Édition du dimanche de la déclaration de l’ACSP – le 2 mai 2021

Déclaration

Dimanche avec l'ACSP

Mise en valeur des contributions du Canada à la recherche : Vaccins contre la polio et la COVID-19

La semaine dernière était la Semaine nationale de promotion de la vaccination (SNPV), un évènement annuel qui souligne l’importance de la vaccination et laquelle j’ai abordée en détail dans l’Édition du dimanche de la semaine dernière. Au cours de la semaine, j’ai eu l’occasion de participer à un certain nombre d’évènements virtuels et de communiquer avec des gens de partout au Canada sur l’important sujet de la vaccination. Rencontrer des gens dans les nombreuses communautés du pays, discuter avec eux et apprendre d’eux est l’un des aspects les plus intéressants et les plus gratifiants de mon travail d’administratrice en chef de la santé publique du Canada. 

En réfléchissant aux discussions de la semaine dernière, je continue d’être encouragée par les histoires personnelles qui m’ont été racontées au sujet de la vaccination contre la COVID-19 – des personnes et des membres de leur famille impatients de se faire vacciner, ainsi que par la gentillesse et la compassion dont ont fait preuve les personnes qui ont facilité ce processus pour eux. Ces histoires sont souvent comparées et mises en contraste avec des histoires du passé; des récits de difficultés personnelles ou familiales graves posées par d’autres maladies infectieuses, à une époque où la vaccination n’était pas courante, ou plus grave, pas possible.

Il n’est pas nécessaire de chercher bien loin pour trouver des histoires de ce genre. Il est probable que vous ayez des histoires similaires ancrées dans votre propre histoire familiale, peut-être un parent, un grand-parent, une grande tante ou un oncle qui a été directement touché par une maladie comme la polio. Il vaut la peine d’encourager les membres de votre famille et vos amis à partager ces expériences. Chacun de ces récits, provenant de différentes époques et peut-être de différents endroits dans le monde, constitue une partie importante de notre histoire de la santé publique mondiale. Elles nous permettent également de mieux apprécier le rôle important que les vaccins peuvent jouer dans la prévention et le contrôle de maladies graves, qui changent la vie et sont parfois mortelles, au Canada et dans le monde entier.

Dans cet esprit, l’Édition du dimanche d’aujourd’hui se concentre sur l’histoire du Canada, en mettant en lumière certaines des contributions remarquables de notre pays sur le front des vaccins – dans le passé et aujourd’hui.

Vaccins contre la polio : Réflexion sur les contributions du Canada à la recherche

Mme E. Marr, physiothérapeute, avec Gifford, enfant de 2 ans 1/2, aux barres parallèles de la clinique de polio à l'Hôpital général de Sudbury

Source : https://www.bac-lac.gc.ca/fra/recherchecollection/Pages/notice.aspx?app=FonAndCol&IdNumber=3604102

La polio, ou poliomyélite, est une maladie hautement infectieuse causée par le poliovirus, et était l’une des maladies infectieuses les plus redoutées dans la première moitié du 20e siècle. Mal comprise à l’époque, la polio touchait principalement les jeunes enfants de moins de cinq ans. Bien que la plupart des personnes se soient rapidement remises de la maladie, certaines ont souffert de paralysie temporaire ou permanente et de débilitation, ou en sont même décédées.

La polio a atteint des proportions épidémiques au début des années 1900, à une époque où d’autres maladies comme la diphtérie, la typhoïde et la tuberculose étaient en déclin. Le Canada a été l’un des pays les plus durement touchés par la maladie. Des années 1920 aux années 1950, le Canada a été confronté à une série d’éclosions et d’épidémies de polio de grande ampleur et de gravité croissante, entraînant des hospitalisations massives et une pression accrue sur le système public de soins de santé. Le point culminant de ces épidémies a été atteint en 1953, année où le Canada a enregistré environ 9 000 cas et 500 décès d’un océan à l’autre. Cette épidémie a été considérée comme la plus grave à l’échelle nationale depuis la pandémie de grippe de 1918. Comme de plus en plus de patients développaient le type le plus grave de polio – la polio bulbaire, qui peut affecter gravement les muscles qui régulent la respiration – l’Aviation royale du Canada a été sollicitée pour effectuer des livraisons d’urgence de poumons d’acier à travers le pays.

À cette époque, et tout comme aujourd’hui, des mesures de santé publique telles que le confinement, la mise en quarantaine des malades et la fermeture des écoles ont été mises en place afin de contenir la maladie, tandis que les communautés médicales et de recherche, tant au Canada qu’à l’étranger, s’efforçaient de mieux comprendre la polio et les moyens de la prévenir. Parmi eux, les laboratoires de recherche médicale Connaught de l’Université de Toronto qui ont fait de nombreuses contributions dans le domaine des vaccins, dont plusieurs importantes liées au développement et à la production de vaccins contre la polio.

L’une des principales réalisations des laboratoires Connaught en matière de recherche fut le « milieu 199 », le premier milieu nutritif purement synthétique au monde pour la culture des cellules. Ce milieu a suscité l’intérêt de Jonas Salk, le virologue à qui l’on doit le premier vaccin contre la polio, en lui permettant de cultiver le virus de la polio dans des cellules et de préparer un vaccin antipoliomyélitique inactivé (VPI) qui pouvait être testé en toute sécurité sur des enfants.

Des techniciens de laboratoire à Connaught récoltant un virus qui sera utilisé pour produire un vaccin Salk, photo gracieusement fournie par Bibliothèque et Archives Canada

Source : https://www.bac-lac.gc.ca/fra/recherchecollection/Pages/notice.aspx?app=FonAndCol&IdNumber=4948442

Les laboratoires Connaught ont également relevé un autre défi majeur dans le processus de développement du vaccin contre la polio : comment produire le vaccin mis au point par Jonas Salk à une échelle suffisamment grande pour permettre son utilisation dans des essais cliniques sur l’humain. La chercheuse principale du laboratoire, Leone Farrell, une biochimiste et microbiologiste novatrice de Monkland, en Ontario, et l’une des rares femmes de la première moitié du XXe siècle à obtenir un doctorat en sciences, a mis au point la « méthode de Toronto », qui permettait de cultiver des quantités importantes de poliovirus liquides à l’aide de grandes bouteilles doucement secouées sur des machines à bascule fabriquées sur mesure. À l’époque, aucun laboratoire aux États-Unis n’avait l’expérience nécessaire pour produire en masse le virus de la polio vivant nécessaire à la fabrication du vaccin, et après avoir été sollicité par l’organisme américain March of Dimes, les laboratoires Connaught ont expédié le plus grand nombre possible de ces bouteilles pour un essai à grande échelle du vaccin Salk aux États-Unis. Le VPI de Salk a été introduit en 1955, suivi d’une campagne d’immunisation massive.

Les laboratoires Connaught ont également joué un rôle majeur dans la production d’un autre type de vaccin contre la polio – le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO) – qui contenait des souches de poliovirus affaiblies pouvant être administrées par voie orale et dont la production était moins coûteuse, ce qui le rendait plus accessible aux pays en développement. Le laboratoire a collaboré avec le chercheur américain Albert Sabin pour produire le VPO, en effectuant des tests minutieux sur le terrain pour en vérifier la stabilité, la sécurité et l’efficacité, et a homologué son propre VPO en 1962. Au cours de la décennie suivante, l’application généralisée des vaccins VPI et VPO a permis de maîtriser la polio au début des années 1970. Fait remarquable, le Canada a été certifié « exempt de polio » en 1994.  

Retour vers le présent : La recherche et le développement du vaccin contre la COVID-19 au Canada

La vaccination a marqué un tournant décisif dans les efforts du Canada pour contrôler et finalement éliminer la polio, l’excellence et l’innovation scientifiques canadiennes ayant joué un rôle essentiel. Si l’on examine la présente pandémie de COVID-19, nous pouvons également être fiers des contributions actuelles du Canada en matière de recherche dans le domaine des vaccins contre la COVID-19.

Une contribution majeure est le travail novateur de l’entreprise de biotechnologie Acuitas Therapeutics, basée à Vancouver, qui fournit les nanoparticules lipidiques pour le vaccin à ARNm contre la COVID-19 de Pfizer-BioNTech. Les nanoparticules lipidiques agissent comme un système d’administration spécial qui protège l’ARNm, le transporte en toute sécurité dans l’organisme et l’achemine dans les cellules cibles où il indique aux cellules comment fabriquer la protéine de spicule présente dans le SRAS-CoV2, le virus responsable de la COVID-19. 

Le système de nanoparticules lipidiques utilisé dans le vaccin Pfizer-BioNTech est une réussite « fabriquée au Canada » qui repose sur les travaux pionniers de Pieter Cullis, professeur de biochimie et de biologie moléculaire, et de son équipe de l’Université de la Colombie-Britannique, qui étudient l’utilisation des nanoparticules en médecine depuis plus de trois décennies. Comme le vaccin contre la polio, le développement des vaccins à ARNm contre la COVID-19 s’est appuyé sur des décennies de recherche. Et tout comme les découvertes scientifiques du milieu 199 et de la méthode de Toronto pour cultiver le virus de la polio ont été importantes pour la création du vaccin contre la polio, sans la découverte des nanoparticules lipidiques et leur utilisation en médecine, nous n’aurions pas de vaccins ARNm contre la COVID-19.

De nombreuses universités du pays, ainsi qu’un certain nombre d’entreprises biopharmaceutiques canadiennes, travaillent également d’arrache-pied à la mise au point de vaccins contre la COVID-19, en utilisant une série de technologies novatrices. Par exemple, l’entreprise québécoise Medicago mène actuellement des essais cliniques de phase 3 sur son vaccin contre la COVID-19 dérivé de plantes, en combinaison avec l’adjuvant pandémique de GSK. Medicago utilise des plantes vivantes comme « bioréacteurs » pour produire des versions non infectieuses de protéines virales. D’autres vaccins fabriqués au Canada en sont aux premiers stades de leur parcours d’essais cliniques.

Deux infirmières de la santé publique vaccinent des adultes à la clinique de polio à Southey, en Sask., photo gracieusement fournie par Bibliothèque et Archives Canada

Source : https://www.bac-lac.gc.ca/fra/recherchecollection/Pages/notice.aspx?app=FonAndCol&IdNumber=3604102

Regarder le passé et être reconnaissant pour le présent

Un coup d’œil sur notre histoire peut nous rappeler de manière convaincante que certaines choses ne changent pas avec le temps. Comme les générations qui ont affronté les épidémies de polio du début du siècle dernier, nous sommes inquiets pour notre sécurité et celle de nos proches, nous pleurons la perte d’êtres chers et nous ressentons la même solitude que celle provoquée par les fermetures et la séparation physique prolongée. Ce que nous avons vécu pendant cette pandémie nous a, en un sens, rapprochés de notre passé.

Mais la science et la technologie ont grandement évoluées. Il est important de garder à l’esprit la chance que nous avons de vivre à une époque où nous pouvons nous connecter virtuellement et instantanément les uns aux autres, où nous pouvons facilement accéder aux informations pour nous tenir au courant de la situation et, plus remarquable encore, où nous avons progressé au point de pouvoir développer et distribuer des vaccins sûrs et efficaces en l’espace de quelques années.

Alors que la SNPV de cette année tire à sa fin, nous pouvons tous exprimer notre gratitude pour les remarquables réalisations scientifiques des chercheurs d’ici et du monde entier qui nous ont permis d’arriver là où nous sommes aujourd’hui et qui continueront à nous faire avancer. Les gestes que nous posons en sont la meilleure preuve. Comme toujours, je demande à chacun d’entre vous de rester fort et de respecter les mesures essentielles : continuez à suivre les conseils de santé publique, maintenez les pratiques individuelles et faites-vous vacciner quand c’est votre tour.   

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