Recherche quantitative originale – Obésité et vieillissement en santé : bien-être social, fonctionnel et mental chez les personnes âgées au Canada
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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada
Deepa P. Rao, Ph. D. Rattachement de l'auteur 1; Parth Patel, MSP Rattachement de l'auteur 1,Rattachement de l'auteur 2; Karen C. Roberts, M. Sc. Rattachement de l'auteur 1; Wendy Thompson, M. Sc.Rattachement de l'auteur 1
https://doi.org/10.24095/hpcdp.38.12.01f
Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.
Correspondance : Deepa P. Rao, Agence de la santé publique du Canada, 785, avenue Carling, bureau 707B1, Ottawa (Ontario) K1A 0K9; tél. : 613-867-8303; téléc. : 613-941-2057; courriel : deepa.rao@canada.ca
Résumé
Introduction. Si les Canadiens vivent plus longtemps qu’avant, bon nombre d’entre eux souffrent cependant d’obésité. Cette étude vise à décrire, par un examen de mesures du bien-être social, fonctionnel et mental, le vieillissement des personnes âgées souffrant d’obésité ayant participé à l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ELCV).
Méthodologie. Nous avons extrait des données du premier cycle de l’ELCV portant sur les personnes de 55 à 85 ans. Nous avons utilisé des statistiques descriptives pour caractériser cette population et ajusté des modèles logistiques généralisés pour comparer les mesures du bien-être social, fonctionnel et mental chez les participants souffrant d'obésité (indice de masse corporelle de 30 kg/m2 et plus) et chez les participants n'en souffrant pas. Nos résultats sont présentés en fonction du sexe.
Résultats. Plus de la moitié des participants ont déclaré avoir un revenu personnel relativement faible (moins de 50 000 $), les femmes étant particulièrement affectées. Moins de la moitié des participants souffraient d'obésité et la multimorbidité était plus fréquente parmi ceux souffrant d'obésité que parmi ceux n'en souffrant pas (participants de 55 à 64 ans; rapport de cotes [RC] : 2,7; intervalle de confiance [IC] à 95 % : 2,0 à 3,5 chez les hommes; RC : 2,8; IC à 95 % : 2,2 à 2,5 chez les femmes). La faible participation sociale était associée à l’obésité chez les femmes plus âgées mais pas chez les hommes plus âgés. La présence de problèmes de fonctionnement physique et de limitations dans la vie quotidienne était fortement associée à l’obésité tant chez les femmes que chez les hommes. Bien que le bonheur et la satisfaction à l’égard de la vie ne soient pas associés à l'obésité, les femmes âgées souffrant d’obésité ont déclaré avoir une perception défavorable de leur état de santé.
Conclusion. La multimorbidité était plus fréquente chez les participants souffrant d'obésité que chez ceux n'en souffrant pas. Les femmes souffrant d'obésité étaient plus nombreuses que les hommes à avoir une perception défavorable de leur état de santé et à ne pas prendre part à des activités sociales. Les participants des deux sexes ont fait état de problèmes de santé fonctionnelle. Les associations observées, qui sont indépendantes de la multimorbidité chez les personnes âgées, mettent en relief les secteurs où des actions en faveur d'un vieillissement en santé pourraient être bénéfiques.
Mots-clés : obésité, vieillir en santé, santé mentale, participation sociale, multimorbidité, bonheur
Points saillants
- Les participants de l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement ont fait état de niveaux élevés de participation à des activités sociales, de bonheur et de satisfaction à l’égard de la vie, ainsi que d’une perception favorable de leur état de santé.
- La multimorbidité était plus fréquente chez les participants souffrant d'obésité que chez ceux n'en souffrant pas.
- La participation à des activités sociales était moins importante chez les femmes âgées souffrant d’obésité.
- Les participants des deux sexes souffrant d'obésité ont plus fréquemment fait état de problèmes de santé fonctionnelle.
- Les femmes âgées souffrant d'obésité étaient moins nombreuses à se dire en bonne santé que celles n'en souffrant pas.
Introduction
Les Canadiens d’aujourd’hui vivent plus longtemps que les générations précédentes : la proportion de Canadiens de 65 ans et plus au sein de la population devrait passer à 1 sur 5 d’ici 2024Note de bas de page 1. Vieillir en santé ne se signifie cependant pas simplement vivre plus longtemps, et la qualité de vie d’une personne a une incidence sur le nombre d’années vécues en bonne santé. Ainsi, bien que les Canadiens vivent en moyenne plus longtemps qu’autrefois, ils ne vivent pas nécessairement bienNote de bas de page 2. En effet, la majorité des personnes âgées au Canada souffrent d’embonpoint ou d’obésitéNote de bas de page 3 et l'on sait que l’obésité est un facteur de risque associé à plusieurs problèmes de santé chroniquesNote de bas de page 4Note de bas de page 5 susceptible d'exacerber la fragilité ainsi que le déclin des fonctions physiques lié au vieillissementNote de bas de page 6. De plus, bien que le poids perçu ne corresponde pas toujours au poids réel, il est associé à des mesures auto-évaluées de la santé et de la satisfaction à l’égard de la vie, qui varient selon le sexeNote de bas de page 7. Il est donc important de saisir quel rôle l’obésité peut jouer dans le vieillissement en santé des personnes âgées au Canada.
Il existe un paradoxe lié à l’obésité chez les personnes âgées : un indice de masse corporelle (IMC) élevé semble conférer un avantage sur le plan de la survie et présenter une association moins forte avec la mortalité qu’un IMC faible, qui est associé à une plus grande mortalité qu’un poids normalNote de bas de page 8. Les risques associés au surpoids chez les personnes âgées sont complexes et sont influencés par divers facteurs, en particulier la redistribution adipeuse liée au vieillissement, les causes de mortalité concurrentes et les risques découlant d’un changement de poids, tous ayant une influence spécifique sur le traitement et la prévention de l’obésité dans ce groupe d’âgeNote de bas de page 9. La définition clinique de l’obésité est fondée sur l’IMC, mais certaines autres mesures du surpoids pourraient mieux convenir aux personnes âgées, en particulier celles qui tiennent davantage compte de la redistribution adipeuse (par exemple le tour de taille) sont aptes à faire ressortir un risque pour la santé qui peut passer inaperçu avec l’IMCNote de bas de page 10. En matière de vieillissement en santé, la gestion du poids chez les personnes âgées vise essentiellement à améliorer le fonctionnement physique (réduction de la perte musculaire et osseuse) et la qualité de vie liée à la santéNote de bas de page 6.
Bien qu’il n’existe aucune définition uniforme du vieillissement en santé, on peut le concevoir comme le maintien d’un bien-être physique, social et mental au fil du tempsNote de bas de page 11. La qualité de vie chez les personnes âgées dépend en grande partie de ces facteursNote de bas de page 12 ainsi que de la capacité qu'elles ont à maintenir leur autonomie et leur indépendanceNote de bas de page 12 . Peu de problèmes de santé chroniques, des soutiens sociaux solides, de l'indépendance dans les activités et une satisfaction générale à l’égard de la vie sont quelques-uns des nombreux indicateurs d’un vieillissement sainNote de bas de page 11 Note de bas de page 13 Note de bas de page 14 Note de bas de page 15. Suivant ce concept holistique, l'analyse du bien-être social, fonctionnel et mental jumelé à un faible nombre de problèmes de santé chroniques et de troubles mentaux peut fournir une idée objective de ce que signifie vieillir en santé.
Selon des estimations récentes, environ 15 % des Canadiens âgés de 20 ans et plus seraient atteints d’au moins deux maladies chroniques (multimorbidité)Note de bas de page 16, et cette proportion augmenterait avec l’âgeNote de bas de page 17. C’est pourquoi on s'intéresse de plus en plus, en recherche, aux attitudes du troisième âge qui contribuent à une bonne qualité de vieNote de bas de page 18. Les tendances actuelles laissent penser que l’obésité et les problèmes de santé connexes vont persister avec l'arrivée à l'âge de la retraite de la génération des « baby-boomers »Note de bas de page 19Note de bas de page 20. Il est donc pertinent de mieux saisir le rôle potentiel de l’obésité dans le vieillissement en santé au Canada. C’est pourquoi cette étude a pour objectif d'établir les indicateurs de la santé sociale, fonctionnelle et mentale chez les aînés canadiens souffrant d'obésité, indépendamment de leurs autres problèmes de santé chroniques.
Méthodologie
Source de données
Cette étude a été réalisée à l’aide des données transversales du premier cycle de l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ELCV). Les participants (n = 21 241) ont été recrutés : 1) par l’enquête thématique sur le vieillissement en bonne santé menée dans le cadre de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de Statistique Canada (n = 3 923); 2) par les bases de données des registres de santé provinciaux (n = 3 810); et 3) par appel téléphonique aléatoire (n = 13 508). Tous les participants ont répondu aux questions de l’étude à l’aide de la technique d’entrevue téléphonique assistée par ordinateur (ETAO) entre 2010 et 2014. Les cadres d’échantillonnage excluaient les résidents des trois territoires canadiens, les personnes vivant dans les réserves des Premières Nations, les membres à plein temps des Forces canadiennes, les personnes vivant dans des établissements de soins de longue durée ainsi que les personnes incapables de communiquer en français ou en anglais. Une description détaillée du contexte et de la méthode de l’ELCV a été publiée ailleursNote de bas de page 21. La population à l’étude a été restreinte aux personnes de 55 à 85 ans (N = 15 345).
Variables
Caractéristiques socioéconomiques
Nous avons calculé le revenu individuel annuel sur la base du revenu individuel total autodéclaré de toutes les sources puis nous avons construit une variable sous forme binaire (moins de 50 000 $ ou 50 000 $ ou plus). Nous avons défini le statut vis-à-vis du logement – qui a été utilisé comme mesure subjective du bien-être financier – en combinant le type d’habitation des participants et leur statut vis-à-vis de la propriété. Ainsi, les personnes vivant dans une résidence pour personnes âgées ou dans un hôtel ont été considérées comme ne résidant pas dans leur logement, tout comme celles vivant dans d’autres lieux indépendants (maison ou appartement) mais ayant indiqué qu’elles n’en étaient pas propriétaires. Les personnes ayant répondu qu’elles habitaient dans une maison ou un appartement et qu’elles en étaient propriétaires ont été classées dans le groupe des personnes vivant dans leur logement.
Caractéristiques liées au comportement
Le tabagisme a été défini en fonction des renseignements fournis par les participants (fumeur ou non-fumeur [ex-fumeur ou personne n’ayant jamais fumé]), tout comme le niveau de consommation habituelle d’alcool (4 boissons alcoolisées ou plus par semaine ou moins de 4).
Caractéristiques liées à la santé
Nous avons calculé l’IMC en divisant le poids autodéclaré (kg) par la taille autodéclarée élevée au carré (m2). L’obésité a été définie par un IMC supérieur ou égal à 30 kg/m2 et l’absence d’obésité par un IMC de moins de 30 kg/m2 (ce qui englobe les personnes ayant un poids normal et celles faisant de l’embonpoint)Note de bas de page 22. Nous avons défini la multimorbidité à partir de l'autodéclaration par les participants de deux ou plusieurs des problèmes de santé parmi les suivantsNote de bas de page 23Note de bas de page 24 : arthrite, trouble respiratoire (asthme ou maladie pulmonaire obstructive chronique), diabète, trouble cardiaque (angor, crises cardiaques et maladies vasculaires périphériques), accident vasculaire cérébral (incluant les accidents ischémiques transitoires), trouble neurologique (maladie d’Alzheimer ou de Parkinson), cancer et trouble de santé mentale (trouble de l’humeur ou trouble d'anxiété). Les participants ont été considérés comme présentant le problème de santé en question s’ils avaient répondu par l’affirmative lorsqu'on leur a demandé si un médecin leur avait déjà dit qu’ils en étaient atteints.
Santé sociale
Les participants devaient indiquer le nombre de fois au cours des 12 derniers mois (au moins une fois par jour, au moins une fois par semaine, au moins une fois par mois, au moins une fois dans l’année, jamais) où ils avaient participé à huit types d'activités : 1) activités en famille ou avec des amis à l’extérieur de la maison; 2) fréquentation d’une église ou activités religieuses; 3) activités sportives ou physiques avec d’autres personnes; 4) activités éducatives ou culturelles avec d’autres personnes; 5) activités d’un club philanthropique ou d’une société d’aide mutuelle; 6) activités d’une association de quartier, communautaire ou professionnelle; 7) bénévolat ou activités de bienfaisance; ou 8) autres activités récréatives avec d’autres personnes. À partir de ces réponses, nous avons codé la participation à des activités communautaires et sociales en deux catégories : au moins une fois par semaine ou moins fréquemment. Les questions concernant ces mesures sont extraites de l’enquête sur le soutien social de l’étude Medical Outcomes Study (OMS) et se sont révélées valides et fiables chez les femmes âgéesNote de bas de page 25.
Santé fonctionnelle
Nous avons évalué le fonctionnement physique à l’aide des réponses à 14 questions. Pour chaque scénario proposé (par exemple on demandait au répondant s'il avait de la difficulté à lever son bras au-dessus de sa tête), les participants ont été classés comme ayant une incapacité fonctionnelle s’ils présentaient des limitations dans le cadre de 3 scénarios proposés ou plus. Les limitations dans la vie quotidienne ont été codées en fonction des réponses au questionnaire d’évaluation multidimensionnelle Older Americans Resources and Services (OARS)Note de bas de page 26, dont la validité a été établie antérieurementNote de bas de page 27. Les variables ordinales ont été réparties en deux catégories, « aucune incapacité » et « incapacité légère ou totale ».
Santé mentale et bien-être
Nous avons déterminé l’état de santé mentale en fonction de l’autodéclaration d’un trouble de l’humeur ou d’un trouble d'anxiété diagnostiqué par un médecin. Plusieurs mesures ont été utilisées pour évaluer le bien-être mental. Nous avons défini le bonheur comme le sentiment d’être heureux trois jours ou plus par semaine, par opposition à moins de trois jours. Bien que cette mesure ne remplace pas une évaluation de la santé mentale en bonne et due forme, son utilité a été confirmée pour la mesure de l’état de santé mentale généralNote de bas de page 28. Le bonheur autodéclaré est associé à une réduction de la mortalité, et peut être médié par l’activité physique et la comorbidité chez les personnes âgéesNote de bas de page 29. La satisfaction à l’égard de la vie a été évaluée à partir des réponses indiquant une certaine satisfaction à l’égard de la vie par opposition aux réponses neutres ou traduisant une insatisfaction. Ces variables (auto-évaluation de la santé mentale et auto-évaluation du vieillissement en santé) ont été codées sous forme binaire (état « passable » et « mauvais » par opposition à « bon », « très bon » et « excellent »).
Analyses statistiques
Nous avons utilisé des analyses descriptives pour rendre compte des caractéristiques socioéconomiques, comportementales et de santé chez les participants (Canadiens de 55 à 85 ans). Nous avons mené des analyses du khi carré pour établir des comparaisons en fonction du groupe d’âge et du sexe. Nous avons conçu des modèles de régression logistique pour examiner l’association entre l’obésité (comparativement à l'absence d'obésité) et la multimorbidité, la santé fonctionnelle, la santé sociale, la santé mentale et le bien-être mental. Nous avons vérifié les facteurs de confusion possibles individuellement en vue de leur inclusion dans un modèle de régression logistique évaluant le risque de multimorbidité en fonction de la présence d’obésité, et le niveau de signification a été établi à p < 0,20. Nous avons retenu les variables de confusion suivantes : revenu, consommation d’alcool et tabagisme. Le niveau de scolarité et l’état matrimonial ont aussi été vérifiés, mais ils se sont révélés non significatifs. Nous avons inclus la multimorbidité dans les modèles afin de tenir compte de son association à l’obésité. Nous présentons également les rapports de cotes (RC) et les intervalles de confiance (IC) à 95 %. Le taux de réponse globale était de 10 % dans la cohorte de suivi de l’ELCV ce qui fait que, bien que des poids d’échantillonnage partiels aient été utilisés pour tenir compte des nombreux cadres d’échantillonnage complexes de l’ELCV, nos résultats ne sont valables que pour l’échantillon de l’ELCV et ne sont pas généralisables à la population canadienneNote de bas de page 30.
Résultats
Dans chaque groupe d’âge successif, le nombre de personnes représentées par les techniques de pondération se réduisait d’un facteur de deux (N55-64ans pondéré = 4 090 454; N65-74ans pondéré = 2 599 404; et N75-85ans pondéré = 1 664 872). La prévalence et la répartition des caractéristiques socioéconomiques, comportementales et de santé sont présentées dans le tableau 1. Environ la moitié des hommes de 55 à 64 ans avaient un revenu personnel supérieur à 50 000 $, avec une diminution significative de cette proportion dans les groupes d’âge plus élevés. Moins du tiers des femmes de 55 à 64 ans avaient un revenu personnel supérieur à 50 000 $, une proportion significativement inférieure à celle constatée chez les hommes. Cette proportion allait aussi en diminuant avec l'âge. Nous avons observé des différences significatives tant entre les sexes qu’entre les différents groupes d’âge en ce qui concerne le statut vis-à-vis de la propriété, avec un grand nombre de participants plus âgés propriétaires de leur logement.
Caractéristiques | 55 à 64 ans | 65 à 74 ans | 75 à 85 ans | ||||||||||||
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Hommes | Femmes | Valuer p Note a du χ2 |
Hommes | Femmes | Valeur pNote a du χ2 | Hommes | Femmes | Valeur pNote a du χ2 | |||||||
Pourcentage (%) | IC à 95 % | Pourcentage (%) | IC à 95 % | Pourcentage (%) | IC à 95 % | Pourcentage (%) | IC à 95 % | Pourcentage (%) | IC à 95 % | Pourcentage (%) | IC à 95 % | ||||
Caractéristiques socioéconomiques | |||||||||||||||
Revenu personnel ≥ 50 000 $ | 56,0 | 53,8 à 58,1 | 29,7 | 27,7 à 31,7 | < 0,01 | 41,1 | 38,6 à 43,7 | 17,6 | 15,6 à 19,6 | < 0,01 | 42,8 | 40,0 à 45,6 | 17,7 | 15,5 à 19,9 | < 0,01 |
Être propriétaire de son logement | 89,6 | 88,3 à 90,9 | 87,3 | 85,9 à 88,7 | < 0,01 | 89,4 | 87,9 à 91,0 | 84,2 | 82,4 à 86,1 | < 0,01 | 84,2 | 82,2 à 86,3 | 76,1 | 73,8 à 78,4 | < 0,01 |
Caractéristiques comportementales | |||||||||||||||
Fumeur | 13,2 | 11,7 à 14,7 | 11,4 | 10,1 à 12,7 | 0,23 | 6,7 | 5,5 à 7,9 | 8,3 | 7,0 à 9,7 | 0,20 | 3,7 | 2,7 à 4,7 | 5,5 | 4,3 à 6,7 | < 0,01 |
Consommation de ≥ 4 boissons alcoolisées /sem. | 28,9 | 26,9 à 31,0 | 19,3 | 17,6 à 21,1 | < 0,01 | 36,4 | 33,9 à 38,9 | 23,3 | 21,0 à 25,5 | < 0,01 | 36,9 | 34,2 à 39,6 | 21,7 | 19,3 à 24,0 | < 0,01 |
Caractéristiques de santé | |||||||||||||||
Obésité | 45,5 | 42,5 à 48,5 | 39,4 | 36,9 à 41,9 | < 0,01 | 41,3 | 38,0 à 44,7 | 40,1 | 37,0 à 43,1 | 0 ,20 | 26,1 | 22,8 à 29,5 | 29,7 | 26,7 à 32,8 | 0,20 |
Multimorbidité (≥ 2 problèmes de santé chroniques) | 29,7 | 27,8 à 31,7 | 37,8 | 35,7 à 39,8 | < 0,01 | 39,8 | 37,3 à 42,3 | 43,6 | 41,1 à 46,1 | 0 ,01 | 53,0 | 50,3 à 55,7 | 50,6 | 47,9 à 53,3 | 0,50 |
Caractéristiques liées au vieillissement en santé | |||||||||||||||
Santé sociale | |||||||||||||||
Participation à des activités sociales au moins une fois par semaine | 76,7 | 74,8 à 78,6 | 83,7 | 82,2 à 85,3 | < 0,01 | 82,3 | 80,4 à 84,3 | 86,6 | 84,9 à 88,4 | < 0,01 | 82,2 | 80,1 à 84,3 | 85,1 | 83,1 à 87,1 | < 0,01 |
Santé fonctionnelle | |||||||||||||||
Problèmes de fonctionnement physique | 13,6 | 12,1 à 15,0 | 17,5 | 15,9 à 19,1 | < 0,01 | 14,3 | 12,6 à 16,1 | 20,4 | 18,4 à 22,4 | < 0,01 | 19,8 | 17,6 à 22,0 | 26,7 | 24,3 à 29,1 | < 0,01 |
Limitation(s) dans la vie quotidienne | 5,2 | 4,3 à 6,1 | 11,5 | 10,2 à 12,8 | < 0,01 | 7,2 | 5,9 à 8,4 | 15,2 | 13,4 à 17,0 | < 0,01 | 12,9 | 11,1 à 14,7 | 30,9 | 28,5 à 33,4 | < 0,01 |
Santé mentale | |||||||||||||||
Trouble de l'humeur ou trouble d’anxiété | 15,9 | 14,3 à 17,5 | 26,2 | 24,4 à 28,1 | < 0,01 | 11,7 | 10,1 à 13,3 | 19,3 | 17,3 à 21,2 | < 0,01 | 7,0 | 5,7 à 8,4 | 14,2 | 12,4 à 16,0 | < 0,01 |
Bien-être mental | |||||||||||||||
BonheurNote b | 89,8 | 88,6 à 91,1 | 88,5 | 87,2 à 89,9 | 0,32 | 90,9 | 89,4 à 92,3 | 89,3 | 87,7 à 90,9 | 0 ,40 | 90,6 | 89,0 à 92,2 | 87,7 | 85,9 à 89,6 | 0,13 |
Satisfaction à l'égard de la vie | 85,2 | 83,7 à 86,8 | 85,7 | 84,3 à 87,2 | 1,0 | 90,8 | 89,4 à 92,3 | 88,1 | 86,5 à 89,7 | < 0,01 | 91,8 | 90,4 à 93,2 | 88,5 | 86,8 à 90,3 | 0 ,04 |
Santé mentale | 95,3 | 94,4 à 96,2 | 93,8 | 92,8 à 94,8 | 0 ,01 | 97,0 | 96,1 à 97,8 | 96,7 | 95,8 à 97,5 | 0,27 | 96,5 | 95,5 à 97,4 | 96,5 | 95,5 à 97,4 | 0,84 |
Vieillissement en santéNote c | 89,5 | 88,2 à 90,8 | 90,2 | 89,0 à 91,4 | 0,28 | 92,1 | 90,8 à 93,4 | 90,9 | 89,4 à 92,4 | 0,85 | 90,0 | 88,4 à 91,6 | 90,8 | 89,2 à 92,3 | 0,07 |
Source de données : Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (2014).
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En ce qui concerne la santé, la proportion de fumeurs était plus faible dans le groupe d’âge le plus élevé pour chaque sexe, Alors que la consommation de tabac ne différait pas de façon significative d’un sexe à l’autre entre 55 et 64 ans, les femmes de 75 à 85 ans étaient plus nombreuses que les hommes du même âge à avoir déclaré fumer (p < 0,01). La proportion de participants ayant déclaré consommer 4 boissons alcoolisées ou plus par semaine variait de façon significative entre les sexes et elle diminuait significativement en fonction de l’âge. La fréquence de l’obésité était significativement plus élevée chez les hommes et diminuait avec l’âge jusqu’au groupe d’âge des 75 à 85 ans. Les femmes de 75 à 85 ans étaient plus nombreuses que les hommes à souffrir d’obésité, en dépit du fait qu’elles présentaient une diminution de l’obésité avec l’âge. Enfin, les femmes étaient significativement plus nombreuses que les hommes à présenter une multimorbidité entre 55 et 64 ans, différence qui n’a pas été observée dans le groupe d’âge des 75 à 85 ans (tableau 1). Dans tous les groupes d’âge, et chez les deux sexes, la multimorbidité était fortement associée à l’obésité (tableau 2). Nous avons constaté des différences entre les sexes dans les groupes d’âge les plus jeunes (p < 0,01) mais non chez les 75 à 85 ans (p = 0,8).
Âge | Hommes | Femmes | Valeur pNote a du χ2 | ||
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RC | IC à 95% | RC | IC à 95% | ||
Groupes d’âge | |||||
55 à 64 ans | 2,7Note * | 2 à 3,5 | 2,8Note * | 2,2 à 3,5 | < 0,01 |
65 à 74 ans | 2,5Note * | 1,9 à 3,4 | 2,7Note * | 2,1 à 3,6 | < 0,01 |
75 à 85 ans | 2,0Note * | 1,4 à 2,9 | 2,1Note * | 1,5 à 2,9 | 0,80 |
Valeur pNote b du χ2 | <0 ,01 | < 0,01 | – | ||
Source de données : Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (2014).
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La réduction de la participation sociale n’était pas associée à l’obésité chez les hommes mais l’était chez les femmes de 55 à 64 ans (RC : 0,5; IC à 95 % : 0,4 à 0,7) et celles de 75 à 85 ans (RC : 0,5; IC à 95 % : 0,3 à 0,8) (tableau 3). Alors que la participation sociale chez les personnes souffrant d’obésité ne variait pas de façon significative entre les sexes, des différences significatives ont été constatées entre les groupes d’âge de femmes (p < 0,01). La réduction du fonctionnement physique s'est révélée fortement associée à l’obésité tant chez les hommes que chez les femmes, avec des différences significatives entre les sexes uniquement chez les 65 à 74 ans. La force de cette association entre la réduction du fonctionnement physique et l’obésité augmentait avec l’âge chez les deux sexes. Nous avons de la même manière constaté une association significative entre les limitations dans la vie quotidienne et l’obésité chez les deux sexes, la force de cette association augmentant avec l’âge. La différence entre les sexes était significative dans tous les groupes d’âge, les femmes souffrant d'obésité ayant déclaré plus de limitations que les hommes souffrant d'obésité.
Indicateurs | 55 à 64 ans | 65 à 74 ans | 75 à 85 ans | χ2 | |||||||||||||
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Hommes | Femmes | Valeur pFootnote a du χ2 | Hommes | Femmes | Valeur pFootnote a du χ2 | Hommes | Femmes | Valeur pFootnote a du χ2 | Hommes | Femmes | |||||||
RC | IC à 95% | RC | IC à 95% | RC | IC à 95% | RC | IC à 95% | RC | IC à 95% | RC | IC à 95% | Valeur pFootnote b | Valuer pFootnote b | ||||
Santé sociale | |||||||||||||||||
Participation à des activités sociales au moins une fois par semaine | 0,8 | 0,6 à 1,1 | 0,5Footnote * | 0,4 à 0,7 | 0,10 | 1,0 | 0,7 à 1,4 | 0,7 | 0,5 à 1,1 | 0,08 | 0,8 | 0,5 à 1,3 | 0,5Footnote ** | 0,3 à 0,8 | 0,10 | 0,09 | 0,01 |
Santé fonctionnelle | |||||||||||||||||
Problèmes de fonctionnement physique | 2,2Footnote * | 1,5 à 3,1 | 2,0Footnote * | 1,5 à 2,8 | 0,06 | 1,5 | 1,0 à 2,3 | 3,0Footnote * | 2,1 à 4,3 | <0 ,01 | 2,8Footnote * | 1,8 à 4,3 | 1,5** | 1,0 à 2,2 | 0,30 | 0,01 | < 0,01 |
Limitation(s) dans la vie quotidienne | 1,8Footnote ** | 1,1 à 3,0 | 2,0Footnote * | 1,4 à 2,9 | <0 ,01 | 1,1 | 0,7 à 1,9 | 2,7Footnote * | 1,8 à 4,1 | <0 ,01 | 2,1Footnote * | 1,3 à 3,3 | 2,2Footnote * | 1,6 à 3,1 | <0,01 | <0 ,01 | < 0,01 |
Source de données : Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (2014).
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La probabilité d’être atteint d’un trouble de l’humeur ou d’un trouble d'anxiété était significativement plus élevée chez les participants souffrant d'obésité que chez ceux n'en souffrant pas dans le groupe des femmes de 65 à 74 ans (RC : 0,6, IC à 95 % : 0,4 à 0,9) et les différences entre les sexes et entre les groupes d’âge se sont révélés également significatives (p < 0,01) (tableau 4). Les mesures du bonheur et de la satisfaction à l’égard de la vie ne présentaient d’association significative avec l’obésité chez aucun des sexes ni dans aucun groupe d’âge. Les femmes de 55 à 64 ans souffrant d’obésité étaient cependant significativement moins nombreuses à avoir fait état d'une bonne santé mentale, cette association entre la santé mentale et l’obésité disparaissant dans les groupes d’âge plus élevés. Un vieillissement en bonne santé a été associé de manière significative à l'obésité chez les participants âgés : les femmes souffrant d'obésité de tous les groupes d’âge ont déclaré avoir une perception nettement défavorable de leur état de santé que celles n'en souffrant pas. Cependant, chez les hommes, cette association n'a été constatée que chez les 55 à 64 ans (RC : 0,4; IC à 95 % : 0,2 à 0,5).
Indicateurs | 55 à 64 ans | 65 à 74 ans | 75 à 85 ans | χ2 | |||||||||||||
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Hommes | Femmes | Valeur pFootnote a du χ2 | Hommes | Femmes | Valeur pFootnote a du χ2 | Hommes | Femmes | Valeur pFootnote a du χ2 | Hommes | Femmes | |||||||
RC | IC à 95 % | RC | IC à 95 % | RC | IC à 95 % | RC | IC à 95 % | RC | IC à 95 % | RC | IC à 95 % | Valeur pFootnote b | Valeur pFootnote b | ||||
Santé mentale | |||||||||||||||||
Trouble de l'humeur ou trouble d'anxiété | 1,3 | 0,9 à 1,9 | 0,8 | 0,6 à 1,1 | <0 ,01 | 0,8 | 0,5 à 1,3 | 0,6Footnote * | 0,4 à 0,9 | <0 ,01 | 1,0 | 0,5 à 1,9 | 0,7 | 0,5 à 1,2 | < 0,01 | < 0,01 | <0 ,01 |
Bien-être mental | |||||||||||||||||
Bonheur | 1,0 | 0,6 à 1,5 | 1,4 | 1,0 à 2,0 | 0 ,40 | 1,3 | 0,8 à 2,2 | 1,0 | 0,6 à 1,6 | 0,30 | 1,0 | 0,5 à 1,8 | 1,3 | 0,8 à 2,1 | 0,40 | 0,50 | 0,70 |
Satisfaction à l'égard de la vie | 0,8 | 0,6 à 1,2 | 0,8 | 0,6 à 1,1 | 0 ,40 | 0,8 | 0,5 à 1,4 | 0,8 | 0,5 à 1,2 | 0,05 | 1,2 | 0,7 à 2,3 | 0,9 | 0,6 à 1,6 | 0,60 | <0 ,01 | 0,08 |
Bonne santé mentale | 0,7 | 0,4 à 1,2 | 0,5Footnote * | 0,3 à 0,8 | 0 ,40 | 1,2 | 0,5 à 2,7 | 1,2 | 0,6 à 2,2 | 0,20 | 0,7 | 0,3 à 1,6 | 0,5 | 0,2 à 1,2 | 0,20 | 0,02 | <0,01 |
Vieillissement en santé | 0,4Footnote * | 0,2 à 0,5 | 0,3Footnote * | 0,2 à 0,4 | 0 ,60 | 0,8 | 0,5 à 1,3 | 0,4Footnote * | 0,2 à 0,6 | 0,40 | 0,6 | 0,4 à 1,0 | 0,4Footnote * | 0,2 à 0,2 | 0,07 | 0,03 | 0,03 |
Source de données : Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (2014).
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Analyse
Les Canadiens vivent plus longtemps que jamais : selon des estimations démographiques récentes, les Canadiens de 65 ans et plus sont maintenant plus nombreux que les Canadiens de 14 ans et moinsNote de bas de page 1. Plus de la moitié des Canadiens ont un revenu personnel relativement faible, et ce problème touche de façon disproportionnée les femmesNote de bas de page 31. Cependant, alors que certaines études laissent penser qu’une situation financière précaire est associée à la maladieNote de bas de page 32, nous avons observé que les participants de l’ELCV bénéficiaient d'une situation financière autoévaluée solide. Nous avons aussi constaté qu’un grand nombre d’entre eux consommaient 4 boissons alcoolisées ou plus par semaine à un âge avancé, mais que le nombre de fumeurs diminuait avec l’âge. Cette première constatation n’est pas nécessairement inquiétante, étant donné que la consommation régulière d’alcool a été associée à une amélioration de la qualité de vie et de l’humeurNote de bas de page 33, mais elle reste liée à certaines maladies chroniques comme le cancerNote de bas de page 34.
Le fardeau de la multimorbidité chez les personnes âgées est largement reconnuNote de bas de page 17Note de bas de page 35Note de bas de page 36 : cette combinaison de facteurs physiques et mentaux affecte la qualité de vieNote de bas de page 37Note de bas de page 38 et, bien souvent, accroît les besoins en soins personnelsNote de bas de page 38. Évaluer l’impact de l’obésité sur les aînés canadiens implique de tenir compte de la grande prévalence de la multimorbidité au sein de cette population. Notre étude a fait ressortir une diminution de la fréquence de l’obésité en fonction de l’âge, mais ce résultat pourrait relever d'une tendance en matière de mortalité. Il pourrait également être le signe de la fragilité des personnes âgées, un syndrome qui se caractérise par un déclin de la santé et du fonctionnement et qui se manifeste par une perte de poids involontaire, une perte musculaire ou encore de la faiblesse ou de la fatigueNote de bas de page 39. Par conséquent, bien que l’IMC puisse être considéré comme relevant d'un état indépendant, il peut constituer à la fois un symptôme et un facteur de risque de maladie.
Conscients de ces associations complexes, nous avons voulu décrire dans notre étude comment les participants âgés de l’ELCV vieillissent, au-delà de leurs problèmes de santé chroniques, de leurs habitudes de vie et de leurs conditions socio-économiques. La mesure du bien-être subjectif se divise en trois parties : évaluative (satisfaction à l’égard de la vie), hédonique (sentiments, y compris le bonheur) et eudémonique (sentiment d’utilité). Cette mesure, qui est considérée comme englobant tout ce qui est important pour une personne, influe sur sa santé et sur sa qualité de vie au fil du vieillissementNote de bas de page 40Note de bas de page 41. Nous avons constaté que la participation sociale, qui est un concept eudémonique, était réduite chez les femmes plus âgées souffrant d’obésité mais pas chez les hommes de la même tranche d'âge. La diminution de la participation sociale avec l’âge était significative chez les femmes souffrant d’obésité. Une étude antérieure a pourtant établi que la participation sociale n'était pas associée à l’IMC mais, contrairement à notre étude, elle tenait compte de la dépression et de l’estime de soiNote de bas de page 42. En raison du lien étroit entre l’estime de soi et la participation sociale, il est possible que nos résultats traduisent une faible estime de soi chez les femmes âgées souffrant d’obésité. La participation sociale et le soutien social sont importants pour une bonne santé physique, plus encore que les comportements de santé positifs, même à un âge très avancé (90 à 97 ans)Note de bas de page 43. L’obésité a été associée à une diminution du fonctionnement physiqueNote de bas de page 6, quoique les femmes souffrant d'obésité aient présenté moins de limitations que les hommes souffrant d'obésité. Les fortes associations positives entre les limitations physiques et l’obésité révélées dans notre étude sont conformes aux résultats de recherches antérieures, qui indiquent que l’obésité et un faible niveau d’activité physique sont des facteurs prédictifs d'une mobilité réduite chez les personnes âgéesNote de bas de page 44. Bien que nous n’ayons pas pu tenir explicitement compte des niveaux d’activité physique dans nos analyses, il est vraisemblable que l’association constatée entre l’obésité et le fonctionnement physique ait été influencée par l’activité physique. En effet, d'après une étudeNote de bas de page 45, les personnes âgées modérément ou vigoureusement actives présentent un moins grand risque de mobilité réduite que les personnes âgées inactives, et les personnes âgées faisant ou ayant commencé à faire de l’activité physique présentent une mobilité supérieure à celle des personnes âgées n’en pratiquant aucune. De même, l’augmentation des limitations dans la vie quotidienne avec l’âge, plus marquée chez les femmes, a mis en évidence l'existence d'une population à risque susceptible de tirer des bénéfices de programmes de vieillissement en santé.
Les mesures de la santé mentale et du bien-être sont variables selon l’âge et le sexeNote de bas de page 45Note de bas de page 46. L’anxiété chez les personnes âgées a un lien bidirectionnel avec la cognition et avec la diminution des fonctions exécutivesNote de bas de page 47. Les mesures du bien-être mental sont de nature évaluative et hédonique. Nous n’avons constaté aucune association significative entre ces mesures et l’obésité chez les personnes âgées même si, lorsque nous avons examiné ces caractéristiques en fonction du groupe d’âge, des analyses du khi carré ont fait ressortir un lien possible entre l’âge et la satisfaction à l’égard de la vie chez les hommes. On sait que la satisfaction à l’égard de la vie est associée à la mortalité chez les hommes mais non chez les femmesNote de bas de page 48. Cette association relève sans doute en partie de comportements néfastes pour la santéNote de bas de page 48. Par conséquent, bien que l’ajustement en fonction des covariables puisse avoir éliminé les associations entre l’obésité et la satisfaction à l’égard de la vie, ce qu'illustrent les RC, les tendances du khi carré laissent entrevoir une possibilité d’étudier ce concept évaluatif chez les hommes plus âgés. La perception défavorable qu’ont les femmes âgées de leur santé mentale est notable, même si elle s’améliore avec l’âge. Enfin, en lien avec la question de savoir comment une attitude positive peut favoriser le maintien en santé jusqu’à un âge avancéNote de bas de page 18, nous avons noté que les participants souffrant d'obésité les plus âgés considéraient qu’ils ne vieillissaient pas en santé. Cette constatation était significative chez les femmes de tous les groupes d’âge à l’étude et chez les hommes de 55 à 64 ans. Une association négative entre l’obésité et la satisfaction à l’égard de la vie a déjà été établie par Wadsworth et ses collaborateurs et, bien que significative chez les deux sexes, elle s’est révélée plus forte chez les femmes que chez les hommesNote de bas de page 49.
Points forts et limites
L’utilisation d’une vaste enquête nationale pour mener un examen approfondi des caractéristiques du vieillissement constitue l'un des principaux points forts de l’étude. Cependant, certaines limites doivent être prises en compte dans l’interprétation de nos résultats. Premièrement, l’IMC a été calculé à partir de mesures autodéclarées de la taille et du poids, qui sont sujettes à un biais de réponse : certaines données indiquent que les déclarations inexactes ont été plus fréquentes dans le groupe d’âge le plus élevéNote de bas de page 50. Il demeure difficile d’évaluer l'impact de ces biais potentiels dans le contexte des modèles multivariables décrits. Deuxièmement, d'après la littérature sur la fragilité chez les personnes âgées, l’IMC n'est pas obligatoirement la mesure la plus appropriée de l’obésité ou de l’excès de graisse corporelle dans cette population. Troisièmement, l’analyse menée dans le cadre de notre étude est limitée par les données de l’enquête : certains facteurs importants ont peut-être été exclus, comme l’activité physique, l’alimentation ou l’environnement. L’absence de données sur l’activité physique, sur les périodes de sédentarité et sur l’aménagement général du temps limite l’interprétation de la relation entre l’obésité et la santé, particulièrement face aux associations établies entre l’activité physique et les mesures de la santé chez les personnes âgées45. Quatrièmement, il importe de souligner que, même si on utilise en général des poids d’échantillonnage afin que les estimations des statistiques soient représentatives de la population canadienne, le premier cycle de l’ELCV a eu un faible taux de réponse. Par conséquent, malgré l'utilisation de poids d’échantillonnage dans nos analyses, nos résultats ne sont valides que pour les participants de l’ELCV et ne sont pas généralisables à la population canadienne. Enfin, nous sommes conscients que les mesures autodéclarées utilisées dans notre analyse n’ont pas toutes été validées, par exemple le bonheur et le vieillissement en santé, ce qui implique que les interprétations doivent être faites avec prudence.
Conclusion
Cette étude fournit une analyse de référence du vieillissement en santé chez les personnes âgées souffrant d’obésité ayant participé à l’ELCV, et cette analyse pourra être poursuivie dans le cadre des cycles ultérieurs de l’ELCV. Le constat d'une association entre l'obésité et les profils de santé sociale et fonctionnelle de ces Canadiens âgés est préoccupante, même si cette association n’a pas été constatée pour la plupart des autres mesures du bien-être, car nous nous dirigeons vers une ère où vieillir en santé va devenir une question de plus en plus importante. L'établissement de ces profils devrait pouvoir contribuer aux tentatives faites pour promouvoir un vieillissement sain pour tous, grâce au portrait qui se dégage des effets de l’obésité sur le bien-être social, fonctionnel et mental des personnes âgées.
Conflits d’intérêts
Les auteurs déclarent n'avoir aucun conflit d’intérêts.
Contributions des auteurs et avis
Tous les auteurs ont participé à la conceptualisation de l’étude, à l’interprétation des résultats et à l’approbation du manuscrit final. PP et DR ont analysé les données et rédigé l’ébauche du manuscrit.
Le contenu de cet article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteurs et ne correspondent pas nécessairement à ceux du gouvernement du Canada.
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