La sclérose en plaques au Canada, 2011-2031 : résultats d’une étude de modélisation par microsimulation des répercussions épidémiologiques et économiques - PSPMC: Volume 37-2, février 2017

Volume 37 · numéro 2 · février 2017

La sclérose en plaques au Canada, 2011-2031 : résultats d’une étude de modélisation par microsimulation des répercussions épidémiologiques et économiques

Nana Amankwah, M. Sc.Note de bas de page 1; Ruth Ann Marrie, M.D., Ph. D.Note de bas de page 2; Christina Bancej, Ph. D.Note de bas de page 1; Rochelle Garner, Ph. D.Note de bas de page 3; Douglas G. Manuel, M.D.Note de bas de page 3,Note de bas de page 4,Note de bas de page 5,Note de bas de page 6,Note de bas de page 7,Note de bas de page 8,Note de bas de page 9; Ron Wall, Ph. D.Note de bas de page 1,Note de bas de page 3; Julie Bernier, M.A.Note de bas de page 3, Karen Tu, M.D.Note de bas de page 9,Note de bas de page 10Note de bas de pag,Note de bas de page 11; Kim Reimer, B. Sc.Note de bas de page 12,

https://doi.org/10.24095/hpcdp.37.2.02f

Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.

Rattachement des auteurs :

Correspondance : Nana Amankwah, Direction des déterminants sociaux et de l’intégration scientifique, Direction générale de la promotion de la santé et de la prévention des maladies chroniques, Agence de la santé publique du Canada, salle 903 A3, 785, avenue Carling, Ottawa (Ontario) K1A 0K9; tél. : 613-291-3181; courriel : nana.amankwah@phac-aspc.gc.ca.

Résumé

Introduction : L’objectif de notre étude est de présenter des estimations et des projections des répercussions épidémiologiques et économiques de la sclérose en plaques (SP) au Canada sur 20 ans (2011-2031).

Méthodologie : Nous avons utilisé un modèle de microsimulation de la santé de la population (POHEM) de Statistique Canada, plus précisément le modèle longitudinal de microsimulation démographique appelé POHEM — Maladies neurologiques. Nous avons sélectionné les personnes atteintes de SP à partir de sources de données administratives sur la santé et dérivé les paramètres liés à l’incidence de la maladie et au taux de décès d’une étude de cohorte de la Colombie-Britannique afin de prévoir quels seront l’incidence de la SP et son taux de décès. Nous avons également inclus une mesure reposant sur l’utilité (Health Utilities Index Mark 3) qui rend compte des états de santé fonctionnelle afin de réaliser des projections sur la qualité de vie liée à la santé. Enfin, nous avons estimé les paramètres de prestation de soins et de coûts des soins de santé à partir de sondages nationaux du Canada et de données administratives sur la santé et nous les avons inclus comme paramètres dans le modèle visant à évaluer les répercussions économiques et sur la santé des maladies neurologiques.

Résultats : On anticipe une légère augmentation du nombre de cas incidents de SP, passant de 4 051 cas pour 100 000 personnes en 2011 à 4 974 en 2031. Le nombre de Canadiens touchés par la SP passera ainsi de 98 385 en 2001 à 133 635 en 2031. Le coût total des soins de santé par personne (à l’exception des dépenses directes) pour les adultes de 20 ans et plus atteints de SP en 2011 était d’environ 16 800 $, contre un peu moins de 2 500 $ pour ceux ne souffrant d’aucune affection neurologique. Si on comptabilise les dépenses supplémentaires liées à la SP (à l’exception des dépenses directes), les coûts totaux annuels de la SP pour le secteur de la santé devraient donc atteindre deux milliards de dollars d’ici 2031. Par ailleurs, les dépenses directes moyennes des personnes atteintes de SP seront d’environ 1 300 $ par année tout au long de la période de projection.

Conclusion : La SP est associée à un important fardeau économique pour la société car elle touche surtout de jeunes adultes à un moment fondateur pour leur vie professionnelle et leur vie familiale. Sa prévalence étant particulièrement élevée au Canada, des recherches comme la nôtre sont essentielles afin de mieux comprendre les répercussions actuelles et futures de la SP sur la population canadienne, afin que les décideurs du réseau de la santé puissent mieux planifier les besoins en soins de santé pour les malades qui en sont atteints. Selon ces résultats, des stratégies pour prévenir la SP et la traiter plus efficacement sont essentielles pour en atténuer les futures répercussions.

Mots-clés : sclérose en plaques, fardeau économique, Canada, modèle de microsimulation, incidence, prévalence

Points saillants

  • La sclérose en plaques (SP) est associée à un important fardeau économique pour la société.
  • On anticipe une légère augmentation du nombre de cas incidents de SP au Canada, passant de 4 051 cas nouveaux pour 100 000 personnes en 2011 à 4 974 cas nouveaux pour 100 000 personnes en 2031.
  • La prévalence de la SP chez les femmes de 20 ans et plus est environ trois fois plus élevée que chez les hommes.
  • La plupart des personnes atteintes de SP ont un aidant naturel.
  • On anticipe que les coûts directs et indirects (dépenses directes) associés à la SP augmenteront au cours des 20 prochaines années.

Introduction

La sclérose en plaques (SP) est une maladie inflammatoire dégénérative chronique et imprévisible du système nerveux centralNote de bas de page 1Note de bas de page 2Note de bas de page 3Note de bas de page 4. Elle est l’affection neurologique invalidante la plus répandue chez les jeunes adultes canadiensNote de bas de page 5. La maladie se déclare habituellement entre 20 et 40 ans, et les femmes en sont plus souvent atteintes que les hommesNote de bas de page 1Note de bas de page 5. Bien que l’étiologie de la SP demeure inconnue, la combinaison d'une prédisposition génétique et de facteurs environnementaux déclenche cette maladieNote de bas de page 2Note de bas de page 6.

La prévalence de la SP varie géographiquement : elle est élevée au Canada, dans le nord des États-Unis, dans la majeure partie du nord de l’Europe, en Nouvelle-Zélande, dans le sud-est de l’Australie et en IsraëlNote de bas de page 7. La prévalence de la SP au Canada est parmi les plus élevées au mondeNote de bas de page 8. Cette maladie se déclarant à un âge relativement précoce, elle affecte les individus au moment de leur productivité maximale, ce qui les confronte alors à des difficultés d’emploi, particulièrement le sous-emploi, le chômage et l’invalidité à long termeNote de bas de page 9Note de bas de page 10Note de bas de page 11Note de bas de page 12. Selon le rapport Action en faveur des personnes touchées par la SP de la Société canadienne de la SPNote de bas de page 13, près de 80 % des Canadiens atteints de SP sont susceptibles de se retrouver sans emploi. Déterminer les raisons de cette forte prévalence et réduire le fardeau de vivre avec la SP et d’autres maladies neurologiques chroniques sont devenus d’importantes préoccupations en matière de politique de la santé au Canada. C'est dans ce cadre que le gouvernement du Canada a lancé l’Étude nationale de la santé des populations relative aux maladies neurologiques (ENSPMN), afin d’approfondir la compréhension de ces maladies, dans le but à long terme de réduire le fardeau des maladies neurologiques au CanadaNote de bas de page 9.

Compte tenu des effets sociétaux de la SP, la conduite d'études exhaustives est nécessaire afin de gérer les répercussions actuelles de la maladie et d'en planifier les répercussions futures. Nous avons utilisé le modèle de microsimulation de la santé de la population (POHEM) de Statistique Canada, plus précisément le modèle longitudinal de microsimulation démographique appelé POHEM — Maladies neurologiques, pour analyser les répercussions économiques et sur la santé de la SP au Canada, qui inclut l'incidence, la prévalence, la mortalité et les coûts directs et indirects associés à cette maladie sur un horizon de 20 ans (2011-2031). L'objectif de cette étude est de fournir une information clé susceptible d'aider à concevoir les stratégies et les politiques de santé publique associées à la SP.

Méthodologie

Modèle de santé de la population (POHEM) — Maladies neurologiques

Le POHEM — Maladies neurologiques de Statistique Canada est un modèle longitudinal de microsimulation démographiqueNote de bas de page 14 créé dans le cadre de l’ENSPMN du Canada. L’ENSPMN inclut 13 projets de recherche et 3 sondages nationaux visant à étudier les nombreuses maladies neurologiques affectant les CanadiensNote de bas de page 9Note de bas de page 14Note de bas de page 15. Le POHEM a été généré à l’aide de la version 11 du logiciel MODGEN (générateur de modèle), un langage de programmation de microsimulation développé par Statistique CanadaNote de bas de page 14. Ce modèle a été élaboré afin de réaliser des projections du fardeau de diverses maladies neurologiques au Canada, dont la SP, d’un point de vue sociétal, en incluant les répercussions sur la santé et les coûts directs et indirects des soins de santé et en synthétisant la grande quantité d’information tirée des projets de l’ENSPMN. Le POHEM repose sur des observations empiriques issues des données démographiques canadiennes et des estimations des taux d’incidence et de mortalité de la maladie et permet d’établir des projections des dynamiques couvrant le cycle de vie des CanadiensNote de bas de page 16. L’unité de base d’analyse du modèle est constituée des individus (ou « acteurs ») dont le parcours de vie est modélisé en temps continu grâce à l'approche de Monte-CarloNote de bas de page *. La simulation dynamique recrée la population canadienne à un moment donné (dans le passé ou le futur) puis en suit le vieillissement, individu par individu, jusqu’au décès.

Caractéristiques du modèle

Des fournisseurs de soins, des cliniciens et des personnes ayant une expertise stratégique ont fourni des services consultatifs au POHEM — Maladies neurologiquesNote de bas de page 14. Les conseillers de projet et l’équipe de recherche ont créé les caractéristiques du modèle, à savoir son objectif, sa structure et ses sources de données. Le modèle est :

  • fondé sur la population – il est représentatif de la population canadienne, ainsi que d'importants sous-groupes par âge, sexe et région,
  • souple sur les caractéristiques de la population – il permet des changements dans la population au fil du temps pour rendre compte des données passées et projetées sur les naissances, les décès, l’immigration et l’émigration,
  • cohérent et uniforme – avec une définition commune de la SP dans l’ensemble du modèle et une méthode uniforme de modélisation de l’épidémiologie et des coûts associés à la maladie; détermination des cas reposant sur un diagnostic de la SP par un clinicien; utilisation du Health Utilities Index Mark 3 (HUI3, voir plus loin), une mesure générique de la qualité de vie liée à la santé fondée sur les préférences, pour la détermination de la gravité de la maladieNote de bas de page 17,
  • très précis sur les projections – il est capable d’établir des projections précises pour l’ensemble de la population canadienne et pour divers sous-groupes d’âge et de sexe,
  • utile pour la planification de la santé de la population– il est utilisable pour estimer le fardeau futur de la SP, ce qui inclut les coûts des soins de santé et le fardeau pour les personnes soignantes,
  • flexible et robuste – son développement est possible. Si les facteurs de risque pour le développement de la SP autres que l’âge et le sexe ont été exclus de cette étude, les facteurs de risque des comportements sociodémographiques et de santé sont intégrés dans les autres modèles de maladies du POHEM et de l’ENSPMN et sont donc susceptibles d'être inclus dans une prochaine modélisation pour la SPNote de bas de page 18.

Modèle de conception

Le processus d’élaboration du modèle de microsimulation comporte quatre étapes : génération, mises à jour annuelles, validation du modèle et projection (tableau 1). Seules des sources de données démographiques canadiennes ont été utilisées pour la génération et les mises à jour annuelles (données non présentées; disponibles sur demande auprès des auteurs).

Tableau 1
Processus de projection de la prévalence de la sclérose en plaques, du fardeau en santé et de l'utilisation des soins de santé au Canada, à l’aide du POHEM — Maladies neurologiques
Étape de génération du modèle Activité du modèle Détails de l’étape du modèle
Étape 1 : Générer une population canadienne initiale Mettre en place un modèle de projection en créant une cohorte synthétique de Canadiens. Associer les cohortes de naissance aux décès, à l’immigration et à l’émigration annuels.

Données démographiques observées jusqu'en 2006 et projetées jusqu'en 2031Note de bas de page a.

Étape 2 : Mettre à jour l’incidence annuelle de la SP et les autres paramètres du modèle Chaque année jusqu’en 2031, mettre à jour les caractéristiques de la population, l’incidence de la SP, l’état de santé et les coûts des soins de santé. Chaque année, mettre à jour la cohorte synthétique afin de tenir compte des changements démographiques, de l’incidence de la SP et des décès. Pour les personnes atteintes de SP et les autres, estimer le Health Utilities Index, l’utilisation des soins de santé (formels et informels) et les décès.
Étape 3 : Valider et calibrer le modèle Comparer la prévalence projetée de la SP à celle observée en 2009. Comparer la prévalence projetée de la SP à celle observée, selon l’âge et le sexe.
Calibrer le modèle au besoin (aucune calibration effectuée pour la SP).
Étape 4 : Générer les projections finales pour 2011-2031 Prévoir l’incidence de la SP, la prévalence, les décès, le Health Utilities Index et les coûts des soins de santé pour 2011-2031. Générer les tableaux des résultats tirés des projections.

Abréviations : POHEM, Modèle de santé de la population; SP, sclérose en plaques.

Génération

La génération a débuté avec les cohortes de naissances de 1872, que nous avons soumises au taux de décès de l'époque observé, comme pour les autres modèles en santé de Statistique CanadaNote de bas de page 19Note de bas de page 20. Nous avons ajouté la migration (immigration et émigration) aux cohortes de naissance, également en fonction des événements historiques observés ou estimés. Les cohortes de naissance utilisées reposent sur les données observées jusqu’en 2006, puis sur les taux de naissance, de décès et de migration issus des projections canadiennes habituelles (scénario de croissance moyenne) estimés par Statistique Canada pour 2007 à 2031.

Mises à jour annuelles de l’état de santé des acteurs

Le profil de santé d'un acteur comporte six caractéristiques : (1) données individuelles (âge, province de résidence), (2) état de la SP, (3) état de santé, (4) présence d’un aidant naturel, (5) coûts des soins de santé et (6) mortalité (date du décès). Le profil de santé de chaque acteur est mis à jour durant l’année, à une date particulière (anniversaire, date du diagnostic de SP) ou au début de la nouvelle année, en fonction des caractéristiques du profil. Les calculs et la modélisation ont porté sur toutes les caractéristiques, pour les personnes atteintes de SP comme pour les autresNote de bas de page 20 (sources de données fournies sur demande par les auteurs).

Mise en œuvre du modèle

La figure 1 illustre les paramètres du parcours de vie utilisés dans le modèle de simulation.

Figure 1
Aperçu de la mise en œuvre du POHEM—Maladies neurologiques

 

Équivalent textuel - Figure 1

La figure 1 illustre les paramètres du parcours de vie utilisés dans le modèle de simulation. Étant donné que le modèle est fondé sur une hypothèse de statu quo pour la prévision des répercussions futures, il suppose que l’incidence, les facteurs pronostiques et de risque de la SP demeureront stables durant toute la période de projection, conformément aux résultats obtenus en Nouvelle-Écosse et au Manitoba.

État de la SP : incidence

Étant donné que le modèle est fondé sur une hypothèse de statu quo pour la prévision des répercussions futures, il suppose que l’incidence, les facteurs pronostiques et de risque de la SP demeureront stables durant toute la période de projection, conformément aux résultats obtenus en Nouvelle-ÉcosseNote de bas de page 21 et au ManitobaNote de bas de page 22. Nous avons généré des acteurs atteints de SP en deux étapes. Nous avons d'abord appliqué des estimations empiriques des taux d’incidence de la SP selon l’âge et le sexe à la population canadienne synthétique du modèle pour les données de chaque année, passées comme projetées. Nous avons estimé les taux d’incidence à l’aide d’un algorithme validé de définitionNote de bas de page ± de cas ayant une sensibilité de 84,0 % pour les adultes âgés de 20 ans et plusNote de bas de page 23 et une spécificité de 99,9 % 24, qui a été appliqué à une cohorte de l’Ontario. La population de moins de 20 ans a été exclue, étant donné la faible incidence des syndromes de démyélinisation acquise (SDA) conduisant à une SP chez les enfants et les adolescents canadiens. Les taux d’incidence et de prévalence estimés à partir de la population de la Colombie-Britannique se sont révélés similaires à ceux des études publiées en contexte canadien et dans des projets pilotes provinciaux ou territoriauxNote de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24Note de bas de page 25. On a classé les acteurs au début de chaque année, à l’aide des taux d’incidence selon l’âge et le sexe, comme ayant reçu un diagnostic de SP en fonction de leur risque de développer la maladie. Les cas incidents de SP accumulés au fil des années ont généré les cas prévalents de SP.

Dans un second temps, nous avons appliqué le risque de décès associé à la SP aux acteurs atteints de SP. Ce risque a été calculé en multipliant le taux de décès des personnes atteintes de SP par le taux de décès de base de la population canadienne avec le POHEM — Maladies neurologiques. Le taux de décès de l'ensemble de la population diminue progressivement au fil du temps, conformément au taux projeté de décès (espérance de vie) reposant sur les cohortes de naissances et le modèle Lee-Carter estimé par Statistique CanadaNote de bas de page 26. Cela signifie que le taux projeté de décès des personnes atteintes de SP est le même que celui des Canadiens non atteints de SP, ce qui est globalement conforme aux observations faites en Colombie-BritanniqueNote de bas de page 27. En utilisant les données administratives de prévalence de la Colombie-Britannique, nous avons examiné le nombre de décès chez les personnes atteintes de SP et l’avons comparé au taux de décès chez les personnes ne souffrant d’aucune maladie neurologique.

État de santé

Le HUI3 est une mesure reposant sur l’utilité qui tient compte de l’état de santé, variant d’une santé parfaite (HUI3 = 1,0) au décès (HUI3 = 0), et incluant des états de santé considérés comme pires que le décès (HUI3 = -0,36), ce qui permet de déterminer des degrés de gravitéNote de bas de page 17. L'évaluation de la santé fonctionnelle réalisée avec le HU13 comporte huit dimensions (cognition, émotion, mobilité, dextérité, douleur et inconfort, parole, vision et ouïe) et son utilisation repose sur la nécessite de disposer d’un cadre commun d'évaluation de la santé fonctionnelle et de l’incapacité due à la SP. Cet outil mesure et prévoit l’état de santé et la qualité de vie des personnes atteintes de SPNote de bas de page 17Note de bas de page 28Note de bas de page 29. Les moyennes selon l’âge utilisées dans le HUI3 pour la population atteinte de SP sont tirées de l’Enquête sur les personnes ayant des problèmes neurologiques au Canada (EPPNC) de 2011Note de bas de page 3030, alors que les valeurs du HUI3 pour la population non atteintes de SP proviennent de l'ensemble des cycles (1994-2010) de l’Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP)Note de bas de page 31.

Les répercussions de la SP peuvent aussi être évaluées par le nombre d’années de vie perdues (AVP) en raison de la maladie, à savoir en raison d’un décès prématuré dû à la maladie. Pour calculer le nombre d’AVP, nous calculons tout d’abord l’âge au décès de tous les acteurs atteints de SP pour chaque année civile, puis nous recalculons l’âge au décès en fonction d'un scénario où le risque de mortalité pour la SP est le même que pour les acteurs non atteints de SP : les AVP correspondent à la différence d'âge au décès entre ces deux calculs. Les années de vie perdues ajustées sur la santé (AVPS) indiquent quant à elles le nombre d’années de vie en bonne santé perdues, en combinant les statistiques de morbidité et de mortalité : elles sont estimées en multipliant le nombre d'années de vie (âge au décès) par le HUI3 annuel pour chaque acteur durant tout son cycle de vie.

Soins informels

Les soins informels correspondent à des soins non rémunérés fournis par des membres de la famille ou des amis (« aidants naturels ») à des Canadiens qui vivent avec une maladie chronique ou ont des besoins spécifiques en raison d’un handicap ou de leur âge. Nous avons attribué à chaque acteur du modèle des soins informels à la fin de chaque année civile en fonction de son âge, de l’état de sa SP et de son état de santé (HUI3). Avec l'attribution d’un aidant naturel à une personne, certaines caractéristiques supplémentaires lui ont aussi été attribuées, en fonction des estimations empiriques de l’EPPNC enrichies par l’Enquête sociale générale (ESG) de 2012Note de bas de page 32 : (1) nombre d'heures de soins reçues, (2) état de santé de l’aidant naturel et (3) dépenses directes effectuées par l’aidant naturel.

Coûts des soins de santé

Les coûts officiels des soins de santé ont été estimés pour les cohortes de cas incidents et prévalents de SP et établis à l’aide de données administratives de Colombie-Britannique et de l'Ontario. Ils ont été estimés en utilisant la valeur du dollar de 2010, ce qui fait que l’inflation n’a pas été prise en compte dans les projections de coûts. De plus, les coûts pour les cohortes de cas prévalents et hypothétiques ont été obtenus entre le 1er avril 2009 et le 31 mars 2010, à la fois pour l'Ontario et la Colombie-Britannique. Nous avons aussi examiné les cohortes de cas incidents en Ontario sur la même période, et nous avons obtenu les coûts des cohortes de cas incidents en Colombie-Britannique disponibles pour la période de douze mois débutant le 1er avril de l’année de l’incidence (2006, 2007 ou 2008).

Les coûts officiels des soins de santé sont ceux couverts par les régimes provinciaux d’assurance-maladie dans les composantes de la santé suivants : (1) hospitalisation de courte durée, (2) services médicaux, (3) données sur les médicaments d’ordonnanceNote de bas de page , (4) hôpitaux de réadaptation, (5) soins à domicile financés par l’Ontario, (6) résidences et établissements de soins de longue durée en Ontario et (7) appareils et accessoires fonctionnels financés par l’Ontario. Les dépenses directes engagées par les soignants et les soins informels fournis par les aidants naturels (nombre d'heures de soins par semaine) ont été estimés à partir d’un échantillon national de fournisseurs de soins de l'ESG de 2012, alors que les dépenses directes engagées par les personnes vivant avec une maladie neurologique ont été estimées à partir d’un échantillon national de l’EPPNC. On entend par dépenses directes toutes les dépenses non couvertes par l’assurance privée ou l’assurance-maladie provinciale : coût ou dépassements de remboursement du coût de médicaments d’ordonnance ou en vente libre, d'appareils et accessoires fonctionnels et de réadaptation (physiothérapie, ergothérapie et services de soins à domicile). Nous avons estimé séparément les dépenses de santé officielles pour les cas incidents (dans les 12 premiers mois suivant l’incidence) et les cas prévalents (un an ou plus après l’incidence) de SP. Nous avons utilisé des données d'enquêtes pour évaluer les dépenses directes étant donné qu'elles ne sont pas saisies dans les bases de données administratives.

Comorbidité, population hypothétique et estimation des coûts

Les personnes atteintes de SP souffrent souvent de maladies comorbidesNote de bas de page 33Note de bas de page 34. Ces maladies peuvent être antérieures ou constituer des séquelles de la SP comme elles peuvent être indépendantes de la SP. Elles peuvent toucher les personnes atteintes de SP comme les autres personnes. Il est donc parfois difficile d'isoler la contribution de la SP aux coûts des soins de santé, à la prestation de soins ou à la mortalité en présence de ces maladies comorbides. Pour résoudre ce problème, nous avons défini une population hypothétique (ne souffrant d’aucune affection neurologique) afin de déterminer l’incidence réelle de la SP. Par exemple, si la prévalence de la comorbidité X est plus importante chez les personnes atteintes de SP, les coûts additionnels des soins de santé (ou les heures de soins reçues) associés à cette morbidité supérieure seront attribués aux personnes vivant avec la SP. À l'inverse, si les personnes atteintes de SP utilisent moins certaines ressources en soins de santé que les personnes ne souffrant d’aucune maladie neurologique, cette moindre utilisation sera aussi prise en compte dans notre modèle.

La population hypothétique non atteinte de la SP est constituée de toutes les personnes de nos ensembles de données qui n'ont pas été classées comme souffrant de l'une des sept maladies neurologiques étudiées dans le projet de microsimulation de l’ENSPMN. Outre la SP, ces maladies sont la maladie d’Alzheimer et autres démences, la paralysie cérébrale, l’épilepsie, la maladie de Parkinson ou le parkinsonisme, les traumatismes crâniens et les lésions médullaires traumatiques.

Validation du POHEM—Maladies neurologiques

La prévalence de la SP prévue par le modèle en 2010 s'est révélée supérieure à celle observée dans les données de la Colombie-Britannique et à celle signalée dans certaines provinces canadiennes. Les estimations de la prévalence sont variables à l'échelle du Canada : elles varient entre 207,3 pour 100 000 personnes en Ontario en 2010Note de bas de page 24 et 266,9 pour 100 000 en Nouvelle-ÉcosseNote de bas de page 21, voire 357,6 pour 100 000 en Alberta en 2004Note de bas de page 35. Malgré cette variabilité, nos estimations des taux de prévalence selon l’âge et le sexe sont assez similaires aux estimations fondées sur l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2010-2011Note de bas de page 36 (figure 2), sachant que l’ESCC n’a pas pris en compte la population vivant en établissement de soins de longue durée, qui forme entre 5,8 et 9,2 % des patients atteints de SP âgés de 65 ans et plusNote de bas de page 37. Nous n’avons donc effectué aucun ajustement supplémentaire aux projections de prévalence du POHEM—Maladies neurologiques.

Figure 2
Taux de prévalence de la sclérose en plaques, selon l’âge et le sexe, prévus par le POHEM — Maladies neurologiques et estimations d’autres sources de données canadiennes à diverses dates

Équivalent textuel - Figure 2

Dans la figure 2, on peut constater la prévalence de la SP prévue par le modèle en 2010 s'étant révélée supérieure à celle observée dans les données de la Colombie-Britannique et à celle signalée dans certaines provinces canadiennes. Les estimations de la prévalence sont variables à l'échelle du Canada : elles varient entre 207,3 pour 100 000 personnes en Ontario en 2010 et 266,9 pour 100 000 en Nouvelle-Écosse, voire 357,6 pour 100 000 en Alberta en 2004. Malgré cette variabilité, nos estimations des taux de prévalence selon l’âge et le sexe sont assez similaires aux estimations fondées sur l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2010-2011, sachant que l’ESCC n’a pas pris en compte la population vivant en établissement de soins de longue durée, qui forme entre 5,8 et 9,2 % des patients atteints de SP âgés de 65 ans et plus. Nous n’avons donc effectué aucun ajustement supplémentaire aux projections de prévalence du POHEM – Maladies neurologiques.

Projections

Nous avons réalisé 13 projections principales jusqu’en 2031 incluant (1) les cas incidents et prévalents de SP au Canada, (2) les AVP des personnes atteintes de SP, (3) les AVPS, (4) les coûts des soins de santé, en détaillant ceux pour chacun des sept secteurs, (5) les dépenses directes et (6) le nombre d'heures de soins informels. De plus, nous avons effectué des projections en fonction de trois paramètres du point de vue des personnes soignantes d’individus atteints de SP : (1) nombre d'heures de soins, (2) dépenses directes et (3) état de santé (HUI3).

Résultats

On anticipe une légère augmentation du nombre de cas incidents de SP au Canada, passant de 4 051 pour 100 000 personnes en 2011 à 4 974  en 2031 (données non présentées). La prévalence de la SP devrait augmenter progressivement au sein de la population canadienne de 20 ans et plus, passant de 380 cas pour 100 000 personnes en 2011 à 430 en 2031, ce qui correspond à 98 835 Canadiens vivant avec la SP en 2011 et 133 635 en 2031 (figure 3). Cette faible augmentation de la prévalence sur un horizon de 20 ans est le reflet de notre hypothèse d’incidence et de mortalité stables de la SP.

Figure 3
Nombre (personnes-années) et taux de prévalence de la sclérose en plaques projeté par le POHEM — Maladies neurologiques, personnes âgées de 20 ans et plus, hommes et femmes, Canada, 2011-2031

Équivalent textuel - Figure 3

Tel que démontré dans la figure 3, le nombre de cas incidents de SP va légèrement augmenter au Canada, passant de 4 051 pour 100 000 personnes en 2011 à 4 974 en 2031 (données non présentées). La prévalence de la SP devrait augmenter progressivement au sein de la population canadienne de 20 ans et plus, passant de 380 cas pour 100 000 personnes en 2011 à 430 en 2031, ce qui correspond à 98 835 Canadiens vivant avec la SP en 2011 et 133 635 en 2031. Cette faible augmentation de la prévalence sur un horizon de 20 ans est le reflet de notre hypothèse d’incidence et de mortalité stables de la SP.

La prévalence de la SP chez les femmes de 20 ans et plus est environ trois fois plus élevée que chez les hommes (figure 4). En 2011, elle était de 580 pour 100 000 personnes chez les femmes contre 200 chez les hommes. En 2031, le taux de prévalence sera d'après le modèle de 620 pour 100 00 personnes chez les femmes contre 220 chez les hommes. La prévalence de la SP augmente considérablement pour les deux sexes entre le groupe d’âge des 20 à 24 ans et celui des 60 à 69 ans, puis elle commence à diminuer, ce qui témoigne d’une incidence supérieure entre la fin de la trentaine et le début de la soixantaine.

Figure 4
Nombre de cas prévalents (années-personnes) et taux de prévalence projetés de la sclérose en plaques selon le POHEM — Maladies neurologiques, selon l’âge et le sexe, Canada, 2011 et 2031

Équivalent textuel - Figure 4

La figure 4 permet de constater que la prévalence de la SP chez les femmes de 20 ans et plus est environ trois fois plus élevée que chez les hommes. En 2011, elle était de 580 pour 100 000 personnes chez les femmes contre 200 chez les hommes. En 2031, le taux de prévalence sera d'après le modèle de 620 pour 100 00 personnes chez les femmes contre 220 chez les hommes. La prévalence de la SP augmente considérablement pour les deux sexes entre le groupe d’âge des 20 à 24 ans et celui des 60 à 69 ans, puis elle commence à diminuer, ce qui témoigne d’une incidence supérieure entre la fin de la trentaine et le début de la soixantaine.

En ce qui concerne la santé fonctionnelle et l’incapacité causée par la SP, les personnes des deux sexes atteintes de SP ont d'après l’EPPNC des scores HUI3 inférieurs à ceux des personnes ne souffrant d'aucune maladie neurologiques (figure 5). Bien que les scores HUI3 diminuent avec l’âge dans les deux populations, il diminue en moyenne 15 ans plus tôt au sein de la population atteinte de SP, l’écart entre les scores HUI3 persistant pour tous les groupes d’âge. On a projeté un maintien de ces tendances tout au long de la période de projection, dans la mesure où le modèle suppose que les scores HUI3 selon l’âge ne changent pas (pour les personnes atteintes de SP comme pour celles ne souffrant d’aucune maladie neurologique).

Figure 5
Score moyen au Health Utilities Index Mark 3, personnes atteintes de SP et celles ne souffrant d’aucune maladie neurologique, selon l’âge, hommes et femmes, Canada

Équivalent textuel - Figure 5

Tel que démontré dans la figure 5, en ce qui concerne la santé fonctionnelle et l’incapacité causée par la SP, les personnes des deux sexes atteintes de SP ont d'après l’EPPNC des scores HUI3 inférieurs à ceux des personnes ne souffrant d'aucune maladie neurologiques. Bien que les scores HUI3 diminuent avec l’âge dans les deux populations, il diminue en moyenne 15 ans plus tôt au sein de la population atteinte de SP, l’écart entre les scores HUI3 persistant pour tous les groupes d’âge. On a projeté un maintien de ces tendances tout au long de la période de projection, dans la mesure où le modèle suppose que les scores HUI3 selon l’âge ne changent pas (pour les personnes atteintes de SP comme pour celles ne souffrant d’aucune maladie neurologique).

Bien que les personnes atteintes de SP nées dans les dernières décennies puissent s’attendre à vivre plus longtemps que celles nées au cours des décennies antérieures, elles ne vivront pas aussi longtemps que les personnes qui ne sont pas atteintes de SP. Les femmes atteintes de SP nées entre 2010 et 2019 vivront cinq ans de moins que les femmes du même âge qui ne sont pas atteintes de SP, et les hommes nés dans la même décennie atteints de SP vivront quatre ans de moins que ceux qui ne sont pas atteints de SP. Les personnes atteintes de SP vivront de plus longues périodes en mauvaise santé que celles qui ne sont pas atteintes de SP (tableau 2). Par exemple, les femmes nées entre 2010 et 2019 qui recevront un diagnostic de SP perdront en moyenne 19,8 années en parfaite santé contre 12,4 pour celles qui ne sont pas atteintes de SP. De même, les hommes nés dans la même décennie et atteints de SP perdront en moyenne 17,2 années en parfaite santé contre 10,7 pour ceux qui ne sont pas atteints de SP.

Tableau 2
Moyenne du nombre d’années de vie et d’années de vie ajustées sur la santé calculée par le POHEM — Maladies neurologiques, personnes atteintes de sclérose en plaques ou non, selon le sexe et la décennie de naissance, Canada, 1970-2019
Décennie de naissance Personnes atteintes de SP (AV) Personnes non atteintes de SP (AV) AVAS pour les personnes atteintes de SP AVAS pour les personnes non atteintes de SP
Femmes
1970-1979
1980-1989
1990-1999
2000-2009
2010-2019
81,7
82,5
82,7
82,9
83,0
86,0
86,9
87,4
87,6
87,7
62,7
63,0
63,1
63,2
63,2
74,0
74,7
75,0
75,2
75,3
Hommes
1970-1979
1980-1989
1990-1999
2000-2009
2010-2019
80,6
81,0
81,6
81,4
81,3
81,5
82,8
83,4
83,8
84,0
63,8
63,8
64,3
63,9
64,1
71,3
72,3
72,8
73,1
73,3

Le tableau 3 fournit un aperçu des coûts des soins de santé par personne observés en 2011 pour les Canadiens atteints de SP et ceux non atteints. Pour tous les âges, le coût total moyen des soins de santé était beaucoup plus élevé pour les personnes atteintes de SP que pour celles qui n’en étaient pas atteintes. Par exemple, dans le groupe d'âge des 20 à 24 ans, les coûts totaux prévus des soins de santé étaient 13 fois plus élevés pour les personnes atteintes de SP que pour celles non atteintes. Les coûts des soins de santé pour les personnes atteintes de SP demeuraient de cinq à dix fois supérieurs entre les âges de 25 et 64 ans, pour diminuer à quatre fois supérieurs et demeurer stables pour le reste des groupes d’âge. La répartition par secteur de coûts de soins de santé révèle que les coûts des services hospitaliers et médicaux ainsi que ceux des médicaments d’ordonnance sont toujours plus élevés chez les personnes atteintes de SP (tableau 3). La disparité entre les deux populations est vraiment supérieure pour le coût des médicaments, qui est 40 fois plus élevé chez les personnes de 20 à 24 ans atteintes de SP que chez celles qui n’en sont pas atteintes.

Tableau 3
Estimation de la moyenne des coûts par personne atteinte de SP comparée à celle des personnes non atteintes, par principales composantes de coûts et par groupe d’âge, 2011
Groupe d’âge
(ans)
Avec SP (en dollars) Sans SP (en dollars) Ratio des coûts pour les personnes atteintes de SP et celles qui ne sont pas atteintes de SP par groupe d’âge
Secteur des soins de santéNote de bas de page a Médecin Hôpital Médicaments d'ordonnance Secteur des soins de santéNote de bas de page a Médecin Hôpital Médicaments d'ordonnance Secteur des soins de santéNote de bas de page a Médecin Hôpital Médicaments d'ordonnance
20–24
25–29
30–34
35–39
40–44
45–49
50–54
55–59
60–64
65–69
70–74
75–79
80–84
85 et plus
11 158
10 845
10 816
11 011
12 104
13 375
14 067
15 947
16 550
18 523
22 218
27 131
30 833
32 310
1 718
1 351
1 275
1 126
1 217
1 314
1 313
1 436
1 532
1 607
1 906
1 964
2 153
2 079
1 480
1 249
2 010
1 928
2 780
3 247
3 816
5 111
4 973
6 146
6 032
8 721
7 705
6 906
7 439
7 488
6 760
6 764
6 145
5 654
4 927
4 024
3 543
2 542
2 447
2 433
2 666
2 042
854
1 066
1 215
1 216
1 305
1 575
1 998
2 514
3 205
4 130
5 169
6 344
7 547
9 196
326
411
469
457
472
538
644
754
898
1 096
1 278
1 444
1 502
1 354
340
420
456
414
422
513
676
882
1 201
1 634
2 115
2 686
3 238
3 711
170
216
266
315
372
468
592
750
917
1 123
1 350
1 521
1 603
1 417
13:1
10:1
9:1
9:1
9:1
8:1
7:1
6:1
5:1
4:1
4:1
4:1
4:1
4:1
5:1
3:1
3:1
2:1
3:1
2:1
2:1
2:1
2:1
1:1
1:1
1:1
1:1
2:1
4:1
3:1
4:1
5:1
7:1
6:1
6:1
6:1
4:1
4:1
3:1
3:1
2:1
2:1
44:1
35:1
25:1
21:1
17:1
12:1
8:1
5:1
4:1
2:1
2:1
2:1
2:1
1:1

Abréviation : SP, sclérose en plaques.

Les dépenses supplémentaires engagées par les Canadiens de 20 ans et plus atteints de SP sont de trois à huit fois supérieures dans les trois principaux secteurs (services médicaux, services hospitaliers et médicaments) que celles engagées par les personnes qui ne souffrent d’aucune des sept principales maladies neurologiques mentionnées plus haut. Les coûts additionnels engagés par les personnes atteintes de SP sont systématiquement plus élevés chez les 25 à 49 ans, mais ils commencent ensuite à se stabiliser et à diminuer (tableau 4). À l’âge de 70 ans, l’écart entre les dépenses de base et les dépenses additionnelles est trois fois moins élevé et demeure à ce niveau pour les groupes d’âge de 70 ans et plus, ce qui témoigne sans doute de l'accentuation de la morbidité dans l'ensemble de la population.

Tableau 4
CoûtsNote de bas de page a totaux des soins de santé prévus par le POHEM — Maladies neurologiques pour les personnes atteintes de SP, divisions en composantes de base et supplémentaires des dépenses totales, par groupe d’âge et année de projection, Canada
Groupe d’âge (ans) 2011 2016 2021 2026 2031
Dépenses de base Dépenses supplémentaires Dépenses de base Dépenses supplémentaires Dépenses de base Dépenses supplémentaires Dépenses de base Dépenses supplémentaires Dépenses de base Dépenses supplémentaires
Coûts totaux (millions de dollars)
20-24
25-29
30-34
35-39
40-44
45-49
50-54
55-59
60-64
65-69
70-74
75-79
80-84
85 et plus
0,4
1,7
3,9
6,4
10,2
18,7
27,8
35,5
40,1
41,9
39,0
33,6
23,1
18,9
4,2
15,7
30,8
51,7
84,5
139,7
168,2
189,6
166,9
145,9
128,8
110,1
71,2
47,6
0,3
1,8
4,3
6,8
10,1
16,2
28,3
40,2
48,3
50,9
49,7
39,9
27,3
21,6
3,9
16,0
33,6
54,2
84,2
122,4
171,1
214,2
201,8
176,7
164,1
130,8
83,5
54,8
0,3
1,8
4,5
7,2
10,5
16,1
24,9
41,1
54,5
61,9
60,6
52,0
32,9
26,1
3,6
16,8
34,9
57,5
86,8
122,2
150,5
219,5
227,0
216,1
200,2
170,2
100,5
66,0
0,3
1,7
4,6
7,7
11,2
16,7
25,1
36,3
55,8
70,3
73,5
63,9
43,7
32,7
4,0
15,3
35,5
61,0
92,7
126,1
152,0
194,0
232,7
244,8
241,9
209,0
134,3
82,8
0,4
1,7
4,3
7,9
11,9
17,7
26,2
36,6
50,2
72,3
84,7
78,0
54,3
43,2
4,2
15,3
33,4
62,5
97,8
133,6
159,1
196,3
209,4
251,6
279,1
254,5
166,4
109,5
Total 301,2 1355,0 345,6 1511,2 394,4 1671,7 443,4 1826,1 489,4 1972,8

Abréviations : POHEM, Modèle de santé de la population; SP, sclérose en plaques. Remarque : Les coûts de base équivalent à la moyenne des coûts par personne ne souffrant d’aucune maladie neurologique s’ils sont appliqués aux personnes atteintes de SP. Les coûts supplémentaires représentent la différence entre les coûts pour les personnes atteintes de SP et les coûts de base.

L'ensemble des coûts projetés pour les soins de santé indique que les dépenses additionnelles causées par la SP sont environ quatre fois supérieures aux dépenses de base associées à cette maladie. On prévoit de plus une augmentation de ces coûts au cours de la période de projection. Les dépenses additionnelles en médicaments faites par les personnes atteintes de SP sont de 10 à 20 fois supérieures à celles faites par les Canadiens qui ne souffrent d’aucune des sept maladies neurologiques précédemment mentionnées. Cette tendance, bien visible pour les 20 à 49 ans, se poursuit tout au long de la période de projection.

Les dépenses directes totales engagées par les Canadiens atteints de SP devraient elles aussi augmenter, passant de 126 millions de dollars en 2011 à 170 millions de dollars en 2031 (tableau 5). Les dépenses directes vont augmenter entre l'âge de 25 et celui de 54 ans, puis se stabiliser et commencer à diminuer après 65 ans, cette diminution du coût par personne étant sans doute partiellement causée par la mortalité. Les dépenses directes moyennes des personnes atteintes de SP sont d’environ 1 300 $ par année tout au long de la période de projection.

Tableau 5
Total des dépenses directesNote de bas de page a projetées pour les personnes atteintes de sclérose en plaques, par groupe d’âge et année de projection, Canada, 2011-2031
Groupe d’âge (ans) 2011 2016 2021 2026 2031
Coûts totaux (millions de dollars)
20-24
25-29
30-34
35-39
40-44
45-49
50-54
55-59
60-64
65-69
70-74
75-79
80-84
85 et plus
0,5
1,8
3,6
6,7
9,9
15,1
17,8
17,9
16,0
13,1
9,6
6,8
4,0
2,8
0,4
1,9
4,0
7,1
10,0
13,1
18,1
20,5
19,2
15,8
12,3
8,1
4,7
3,2
0,4
2,0
4,1
7,5
10,2
13,1
15,9
20,8
21,7
19,2
15,1
10,4
5,7
3,8
0,5
1,7
4,3
7,9
11,0
13,5
16,1
18,4
22,3
21,8
18,2
12,8
7,5
4,8
0,5
1,8
3,9
8,2
11,5
14,3
16,8
18,7
20,0
22,3
20,9
15,7
9,3
6,4
Total 125,7 138,2 149,9 160,7 170,4

Le recours à des aidants naturels témoigne aussi du fardeau supplémentaire qui pèse sur les familles et l'entourage des personnes atteintes de SP. D'après les données de 2011, la proportion de Canadiens bénéficiant de soins d’un aidant naturel est plus importante au sein de la population atteinte de SP qu'au sein de celle ne souffrant d’aucune maladie neurologique, quel que soit le groupe d’âge. On estime que 34 % des personnes de 20 à 24 ans atteintes de SP ont un aidant naturel. Cette proportion grimpe à 59 % chez les personnes de 60 à 64 ans atteintes de SP (figure 6). En général, les personnes atteintes de SP ont besoin d’un aidant naturel plus tôt et pour le reste de leur vie.

Figure 6
Pourcentage projeté par le POHEM—Maladies neurologiques des personnes ayant un aidant naturel, personnes atteintes de sclérose en plaques et personnes ne souffrant d’aucune maladie neurologique, par groupe d’âge, Canada, 2011

Équivalent textuel - Figure 6

On voit sur la figure 6 que le recours à des aidants naturels témoigne aussi du fardeau supplémentaire qui pèse sur les familles et l'entourage des personnes atteintes de SP. D'après les données de 2011, la proportion de Canadiens bénéficiant de soins d’un aidant naturel est plus importante au sein de la population atteinte de SP qu'au sein de celle ne souffrant d’aucune maladie neurologique, quel que soit le groupe d’âge. On estime que 34 % des personnes de 20 à 24 ans atteintes de SP ont un aidant naturel. Cette proportion grimpe à 59 % chez les personnes de 60 à 64 ans atteintes de SP. En général, les personnes atteintes de SP ont besoin d’un aidant naturel plus tôt et pour le reste de leur vie.

Analyse

Nous avons utilisé le modèle de microsimulation POHEM — Maladies neurologiques avec hypothèse de statu quo afin d'anticiper sur 20 ans les évolutions de la SP au Canada en matière d’incidence de nouveaux cas, d’augmentation de la prévalence et de fardeau pour l'avenir, tant sur le plan des coûts que sur celui des répercussions sur la santé. D’ici 2031, la prévalence de la SP dépassera les 400 personnes pour 100 000, ce qui correspond à plus de 133 000 Canadiens touchés et une augmentation de 13 % par rapport à 2011. Si l'on comptabilise les dépenses supplémentaires liées à la SP, les coûts totaux de la SP pour le secteur de la santé devraient atteindre deux milliards de dollars d’ici 2031. De plus, on prévoit que 65 % des personnes atteintes de SP auront besoin de soins informels d’ici 2031.

Nous avons constaté que les personnes atteintes de SP ont une espérance de vie moins longue et vivent plus longtemps en mauvaise santé (sur la base des scores HUI3, plus faibles), ce qui limite leur capacité à participer à des activités dans leur vie quotidienne. D’autres études ont également montré que les personnes atteintes de SP ont une qualité de vie inférieure à celle de l'ensemble de la populationNote de bas de page 38. De plus, on sait que le score HUI3 est étroitement lié à l’incapacité mesurée par les médecinsNote de bas de page 39, qui a tendance à s’aggraver avec l’âgeNote de bas de page 40, ce qui est cohérent avec nos résultats. Nous n'avons pas fait d'évaluation des variations de tendances de ces associations au cours de la période, présumant une stabilité au fil du temps. Comme la SP touche surtout les jeunes adultes de 18 à 40 ans, l'invalidité précoce et le décès prématuré impliquent que les personnes touchées possèdent une capacité réduite à contribuer à l'activité économique.

Conformément à la littérature existante, les modélisations montrent que les dépenses en soins de santé par personne sont plus importantes chez les personnes atteintes de SPNote de bas de page 41 que chez celles qui n’en sont pas atteintes. Bien que le taux d’hospitalisation diminue au fil des années pour les personnes atteintes de SP, il demeure toujours plus élevé que chez des personnes de même âge et de même sexe non atteintes de SPNote de bas de page 42. D’autres services de soins de santé sont aussi beaucoup plus utilisés par les personnes atteintes de SP que par l'ensemble de la population38. Les dépenses en médicaments d’ordonnance sont particulièrement élevées, ce qui témoigne sans doute des coûts très élevés des traitements modificateurs de la maladie pour la SPNote de bas de page 43. Nous avons observé que chez les 20 à 34 ans, groupe qui utilise le plus les traitements modificateurs de la maladie, les dépenses en médicaments d’ordonnance représentent de 62,5 à 69 % des dépenses totales en soins de santé. Dans une enquête menée en 2006 auprès de 1 909 Américains atteints de SP, les traitements modificateurs de la maladie représentaient le coût lié à la SP le plus élevéNote de bas de page 44. De plus, dans une étude américaine utilisant des données administratives, les dépenses en produits pharmaceutiques ont représenté en 2004 65 % des coûts en soins de santé liés à la SPNote de bas de page 45.

Bien que le modèle de microsimulation n'ait prévu qu’une légère hausse de la prévalence de la SP en 20 ans, le fardeau de la SP pour les personnes touchées, pour le système de santé et pour la société devrait augmenter considérablement. Cette augmentation témoigne de l’amélioration de l’espérance de vie pour les personnes atteintes de SP, mais avec de longues périodes de mauvaise santé et d’incapacité fonctionnelle. Les coûts des soins de santé formels vont ainsi augmenter et les personnes atteintes de SP verront également leurs dépenses directes augmenter considérablement sur 20 ans. La demande en soins informels va également augmenter, ce qui va affecter encore davantage la santé et le bien-être économique des aidants naturelsNote de bas de page 46Note de bas de page 47Note de bas de page 48.

Points forts et limites

Les projections de notre étude comblent plusieurs lacunes des estimations actuelles fondées sur la population canadienne et sont, de plus, cohérentes avec la littérature canadienne existante.

Le POHEM — Maladies neurologiques fait l'hypothèse de statu quo quant à l’incidence, la mortalité relative et la santé fonctionnelle : à l’exception des risques associés à l’âge et au sexe, la croissance de la population canadienne, les tendances migratoires et le vieillissement devraient demeurer identiques au cours des 20 ans de projection. Nous n'avons pas tenu compte d’autres facteurs de risque, car il était difficile de déterminer lesquels seraient les plus déterminants, sans compter qu’ils auraient varié au cours de la période de projection. Nous avons aussi projeté une tendance identique dans le traitement de la SP pour l'ensemble de la période de projection, bien que des progrès en soins de santé soient susceptibles d'offrir de nouveaux moyens de prévention, de diagnostic et de traitement de la maladie. Le POHEM Maladies neurologiques fait l'hypothèse que l’incidence de la SP débute à l’âge de 20 ans, même si jusqu’à 5 % des personnes ont vu leurs premiers symptômes apparaître alors qu’elles avaient moins de 16 ansNote de bas de page 49, sachant que la majorité des diagnostics de ces personnes ne surviendra qu’à l’âge adulte. Les effets de cette hypothèse devraient être négligeables, étant donné que la majorité des cas de SP sont diagnostiqués à l'âge de 20 ans ou plus tard. Le modèle fait état d'un pic d’incidence à un âge plus avancé que les autres études canadiennes menées en Nouvelle-ÉcosseNote de bas de page 21 et au ManitobaNote de bas de page 22, et ce, même si les taux d’incidence globaux générés par le modèle se sont révélés similaires à ceux de ces études.

D’autres limites doivent être prises en compte. Le modèle a projeté une augmentation conservatrice de prévalence de la SP de 6,5 % par décennie. Dans toutes les provinces canadiennes où elle a été évaluée au fil du temps, la prévalence de la SP a augmentéNote de bas de page 21Note de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24Note de bas de page 36 conformément à nos résultats. Toutefois, le degré de changement s'est révélé variable, allant de 13,5 % par décennie au ManitobaNote de bas de page 22 à 55 % par décennie en OntarioNote de bas de page 24. Soit cette variation résulte de l’application des critères de diagnostic et de déclaration, soit nos résultats sont susceptibles de sous-estimer les répercussions à venir de la SP.

Nos résultats supposent qu’il n’y aura aucune avancée significative en matière de traitement pour améliorer les capacités fonctionnelles ou réduire la mortalité et que les modèles généraux d’utilisation des services de santé demeureront les mêmes (hypothèse de statu quo). Les futures versions du POHEM — Maladies neurologiques seront capables de passer outre au problème des limites posées par ces hypothèses, en intégrant les nouvelles recherches sur les facteurs pronostiques et de risque de la SP.

La microsimulation comporte également certaines limites intrinsèques, dont une sensibilité à la qualité des données utilisées comme paramètres d’entrée et la capacité de modéliser et de quantifier les incertitudes des projectionsNote de bas de page 50. Sur le plan de la qualité des données intégrées au modèle, malgré nos efforts pour utiliser les données les plus pertinentes, de nouvelles données, plus précises, seront disponibles dans le futur. Elles pourront être intégrées à un futur modèle de microsimulation et les répercussions de ces changements pourront être évaluées. Quant à l’incertitude des projections, des méthodes visant à améliorer la prévision des projections, actuellement en cours d’élaboration, pourront être appliquées à de futurs scénarios de projectionNote de bas de page 51Note de bas de page 52.

Conclusion

Le POHEM — Maladies neurologiques a mis en lumière la montée des coûts de la SP et de ses répercussions sur la société, l’économie et la santé. Les personnes atteintes de SP perdent progressivement leurs capacités physiques et cognitives et leur qualité de vie s'en trouve réduite. Le coût de la SP et les modalités d'en atténuer les impacts sociétaux constituent des enjeux stratégiques d'importance, sachant que l'on prévoit une augmentation croissante des coûts des soins de santé, en particulier des médicaments d’ordonnance. De futures études de microsimulation pourront être conçues afin de fournir les données nécessaires aux décideurs pour répartir aux mieux des fonds destinés aux soins de santé réduits. Par exemple, le POHEM — Maladies neurologiques pourrait fournir des données probantes en appui aux analyses coûts-avantages de diverses recommandations stratégiques visant à réduire les répercussions de cette maladie sur la société.

Remerciements

Cette étude a reçu le soutien de l’Institut de recherche en services de santé, qui est financé par une subvention annuelle du Ministère de la santé et des soins de longue durée de l’Ontario (MSSLD). Les opinions, résultats et conclusions présentés dans cet article demeurent cependant ceux des auteurs et sont indépendants des sources de financement. Il n'en découle ni approbation ou soutien de la part de l’Institut de recherche en services de santé ou du MSSLD de l’Ontario.

Certaines parties de cet article reposent sur des données et des renseignements compilés et fournis par l’ICIS. Cependant, les analyses, conclusions, avis et affirmations présentés dans cet article sont ceux des auteurs et ne reflètent pas nécessairement ceux de l’ICIS.

Dre Karen Tu est chercheure-boursière au Department of Family and Community Medicine de l’Université de Toronto.

Conflits d’intérêts

Les auteurs n’ont aucun conflit d’intérêts à déclarer.

Contribution des auteurs

NA, RM, CB et RG ont contribué à la con­ception du manuscrit, la rédaction, l'interprétation de l'analyse et la révision critique de l'article. RM a fourni une expertise sur le contenu spécialisé ayant trait à la sclérose en plaques, alors que CB, RG, DGM, RW, PF, JB, KT et KR ont contribué à l'acquisition des données, la modélisation de microsimulation et la révision de l'article.

Références

 

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