Page 2 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada: document technique – le nitrate et le nitrite

Partie I. Vue d'ensemble et application

1.0 Recommandations

Nitrate
Une concentration maximale acceptable (CMA) de 45 mg/L est établie pour le nitrate dans l'eau potable. Cela équivaut à une concentration de 10 mg/L d'azote de nitrate.
Nitrite
Une CMA de 3 mg/L est établie pour le nitrite dans l'eau potable. Cela équivaut à une concentration de 1 mg/L d'azote de nitrite.

2.0 Sommaire

Le nitrate et le nitrite sont très répandus dans l'environnement. Ils sont produits de manière naturelle par l'oxydation de l'azote par les microorganismes et, dans une moindre mesure, par les éclairs. L'activité humaine, y compris l'agriculture, le traitement des eaux usées ainsi que les rejets issus des procédés industriels et des véhicules motorisés, constitue la source la plus importante de ces substances. Le nitrate et le nitrite peuvent aussi être générés par un processus de nitrification dans l'eau de source ou dans les réseaux de distribution. Une concentration d'ammoniac libre pénétrant dans le réseau de distribution peut permettre la nitrification et la hausse des quantités de nitrate et de nitrite dans l'eau potable. Cette question fait l'objet d'une discussion détaillée dans le document technique sur l'ammoniac dans l'eau potable.

Dans ce document technique, on recense et on évalue tous les risques pour la santé associés à la présence de nitrate et de nitrite dans l'eau potable. On y passe en revue les nouvelles études et méthodologies et on prend en considération la disponibilité de techniques de traitement appropriées pour proposer des concentrations maximales acceptables qui assurent la protection de la santé humaine et qui peuvent être atteintes grâce aux techniques de traitement utilisées à l'échelle résidentielle comme à l'échelle municipale.

Sur la base de cet examen, la recommandation pour le nitrate dans l'eau potable est une concentration maximale acceptable de 45 mg/L (équivalant à 10 mg/L d'azote de nitrate); la recommandation pour le nitrite dans l'eau potable est une concentration maximale acceptable de 3 mg/L (équivalant à 1 mg/L d'azote de nitrite).

2.1 Effets sur la santé

2.1.1 Nitrate

La méthémoglobinémie est depuis longtemps considérée comme l'effet cible préoccupant chez les humains exposés au nitrate dans l'eau potable. Des études scientifiques démontrent des cas de méthémoglobinémie chez des nourrissons alimentés au biberon, qui sont la population vulnérable pour cet effet. Des résultats d'études récentes chez les animaux et les êtres humains suggèrent que des effets sur la fonction de la glande thyroïde sont aussi un effet cible préoccupant. Des études ont indiqué un effet chez les enfants d'âge scolaire, mais aucune étude n'a été menée chez les nourrissons, qui seraient aussi la population vulnérable pour cet effet sur la santé. De plus, les données scientifiques actuelles laissent supposer l'existence d'un lien entre le cancer et l'exposition au nitrate dans l'eau potable lorsque les conditions causent une nitrosation dans le corps humain.

Même s'il n'existe aucune étude qui pourrait, seule, être utilisée pour établir une recommandation pour le nitrate dans l'eau potable, les études disponibles menées chez les humains ne montrent aucun effet néfastes à la santé (que ce soit la méthémoglobinémie ou des effets sur la glande thyroïde) à des niveaux inférieurs à 45 mg/L. À ce niveau d'exposition, l'augmentation estimée de risque de cancer serait dans la plage de concentrations considérée essentiellement négligeable par Santé Canada.

La concentration maximale acceptable pour le nitrate a été établie à 45 mg/L (équivalant à 10 mg/L d'azote de nitrate), afin de protéger la santé de la sous-population la plus vulnérable, c'est-à-dire les nourrissons alimentés au biberon. Santé Canada continuera, dans le cadre de son processus continu de révision des recommandations, de suivre les nouvelles recherches à ce sujet, et recommandera au besoin toute modification jugée appropriée. Le ministère surveillera particulièrement la science concernant les effets sur la glande thyroïde, y compris les effets neurodéveloppementaux, dans la sous-population la plus sensible.

2.1.2 Nitrite

Les données scientifiques actuelles justifient le maintien de la méthémoglobinémie comme effet cible préoccupant pour le nitrite dans l'eau potable. La concentration maximale acceptable de 3 mg/L (équivalant à 1 mg/L d'azote de nitrite) pour le nitrite dans l'eau potable est établie sur la base de cet effet chez les nourrissons alimentés au biberon, soit la sous-population la plus sensible.

2.2 Exposition

Les Canadiens peuvent être exposés au nitrate et au nitrite présents dans les aliments, l'eau potable, l'air et le sol. On a aussi détecté du nitrate et du nitrite dans les viandes - en particulier dans les saucisses de Francfort et les autres saucisses ainsi que dans les viandes froides. Si les nourrissons allaités au sein sont peu exposés au nitrate, les nourrissons alimentés au biberon peuvent quant à eux subir une exposition considérable - par l'intermédiaire de l'eau employée pour diluer les préparations pour nourrissons concentrées et/ou des préparations à base de soja. Il est plus fréquent de trouver le nitrate dans les eaux souterraines que dans les eaux de surface, et on en détecte souvent dans les puits peu profonds. On trouve moins souvent de nitrite dans les sources d'approvisionnement en eau potable, puisqu'ils y sont convertis en nitrate en présence d'oxygène. Environ 80 % de l'exposition totale au nitrite est attribuable à la réduction du nitrate ingéré par les bactéries orales. Le nitrate et le nitrite ne sont pas volatils; l'exposition liée à l'eau potable se produit donc exclusivement par ingestion.

2.3 Analyse et traitement

Le nitrate et le nitrite peuvent être détectés et analysés dans les approvisionnements d'eau potable jusqu'à des concentrations largement inférieures aux CMA. Les techniques de traitement visent généralement le nitrate puisque le nitrite est relativement instable et peut être rapidement oxydé en nitrate.

Les procédés classiques de traitement de l'eau employés dans les usines de traitement des eaux municipales (coagulation, sédimentation, filtration et chloration) ne sont pas efficaces pour l'élimination du nitrate. Les techniques permettant d'éliminer le nitrate dans les approvisionnements d'eau municipaux comprennent l'échange d'ions, la dénitrification biologique, l'osmose inverse et l'électrodialyse. Les techniques de traitement disponibles permettent de diminuer la teneur en nitrate à des niveaux aussi bas que 22 mg/L (équivalant à 5 mg/L d'azote de nitrate).

À l'échelle résidentielle, il existe des dispositifs de traitement de l'eau potable certifiés pouvoir diminuer le nitrate jusqu'à des concentrations égales ou inférieures à la CMA. Les dispositifs résidentiels d'osmose inverse sont capables de produire des concentrations encore plus faibles dans l'eau traitée. La technique de l'échange d'ions peut aussi être utilisée, mais la qualité de l'eau traitée doit être vérifiée régulièrement pour s'assurer que le procédé fonctionne correctement et qu'il n'y a pas d'infiltration de nitrate.

3.0 Application des recommandations

Remarque : Il convient d'obtenir des indications particulières sur la mise en application des recommandations pour la qualité de l'eau potable auprès de l'autorité compétente en matière d'eau potable dans le territoire concerné.

La CMA pour le nitrate a été établie à 45 mg/L (équivalant à 10 mg/L d'azote de nitrate), afin de protéger la santé de la sous-population la plus sensible, c'est-à-dire le nourrissons alimentés au biberon. Il est cependant recommandé de maintenir les concentrations de nitrate au niveau le plus bas qui soit pratique d'atteindre pour tenir compte : (1) du manque d'étude sur les effets sur la glande thyroïde dans la sous-population la plus sensible; (2) de l'importance des effets possibles sur la santé des nourrissons (neuro-développementaux); et (3) du fait que le nitrate ingéré sous des conditions pouvant conduire à la nitrosation endogène est probablement cancérogène pour l'être humain.

Dans les systèmes municipaux dont la source d'eau contient des concentrations naturelles d'ammoniac ou qui ajoute de l'ammoniac pour la chloramination, la présence d'ammoniac libre à l'entrée du réseau de distribution peut être un des facteurs entrainant la nitrification et l'augmentation possible de nitrate et de nitrite dans le réseau. Les services publics qui ont recours à la chloramination ainsi que ceux qui exploitent une source d'eau contenant de l'ammoniac doivent veiller à employer de bonnes pratiques de fonctionnement; ils doivent par exemple limiter l'excès d'ammoniac libre qui pénètre dans le réseau de distribution à des concentrations inférieures à 0,1 mg/L, et idéalement inférieures à 0,05 mg/L (telles que mesurées en termes d'azote), ce qui contribuera à prévenir la nitrification. Les services publics qui utilisent de l'ammoniac dans leurs procédures de désinfection doivent veiller à maintenir un ratio chlore-ammoniac adéquat.

Les particuliers possédant un puits devraient mesurer les concentrations de nitrate et de nitrite dans leur approvisionnement d'eau. Les puits situés dans des régions agricoles sont susceptibles d'être contaminés par du nitrate et du nitrite, surtout les puits peu profonds. L'eau dont la teneur en nitrate et (ou) en nitrite est supérieure à la CMA ne doit pas être utilisée pour diluer les préparations pour nourrissons ou pour préparer quelque aliment pour nourrissons que ce soit.

Les particuliers qui obtiennent systématiquement des valeurs plus élevées que les CMA lorsqu'ils mesurent les concentrations de nitrate ou de nitrite devraient envisager l'installation d'un dispositif de traitement de l'eau potable, le recours à une autre source d'approvisionnement en eau potable, le déplacement de leur puits ou le forage d'un puits plus profond qui produira, d'après les analyses effectuées, une eau ne présentant pas de danger. Il est à noter que le fait de faire bouillir l'eau n'en réduit pas la concentration en nitrate ou en nitrite et n'élimine pas ces composés.

L'approche utilisée pour réduire l'exposition au nitrate par l'eau potable inclut généralement la gestion des activités dans le bassin versant, un traitement pour diminuer les niveaux de nitrate dans l'approvisionnement d'eau potable et la gestion de la nitrification dans le réseau de distribution.

3.1 Surveillance

On recommande une surveillance régulière des concentrations de nitrate et de nitrite dans les eaux de surface et les eaux souterraines dans les régions agricoles et dans les autres régions où il y avoir des rejets de composés azotés. On recommande que les services publics qui traitent pour éliminer le nitrate exercent une surveillance continue des concentrations de nitrate dans l'eau à la source et dans l'eau traitée et consignent les résultats de cette surveillance. Si cela n'est pas possible, on recommande au minimum que les services publics mesurent et enregistrent les concentrations de nitrate dans l'eau traitée sur une base quotidienne, pendant une période où les activités de traitement sont susceptibles de produire les concentrations les plus élevées (par exemple, juste avant la régénération d'une unité d'échange d'ions). Dans les cas où du nitrite a été détecté dans l'eau à la source ou lorsque les installations utilisent des processus de traitement à base de dénitrification biologique, on recommande qu'une surveillance régulière du nitrite dans l'eau à la source et dans l'eau traitée soit également effectuée.

Les services publics qui ont recours à la chloramination ainsi que ceux qui exploitent une source d'eau contenant de l'ammoniac devraient aussi exercer une surveillance à l'égard du nitrate et du nitrite puisque la pénétration d'ammoniac dans le réseau de distribution peut constituer un facteur de nitrification. La surveillance devrait porter, en plus des concentrations de nitrite et de nitrate, sur des paramètres tels que l'ammoniac libre, le chlore résiduel total ainsi que la numération des bactéries hétérotrophes. Il est recommandé de vérifier chaque semaine les concentrations de nitrate et de nitrite aux emplacements tels que les points d'entrée, les sorties des réservoirs ainsi que les endroits où l'eau réside longtemps (p. ex. les culs-de-sac). Les services publics qui appliquent une gamme complète de mesures préventives et qui ont des données de référence indiquant l'absence de nitrification dans leur réseau peuvent vérifier les concentrations de nitrate et de nitrite moins souvent.

On recommande aux propriétaires d'approvisionnements privés de faire analyser la teneur en nitrate et en nitrite de leur eau à intervalles réguliers. Les puits peu profonds situés dans des régions agricoles sont particulièrement sensibles à la contamination par le nitrate et le nitrite, et on recommande aux propriétaires de ce genre de puits d'analyser le nitrate et le nitrite dans l'eau de leur puits au moins une fois par année, au printemps ou à l'automne, lorsque les concentrations de nitrate sont habituellement à leur maximum.

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