Recherche quantitative originale – La prescription sociale dans le contexte des services intégrés pour la jeunesse : une étude de cas sur les Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario
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Publié par : L'Agence de la santé publique du Canada
Date de publication : septembre 2024
ISSN: 2368-7398
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Aaron Turpin, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 1Note de rattachement des auteurs 2; Deb Chiodo, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 1; Maria TalottaNote de rattachement des auteurs 1; Jo Henderson, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 1Note de rattachement des auteurs 3
https://doi.org/10.24095/hpcdp.44.9.02f
Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.
Attribution suggérée
Article de recherche par Turpin A et al. dans la Revue PSPMC mis à disposition selon les termes de la licence internationale Creative Commons Attribution 4.0
Rattachement des auteurs
Correspondance
Deb Chiodo, Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario, Centre de toxicomanie et de santé mentale, 80, Workman Way, Toronto (Ontario) M6J 1H4; tél. : 226-378-7199; courriel : debbie.chiodo@camh.ca
Citation proposée
Turpin A, Chiodo D, Talotta M, Henderson J. La prescription sociale dans le contexte des services intégrés pour la jeunesse : une étude de cas sur les Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario. Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada. 2024;44(9):397-406. https://doi.org/10.24095/hpcdp.44.9.02f
Résumé
Introduction. Les services intégrés pour la jeunesse offrent une occasion unique d’inclure des stratégies de prescription sociale au sein de ce modèle de services par la mise en place d’un réseau multidisciplinaire étroitement connecté, composé de fournisseurs de services cliniques et communautaires, afin de s’attaquer aux inégalités en matière de santé et d’améliorer l’accès aux services et l’état de santé des jeunes. Dans cet article, nous présentons une étude de cas sur les Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario (CBEJO), au Canada, un regroupement d’organismes de services jeunesse intégrés et interreliés, qui fonctionnent à la manière d’un système de santé apprenant pour la mise en œuvre des services de prescription sociale. L’étude visait principalement à documenter la façon dont les carrefours de CBEJO intègrent la prescription sociale à leur offre de services.
Méthodologie. Nous avons adopté une approche d’étude de cas intégrée. Les données ont été recueillies auprès de 6361 jeunes de 12 à 25 ans qui ont fait appel aux services d’un carrefour des CBEJO. Nous avons généré, à partir des données sur les services, des analyses descriptives, dont des fréquences associées aux diverses catégories, pour la raison de la visite, les besoins abordés et le service fourni.
Résultats. Une analyse comparative des services demandés et fournis a révélé qu’au cours de leurs visites aux CBEJO, les jeunes interagissaient avec de multiples services et fournisseurs, un large éventail de besoins étant abordés sur le plan de la santé physique et mentale et du soutien social.
Conclusion. Les CBEJO offrent des services de prescription sociale qui visent à améliorer la résilience en santé mentale, grâce à la satisfaction des besoins liés à l’emploi, aux études et à la socialisation, chez les jeunes qui reçoivent des services intégrés pour la jeunesse dans ces centres.
Mots-clés : prescription sociale, services intégrés pour la jeunesse, services pour les jeunes, bien-être des jeunes
Points saillants
- Les services intégrés pour la jeunesse offrent l’exemple d’une approche novatrice de prescription sociale qui repose sur l’établissement d’un réseau étroitement connecté de fournisseurs de services interdisciplinaires.
- Les jeunes qui reçoivent des services intégrés pour la jeunesse accèdent couramment à de multiples services en même temps, en fonction des besoins biopsychosociaux cernés.
- Le plus souvent, les services fournis par les CBEJO répondent à des besoins associés à la santé mentale, aux études et aux relations, et ils sont offerts par des travailleurs en santé mentale, des intervenants-pivots et des travailleurs de soutien aux études ou à la formation.
Introduction
L’utilisation des services de santé mentale reste faible chez les jeunesNote de bas de page 1Note de bas de page 2 et le traitement des troubles liés à la consommation de substances s’est révélé insuffisant pour répondre aux besoins des jeunesNote de bas de page 3. Les jeunes qui font appel aux services présentent souvent un ensemble de problèmes intériorisés (symptômes dépressifs, anxiété, stress, etc.) et externalisés (inattention, usage de substances, hyperactivité, etc.)Note de bas de page 3Note de bas de page 4Note de bas de page 5Note de bas de page 6 qui risquent de compromettre leur développement s’ils ne sont pas pleinement pris en compteNote de bas de page 7. Si de nombreuses sources attestent de la nécessité d’agir simultanément sur ces disparités sanitaires au moyen de services intégrés de qualitéNote de bas de page 2Note de bas de page 5Note de bas de page 8Note de bas de page 9Note de bas de page 10Note de bas de page 11, dans les faits, peu de cadres de services suivent une telle approcheNote de bas de page 9.
Devant cette lacune, les services intégrés pour la jeunesse constituent une approche de soins novatrice, par laquelle des équipes multidisciplinaires de professionnels travaillent ensemble à répondre aux besoins concomitants des jeunes et de leurs famillesNote de bas de page 4Note de bas de page 9Note de bas de page 10. Les services intégrés pour la jeunesse établissent une vision commune de la prestation de services aux jeunes au sein d’un réseau intégré de fournisseursNote de bas de page 9Note de bas de page 11, ce qui leur confère une capacité supérieure à celle des programmes individuels et leur permet de tirer parti de la force d’un réseau collectif offrant un soutien holistique et réduisant la fragmentation des soinsNote de bas de page 10Note de bas de page 11Note de bas de page 12Note de bas de page 13. Par un accès facilité aux services et de meilleures connexions entre services, les services intégrés pour la jeunesse favorisent des soins de santé physique et mentale efficaces, offerts aux jeunes au moment où ces derniers en ont besoinNote de bas de page 2. Ils réduisent ainsi les disparités en matière de santé au sein de cette populationNote de bas de page 7Note de bas de page 8.
Une composante centrale des services intégrés pour la jeunesse consiste à recourir aux pratiques de prescription sociale dans le but d’améliorer les interactions des jeunes avec les servicesNote de bas de page 4Note de bas de page 10. La prescription sociale consiste à orienter, dans le cadre d’une intervention, les usagers vers des services de santé physique et mentale en milieu communautaire axés sur la personneNote de bas de page 14. Ces services ont pour but d’aider la personne à satisfaire ses besoins sociaux et sanitaires par l’établissement de liens communautairesNote de bas de page 15, en facilitant l’aiguillage depuis un milieu clinique vers des services communautaires non cliniquesNote de bas de page 16. À mesure que les services intégrés pour la jeunesse s’implantent au CanadaNote de bas de page 4Note de bas de page 9Note de bas de page 11Note de bas de page 13Note de bas de page 17Note de bas de page 18, il devient possible d’élargir le recours à la prescription sociale dans les services de mieux-être pour les jeunesNote de bas de page 15. Les réseaux locaux, régionaux et pancanadiens de services intégrés pour la jeunesse, comme YouthCan IMPACTNote de bas de page 13, mettent en œuvre des modèles favorisant un accès pertinent et rapide à des services de bien-être pour les jeunes. Bien qu’un ensemble substantiel de données probantes étaye le modèle des services intégrés pour la jeunesseNote de bas de page 9Note de bas de page 10Note de bas de page 11, il reste à décrire ses composantes et l’utilisation des services dans des écrits fondés sur la pratique pour que ce modèle soit reproductibleNote de bas de page 11. Pour combler ce besoin, nous avons mené cette étude qui, à l’aide d’une méthode d’étude de cas, explore la manière dont les carrefours bien-être pour les jeunes intègrent la prescription sociale à leur offre de services.
Services intégrés pour les jeunes et prescription sociale
Au Canada, les réseaux de services intégrés pour la jeunesse fonctionnent selon un modèle de carrefour de services : ainsi, en règle générale, différents services de mieux-être sont fournis aux jeunes dans un même lieu communautaireNote de bas de page 9Note de bas de page 19Note de bas de page 20. Ces carrefours répondent habituellement à des besoins complexes de nature sociale, psychologique et physique. Ils offrent des services destinés aux jeunes et à leurs familles par l’entremise d’équipes de soins intégrés qui utilisent des approches rapides de continuum de soins dans un environnement adapté aux jeunesNote de bas de page 2Note de bas de page 9. La participation des jeunes et des familles à la conception et à la prestation des services constitue un aspect central du fonctionnement de ces carrefours, tout comme la volonté de faire connaître les services aux membres de la collectivité, d’établir des réseaux communautaires, d’offrir des soins fondés sur des mesures et de procéder à l’évaluation des programmesNote de bas de page 9. La mise en œuvre des services intégrés pour la jeunesse peut toutefois différer d’un centre à l’autre, en raison de la participation active des intervenants locaux au développement du centre, à la fois les jeunes, le personnel, les familles et les organismes externesNote de bas de page 9Note de bas de page 11Note de bas de page 12Note de bas de page 21.
La prescription sociale est un outil qui se veut complémentaire aux soins de santé mentale et aux soins primairesNote de bas de page 22 et qui cadre bien avec le modèle des services intégrés pour la jeunesse, puisque les deux partagent l’objectif d’aiguiller les jeunes vers des sources communautaires de soutien socialNote de bas de page 18, ce qui implique souvent une évaluation des besoins et un soutien actif pour faciliter l’accès aux servicesNote de bas de page 17. En outre, l’un des piliers clés de la prescription sociale dans le contexte des services intégrés pour la jeunesse est l’adoption d’une approche centrée sur la personne, les interventions étant conçues pour que chaque individu ait la capacité d’améliorer sa santéNote de bas de page 21. De même, la prescription sociale et les services intégrés pour la jeunesse facilitent tous deux des relations solides entre les praticiens en mettant à profit les forces du réseau, en améliorant le suivi des services offerts et en favorisant le bon déroulement des activés entre les servicesNote de bas de page 19. Les données montrent que les jeunes qui désirent recourir à des services rencontrent souvent des difficultés liées aux déterminants sociaux de la santé (accès à des traitements, sécurité alimentaire, emploi, éducation et ressources financières)Note de bas de page 22. Les modèles de services intégrés pour la jeunesse offrent des trajectoires de service intégrées qui permettent d’agir sur l’ensemble des difficultés vécues par les jeunesNote de bas de page 9Note de bas de page 16.
Réduire les disparités en santé
Les carrefours offrent une solution aux problèmes persistants de fragmentation du système en facilitant l’accès des jeunes à différents services de manière concomitante et en offrant l’accompagnement d’un intervenant-pivot lorsque des services plus intensifs ou des services externes sont nécessairesNote de bas de page 16. Les liens étroits qui unissent les fournisseurs de services d’un même réseau facilitent la prestation d’interventions adaptées aux besoins des jeunes en temps opportunNote de bas de page 4. Les services intégrés pour la jeunesse visent à éliminer les obstacles qui empêchent couramment les jeunes de bénéficier des services dont ils ont besoin, comme le manque de connaissances ou de confiance envers les services offertsNote de bas de page 12. Pour ce faire, on favorise l’établissement de relations pertinentes et suivies entre les fournisseurs et les jeunes, de même qu’entre les différents organismes et professionnels offrant des services aux jeunesNote de bas de page 23.
Des recherches ont montré que les programmes qui adoptent des approches de services intégrés pour la jeunesse et de prescription sociale auprès des jeunes parviennent à réduire les disparités en matière de santé. Par exemple, l’approche de suivi intensif dans le milieu (SIM) intègre des modalités de soins rapides et par étapes, incluant des services d’orientation communautaire, et il a été prouvé qu’elle réduisait les difficultés psychosociales ainsi que les symptômes dépressifs et psychotiques subcliniques chez les jeunes, tout en améliorant les interactions sociales et la qualité de vieNote de bas de page 24. De même, un programme de traitement familial intégré offert dans des centres communautaires de santé mentale aux adolescents ayant des problèmes de consommation de substances a utilisé plusieurs techniques de prescription sociale, comme la prestation de plusieurs services dans un seul lieu et l’adoption d’une approche séquentielle de la prestation de servicesNote de bas de page 6. Un essai contrôlé randomisé a révélé des résultats positifs en ce qui a trait à la consommation de substances lorsque le programme était comparé au traitement habituelNote de bas de page 6. Enfin, le recours aux techniques de prescription sociale dans le cadre de services intégrés de santé comportementale a permis de renforcer la littératie en santé mentale et l’engagement à servir les jeunes chez des praticiens et a favorisé l’autoefficacité de ces derniers et le perfectionnement de leurs compétencesNote de bas de page 8.
Dans un contexte où des travaux de recherche et d’évaluation des services sont nécessaires en matière de prescription sociale auprès des jeunes si l’on veut soutenir sa mise en œuvre et une pratique fondée sur des données probantes, nous présentons une description de la prescription sociale au sein d’un modèle particulier de services intégrés pour la jeunesse mis en œuvre et évalué en Ontario (Canada).
L’étude de cas : Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario
Les Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario (CBEJO) forment un réseau ontarien de carrefours de services qui offrent aux jeunes des services intégrés conçus en collaboration avec des jeunes et leur famille. À l’heure actuelle, le réseau regroupe 22 carrefours impliquant 31 collectivités diversement réparties dans la province et desservant les jeunes de 12 à 25 ans. Les CBEJO offrent un continuum de services répondant aux besoins des jeunes en matière de santé mentale, d’usage de substances, de soins primaires, de soutien par les pairs, de formation, d’emploi, de logement et de mieux-être ainsi que divers autres services communautaires et sociauxNote de bas de page 9. Accessibles à la fois virtuellement et en personne, les CBEJO constituent des points d’accès locaux où les jeunes peuvent obtenir des services de soutien de grande qualité, offerts sans rendez-vous selon un modèle intégré privilégiant l’équité et l’accessibilité. Chaque carrefour est tenu d’offrir des services fondés sur des données probantes en santé mentale, en santé liée à la consommation de substances, en soins primaires et en soutien social et communautaire. Cependant, la nature exacte des services offerts dans chacun de ces volets dépend de la disponibilité locale des services et des démarches de consultation et de conception conjointe entreprises avec les jeunes et les membres de la collectivité qui forment le comité de gouvernance du carrefour.
Autre composante commune aux divers points de contact du réseau, des équipes de mieux-être des jeunes contribuent à l’intégration des services tout au long du parcours de services cliniques (santé physique, santé mentale et consommation de substances). Ces équipes sont formées de cliniciens en santé mentale et en usage de substances; de professionnels de la santé comme des infirmières praticiennes, des prestataires de soins primaires et des psychiatres; d’intervenants de soutien par les pairs; d’intervenants-pivots et enfin d’intervenants en mieux-être des jeunes qui facilitent la mobilisation et l’obtention de soins fondés sur des mesures. Chaque catégorie de services des CBEJO offre un continuum de soins d’intensité variable pour les jeunes, ce qui facilite l’adaptation des services en fonction des besoins, des objectifs et des préférences de chaque jeune.
Comme le préconisent les jeunes et leurs familles, les services des CBEJO sont accessibles sans recommandation ni évaluation ou diagnostic préalable. Les jeunes y accèdent directement, avec ou sans rendez-vous, à leur convenance, à des heures pratiques pour eux (incluant le soir et les fins de semaine). Les démarches d’obtention ou d’arrêt des services sont peu contraignantes pour les jeunes et s’adaptent à leurs besoins changeants au fil de leur développement. Une description complète du modèle des CBEJO et de leurs valeurs et caractéristiques fondamentales a déjà été publiée ailleursNote de bas de page 9.
Méthodologie
Approbation par un comité d’éthique
Ce projet a été approuvé par le Centre de toxicomanie et de santé mentale dans le cadre d’un examen éthique de projet lié à la qualité (no QPER42).
Procédure
Ce projet visait à décrire une nouvelle stratégie de prescription sociale grâce à la réalisation d’une étude de cas intégréeNote de bas de page 25 à l’aide des données sur les services offerts dans les CBEJO. Les études de cas fournissent des analyses approfondies portant sur un seul exemple de phénomène social et permettent d’en faire ressortir des caractéristiques inédites et subtilesNote de bas de page 25, qui passent souvent inaperçues dans les études portant sur plusieurs échantillons de cas. Les études de cas intégrées diffèrent des études de cas typiques en ce sens que les chercheurs participent activement aux activités organisationnelles et font souvent partie de la structure organisationnelle (par exemple, en tant que membres du personnel)Note de bas de page 26. Dans le cadre de notre étude, nous avons réalisé une analyse descriptive des données transversales quantitatives sur l’utilisation des services dans un vaste échantillon d’usagers des CBEJO. En comparant les raisons du recours aux CBEJO et les besoins que visaient à combler les services offerts, on peut mieux saisir les difficultés que vivaient les jeunes et la façon dont les CBEJO ont contribué à résoudre ces difficultés. De plus, les analyses descriptives des services fournis font ressortir les modalités d’intervention employées auprès des jeunes.
Échantillon et recrutement
Les participants étaient des jeunes (n = 6361) de 12 à 25 ans ayant reçu des services dans 14 carrefours entre avril 2020 et mars 2023.
Les CBEJO recueillent des données sur les services et sur les caractéristiques sociodémographiques des jeunes depuis avril 2020. Cette collecte s’inscrit dans la démarche de soins fondés sur des mesures qu’entreprennent le personnel et les jeunes au cours des visites. Au début d’une visite, les jeunes répondent en privé à des questions sur leurs besoins, leurs objectifs, leurs symptômes, leur fonctionnement et leurs caractéristiques sociodémographiques à l’aide d’une tablette programmée pour l’évaluation de mesures. De plus, ils lisent et remplissent un formulaire de consentement qui décrit les services intégrés offerts par le carrefour et les modalités de communication des données à l’intérieur du cercle de soins. Les jeunes reçoivent du soutien pour le consentement et l’utilisation des instruments de mesure s’ils le désirent mais il n’est pas obligatoire de procéder aux mesures pour accéder aux services. À la fin de la visite, les fournisseurs de services remplissent un formulaire électronique avec des questions sur les interventions effectuées, les besoins abordés et les prochaines étapes du plan de soins. Des outils électroniques de mesure de l’expérience et de la satisfaction des jeunes à l’égard des services sont également utilisés. Les données sont stockées sur une plateforme infonuagique sécurisée, avec une partition par site, et le personnel peut accéder aux données du carrefour dont il relève. Certains employés du bureau provincial des CBEJO ont accès aux données des différents carrefours.
Mesures et analyse
Les données liées à trois variables ont été analysées : « raison de la visite », « besoins abordés » et « type de fournisseur de services ». La « raison de la visite » est une question à laquelle les jeunes répondent au début de chaque visite avant que les services soient fournis. On demande aux jeunes d’indiquer la raison pour laquelle ils viennent au carrefour ce jour-là et plusieurs catégories de réponse correspondant aux besoins mentaux, physiques, culturels et sociaux leur sont proposées. La variable « besoins abordés » repose sur une liste de besoins à l’aide de laquelle le fournisseur indique, à la fin de la visite, les besoins qui ont été abordés au cours de la séance. La variable « type de fournisseur de services » sert à indiquer qui a participé à la prestation des services et elle est renseignée par les fournisseurs de services à la fin de la visite.
Des réponses multiples sont permises pour toutes les variables. Les fréquences associées aux différentes catégories de réponse pour chaque variable sont présentées dans un tableau fournissant les données sur les services. Le nombre de sélections (n) et le pourcentage du nombre total de visites (%) ont été calculés. Pour affiner l’analyse des données sur les services, nous avons stratifié les catégories de raison de la visite en fonction de l’âge et du genre. Cette analyse visait à générer des renseignements supplémentaires sur les sous-groupes sociodémographiques prédominants dans chaque catégorie de service. La raison de la visite a été retenue parce qu’il s’agit de la seule variable relative aux services qui est fournie par les jeunes, et la stratification d’autres variables relatives aux services dépassait la portée de cet article. L’analyse a été effectuée à l’aide de SPSS Statistics pour Windows, version 27.0 (IBM Corp., Armonk, New York, États-Unis).
Résultats
Statistiques sociodémographiques
Le tableau 1 présente les caractéristiques sociodémographiques des jeunes de notre échantillon. Cet échantillon présente une distribution similaire à celle de la population du même âge au CanadaNote de bas de page 27. Les catégories de réponse pour l’identité de genre, l’identité sexuelle, la situation en matière de handicap et de logement ont été regroupées en catégories générales pour accroître la taille du groupe et préserver la confidentialité des données sur les jeunes. (L’annexe 1 contient une liste complète des regroupements de variables sociodémographiques.) Dans l’échantillon, 31,8 % des jeunes ont indiqué être des filles ou des femmes, 25,2 % des garçons ou des hommes et 7,5 % des personnes transgenres ou d’autres identités de genre. Pour la catégorie de l’identité sexuelle, 29,7 % des jeunes ont indiqué être hétérosexuels et 19,6 %, 2ELGBTQI++. Une liste complète des variables sociodémographiques est fournie dans le tableau 1.
Variable | n (%) |
---|---|
Nombre total de visites | 22 153 |
Nombre de jeunes | 6361 |
Âge (ans) | |
12 à 14 | 1204 (18,9) |
15 à 17 | 2086 (32,7) |
18 à 20 | 1445 (22,7) |
21 ou plus | 1414 (22,2) |
Renseignements manquants | 269 (4,2) |
Identité de genre | |
Garçon/homme | 1606 (25,2) |
Autre identité de genre | 484 (7,5) |
Fille/femme | 2025 (31,8) |
Ne sait pas, en questionnement, autre ou préfère ne pas répondre | 214 (3,3) |
Renseignements manquants | 2062 (32,4) |
Identité sexuelle | |
Hétérosexuel | 1889 (29,7) |
2ELGBTQI+ | 1247 (19,6) |
N’utilise pas d’étiquette, ne sait pas, en questionnement, autre ou préfère ne pas répondre | 549 (8,6) |
Renseignements manquants | 2868 (45,1) |
Né(e) au Canada | |
Oui | 3199 (50,3) |
Non | 251 (3,9) |
Ne sait pas/ne souhaite pas répondre | 30 (0,5) |
Renseignements manquants | 2900 (45,6) |
Handicap | |
A une maladie chronique | 145 (34,7) |
A un handicap | 1351 (21,2) |
Aucun handicap | 1601 (25,2) |
Ne sait pas/ne souhaite pas répondre | 745 (11,7) |
Renseignements manquants | 2048 (32,2) |
Logement | |
En situation d’itinérance | 92 (1,4) |
A un logement | 3370 (53,0) |
Autre/préfère ne pas répondre | 125 (1,9) |
Renseignements manquants | 2779 (43,7) |
Études | |
Fréquente un établissement scolaire | 2513 (39,5) |
Ne fréquente pas d’établissement scolaire | 892 (14,0) |
Renseignements manquants | 2957 (46,5) |
Emploi | |
A un emploi | 1289 (20,3) |
N’a pas d’emploi | 2086 (32,8) |
Renseignements manquants | 2983 (46,9) |
La proportion de données manquantes allait de 4,2 % (âge) à 46,9 % (emploi). Les jeunes ne sont pas tenus de fournir des données sociodémographiques (ils peuvent omettre de répondre à ces questions), mais on les encourage fortement à fournir des données pour qu’on puisse mieux comprendre leurs besoins. Il s’agit d’un choix intentionnel de la part des jeunes, dans la mesure où ils ne sont pas forcément à l’aise de fournir des données relatives à leur identité. De plus, les catégories de réponse ne sont pas mutuellement exclusives, ce qui permet aux jeunes de choisir plus d’une option par question sociodémographique et, ainsi, de mieux rendre compte de la façon dont ils se perçoivent. Par conséquent, il se peut que les chiffres et les pourcentages associés aux caractéristiques sociodémographiques et aux variables relatives aux services ne correspondent pas à la taille de l’échantillon.
Services demandés et services fournis
Le tableau 2 synthétise les résultats se rapportant à 6361 jeunes et 22 153 visites (soit une moyenne de 3,5 visites/jeune), les besoins indiqués par les jeunes, la raison de la visite fournie avant le service et les besoins abordés mentionnés par le fournisseur après le service. Dans l’ensemble, les jeunes ont d’abord indiqué « santé mentale » comme raison de leur visite (47,3 %), puis « école/formation » (13,0 %), « relations » (13,0 %), « santé physique » (6,8 %) et « alimentation/nutrition » (5,6 %). Les autres catégories rassemblaient moins de 5,5 % des réponses. Pour ce qui est des besoins abordés, les fournisseurs de services ont indiqué que la « santé mentale » était le besoin le plus courant (72,7 %), puis « l’école/la formation » (13,7 %), les « relations » (12,1 %), la « santé physique » (8,3 %), la « consommation de substances » (6,8 %) et l’« emploi » (5,7 %). Les autres catégories rassemblaient moins de 5,5 % des réponses. Les fournisseurs de services étaient plus enclins que les jeunes à sélectionner plusieurs catégories de réponse en ce qui a trait aux besoins abordés, avec un écart correspondant à 6 942 besoins supplémentaires (29,5 % de plus que chez les jeunes).
Service | Raison de la visite n (%) |
Besoins abordés n (%) |
---|---|---|
Santé mentale | 10 475 (47,3) | 16 098 (72,7) |
École/formation | 2873 (13,0) | 3039 (13,7) |
Relations | 2891 (13,0) | 2685 (12,1) |
Santé physique | 1506 (6,8) | 1838 (8,3) |
Alimentation/nutrition | 1242 (5,6) | 1171 (5,3) |
Emploi | 1 099 (5,0) | 1274 (5,7) |
Consommation de substances | 950 (4,3) | 1506 (6,8) |
Soutien par les pairs | 893 (4,0) | 953 (4,3) |
Logement | 842 (3,8) | 804 (3,6) |
Culture | 270 (1,2) | 495 (2,2) |
Total | 23 041 | 29 863 |
Les tableaux 3 et 4 présentent une stratification des données sur la raison de la visite selon les catégories sociodémographiques en fonction respectivement de l’âge (tableau 3) et du genre (tableau 4). Les jeunes de 15 à 17 ans sont le principal groupe d’âge représenté dans les trois premières catégories (« santé mentale », « école/formation » et « relations »). Les fréquences et les pourcentages étaient similaires dans les autres groupes d’âge. Les jeunes qui ont indiqué être une fille ou une femme cumulaient le plus grand nombre de visites pour « santé mentale », « école/formation » et « relations », et les jeunes qui ont indiqué être un garçon ou un homme ont eu plus de visites pour « santé mentale » que les jeunes d’autres identités de genre. Les fréquences et les pourcentages des autres catégories étaient sensiblement les mêmes pour les différents groupes d’identité de genre.
Service | 12 à 14 ans (n = 1204) n (%) |
15 à 17 ans (n = 2086) n (%) |
18 à 20 ans (n = 1445) n (%) |
21 à 25 ans (n = 1414) n (%) |
---|---|---|---|---|
Santé mentale | 1225 (5,5) | 3155 (14,2) | 2232 (10,1) | 2092 (9,4) |
École/formation | 361 (1,6) | 946 (4,2) | 423 (1,9) | 302 (1,3) |
Relations | 319 (1,4) | 851 (3,8) | 583 (2,6) | 603 (2,7) |
Alimentation/nutrition | 157 (1,0) | 342 (1,5) | 232 (1,0) | 208 (1,0) |
Emploi | 25 (< 1) | 165 (1,0) | 220 (1,0) | 252 (1,1) |
Consommation de substancesNote de bas de page a | 59 | 211 | 178 | 232 |
Soutien par les pairsNote de bas de page a | 65 | 182 | 113 | 157 |
LogementNote de bas de page a | 67 | 161 | 169 | 147 |
CultureNote de bas de page a | 11 | 32 | 29 | 68 |
Service | Fille/femme (n = 2025) n (%) |
Garçon/homme (n = 1606) n (%) |
Autre identité de genre (n = 484) n (%) |
Ne sait pas, en questionnement, autre ou préfère ne pas répondre (n = 214) n (%) |
---|---|---|---|---|
Santé mentale | 3443 (15,5) | 1621 (7,3) | 802 (3,6) | 264 (1,2) |
École/formation | 967 (4,4) | 369 (1,6) | 238 (1,1) | 103 (< 1) |
Relations | 1066 (4,8) | 384 (1,7) | 308 (1,4) | 99 (< 1) |
Alimentation/nutrition | 451 (2,0) | 135 (1,0) | 133 (< 1) | 59 (< 1) |
Emploi | 246 (1,1) | 148 (1,0) | 80 (< 1) | 34 (< 1) |
Consommation de substancesNote de bas de page a | 189 | 207 | 84 | 27 |
Soutien par les pairs | 239 (1,1) | 84 (< 1) | 92 (< 1) | 27 (< 1) |
LogementNote de bas de page a | 228 | 103 | 169 | 147 |
CultureNote de bas de page a | 48 | 33 | 42 | 8 |
Type de fournisseur de services
Pour ce qui est de la fréquence des types de fournisseurs de services (tableau 5), le type le plus courant est « clinicien/travailleur en santé mentale ou en usage de substances » (41,7 %), suivi par « intervenant-pivot/coordonnateur des soins » (13,4 %), « travailleur de soutien en éducation/formation » (6,5 %) et « responsable des soins fondés sur des mesures » (5,7 %). Toutes les autres catégories rassemblent moins de 5 % des réponses.
Service | Visites n (%) |
---|---|
Clinicien/travailleur en santé mentale ou usage de substances | 9241 (41,7) |
Intervenant-pivot ou coordonnateur des soins | 2966 (13,4) |
Travailleur de soutien en éducation/formation | 1454 (6,5) |
Responsable des soins fondés sur des mesures | 1259 (5,7) |
Intervenant de soutien par les pairs | 1060 (4,8) |
Intervenant en soutien social (logement, revenu ou autre) | 625 (2,8) |
Intervenant en aide à l’emploi/au placement | 409 (1,8) |
Renseignements manquants | 7546 (34,1) |
Analyse
On trouve dans la littérature peu de données décrivant la prescription sociale dans le cadre de services intégrés pour la jeunesse et, globalement, peu d’analyses approfondies ont été publiées à propos de modèles particuliers intégrant la prescription sociale. À l’aide d’une approche d’étude de cas intégrée, nous avons cherché à décrire un modèle de prescription sociale novateur actuellement mis en œuvre par les services intégrés pour la jeunesse en Ontario, et nous avons analysé les données sur l’utilisation des services pour comprendre la complexité et le recoupement des besoins des jeunes qui bénéficient de services intégrés pour la jeunesse. Nos résultats donnent un aperçu des besoins des jeunes en matière de services et des services qui leur sont offerts lorsqu’ils s’adressent aux carrefours de services intégrés.
En ce qui concerne les catégories d’identité de genre, environ le tiers des jeunes de l’échantillon ont indiqué être des filles ou des femmes, ce qui reflète les résultats de recherches antérieures selon lesquels les filles et les femmes demandent plus couramment de l’aide en santé mentale et d’autres servicesNote de bas de page 28Note de bas de page 29. Les jeunes en transition vers la vie adulte (groupe d’âge des 18 à 25 ans) forment la plus grande part des usagers des CBEJO, ce qui rejoint les constatations faites à propos d’autres modèles internationaux de services intégrés pour la jeunesse et laisse penser que des obstacles fréquents à la recherche d’aide chez les jeunes adultes ont été éliminésNote de bas de page 4Note de bas de page 22Note de bas de page 23.
Les modèles de services intégrés pour la jeunesse sont conçus pour combler les failles dans les systèmes classiques de services relatifs à la santé mentale et à la consommation de substances chez les jeunes (obstacles à la recherche d’aide, fragmentation, obstacles liés à l’âge, etc.). Nos données montrent que les jeunes qui souhaitent obtenir des services de santé mentale ont de meilleurs services et un meilleur accès lorsque ces services sont offerts dans des contextes intégrés.
Les jeunes qui, dans notre échantillon, ont choisi la santé mentale comme raison de leur visite voulaient peut-être manifester par là leur besoin en différents services offerts par le centre (comme le counseling de groupe et individuel) et la « santé mentale » indiquée comme raison de la visite peut également avoir englobé des besoins similaires connexes, comme le soutien par les pairs, les relations et la santé physique. Sachant qu’il existe une association entre la santé mentale et des déterminants sociaux de la santé comme les finances, l’emploi, la sécurité alimentaire et le logementNote de bas de page 22Note de bas de page 30, nos données révèlent à la fois des besoins en matière de soins professionnels multidisciplinaires dans le cadre des services aux jeunes et la capacité des CBEJO à répondre aux besoins de prescription sociale. Ces résultats corroborent en outre l’observation selon laquelle les jeunes ont accès dans les centres à différents services qui répondent à un ensemble élargi de besoins lorsqu’une approche de prescription sociale est adoptée.
Les catégories « école/formation » et « relations » arrivent au deuxième rang des raisons les plus fréquentes de visite (13 %). Les jeunes se rendent couramment dans les CBEJO pour faire leurs travaux scolaires et obtenir de l’aide en lien avec ces travaux, ce qui met en évidence la multifonctionnalité des carrefours et leur importance pour les jeunes en tant que lieux accessibles sans rendez-vous. La fréquence de la raison « relations » dans les données sur les services rappelle l’importance du développement interpersonnel pour les jeunes, les pairs et les familles dans le cadre des services de santé mentale, et la place essentielle de ces liens dans les soins destinés aux jeunes. Les liens sociaux, ou leur absence, sont considérés comme un déterminant social de la santé et ont des conséquences avérées sur la santé, en particulier un mauvais état de santé et un faible statut socioéconomiqueNote de bas de page 31. On a dit des services de prescription sociale qu’ils favorisaient le sentiment d’appartenance et, par extension, le bien-être mental, les comportements de santé et la santé physiqueNote de bas de page 32Note de bas de page 33. Les services intégrés sont censés offrir aux jeunes un espace sûr où divers intervenants peuvent répondre à leurs besoins globaux sans qu’ils aient à répéter leur histoire plusieurs foisNote de bas de page 34. De plus, les jeunes peuvent bénéficier de services sans que leurs pairs connaissent la nature exacte de ces servicesNote de bas de page 35. Les CBEJO ont adopté une plateforme de données intégrée à l’échelle de leur réseau de fournisseurs de services grâce à laquelle ils recueillent et stockent de l’information sur les besoins, les objectifs et les préférences des jeunes qu’ils servent en matière de services. Les fournisseurs de services qui font partie du cercle de soins ont accès aux antécédents des jeunes et peuvent leur offrir des soins personnalisés fondés sur des mesures.
Enfin, la présence des divers types de fournisseurs de services présents dans les CBEJO reflète l’importance accordée au fait de réunir dans un même lieu différents professionnels aptes à répondre aux besoins et aux objectifs variés des jeunes qui s’y présentent. L’intervenant-pivot et le coordonnateur des soins arrivent au deuxième rang parmi les fournisseurs les plus souvent sollicités (13,4 %). Cela montre l’importance des soins multifonctionnels, comme ceux que facilite le personnel qui soutient la démarche de prescription sociale dans les CBEJO en assurant l’orientation au sein des systèmes de santé, les communications avec d’autres fournisseurs, les demandes de services et la continuité des soins. Ces intervenants sont une source de soutien utile pour les jeunes, font le pont entre les services et favorisent un accès fluide aux différents services par une meilleure communication entre les fournisseurs. Par conséquent, le rôle des intervenants-pivots et des coordonnateurs des soins doit être considéré comme un élément essentiel de la prescription sociale et des services intégrés pour la jeunesse. De même, les données montrent que d’autres membres du personnel de soutien social sont essentiels aux services intégrés pour la jeunesse, notamment les intervenants en éducation et formation, en logement, en revenu et en emploi, fournissant ensemble plus de 10 % des services.
Points forts et limites
Plusieurs points forts contribuent à la généralisabilité du travail présenté dans cet article. La taille de l’échantillon est considérable pour une étude utilisant des données sur les jeunes, tout comme le nombre de visites pour lesquelles nous disposons de données. L’échantillon intègre des personnes de plusieurs groupes, dont des jeunes 2ELGBTQI++ et de diverses identités de genre. De même, les données ont été recueillies à l’échelle de la province de l’Ontario, dans des centres de population de nature différente (grands, moyens et petits). Nous considérons que les données d’autoévaluation constituent une force de notre étude, car le point de vue des jeunes est souvent négligé dans les recherches similaires. Il s’agit du premier ensemble de données de ce genre obtenues à grande échelle chez les jeunes au Canada.
Notre étude n’est toutefois pas dépourvue de limites. Les données associées aux résultats sont de nature descriptive, ce qui empêche d’établir des relations entre les variables. L’absence d’analyses inférentielles rend impossible la détermination d’interactions causales et corrélationnelles. De ce fait, l’interprétation des résultats étant fondée sur des conjectures, leur confirmation nécessiterait une étude approfondie à l’aide d’un modèle multivarié. L’ensemble de données est associé à des taux élevés de données manquantes sur les caractéristiques sociodémographiques, les services fournis et les fournisseurs de services. La modalité de collecte des données explique cette situation : la plupart des questions posées aux jeunes et au personnel ne sont pas obligatoires, et les répondants peuvent s’abstenir de fournir des données pour diverses raisons légitimes (que ce soit par exemple car un jeune n’est pas à l’aise de répondre ou car il n’est pas disposé à fournir de données au cours d’une visite).
De même, le personnel peut négliger de répondre aux questionnaires s’il a oublié de saisir les données ou s’il n’a pas aiguillé un jeune vers un service. Quoi qu’il en soit, obtenir les réponses correspondant aux données manquantes aurait pu modifier la nature des résultats mais il demeure impossible de déterminer si ce fut le cas. La validité des données aurait pu être renforcée dans notre étude par des mesures garantissant que les jeunes fournissent toutes les variables. De telles mesures assureraient une continuité entre les services demandés et les services fournis grâce à l’intégration complète du point de vue des jeunes.
Conclusion
En matière de données de recherche, nous disposons de très peu de comptes rendus décrivant en détail la prescription sociale offerte dans le cadre de services aux jeunes, grâce auxquels on aurait accès à des exemples détaillés de l’élaboration, de la mise en œuvre et des résultats des activités auxquelles cette prescription est reliée. L’approche de prescription sociale novatrice adoptée par les CBEJO permet aux services intégrés pour la jeunesse d’offrir une méthode d’aiguillage rapide et efficace au sein d’un ensemble multidisciplinaire de services répondant aux besoins des jeunes. Dans notre étude, une analyse comparative des données sur les services a révélé que le personnel offrant les services aux jeunes tendait à sélectionner plusieurs besoins après la prestation des services, ce qui corrobore l’idée selon laquelle les approches de prescription sociale associées à des services intégrés pour la jeunesse aident efficacement les jeunes à bénéficier de multiples services. La forte proportion de jeunes en transition vers la vie adulte dans l’échantillon laisse penser que les services intégrés pour la jeunesse éliminent les obstacles habituels qui entravent l’accès aux services chez les jeunes plus âgés. Les données révèlent également un chevauchement considérable entre services cliniques et non cliniques, ce qui illustre bien la nécessité d’une coordination entre équipes de soins multidisciplinaires. La diversité des besoins en services observés dans cet échantillon souligne par ailleurs l’importance d’un accompagnement pertinent en matière de soins.
Dans l’ensemble, cette étude présente le cas des CBEJO comme un modèle de prescription sociale pour les jeunes dont pourraient s’inspirer d’autres milieux de services intégrés pour la jeunesse et de services de santé. Les intervenants qui souhaitent offrir des services intégrés pour la jeunesse pourraient envisager une approche similaire de collecte de données pour consigner l’utilisation des services et déterminer les tendances relatives aux interactions des jeunes avec ces services. La mise en œuvre d’un système de services intégrés pour la jeunesse serait facilitée par la création d’équipes de soins interprofessionnels qui assureraient une transition harmonieuse entre services afin de répondre aux besoins globaux des jeunes en matière de santé, de santé mentale et de soutien social. Les recherches à venir pourraient contribuer à l’accumulation de données probantes sur les services intégrés pour la jeunesse au moyen de devis inférentiels et longitudinaux aptes à mesurer l’évolution de la santé physique et mentale des jeunes au fil du temps.
Remerciements
Les auteurs souhaitent souligner les contributions de tous les membres du bureau provincial des Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario, tant aujourd’hui que par le passé, ainsi que du personnel de l’ensemble des CBEJO. Les auteurs tiennent particulièrement à remercier les jeunes et les membres de leur famille qui ont contribué ou contribuent aux Carrefours bien-être pour les jeunes de l’Ontario par leur enthousiasme, leur leadership, leurs idées, leur temps et leur dévouement.
Conflits d’intérêts
Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Contribution des auteurs et avis
- AT, DC : conception, analyse.
- AT, DC : rédaction de la première version du manuscrit.
- MT, JH : relectures et révisions.
Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteurs; ils ne correspondent pas nécessairement à ceux du gouvernement du Canada.
Annexe 1. Variables sociodémographiques : catégories de regroupement des variables
Intitulé de la variable de l’étude | Variables de l’échantillon correspondantes |
---|---|
Autre identité de genre |
Femme trans; homme trans; personne non binaire; personne bispirituelle; queer; au genre fluide; androgyne |
2ELGBTQI+ |
Gai; lesbienne; bisexuel; asexuel; queer; pansexuel; omnisexuel; demisexuel; bispirituel |
A un handicap |
Trouble du développement; trouble d’apprentissage; handicap physique; déficience sensorielle; autre |
A un logement |
Domicile familial; logement personnel; vit avec des amis; foyer de placement familial; logement subventionné; garde en milieu ouvert; chambre individuelle dans la maison de quelqu’un d’autre |
En situation d’itinérance |
Vit dans un refuge; vit dans la rue; hébergement temporaire chez des connaissances |
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