eau à l'aide d'une approche à barrières multiples ou d'un plan de salubrité de l'eau, il est important de rester au fait des pratiques exemplaires et des progrès dans l'industrie de l'eau potable.
Partie B. Renseignements complémentaires
B.1 Descriptions, sources et exposition
B.1.1 Descriptions et sources
Les entérocoques appartiennent au genre bactérien Enterococcus. Ce sont des bactéries Gram positif, de forme sphérique, se présentant seules, en paires ou en chaînettes.
La classification des entérocoques a évolué au cours des années. Ces bactéries ont d'abord été considérées comme une division du genre Streptococcus qui satisfaisait aux exigences suivantes : capacité de croître à une température entre 10 °C et 45 °C, de survivre pendant 30 minutes à 60 °C, et de croître à pH 9,6 et dans une solution contenant 6,5 % de NaCl. Les entérocoques ont aussi porté le nom de streptocoques fécaux, car ils ont été découverts dans des intestins d'animaux. L'élaboration de méthodes moléculaires a mené à la création d'un nouveau genre, Enterococcus, en 1984 (Fisher et Phillips, 2009).
On estime actuellement que le genre Enterococcus compte plus de 30 espèces classées en cinq ou six grands groupes (E. faecalis, E. faecium, E. avium, E. gallinarum, E. italicus et E. cecorum) (Svec et Devriese, 2009; Byappanahalli et coll., 2012a). Par contre, le nombre exact d'espèces, leurs divisions et l'étendue des habitats qu'ils peuplent sont encore incertains (Del Mar Lleò et coll., 2005). Certaines espèces colonisent surtout les selles, alors que d'autres se trouvent plus couramment dans l'environnement. Les termes « entérocoque », « streptocoque fécal » et « entérocoque intestinal » figurent dans la littérature traitant de l'eau potable, mais, pour des raisons pratiques, ils peuvent être considérés comme essentiellement synonymes et interchangeables (Del Mar Lleò et coll., 2005; Byappanahalli et coll., 2012). Les méthodes d'essais normalisées pour la détection des entérocoques ne sont pas spécifiques des espèces se trouvant dans les selles et elles détectent les espèces naturellement présentes dans l'environnement (APHA et coll., 2012).
Les entérocoques sont présents naturellement dans les intestins des humains et d'une gamme d'animaux, dont les mammifères, les oiseaux, les reptiles et les insectes. Leur concentration dans les selles humaines et animales se situe généralement autour de 103 à 107 cellules par gramme (Ashbolt et coll., 2001; Leclerc et coll., 2001; Ervin et coll., 2013). La quantité présente dans les selles des espèces animales peut varier considérablement et, au cours de certaines études, des quantités plus importantes d'entérocoques ont été détectées dans les selles des animaux de ferme et des animaux domestiques que dans les selles humaines (Ervin et coll., 2013; Masters et coll., 2015). Habituellement, le nombre d'entérocoques dans les selles humaines et animales est plus petit que le nombre d'E. coli par un à plusieurs ordres de grandeur (sur une échelle logarithmique de base 10) (Donnison, 1992; Cabral, 2010; Ervin et coll., 2013, Boehm et Sassoubre, 2014).
E. faecalis et E. faecium sont les espèces prédominantes dans les matières fécales et les égouts. Parmi les autres espèces communément isolées dans les matières fécales, mais en moins grand nombre, figurent E. durans, E. hirae, E. gallinarum et E. avium (Poucher et coll., 1991; Moore et coll., 2008; Staley et coll., 2014).
Des entérocoques ont aussi été détectés dans des milieux environnementaux divers (Byappanahalli et coll., 2012a; Staley, 2014) : des plantes, des fleurs, des légumes, des céréales et des graminées (Mundt et coll., 1962; Müller et coll., 2001; Ott et coll., 2001; Sánchez Valenzuela et coll., 2012); du sable provenant de milieux marins ou d'eau douce, de la terre et des sédiments (Obiri-Danso et Jones, 2000; Ran et coll., 2013); ainsi que des tapis d'algues vertes du genre Cladophora, des algues de mer en décomposition et des plantes aquatiques submergées (Anderson et coll., 1997; Whitman et coll., 2003; Badgley et coll., 2010; Byappanahalli et coll., 2012a). À ce jour, certains membres du genre Enterococcus ont été détectés principalement dans des milieux environnementaux. Par exemple, E. camelliae, E. casseliflavus, E. mundtii et E. sulfureus sont tous observés chez les végétaux (Collins et coll., 1986; Moore et coll., 2008; Byappanahalli et coll., 2012a).
Toutefois, certaines espèces principalement détectées dans des milieux environnementaux ont aussi été isolées dans des selles animales ou humaines (Splichalova et coll., 2015; Medeiros et coll., 2017; Beukers et coll., 2017). De plus, les principales espèces fécales ont été détectées à de multiples reprises dans des échantillons environnementaux malgré l'absence de sources apparentes de contamination fécale (Müller et coll., 2001; Sánchez Valenzuela et coll., 2012; Byappanahalli et coll., 2012a).
Un nombre toujours grandissant de données indique que, dans les milieux qui leur sont favorables hors du tube digestif, certaines souches de bactéries indicatrices de contamination fécale pourraient avoir la capacité de croître, de se multiplier et, finalement, de s'adapter à leur milieu jusqu'à se naturaliser (Ferguson et Signoretto, 2011; Ran et coll., 2013). Une population naturalisée est une population qui a évolué au point de pouvoir exister dans l'environnement indépendamment des sources de contamination fécale. Au cours des années, les recherches ont indiqué que l'existence de milieux environnementaux servant de sources possibles de bactéries indicatrices constitue un problème associé à tous les groupes généralement considérés comme des indicateurs de contamination fécale qui sont utilisés pour l'évaluation de la qualité de l'eau potable (les coliformes totaux, les coliformes thermotolérants, E. coli, les entérocoques [Whitman et coll., 2003; Byappanahalli et coll., 2012a]). Cette découverte complique l'interprétation des données lorsque ces organismes sont détectés, car il n'est plus possible de supposer qu'un groupe particulier de bactéries est associé exclusivement aux déchets fécaux. Par contre, ces groupes demeurent de précieux indicateurs d'une vulnérabilité possible aux contaminants fécaux et de l'efficacité des barrières mises en place pour garantir la qualité de l'eau potable.
Seules quelques études ont porté sur la caractérisation des espèces d'entérocoques décelées dans les systèmes municipaux d'approvisionnement en eau potable et en eaux souterrainesLes rapports disponibles ont systématiquement indiqué que les espèces fécales E. faecalis et E. faecium sont les deux espèces le plus souvent détectées dans ces sources (Sinton et Donnison, 1994; Celico et coll., 2004; Grammenou et coll., 2006; Jackson et coll., 2012; Peter et coll., 2012). D'autres espèces d'entérocoques, y compris celles considérées comme provenant soit de matières fécales, soit de l'environnement, ont été détectées dans ces milieux, mais moins fréquemment (Sinton et Donnison, 1994; Jackson et coll., 2012). Les données recueillies à la suite d'études sur les eaux souterraines et les eaux de surface indiquent que d'autres espèces d'entérocoques peuvent parfois être observées aussi fréquemment ou plus fréquemment qu'E. faecium ou E. faecalis (Moore et coll., 2008; Suzuki et coll., 2012; Furtula et coll., 2013). Moore et coll. (2008) ont observé qu'E. casseliflavus, espèce étroitement associée aux milieux environnementaux, prédominait dans les eaux de ruissellement urbaines, et qu'E. faecalis et E. hirae dominaient dans les échantillons d'eaux usées. Les méthodes de culture classiques ne sont pas vraiment conçues pour identifier les entérocoques provenant de sources différentes (Byappanahalli et coll., 2012a).
Les entérocoques peuvent survivre dans l'eau pendant quelques heures à quelques semaines. Dans un milieu favorable (p. ex. de la terre, du sable, des masses de matières provenant de végétaux aquatiques) qui leur procure des nutriments et une protection contre les stress environnementaux, leur espérance de vie peut s'allonger jusqu'à atteindre des mois (Davies et coll., 1995; Pote et coll., 2009). Par exemple, des entérocoques ont survécu plus de 6 mois dans des tapis d'algues séchées au soleil qui ont été ultérieurement conservés à une température de 4 °C (Whitman et coll., 2003).
Les entérocoques ont toujours été considérés comme plus résistants aux stress environnementaux, tels que de hauts taux de salinité ou la dessiccation, que les bactéries indicatrices de contamination fécale généralement utilisées, soit E. coli et les coliformes thermorésistants (WHO, 1997, 2004). Certains ont avancé l'idée que leur résistance accrue pourrait s'expliquer en partie par leur paroi cellulaire Gram positif plus épaisse que celle des autres bactéries indicatrices courantes (Byappanahalli et coll., 2012a). Un certain nombre d'études ont révélé que les entérocoques étaient capables de survivre plus longtemps qu'E. coli dans les eaux marines (Lessard et Sieburth, 1983; Sinton et coll., 1994; Bordalo et coll., 2002; Fujioka et Yoneyama, 2002; Sinton et coll., 2002). En eau douce, les taux de survie différaient (Sinton et coll., 2002; Anderson et coll., 2005; Deller et coll., 2006; Fisher et coll., 2012). L'examen des études sur les eaux souterraines a révélé que la vitesse d'inactivation des entérocoques était généralement plus lente que celles d'E. coli ou des coliformes fécaux et qu'elle était similaire à celle des autres coliformes (John et Rose, 2005). Dans certaines études, les entérocoques toléraient mieux la dessiccation qu'E. coli (Byappanahalli et Fujioka, 2004; Mika et coll., 2009), ce qui explique probablement leur abondance et leur omniprésence dans certains sols tropicaux (Byappanahalli et coll., 2012b).
Lorsqu'ils sont soumis aux stress causés par un milieu aquatique, les entérocoques peuvent passer à l'état de cellules viables mais non cultivables, dans lequel ils ne croissent pas sur les milieux de culture, mais demeurent vivants et peuvent revenir à leur état initial lorsque les conditions leur sont favorables (Boehm et Sassoubre, 2014; Ramsey et coll., 2014). L'état de cellule viable mais non cultivable est une stratégie de survie primaire des bactéries qui a été observé chez bien des espèces, dont celles utilisées pour vérifier la qualité de l'eau potable (Ramsey et coll., 2014). Dans l'ensemble, on peut considérer que l'espérance de vie des entérocoques est du même ordre que celle de la plupart des bactéries pathogènes d'origine hydrique. Par contre, on s'accorde pour dire que les entérocoques ne survivent pas aussi longtemps dans l'environnement que les virus et les protozoaires pathogènes d'origine hydrique (Sinton et coll., 2002; Medema et coll., 2003).
B.1.2 Exposition
Les concentrations d'entérocoques dans les eaux des rivières et des lacs tempérés se situent généralement sous les 103 unités formatrices de colonies (UFC) par 100 ml d'eau (Jenkins et coll., 2005; Ran et coll., 2013). Par contre, ces taux peuvent s'accroître en réponse à une chute de pluie, des échantillons d'eau de surface ayant affiché des taux de 104 à 105 CFU par 100 ml d'eau (Haack et coll., 2003; Wilkes et coll., 2009; Nnane et coll., 2011). Des valeurs dépassant 102 UFC par 100 ml d'eau ont été obtenues dans des échantillons de sources d'eaux souterraines contaminées (Atherholt et coll., 2003; Schneeburger et coll., 2014). De plus, des valeurs de 104 par gramme de poids sec ont été observées dans des sédiments de plage, tels que des algues (Whitman et coll., 2003).
Il est nécessaire d'obtenir plus de données sur la détection des entérocoques dans l'eau traitée et dans les réseaux de distribution des systèmes municipaux d'approvisionnement en eau canadiens. Dans l'Union européenne (UE), d'après les rapports des États membres concernant les systèmes d'approvisionnement en eau potable à grande échelle, même si la plupart des États avaient mentionné qu'ils étaient conformes à 99 % aux paramètres microbiologiques de la directive du Conseil relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine de l'UE, de nombreuses zones d'approvisionnement en eau ont déclaré au moins un cas où les résultats des échantillonnages n'étaient pas conformes aux exigences relatives à E. coli et aux entérocoques (KWR, 2012; Commission européenne, 2015). Les cas de non-conformité relatifs aux entérocoques détectés dans des zones d'approvisionnement étaient assez nombreux et se distinguaient suffisamment de ceux relatifs à E. coli pour permettre de conclure que, sans la surveillance des entérocoques, il aurait été possible de ne pas détecter de potentiels problèmes de qualité de l'eau.
Dans la littérature, des études sur des réseaux municipaux de distribution d'eau potable mentionnent la présence d'entérocoques en l'absence d'E. coli dans des échantillons. D'autres signalent une détection plus fréquente d'entérocoques dans les échantillons prélevés dans les culs-de-sac ou dans les sections où la concentration de chlore résiduel dépassait 0,1 mg/L (Mendez et coll., 2004; Batté et coll., 2006). Ces résultats confirment la pertinence de l'utilisation des entérocoques comme indicateurs de problèmes de qualité de l'eau. La contamination postérieure au traitement (p. ex. causée par des jonctions fautives, des siphonnements à rebours, des pertes de pression, la contamination des réservoirs de stockage) et la contamination des conduites principales lors de réparations sont reconnues comme des causes de contamination des réseaux de distribution qui peut entraîner des maladies (Organisation mondiale de la Santé [OMS], 1970, 1997, 2011).
La présence et la survie des entérocoques dans les biofilms des réseaux de distribution ont aussi été évaluées. Les entérocoques étaient rarement détectés dans les biofilms des réseaux municipaux à grande échelle, et leur nombre était faible lorsqu'ils étaient présents. (Lee et Kim, 2003; Batté et coll., 2006; Långmark et coll., 2007). Bien que des entérocoques soient parfois isolés dans les biofilms des réseaux de distribution, ils ne semblent pas être une composante importante de la matrice des biofilms.
Il existe des données concernant la détection des entérocoques (et d'autres indicateurs de contamination fécale) dans l'eau potable au point où celle-ci est consommée. Au Royaume-Uni, des échantillons d'eau servant à évaluer la conformité réglementaire sont prélevés directement des robinets des consommateurs. Selon les données provenant des autorités compétentes en matière de qualité de l'eau potable du Royaume-Uni et de l'Irlande obtenues au cours des années 2010 à 2014, dans le cas des systèmes d'approvisionnement en eau potable desservant un large public, très peu des échantillons prélevés étaient non conformes à la norme réglementaire qui exige l'absence totale d'entérocoques (DWI, 2016; DWQR, 2016a, 2016b; EPA, 2016a, 2016b; Northern Ireland Water, 2016). Parmi les échantillons prélevés dans différentes municipalités pendant ces années, le nombre d'échantillons non conformes calculé selon le pays sur une période d'une année se situait entre 0 et 11. Les données ont aussi révélé que, même si le nombre d'échantillons recueillis pour la détection des entérocoques était généralement plus petit que ceux prélevés pour la détection d'E. coli, les entérocoques étaient parfois détectés à une fréquence relative plus élevée (DWI, 2016; DWQR, 2016a, 2016b; EPA, 2016a, 2016b; Northern Ireland Water, 2016). Ces cas mettent en évidence les données additionnelles relatives à la qualité de l'eau qui pourraient être obtenues si la surveillance des entérocoques était appliquée.
Des données additionnelles concernant la détection des entérocoques dans les petits systèmes d'approvisionnement en eau potable canadiens sont aussi nécessaires. En effet, les petits systèmes d'approvisionnement sont plus vulnérables aux éclosions de maladies d'origine hydrique que les systèmes municipaux de plus grande envergure (NRC, 1997; Schuster et coll., 2005; NCCPH, 2011: Murphy et coll., 2016). Un programme québécois de surveillance des eaux souterraines a recueilli des données sur les tests de détection des indicateurs de contamination fécale dans les puits d'eaux souterraines non désinfectés (Ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, 2016). Les résultats d'analyse des échantillons prélevés entre 2010 et 2014 dans 223 sources d'eaux souterraines destinées à la consommation qui n'étaient pas désinfectées ont révélé que le pourcentage global de tests positifs pour les entérocoques était pratiquement le même que pour E. coli (2,38 % c. 2,36 %, respectivement).
L'examen des rapports concernant la qualité de l'eau potable préparés par les États membres de l'UE et par les autorités compétentes en matière d'eau potable de l'Angleterre et de l'Irlande a révélé que la non-conformité relativement aux entérocoques était plus fréquente dans le cas des petits systèmes d'approvisionnement que dans celui des plus grands systèmes (KWR, 2012; Commission européenne, 2015; DWI, 2016; EPA, 2016a, 2016b).
Il ressort d'études sur les eaux souterraines que les entérocoques sont plus persistants que les coliformes fécaux et qu'E. coli, tous deux des indicateurs fécaux, dans les aquifères contaminés (Sinton et Donnison, 1994; Roser et coll., 2005; Naclerio et coll., 2008; Schneeberger et coll., 2014). Lors d'une étude portant sur les effets de deux systèmes septiques sur la qualité des aquifères souterrains environnants, Schneeberger et coll. (2014) ont observé que les concentrations d'entérocoques décroissaient plus graduellement que celles d'E. coli à mesure qu'ils s'éloignaient de la source de contamination. Ils ont aussi détecté un plus grand nombre d'entérocoques que d'E. coli dans les échantillons d'eaux souterraines prélevés à des distances de 15 m à 30 m et de 30 m à 40 m du champ d'épuration. Grâce à leur grande capacité de survie, les entérocoques peuvent vivre plus longtemps et être transportés plus loin qu'E. coli dans certains milieux aquatiques, dont les sources d'eaux souterraines.
Dans une étude québécoise portant sur la détection des indicateurs bactériologiques dans des puits municipaux d'eaux souterraines, il y avait corrélation entre les coliformes totaux et la contamination par E. coli et les entérocoques (Payment et Locas, 2005). Les données sur les puits qui ont été classés parmi ceux dont la qualité de l'eau était jugée mauvaise ou moyenne indiquaient que les échantillons dans lesquels des entérocoques avaient été détectés contenaient aussi des coliformes totaux et que ces derniers s'y trouvaient en plus grand nombre. Des résultats similaires ont été obtenus à la suite d'une étude sur des sources d'eaux souterraines dont la contamination fécale était connue (Atherholt et coll., 2003). Lors d'une autre étude effectuée au Québec concernant les effets sur la qualité de l'eau des pratiques d'épandage du fumier dans les bassins versants, des entérocoques et E. coli ont été détectés dans 5,8 % et 1,5 %, respectivement, des échantillons d'eaux souterraines (n = 1 260) (Gouvernement du Québec, 2004). La fréquence de détection de ces deux indicateurs dans les échantillons d'eaux souterraines des bassins versants dans lesquels du fumier avait été épandu n'était pas significativement différente de la fréquence observée dans les sources d'eaux des zones témoins où aucun fumier n'avait été épandu.
Lors d'un examen de systèmes ruraux d'approvisionnement en eau potable de l'Alabama, Wedgworth et coll. (2015) ont observé que le nombre d'échantillons positifs pour les entérocoques était significativement plus grand que le nombre d'échantillons positifs pour E. coli, et ce, à tous les endroits échantillonnés (dans les puits, après traitement, après stockage, dans les conduites et à leur extrémité). La présence de coliformes totaux était corrélée avec la présence d'entérocoques partout où les échantillonnages ont été réalisés. Dans les sources d'eaux souterraines ayant des niveaux faibles ou irréguliers de contamination, les coliformes totaux, les entérocoques et E. coli ont chacun pu être détectés en l'absence des autres indicateurs (Atherholt et coll., 2003; Locas et coll., 2007, 2008).
Dans le cadre de nombreuses études, les liens entre la présence de bactéries indicatrices et la détection de bactéries, de virus ou de protozoaires particuliers d'origine fécale dans les sources d'eaux de surface ont été évalués. Des recherches individuelles ont révélé une corrélation entre la présence d'entérocoques ou d'E. coli (ou d'autres indicateurs) et la détection d'un agent pathogène donné, mais la relation était généralement faible (Brookes et coll., 2005, Wilkes S, 2009). Les études effectuées sur les sources d'eaux souterraines sont moins nombreuses, et les corrélations qui ont été établies sont considérées tout au plus comme faibles (Borchardt et coll., 2003; Locas et coll., 2007, 2008; Pitkänen et coll., 2011; Hynds et coll., 2014). Les chercheurs qui étudient la qualité microbiologique des puits municipaux d'eau potable canadiens ont observé que les coliformes totaux et, dans une moindre mesure, E. coli étaient de meilleurs indicateurs que les entérocoques pour prédire la présence de virus entériques humains (Locas et coll., 2007, 2008). Cependant, lors d'examens du corpus de données sur ce sujet, les chercheurs ont conclu que la probabilité d'une corrélation avec la présence d'agents pathogènes fécaux n'était plus grande ni avec les entérocoques ni avec E. coli (Payment et Locas, 2011; Wu et coll., 2011).
Des corrélations directes entre la concentration d'un indicateur et le type ou la concentration d'un agent pathogène donné ne devraient pas être attendues. Les indicateurs et les agents pathogènes présents dans un bassin versant peuvent provenir d'une multitude de sources, et, lorsqu'ils sont libérés dans l'eau, leur dilution, leur taux d'inactivation et la distance qu'ils parcourent peuvent être différents (Wilkes et coll., 2009; Payment et Locas, 2011). Malgré l'absence de corrélation directe avec des agents pathogènes particuliers, la présence d'entérocoques dans les sources d'eaux souterraines ou de surface indique généralement une contamination par des matières fécales et donc un possible risque pour la santé, et ce, qu'un agent pathogène particulier ait été détecté ou non (Wu et coll., 2011).
Le gène codant pour la protéine de surface des entérocoques (esp) chez Enterococcus faecalis et E. faecium a été examiné en vue de son utilisation possible comme marqueur de pollution par des égouts dans les eaux utilisées à des fins récréatives (Byappanahalli et coll., 2008; Harwood et coll., 2014). Toutefois, la détection de ce gène dans des excréments d'origine animale et dans des échantillons environnementaux a eu pour effet de refroidir l'intérêt envers des études plus poussées de ce marqueur à titre d'outil bactérien fiable pour déceler les résidus fécaux humains (Byappanahalli et coll., 2008; Harwood et coll., 2014).
B.2 Effets sur la santé
Bien que les entérocoques fassent partie de la flore fécale naturelle, certains d'entre eux ont été mis en cause dans des infections opportunistes. Des infections à entérocoques ont été contractées à l'extérieur des intestins dans les conditions suivantes : le système immunitaire du patient était affaibli, le patient présentait des lésions tissulaires, ou la flore normale avait été perturbée par la prise d'antibiotiques sur ordonnance (Tendolkar et coll., 2003). La consommation d'eau traitée ne s'est jamais révélée être une voie d'exposition pouvant causer des infections.
B.2.1 Évaluation des risques
Une évaluation des risques pour la santé associés aux entérocoques n'est pas considérée comme appropriée puisque ces bactéries ne sont utilisées que comme des organismes indicateurs. Des évaluations des risques ont été effectuées pour certains microorganismes ayant des effets sur la santé, par exemple, les virus entériques et les protozoaires entériques des genres Cryptosporidium et Giardia (Santé Canada, 2011, 2012a).
Bien que la présence d'entérocoques ne soit pas nécessairement associée à la présence d'agents pathogènes particuliers, les études portant sur les eaux utilisées à des fins récréatives ont révélé des liens entre des affections gastro-intestinales, des affections respiratoires fébriles aiguës et les concentrations en entérocoques (Kay et coll., 1994; Fleisher et coll., 1996; Wade et coll., 2006, 2010; Heaney et coll., 2012, 2014). De plus, dans certaines études portant sur l'incidence d'affections gastro-intestinales et la présence d'indicateurs dans de petites sources d'eau potable, les données concernant la présence des entérocoques se rapprochent plus des modèles de régression statistique que celles concernant E. coli (Borchardt et coll., 2003; Risebro et coll., 2012).
L'adoption d'une approche fondée sur les risques, telle qu'une approche à barrières multiples ou un plan de salubrité de l'eau, est essentielle pour la gestion efficace des systèmes d'approvisionnement en eau potable (CCME, 2004; OMS, 2011; Santé Canada, 2013; Government of Alberta, 2015). Les recommandations actuelles concernant la qualité de l'eau potable privilégient l'adoption d'une approche à barrières multiples pour la production d'une eau potable propre, salubre et fiable. Il s'agit d'une approche qui comprend la protection de la source d'approvisionnement en eau, l'utilisation d'un traitement approprié et toujours efficace, le bon entretien des réseaux de distribution, du personnel qualifié, la vérification régulière de la qualité de l'eau potable, la transmission de l'information et la sensibilisation de la population.
E. coli et les coliformes totaux sont des indicateurs bactériens utilisés pour vérifier la salubrité de l'eau et les changements dans la qualité de l'eau, respectivement. La surveillance de ces indicateurs est l'une des mesures utilisées pour déterminer la vulnérabilité des eaux souterraines et la qualité des eaux de surface et pour vérifier si l'eau a été traitée adéquatement et distribuée de façon sécuritaire. Les entérocoques sont des indicateurs bactériens de contamination fécale qui peuvent être aussi employés dans le cadre d'une approche à barrières multiples afin de vérifier que la qualité microbiologique de l'eau produite par le système d'approvisionnement en eau potable est acceptable.
Les résultats obtenus lors de la surveillance des entérocoques conjugués à la surveillance des autres indicateurs microbiologiques (E. coli, coliformes totaux), à l'analyse de la turbidité et à l'analyse des résidus de désinfectants dans le cadre d'un plan de gestion des risques peuvent être utilisés aux fins suivantes :
- évaluer la qualité microbiologique de la source d'eau, l'impact des matières fécales, les sources possibles de contamination et les changements dans la qualité de l'eau;
- évaluer l'efficacité du traitement de l'eau, la qualité microbiologique de l'eau dans le réseau de distribution et la distribution d'une eau saine aux consommateurs.
Les tests de détection des entérocoques peuvent aussi être utilisés à des fins d'enquête dans le but de mieux comprendre les systèmes d'approvisionnement en eau. La présence de tout entérocoque dans l'eau venant de sortir d'une usine de traitement ou dans toute eau venant de subir un traitement signifie que le traitement est inadéquat. Dans les puits non désinfectés, la présence d'entérocoques indique l'existence d'une contamination fécale récente ou d'une possible voie d'accès pour les contaminants fécaux. La présence d'entérocoques dans un réseau de distribution ou de stockage de l'eau après que l'eau venant de sortir d'une usine de traitement a été déclarée exempte d'entérocoques signifie qu'une contamination postérieure au traitement s'est produite.
B.3 Méthodes analytiques
La plupart des méthodes de numération des entérocoques qui emploient des milieux de culture sont fondées sur la détection de l'activité de l'enzyme β-glucosidase (esculinase) présente chez la grande majorité des espèces et des souches d'entérocoques. Les méthodes reposent aussi sur les caractéristiques biochimiques propres au genre Enterococcus et utilisent des additifs ajoutés aux milieux de culture ainsi que des températures d'incubation qui inhibent la croissance de la microflore de fond et permettent de distinguer les entérocoques des autres bactéries Gram positif.
Des milieux de culture ont été conçus afin de détecter les entérocoques dans des échantillons d'eau, mais sans les identifier à l'espèce (Leclerc et coll., 1996; APHA et coll., 2012). Bien que certaines espèces soient d'origine environnementale et aient été isolées en l'absence de contamination fécale, la présence de tout entérocoque dans un système d'approvisionnement en eau plaide en faveur de l'existence d'une voie d'accès pour les contaminants fécaux. Plusieurs types de tests peuvent être utilisés; toutefois, il faut savoir que la sensibilité de détection et de quantification varie en fonction du test choisi. Il est important d'employer des méthodes validées et normalisées pour que les décisions de santé publique soient prises correctement et sans délai (Leclerc et coll., 1996). Des étapes additionnelles de confirmation et de validation peuvent être requises, ce qui prolongera le temps nécessaire pour terminer les analyses (APHA et coll., 2012).
B.3.1 Méthodes par culture
Le livre Standard Methods for the Examination of Water and Wastewater dresse la liste des méthodes de numération des entérocoques qui font appel à la méthode de filtration sur membrane (FM), à la technique de fermentation en tubes multiples (FTM) et au test avec substrat fluorogène (APHA et coll., 2012). La filtration sur membrane est actuellement considérée comme la méthode de référence pour l'évaluation de la qualité de l'eau relativement aux entérocoques (Byappanahalli et coll., 2012a). La technique de FTM est recommandée lorsque la turbidité de l'eau est élevée (APHA et coll., 2012). Des préparations de substrat fluorogène sont offertes sur le marché pour être utilisées lors des tests de FTM, des tests de présence-absence ou des tests multi-puits (APHA et coll., 2012). La méthode ISO 7899-2 est celle qui est recommandée pour la détection des entérocoques dans la directive du Conseil de l'UE (toutefois, les États membres peuvent utiliser des méthodes de rechange équivalentes) (UE, 1998; ISO, 2000). Une liste de méthodes normalisées publiées est présentée au tableau 1.
Organisation et méthode | Milieu | Principe de détection | Critères de détection des entérocoques | Temps requis pour obtenir les résultats | ||
---|---|---|---|---|---|---|
Fermentation en tubes multiples (FTM) | ||||||
Méthode 9230 B |
Bouillon dextrose azide et gélose esculine azide (méthode en deux étapes) | β-glucosidase | Bouillon trouble produisant des colonies noires à halo brun-noir | 48 h | ||
Filtration sur membrane (FM) | ||||||
Méthode 9230 C |
mE-EIAFootnote * (méthode en deux étapes) | β-glucosidase | Colonies roses à rouges à halo brun-noir | 48 h | ||
mEIFootnote ** (méthode en une étape) | β-glucosidase | Colonies ≥ 0,5 mm à halo bleu | 24 h | |||
m-Enterococcus (méthode en une étape) | Métabolisation du colorant TTC contenu dans le substrat | Colonies rouge vif ou foncé | 48 h | |||
ISO 7899-2 | mE-EIA (méthode en deux étapes) | β-glucosidase | Colonies roses à rouges à halo brun-noir | 48 h | ||
Test avec substrat fluorogène (FTM, multi-puits, présence-absence) | ||||||
Méthode 9230 D |
Substrat fluorogène commercial (méthode en une étape) | β-glucosidase | Fluorescence sous la lumière UV (366 nm) | 24 h |
- Footnote 1
-
mE-EIA : gélose mE-gélose esculine fer.
- Footnote 2
-
mEI : gélose indoxyl-β-D-glucoside
Des études qui comparent le test avec substrat fluorogène commercial et différentes méthodes de FM ont été effectuées dans diverses matrices d'eau (eaux de baignade douces ou marines, eaux de surface, eau potable traitée). Des coefficients de corrélation situés entre 0,68 et 0,93 ont été calculés (Fricker et Fricker, 1996; Abbot et coll., 1998; Eckner, 1998; Kinzelman et coll., 2003). Lors de certaines études, le test commercial affichait une sensibilité égale ou supérieure aux méthodes de FM (Fricker et Fricker, 1996; Eckner, 1998; Kinzelman et coll., 2003), alors que, dans d'autres études, les méthodes de FM se sont révélées plus sensibles (Adcock et Saint, 2001; Heiber et coll., 1998; Maheux et coll., 2009).
Dans le cadre d'une étude, la capacité de trois méthodes d'analyse commerciales, reposant sur la β-glucosidase, à détecter 110 souches différentes d'entérocoques provenant de sources diverses a été comparée (Maheux et coll., 2009). Une méthode d'analyse commerciale utilisant un substrat fluorogène et deux méthodes de FM ont affiché des rendements de détection de 68,3 %, 83,2 % et 88,1 %, respectivement. En ce qui concerne la détection des souches des principales espèces fécales, E. faecalis et E. faecium, le rendement de détection des trois méthodes se situait près de 90 % ou plus (Maheux et coll., 2009). Dans une analyse comparative de ces trois mêmes méthodes utilisées pour la détection des entérocoques dans des échantillons d'eau de puits prélevés dans la région de la ville de Québec, les taux de détection signalés étaient de 3,0 %, 5,5 % et 11,5 %, respectivement (Maheux et coll., 2012).
B.3.2 Méthodes moléculaires
Des méthodes moléculaires de détection des entérocoques dans les eaux naturelles ont été élaborées par la United States Environmental Protection Agency (U.S. EPA), mais elles ne sont pas approuvées actuellement. La U.S. EPA (2015a, 2015b) a validé deux méthodes d'amplification en chaîne par la polymérase quantitative (PCRq) pour la détection de l'ADN des entérocoques dans les eaux naturelles : la méthode 1609.1 et la méthode 1611.1.
Des méthodes moléculaires sont en cours d'élaboration pour l'analyse de l'eau potable, mais elles non pas été approuvées pour la surveillance de la conformité de l'eau potable. Le plus grand défi associé à l'analyse de l'eau potable est la valeur limite plus stricte indiquant la présence de microorganismes indicateurs, et, par conséquent, le besoin d'une méthode sensible à de très faibles concentrations. Plus de recherches dans ce domaine sont nécessaires afin de mettre au point des méthodes normalisées abordables qui produiront des résultats exacts et fiables. Une méthode moléculaire de détection des entérocoques a été élaborée par Maheux et coll. (2011). Cette méthode combine la concentration et la récupération des particules microbiennes, l'amplification du génome entier et la détection par PCRq des gènes cibles codant pour l'ARN ribosomal. Les auteurs ont signalé avoir détecté aussi peu que 4,5 cellules d'entérocoques par 100 ml d'eau en moins de 5 heures à l'aide de cette méthode et ils ont ajouté qu'en théorie celle-ci devrait permettre de détecté 1 UFC d'entérocoques par 100 ml d'eau. Une autre méthode moléculaire a été décrite par Pitkänen et coll. (2013). Dans cette méthode, l'ARN ribosomal est utilisé comme cible pour la PCRq, plutôt que le gène codant pour l'ARN ribosomal. Une validation supplémentaire est nécessaire, mais les résultats de l'étude laissent entrevoir les avantages suivants : comparativement aux épreuves de PCRq basées sur l'ADN, la méthode proposée par Pitkänen et coll. (2013) présente une sensibilité accrue et détecte des entérocoques viables.
Les méthodes de PCR actuelles qui ciblent le gène de l'ARN ribosomal permettent de détecter les bactéries du genre Enterococcus, mais non pas de distinguer les espèces l'une de l'autre (Ryu et coll., 2013). Park et coll. (2016) ont décrit une méthode dans laquelle ils utilisent des amorces spécifiques de multiples espèces qui permet d'identifier plusieurs espèces d'entérocoques.
Pour toutes ces méthodes, plus d'études sont nécessaires pour confirmer les résultats obtenus et pour s'assurer qu'elles conviennent à l'évaluation de la qualité de l'eau.
B.3.3 Échantillonnage aux fins de détection des entérocoques
La procédure appropriée de prélèvement des échantillons doit être respectée pour veiller à ce que ceux-ci soient représentatifs de l'eau analysée. Des instructions détaillées concernant l'échantillonnage de l'eau à des fins d'analyse bactériologique sont contenues dans les Standard Methods for the Examination of Water and Wastewater (APHA et coll., 2012). Idéalement, le délai entre le prélèvement des échantillons et le début des analyses ne devrait pas dépasser 24 heures (Bartram et Rees, 2000), et un délai de 8 heures entre le prélèvement et l'analyse est considéré comme optimal (Bartram et Rees, 2000; APHA et coll., 2012). Dans le cas des échantillons prélevés dans un endroit éloigné, un délai de 48 heures peut être acceptable, par contre, il convient alors de discuter avec les autorités compétentes des répercussions de cet allongement du délai avant l'analyse. Si des retards sont prévus, des analyses effectuées sur place (p. ex. à l'aide de méthodes d'analyse commerciales) peuvent être envisagées. Les personnes concernées devraient consulter préalablement les autorités compétentes afin de s'assurer que cette pratique est acceptable. Un volume minimal de 100 ml d'eau devrait être analysé afin d'obtenir une estimation fiable du nombre de microorganismes présents (par FTM, FM ou présence-absence) et de s'assurer que le nombre correspond aux faibles concentrations attendues dans l'eau potable traitée. L'analyse de plus grands volumes, dans le cas des eaux souterraines présentant de très faibles niveaux de contamination par exemple, peut accroître la sensibilité et la fiabilité des tests. Dans le cas des eaux de piètre qualité, l'analyse de plus petits volumes d'eau, la dilution des échantillons ou d'autres combinaisons de tests de FTM peuvent être plus appropriées.
Lorsque les exigences en matière de fréquence d'échantillonnage des systèmes municipaux d'approvisionnement en eau doivent être fixées, il est impossible d'appliquer une formule d'échantillonnage universelle, car certains des facteurs qui influencent le choix, tels que la qualité de la source d'eau, la pertinence et la capacité du traitement, ainsi que la taille et la complexité du réseau de distribution de l'eau, sont fondamentalement différents (OMS, 1971, 1976, 2004). Par conséquent, la fréquence d'échantillonnage et les endroits où celui-ci aura lieu doivent être déterminés par les autorités responsables à la suite de l'évaluation des conditions locales, p. ex. les variations de la qualité de l'eau brute et l'historique de la qualité de l'eau traitée. De plus, il faut que la fréquence d'échantillonnage soit conforme à toutes les exigences réglementaires applicagbles.
La quantité d'échantillons à prélever pour la détection des entérocoques peut aussi varier selon l'objectif escompté de la stratégie de surveillance. Si l'objectif est d'effectuer des tests courants de détection d'indicateurs fécaux afin de déterminer l'efficacité du traitement de l'eau potable dans le réseau de distribution et la présence de microorganismes dans celui-ci, il est recommandé de réaliser l'échantillonnage à une fréquence similaire à celle employée pour la détection d'autres indicateurs microbiologiques, tels qu'E. coli et les coliformes totaux. Les documents techniques sur E. coli et les coliformes totaux (Santé Canada, 2012b, 2012c) renferment plus de détails sur le rôle d'E. coli et des coliformes totaux dans la gestion de la qualité de l'eau potable.
Si l'objectif est d'effectuer des inspections périodiques du système d'approvisionnement, les échantillonnages aux fins de détection des entérocoques peuvent être réalisés moins fréquemment. Par exemple, la directive du Conseil relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine de l'UE définit les exigences relatives à la fréquence d'échantillonnage minimale pour la détection des entérocoques lorsque celui-ci est effectué dans le cadre de la vérification périodique de la conformité d'un système d'approvisionnement. Les fréquences minimales d'échantillonnage sont déterminées selon le volume d'eau distribuée ou produite quotidiennement par le système, la quantité d'échantillons à prélever augmentant en fonction de la taille de la production. Les fréquences spécifiées varient entre 1 échantillonnage par année pour les systèmes produisant > 100 à ≤ 1 000 m3 d'eau par jour et > 10 échantillonnages par année pour ceux produisant > 100 000 m3 d'eau par jour (UE, 1998).
Plusieurs limites doivent être prises en compte lorsqu'on interprète les résultats des tests. Des études par simulation ont montré qu'il est très difficile de détecter une contamination dans un réseau de distribution, sauf si celle-ci se produit dans une conduite principale d'eau, dans un réservoir, à l'usine de traitement, ou encore si elle est importante et présente depuis longtemps (Speight et coll., 2004; van Lieverloo, 2007). De plus, pour la détection des indicateurs microbiologiques, le faible taux d'échantillons produisant des résultats positifs signifie qu'il peut être difficile de déceler des différences statistiquement significatives dans les taux positifs obtenus, par exemple, avant et après l'application d'une mesure corrective, à moins d'analyser un très grand nombre d'échantillons (Rosen et coll., 2009). Hargy et coll. (2010) ont démontré que l'utilisation d'échantillons de gros volume (20 L) au lieu d'échantillons de 100 ml était utile pour améliorer la détection des coliformes totaux. Les résultats semblent indiquer que le volume de l'échantillon (et non la qualité de l'eau) est un meilleur indicateur de la présence de coliformes totaux. Il existe peu d'études qui évaluent les stratégies efficaces de surveillance, et il faudra réaliser d'autres travaux statistiques et sur le terrain dans le cadre desquels différents paramètres (volume des échantillons, fréquence de la surveillance, méthodes de détection, vrais et faux positifs et négatifs, et coûts) seront pris en compte simultanément. Ces limites font ressortir l'importance de mettre en place une approche à barrières multiples ou un plan de salubrité de l'eau de la source au robinet dans le but de déterminer la qualité microbiologique de l'eau potable.
La pertinence de la surveillance des entérocoques dans le cadre d'une approche à barrières multiples dans un système d'approvisionnement en eau potable devrait être déterminée par l'autorité responsable. Dans le cas des petits systèmes, il peut être utile de recourir à d'autres lignes directrices. Les petits systèmes pourraient comporter plus de lacunes et posséder des ressources plus limitées en matière de surveillance que les grands. Il faut insister aussi sur les problèmes révélés par les évaluations de la source au robinet, dont les inspections sanitaires.
B.4 Technologies de traitement
Le principal objectif du traitement est de réduire le nombre de microorganismes pathogènes et les risques connexes pour les ramener à un niveau acceptable ou sécuritaire.
Peu de données ont été publiées sur l'efficacité des diverses techniques de traitement et de désinfection de l'eau potable servant à éliminer et à inactiver les entérocoques. Globalement, les méthodes d'élimination physique (dont la coagulation, la floculation, la sédimentation, la filtration rapide ou lente sur sable et la filtration directe avec ou sans aide) permettent d'obtenir une réduction de 1 à 4 log des bactéries indicatrices (E. coli, coliformes, entérocoques) (Payment et coll., 1985; Smeets et coll., 2006). Les techniques de filtration sur membrane permettent aussi d'obtenir une réduction de 4 log à plus de 6 log des bactéries (NSF, 2002; Smeets et coll., 2006). Les désinfectants couramment utilisés dans l'industrie de l'eau potable, tels que le chlore, la chloramine, le dioxyde de chlore, l'ozone et les rayons UV sont reconnus pour éliminer efficacement les entérocoques. Tous ces agents se sont révélés capables d'inactiver les entérocoques par plus de 4 log lors d'expériences en laboratoire.
Selon certaines études scientifiques, les entérocoques seraient plus résistants à l'inactivation par le chlore, la monochloramine et les rayons UV qu'E. coli, mais, vu la quantité limitée de données, il est difficile de tirer des conclusions solides (Chang et coll., 1985; Harris et coll., 1987; Rice et coll., 1993). Néanmoins, il est généralement admis que les réactions des entérocoques à la désinfection sont du même ordre de grandeur que celles d'E. coli (Hijnen et coll., 2011). Dans l'ensemble, les données montrent que les entérocoques sont beaucoup plus sensibles à la chloration que les protozoaires entériques appartenant aux genres Giardia et Cryptosporidium, et ils sont plus sensibles à l'inactivation par les rayons UV que certains virus entériques. Par conséquent, l'eau traitée conformément aux recommandations relatives aux virus et aux protozoaires entériques devrait être de qualité microbiologique acceptable et afficher des concentrations nulles d'entérocoque par 100 ml d'eau lorsque celle-ci sort de l'usine de traitement. De plus amples renseignements sur l'inactivation de certains protozoaires et virus pathogènes figurent dans les documents techniques sur les protozoaires et les virus entériques (Santé Canada, 2011, 2012a).
La présence d'un désinfectant résiduel est nécessaire dans un réseau de distribution pour prévenir une nouvelle croissance bactérienne et pour détecter les changements dans la qualité de l'eau. Il est important que la qualité de l'eau contenue dans un réseau de distribution soit surveillée régulièrement (p. ex. les indicateurs microbiens, les désinfectants résiduels, la turbidité, le pH) et que des programmes d'entretien et des activités (p. ex. le nettoyage des conduites principales, le contrôle des jonctions, le remplacement et la réparation) soient mis en place pour que l'eau soit acheminée jusqu'au consommateur en perdant le moins possible de sa qualité (Kirmeyer et coll., 2001, 2014).
Le traitement à l'échelle résidentielle s'applique aussi aux petits systèmes d'approvisionnement en eau potable. Les eaux de surface ne sont pas recommandées pour l'approvisionnement privé en eau, à moins qu'elles ne soient correctement filtrées et désinfectées, et que leur qualité soit surveillée. L'eau des puits peut aussi être contaminée et peut devoir être traitée. Il existe tout un éventail de moyens possibles pour traiter les eaux de source afin de produire de l'eau potable de grande qualité exempte d'agents pathogènes, dont des appareils de traitement utilisant le chlore, les rayons UV ou la filtration. Sans recommander une marque d'appareil de traitement à l'échelle résidentielle en particulier, Santé Canada recommande fortement aux consommateurs d'utiliser des appareils certifiés par un organisme de certification agréé indiquant qu'ils répondent aux normes NSF International (NSF)/American National Standards Institute (ANSI) visant les appareils de traitement de l'eau potable, une étiquette ou une marque faisant foi de la certification. Ces normes visent à protéger la qualité de l'eau potable en aidant à garantir l'innocuité des matériaux et l'efficacité des produits qui entrent en contact avec l'eau potable. Les dispositifs de traitement doivent être inspectés et entretenus selon le calendrier d'entretien et les recommandations du fabricant.
B.5 Contexte international
Les recommandations, normes et / ou directives relatives à la qualité de l'eau potable établies par des gouvernements étrangers ou des agences internationales peuvent varier en raison des connaissances scientifiques disponibles au moment de l'évaluation, ainsi que de l'utilisation de différentes politiques et approches.
Depuis 1980, les entérocoques (originalement appelés streptocoques fécaux) sont inclus dans la directive du Conseil relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine de l'UE comme paramètre microbiologique utilisé dans la surveillance de l'eau potable (UE, 1980). Cette directive décrit les exigences législatives pour tous les États membres (UE, 1980). Dans la directive, les entérocoques sont classés comme un paramètre de surveillance des vérifications : ils fournissent des renseignements permettant d'évaluer si les valeurs paramétriques sont respectées ou non. La présence des entérocoques est évaluée moins souvent que celle des paramètres de vérification (c.-à-d. la surveillance régulière). La concentration permise des entérocoques selon la directive est de 0 entérocoque par 100 ml d'eau (UE, 1998).
La quatrième édition des Directives pour qualité de l'eau de boisson de l'OMS (2011) contient des feuillets de renseignements portant sur bien des indicateurs microbiens, dont les entérocoques intestinaux. Le document indique que les bactéries appartenant au groupe des entérocoques intestinaux peuvent être employées comme un indice de pollution fécale récente et que leur détection devrait inciter les intervenants à prendre des mesures correctives. Aucune valeur n'est recommandée dans le document.
Les Australian Drinking Water Guidelines comportent aussi des feuillets de renseignements sur bien des indicateurs microbiens, y compris les entérocoques intestinaux, mais aucune valeur n'y est recommandée. Le document mentionne que ces bactéries peuvent être utilisées en pratique pour évaluer la qualité des sources d'eau, pour vérifier si le traitement est adéquat, pour relever la présence de sources de contamination post-traitement dans le réseau de distribution et pour garantir que l'eau potable distribuée aux consommateurs est saine (NHMRC, 2011).
La Ground Water Rule de la U.S. EPA (U.S. EPA, 2006) inclut les entérocoques dans la liste des trois indicateurs bactériens de contamination fécale spécifiés par les États, dont font aussi partie E. coli et les coliphages. En vertu de cette règle, lorsqu'un résultat positif est obtenu pour les coliformes totaux dans un réseau de distribution d'eaux souterraines non traitées, des échantillons doivent être prélevés dans chaque source d'eau et être soumis à un test de détection d'un des indicateurs spécifiés par l'État, ce qu'on appelle une surveillance déclenchée par un résultat positif. Si la présence d'un indicateur fécal est détectée dans le cadre de la surveillance, les responsables doivent en avertir les autorités de l'État concernées ainsi que le public, puis prendre des mesures correctives.
B.6 Lacunes en matière de recherche
Le grand nombre d'études importantes qui a été effectué a mené à une meilleure connaissance du genre Enterococcus et a permis d'évaluer l'utilité des entérocoques en tant qu'indicateurs de contamination fécale. Malgré cela, il existe de nombreuses lacunes qui doivent toujours être comblées.
La mise en place de programmes pilotes de surveillance et la réalisation d'études en laboratoire permettraient d'évaluer l'utilité des entérocoques en tant que microorganismes indicateurs, leur valeur comparative et les avantages à les ajouter aux programmes de surveillance fondés sur l'utilisation d'E. coli et des coliformes totaux. Toute évaluation des utilisations pratiques des entérocoques effectuée par les autorités réglementaires gagnerait à être menée en collaboration avec un partenaire de recherche universitaire qui pourrait offrir son expertise dans le cadre d'études concernant les traitements ciblés, les méthodes de numération et la caractérisation.
Les autorités réglementaires et les services publics pourraient vouloir évaluer le potentiel des entérocoques en tant que microorganismes indicateurs principaux à l'aide d'une étude comparative entre les entérocoques et les indicateurs existants (p. ex. les coliformes totaux et E. coli). Une étude pilote pourrait inclure une analyse réalisée sur la base d'échantillons fractionnés servant à détecter les indicateurs réglementaires (les coliformes totaux et E. coli), échantillons dont une moitié serait analysée par un laboratoire certifié. Ces échantillons devraient être prélevés au cours d'une année, pour observer les variations saisonnières, et dans diverses régions, pour assurer une diversité géographique. Des sources d'eaux brutes et traitées, de surface et souterraines, devraient être échantillonnées, et les échantillons devraient inclure des sources d'eau représentatives de qualité différente. Un nombre suffisant d'échantillons devrait être prélevé afin de permettre une interprétation statistique significative des données.
Même si plusieurs études ont permis d'obtenir de l'information sur les capacités de survie des entérocoques à différents traitements, il serait tout de même utile de mener des études ciblées servant à comparer les taux relatifs de survie d'E. coli et des entérocoques lorsque ceux-ci sont exposés à une gamme de techniques de traitement de l'eau potable, et ce, dans des eaux de qualité variée.
Le rendement des méthodes de culture recommandées pour les échantillons d'eau potable provenant d'eaux canadiennes de qualité variable devrait aussi être évalué. Par ailleurs, il serait utile de poursuivre la mise au point de méthodes moléculaires rapides et faciles pour détecter les entérocoques dans des eaux de qualité très variable.
Il serait important de mener des études dans d'autres domaines cruciaux afin de mieux comprendre le génome des entérocoques ainsi que ses aspects fonctionnels et taxonomiques; l'identité et la diversité des espèces d'entérocoques présentes dans diverses sources d'eau potable; la façon dont les entérocoques pourraient être utiles pour évaluer les risques microbiens; et dans quelle mesure les milieux non entériques peuvent servir de sources d'entérocoques.
Partie C. Références et acronymes
C.1 Références
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C.2 Liste des acronymes
- ADN
- acide désoxyribonucléique
- ANSI
- American National Standards Institute
- ARN
- acide ribonucléique
- FM
- filtration sur membrane
- FMT
- fermentation en tubes multiples
- ISO
- Organisation internationale de normalisation
- NSF
- NSF International
- PCR
- amplification en chaîne par la polymérase
- PCRq
- amplification en chaîne par la polymérase quantitative
- UE
- Union européenne
- UFC
- unité formatrice de colonie
- U.S. EPA
- United States Environmental Protection Agency
- UV
- ultraviolet
- OMS
- Organisation mondiale de la Santé
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